✧ MADE IN PAIN chez lui ça crie ça cogne ça s'déchire, y a papa tyran et maman soumise – les travers qu'on inculque aux marmots, la mauvaise graine qui coule dans leurs veines. ils sont neufs gosses et c'est trop souvent le chaos, ça s'bat dans tous les coins et ça s'crache à la gueule sans retenue. ils sont pas tous mauvais, ils sont juste abîmés, fissurés, éclatés. on sait qu'il vaut mieux pas s'en approcher, naître là-dedans c'est comme une malédiction il en est persuadé. il les a tous reniés un par un,  d'abord ses parents puis sa fratrie toute entière – ceux qui désertent et qui n'seront pas pardonnés, ceux qui restent comme s'ils avaient envie de crever. il veut se détacher de ce nom maudit mais il sait pas comment faire, alors il beugle il fuit il leur dégueule sa haine, mais quoi qu'il fasse il peut pas s'en détacher. c'est pas faute d'avoir essayé.

✧ RUN AWAY TURN AWAY il avait onze ans quand il a fugué pour la première fois, mais il a plus jamais arrêté. il passait son temps à disparaître sans prévenir, parfois des heures parfois des jours, sans que personne ne le cherche. ils étaient si nombreux qu'on avait pas toujours le temps de remarquer son absence – et même quand c'était le cas on s'en formalisait pas. personne s'inquiète quand on sait qu'il finira par rentrer, alors il a attendu des jours et des nuits entières sans qu'on vienne le trouver. il a essayé de partir trop d'fois pour les compter, mais ça a toujours foiré ; les plans avortés les compagnons de route envolés, la violence de la rue, le froid de la nuit. il rentrait, genoux écorchés et cœur fissuré. il a pas été foutu de partir pour de vrai, et il se l'est jamais pardonné.

✧ BOYS DON'T CRY dans sa lignée y a trop de principes arriérés, l'éducation se fait à la dure et à dix ans chaque fils doit être capable de boire cul sec, rouler une clope et la fumer, jouer d'ses poings et encaisser les coups. le patriarche leur tapait pas dessus, pas vraiment – c'était plutôt un entraînement un peu militaire, foutrement archaïque. ceux qui doivent devenir hommes trop tôt, et celles qui sont censées se soumettre. forcément ça laisse des traces, une misogynie profondément ancrée en lui, un tas de croyances erronées. un homme ça pleure pas, ça ploie pas, ça montre aucun signe de faiblesse. un homme c'est dur et fort sinon rien. la masculinité toxique l'étouffe ; y a cette virilité fragile qu'il se sent toujours obligé de prouver.

✧ KISS ME KILL ME la tendresse c'est proscrit, il supporte pas la moindre douceur, préfère les coups aux caresses. pourtant il passe son temps à échouer entre des bras inconnus, les filles qu'il essaie de collectionner comme si c'était des trophées, à les amadouer pour mieux leur cracher dessus juste après. et puis y a les garçons, ceux qu'il a pas l'droit d'aimer, il veut pas qu'on le traite de pd. pas foutu de gérer sa bisexualité, pour lui c'est trop abstrait – il comprend pas qu'il puisse aimer les deux, et surtout il l'accepte pas. il se cache mais plus ça va plus tout lui échappe, les soupçons et les rumeurs, des désirs violents qui l'ont exposé quand ils sont tombés sur la mauvaise personne. il se pense malade, convaincu d'être déglingué, détraqué, désaxé. il a essayé de lutter mais il peut pas alors il cède à ses pulsions, il dit oui aux filles aux garçons, le corps en pâture jusqu'à s'faire désarticuler par des griffes acérées. ça fait mal, ce dégoût qui lui étreint la gorge.

✧ SOME LIKE IT VIOLENT le sang chaud c'est une ébullition permanente, ses veines qui bouillonnent comme un volcan pour mieux déverser un torrent de lave une fois qu'il a explosé. la violence est ancrée en lui, elle lui a été inculquée, elle est devenue sa meilleure amie. il lui faut pas grand-chose pour lever les poings et tout fracasser sur son passage, sans jamais se soucier des conséquences. des victimes il en a la pelle, des ennemis aussi. il fracasse il tabasse il dégueulasse tout, et on le lui rend bien. mais la violence fait partie d'lui, c'est son seul moyen d'extérioriser sa haine et sa rage, c'est sa seule échappatoire. qu'il la distribue ou la reçoive il s'en contrefout – la douleur lui fait pas peur, il encaisse aussi efficacement qu'un sac de frappe. les poings pour dire tout c'que ses lèvres refusent d'exprimer, les poings pour pas crever.

✧ BENEATH THE SKIN forcément sa peau garde les traces de son rythme de vie, les cernes et le teint trop souvent blafard, des galaxies d'hématomes sous ses fringues, les os trop souvent ressoudés. son dos est jonché d'une cascade de cicatrices – dix ans et les premiers coups que le patriarche lui apprend à parer, dix ans et son corps qui atterrit sur un tas d'éclats de verre, la chair perforée, les mensonges à l'hôpital. une sale trace sur l'épaule – poignardé d'un morceau de verre par l'un de ses pires ennemis, il est juste content qu'il n'ait pas su viser mieux que ça. une balafre sur la joue – la lame qui l'a défiguré, aux mains de celui venu abattre la justice sur lui. y a des marques qui traînent un peu partout, sur ses poings sur son torse, ses phalanges perpétuellement abîmées. et puis y a sa fesse droite, agrémentée d'un tatouage ridicule. un cupcake coloré de rose et de violet, surmonté d'une cerise bien rouge. il était défoncé, on l'a défié, il déteste perdre. la victoire n'est pas toujours facile à assumer.

✧ THE WILD YOUTH s'il a réussi à quitter son foyer toxique c'est pas un hasard, on l'a tiré de là. c'est jimmy qui est venu le chercher, p'tit chef d'une bande de cons, seven a suivi par intérêt. pour le fric, pour la reconnaissance, rien de plus – il pensait même pas rester. mais il aime trop jouer sur scène avec le reste des yobbos, il est devenu trop impliqué dans la guerre avec le clan adverse, et p't'être bien qu'il s'est attaché, même s'il préfère crever que l'avouer. ils s'aiment pas tous, y en a même qu'il déteste cordialement, mais ils sont devenus sa meute et c'est plus facile d'avancer avec eux qu'en se la jouant solitaire. tant pis s'il respecte pas l'autorité du leader, tant pis s'il leur crache dessus parfois, tant pis s'il disparaît sans prévenir. il a besoin d'eux qu'il le veuille ou non, même si c'est pas pour les bonnes raisons. parfois il s'dit que c'était mieux avant ; il s'est retrouvé plongé dans un conflit qui n'a plus de fin et les dégâts sont trop profonds pour être oubliés. il en garde des traces au corps, au cœur. y a les coups qu'il ne compte plus, les souvenirs qui lui filent la nausée, les vengeances qui ne s'arrêteront jamais. il voulait juste se marrer, il pensait pas qu'il finirait condamné.

✧ PICK YOUR POISON la première fois qu'il a touché à la drogue dure il avait seize ans, mais il s'est mis des limites, s'est forcé à n'plus y toucher quand il voyait les déchets qu'il côtoyait, quand il s'est mis à vendre pour faire rentrer les billets. il se contentait des joints au quotidien, et le reste seulement en soirée. il sait pas à quel moment ça a dérapé, quand le contrôle lui a échappé. il se persuade qu'il gère, qu'il maîtrise parfaitement sa consommation mais au fond il sait que c'est faux. plus ça va plus il s'empoisonne parce qu'il tient plus le coup, il a besoin d'oublier, s'envoler, effacer les visages qui le hantent. ça fait des trous dans ses stocks mais pour l'instant il arrive à le cacher à son fournisseur, il évite les représailles de justesse même s'il sait que ça pourra pas durer. il a plus envie d'vendre, il veut juste consommer et qu'on lui foute la paix.

✧ NO SLEEP CLUB la nuit il dort plus, accaparé par les démons qu'il sait plus comment repousser. y a trop de haine trop de rancoeur trop de douleur, tout s'accumule et il arrive plus à le gérer – souvent il a du mal à respirer. l'air se met à lui manquer et il panique il enrage, il hyperventile jusqu'à partir en crise d'angoisse. il met pas de nom là-dessus, ne sait pas comment qualifier ça autrement qu'en faiblesse. ça l'insupporte et il comprend pas, il sait pas c'que c'est ni pourquoi ça lui arrive, il sait juste que son corps le trahit, son cœur lui fait mal. quand il ferme les yeux il voit la violence qu'il sème, celle qui grandit en lui sans qu'il puisse la contrôler. il voit le mal qu'il a distillé, les victimes qu'il a accablées – celles qui ont subi ses coups ses cris ses assauts, celles qu'il a brisées, qu'il a failli tuer. y a le poids de la culpabilité qui s'fait sentir mais il est pas calibré pour ça, alors il ravale tout, enfouit ses peurs et ses douleurs sous une couche de rage. la nuit était sa meilleure alliée, elle est devenue sa pire ennemie.

✧ EMOTIONAL TIME BOMB seven c'est qu'une bombe à retardement, une foutue grenade dégoupillée. avec lui c'est toujours dans l'excès, le bon mais surtout le mauvais ; c'est tout ou rien, mais souvent rien. il est incapable de se gérer. écorché vif, à fleur de peau, le moindre contact l'agresse, le moindre mot le fait vriller. il a cette empathie qu'il n'accepte pas, ne contrôle pas – les émotions des autres il les sent et les absorbe au centuple, les reçoit comme des coups trop violents. sa seule protection c'est sa violence, il attaque le premier pour être sûr de n'pas sombrer. il n'en fait qu'à sa tête, suit son instinct, ne répond qu'à ses pulsions. capable de tout foutre en l'air pour un coup d'sang, il est pas facile à suivre, même lui il s'perd tout seul. il sait pas ce qu'il veut ni où il va, il sait pas ce qu'il fait, il s'accroche il écorche pour mieux tout envoyer valser. on sait jamais quand il va exploser.