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 entre la courbe et l'âme (dafy)

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Teddy Dobson

Teddy Dobson
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▹ signe particulier : les yeux bleus percutants, les traces de brûlures visibles au niveau de son coude et sous le poignet gauche. le restant de la cicatrice s'étend du même côté, presque tout le long de ses côtes jusqu'au creux de ses reins, mais bon ça faut qu'elle se désape pour que d'autres le remarquent. les sons paraissent de plus en plus étouffés quand ils lui arrivent par la droite.
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MessageSujet: entre la courbe et l'âme (dafy)   entre la courbe et l'âme (dafy) EmptyJeu 18 Mai - 23:13


Se mêler aux ombres jusqu’à s’y fondre, être même l’ombre de soi-même. Yeux rivés sur le macadam, le ciel qui pèse sur ses épaules comme un couvercle. Silhouette furtive, habituée aux empreintes des choses brisées, à la douleur qui rayonne entre ses côtes, sur son visage, habituée à marcher le long des rues abîmées, à frôler les vies à néant échouées ici-bas -comme la sienne. Profil bas. Ça fait deux semaines qu’elle s’est retirée des radars pour panser ses plaies. Pas de fac de droit. Pas de striptease au club. Pas de visite au chevet de sa mère. Elle met peut-être même plus de temps à se remettre de la violence qui a exulté de ce combat perdu. L’instinct de vouloir se cacher de l’infortune, mais aussi de se coincer dans un présent immobile parfois entouré de murs d’angoisse qu’elle devrait avoir la force de débouler.

Le regard absent, Dani voit sans voir réellement. Elle vacille, bloque de temps à autre quand un mouvement la poignarde avec ses traumas. Mais dans les ruelles les plus sombres de River Street, elle doit tout de même enjamber un sans-abri comme si il n’était qu’un débris abandonné-là. Elle pourrait finir comme ça un jour. Ça fait partie des possibilités dont elle a conscience. Quelqu’un qu’on enjambera de la même façon, qu’on oubliera au prochain coin d’rue. Une overdose. Une mauvaise rencontre. Ou lui qui l’aura atteinte avant qu’elle ne le fasse. Son âme soupire. Usée. Ça fait presque dix ans qu’elle patauge pour vivre. Elle a besoin d’un break. De rester seule, loin des gens, de se trouver un autre monde. Et y a la cocaïne pour ça. Depuis que ce type aux mots assassins a frappé, il a déclenché l’éclat de réminiscences dont elle se serait bien passée. Elle a besoin d’oublier, de s’enfoncer dans la poudre blanche. Elle qui contrôlait ses prises avec une précision de maniaque a finalement revu sa copie. Les derniers achats lui lapident ses réserves, mais elle ne voit pas d’autres solutions pour passer la journée. Elle s’refera plus tard. Elle ne doute même pas quand elle retire son capuchon pour faire face au dealer. L’échange est discret, presque muet. Elle prend plus que d’habitude. Les p’tits sachets immaculés pour seuls béquilles. Pas de Tinks. Pas de Brennyn. Pas d’Halina. Pas… Pas lui.

Elle allait repartir on-ne-sait-où. Le deal était plié. Sans encombre, sans accroc. Pour une fois, un truc simple. Argent contre dû. Pas d’embrouille. Elle venait de s’retourner quand elle l’a vu arriver. Putain pas lui. Elle s’est figée. Puis y a eu le mouvement de recul qui a aussi provoqué une douleur, étouffée dans sa gorge. Alors elle se détourne. Pas lui Avec ses mots trop doux, avec sa voix trop rieuse, avec sa légèreté qu’elle n’arrive pas à maîtriser. Pas lui. Qui apparaît un peu trop souvent là où elle se trouve. Qui aimerait lui faire croire que ce n’est qu’un hasard. Mais d’habitude, Dani n’est déjà pas une personne confiante, alors aujourd’hui précisément, sa paranoïa pourrait prendre le dessus. Elle pourrait le blesser, même si ça veut dire souffrir aussi. Pas lui Et son flegme qu’elle est incapable de frôler. Et son univers qu’elle ne comprend pas. Dani ne sait pas le gérer. Elle est trop étrangère à tout ce qu’il représente, peu importe ce qu’il représente. Elle ne veut pas qu’il l'atteigne, la touche. Elle refuse de se rendre compte qu'en réalité, qu’il y a d’autres possibles pour elle et qu’elle espèrerait les posséder -tous les meilleurs côtés de la vie. Dani ne sait pas faire face à une personnalité comme la sienne. Alors son corps prétend l’ignorer mais ses yeux s’accrochent une seconde de plus pour lui faire comprendre qu’il n’a pas intérêt à lui parler, qu’il n’a rien à faire là. Et elle lui passe sous le nez, partant dans la direction opposée. L’âme doublement sous barricade pour pas flancher comme l’animal blessé qu’elle entend clopiner dans son myocarde.
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MessageSujet: Re: entre la courbe et l'âme (dafy)   entre la courbe et l'âme (dafy) EmptyMar 23 Mai - 20:55

Elle passe comme une bourrasque. Les joues rondes et les yeux noirs. Les boucles brunes. Les mêmes. Toujours les mêmes. Quand il la croise, au milieu de river street dans la lueur du soir, il abandonne tout d'un coup sa filature. Sa couverture est compromise. Il la découvre dans une ruelle. Dani. Coup de tonnerre dans ses iris. Comme un vent de révolte au fond des yeux.
Les paumes plantées au fond des poches, la capuche de son sweatshirt rabattue vers l'arrière, écrasée sur ses épaules, il patiente. La nuit a englouti le quartier. Lumière froide des lampadaires qui éclabousse le bitume de jaune et de blanc. Rue sale, pavé souillé et eau croupie. Où va-t-elle encore se fourrer ?
L'échange est si vif qu'il le devine plus qu'il ne le voit ; rituel bien rodé, deux silhouettes, un frôlement, une caresse, vert de dollars et poudre blanche, dans une valse de doigts entremêlés. Elle passe devant lui, leurs regards se verrouillent. Il connaît cette expression. Cet air d'émeute qui brûle, un parfum d'insurrection dans son sillage. Elle bouillonne, une colère aveugle flambe sur ses traits. Dans l'encre de ses yeux, une note d'avertissement. Une menace même, sans doute. Il n'a rien à foutre là. Elle ne veut pas de lui ici. Il devrait déguerpir, feindre l'inattention, prétendre à l'oubli. Cette ville déborde de méfaits et de malfrats, de petits larcins à la sauvette, un de plus ou de moins, cela ne changerait rien. Taffy plisse les paupières. Pour se dédouaner il pense à Asher. L'autre flic un peu raté que la vie a ramassé à la pelle sur le bas-côté. L'autre flic cabossé qui lui aussi, à l'occasion, ferme les yeux sur les délits de ses protégés. Pourtant, ce soir, il n'a pas envie de la laisser s'enfuir. Il contemple la silhouette sombre qui s'éloigne. Il ne pense qu'à son secret, bagage léger camouflé, la poudre blanche quelque part dans sa manche. Il pense et ressasse. Il devine ; l'étau de la cocaïne autour de sa clavicule. Ce soir, il n'a pas envie de rire. De son pas pressé, Dani a franchi les frontières tacites, démarcations troubles, limites muettes, qu'il lui a donné. S'aménager des squats, traîner seule la nuit dans des taudis, pour toutes ces bêtises illégales, sordides ou irréfléchies, il n'a pas bronché. Pas cette fois. Pas la cocaïne. Tu vas trop loin, Valentine. Il ne peut pas la laisser filer. Les souvenirs accourent. Le crépitement des cristaux. Baltimore. La bouche de métro. L'odeur de crack, de bile et d'urine contre le béton. Les visages faméliques. La déchéance des camés. La souffrance qui le lance. Putain de coke.
Il l'observe alors qu'elle disparait. Il connaît trop bien son allure, depuis le temps qu'ils se rencontrent à l'improviste. Il l'aime bien. À vrai dire, il l'apprécie autant qu'elle le hait. Il aimerait bien qu'elle lui témoigne un peu de chaleur, un mot, un geste, un sourire. Rien qu'une fois. Elle le déteste. Il se met à pleuvoir. Morsure glacée de la pluie sur la peau brune. L'éclairage fait briller les gouttes sur la chaussée. C'est beau, un peu. Il baisse le menton, ses yeux glissent sur la gerbe d'étincelles à ses pieds. Bruine sur les paupières, brise sur le visage. Elle va s'envoler. Hors de question. Il relève la tête brusquement.
« Tu vas où avec ça ? »
Il a la voix grave, cruelle et froide qui n'appelle pas la réplique. Son ton est aussi glacé que la nuit. Il commence à marcher. Elle esquive son regard et poursuit son échappée à la hâte. Il s'humecte les lèvres du bout de la langue. Il reprend sa marche et s'arrête à quelques mètres d'elle. « Si tu te tires, j't'embarque au poste. » Ce soir, il n'a pas envie de rire. Tu vas trop loin Valentine. Arrête tes conneries.
« Et... tu vas pas prendre ça toute seule ? » Il lui offre un demi-sourire, un peu triste, qui peine à se dessiner sur sa bouche. Un petit rire fébrile grelotte dans sa gorge. « Ce serait bien que tu en prennes pas tout court, en vrai. » Puis il se tait. Silence dans l'air humide et malice au creux des yeux.
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Teddy Dobson

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MessageSujet: Re: entre la courbe et l'âme (dafy)   entre la courbe et l'âme (dafy) EmptyJeu 1 Juin - 18:49


Tu vas où avec ça ? Elle se glace. Il a fallu qu’elle tombe encore sur lui. Il faut toujours qu’il s’en mêle. Il faut qu’il insiste. Et même si l’invasion qu’il mène à chaque fois la révolte, il y a autre chose. Ça se plante un peu plus dans son ventre quand il lève la voix ainsi -comme il ne l’avait jamais fait auparavant. En réalité, elle a encore plus peur de lui aujourd’hui. On a peur des choses qu’on ignore, surtout quand on a vécu dans la paranoïa et la douleur pendant aussi longtemps. L’idée même de ne pas être amoché est difficile à accepter. C’est même plus que difficile. Alors, comme d’habitude, Dani snobe. Mieux vaut ça que lorsque son attention ne se braque sur lui. Il n’en voudrait pas. Il regretterait certainement. Suffit de demander à Sidney ce qu’il en pense. Les rencontres avec la métisse devraient être limitées pour le bien de tous, mais surtout du sien. C’est pour ça qu’elle reprend sa route, toujours à tracer. Si tu te tires, j't'embarque au poste. Et Dani se braque. Le sang en vrille et les instincts qui s’tordent. Le volte-face est brutal, fait mal. Et dans la poche de sa veste, c’est plus la coke qu’elle serre entre ses doigts mais le canif. “Me menaces pas.” Sur le même ton que lui, cinglant, l’avertissement est noué à sa voix, la défiance encadre ces trois petits mots lourds de sous-entendus. Mais même si elle doit ramper, s’traîner sur l’asphalte le corps entier à vif, elle attaquera pour s’défendre, pour s’en sortir. Même si elle a tort, même si elle échoue au final. Le risque toujours le risque. Se battre, ou plutôt se débattre avec la vie encore et toujours. Et... tu vas pas prendre ça toute seule ? Son visage se froisse en un éclair. Quoi ? Il en veut, c’est ça ? Besoin de sa dose comme tout le monde. L’abus de pouvoir c’est une marque de fabrique pour tous les flics apparemment. Sa pensée grince entre ses dents avec le dégoût qu’elle éprouve pour ceux qui portent l’insigne plaqué dans ses joues. ’Honor, protect, serve’. Mon cul, ouais. Mais la courbe faible et furtive des lèvres de Taffy tranche le fil de ses pensées hargneuses et vengeresses. Le rire-clochette qui sonne faux. Pourquoi ça grésille autant à ses oreilles ? Pourquoi elle le voit ? Pourquoi elle reconnaît ce faux-contact sur son visage ? Pourquoi ça ne lui va pas ? Pourquoi il ne devrait pas être comme ça, afficher cette tête-là ? Il a l’intention de flinguer quoi d’autres comme habitudes encore ? Ce serait bien que tu en prennes pas tout court, en vrai. Elle bloque encore. Sans comprendre. La perturbation traverse même son visage dans un vague troublé tellement c’est impossible, saugrenu pour elle qu’on puisse lui dire ça. Personne ne lui a jamais rien dit. Et c’est bien à cet instant qu’elle admet qu’elle n’arrivera jamais à comprendre ni même anticiper ce que ce type pourrait faire ou dire. Et elle se recule d’un pas, ressentant bien qu’avec ces quelques mots, il essaye de se rapprocher. “Ne…” Elle serre ses poings, s’enfonçant les ongles dans ses paumes, sourcils froncés. Elle s’reprend. “De quoi tu te mêles ?! Qu’est-ce que ça peut te faire ?!” Il n’a aucun droit. Personne n’en a. C’est trop risqué. Pour elle. Elle ne peut pas donner, surtout pas des bouts d’elle. Il ne lui reste déjà pas grand chose. De toute façon, elle ne sait pas donner. Ça ne sera jamais juste et équitable. Et elle ne peut pas se laisser percer par les autres non plus. “Et faudrait savoir. Tu m’enfermes au trou ou dans un centre pour toxico ?” Y a l’assurance cynique dans ses cordes vocales. Sa réponse à elle suinte. Dans les deux cas, elle n’y mettra jamais les pieds. Plutôt crever. Dani et sa mère ont toujours eu une certaine liberté de mouvement à force d’être sur les routes, sans attaches, sans contraintes, sans quotidien fixe -elles sont de celles qui se volatilisent comme elles déboulent. Mais en réalité, leur liberté a toujours été bridée par la laisse du père en chasse. Par sa menace persistante de retrouver ses biens, qu’elles reviennent à leur place pour y dépérir lentement. Au moins, une overdose, une bagnole qui te renverse, le mauvais gars au mauvais moment, ça assure une mort rapide. Ça ça serait avoir de la chance pour une fois.
Elle recule à nouveau et dans ses pupilles sans fond, malgré tous ses crocs, tout ça, Dani hurle, supplie. M’approches pas. Si lui n’est pas capable de l’ignorer, de la laisser partir cette fois, elle… elle n’est pas en état pour le laisser entrer sans danger, sans morsure, sans perdre pieds. Il n’a pas l’droit d’être plus réel dans sa vie que sa propre peau sur les os. Il n’a pas l’droit.
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