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 beach life-in-death (miriel)

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Mihail Popescu

Mihail Popescu
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MessageSujet: beach life-in-death (miriel)   beach life-in-death (miriel) EmptyDim 1 Juil - 19:34

Le soleil est encore assez haut dans le ciel quand il quitte son poste de surveillance à la fin de son service. C'est la fin d'après-midi mais le solstice d'été n'est pas loin derrière eux et les journées sont longues. Il peut pas s'empêcher d'être heureux, juste un peu, quand il sent le sable s'enfoncer sous ses pieds et le soleil lui chauffer la nuque. Bien sûr, il est obligé de bosser, mais tout autour de lui a un goût de vacances et ça l'enivre. C'est la période qu'il préfère, le début de l'été, la délivrance, avant l'arrivée massive des touristes. Il y en a quand même et les locaux ont déjà envahi la plage, mais il est encore trop tôt dans la saison pour qu'il les déteste tous autant qu'ils sont. En s'approchant de la jetée pour rejoindre la route, il voit plusieurs groupes de promeneurs, des familles, des vieux, et quelques jeunes qui fêtent peut-être l'arrivée des vacances — Mihail n'a pas en tête le calendrier des lycéens, la fac c'est fini depuis un moment. En tout cas ceux-là sont bruyants. Il en voit un se percher sur la rambarde et à le voir comme ça Mihail se dit qu'il doit avoir bu autre chose que de l'eau. Dans ce cas c'est vraiment dangereux, mais c'est pas son problème, il a tiré sa journée.

Il passe sous la jetée, dans le sable, pas loin de là où il a forcé Tito à venir le chercher la dernière fois — nan, il a pas de leçon à donner à ceux qui picolent sur la plage — et il commence à s'éloigner quand il entend des voix s'énerver, un cri, un rire de hyène et un gros plouf. Il se retourne. Il voit trois types penchés par-dessus la rambarde qui fixent tous le même point dans l'eau, et leurs rires se font de moins en moins confiants. Mihail suit leur regard et comprend tout de suite que quelque chose ne va pas. Il y a du mouvement, un corps qui s'agite et qui se débat mais malgré ses efforts il ne remonte pas. C'est pas le problème de Mihail, sauf que ça l'est, forcément. Il est le plus proche et c'est exactement le genre d'urgences auxquelles il été formé, sans parler du fait qu'il doit être le meilleur nageur à proximité.

Alors il laisse tomber ses affaires dans le sable, vire ses tongs et son tee shirt en chemin et s'élance dans les vagues. Après avoir passé des heures au soleil, ça lui paraît glacé, mais même s'il est l'animal le plus frileux du monde c'est pas ce qui va l'arrêter. Il s'est pas passé plus d'une minute entre la chute du garçon et le moment où Mihail le saisit sous les aisselles pour lui tirer la tête hors de l'eau. Il est encore conscient, mais apparemment tellement paniqué qu'il n'est plus tout à fait là pour autant. « Arrête de te débattre, j'te tiens. Laisse-toi faire, c'est bon. » Ça se veut rassurant mais il y une pointe d'exaspération dans sa voix parce que le gamin ne lui facilite pas la tâche. « Hey, t'as pied maintenant. Tu m'entends ? T'as pied, c'est bon. » Mihail se demande s'il est pas un peu sonné. Mais y a pire que ça. Il le reconnaît, et il serait étonné que Walker ne se souvienne pas de lui aussi. Il voudrait se tirer aussi lâchement que les types qui l'ont balancé du haut de la jetée, mais il peut pas faire ça. Il le soutient jusqu'à ce qu'ils arrivent sur le sable sec. « Ça y est, tu crains plus rien. Ça va ? » S'il pouvait être trop sonné pour se rappeler son visage, ce serait bien.
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Ariel Walker

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MessageSujet: Re: beach life-in-death (miriel)   beach life-in-death (miriel) EmptyMar 17 Juil - 15:16

T’as les chaussures qui s’enfoncent dans le sable, les poumons qui toussent la nicotine, et le regard sur l’étendue bleue effroyable. T’as l’cœur presque figé quand les marées tentent d’attraper tes pieds et toi qui fait quelques pas en arrière dans des gestes paniqués, le myocarde qui fait quelques bons en trop, ta bouche qui forme un « oh ! ». Une goute de sel sur tes chevilles, les traces sur le sable, elle semble tellement vicieuse la mer, plus que tes cigarettes délétères que tu poses armes à terre et t’en vas courir prêt de la jetée, t’as presque un sourire de lui échapper à cet océan incontrôlable, ta panique en adrénaline alors que t’es seul à fêter cette victoire minable.  Tu regardes les gens qui n’ont pas de peur d'aller se noyer, t’aimerais être à leur place pour un instant, oublier l’horreur sous l’eau que tu imagines quand t’aspires un peu plus de nicotine. Tu marches, le regard parfois baissé sur tes pieds, t’es dans ta bulle, peut-être la faute au soleil, à l’ambiance chaleureuse, les jeunes qui t’ont dans le viseur que tu remarques pas encore quand tu sens juste les battements de ton cœur répondre aux vagues. Tu t’avances vers cette jetée gigantesque qu’ose s’aventurer dans la mer et y rester fièrement, peut-être que le bois cède déjà quand tu poses tes pieds dessus, que tu prends le peu de courage que tu as ramassé sur la plage à t’approcher si prêt du bord, à te brûler la rétine par les rayons orangées. T’as peur que la jetée s’effondre, toi avec, t’as peur qu’une vague l’assassine, t’emporte avec elle mais au milieu de cette panique intérieure t’oublie ta mère qui se fait violer pour un peu d’argent, t’oublie le virus qui te grignote lentement. A côté de toi, un couple se prend en photo, puis part. T’es presque seul si quelques merdeux ne gueulaient pas si fort, si prêt. « Bah qu’est-ce qu’on a là ? » que tu entends, tu tournes la tête vers eux. Ils te regardent, ils t’encerclent, s’amusent et toi tu restes silencieux, à regarder le mouvement des vagues en dessous, à paraitre calme, à mourir mille fois à l’intérieur. « Elle est où ta queue de sirène ? », ça se moque, tu réponds pas, « oh j’te parle ! », ça te crache presque dessus, tu recules juste la tête, t’essaies de t’éloigner du bord mais t’as plus aucune issu, tu te cognes à un mur humain avant d’être pousser à l’avant, t’as le cœur qui chancelle quand tu te vois déjà passer par dessus bord mais tu t’agrippes à la barre, t’y plantes tes ongles. C’est la seule qui peut te sauver. Laissez-moi tranquille… que t’as envie de murmurer, de supplier mais ça ne sert à rien, ton corps qui joue à la balle quand ils te passent de main en main à rire de ton visage fragile, ton air malheureux, tes pieds peu agiles qui te font perdre l’équilibre en putain de mal chanceux.

T’en as marre.

Et tu fermes bien ta gueule. « R’garde comme elle est terrifiée la gonzesse ! », c’est de toi qu’ils parlent et tu n’es pas assez courageux pour faire vibrer ta voix d’garçon qu’a pas muet, d’leur montrer tes bras pas musclés et ta colère d’égaré, « une sirène ça sait nager nan ? », tu commences à trembler. Non. Non, toi t’es pas cette sirène là, t’es l’handicapée, celle qui ne sait pas nager. Et puis tu te mets à crier, « lâchez-moi ! » quand ils te soulèvent par les pieds, qu’ils t’élèvent dans les airs, face à la mer et que t’es trop terrifié. Non, non, non. Ils peuvent pas te jeter, ils ont pas le droit ! Non ! « A la une, à la deux… » tu vas couler, «  à la trois ! », tu coules. Tu te pinces le nez comme un enfant, et tu sens ton corps plonger dans l’horreur, l’eau qui t’étouffe, qui vient t’assassiner par la bouche, tes bras qui se débattent contre la terreur mais t’es trop lourd, et tu peines à garder la tête hors de l’eau. Tu veux leur crier aidez-moi ! mais ce ne sont que des lâches qui lorsqu’ils te voient sombrer préfère déguerpir qu'assumer. Alors peut-être que tu pleures, tu vois ta vie défiler et tu n’y vois que de la peur, tu regrettes d’avoir été si malheureux, tu regrettes la vie, juste une seconde, tu voulais au moins dire à ta mère que tu l’aimes, que tu l’aimes comme un fou, qu’elle est la plus belle, et que tu seras toujours son petit Ariel. Tu tousses, tu pleures, les vagues te giflent, et tu coules. Ça y est, tu meurs ? C’est douloureux de mourir. C’est rempli de regrets, rempli de terreur. Tu veux pas mourir.

Combien de temps ça dure ? Une heure ? Une minute ? Alors que l’air te manque, tu sens quelque chose autour de ton corps, et la lumière du soleil v’nir brûler à nouveau tes rétines, la bouche grande ouverte sous la panique, l’eau qui s’y échappe, et tu continues à te débattre, tes muscles qui s’épuisent. « Arrête de te débattre, j'te tiens. Laisse-toi faire, c'est bon », tu penses connaître cette voix, ou c’est peut-être trop le bordel dans ta cervelle, tu paniques juste alors tu n’y crois pas, tu continues à bouger comme un sirène échouée alors que ça y est t’as pieds, tu trébuches, tu tombes dans l’eau alors que l’inconnu te soulève encore, à croire que tu en as oublié de savoir marcher. T’as pieds. T’as pieds… Putain. T’es essoufflé, t’as plus de force. Et il te tire vers la plage, où ton corps s’effondre simplement pour tousser face au sable, tu trembles comme en plein hivers, t’as les vêtements trempés, tes boucles qui tombent sur ton front, alors que tu te revois crever. « Ça y est, tu crains plus rien. Ça va ? », tu lèves la tête vers ton sauveur, t’es prêt à le prendre dans tes bras, à en oublier toutes tes barrières, mais son visage te donne froid, soudainement tu te recules, « laissez-moi j’vous ai rien fait putain ! » que tu chouines quand tu penses qu’il est venu ici pour te frapper comme tous les autres, parce que ta gueule ne lui revient pas. Comme au bon vieux temps. « Je sais pas nager et vous trouvez ça drôle ?! Vous êtes stupides, j’vous déteste tous ! » que tu gueules, l'émotion qui te fait parler un peu trop, ta vision floue, ton corps en plein choc. Tu te souviens plus de ces trois visages sur la jetée, il faisait peut-être parti du plan qui sait. Après tout l'humain est mauvais.
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Mihail Popescu

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MessageSujet: Re: beach life-in-death (miriel)   beach life-in-death (miriel) EmptySam 4 Aoû - 18:47

Leurs regards se croisent et pendant une fraction de seconde Mihail croit qu'il est tiré d'affaire. Walker ne le remet pas, y a que du soulagement dans ses yeux, peut-être même de la gratitude et c'est clair que Mihail n'a jamais rien vu de tel dans ces prunelles-là. Mais la fraction de seconde suivante, Walker s'écarte de lui violemment et se met à beugler sans raison. « Laissez-moi j’vous ai rien fait putain ! » Enfin, sans raison, c'est vite dit. Mais y a pas de raison dans l'immédiat. « Non mais calme toi, j't'ai rien fait non plus ! » Aujourd'hui. Bordel de merde. Y a de quoi croire au karma. « Je sais pas nager et vous trouvez ça drôle ?! Vous êtes stupides, j’vous déteste tous ! » J'vous déteste tous ? Depuis quand Mihail est un tous ? La dernière fois qu'il a vérifié il était encore seul dans sa tête. « Euh... » Il fronce les sourcils, regarde le gamin qui s'agite tout seul puis lève les yeux sur le pont d'où les trois autres silhouettes ont définitivement disparues. Même pas ils ont cherché à s'assurer qu'ils avaient pas fait une grosse connerie. Ils auraient pas assumé s'ils l'avaient tué. Mihail est pas comme eux et il est pas comme les membres de sa famille qui valent pas mieux. OK, c'est dit. Ça veut dire qu'il faut assumer maintenant.

« Mec, » il fait de la voix la plus calme possible. Non, ça suffit pas. « Hey, Walker. » Ouais, j'me souviens d'toi. Je sais que tu te souviens de moi aussi. « Je sais comment j'étais au lycée mais j'ai rien à voir avec ces gars-là. » Il sait comment il était. La vraie question c'est est-ce qu'il savait, à l'époque ? Est-ce qu'il s'en rendait compte, de ce à quoi il participait ? Il peut se chercher toutes les excuses du monde, rejeter la faute sur son père et son éducation, sur la pression sociale et l’ingérence du lycée, ça change pas grand-chose. Ça change même rien pour la petite sirène. Non, merde, il faut pas l'appeler comme ça, les brutes l'appellent comme ça en guise d'insulte. « C'était des gars du lycée  là-haut nan ? Moi ça fait un an qu'j'y suis plus, c'est pas mes potes. » Un an qu'il n'y est plus et plus que ça qu'il a arrêté de se compter parmi les petites frappes du lycée, qu'il a arrêté de penser qu'il fallait ajouter sa voix aux insultes et aux moqueries pour ne pas se retrouver de l'autre côté des brimades. Il pense pas qu'Ariel ait remarqué ça.  Pour chaque gamin qui s'est rangé comme Mihail, y en bien eu un ou deux pour prendre la relève. Et y en a sans doute pas un qui a soutenu Ariel. Tu parles qu'il est pas lâche, Mihail. Il a arrêté, mais il s'est contenté de lui tourner le dos après, il l'a évité dans les couloirs, tout au plus il a dit à deux-trois autres gars de le lâcher un peu parce que c'était plus drôle, mais jamais trop fort, jamais devant l'autre gamin. Comme si la pire chose qui pouvait arriver était que Walker sache que quelqu'un avait réalisé qu'il méritait d'être traité en être humain. On va pas se mentir, il pense pas à Ariel tous les jours, c'est pas ce qui l'empêche de dormir le soir, mais chaque fois qu'il entend parler d'un gosse qui s'est suicidé à cause de brimades ou bien d'une histoire de pédophilie, sa gorge se serre et la culpabilité revient lui grignoter le cœur. Ça dure jamais assez pour qu'il y fasse quelque chose, n'empêche que c'est un secret plus honteux pour lui que sa passion pour certaines drag queens et son amour du rouge à lèvres. Mais c'est la première fois qu'il se retrouve face à lui depuis. Là, ce serait le moment. D'assumer. « Si tu sais qui c'était j'peux aller les défoncer. » Ben oui, Mihail, en v'là une solution. Une absolution. Hey, il reste un Popescu.
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MessageSujet: Re: beach life-in-death (miriel)   beach life-in-death (miriel) EmptyMar 21 Aoû - 17:40

T’exploses. Comme ça, sorti de nulle part. Ça éclate dans l’air comme les balles d’un revolver. Il se révolte le petit, pas longtemps, l’temps que tu t’épuises une nouvelle fois le souffle, l’temps de tousser, gout salée entre tes dents gelées, ta main que tu poses sur ton myocarde tremblant. T’as failli mourir. Putain, t’as failli mourir. T’exploses, le genre de bombe qui te saute à la gueule sans le signaler. T’as envie de crier, t’as envie de pleurer. Tu parles d’un vous, d’un tous, de tous ces mêmes connards qui n’ont pas d’amour, démunis de regrets, qui te tourne autour pour t’enfoncer, et tu tousses. Genoux mouillés sur le sable, et les mèches brunes qui te soulignent l’oeil, cache tes cernes de gamin épuisé. Epuisé d’un temps qui passe trop lentement, ou d’un temps qui te claque entre les doigts sans que tu puisses formuler quelques mots. Epuisé de cet acharnement qui va bien trop loin maintenant.
Il t’a rien fait qu’il dit. Tu pourrais rire, lever la tête pour lui cracher à la gueule, l’regard féroce et rempli de vengeance, l’insulter. Lui dire de dégager. « Hey, Walker », tu lèves tes yeux verts sur son visage, surpris par ton propre nom, c’est petit sirène d’habitude, c’est la petite Ariel frêle qu’on te colle sur l’front. Tu te sens presque humain, tiens. Mais ses mots te font pas du bien. Stupidement, t’as attendu des excuses quelques secondes avant qu’il tue ton espoir d’un coup de poignard nonchalant. Connard. Tu baisses les yeux sur son corps, tu l’observes à la volée, la mâchoire serrée. Même le karma il s’est barré. Il est bien foutu, en bonne santé et il a le rôle du héros. Tout l’inverse de toi. « J’espère bien que tu sais ouais », y’a la colère qui grouille, qui te tord le ventre, c’est craché dans un murmure. T’espères bien qu’il est courant du mal qu’il a encouragé, qu’il a lui-même semé d’un simple regard de pitié, d'un regard méchant, sans main tendu, sans désolé. Ouais ça te revient maintenant. Il levait pas la main sur toi celui-là, mais il était au premier rang pour regarder. Pas celui qui te cracher dessus, mais celui qui partait d'un sourire aux lèvres satisfait. T’espères bien qu’il est courant d’à quel point c’est un con. Et que Dieu se chargera de son cas. Tu t’essuies la bouche.

Il se justifie ou tu rêves ? Tu fronces les sourcils. Oh c’est pas tes potes ? Excuse-moi, merci pour tout alors ! Putain ça t’énerve. Pourquoi y’a fallu que ce soit lui qui te sauve de la noyade ? Ça te coute de remercier l’ennemi, ça te coute tellement que ça reste coincé dans ta gorge mais va bien falloir que tu l’craches à un moment parce que toi, t’es pas méchant. T’es même peut-être trop gentil dans l’fond. De pas lui en vouloir assez pour lui dire d’aller crever. De pas lui dire de courir loin de lui sans lui jeter un merci. Il le mérite pas. Tu le sais. Il t’a quand même sauvé. Ta gueule. « Oui », tu réponds juste à sa question, le reste t’ignore. T’es bien tenté de t’allonger sur la sable comme un échoué, de rester là jusqu’à la nuit tombée. T’as peut-être la cervelle en off pour simplement attendre un pardon. Tu devrais courir rejoindre ta mère, lui dire que tu l’aimes. Que putain tu veux pas mourir. Mais non. Tu restes là. A attendre qu’il crache le morceaux, désespérément.
Il viendra jamais pauvre con.
Et tu hallucines. Il est sérieux là ? « t’en as d’autres des idées comme ça ? », la voix douce trahi par l’ironie, les yeux qui l’observent. Tu l’avais jamais vu de près. Puis tu regrettes déjà ton arrogance alors tu soupires, t'abandonnes en réalité « si tu pars le faire, c’est sur moi que ça va retomber » idiot. T'expliques la conséquence calmement, enfin t'essaies, c'est le bordel là-haut. « Laisse tomber », c’pas ça qui va te racheter tu sais.
Laisse tomber.
Faudrait peut-être arrêter de laisser tomber, Ariel.
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MessageSujet: Re: beach life-in-death (miriel)   beach life-in-death (miriel) EmptyMar 30 Oct - 11:58


« J’espère bien que tu sais ouais. » Mihail lance un regard noir au nuage solitaire au-dessus de la mer. Il a rarement été aussi désolé mais ça l'emmerde d'entendre Walker lui parler comme à un gamin pris en faute. Il vient de reconnaître ses torts, ça peut pas suffire, faut que l'autre en rajoute une couche ? Ça craint d'être confronté aux conséquences de ses actes des années plus tard, même si c'est que deux années, ça craint parce que Mihail a l'impression qu'on lui demande de les assumer alors qu'ils ont été commis par quelqu'un d'autre. Mais nan, c'était lui le sale gosse qui se marrait au lieu de s'interposer quand on s'en prenait à Walker. À peine un gosse en fait, pas si jeune que ça, il a même pas cette excuse-là. Y en a qui savent penser par eux-même dès le collège, mais il était pas de ceux-là. Il peut peut-être blâmer son instinct de conservation. Il était trop occupé à se voiler la face et à se cacher aux yeux du reste du monde pour se mettre à la place de qui que ce soit, pour réaliser que tous ceux qui arpentaient les couloirs du bahut avec lui étaient aussi des êtres humains, dehors comme dedans, pas juste des enveloppes vides qui servaient de décor à sa petite vie, pas juste des figurants dans son film à lui. C'est peut-être bien les révélations sur Walker qui lui ont fait comprendre ça. Mais c'était un peu tard. En attendant quand on balançait un « pédé » à Walker en l'envoyant percuter les casiers, il était juste heureux de pouvoir prétendre que ça le concernait pas. Heureux de pas avoir à admettre qu'il était terrifié à l'idée qu'il puisse en être un, lui, un pédé. Heureux de pas être à sa place. Il y avait assez souvent droit à la maison quand il enquillait pas assez de verres de gnôle ou qu'il cognait pas avec assez de conviction.

Mais lui il s'est cassé de cette maison, son père est en prison et ne peut plus rien lui faire, et Walker est encore coincé dans le même bahut, toujours une victime pour les salauds et les trouillards comme lui. Il a de quoi se méfier, il a des raisons de lui en vouloir, il aurait même des raisons de lui cracher à la gueule. Il lui fait un peu pitié mais Mihail est à peu près certain qu'il ne veut pas de sa pitié. Il sait qu'il a jamais voulu de celle des autres, lui, même quand il était tout petit. Mais il sait pas ce que veut Walker, il est pas sûr qu'ils fonctionnent pareil, et il voit pas de meilleure idée qu'aller rendre la pareille aux brutes. « T'en as d’autres des idées comme ça ? » Ce ton-là, il connaît. Ça lui arrache un demi-sourire. Ils fonctionnent peut-être pas si différemment. « Ouais, je sais. » Sauf si je tape assez fort, il se retient d'ajouter, pas parce que c'est pas bien mais parce qu'il taperait pas assez fort à lui tout seul et c'est pas le moment de faire des promesses en l'air. « Mais tu peux pas t'laisser faire non plus, ils vont recommencer. J't'apprends rien. » Il risque un regard vers celui de Walker. Bien sûr qu'il sait de quoi il parle. Les autres aussi ils recommençaient. Mihail, on lui a appris à se défendre, et même à se venger, et même à attaquer — mais ça a jamais été son truc, ça, sauf des fois quand il est torché. Mais Ariel est encore plus une crevette que lui et il apprendra pas à se battre avec efficacité d'ici la fin du lycée. Il soupire en ramassant son tee shirt et l'enfile sur sa peau encore moite. « Faudrait qu't'apprennes à nager. » Ça au moins c'est faisable. « T'aurais pu crever. » Là non plus il lui apprend rien, mais il a rien de mieux à offrir.
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