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Invité ☽ ☾
| Sujet: King and queen (Jedeau) Ven 12 Aoû - 19:20 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway Ce n’est pas spécifiquement de sa faute. A cet instant, elle est capable de pousser sa réflexion au delà du possible, quitte à transcender ladite réflexion. Un peu à la manière d’un philosophe, celui qu’elle ne sera probablement jamais (son cerveau ne le supporterait pas. Et puis, son vocabulaire limité, aussi). Beau observe la foule présente – et par foule, elle considère surtout les quelques habitués perdus dans la contemplation de leur désarroi (après tout, s’ils avaient quelque chose de mieux à faire de leur jeudi soir…) ; ou encore ceux qui contemplent autre chose, par exemple, le fond de leur verre, en croyant pouvoir y sonder leur âme, même leur reflet fuit le contact, ils se paient d’affreuses gueules, mine de rien. Elle se prend à farfouiller dans sa mémoire, recoupant la suite d’évènements qui l’a mené à ce point précis. A quinze mètres de la scène, avec sa petitesse, il lui faudra surement vingt pas pour atteindre l’estrade ( et culminer). Si elle n’avait pas quitté la scène comme une voleuse, quatre mois plus tôt, à deux foutues minutes du grand show, elle n’aurait jamais pris le bus pour Savannah, n’aurait jamais erré dans les rues, jamais poussé la porte de ce coin paumé, jamais rencontré Barbra-coupe-de-lionne, jamais poussé la chansonnette au Savannah, jamais jamais jamais -au grand jamais - cédé à cette impulsion aussi débile qu’incontournable de monter sur scène. Encouragée par la blondasse et ses regards de Longhorn entêtée – en vérité, elle a de beaux yeux Barbie Hawaii (perdue dans un bled où le soleil trop couard se tape un sacré petit caractère). Beau ne serait pas là, triturant ses doigts, refoulant le goût d’bile et la sensation bizarre d’un estomac porté tantôt aux bords des lèvres, tantôt aux orteils. Certains parlent du trac comme d’une légende. Ils racontent qu’aussitôt sur le devant, ils oublient tout, les chauves souris dans le ventre se tirent, seule la musique compte. Peut-être. Beau n’a jamais accordé une grande importance aux racontars – réfléchir, trop peu pour elle. Sauf à l’instant. Surtout lorsque les enjeux sont réels, énormes, menaçants. Et si tu t’faisais démasquer, hein, Beau ? S’ils voyaient en toi, la chanteuse fringuée comme une pute ? Des questions, des réponses, des problèmes, des solutions improbables, des envies, des trucs qui bouffent sa cervelle et se déchainent, là, à l’abri d’sa boîte crânienne. Elle n’est plus rien de l’icone qu’elle a été, elle est dépossédée des chichis. La conjugaison paraît usurpée, mauvais temps, enfin, mauvaise personnalité. Elle déglutit, le sourire qui lui dégomme les joues n’atteint malheureusement pas son regard qui reste éteint. En fait, non, c’est faux. Beau, elle a toujours cette étincelle au fond des pupilles, qui donne l’impression qu’elle a été bercée beaucoup trop près du mur durant ses premiers mois de vie. D’ailleurs, elle avale les mètres qui la séparent de l’échafaud, avec cette même étincelle brillant salement dans le regard. Elle porte des talons de non pas cinq, non pas dix mais de quinze magnifiques centimètres, qui frappent le sol faisant résonner leur son. Les têtes se tournent, les regards vrillent tombant sur son cul. Elle a cette démarche chaloupée, résultat de cours de maintien l’ayant transformé en véritable pouffiasse du catwalk. Quinze centimètres, pff, la bagatelle, vous devriez voir les échasses qu’elle portait lors du Moutain Tour, empruntées à la mythique Tina Turner ( ou d’son sosie transformiste). Elle se sent dénudée, sans sa guitare, sans ses extensions, ses faux cils, ses faux ongles, son maquillage contouring mode « effets spéciaux ». Elle se sent lasse et, excitée. Comme la rencontre des paradoxes. Heureusement que son chewing gum, mâché avec la plus grande élégance - donc, tout son contraire- , lui permet de gérer son stresse, un minimum. C’est soirée ‘open mic’, dans ce bar fréquenté par des hipsters venus du nord ( ils ne savent manifestement pas utiliser : ni un GPS, ni une douche), des personnes qui ne doivent pas faire la différence entre moustique et taon ( à son avis, elles ont foiré leur existence). Nul doute ne l’étreint lorsqu’elle se place face à la tige de métal ou lorsqu’elle dodeline de la tête, espérant attirer l’attention de l’ingénieur son à deux pesos, trop occupé à titiller de sa langue la glotte d’une demoiselle. Le manque de professionnalisme lui inspire quelques jurons mais, bon, l’espèce humaine a besoin de se reproduire ( en vérité, elle est si romantique, au fond, bien au fond). A un moment donné, les premiers accords d’une chanson pop résonnent dans la salle, elle en fait la cover, la version sad de Baby one more time débute. « Cette chanson est pour ceux et celles qui ne voient jamais au-delà des paroles, à tous ceux et celles qui se font duper » - une introduction qui tire ,en gros, à bout portant sur l’ambiance.Ça commence plutôt bien, les premières minutes, elle pense même avoir trouvé bon public. Juste une impression.
Dernière édition par Beau Decker le Sam 13 Aoû - 2:35, édité 4 fois |
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Sam 13 Aoû - 1:25 | |
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The kind of Queen You'd really love to slap the ass
Ce n’était pas spécifiquement sa faute non plus.
Jedediah avait toujours mis un point d’honneur à se soûler dans les bars les plus miteusement inopportuns de Savannah. Odeur de graisse, bruit de fond travestis en engueulade rigolarde, bière et vin qui vous foutaient à l’envers dès le premier verre. Il avait développé pour ces établissements insipides et puants une fascination controversée par son caractère d’une naturelle élégance, vaguement bourgeois et certainement méprisant.
Jedediah était donc affalé dans un coin de la pièce. Ca n’avait pas toujours été le cas. A un moment de la soirée, après quelques apéritifs consommés dans un restaurant huppé de la ville (il tenait à se mettre en condition, à opposer les lieux pour haïr avec plus d’intensité encore la piètre qualité des services du bar), il avait conquit la cage d’escalier sombre, avait descendu une volée de marches et s’était immobilisé sur le seuil. Il était alors en pleine possession de ses moyens : tête légèrement émue par les vapeurs d’alcool, les sens couverts d’un voile d’ivresse subtile, mais tout ouverts aux diverses agressions sensitives que nous avons citée, il avait regardé depuis le palier, les dents serrés. Puis, d’un pas sur, il avait pénétré dans la pièce, avec ce sentiment d’avoir raison, encore une fois, et de ne trouver dans l’endroit rien de plus que le jugement terne et brutal qu’il s’en était fait au préalable.
Jedediah s’était assit et avait observé les gens. Des sales gueules de cons, avait-il pensé, bien avant de songer à consommer. Des sales gueules de cons de sales types qui ont foirés leur vies à l’ombre du tempérament capricieux de l’écosystème à vomir de Savannah. Il ne regrettait jamais plus l’Italie et ne sentait jamais plus le soleil méridional courir dans ses veines que face à ces visages pâles, à ces cernes noirs, à ces accents irascibles. C’était en omettant bien sur son propre teint et ses propres cernes, marqués comme deux fossés sombres sous ses yeux brûlants.
Il regardait les gens vivres, avec une irritation étrange et profonde, qu’il ne parvenait à faire disparaître qu’au sein de son cabinet. Il commanda. Une fois, deux fois, les consommations défilèrent sous ses yeux, sans qu’il réalise qu’il buvait machinalement, avec le désir profond et circonspect de faire disparaître cette colère qu’il avait au fond du cœur.
C’est à peut près à partir de ce moment là qu’il commença à s’affaler. Son maintient, irrigué par l’alcool, se fit plus négligé, tandis qu’il posait sur les vas et viens des regards troublés par sa perfusion de cocktails. Un mouvement souple attira son attention : une jolie paire de fesses, bringuebalées par une cadence subtile et rythmée de pétasse type tee-shirt mouillé. Ce genre là, Jedediah les voyait venir à mille kilomètres. Et pourtant, quelque chose dans la démarche, dans un rien de tension du bassin, du claquement des talons, du galbe des jambes, le met sur la touche, l’empêche d’assimiler copieusement le dodelinement érotique de salope genre trottoirs de Chicago.
Il la regarde passer, et grimace avec une sorte de dépit. Elle marche vers la scène avec une assurance qui semble clamer qu’elle va rompre la tranquillité subite qui s’est abattu sur le bar : parce qu’il est tard, parce qu’ils sont ivres et tristes, les gens sont rentrés chez eux ou se sont tut, à peut près, et Jedediah y trouve son compte. Et il sent qu’elle va tout gâcher, avec sa paire de fesse moulée, ses bras blancs de princesse Sudienne, sa chevelure profonde qui ne laisse encadrer qu’un visage où deux grands yeux appellent comme un échos. Une étincelle océane, qui lui rappellent l’éclair de ceux d’Anca, lorsqu’elle s’apprête à dire quelque chose d’important. Mais Anca n’a pas ce déhanché, n’a pas ces jambes, n’a pas ce cul.
L’ancolie se dresse sur scène, domine de ses talons qui ne tremblent même pas un peu sous ses pieds cambrés. Elle semble faire un signe, chercher du geste l’attention de quelqu’un, mais Jedediah s’en fou et n’a d’yeux que pour elle.
Si elle ose ouvrir la bouche et cracher dans ce putain de micro, se dit-il, je monte sur scène et je lui casse la gueule.
Il est suffisamment ivre pour se prendre au mot. Lorsque les premières notes retentissent, lorsque les premiers accords heurtent avec une violence décérébré son tympan, sa sombre solitude, sa paisible tranquillité, Jedediah rugit et se lève, trébuche, couvert par le bruit de la musique, couvert par la voix mélodieuse de la jeune fille qui chante avec un savoir qu’elle n’a pu obtenir dans aucun bar perdu de Savannah.
Jedediah marche vers la scène, pris d’une rage soudaine à l’encontre de la chanson qu’il juge de mauvais goût, de la jeune femme qu’il juge vulgaire, de lui même qu’il juge odieux. Il monte sur scène, se saisit du micro et d’un geste brutal, le balance contre le mur. La sono implose et laisse courir un son strident. Tout le monde se couvre les oreilles, et Jedediah se tourne vers Beau, spirale ouragan décérébrés par la colère absurde qui l’anime.
- Je ne suis pas venue me farcir la lie de la chiasse de Savannah dans ce bar pourrie pour écouter une pétasse réciter des airs à la con. » Aboie t-il a à l’attention de Beau. Les gens le dévisagent sans bouger, assumant le choc en silence. « Personne veut t’entendre. Tu vas t’asseoir et tu la ferme. »
D’une démarche qui pardonnerai presque son geste tant il est incertain, il tente de descendre de l’estrade pour aller rejoindre sa place.
Vaguement, l’idée qu’il est allé trop loin l’effleure.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Sam 13 Aoû - 16:18 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway Elle les entend encore, ces quatre péquenauds, assis sur leurs fauteuils mobiles, balancer des critiques sur ses vibratos « singuliers », l’aspect on ne peut plus « nasillard » de sa voix, sur ses tenues champêtres et son sourire made in Amarillo. Des phrases lancées avec des regards planquant des commentaires plus déplacés, flanquées de mots formant un temple de sous entendus. Cinq ans, plusieurs millions de disques vendus , plus tard, même rengaine débile. Beau, elle accueille la gifle, elle en entend l’écho qui chahute ses tympans. Les souvenirs sont charriés jusqu’à elle par une mauvaise brise rappelant les relents amers d’un mélange particuliers de diverses décoctions alcoolisées – dont elle a appris, temps faisant, à identifier les caractéristiques. L’haleine torche ses sinus à une vitesse surnaturelle et décape ses pores jusqu’au derme profond, bordel, la vache. L’instinct de survie peine à s’activer, rouillé, résultat des années passées à courber l’échine face à l’autorité matriarcale archaïque ( à se comporter comme une mauviette de premier ordre, surtout. Il n’y a aucune excuse à cela). Elle entend son cœur battre , ou en tout cas, quelque chose est en train d’agoniser entre ses deux oreilles. Elle ne sait pas si c’est son cerveau harassé par les cris, les insultes directes, la vulgarité de ce qui est dit ou son âme fatiguée qui désire à tout prix sortir de ce corps. Les filtres sont appliqués. Seuls les mots révérencieux lui parviennent. Pas grand-chose, même, rien. En réalité, sa tête lui donne l’impression d’un tupperware. Hermétiquement fermée à tous ce qui aimerait y entrer mais également, en sortir. C’est probablement ce qui invite chaleureusement ses traits à afficher cette expression sidérée. Elle avait la même, le jour où elle a appris que sa grande marque de cosmétique favorite avait décidé d’arrêter la production de son rouge à lèvre ‘Baiser sublime’ nuancé n°986. Sourcils arqués, pommettes affaissées, bouche formant un prosaïque « o » ( o-misère, o-merdouille, o-mais-o). Le micro débute une séance de voltige (première séance, premier cour, surement le dernier), il s’en va se fracasser contre un mur ( à moins que ce ne soit un spectateur malchanceux, elle a l’impression d’avoir entendu un « Aïe ») et finir sa vie de micro, qu’il repose en paix. Beau ne tremble pas, elle se voit victime d’une boule d’angoisse qui va se nicher dans sa gorge, provoquant un arrêt momentanément brutal ( assez redondant, oui) de ses capacités verbales. Évidemment, les filtres laissent passer le vocabulaire primitif, autrement dit, la base de toute communication cro-magnienne, onomatopées en rab et insultes corsées. Encore faut-il que ledit vocabulaire primitif parvienne à l’homme des cavernes qui se tient à quelques centimètres d’elle, imposant, jetant une ombre pas très amicale sur elle, l’avalant presque. Elle a l’impression qu’il l’a déjà assassinée de diverses manières possibles et imaginables dans l’espace confiné qui lui sert de bourrichon. Oh, c’est certain, vu le sang injectant le blanc de ces yeux là, il l’a déjà découpé en rondelle, au moins. Elle s’écarte, il semblerait que cerveau et membres soient à nouveau reliés, ses poings se serrent perceptiblement au moment où il lui offre une vue imprenable sur son dos et cette espèce d’accoutrement ridicule d’homme sui se serait paumé sur la route du retour, à la fin d’une bonne grosse journée de travail. Il lui inspire une vague de pitié, remplacée par frustration et colère. Haine veut se joindre à l’orgie mais, pitié et colère décident de se la jouer élitistes. « Hey » crache-t-elle, si son but était d’attirer son attention, la tentative est ratée. Il poursuit, titubant, essayant de descendre les quelques marches qu’il n’a eu aucun mal à monter, trente secondes auparavant. Est-ce que ça n’a vraiment duré que trente misérables secondes ? Beau a bien du mal à y croire. « Le sale con éméché » - berk, elle a l’impression de sentir son souffle arrosé de téquila et réprime un haut le cœur. « C’est quoi ton problème ? » - la question n’en est pas une, il est évident qu’il a un problème assez substantiel : son micropénis. « Ta bite est trop petite, ta vie est misérable, t’es en colère contre le monde, tu te tapes une sacrée hypertension artérielle qui t’offre d’importants problèmes d’érection ? Tu ne bandes plus c'est ça et tu essayes de lustrer ton ego en agressant des gens honnêtes ... » point d’exclamation, ou peut-être point d’interrogation, elle s’emmêle, Beau, ne sait plus si c’est un constat qu’elle lui offre avec un sourire de pétasse ou des questions lancées à la volée. La ponctuation s'est improvisée gréviste. Quoiqu’il en soit, l’instinct s’éveille et sans que son subconscient n’intervienne pour limiter la casse, elle prend de l’élan et s’élance sur le frustré. Vaguement, l’idée qu’elle est allée trop loin l’effleure. Enfin, l’idée l’effleure seulement au moment où les deux colosses chargés de la sécurité les fichent dehors. Pas avant.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Dim 14 Aoû - 0:16 | |
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The king of Queen You'd really love to slap the ass
Jedediah se retourne brutalement, écumant de rage.
Il sent dans ses veines courir une sueur électrique, il sent la colère sourde gronder, il sent le besoins de lui foutre sa main dans la gueule aussi sûrement qu’il se sent le besoins de respirer. Il lui rend son sourire, mais le sien est cruel et dur comme un pain de glace, il la jauge, il la juge, il appuie sur chaque parcelle de son corps un regard blessant et injurieux, sans pudeur.
Ha, la petite salope.
- Pour une mijorée qui vient tout juste d’avoir ses premières règles, tu sembles bien obsédée par la b… »
Il n’a pas le temps d’achever, Beau s’est jetée sur lui. Il sent son poids l’emporter en arrière, son dos éviter les marches, deux tables voler en éclat. Les bris de verre pleuvent dans un concert de cris, que Jedediah ne perçoit pas, car il sent seulement le corps de Beau contre le sien, ses ongles transpercer sa peau, son poing heurter profondément ses côtes. Son souffle l’abandonne, il contre un genou qui lui semblait prêt à réduire son entre-jambe en miettes douloureuses. Il renverse Beau avec un chapelet d’insultes un peu misogynes, l’attrape par les cheveux en se saisissant de son poignet, l’oblige à rejeter son visage en arrière. Lestement, il lui flanque une gifle à moitié contrôlée et s’apprête à y conjuguer l’aller retour lorsqu’une main ferme le saisit par le col et le tire en arrière avec une brutalité qui le met sur ses pieds.
Jedediah se dégage, l’œil couvert du rouge écarlate qui anime la chaleur de son sang bouillonnant, et avant qu’il n’ai pu se contrôler, il lève la main. Trop tard, un poing s’écrase contre sa mâchoire, et l’ocre se couvre de noir, dans le silence. Il sent qu’on le traîne, il se tient la joue, le sang coule entre ses doigts, l’arcade et la lèvre ouverte. L’arcade ? Son hémoglobine dégouline en cascade.
L’air frais le ravive, ses genoux heurtent le bitume dur et froid. Jedediah crache du sang et insulte le videur. Il sent à côté de lui une masse gesticulante s’affaler, il n’en est pas certain, mais il crois que le tas jette encore des insultes à qui veut les entendre. Jedediah crache à nouveau. Sa veste est foutue, sa chemise est foutue, sa soirée ne l’est peut être pas totalement. Il retrouve ses esprits, lentement, il dessoûle un peu. Il tourne la tête et voit à côté de lui une paire de talons de quinze centimètres.
- Putain de merde, mais c’est pas vrai. »
Il tente de se lever, chancèle, s’appuie au mur et s’y adosse avec la pénible impression d’avoir le souffle coupé, la vue brouillée, la tête en bouillie. Il cherche dans sa poche un mouchoir, mais n’en trouve pas, et s’essuie les yeux et le menton d’un revers de manche. Foutu pour foutu…
Remis de ses émotions, il considère Beau, étalée comme lui sur le sol, qui semble reprendre son souffle.
- Il fallait que je tombe sur une petite conne qui ne contrôle pas ses hormones. » Jedediah crache encore, en se tient les côtes, secrètement impressionné par la force de frappe brute de Beau.
L’air de rien, il se sent doucement con, adossé à son mur de crépit puant, la gueule couverte d’un sang poisseux, la mise en miette et le souffle court. Il en a vue de pire, dans son passé, mais jamais décoché par des gamines en mini short.
Celles là tiraient plutôt au pistolet.
- Je te rendais service, personne ne supportait tes gémissements de gamine en chaleur. » Lâche t-il entre ses dents.
Il a l’habitude de cette sensation d’étouffement, suffoqué de colère et de douleur. Il lui dirait bien encore deux mots sur cette histoire de micropénis, excédé par l’absence absolue de limite de Beau, sans réaliser qu’il l’a peut être un peu mérité. Pour lui, la demoiselle aurait dû se taire depuis le début, point. Il la dévisage dans la pénombre, en reprenant son souffle, avec la résolution d’entretenir la colère brutale qui lui est si coutumière.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Dim 14 Aoû - 4:00 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway Une rotation à 360 degrés, elle l’a évité de justesse, il lui semble. Pommettes endolories, lèvre supérieure fendue, elle essaye de se remettre en mémoire la totalité des coups encaissée, le poison de la revanche se distillant lentement dans ses veines. Vindicative, elle ne veut pas offrir au salopard qui pisse le sang à quelques mètres d’elle, le plaisir de la voir se masser la joue. Elle déglutit, avalant une salive au goût ferrique, en fomentant un plan dont le résultat serait probablement le frustré, se tenant les burnes et hurlant comme une débutante, réveillant les habitants de l’immeuble flanquant le Savannah. Beau essaye de se relever, ses genoux écorchés ruissellent, il a fallu qu’elle atterrisse dans une flaque et l’odeur d’urée qui s’en dégage lui donne envie de vomir. Elle abandonne, maudissant les deux colosses de n’avoir montré aucun respect vis à vis du sexe faible ( les remerciant , aussi, silencieusement, pour cette même raison). Elle pourrait appeler Micheal, le responsable de sa sécurité personnelle, lui dépeindre par le menu détail la délicatesse innée des deux employés du bar et assister – pop corn et Schweppes Tonic en mains – à leur mise à mort (en tout cas, à un tabassage dans les règles). Elle prend une profonde inspiration, qui lui rappelle qu’elle se trouve dans une ruelle mal éclairée, que des gens ont vidé leur vessie et leur estomac pas bien loin, qu’une benne à ordures est placée à sa droite tandis que le connard qui lui a probablement filé une belle gueule de panda, lui, est allongé comme une merde, à sa gauche. Quelque chose dans le spectacle lui paraît pittoresque, seulement, elle est très loin de vouloir faire des claquettes, le moral situé bas dans les chaussettes. « T’as d’la chance d’être tombé sur moi » - et pas sur mon garde-du-corps qui t’aurait brisé les rotules. Il n’y a plus de garde du corps. Plus rien que le bon vieux crochet du droit enseigné par son grand-père et les techniques de lutte basiques que ses frères ont bien daigné lui apprendre, entre deux entrainements de football américain. Avant que ses joggings ne soient remplacés par les shorts moulants et ses t-shirts informes par des brassières x-tra small. Elle jette sur l’inconnu un regard courroucé – elle aimerait qu’il le soit, mais elle a l’impression que son œil est avalé par une masse de chair insoupçonnée ayant pris d’assaut la moitié de son visage. Un homme qui frappe une femme ne peut qu’être un lâche et ne doit surement répondre à aucune valeur morale. Pitié revient à la charge, colère, elle, sirote un cocktail de l’autre côté de la porte par laquelle ils ont été jetés comme des malpropres. Tss. Elle se relève, chancèle, se passe une main fébrile dans la tignasse, domptant les mèches indépendantistes qui se redressent. Un mouvement contestataire inopportun, invoqué par madame Gifle. Elle a envie de le dénigrer, ce petit mecton pathétique, lui dire : mon pauvre, ta claque m’a fait l’effet d’une caresse. Et vu les revers qu’elle a déjà dégusté, elle n’est pas loin d’une réalité qui lui paraît assez cruelle. Ça pourrait lui faire plaisir. « On ne t’a jamais dit de ne pas parler d’toi à la troisième personne, petite conne qui ne contrôle pas ses hormones » - elle grimace, ses sourcils forment une ligne bien nette au dessus de ses paupières et ses longs cils de biche, eux, saluent bien bas le visage dégoulinant qui lui fait désormais face. Ils tiennent le mur, cassés. Elle n’a pas reçu de coup, non, elle les a encaissé avec maestria. Un certain débile a un jour dit : ce qui ne nous tue pas, nous rend plus fort. Faux. Archi faux, ce qui ne nous tue pas, nous fait un mal de chien. Il faut savoir que toutes les obscénités proférées à l’encontre de l’autre crétin bien fringué n’ont pas été volées. En revanche, le mojito et la bière ingurgités avant de monter sur scène s’expriment encore avec toute la politesse requise. Beau n’a pas un langage fleuri, d’habitude. Elle garde les lèvres serrées, d’habitude. Elle se laisse marcher sur les pieds, d’habitude. Sauf lorsqu’on se permet de critiquer sa voix, sa passion. « Et j’imagine que le mot« personne » n’englobe que toi » - elle a les yeux embués et la voix rauque, elle refoule les larmes qui tambourinent contre ses paupières closes. Elle ouvre à nouveau les yeux. « Quoi ? Pourquoi tu me dévisages, hein ? T’as l’intention d’entamer le second round ? » la perspective est fatigante et flippante mais, elle est forte , Beau. Elle ne laisse rien paraître. Elle hausse les épaules, elle n’a rien à perdre, à part la vie. Mieux vaut ne pas y penser, songe-t-elle, s’époussetant, énumérant toutes ses blessures. « T’as quoi ? Cinquante ballets , regarde-toi tu t’comportes comme un éphèbe » - éphèbe, ça, c’est le genre de mot qu’elle pourrait recaser durant les parties de Scrabble contre Meo. Enfin, si elle survit au Frustré. « J’te conseille d’aller consulter. Tu ne peux pas faire une crise à chaque fois que tu te manges une décennie dans la fiole ».
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Dim 14 Aoû - 23:50 | |
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The kind of Queen You'd really love to slap the ass
Le sang coagule contre sa tempe. Il commence à sentir une croûte épaisse tirer sa peau et écarteler ses pores. Il sait avec la certitude de l’habitude que d’ici un quart d’heure, sa lèvre va gonfler et virer vers une vilaine couleur violette qui lui vaudra un certains nombres de remarques demain. Demain, quand il fera jour. Demain, quant tout cela aura pris fin.
Jedediah ne sourit même pas lorsqu’il constate qu’un liquide ignoble coule le long des genoux de Beau. Il observe le phénomène avec une soudaine lassitude : cette situation, il l’a vécue des dizaines de fois, et si Beau n’a pas la subtilité de penser qu’il a retenue sa main pour la frapper, elle changerait sans doute d’avis si elle apprenait quel type de gonzesse hystérique Jedediah s’est farcie toute sa vie.
Il est vrai qu’en théorie, on ne frappe pas les femmes. Mais Jedediah en a connue certaines avec lesquelles on ne pouvait faire autrement. De véritables harpies. Des tigresses qui se défendaient contre les aléas d’un milieux machiste et d’une violence extrême qui leur imposait un train de vie ignoble et dur comme un bloc de béton – le genre de ceux qui vous coulent un corps décapité pour faire disparaître les traces trop visible d’un assassinat convertie en boucherie.- Jedediah regarde Beau et il prend conscience, dans les vapeurs d’alcool diffuse que la douleur éradique sourdement de ses veines, qu’elle n’est qu’un gamine sapée en pimbêche et que si elle en porte la forme, elle n’en a certainement pas le fond.
De la chance d’être tombé sur elle, ha, oui. Jedediah esquisse quelque chose qui ressemble à un haussement de sourcils profondément désintéressé. Les « si » ne sont pas une valeur qu’il véhicule, il préfère s’en tenir aux faits, aux actions, à ce qu’il a sous les yeux. Et ce qu’il voit à côté de lui, blessé, l’œil comme un ballon de rugby, belle petite gueule défigurée par l’irritation, ce n’est pas un colosse de cent vingt kilos mais une gamine qui n’a pas voulu aller s’asseoir sagement et à préféré lui sauter dessus, dans un espoir absurde de griffer et mordre sans être payer de retour.
Là dessus, Jedediah est très clair. Quiconque agresse physiquement reçoit ce pourquoi il s’est manifesté. L’égalité des sexes commence avec la violence et la douleur.
Jedediah sert les dents, pour la sixième fois de la soirée. La gamine a du répondant, sous son petit top ridicule et sa chevelure de Barbie chanteuse country. S’il n’avait pas autant la haine, Jedediah apprécierait l’échange, admirateur de la rhétorique injurieuse et passé maître dans l’odieux échange verbale. Seulement, Jedediah déteste qu’on lui réponde, déteste qu’on l’insulte, déteste qu’on lui manque de respect de la manière dont il se permet de manquer de respect envers les autres. Lorsqu’il s’agit d’une sale petite gamine couverte de pisse et de bleus, le potentiel humoristique de la situation lui échappe totalement.
- T’as le cul dans la pisse, parle moins fort. »
Jedediah en a marre, il voudrait un peu rentrer chez lui. Conscient de redescendre, il réalise qu’il a visé un peu fort lorsqu’il a fait exploser le micro. Ce sont aussi les yeux de Beau qui le lui disent, parce qu’avec son habitude d’analyse intrinsèque, il voit au fond des yeux, au fond du cœur blessé de la jolie fleure transformée en putain les larmes amers que la critiques attirent au jours. Il entend l’échos de sa voix, qui l’insultait avec un accent si ferme qu’il ne lui était pas venue à l’idée que la demoiselle puisse avoir un cœur sensible –il connaît bien ce sentiment, personne ne pense que Jedediah sait ce que le mot sensible veuille dire, et pourtant.- Alors il la fixe, et sa colère s’allège un peu, parce qu’il se sent con de faire pleurer une gamine.
Parce qu’il se remémore sa voix avec un sorte de culpabilité absurde –encore elle, pense t-il- qu’il lui fait regretter de s’être comporté comme un infâme connard alors qu’au fond, il doit bien l’admettre, Beau a une jolie voix, un jolie rythme, et que c’était son droit de chanter là, sur cette scène, à cette heure, sans venir se faire emmerder par un vieux con.
Doucement, dans les replis profonde de son esprit et de son cœur, Jedediah est d’accord avec Beau, même si elle se trompe sur la cause, les conséquences sont inadmissibles, et comme à chaque fois qu’il dit quelque chose de dégueulasse, il s’en veut mais son amour propre déguise cette prise de conscience en un sursaut d’égo stupide.
Jedediah se tait pour cette fois, avale la couleuvre et mâche la tête avec un dégoût désabusé. Il a en lui une fatigue soudaine, et une lassitude absolue. Il se demande pourquoi il ne s’est pas contenté de quitter le bar et de rentrer chez lui.
Ha, bien sur. Quand il boit, il mute d’odieux à odieux connard, voilà pourquoi.
Il lâche un rire sombre qui ne ressemble en rien à un rire. Beau a parfaitement raison, il devrait se trouver un psychologue, il le sait. Mais il sait aussi que les psy sont tous des menteurs.
- Je me demandais, » amorce t-il comme si Beau ne venait pas de l’insulter copieusement et de lui donner dix ans de plus. « Est ce que tu te fringues comme une pute parce qu’on t’y force, ou par désir de dissimuler ta subtilité de fermière ? »
Jedediah semble sur de lui. Depuis un moment, depuis qu’il regarde Beau, il a la sensation tenace que la demoiselle porte le top et les short ras du cul avec une élégance qui n’a rien n’a voir avec la vulgarité. Il se demande, sans pouvoir s’en empêcher, outrageux réflexe professionnel, jusqu’à quel point la jeune femme a conscience de se dissimuler. Il se demande jusqu’à quel point Beau peut souffrir de se voir mettre à nue par un sale type qui n’a échangé que quelques baffes avec elle, mais voit beaucoup de choses qu’elle ne semble pas être.
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| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Lun 15 Aoû - 3:16 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway Elle a mal aux jointures. Au cou, aux coudes, aux genoux, aux poignets, partout. Elle est écœurée, secouée, dépitée. Au final, Beau a l’impression de ne tenir qu’à un fil. Un fil si fin et de si mauvaise facture, qu’un simple geste déplacé pourrait couper, détruire, avec une célérité quasi occulte. Elle serre les dents et entend un bruit. Parait que le corps est constitué de deux cents six os. Ce connard a probablement réussi à lui en fêler la moitié. Sa gifle restera un souvenir impérissable qui lui rappellera de toujours y repenser à deux fois avant de se jeter dans la mêlée, voulant sauver un honneur déjà bien branlant, sans s’y connaître vraiment dans l’art du combat truqué – oui, parce qu’elle partait clairement pas favorite. L’espace d’une nanoseconde, elle se demande si ses fichus talons de quinze maudits centimètres sont aiguisés et, si c’est le cas, serait-elle capable de tenter le tout pour le tout en essayant de les lui foutre pile entre les deux yeux. La nanoseconde s’égraine tandis que cette idée s’évapore, sa sagesse ,qui se manifeste visiblement par intermittence, lui suggère de ne pas se la jouer ninja, elle n’a été qu’à deux cours de kung fu ( et s’en est donc tenue à la pas très fameuse ceinture jaune). Elle serre les poings, tremble légèrement. Ses vêtements sont mouillés, sales, maculés d’hémoglobine, elle se sent à la fois guerrière, guimauve...zombie. « Bien lancée ta réplique, le vioc. M’enfiler un bâton dans l’cul se serait révélé surement moins invasif » - grossière, elle se penche légèrement, consciente d’exposer son décolleté à ce grand malade (elle se réveillera le lendemain avec une envie effroyable d’aller s’enterrer dans une ville du Nebraska, en proie à la plus terrible honte). Elle referme la lanière de sa godasse droite qui menaçait de lâcher et de lui faire perdre l’équilibre.Puis, elle se relève, excédée. « N’essaye pas d’inverser les rôles, je n’ai pas besoin que tu établisses mon profil » - sur la défensive, elle crache une insulte, étouffée par la salive avalée de travers. Menteuse de pacotille. Parce qu’il est clair qu’elle ne remportera jamais d’médaille dans cette catégorie. Bestiole honnête qui se contente de l’omission et qui prétend que ne rien dire ne signifie pas mentir, oubliant son catéchisme, ses cours de théologie et ce pervers grassouillet d’révérend Gutterie. Elle l’entend de là où elle est postée, la gratifiant d’une salve de sermons tout en essayant de lui passer une main sous la jupe. Avec Dieu de son côté, ce gros dégueulasse s’est étouffé dans son sommeil, après avoir descendu un whisky cheap. Une autre ordure mériterait le même sort et elle se tient devant elle, lui lançant des vacheries. Elle ne sait pas ce qui le pousse à être aussi désagréable et colérique mais, elle parierait ce qui lui reste de fierté ( pas grand-chose) qu’il doit avoir vécu pas mal de trucs innommables dans sa vie – dont il semble garder quelques stigmates. « D’ailleurs, tu peux me redéfinir le mot « pute » ? Et me décrire comment une « pute » - se fringue selon toi ? » - elles s’habillaient comment, les putes, de son époque, hein ? Elle esquisse quelques pas, dans la direction opposée, évalue ses capacités de fuite. Elle n’a rien de brisé, elle peut encore courir ; même avec ses chaussures, Husain Bolt n’aurait qu’à bien se tenir. La brunette le fixe, avec dans la pupille, une lueur imperceptible de défi. Archer, il lui fait penser à ce frère là, qui pourrit derrière les barreaux. Sauf que le Frustré est pire. Sans aucun doute. « Ceci dit, t’as pas tort, je suis une fermière aux joues bien roses, qui ne s’épile pas et qui passe sa journée à mâchouiller d’la paille » - sarcasme mis de côté, elle décrit là sa Tante Bertha et éprouve aussitôt une vague de tendresse, un mal du pays atroce, une envie de se carapater de cet endroit inhospitalier. Elle ne veut plus poser le regard sur cet homme qui semble voir en elle. Avec son intelligence cinglante, elle a la sensation de s’entretenir avec le démon et en a la chair de poule. « Et contrairement à toi, je ne me mets pas le monde à dos avant même qu’il ne découvre quel être abjecte je suis, en lui donnant l’occasion de m’abandonner comme de la chiasse. T’as raison, c’est mieux comme ça, tu lui épargnes une sacrée déception » - elle a besoin d’avaler quelques verres mais elle n’a pas son portefeuille. La jeune femme pense appeler Anca sauf que son téléphone est avec son portefeuille, dans son sac, resté de l’autre côté de la lourde porte qu’ils ont passé quelques minutes auparavant et elle sait que pour le récupérer, il va falloir ruser, les deux colosses n'étant pas de grands comiques. « Zut » - siffle-t-elle, « j’ai laissé ma besace à l’intérieur ». Elle pivote vers lui, croisant les bras sur sa poitrine. Elle connaît quelqu’un qui a intérêt à manifester son désir de l’aider, après tout, ce serait la moindre des choses compte tenu son faciès où les discontinuités s'étalent à la perfection.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Jeu 18 Aoû - 21:38 | |
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The kind of Queen You'd really love to slap the ass
Toutes les fois où Beau ouvrait la bouche – et Jedediah ne les comptait plus par peur du désespoir que le compte lui procurerait sans doute, - le flot continu de grossièretés qui s’égrenait entre les dents de la jeune fille lui faisait hausser les sourcils, signe incontestable d’une certaine surprise. Certes, Jedediah n’était pas en reste : aborder quelqu’un en plaçant dans sa salutation plus d’injures que de conjonction, souvent, vous fait passer pour quelqu’un de malpolie. Toutefois, il devait avouer que e paradoxe entre le visage angélique de la jeune fille, la perfection de ses lèvres rouges, la grâce de sa colère (Jedediah l’avait remarqué, au travers du filtre de pétasse et de pisse qui la recouvrait et lui cousait un joli masque) et les mots orduriers et putassiers qu’éructaient cet être qui n’en semblait pas capable, plongeait Jedediah dans un sentiment d’irritation nacré d’amusement.
Il était habitué aux femmes vulgaires : il en avait côtoyé toute sa vie. Des vénales, des vaniteuses, des orgueilleuses, des absurdes. Il en avait vu de toutes sortes, pendant aimable d’hommes tout aussi effroyables et peu raffinés. Beau avec quelque chose de ses femmes, les deux genoux dans l’urine, la moitié du visage rouge et gonflé, les cheveux éparpillés en une espèce de crinière sombre que la mêlée, bien que courte, n’avait guère épargné –Jedediah n’avait pas hâte de voir sa propre tête, il sentait bien que la moitié de son visage n’était plus qu’un masque rouge et puant.- Mais Beau avait quelque chose d’autre, il en était certains, maintenant que l’alcool redescendait dans ses veines, la douleur lui ayant servit de calmant efficace. Elle n’avait pas l’air si vulgaire, au fond. Elle avait même un côté très enfoui qui donnait à Jedediah l’envie de la respecter.
Jusqu’à ce qu’elle accorde les mots bâtons et son propre cul dans la même phrase, bien entendu. Jedediah ne pu que lever les yeux au ciel avec un air avertit, du genre bon sang, elle n’a aucune limite, et franchement je ne veux pas entendre parler de son anus dans une situation pareille.
- Ma réponse pourrait être facile et vulgaire, est-ce vraiment ton choix ? Nous ne sommes pas obligé d’en arriver aux beaufferies stupides. C’est aisé et ça manque clairement de raffinement. » Jedediah prenait peu de choses à la légère, lorsqu’il était impliqué, et surtout pas un échange comme celui qu’il était en train d’entretenir avec Beau.
Non pas qu’il eu voulu avoir le dernier mot à tout pris – en réalité c’était d’une évidence absolue qu’il lui fallait l’obtenir. Par principe et par réflexe, sa nature le lui dictait.- Mais lui répondre qu’un bâton dans quelle partie qu’elle veuille de son anatomie pouvait être une affaire rapidement réglée si elle el désirait vraiment lui semblait vil, mesquin, à la limite du délit. Même dans un duel absurde comme celui qu’ils étaient en train d’entretenir, il y avait des règles. Et Beau avait prouvé qu’elle était au dessus des répliques de cul honteuses. Jedediah, pour sa part, aurait préféré crever que d’y venir : il avait trop de respect pour lui même pour se permettre de tomber dans une telle bassesse de vulgarité.
Le raffinement, Beau. Le raffinement.
Bon, conclu Jedediah en pensée, le raffinement semble être mort, étouffé par les mamelles de Beau Decker, chanteuse à ses heures, serpillière à pisse le reste du temps. Il aimerait lui faire une remarque, quelque chose de très méchant lui viendrait à l’esprit, mais il sert les lèvres par crainte de tomber trop vite dans ce qu’il s’est refusé à peine trente secondes plus tôt. Avec une sorte de politesse inattendue, un air crispé sur le visage, visible au travers de la couche de sang, Jedediah fixe les yeux de Beau. Il n’est pas pervers au point de mater la paire de loche d’une fille avec qu’il il vient d’échanger trois mandales et six paires de claques verbales. Par respecter de son égo, il préfère regarder ailleurs, parce qu’il sait très bien que deux jolis seins sur un joli buste surplombé d’une jolie tête capable de répondant ne l’ont jamais laissé indifférent.
Mais pas de ça avec Beau. Clairement, il préférerait mourir de honte que de fantasmer la jeune femme à un moment pareil.
Ha, mais tout de même. La proposition est trop accessible. Alors il jette un coup d’œil au décolleté, une demi-seconde, en vérité il a à peine vue, et il grimace avant de regarder ailleurs. Si Beau ne saisit pas le jugement dégoûté qu’il place sur sa position physique, alors Jedediah ne sait plus comment s’adresser à elle.
Jedediah ris sèchement, d’un raclement de gorge qui semble quotidiennement ce qu’il a de plus propice en magasin pour imiter le rire. Ca ne donne pas grand chose de très chaleureux, et surtout rien d’aimable. Mais il ne peut s’en empêcher tant il entend dans la voie de Beau l’énorme mensonge qui croit au travers des mots. Ca n’a rien de réellement hilarant – la situation ne l’est pas, elle n’est rien d’autre que sordide et vue de l’extérieur, Jedediah a bien conscience de faire pitié, au moins autant si ce n’est plus que Beau. Quarante ans, ça ne pardonne pas.- Mais elle, qui pourtant s’adresse à lui avec une conviction forcée pleine de vigueur, ne semble pas prendre au sérieux ce qu’elle émet. Tout le monde à besoins de se faire établir un profil, un jour ou l’autre. Jedediah le sait par cœur, et manifestement Beau en a parfaitement conscience. Son ton de voix, uniquement, lui a déjà donné raison.
- Excellente question, sur laquelle nous pourrions débattre longuement si ta propre odeur ne risquait pas de t’incommoder d’ici quelques minutes. Admettons simplement que ma définition doit rejoindre celles que tu te fais d’une crise de la cinquantaine ou d’un complexe de micro pénis, c’est à dire quelque chose d’assez faux et de sans doute très subjectif. »
Jedediah parle d’un ton posé que trahis profondément tout le reste de sa physionomie : il n’a jamais su comment avoir l’air calme, même dans ses plus grand moments de détentes. Constamment, son visage et ses muscles se crispent et donnent à son entourage l’impression de côtoyer un type en pleine crise existentielle. Au moins a t-il pu se rendre justice : s’il juge à la légère, il n’est certes pas le seul, et si Beau ne semble pas vouloir passer outre son premier jugement, Jedediah a bien saisit que la définition ordurière qu’il lui a flanqué dans la gueule ne lui va pas cinq minutes.
Jedediah semble constamment en colère et beau plus vulgaire qu’elle n’est. Tout n’est qu’une question d’apparence.
Quoi qu’en ce qui concerne Jedediah, il doit bien s’avouer que la rage fait désormais plus ou moins partie de ses vitamines.
Il pointe un doigt dans sa direction, dans un signe d’accord. Est ce que Beau est du genre à tout prendre au pied de la lettre ? Il la jauge et se dit qu’au font le profil paysanne lui convient réellement. Fin fond du Texas, dans un vieux ranch miteux, à faire tourner en rond une paire de chevaux pelés dans une carrière d’avant garde. L’accent trainant du Sud et les marques de bronzage en forme de salopette, et le portrait est complet. Elle pourra même reprendre sa guitare, pour l’occasion.
- Ha, bien sur. »
Jedediah la fixe, et échange un regard, parce qu’il a perçu que dans l’œil de Beau, la gnaque s’est éteinte une seconde, et qu’elle a semblé regardé ailleurs, bien au delà des murs noirs de Savannah. Il n’est pas sur de ce qui vient de se produire dans la tête de la jeune femme, mais il interprète l’étincelle qui a fusé un semblant de souffle comme une vague de tristesse nostalgique, parce qu’il connaît bien cette sensation, lorsqu’il pense au cigales, aux vins d’Italie et la chaleur de la brise marine en pleins mois d’août. Parce qu’il préférerait entendre les cipres se courber doucement dans l’air léger de la nuit plutôt que de sentir l’odeur de pisse et de vomi de l’arrière court, que de sentir le sang sur son visage et sur ses mains, que de se ridiculiser à insulter une gamine qui n’a fait de mal à personne.
Il se sent con d’être nostalgique d’une époque que seule son enfance assimile comme de la joie.
Les paroles de Beau frappent juste. Elle craint d’être lu, mais elle se défend avec savoir faire. Jedediah se crispe, encore un peu plus s’il est possible, parce que son cœur réagit mal à ce qu’il vient d’entendre : il se sert un peu, douloureusement, avec une perfidie désagréable qui ulcère Jedediah. Il ne supporte pas de sentir les traces de sa sensibilité, encore moins lorsque les paroles sont justifiées et bien sentie.
- Personne ne t’abandonne, c’est sans doute pour ça que tu es stupidement là, étalée par terre, sans personne pour te défendre contre un taré qui t’agresse sans raison. Ca me semble logique, en effet. J’ai vu le monde autours de toi, quand tu chantais, tout à l’heure : au moins six ivrognes qui avaient plus d’intérêt pour la longueur de ton short que pour ce qui sortait de ta bouche. Allez, ça va. On sait tout les deux que tu ne sais pas de quoi tu parles, et surtout que tu es très mal placée pour faire la morale sur ce type de sujet : ça se voit sur ton visage. Tu as le profil des petites filles capricieuses qui fuguent sans dire au revoir.» Jedediah s’interromps, et arrête les mots sur ses lèvres qu’il trie au hasard. Il n’est pas sur de ce qu’il avance, il n’est jamais sur de rien. Son talent se condense dans la conviction qu’il arrive à placer dans chacune de ses paroles.
Parce que Beau à l’air seule, véritablement, et perdue. Parce qu’elle n’a pas du tout l’air à sa place, parce que son accent, comme celui de Jedediah, n’est pas celui de Savannah. Parce qu’il a vu dans ses yeux l’étincelle s’éteindre une demi seconde. Il ne sait pas où il frappe, et sans doute Beau n’est elle pas aussi ingrate qu’il la décrit. Mais ses paroles lui ont fait du mal, et ont frappé trop juste pour qu’il ne tente pas de se défendre, même si c’est de manière bancale.
Après ça, après ce rejet, la colère s’éteint un peu, pour faire place à une sorte de tristesse lancinante, comme une descente d’adrénaline que la fatigue aurait remplacé par la douleur. Il dévisage Beau mais son agressivité à disparut, laissant place à une résignation heurtée, comme un fauve qu’on aurait épuisé d’un seul coup et qui refuserait désormais de se battre pour le spectacle. Il fait un geste de la main, et machinalement, décide de prendre en charge la demande tacite de Beau, inconsciemment heureux d’avoir une alternative à la prolongation de la bataille.
Il disparaît de la ruelle, contourne le bâtiment et se présente à nouveau à l’entrée de la boîte. Sa gueule ne lui attire pas la sympathie. Il lui faut dix minutes pour venir à bout du type qui lui a asséné une droite, pour parvenir finalement à récupéré le pauvre sac, abandonné sur un siège, miraculeusement intacte – du moins lui semble t-il, étant donné le téléphone visible de la poche ouverte.- Il le ferme, rebrousse chemin et rejoint Beau. En silence, il lui tend le sac.
- Bon. » Dit-il, au bout de ses forces présumés. « Je peux te payer un verre, si ça ne sonne pas trop immonde à tes oreilles. » Jedediah n’essai pas vraiment de racheter quoi que ce soit. Il ne se voit simplement pas rentrer chez lui maintenant, avec le goût bizarre d’une situation inachevée sur le bout de la langue. « Au fait. Même à mon époque, on n'utilisait pas le mot besace.»
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Ven 19 Aoû - 17:35 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway Elle se pince les lèvres, Beau, dents mordant dans la pulpe, le regard, elle le baisse perceptiblement, se soustrayant à ces yeux fauves qui la dévisagent, sans réelle gêne. Elle fixe ses chaussures, qui ne sont que des reliquats couteux, d’une vie alternative profondément insipide. Il a raison, l’autre goujat, elle a été abandonnée. D’abord par ses parents qui l’ont laissé aux soins de Patty, puis, par Bella, cette nuit là, après son foutu thé à la camomille. Progressivement, l’envie de vivre ,elle-même, a voulu la déserter. Alors, pendant qu’au fond des yeux de l’endimanché, elle ne décèle plus aucune gnaque, plus aucune envie de retrousser des manches sales pour embrasser le combat, Beau ,elle, laisse la tension quitter les parcelles de son corps, même les plus endolories. Elle s’est dépeinte en ersatz de femme audacieuse lorsque tous ses proches savent qu’elle n’est qu’une ratée qui ne ferait pas d’mal à une mouche. Enfin, il faut insister sur le fait que le grand brun qui lui fait face n’a absolument rien d’une mouche mais tout d’un frelon. Elle garde le silence, elle empêche tous les mots de forcer la barrière de ses lèvres pour fouetter l’air, de cette manière décadente et sordide dont elle a pu faire preuve dans une version nettement moins édulcorée d’une Laura Ingalls ayant fréquenté tous les rejets bordant un saloon délabré. La petite fille capricieuse chiale, dans un coin, recroquevillée aux tréfonds tandis que Beau Decker, chewing gum imprégné de globine toujours collé à sa molaire, gonflée de superbe, frissonne en silence. Elle prend une profonde inspiration, se saisit de l’élastique qui lui enserrait le poignet et de sa longue chevelure brune pour la relever en queue de cheval de collégienne. Elle n’a pas fière allure fagotée comme la dernière cagole du comté. Il a dit quoi ? ‘Subtilité de fermière’. Sa subtilité et elle l’emmerdent cordialement. Elle grogne lorsqu’elle le voit s’éloigner. Elle reste persuadée qu’il tente un geste chevaleresque, cherchant surement à compenser le grand bordel qu’il a fait (et s’attirer les faveurs, si ce n’est pas les siens, aux moins ceux du Tout puissant) en réalisant probablement la seule bonne action de toute son existence de bourrin aux paluches expérimentées (dans l’art de la claque). Et pendant ce laps de temps assez conséquent – où elle pense à : se carapater, alpaguer un flic , se planquer derrière la benne nauséabonde, s’acheter une nouvelle paire de godasses pas - forcément dans cet ordre là – elle se ronge les ongles jusqu’au sang, molestée par les souvenirs de toutes les rafales verbales essuyées. D’abord, l’adjectif capricieuse lui arrache la cervelle, puis abandonnée, le cœur. C’est bon signe, elle a un cœur et une cervelle. Quelque chose dont ne peut pas se targuer le frustré. Elle essuie les larmes qui – comment ça s’fait, chiure – ont réussi à lui inonder les joues. In extremis avant que le maestro refasse apparition, sa besace dans la main. Elle tend la paume et attrape son bien. Sans que les syllabes formant le mot « merci » ne retentissent dans l’air nocturne. «Tu aurais pu m’épargner la séance de catch si ton seul but était de me proposer d’se mettre une mine dès le début » - vieux pervers, songe-t-elle – et si elle crève de lui envoyer un ongle dans l’oeil, elle se retient, hochant la tête, se surprenant elle-même d’accepter un verre. La soif prime sur tout sentiment de colère, pour le moment. N’est pas dit qu’elle ne retrouve par sa hargne. Ce qui est certain, c’est que son verbe va – quant à lui – subir une régression capable de l'exploit de faire rougir une star du porno.« Ah, au dix neuvième siècle on appelait ça comment, hein? » elle arque un sourcil, défiante. « J’vais pas avoir droit à l’histoire du sac à main dans les grandes largueurs j’espère ? » - elle prend la tangente au cercle infernale, en claquant l’asphalte de pas assurés, consciente de son état lamentable ( ce n’est rien comparé au regard suintant la pitié qu’elle recevra du tenancier de la gargotte-bar incroyablement pourrie où ils décideront de s’installer, dix minutes, quarante sept secondes plus tard). Elle poursuit, d’une voix guillerette empruntée à une Spears sous anxiolytiques. « Besace, fourreau, aumônière, escarcelle, bouguette, pochette, minaudière. Une besace est une besace. T’es de la fashion police ? » - en vérité, c’est seulement l’expression d’un esprit de contradiction salaud et un moyen comme un autre de tâter les nerfs du monsieur, en essayant d’être la plus chiante possible, pédigrée numéro 1. Beau Decker requinquée, pour vous servir, songe-t-elle, persuadée que les pas qu’elle entend derrière elle, sont ceux de ce grand compétiteur , il doit surement dépasser ses comparses dans la catégorie : ‘porteur de costume-cravate qui n’assume pas son micro-pénis’. Beau grimace, ses lèvres se tordent, son nez se retrousse, ses sourcils forment des vagues informes. Dire qu’elle fait une fixette sur l’entrejambe de l’inconnu n’est peut-être pas un mensonge. Après les coups bas, après les coups – au sens large comme au sens littéral, les voilà marchant, pas loin de l’image du duo boiteux, bras dessus, bras dessous. Excellente, la blague, elle est cachée où, la camera ? « Je sais pas si c’est le costume ou ton langage très sophistiqué, en tout cas, t’as l’air de t’y connaître en soie, broderies et pompons néoclassiques » - crache-t-elle, daignant un regard par delà son épaule, en direction de l’énergumène. « C’est quoi ton nom ? Laisse-moi deviner » - avec son nez fin et ses yeux rapprochés, ses pommettes hautes, il a une tête à s’appeler Harrold. Son œil poché ,lui, lui suggère le prénom Connard. Et maintenant qu’elle y pense, c’est vrai que les deux matricules lui iraient comme un gant. Le moulant lui et son micro-joujou. « Moi, c’est Beaumont » - ajoute-t-elle, sans préciser que tout le monde l’appelle Beau. Parce que en l’occurrence, tout le monde exclut forcément monsieur , qui lui est plutôt « personne ». Du « personne » n’aime ta musique, quelqu’un s’en souvient ? « Mais, tu peux m’appeler Votre Altesse, Milady, pas qu’on devienne amis toi et moi mais, étant donné que tu vas m’payer des verres » en effet, au pluriel « il vaut mieux qu’on soit courtois » - dans la mesure du possible. Ils quittent la ruelle, elle débouche sur une rue éclairée par des lampadaires où des badauds trainent encore par cette heure avancée. Un jeudi soir, que quelqu’un lui explique. Elle ralentit le pas, accordant son rythme au sien. Malgré tout, elle ne le déteste pas, Beau. Beau ne déteste et ne hait personne. Ça tombe bien.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Sam 20 Aoû - 21:02 | |
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The kind of Queen You'd really love to slap the ass
Elle marche vite, la gamine, pour une poupée aux genoux en lambeaux. Jedediah ne souffle pas, parce qu’on n’arrête pas d’être sportif à quarante ans, mais il apprécierait que Beau se calme.
Qu’elle se calme, réellement.
Il la jauge, pas sur de savoir comment elle est remontée au créneau, avec quel énergie, avec quelle verve. Ha, peut être s’est elle contentée de chialer un coup toute seule, dans son arrière cour qui pue, pour se redonner un coup de fouet. Jedediah croit bien voir sur ses joues poudrées un sillon savant effacé à la va vite, comme un crime dissimulé avec une relative efficacité. Il ne fait pas de commentaires, il se contente de retourner à Beau son air le plus aimable : sourcils froncés, regard trahissant une profonde irritation désabusée, coins de la bouche baissés vers le sol, mépris au coins des lèvres. Il n’en revient pas. Son champ lexical du sac est incroyable, et incroyablement désuet, lui semble t-il. Il ne fait pas beaucoup d’efforts, il faut l’avouer, pour s’intéresser au sujet : Jedediah ne connaît rien d’autres que les différentes matières de costumes, le coton, la soie et le cachemire pour le reste. Il pourrait l’affronter sur le territoire de la marque, pas sur celui du synonyme employé au scrabble par sa grand-mère.
S’il n’avait pas un peu d’attirance pour Beau, quel quelle soit, il tournerait les talons et rentrerait chez lui, en prenant soin de couper l’énumération en deux, histoire de bien lui manquer de respect. Au lieu de ça, il se surprend à subir la verve nouvelle de Beau, et ça lui rappelle cette soirée sordide où il avait été obligé de rester assit le cul vissé trois heures à une chaise, en face de lui : un gamin de douze ans grattant du violon avec d’aussi belles harmonies qu’un type agitant une scie à métaux sur un radiateur. A côté, une brochette sophistiqués de gangsters concernés à un pour cent par la performance, obligés comme lui de subir ce que le Parrain leur imposait, parce que son fils jouait si bien du violon. Jedediah possède dans les cas extrêmes une patience d’ange, du genre de celle qui permet à la mule du pape de garder sept ans son coup de sabot. Il reste calme la moitié du couplet, se retient le dernier tiers, et parvient à répliquer calmement.
- Si j’étais de la police des mœurs je te ferais changer de short. »
Il est sérieux, il le ferait. Il ne supporte rien moins qu’une fille de l’acabit de Beau fringuée avec des morceaux de tissus qu’il juge vulgaire, et que, s’il parlait avec les mots de JJ, il qualifierait taillé au ras de la chatte.
Il ne profite pas trop du cul de Beau, même si ses talons vertigineux transpercent le béton à quelques mètres devant. Jedediah est trop occupé à chercher un moyens de lui faire ravaler ses petites piques insupportables sur son siècle de naissance, et à détacher sa cravate pour s’en servir de chiffon. Tout en marchant et sans chercher à la rejoindre – il ne fait jamais l’effort de rattraper quelqu’un qui marche plus vite que lui – Jedediah s’éponge méthodiquement le visage, avec un savoir faire qui prouve clairement que ce n’est pas la première fois qu’il vit cette situation. Une fois son masque de beauté supprimé partiellement – autant dire que les larges de traces de sang séchés qui lui couvrent encore une partie du visage s’accorderont parfaitement avec les genoux et la tête remixée de Beau – il jette négligemment et sans regrets apparents sa cravate dans la première poubelle venue.
Fondamentalement, il était éxédé par le flot de parole que Beau semait sur sa route. Bon sang, celle là, elle aurait fait mieux en poupée gonflable : à se contenter d’avoir un beau cul et de fermer sa gueule.
- Et toi ton business c’est charrette de blé et drainage de pie de vache à l’aube, je sais. On a déjà eu cette discussion. » Lâche t-il en réajustant son col de chemise, ses manches et en dissimulant une tâche de sang qui s’est glissée sur sa manchette – le sang de Beau-. « Jedediah. » Il ne précise pas non plus que tout le monde l’appelle Jed, par principe de politesse. « Milady ça me semble correcte : un très joli pseudonyme si l'envie te prend de stationner devant le bar plutôt qu'assise à une table.»
Par ailleurs, Beaumont, ça ne fait pas échos à ses oreilles. Peut être que Beau aurait déclenché quelque chose, mais il ne sera pas le premier à sauter sur l’occasion de s’en mordre les doigts. Car si lui ne le sait pas, nous savons que quelqu’un rapproche déjà les deux imbéciles qui marchent désormais côte à côte dans la nuit de Savannah. Dommage, que Jedediah ne soit pas un prénom plus courant, et Jedediah un type plus apte à se fondre dans la masse. |
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Jeu 25 Aoû - 20:41 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway
Bouche en cœur, Beau l’observe, l’œillade est un poil trop longue. Ce visage singulier, elle se met subitement à en apprécier les déformations, les cicatrices, tous ces trucs qui passent inaperçu, elle les remarque aussitôt. C’est pas l’angle, c’est pas la lumière artificielle crachotée par les lampadaires, c’est pas les paupières plissées par la douleur, par la chair enflée, par l’envie sous-jacente d’en connaître l’histoire. Elle veut , subitement (et elle en reste sidérée) , lui demander de se raconter, comme un anecdote foireuse, un récit de voyageur, le résultat d’une épopée solitaire, Beau, elle murmure les syllabes, d’un prénom biblique, qui n’écorche pas, qui n’est ni abrasif, ni son contraire. Jed-ed-iah. Un prénom qu’elle transforme en mélodie, en parole, en chanson. Puis, ce sont ses pas qui se calquent aux siens, ce sont ses mouvements, même les plus imperceptibles, qui en prennent le rythme. Elle grogne. Pas parce qu’elle n’aime pas la curiosité qu’il invoque en elle. Pas parce qu’elle le méprise pour les ecchymoses qui lui filent la tronche d’un canevas contemporain. Parce qu’elle regrette déjà ce qui va suivre, tout. Huit lettres, belles et à la fois putrides, un écho lointain, une impression d’en connaître les formes, leurs ombres, les vérités qu’elles cachent. Jedediah, il ne s’appelle ni Harry, ni Connard, ni Gentillesse, ni Monstre, ni Frustré. Elle ne relève pas la pique, elle passe à travers elle, comme de la flotte dans une passoire. Elle s’en va, pique, se planter sur un coin imaginaire de bitume, elle n’y lance aucun regard, n’y abandonne aucune partie d’elle-même. « Salomon, fils de David et de Béthsabée. Le bienaimé du Seigneur. Ça veut dire le bienaimé » - un pli prend forme au dessus de sa lèvre supérieure, un autre entre ses deux sourcils et le bleu qui pigmente ses iris, lui, se voile ; il y jaillit un éclair, puis un autre, et un autre. Et, tout à coup, c’est la tempête. La chanteuse pense qu’il s’agit d’une révélation, d’un signe, d’une blague cosmique, à tour de rôle. Elle réprime un frisson, celui qui lui caresse l’épine vertébrale pour aller se planter ,quelque part, au fond d’sa cage thoracique. Elle voit les traits de Bella, elle en entend même la voix et ses inflexions, si particulières. Et, ceux d’Anca, sa bouteille d’oxygène convertible en bouteille d’espoir. Elle jette un regard affolé autour d’elle, croise des silhouettes changeantes, de vulgaires coquilles, elles sont vides, vides de sens. Comme toutes les lettres qui forment son propre prénom, comme elle. Lui, en revanche, il a l’air d’avoir une vie bien remplie. «On n’t’a jamais dit que tu portes très mal ton prénom ? » - en fait, c’est une question à laquelle elle ne cherche pas spécialement de réponse. Qui lit la bible ? Qui s’embourbe à coup de versets et s’assomme à coup de traductions mal fichues ? Il n’y a qu’elle, pour avoir décidé que le pavé lui servirait de livre d’chevet jusqu’à la fin d’sa vie de merde. Même ça, elle n’en n’est pas si sûre, Patty doit lui avoir suggéré et, Beau n’a fait qu’en prendre le pli, éponge à paroles, nodencéphale, poupée articulée flippante, elle se demande si elle n’a jamais eu de volonté propre ? Beau, elle tamponne, elle siphonne, elle prend exemple. Sur Anca, sur Barbra, sur toutes ces gonzesses qui rayonnent et qui ont l’air, peut-être qu’elles n’ont que l’air, de savoir exactement ce qu’elles veulent de cette existence qui leur fait si bien la nique. Beau, tu veux quoi, toi ? Tu veux retrouver tes perruques, tes tenues à paillettes, tes pompes à lèvres pour te lancer des challenges ? Beau, tu veux quoi ? Toute cette réflexion amplifie lamentablement son mal de crâne – l’parfum de mec que l’autre porte, aussi. Elle veut boire, elle veut anesthésier les brûlures, la souffrance, elle veut se soûler et chanter, chanter jusqu’à ce qu’elle en ait mal à la gorge, elle veut lui crever les tympans, à ce bienaimé, elle veut qu’il ravale toutes les méchancetés, elle veut qu’il l’aime, comme tout le monde. Parce qu’il est trop con, Jed. Parce qu’il n’est pas tout le monde, Jed. Parce qu’il est personne, personne pour elle et personne, même personne a besoin d’être aimé. Parce qu’elle ne veut pas se transformer en Jedediah, à la longue. La version non biblique, qui boit l’amertume par litre et la dégueule aussitôt sur les autres. Jedediah & Beaumont ou les deux, tous seuls. C’est tellement pathétique. « J’ai froid, file-moi ta veste » - lance-t-elle, sans transition aucune, au moment même où l’idée lui traverse l’esprit. Évidemment, elle s’attend à ce qu’il obéisse, comme obéissaient ses laquais, les assistantes, les membres du staff, tous ces pions qu’elle respectait et avec lesquels elle se montrait si déférente. Maintenant, elle regrette, elle regrette sa stupidité, sa gentillesse, l'cœur qu’elle porte souvent sur la main. Elle regrette tout. La scène, le Savannah, Savannah. Elle regrette Bella. Elle regrette Beau. Elle regrette les projecteurs et tous les flirts qu’elle n’a pas eu, à cause de tout ça. Alors, elle accélère le pas, le bruit résonne, c’est celui de ses talons et probablement aussi celui de tous les regrets. Celui du micro qui se fracasse, celui de ses pleurs, celui de la porte claquée. Dedans, elle y retrouve le rire de Bella, les paroles de Jedediah. (…) Elle pousse la porte d'un bar, évitant soigneusement le sébum accumulé sur la poignée. L’endroit est médiocre donc, parfait. Elle y pénètre et se précipite dans un coin, à peine éclairé par les spots incrustés au plafond. Installée, elle croise les bras devant elle, y pose son menton. « Je crois que t’es pas le psy le plus conventionnel qui existe et que, tu mériterais franchement une place de choix dans l’enfer d’un asile. D’ailleurs, après ces verres, c’est la fin de la trêve, profites-en bien, j’ai l’intention de protéger Anca de tes comportements déviants » - ouais, il lui arrive encore de faire un plus un et de tomber sur le résultat exact, à l’occasion.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Lun 29 Aoû - 23:16 | |
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The Kind of Queend You'd really love to slap the ass Jedediah ne sent pas le regard de Beau sur lui, pour une fois, il glisse sur son indifférence façonnée tandis que sa concentration est ailleurs. Silencieux, il marche, en regardant ses pieds, en regardant le bitume amer qui défile comme une traînée de poudre grise. Il aurait aimé un chemin de briques jaunes, un jour, sous ses pieds, mais jamais d’autre couleur que celle du sang ne s’est mêlée au noir amer de la saleté du goudron, et pourquoi cela changerait-il ce soir, pense t-il. Beau marche en rythme sur ses pensées, le bruit de ses talons est agaçant mais collé dans un coin de sa tête qui n’en a qu’une demi conscience. S’il savait que, soudainement, la jeune fille éprouve pour lui un intérêt curieux, il partirait en courant dans la direction opposée. Parce que ses cicatrices, il a décidé de les garder pour lui, enfouis au tréfonds de sa boîte à secrets, recouvert des mouchoirs gorgés qui lui ont servit à éponger ses crimes. Et que pourrait dire une Beaumont sur un passé comme le sien ? Jedediah a pour les haussements de sourcils incrédules, les nuages assombris des regards troublés et les exclamations choquées un mépris profond. Sa vie, désormais, c’est lui dans un asile, dans une chambre d’isolement, avec Elliot, avec Anca, lui dans son cabinet avec Blake, a remettre debout à coup de criques de pauvres gamines éperdues, pendus, jetés par terre, coupées au sang.
L’image de Tobias le frapperait sans doute dans son mensonge, Tobias au centre de son univers quotidien, Tobias étalé sur le canapé de son salon, gobant machinalement un sachet de pop corn instantanés qu’il a versé dans un verre à whiskies, télé allumée, un flingue posé sur la table basse, à côté de son pieds. Tobias, cette sale engeance d’une époque révolue, balancée aux trous profond de la loi en même temps que sa morale et ses idéaux. Détruit en même temps que le respect des règles : personne ne parle, personne ne balance.
Face à une Beau, Jedediah n’aurait pas grand crédit à raconter ses méfaits. Et face à lui, peu de plaisir à s’infliger une comparaison brutale entre sa paisible vie actuelle –à en crever d’ennuie- et l’adrénaline du passé.
Jedediah jette un coup d’œil à Beau, qui marmonne de son côté du trottoir, par dessus les coups de butoir de ses aiguilles à tricoter –ses marteaux piqueurs, selon Jedediah.- Solidaire à lui même, il écoute l’énumération, en sentant le coup venir comme un sent le vent se lever, avec l’anticipation précoce de la gifle désagréable qui va suivre. Et Beau ne le loupe pas, évidemment. Comment demander à une gamine capable de vous citer la bible –encore une attitude qui met Jedediah mal à l’aise. En bon sicilien, il connaît ses versets, mais les lectures intempestives d’un certains parasite en robe noire lui rend la référence moyennement agréable- de ne pas aller au bout de sa pensée ? Certes, il l’a mérité : jeter un micro contre un mur et traiter de traînée celle qui tentait de s’égosiller dedans avec de nettes intentions pacifistes ne fait pas respecter le fait de s’être fait appeler Bienaimée. Et si seulement Beau pouvait imaginer un instant que ce prénom, c’est Jedediah lui même qui l’a choisit, pour se débarrasser de l’autre prénom, celui que Tobias lui murmure en continue… Si elle connaissait l’ironie de son identité entière, de la pointe du J au bout du e, des fondations de Jedediah aux flèches élevées d’Innocente, sûrement rirait elle, scandalisée.
Mais c’est la raison exacte pour laquelle Jedediah Innocente a remplacé Alijah Feliciano. Pour ne jamais oublier à quel point il est méprisable de trahir une règle, même dans l’indécence, et même face à la mort.
Il jette un coup d’œil à Beau, et pour toute réponse, pince les lèvres. A quoi bon lui dire, « si tu savais ? » A quoi bon risquer une conversation qu’il n’a, pour rien au monde, envie d’aborder, encore moins d’avoir, mieux vaut se taire. Mieux vaut accepter que la sale petite garce connaît la bible sur le bout des doigts, l’étymologie hébraïque, et qu’elle se fou de sa gueule. Après tout, elle a raison, et Jed est d’accord avec elle, profondément. S’il n’y avait pas derrière ce choix un cynisme sardonique profond, elle aurait raison. « J’ai froid, file-moi ta veste », dit Beau tout à trac, et Jedediah se surprend à avoir n instant d’hésitation.
Soudainement, Beaumont ne semble plus si grande, sur ses escarpins. Elle marche à sa hauteur, et elle à l’air frêle comme une baguette de bois tendre, qu’on pourrait briser en deux d’un coup du tranchant de la main. Ses yeux sont baissés et une tristesse mystérieuse englobe ses iris éloquents. Les commissures de ses lèvres ne jouent plus à cache-cache entre la colère, la peur et le sarcasme, ils se sont juste affaissés un peu, dénué d’énergie, plongés en même temps que les pensées de la jeune femme dans une autre dimension dans laquelle Jedediah n’est pas invité à la suivre. Il se demande d’où lui vient toute cette mélancolie, il se demande pourquoi Beau semble enveloppée de nostalgie et surtout, il se demande ce qu’elle peut regretter.
Il voit Beau marcher dans la rue, décomposée, et elle semble à des années lumières de là, comme une poupée mal incrustée sur un décors en carton pâte. L’image le frappe étrangement, l’impression subtile qu’elle ne convient pas à ce qu’elle a autours d’elle, comme si son corps n’en faisait pas partie. Il se demande ce qui lui donne cet air hors contexte et sauvage, petite lionne mal apprivoisée, mal adaptée à un environnement nouveau. Son accent est si fort, il fait échos à celui de Jedediah, à chaque fois qu’ils s’éructent au visage des saloperies gratuites, les inflexions de leurs voix communes, les syllabes composites qu’une région fait vivre avec plus de vie s’entremêlent et les rapproches l’un de l’autre, dans la plus parfaite inconscience.
Jedediah va retirer sa veste pour la donner à Beau, mais elle accélère le pas. Il interromps le geste qu’il s’apprêtait à esquisser, et se ravise.
(...)
Le bar est puant. Pour rien au monde, Jedediah n’aurait choisit celui là, mais Beau est décidé, elle a poussé la porte et s’est jeté à l’intérieur. Il bloque l’entrée avec son pied pour éviter de toucher la poignée, qui ne récolte de sa part qu’une légère grimace de dégoût avant de claquer sourdement dans son dos. Il suit la gamine entre les tables, et jette à droite et à gauche des regards incertains, agressifs et dégoûtés. Lumière fade, faces jaunes de clients tardifs que Jedediah met au défi de troubler leur « tranquillité ». La table n’est pas propre : restes d’une soirée, les liquides s’entrecroisent dans les veinures du lino ciré et créent des motifs, témoins d’une cuite. Des fragments de nourritures éparses : chips, gras de porc, morceau de fraise. Jedediah jette un regard au siège avant de s’asseoir, et préfère retourner entre ses doigts un dessous de verre épargné dont il s’est saisit par réflexe, plutôt que de risquer le contacte de ses coudes à la table.
Toute son attitude réprouve le choix de Beau, qui ne semble pas porter à son avis un intérêt profond. « …j’ai l’intention de protéger Anca de tes comportements déviants. » Lâche t-elle avec brutalité. Jedediah la fixe et Beaumont, dans son esprit, se transforme immédiatement et devient Beau, Beau l’amie d’Anca, Beau la protectrice, Beau l’ange gardien, Beau la stupide meilleure compagne, Beau et ce stupide hasard, Beau et le début d’emmerdes et de comptes à rendres.
Jedediah éclate d’un rire larvé de nervosité, comme un fou rire bref et intense. L’absurdité de la situation, sa malchance, transforme son irritation en une traînée inflammable excédée qui explose dans la seconde d’hilarité qui le secoue. La courte vie de son rire prend fin progressivement. Jedediah commande deux whiskies, sans s’inquiéter de savoir si Beau consommera le sien ou non : il assurera derrière si elle préfère se la jouer petite fille. Il la considère lentement, sans trouver touchant l’affection qu’elle manifeste spontanément pour Anca.
- Je suis certain de ne pas vouloir ton avis sur la question, Beaumont. » Le prénom sonne comme une moquerie. « Tu vas gentiment me laisser faire mon travaille sans jouer à la petite moralisatrice, que tu ne peux pas te permettre d’être, et considérer qu’éventuellement, Anca supporte très bien mes méthodes. » Le verre arrive juste à temps pour lui permettre de ponctuer sa phrase d’un geste vers la direction de Beau. « A la tienne. »
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Mar 30 Aoû - 13:38 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway
Il y a des personnes comme ça, elles viennent faire des percées à travers les nuages, projetant leurs rayons nocifs jusque dans la substance profonde. Un matin, on s’appelle Beau Decker, on mène une existence en apparence assez lisse, assez terne, on se contente d’exister , de le faire ,au moins, en trois dimensions. Être humanoïde, rampant à la surface d’une terre dont on ne connaît pas le dixième de ce qui la compose, fort d’une expérience risible en tant que bécasse poussant la chansonnette et gagnant des millions de dollars, à simplement porter un short trop court, des cheveux trop longs, trop blonds. Puis, un soir, une de ces personnes lance ses rayons et vous corrompt la moindre particule, comme une déité malfaisante ayant promis de gâcher les bords de cette vie lisse et terne. Beau observe Jedediah. Beau regarde Jedediah. Beau contemple Jedediah. Beau est soumise à ses rayons nocifs et comme un plant de maïs, voit quelque part, sa matière génétique, subir une importante mutation, sans que l’ombre d’un soupçon ne vienne saluer sa petite personnalité et sa subtilité de fermière. Le serveur est bedonnant, sa chemise est tâchée au niveau du troisième bouton, ouverte jusqu’au second, des poils dépassent d’ailleurs, Beau retrousse son nez. Il dépose deux whiskies devant ses yeux, le liquide ambré lui rappelle les nuances qu’elle a pu capter, dans le regard du bienaimé, comme des facettes planquées derrière l’indolence. Elle serre les mâchoires, broyant les invectives qui ne veulent qu’une seule chose, attaquer sa petite gueule de psy barré, avec tout l’amour qu’elle ressent pour lui à cet instant. A chaque fois qu’il ouvre la bouche, elle n’entend rien que des sons tranchants, des moqueries acides, la condescendance d’un homme qui se croit au dessus de tout. Un corrompu. Un gros pourri qui se targue d’une vie dont il connaît jusqu’aux coins les plus sombres. Il la domine et sous le feu de son regard, elle aimerait aller s’enterrer dans un trou d’souris et n’en sortir qu’après avoir réussi à s’endurcir, au moins autant que lui. Mais, Beau, avec ses ongles bien manucurés et sa lèvres fendue, son œil avalé, elle sait qu’elle ne recherche pas ce genre d’emmerde. Et pourtant...« Crois-moi, Bienaimé, je peux me permettre d’être des tas de choses » - tique sur une de ses couilles, par exemple, si l’envie lui prenait, elle ricane , haussant les épaules. Elle tend le bras, attrape du bout des doigts le whisky, le ramenant vers elle, dans un bruit de verre contre du lino bon marché. La table est assez craspec, elle aurait mérité un coup de chiffon. « J’sais pas si j’ferai pas plutôt mieux de te l’envoyer dans la tronche, ce whisky. Ça pourrait t’faire ravaler tes moqueries et désinfecter tes plaies » - ça sert à ça, songe-t-elle, des ongles portés longs, aguisés comme des griffes qui peuvent laisser quelques traces, rappelant au bon souvenir d’individus aussi fourbes que foutus, la belliqueuse qui les leur a infligé. Mais, elle a aussi besoin d’aseptiser ses lèvres, sa bouche qui en a dit, des énormités. Peut-être qu’en rentrant, plus tard, en se laissant tomber sur son matelas, elle récitera vingt « je vous salue Marie », espérant décrocher un brin de redemption. Avec des « peut-être », des « et si », elle pourrait refaire le monde à l’image du truc guilleret qu’elle s’imagine parfois, quand elle joue les idéalistes. Au fait, le monde a depuis bien longtemps cessé d’être son terrain de jeux pour n’être qu’un endroit incrusté de barrière à enfoncer. Des obstacles, des rayons nocifs. Des Jedediah en puissance. Minée, elle porte le verre à ses lèvres, boit une gorgée conséquente, quasiment les deux doigts d’liquide versés au fond.Elle réprime un cri de douleur lorsque le liquide entre en contact avec sa chair endolorie. Elle le laisse traverser sa gorge, son œsophage, atteindre l’estomac et avec toute la patience, espère qu’il aille jusqu’au foie, jusqu’aux centres nerveux , qu’elle se désinhibe davantage, pour donner au brun un peu plus de grains à moudre. Et tout à coup, en croisant un regard, celui d’un gars, assis à deux tables de là, elle se dégoûte, se voit en lui. Elle s’abhorre. Elle veut courir et, aussi, rester, exactement là, assise face à la misère humaine, se laisser imprégner de toute la cruauté qu’elle décèle en ce Jedediah. Pourquoi, parce que. « Je reviens » - elle se relève, le carrelage par terre tourne, elle se rattrape au dossier de la chaise sur laquelle elle était assise. Dans les toilettes, devant le miroir , qui a surement connu des jours meilleurs, elle ne reconnaît pas le visage qui lui fait face. Qui c’est ça ? Surement pas la nana qui s’est hissée à la première place du classement Maxim, sans avoir eu à montrer un seul téton. Surement pas celle qui a failli gagner l’élection de Miss Texas, six ans auparavant. Des traits boursoufflés, un regard vitreux. C’est Beau qui agonise. Elle tourne le robinet, l’eau s’écoule, le débit lui rappelle qu’elle aimerait prendre une douche. Elle se contente de se rafraichir le visage, la nuque, les genoux. Des trainées rouges serpentent, rejoignent les canalisations et sont emportées à travers la ville. (…) « Tu as cru que j’allais me faire la malle, Bienaimé ? » - elle répète, elle appuie exagérément sur ce surnom, cette traduction puriste d’un prénom qui le fait tiquer. Il a ce tressautement, léger, de la paupière droite, lorsqu’elle le prononce. Bienaimé, bienaimé, bienaimé, salaud. Elle se rassoit. « Est-ce que ta proposition inclus un burger ou pas ? C’est que je commence à avoir les crocs » - elle jette un regard, à ce gars, assis à deux tables, il ronfle, une miette collée à la joue. La chanteuse aimerait aller la retirer, cette miette qui la nargue. Elle se retourne à nouveau vers Jedediah, grognant de frustration. « T’as un diplôme, au moins ? Ou t’as trafiqué quelque chose pour l’obtenir ? Je suis curieuse, tu sais, je trouve assez bizarre qu’un alcoolique notoire ait encore le droit d’exercer. C’est le genre de travers qui ne pardonne pas dans la profession » elle sourit, à la manière de cette miette, elle aussi, elle le nargue. « Tu m’as tout l’air d’un parfait charlatan ».
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Mar 6 Sep - 1:18 | |
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The kind of Queen You'd really love to slap the ass
Il n’a pas conscience que deux yeux le sondent avec l’intention de mettre à jours les moindres plis de son intimité, petite curiosité scrutatrice de sa conscience, exploratrice de ses habitudes, juge de ses désirs. Il ne pense avoir en face de lui qu’une Beaumont moyennement intéressée par le vieux type qu’il est, sans doute méprisante à l’égard de son image de vieil alcoolique aigris. Jedediah comprend ça. Il ne ferait pas autrement, s’il était une pimbêche de vingt-quatre ans montée sur talons pupute-brand, le visage tuméfié, la faute à un vieux salaud. Il ne se sent ni acariâtre, ni impressionnant, le cul posé sur sa banquette collante de crasse, le regard d’un serveur qui, clairement, pense qu’il tente tant bien que mal de se faire Beau braqué sur lui. Il se sent con, simplement con. D’être là, les bras croisés, le verre de whisky a portée de main, d’une main qui a collé une beigne à une gamine inoffensive pour une histoire à la con.
Ca lui rappelle des tas de scénarios excitants et sordides. Ca lui rappelle ce type descendu à coups de talons Gucci pour avoir dit le mot de trop, mal tourné sa phrase. Une erreur de communication à chaud et ils l’avaient enterré avec la pelle du jardin dans l’ombre d’une nuit complète. Une époque ou pour presque rien, les couteaux volaient, les poings s’écrasaient dans les mâchoires, et où on mourrait d’une main qu’on pensait amie.
Jedediah dévisage Beau, et leur altercation lui semble stupidement irréelle, comme une espèce de blague sans importance et sans valeur propre. Il aimerait lui dire écoute, Beaumont. Je suis fatigué, et toi aussi. Je te demande pardon d’avoir agis stupidement, rentrons chez nous, nous n’avons pas besoins de nous rendre plus malheureux que nous le sommes. Il aimerait lui dire ces mots, exactement ces mots, mais tout ce qui sort de ses yeux est une vague lassitude couverte d’irritation maîtrisée. Un air de vieux père blasé, c’est tout ce qu’il est capable de faire passer sur les traits de son visage. Il sait de toutes façons que son égo ne supporterait aucune des voyelles qu’il sent danser dans son cœur, et que la fierté de Beau n’est pas prête à les entendre non plus.
Parce qu’il la dévisage, et il la voit, sa fierté. Peinte en blanc sur un fond noir de suie, qui s’illumine comme une fusée de détresse. Il voit sa moue outrée par principe, ses gestes un peu dégoûtés, à la fois de l’endroit, de la situation, et d’elle-même, dirait-on. Son coup d’œil définitivement dirigé vers un espèce de passé sordide que Jedediah se prend à inventer. Ancienne actrice porno ? Beau a l’air à la fois si propre sur elle est si profondément souillée, d’un geste de la main elle balaye toutes supposition et les transforme en fantasme. Insaisissable Beaumont.
Jedediah sourit sans sourire, avec une facilité qui laisse penser qu’il a oublié comment étirer ses lèvres dans le bon sens pour rendre un effet agréable. Il se sent tendu, comme toujours. Il s’analyse par réflexe et arrive à la conclusion qu’il s’en veut de s’être mis dans une situation stupide, et qu’il ne supporte pas de s’être donné en ridicule.
- Tu peux toujours essayer, Beaumont. Si tu tiens à ce que je symétrise ta joue droite avec la gauche. » Il a le regard mauvais, stupidement irrité par ce nom qu’elle lui donne. Il a la désagréable impression d’avoir Tobias en face de lui, trop heureux d’enfoncer le couteau dans la plaie, sans réplique possible car cette plaie c’est lui qui se l’est infligée graduellement.
Elle n’en fait rien, la douce Beaumont. Elle garde son verre pour elle, et se contente de le boire, dans un geste sec et précis qui prouve qu’elle possède dans le domaine une certaine expérience. Par dessus son verre, Jedediah l’observe, elle et ses cheveux de lionne attachés n’importe comment, elle et ses bras velouté exempt des marques qui recouvrent ceux d’Elliot ou d’Anca. Il plisse légèrement les yeux, et croit déceler quelque chose de mystérieusement inquiétant chez elle. En plus de sa propension absurde à se glisser avec plaisir dans les situations dangereuses, s’il en est, Jedediah a déjà scruté avec un intérêt discret sa réactivité face à la violence.
Elle se lève « Je reviens. » Il fait un geste vague, comme pour lui signifier que cela n’a aucune importance. Il se demande si elle va avoir l’intelligence de s’enfuir par la fenêtre. Et sans sourire, il se dit que non, qu’elle ne le fera pas. Il voit très précisément chez Beau ce besoin de se complaire dans des situations étranges. Suivre un vieux type avec qui elle s’est battue dans un bar, à trois heures du matin, ivre, tuméfiée, alors que dans ses yeux flottent un instinct de défense perçant vis à vis de Jedediah qu’il a vu scier leurs échanges comme un coup de couteau dans l’air, n’est pas un épisode auquel elle donne une double fin. Il sait qu’elle va revenir, comme reviennent ceux qui ont besoins de se sentir vivant grâce à l’angoisse ou la douleur, parce qu’il pense comprendre dans Beau ce besoins absolu de se sentir en contrôle.
Quel contrôle exactement, il l’ignore. Son attitude ne ressemble pas à un besoin sexuel, même si son extérieur pourrait le nier. Mais jamais Jedediah ne s’est senti échauffé par Beau, qui met dans la vulgarité de sa tenue un maintient pleins d’une retenue que le balancement de ses hanches ne parvient pas à dissimuler totalement. Il pense que Beau tente de garder un contrôle globale sur une vie qui lui échappe, et il se demande quel a bien pu être l’élément déclencheur de cette perdition profonde.
Lorsqu’elle revient, échevelée, défigurée sous le néon transfuge, l’évidence le frappe avec une force nouvelle. Il voit Beaumont au stade un de la solitude, à l’aube de la conquête de la destruction sur son psychisme à la dérive, sur son physique dérouillée par la brutalité de son entourage. Jedediah en fait parti, il se demande pourquoi, pour quelle raison évidente il s’en est pris à elle, et se dit qu’il est probable que ce soit parce qu’elle ressemble à Elliot. Et instantanément, il se sent pleins d’une honte stupide et profonde, de n’avoir pas su contrôler ses réflexes bestiaux, résultat de trente ans passés à jouer au mâle alpha parmi les seigneurs les plus violents de l’Amérique. De n’avoir pas su se contrôler à cause d’une obsession morbide pour une ancienne patiente. Pour une stupide passion amoureuse de collégien. Jedediah se sent stupide et sale, et voudrait faire cesser l’entretient mais la voix de Beau le ramène à la réalité, l’emprisonne, et il se dit qu’il va rester là, connement, parce qu’il va avoir l’impression, en discutant avec elle –en échangeant leur glaviot pleins d’insultes- de pouvoir racheter sa faiblesse.
- Non. Tu es incapable de te faire la malle. » Il l’affirme parce qu’il sait désormais avec une certitude professionnelle que Beaumont prend plaisir à se confronter aux sordides échanges d’une situation absurde. S’il connaissait les causes, il saurait que sans doute, la jeune fille essai de réparer une fuite énorme par une série de confrontation. Qu’assumer ces rencontres dans la nuit lui donnent la sensation de n’avoir pas trahis son propre courage. Jedediah fait un geste pour se saisir d’une carte, et fait signe au serveur, qui comprend par habitude d’être feignant, que Jedediah lui désigne le plat demandé par Beaumont, sans détours. Il repose la carte et croise les bras, son verre posé devant lui, à peine entamé. « Tu sembles bien la connaître, la profession. Qu'est ce que tu peux me dire d'autre à ce sujet ? » Interroge t-il sur le ton de la conversation. Il est réellement curieux de pousser Beau à lui donner des indications sur les connaissances quelle possède. L’orienter à son insu pour qu’elle se dévoile. Il hausse les épaules avec un mince filet de sourire sardonique coincé au bout des lèvres. « Bien entendu. La manipulation est par définition un art de charlatan. Mais charlatan reste un métier. Tu en sais quelque chose.» Lentement, il pose sa main sur le verre, le soulève et fait doucement jouer les reflets, en scrute la perfection, la couleur profonde. « Construire un personnage, à peut près tout le monde sait le faire. Mais toi, c’est un peu différent. Tes déhanchés, tes shorts, ton vernis… Ce sont de très beaux artifices, charmants. Ton œuvre serait parfaitement achevée si tes invectives ne contredisaient pas chacun de tes gestes. » Beau à l’air pourtant relativement saine d’esprit. Elle ressemble plus à une petite souris perdue sur son propre chemin qu’à un cas d’école psychiatrique. « Ne te soucis pas trop d’Anca, lâche Jedediah en changeant de sujet avec la parfaite maîtrise de ce qu’il est en train de dire. Ca ne la pas tuée de me connaître. » Ironie, lorsqu’on sait qu’au contraire, Jedediah est son pilier de stabilité depuis qu’elle a frôlé la mort. « Tu ferais mieux d’utiliser ton énergie pour régler tes propres problèmes. » C’est une attaque directe, parce que Jedediah a senti que Beau avait des choses à régler. Beaucoup plus que ce que son mascara trop lourd et son rouge à lèvre ne laissent filtrer d’elle.
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| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) Dim 25 Sep - 13:12 | |
| Jed w/ Beau Dude, that song is freaking old, so is your mom. You still listen to her anyway Qu’est-ce qu’elle connaît de la profession, sérieusement ? Que dalle. Et, derrière le voile de ses paupières, il y a ses deux billes couleur merde qui la fixent, l’air de dire : je sais parfaitement que tu n’y connais rien, péteuse. Tout ce qu’elle sait, Beau, de cette profession où foisonnent les démagogues dont le seul but dans l’existence est de bécoter le pouvoir ( de toutes les manières possibles, en se vautrant comme des phoques dans des liasses de billets), c’est le confort de leurs canapés. Il faut dire que dans un monde comme celui-là, Beau en connaît un rayon sur « Comment gagner du fric en hochant la tête comme un de ces joujoux laids qu’on pose sur le tableau de bord d’une bagnole ». Se contenter de sourire, se contenter de vriller ses cordes vocales, se contenter de rester assise, en ne bougeant que les cils et la poitrine. Elle connaît la chute, surtout celle des décolletés qu’elle arbore. Tout le monde a compris qu’elle est sacrément conne, généreuse, naïve, d’ailleurs, quelqu’un devrait entamer les procédures pour pontifier la princesse et l’élever au rang de Sainte. La reconversion se révélerait étrange. Ses pensées sont décousues, elle a le regard qui se perd dans le vague, encore et toujours, comme le membre anonyme d’un cheptel, broutant avec nonchalance de l’herbe verte cent pour cent bio, garantie sans pesticides, en produisant, toujours avec nonchalance, l’équivalent de son poids en méthane, sans sourciller. C’est cool, se la jouer décérébrée. Ça permet de reposer les neurones. Ça permet de supporter la gravité des conversations et surtout, Jedediah. Elle ne risque pas de le reconnaître de si tôt, probablement ne le reconnaîtra-t-elle jamais (même s’il ne faut jamais dire jamais, selon l’adage), mais il l’émerveille, le sot, il possède quelque chose de chimérique. Son visage comme le résultat d’un patchwork indie sur lequel on poserait pas forcément les yeux, car considéré comme insignifiant. Elle y pose le regard, non, l'y renverse, invariablement, depuis plusieurs dizaines de minutes. Et même si elle ne le veut pas, il la captive et, c’est tout. Aucune explication à cela, aucune à sa portée. « T’as l’air de t’en sortir très bien » - siffle-t-elle, ne portant aucune attention au gars, muni d’une toque, qui s’affaire derrière le comptoir. Une odeur de friture s’élève aussitôt, son estomac se serre, ses tripes gargouillent. « Tu m’as percé à jour. Physiologiquement, ça doit te faire quelque chose, non ? » - elle penche la tête, joue avec la salière, l’abandonne pour le poivrier, qu’elle abandonne pour la sauce piquante. Elle la débouchonne et tire la langue pour y verser quelques gouttes. La réaction est instantanée, les papilles en feu, un sourire ourle ses lèvres. Comme au pays, comme là-bas, piquante, elle a le goût de celle que sa mère préparait. « Un pic de dopamine, d’adrénaline, un truc qui doit, j’sais pas, te conforter dans l’idée mentale que tu te fais de toi, celle d’un mec génial...ça te fait kiffer ? » - peut-être qu’elle va loin. Mais, elle sait également qu’ils sont déjà allés trop loin. Il y a cette sensation de viol de l’âme, qui la secoue, par vagues successives de faible amplitude. Il a mis le doigt, c’est bon, pile sur la petite plaie qui voit ses berges se désunir. « Tu sais,j’ai assez d’énergie pour régler les miens et ceux des autres » - par contre, c’est plus difficile de régler ses propres problèmes. Plus difficile de se montrer impartial, plus difficile, putain. Elle se penche, en avant, pour mieux se faire entendre. « Comme je te l’ai déjà dit, je n’ai pas besoin d’une session, je crois que je me connais suffisamment ». Elle s’éloigne, s’adosse à sa chaise pour accueillir le plat, préparé à une vitesse qui pourrait remettre en question la fraicheur de ce qui est servi dans ce boui-boui. Elle s’en fiche, ses colonies bactériennes internes n’attendent que ça, un bras de fer avec les saletés du coin. Elle n’attend que ça. Se battre. Parce qu’elle n’a jamais vraiment le courage de le faire. Et Jed, c’est lui, obscur, qui lui donne le courage de dire et de faire tout ce qui lui passe par la tête. A cet instant, elle veut manger. Elle s’empare du burger, ouvre grand la gueule et mord, mord. La sauce dégouline à chaque coin de lèvres mais vous savez quoi ? Elle a le courage de s’en fiche complètement. Elle s’en fiche, à sa façon. La façon Jedediah. Les travers éclaboussent. « J'imagine que c'est une déformation professionnelle, à force. Tu dois surement déceler des cas, dans chaque personne qui croise ton chemin. Et, cette déformation acquise, te pousse à vouloir en connaître la nature profonde. Parce que, telle ou telle personne n'est probablement pas née vulgaire, exhibitionniste, colérique. Pour toi, il y a forcément une explication à tout » - est-ce qu'il croit en Dieu ? « Ça doit être dur, supporter les monologues intérieurs, tous les jours, parce que tu ne peux pas faire autrement. » Elle, elle ne pourrait pas, elle finirait par s'abrutir à coup d'anxiolytiques, pour se donner l'impression d'être éthérée, zen. « Tu devrais manger des frites, c'est pas bon, trop d'alcool dans un estomac vide. A moins que tu vises la cirrhose à cinquante ballets, profites bien, t'as que dix ans de marge jusque là ».
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| Sujet: Re: King and queen (Jedeau) | |
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