▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
Je devrais pas, je devrais pas. Je sais. Mais j'peux pas tout arrêter comme ça. J'ai besoin d'une dernière fois. Entendre sa voix, juste une fois encore. J'ai besoin de lui parler en sachant que c'est la dernière fois. Je profite qu'ils soient tous dehors pour me dépêcher. Je n'ai pas beaucoup de temps devant moi avant que quelqu'un me repère. Je compose le numéro que je connais par cœur ; les mains qui tremblent. Je devrais pas. J'vais pas y arriver. J'peux pas faire ça. Ça sonne. J'veux pas qu'elle réponde. Ce sera plus simple si elle m'en veut au point de ne pas décrocher. Mais elle décroche et j'me sens pas bien.
— C'est moi. Bien sûr ; qui d'autre ? Je peux encore raccrocher, tout arrêter. — Avant qu'tu dises quoi que ce soit, écoute moi. M'écoute pas. Parle. Hurle. Insulte-moi. J'ai l'air sur de moi, la voix maitrisée et ferme. Et j'enchaine brusquement. Faut que j'commence par ça, sinon ça ne sortira jamais. — C'est terminé Nana, j'te quitte. Ma voix qui faiblit brusquement et mon corps s'immobilise, comme s'il était surpris de mes propres mots. Le souffle coupé, je regrette immédiatement. Je voudrais pouvoir retirer mes mots, mais c'est trop tard. Je pose ma main sur mon visage pour retenir le débordement d'émotions qui m'ébranle.
J’suis assise sur un banc ombragé par des arbres centenaires. La chaleur est écrasante ; j’ai du mal à faire un mouvement sans avoir l’impression de me liquéfier. Autour de moi ce sont les touristes et les autochtones qui s’occupent de la bande son. Eux et la magnifique fontaine à trois étages bordés de chérubins qui déversent leur bile cristalline. Je fantasme d’y plonger à poil. Mais comme j’ai aucune envie d’me taper un PV pour exhibitionnisme, j’reste plantée comme une conne sur les planches en train de tatouer mes cuisses nues. Un flic en patrouille m’observe de travers de l’autre côté de l’allée. J’ai l’impression qu’il est en train de s’demander quel genre de connerie peut bien me passer par la tête. Au même moment, mon téléphone se met à vibrer furieusement dans ma poche. « Un détenu de la prison fédérale Coastal cherche...» Le pouce appuie par réflexe sur le dièse. « Allô ? » Les syllabes sortent sableuses entre mes lèvres. « C’est moi. » Putain. J’me prends un coup de jus en partance du cœur. Il m’électrise tous les nerfs en me jusqu’aux cheveux. Les alentours ont disparu dans l’brouillard et y a plus que la brûlure de l’absence mélangée au soulagement apaisant qui comptent. J’voudrais me fondre au travers de ce coup d’fil invisible pour me couler contre lui. « Avant qu'tu dises quoi que ce soit, écoute-moi. » Ça m’fait taire efficacement. Si les premiers mots m’ont envoyé un shoot d’euphorie, à l’écoute des suivants je redescends instantanément. J’comprends pas comment ni pourquoi JJ est aussi sérieux. Et correct. Normalement c’est le ton qu’il prend juste avant de vous en mettre plein la gueule en sortant des insanités et vous prouver par a+b que vous n’êtes qu’une merde. « C'est terminé Nana, j'te quitte. » En effet, j’me prends le tsunami en plein dans la gueule. Et ce sont des insanités. Et j’me sens comme une merde. Y a plus d’amour dans ce qui m’anime. Juste une absence effroyable, comme si j’étais plus là. Plus vraiment. Mon palpitant saute dans le vide avant de se réincarner en marteau fou-furieux sous les côtes. A cet instant précis, c’est la colère qui s’met à rugir. Juste là, au creux des tripes en ruinant toute autre forme d’expression. J’regarde un mioche en train de se foutre le doigt dans le nez avec un regard désolation. Il est blond aux yeux bruns, avec des putains de bouclettes, mais j’ai l’impression d’y voir JJ. « ... quoi ? » Ma voix s’élève dans le combiné, étrangement rauque. Elle tremble mais n’a aucune intonation. J’veux lui faire répéter, juste pour être sûre. Oh non, t’as envie de raccrocher en lui disant d’aller s’faire mettre bien profond ! Oui, aussi. Mais j’attends. J’attends pour être sûre aussi –juste être sûre – qu’il a bien dit c’qui s’est échappé de sa bouche. Qu’il a franchi la ligne.
JJ O'Reilly
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▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
Son silence n'a jamais été aussi douloureux qu'à cet instant. Je reste le souffle coupé, en suspend. J'attends sa déflagration. Mais rien ne vient et ça me fait encore plus flipper. Jusqu'à ce que. — ... quoi ? Sa voix qui vacille un peu me percute trop fort, l'impact me fait reculer la tête du combiné le temps pour moi de reprendre mon souffle. Je passe une main sur mon visage, laisse retomber mollement l'autre main contre ma cuisse, celle qui tient le téléphone. Je me mords la lèvre inférieure et fixe le plafond quelques secondes. Puis je jette un coup d’œil autour de moi pour m'assurer qu'il n'y a toujours personne. Je ramène l'appareil à mon oreille. Le silence s'éternise entre nous et me laisse un peu plus fébrile à chaque seconde qui passe. — M'oblige pas à répéter.. Ma voix qui se brise. Parce que je pourrais pas. J'ai déjà eu du mal à le dire une fois, je pourrais pas le faire une deuxième. J'essaye de rester fort, d'avoir l'air sur de moi, mais tout s'effrite au rythme de mon palpitant qui se tord dans ma poitrine. Ma gorge se noue. — Écoutes si t'as envie de hurler et de m'insulter, traine pas parce que j'ai pas beaucoup d'temps devant moi ok ? Je redeviens nerveux, le souffle irrégulier que je n'arrive même pas à camoufler. Je ne sais pas faire semblant de toute façon, mes émotions sont toujours trop violentes pour que je puisse les maitriser.
Pendant quelques secondes c’est le blanc. Rien n’se passe en dehors d’un léger froissement dans le creux de l’oreille. Mon regard se perd sur ce qui m’entoure. Le soleil, l’eau qui chante, les gens. Des gens qui continuent à respirer normalement. Maintenant j’ai envie de me noyer dans la fontaine. « M'oblige pas à répéter… » J’reprends mon souffle. J’avais pas capté être en apnée. Ma main libre cherche fébrilement une clope à calciner dans mon sac, comme si ça allait m’aider. Elle tremblent autant que lorsque j’ai trop tapé d’coke mais c’est juste les nerfs qui lâchent. Sous mon crâne c’est la folie : tous les signaux clignotent sans que rien n’ai de sens. Et j’arrive pas à l’ouvrir. « Écoutes si t'as envie de hurler et de m'insulter, traine pas parce que j'ai pas beaucoup d'temps devant moi ok ? » J’essaie pourtant. J’comprends pas. C’est pareil qu’une équation à six inconnues qu’on me demanderait de résoudre. Les mots qu’il a prononcé n’ont strictement aucune signification. Ce sont des aberrations, un bug dans la matrice. J’les ai entendu plein de fois pourtant. J’les ai même dit aussi. Mais généralement c’était juste avant de s’envoyer en l’air sur l’oreiller de la réconciliation. Des paroles sans conséquences. Alors pourquoi là elles me paraissent affreusement réelles ? « T’es sérieux JJ ? Tu me… tu m’quittes ? » Ah, voilà. La rage, cette vieille amie, fait son grand retour. J’ai envie de vomir l’intégralité de mon corps. M’étaler au milieu de la foule, sur l’bitume brûlant en laissant un amas flasque de peau à côté. « Toi… Toi tu m’quittes ? » A force de l’dire ça va bien finir par rentrer ma grande. « Je… Après tout c’que t’as fait tu t’imagines que c’est à toi de rompre hein ? ESPÈCE DE CONNARD ! » Ça enfle brusquement. « TU SAIS QUOI ? T’AS BIEN RAISON, VA TE FAIRE ENFILER PAR TES POTES DE MERDES EN CELLULE ET ÉVITE DE M’REFILER UNE SALOPERIE ! » Et j’raccroche. Comme ça, sans signe avant coureur, j’reste comme une idiote avec l’écran vide à la main et les larmes qui dévalent. Le flic de tout à l’heure tend l’oreille. Il peut bien essayer d’écouter : l’électrocardiogramme est plat.
JJ O'Reilly
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▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
— T’es sérieux JJ ? Tu me… tu m’quittes ? Silence, je déglutis péniblement tandis que mes doigts se resserrent autour du combiné. Non j'suis pas sérieux, j'te quitterais jamais, t'es censée l'savoir putain. T'es censée le deviner. T'es censée me demander pourquoi je mens là. T'es censée me demander si quelqu'un a braqué un flingue sur ma tempe pour me forcer à t'dire ça. — Toi… Toi tu m’quittes ? J'éloigne le combiné de mon oreille une seconde, ça me brûle de l'entendre répéter ce foutu mot. Comme la pire des insultes. Quand je le rapproche, elle a déjà repris de plus belle, la rage qui fait enfin trembler sa voix. — Je… Après tout c’que t’as fait tu t’imagines que c’est à toi de rompre hein ? ESPÈCE DE CONNARD ! Je n'arrive même pas à m'énerver. Je reste tristement calme devant sa réaction, tout simplement désemparé. — TU SAIS QUOI ? T’AS BIEN RAISON, VA TE FAIRE ENFILER PAR TES POTES DE MERDES EN CELLULE ET ÉVITE DE M’REFILER UNE SALOPERIE ! C'est un peu trop pour que je me taise plus longtemps. J'ouvre la bouche pour rétorquer, le visage déformé pendant une seconde par une colère absurde mais très vite, avant même que je n'ai pu formuler un mot, j'entends le bip-bip qui raisonne, signe qu'elle a raccroché. Et je reste bêtement planté là, la bouche ouverte, coupé dans mon élan. Et ma colère qui n'a plus de cible contre laquelle s'abattre se retourne subitement contre moi, uppercut qui éclate mon palpitant déjà à moitié déchiré. Lentement, j'éloigne l'appareil pour le placer devant moi, le fixant, hébété. — Elle... elle a raccroché ? Elle a raccroché ?! Ça fait son chemin. — Putain la salope, elle a raccroché ! Montée d'adrénaline terrible, les doigts qui se mettent à trembler de rage et je commence à recomposer le numéro. Mais je ralentis progressivement et lorsqu'il ne me reste plus que le dernier chiffre je m'arrête. C'est pas une bonne idée. J'ai fait ce que je devais faire. Je me ravise et raccroche le combiné. Je continue de le regarder quelques secondes, déphasé. — Hey, t'as terminé ? Je sursaute et me retourne, dévisageant le prisonnier qui attend son tour. Je hoche la tête et m'éloigne, lui cédant ma place. Tout en réalisant que je viens également de céder ma place à un autre dans la vie d'Eanna. L'idée m'envahit, comme une douce torture qui prend son temps avant de m'achever. Et une partie de moi sait déjà que l'agonie sera sans fin. Alors je m'arrête devant deux gardiens qui discutent. L'envie de violence qui pulse dans mes veines. L'envie de n'entendre plus que les coups qui percutent mon corps pour faire taire tout le reste. Je me plante devant eux. — Alors les poulettes, ça s'encule ? Réaction immédiate. Carnage. Probablement le premier d'une longue liste.
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