dear diary, i think i'm a ghost → La rentrée est passée, il a déjà eu un test, en anglais, qui s'est incroyablement mal déroulé. Il s'est retrouvé, comme un con, devant les réponses du QCM, sans avoir la moindre idée de ce qu'il aurait du marquer, de ce qu'il devait écrire. Il s'est senti con, tellement idiot face à toute cette classe qui savait pertinemment que la réponse B était la bonne. Toujours la réponse B. Sauf que lui a un peu paniqué, il est resté bloqué à la première question au lieu d'avancer, et nous y voila, samedi soir qui suit le test, il est à la caisse, à minuit, en train de déprimer.
Et puis, à vrai dire, il ne fait pas que broyer du noir. Il se sent aussi extrêmement mal. Physiquement. Il se sent faible, dès qu'il se lève de sa chaise pour aider un client il a des vertiges, des vertiges qui ne font que s'amplifier, de minutes en minutes. Au moment d'éteindre les lumières du rayon des produits frais, il titube un peu, s'appuie à un rayonnage, regarde autour de lui, l'air hébété.
Il est seul, seul dans le magasin, et peut-être qu'il va mourir aujourd'hui, ça n'aurait aucune importance. De toute façon, il ne fera rien d'incroyable de sa vie, de toute façon il ne pourrait jamais prétendre à changer le monde, pas avec des notes aussi mauvaises, même avec tout l'acharnement du monde. Il a soudainement envie de s'effondrer en sanglot dans le magasin, mais il se ressaisit. Se souvient qu'on est samedi, qu'il doit aller dormir pour recommencer à taffer demain matin. Alors il se fout une baffe, rouvre les yeux, pousse un long soupir, pour évacuer tout l'air négatif de ses poumons. " Ca va aller." Rien ne va. Pourtant il se convainc du contraire, et il finit par ressortir, tambour battant, après avoir récupéré son sac.
Lorsqu'il veut appuyer sur le bouton extérieur pour baisser le rideau de fer, rien ne se produit. Il appuie, une nouvelle fois, une nouvelle fois. Rien du tout. Il peste un moment, retourne à l'intérieur pour prendre une chaise. Il monde dessus, et, à la force de ses bras, il tire le rideau vers le bas, de toutes ses forces. Il descend de la chaise, et finit par le faire atterrir au sol.
Lorsqu'il se redresse, il n'a aucune idée de ce qui lui arrive. Des points lumineux apparaissent devant ses yeux, et son crâne touche le sol.  

dear diary, i think i'm a ghost → La nuit et ces cauchemars qui lui donnent envie de passer sa vie éveillé, la nuit et ces pensées soudaines complètement déphasées qui viennent le hanter... Cam, c'est pas un mec de la nuit. Il déteste ça parce qu'en général, ça le met de mauvaise humeur de rester éveillé seul aussi tard. Il a tendance à penser à certaines choses, des choses dont il ne veut même pas entendre parler, des choses qui arrivent à s'introduire dans son cerveau et qui ne veulent plus le quitter jusqu'à ce qu'il ait à nouveau fermé les yeux. Cam, il fait comme il peut pour pas déprimer mais c'est compliqué. Ses parents sont pas là, minuit passé et il est pas encore couché. S'ils étaient là, ils seraient déjà en train de le disputer comme un gosse. Ils lui diraient que c'est pas bien d'être levé à cette heure-là, qu'il a pas le droit de se lever à plus de huit heures mais papa et maman sont trop occupés à se morfondre pour s'occuper de leur fils. Un gros sweatshirt sur les épaules pour le protéger du froid, le vieux jogging qu'il utilise toujours lors de ses cours de sports aux jambes avec ces jolies Air Max, il se balade dans Savannah tout en gardant la tête baissée, sa fine silhouette éclairée par les lampadaires faiblement alimentés de la ville. Il se sent pas bien, il a besoin d'être avec quelqu'un... Il s'est dit qu'aller rendre visite à Isaac pourrait être une bonne idée puisqu'il a l'habitude de bosser tard, surtout le week-end. Pourquoi Isaac ? Parce qu'il lui fait confiance, parce qu'il est l'un de ses seuls amis et qu'il bosse pas très loin de chez lui.
Quand il se pointe devant l'épicerie, Isaac est en train de fermer. Le plus jeune lâche un petit soupir, heureusement qu'il est pas arrivé deux minutes après, il l'aurait raté. Il s'approche silencieusement et ses pas se font de plus en plus grands, moins espacés quand il aperçoit son pote s'effondrer au sol après avoir fermé le grand rideau de fer. Immédiatement, il court vers lui, tout chamboulé. "Isaac ?" Il le regarde d'un air stupide, les bras le long du corps. Un vrai pot de fleur. Sa mère pourrait être en train de crâmer devant lui qu'il penserait même pas à essayer de l'éteindre. "I... Isaac ?" Il sait pas quoi faire, il est paumé. Est-ce qu'il dort, est-ce qu'il est tombé dans les pommes ? Est-ce qu'il est mort, merde ? Il perd pas plus de temps, il s'agenouille à ses côtés et le fixe le temps d'un instant. Son cœur bat encore, sa poitrine continue de se soulever... Il respire, bordel. "Ça va ?" qu'il demande bêtement, d'un ton pourtant très innocent avant de poser une main sur sa poitrine et de doucement le taper quelques fois d'affilée. "Réveille-toi, allez." Il pose son autre main sur son épaule, ses yeux deviennent humides. Il continue de le secouer brièvement. Il a pas de téléphone sur lui, il se sent impuissant. Quelle merde.