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| lost and insecure (Merlasher) | |
| Auteur | Message |
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donne coeur, pas cher, déjà utilisé ▹ posts envoyés : 1889 ▹ points : 16 ▹ pseudo : Unserious/Agnès ▹ crédits : WHI, tumblr, bazzart / avatar : balaclava / AES : moi / gif : camille ▹ avatar : Ben Barnes ▹ signe particulier : un accent de liverpool, un tatouage "bad" au creux du coude, et une chevalière à l'index gauche. oh, et totalement casher. en théorie.
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| Sujet: lost and insecure (Merlasher) Sam 3 Mar - 0:01 | |
| Pars pas.
Trop tard, c’aurait dû sortir avant, balayer la fierté, complainte dans le petit matin ensoleillé après l’escale en Floride, pars pas, trois jours plus tard c’était la Saint Valentin, fallait pas retenir les mots, fallait les dire tant qu’il était encore temps. Lui demander de rester, de ne pas l’abandonner, de ne pas faire comme tous les ielles qui l’avaient laissé, bousculé, tourmenté, qui s’étaient foutu de l’état dans lequel ils laissaient son cœur après une trop longue absence. Trop courte. Il avait prévenu, Merle, le temps de quelques jours pour prendre de la distance, pour se rappeler à l’un et à l’autre qu’ils n’étaient qu’amis. Quelques jours. Il ne faut pas tellement plus, parfois, pour que la vie bascule dans le noir, prenne un tour trop sombre, s’entrave sur ses propres pattes et se casse la gueule dans les escaliers. Il avait juste fallu un soir, un Toad en train de clamser sur son tapis à cause d’un Ezra disparu, un Caïn suspecté, une Lena, un bébé, les étoiles qui se percutent, collision lumineuse et stellaire. Bip de retour à la vie normale, celui du réveil qui sonne tous les matins, la routine quotidienne, se lever, bouffer, aller taffer, jamais rentrer très tôt et toujours d’une humeur exécrable. Surtout depuis que Merle est revenu. Vie verrouillée, cœur à l’abri, il a pris soin de se limiter au minimum d’échanges vital, bonjour et salut, fermé la porte de la chambre pour éviter qu'il ne veuille pioncer dans son plumard. C'est à peine s’ils se voient, en réalité, à peine s’ils échangent plus de trois mots dans une journée. Au début, Merle a essayé, a demandé des nouvelles, raconté des blagues. C’est l’absence assourdissante de réponse, le vide sonore qui a eu raison de sa patience, faut croire. Il avait prévenu, pourtant. Il avait prévenu et Asher ne devrait pas agir comme ça, comme un gamin mal élevé qui pense pouvoir prendre et ne jamais donner, qui croit que le monde entier lui est redevable de quelque chose même lorsqu’il se comporte comme le dernier des connards. Il ne devrait pas, mais c’est plus fort que lui. Pars pas, c’aurait été facile à dire, maintenant il n’y a plus que le tu m’as abandonné qui teinte ses iris, foutent des coups de poignard dans tout ce qui croise son regard, putain de chaussures moches, putain de sac à dos, putain de lapin, il aimerait que Merle se barre, peut-être, qu’il finisse par comprendre qu’il a commis l’impardonnable et qu’il vaudrait mieux qu’il continue sur sa lancée, qu’il ne s’arrête pas en plein élan, une énième échappée à la Elena, une nouvelle personne qui n’assume pas, un centième coup au bide, les lèvres qui crachent du sang. Il aimerait qu’il parte et il aimerait qu’il reste, terriblement, gauchement, comme on aime quelqu’un sans savoir le lui dire, comme on éteint les sentiments de peur qu’ils ne consument tout. C’est comme ça aussi, ce matin, quand il se réveille et que ses yeux regardent un peu trop longtemps le plafond, les ronflements de Merle qui lui parviennent du salon, même avec la porte fermée. C’est sa hantise. Sortir de la chambre et le voir pioncer sur ce bout de canapé, la bouche en cul de poule, à pas savoir s’il doit le saluer ou l’ignorer. L’ignorer, comme tous les matins. La danse monotone qu’exécutent leurs corps sans qu’ils ne les commandent, Asher qui sort de la chambre sans bruit, file à la salle de bain sans fermer la porte, prend sa douche en cinq minutes et ressort complètement habillé, pas de serviette autour de la taille ou de caleçon à peine enfilé. C’est pareil ce matin, à l’exception que Merle est toujours là lorsqu’il quitte l’atmosphère vaporeuse de la salle d’eau, lui qui prenait l’habitude depuis quelques jours de partir avant qu’il ne vienne prendre son petit-déjeuner. Ou son absence de petit-déjeuner. Ce sera le cas ce matin, bizarrement, l’estomac n’aura pas grand-chose à se mettre sous la dent.
Il laisse trainer les yeux une seconde sur lui, la silhouette encore endormie, sûrement pas du tout réveillée, à moins qu’il ne fasse semblant en attendant qu’il ait enfilé son blouson et pris le chemin du boulot. Pas ce matin, motivation au ras des pâquerettes, c’est plus une journée à regarder des films qu’à arrêter des criminels, congé oblige. Il ne lui a pas dit qu’il n’enfilera pas l’uniforme aujourd’hui, histoire d’avoir une solution de rechange si les choses se passent mal. Soupir au bord des lèvres, ne pas le laisser sortir, surtout pas. Manquerait plus qu’il réveille le beau au bois dormant. Le frigo n’est pas loin, coup de bol, qu’il attrape d’ailleurs dans le placard au-dessus de l’évier, verse le lait dedans de façon négligée avant d’y mettre deux poignées de céréales et de se percher sur le tabouret de bar. Une bouchée, il lui manque, deux bouchées, ça lui soulève le cœur. Trois bouchées et il se relève aussi sec, part aux toilettes pour vomir ce qu’il vient tout juste d’avaler. On ne lui avait jamais dit que la tristesse donnait un goût de merde à tout, faut croire qu’il est pas assez rompu à l’exercice, depuis le temps. Regard paumé dans la cuvette, il se redresse péniblement, échoue son regard sur le miroir face à lui, visage pâle comme celui d’un fantôme et marques noires sous les yeux. La fatigue, le stress, la dépression, le plus beau cocktail au monde, le plus fatal aussi. Il ouvre le robinet, s’essuie la bouche et se passe une main sur le visage. Il bouge pas, vaut mieux rester là. De toute façon, si la douche et le petit-déjeuner ne l’ont pas réveillé, y a de fortes chances pour que ses acrobaties gastriques aient bien réussi le boulot. « Merde. » Jambes chancelantes, il s’assied sur le rebord de la baignoire, regarde un instant ses mains qui tremblent. Et soupire, enfin, plus rien à perdre de toute façon.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Sam 3 Mar - 14:10 | |
| Certaines nuits, le regard rivé sur le plafond, Merle se demande si y a des chirurgiens pour les relations. Ou des nécromants. Il sait pas trop, il sait plus trop. Il sait juste que y a les bruits d’Asher dans la pièce à côté et qu’il arrive pas à dormir, il sait juste qu’il est comme ça depuis qu’il est rentré, il sait juste que tous ses efforts sont restés sans réponse. Il a foiré. Il sait pas où. Il sait pas quand. Il sait que c’est fait, pourtant, qu’il a appuyé sur la détente du flingue pressé sur la tempe de leur amitié et qu’il sait pas à quel moment ça s’est passé, si c’est la crise sur la route ou le retour silencieux, si c’est le fait d’être revenu, si c’est le fait d’être toujours là, si c’est le fait de pas être ce qu’Asher attendait, d’être difficile à vivre et difficile à aimer et difficile à supporter, si c’est le fait d’être stupide, si c’est les minces tentatives qu’il fait pour tendre la main, si c’est le reste, si c’est autre chose, si c’est une chose si arbitraire qu’il n’a pas la main dessus, quelque chose de si absolu qu’il ne pouvait rien faire. Peut-être qu’il a atteint le seuil de la patience d’Asher, peut-être qu’il a dépassé le seuil, peut-être qu’ils ont franchi le cap. Peut-être qu’il a encore perdu une pensée qui l’aime et tout son esprit se ferme, général shutdown de ses pensées pour essayer de fuir l’âpre réalité. Asher lui en veut. Asher le déteste. Asher l’ignore. Asher essaye de lui faire passer un message que Merle ne veut pas entendre.
C’est pour ça qu’il s’accroche. Parce qu’il sait que s’il part tout est fini, rien n’est rattrapable, parce qu’il sait que s’il s’en va, rien ne bougera plus, parce qu’il sait que s’il franchit la porte, Asher ne parlera pas. Pour ça qu’il reste même quand le silence est inconfortable, pour ça qu’il ne s’attarde plus avec Daria le soir, pour ça qu’il rentre directement, pour attendre, assis en tailleurs dans le salon. Il sait qu’il y laisse des plumes. Il sait qu’il mange moins. Il sait qu’il vomit plus. Il sait qu’il dort moins bien. Il sait, il sait, il sait, parce que ça s’accumule, parce que le mal être s’accentue, parce que tous les jours il prie pour autre chose qu’un bonjour, parce que tous les jours il espère qu’il se fera hurler dessus. Ce serait moins pire que ça. Ce serait moins pire que le vide. Ce serait moins pire que le silence. Il aurait une prise. Il aurait un angle. Il ne serait pas les mains vides et l’envie de pleurer au bord du cœur, l’impression d’avoir fait quelque chose d’irréparable mais de n’avoir aucun moyen de changer ça.
Il a trop dormi ce matin-là. Il a pas pu laisser la place à Asher, il a pas pu décamper avant de se retrouver inconfortablement coincé à ne pas savoir se parler. Il travaille pas, pourtant, mais il a prévu de traîner, de rester dehors, de lui laisser assez de place pour arrêter de s’imposer, arrêter d’empiéter. Il a trop dormi, ce jour-là, et c’est le bruit dans la cuisine qui le réveille, le pousse à enfoncer un peu plus son visage dans le dossier du canapé. Il veut pas se réveiller. Il veut pas affronter. Il veut pas continuer comme ça, faire semblant d’encaisser mais tourner en boucle, faire semblant de supporter puis pleurer dans les chiottes au boulot parce qu’il est incapable de gérer, parce que c’est une perte qu’il arrivera pas à tolérer, parce que son coeur joue aux montagnes russes depuis qu’il est revenu et que tout ça l’épuise, et que tout ça le rend malade. Il a pas le choix de se réveiller, pourtant, parce qu’il y a le bruit des pas précipités et un bruit familier dans la salle de bain, parce que tout son être le pousse debout, parce qu’il est incapable d’écouter en ne faisant rien, incapable de rester silencieux quand il entend ça.
Il marche vers la salle de bain comme vers la guillotine. Il marche vers la salle de bain préparé à se faire renvoyer paître, toujours en pyjama, toujours en t-shirt et en caleçon, toujours pas assez habillé pour l’ambiance tendue qui a envahi l’appartement, pour la distance soigneuse qu’opère Asher à présent. Ca a pas d’importance, à ce moment-là, pas vraiment, parce qu’Asher est assis sur le rebord de la baignoire comme s’il était prêt à se laisser tomber et que ça le pousse à s’approcher, les yeux encore embués de sommeil et les cheveux dressés en piques au-dessus de la tête.
« Tu devrais te rallonger. » Il murmure, doucement. « Si t'es malade, je peux faire du bouillon, pour midi, ou une connerie comme ça. »
Il dit pas bonjour, parce que ça a fini par s’ajouter à la liste des mots qui lui donnent envie de pleurer. Il dit pas bonjour, parce que c’est comme ça qu’Asher le vire de sa vie. Bonjour et puis plus rien, tentatives avortées de discussion de son côté et il finit par s’asseoir à côté de lui sur le rebord de la baignoire, pas trop près mais pas trop loin, le regard rivé sur la porte, prêt à s’échapper avant que les choses ne tournent mal, prêt à s’enfuir avant que ça ne tourne laid.
Ils ont été si beaux, pourtant.
« Tu me traites comme un inconnu. » C’est dit sans colère, sans accusation. Son ton est plat et il finit par secouer la tête, doucement. Il met les pieds dans le plat, comme d’habitude. Jamais au bon moment, jamais au bon endroit. « C’est sans importance. Laisse-moi t’aider. »
Laisse-moi être là. Laisse-moi avoir une place. Laisse-moi t’aimer. |
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| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Dim 4 Mar - 0:24 | |
| Crever, il aimerait crever. Ne plus rouvrir les yeux sur sa vie sans intérêt, sur les choses qu’il brise, les choses qu’il reconstruit, bringuebalantes coquilles de noix au vent, il aimerait se dire qu’il n’y aura plus d’autres occasions de tout foutre en l’air, d’autres heures à se griller les neurones pour trouver un énième moyen de ruiner ses proches. De se ruiner lui-même. Crever, il aimerait, quand Merle arrive et fait preuve de beaucoup trop de sollicitude, la voix douce, le timbre éreinté, il la connait cette fatigue dans les mots, dans les actes, perdant du plus long Roi du silence auquel ils n’aient jamais joué. Il ne mérite pas ça et il le sait. Il est conscient qu’il ne devrait pas lui faire la gueule, conscient qu’il est injuste, prévenu depuis le début des quelques jours de retraite, de l’éloignement imposé, pour ne pas se détruire, pour ne pas le détruire. Bout de chiffon dans la tempête, il se déchire quand le vent est trop fort, s’envole en petits morceaux au lieu de se mettre à l’abri. Stupide, il tend le bâton pour se faire battre, toujours. Mérite, mérite, mérite absolument chaque infime atome de ce qu’il lui arrive aujourd’hui, vieux connard qui essaie de se faire passer pour plus malin qu’il n’est. Déchet anéanti. Dégueulasse en plus, il se relève d’un mouvement brusque pour tirer la chasse quand il s’aperçoit qu’il ne l’a pas fait. Telle pudeur lui est étrangère. Asher n’a jamais été du genre à enrober la vérité d’un joli emballage, a toujours préféré la franchise nue aux jolis mensonges. C’est peut-être pour cette raison qu’il ne se reconnait pas parfois, lorsque Merle est là, lorsque dissimuler la vérité semble plus sage que d’enfoncer des couteaux dans des plaies déjà béantes, lorsque donner des couleurs pastels à l’image n’est plus un simple choix artistique mais une absolue nécessité. Il ignore pourquoi il ne fait ça qu’avec lui, pourquoi il se sent investi du devoir impérieux de le protéger, de faire en sorte qu’il ne lui arrive pas plus de mal. Y a déjà eu la prison, y a déjà eu la presque mort. Il est vivant, putain, il est vivant, il respire et il parle, et même s’il ne lui accorde pas un regard lorsqu’il se rassoit juste après avoir évacué les restes de céréales et de bile, ça lui fait un bien fou de le sentir vibrer à ses côtés, sur la faïence écaillée de la baignoire. Il est trop gentil avec lui, Merle, trop compréhensif, trop inévitablement présent, là, là, toujours là. Et s’il lui fait la gueule aujourd’hui, c’est parce qu’il lui a fait défaut une fois, une seule et unique fois. Injuste. Il voudrait lui dire de ne pas se préoccuper de lui. De l’oublier. De se barrer de ce putain d’appartement avec son lapin sous le bras, d’aller toquer à une plus jolie porte, de trouver une maison avec une plus jolie personne. Foutue rengaine qui se répète en permanence. Il avait dit qu’il ne se casserait pas et il l’a pourtant fait, nécessité ou pas, c’est pour ça qu’il lui en veut. Ouais, au final, il ne sait pas s’il est injuste ou s’il est simplement lassé des gens qui l’abandonnent, qui vont toujours s’échouer là où l’herbe est plus verte. Les gens qui le retiennent de crever alors qu’il ne le mérite pas. Il l’avait dit à Toad lorsqu’il était allé le voir à l’église, lui avait demandé pourquoi y avait toujours une main pour le retenir, pourquoi on ne le laissait pas crever s’il était aussi nul à chier, s’il était aussi peu digne d’intérêt, s’il faisait fuir toutes les personnes qui osaient l’approcher d’un peu trop près. Réponses bidon d’un pasteur déjà trop proches, à se cramer les ailes près de l’incendie de ses névroses. La boule au bord des lèvres, elle a trop enflé dans sa gorge pour y rester vraiment.
Il n’a pas écouté. Il n’a pas écouté parce que tout se bouscule, parce qu’il se revoit sur un banc d’église et dans les chiottes d’une boite de nuit et sur la banquette de Caïn, parce qu’il sent ses doigts sous les vêtements d’Elena et qu’il retrouve la sensation du bitume froid sous ses fesses alors qu’il attrape un petit être entre ses mains et le serre contre lui, trop fort, pas assez, trop près, jamais assez. « Je suis fatigué », il finit par souffler. Euphémisme troublant, il n’est pas simplement fatigué, il est au bout du rouleau, se balance à l’extrémité d’une corde usée qui menace de lâcher à tout moment. Y a une larme qui coule sur sa joue, fatigue, il l’essuie sans cérémonie, le plat de la paume qui passe rapidement sur sa joue, les yeux plantés droit devant lui. Lèvres tremblantes. « Mon ex a fait une overdose l’autre jour. » C’est encore frais, trop frais, une poignée d’heures à tout casser. Si Merle connaissait Toad, il pourrait lui répondre qu’il aurait dû le voir venir. Il aurait dû, effectivement. Dans un autre monde où il serait moins aveugle, où il reconnaîtrait les signes, où il saurait stopper la roue avant qu’elle ne tourne dans le mauvais sens et détruise tous ceux qu’il aime. « Il est vivant, ça va. » Ça ne va pas, pas vraiment. Ça n’ira pas tant que Toad refusera toute aide, lorsqu’il pressera des aiguilles contre sa peau. Ça n’ira pas tant qu’il n’aura pas un moyen de l’en empêcher, tant qu’y aura pas chaque parcelle de son être qui aura cramé pour insuffler de nouveau de la vie chez lui. N’importe quoi pour ça. N’importe quoi y compris le vouloir de nouveau alors qu’il avait délibérément choisi de laisser sa place au mari légitime. Alors qu’y a Merle qui est assis sur le même rebord de baignoire que lui. « C’est juste... quelqu'un que je connais a disparu, Caïn est suspecté, je », abattue en plein vol, la phrase, le sanglot qui l’interrompt, solitaire. Il humecte ses lèvres, comme si ça pouvait l’aider, « j’suis fatigué », il ajoute de nouveau, ça n’explique rien mais c’est une argumentation comme une autre. Qui va de paire avec la révélation suivante, les doigts qui se tordent sur ses genoux, stress palpable, envahissant, monstrueux. « Et j’ai un fils. » Certainement pas ce que Merle attendait.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Dim 4 Mar - 3:01 | |
| « Je suis fatigué » dit Asher et Merle a l’impression d’avoir déverrouillé quelque chose. Je suis fatigué, il dit, et y a son coeur qui se tord dans sa poitrine. Je suis fatigué et il lui parle, enfin, et c’est dur et c’est triste et ça fait mal, mais il parle, il parle, il parle et Merle reste immobile pour ne pas l’effrayer, pour ne pas le pousser dans ses retranchements, pour ne pas tout gâcher. Je suis fatigué, il murmure, et Merle connaît les reliefs du mot par cœur, ce qu’il cache, ce qu’il dissimule, l’abîme qui se cache au milieu. Je suis fatigué pour pas dire autre chose, je suis fatigué pour pas dire pire, fatigué de tout, de la vie, des gens, fatigué d’exister, peut-être, il sait pas trop, sans doute quelque chose qui ressemble à ça. Il n’ose pas le toucher, finalement, hésite, une seconde, quand même ; il appuie son épaule contre la sienne, à la place, presse, presse, presse, pour lui dire qu’il est là, pour lui dire que ça va, pour lui dire qu’il part pas, même si les mots se vrillent en lui comme des flèches un peu trop bien placées, une lame pour l’ex qui est vivant-ça-va alors que ça va, une autre pour Caïn et il se déteste de pas avoir pris des nouvelles dernièrement, une dernière pour la nouvelle qui tinte et qui résonne à ses oreilles et efface toutes les autres. « J’ai un fils » dit Asher et les yeux de Merle s’agrandissent, deux billes au milieu de son visage, quelque chose comme de la surprise au fond des pupilles, quelque chose comme de la joie, peut-être aussi, au milieu de tout ça, malgré tout, malgré ça. Il la dissimule mal et il le sait, n’essaye pas, au final, se contente de caser sa joue sur l’épaule d’Asher pour fixer une tâche en bas de la porte de la salle de bain qui ressemble à un mouton pour essayer de se décider sur ce qu’il va dire après, ce qu’il va dire ensuite, ce qu’il peut faire, ce qu’il va faire. Il sait pas. Il sait pas du tout. Il sait juste qu’Asher a besoin de quelque chose, n’importe quoi, et qu’il va devoir improviser, faire mieux, être mieux.
« Je suis sûr qu’il a hérité de ta gueule de bg de série télé. » Il balance, finalement. C’est presque sûr que c’est pas le truc à dire parce qu’il fait très systématiquement pas le bon choix, presque certain que c’est pas la bonne phrase ou le bon angle mais il sait pas quoi faire alors il opte pour ça, se laisse glisser du rebord de la baignoire pour s’asseoir sur le carrelage en face de lui et attraper ses mains pour les immobiliser, essayer de capter une seconde son regard. Il veut pas faire la conversation à un mur. Il refuse de jouer à nouveau à être transparent et y a ses doigts qui serrent ceux d’Asher aussi fort qu’il le peut et le sol beaucoup trop froid contre ses cuisses. « On va s’en sortir. » Il pianote gentiment sur le creux de ses poignet, un, deux, trois, quatre, cinq, six, dix, lui sourit, comme si ça suffisait à chasser le reste, comme si ça suffisait à dégager le ciel noir qui pèse sur Savannah ce jour-là. Évidemment, que c’est pas suffisant. Évidemment. Ça lui coûte rien d’essayer pourtant et il sourit avec tout ce qu’il peut, écorché et brisé et sale et écœurant, cassé, pété, fêlé et debout, les yeux rivés sur ce d’Asher depuis le sol. « Ça va pas aller. J’veux dire, c’est évident que ça va être pourri. Mais on va pas se noyer. J’suis content que ton ex soit vivant. » Et c’est sincère, et c’est écrit dans chacun de ses mots, et c’est inscrit dans toute son attitude. Je suis soulagé que ce type que t’aimes ait survécu, soulagé que t’aies pas ça à porter en plus, soulagé que vous ayez encore une chance de vous aimer, et il frotte doucement son pouce contre le sien pour attirer son attention. « Caïn est innocent. » C’est dit avec toute l’assurance du monde. Caïn est innocent, Asher, il dit avec les yeux, Merle. Suspect mais innocent, et c’est une évidence, Caïn ne peut pas avoir pris part à ça, parce que Merle le connaît, parce que Merle ne savait pas qu’Asher le connaissait mais qu’il sait que ça ne peut pas lui avoir échappé. « Tu le sais, non ? Vous allez forcément trouver quelque chose. Tu es compétent. »
Il y connaît pas grand-chose, Merle, à la loi. Il a vu tout New-York Unité Spéciale mais ça s’arrête à peu près là, il est pas sûr que ses incartades policières comptent ou que son séjour en prison ait été vraiment instructif. Ce qu’il sait, en revanche, c’est qu’il se jetterait du haut d’un immeuble si Asher le lui demandait. Ce qu’il sait, en revanche, c’est que tant qu’Asher sera sur l’enquête il y aura de l’espoir. Ce qu’il sait, en revanche, c’est que dans un monde parfait la justice finirait par être faite. Il a envie d’y croire, cette fois-là, juste une fois, envie d’être moins désabusé, pas envie de craquer. Il lâche les mains d’Asher, quand il a l’impression d’en faire trop, les range sagement sous ses cuisses pour éviter d’être tenté d’y revenir.
« Comment il s’appelle, ton fils ? »
Il lui demande pas qui est la mère. Il lui demande pas une photo. Il lui demande pas comment il a appris. Il lui demande rien de tout ça. Il lui demande comment il s’appelle et y a son coeur qui bat entre ses côtes, comment il s’appelle et il espère qu’il n’a pas l’air trop heureux, comment il s’appelle et il se rappelle des nuits passées à rêver d’avoir des enfants, des jours à rêver de fonder une famille. C’est stupide d’être si heureux, stupide de se focaliser là-dessus au milieu du reste et il se redresse, pour se rendre de la contenance, plante un baiser sur le front d’Asher, comme lui l’a fait lorsqu’il est venu sonner à sa porte, comme lui l’a fait quand il a tenté de le réconforter.
« Va te recoucher. Je te rejoins, okay ? »
Et c’est pas une invitation à plus. Et il lui offre pas son corps. Il lui offre juste un peu de réconfort, le peu qu’il sait encore donner. |
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| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Lun 5 Mar - 0:08 | |
| Elle est petite cette salle de bain. Il s’était déjà fait la remarque le soir où Niamh et lui avaient essayé de baiser dans la baignoire/douche, s’y étaient pris à trois fois, avaient essayé plusieurs situations avant d’en trouver une pas trop inconfortable, debout contre le mur carrelé, avaient limité les mouvements au minium pour ne pas risquer de casser quelque chose. Ils avaient constaté à leur plus grand malheur que l’ergonomie de la pièce ne permettait pas un agencement dynamique des personnes et des choses et avaient fini par adopter la banale position de l’union suspendue en désespoir de cause. Elle est petite, cette salle de bain, et elle l’est encore plus avec Merle dedans, Merle à côté de lui, Merle qui l’écoute, Merle qui s’assied face à lui et attrape ses mains. Merle fermement, définitivement présent, la sensation de manque bourgeonnante, feu d’artifice lorsque leurs doigts se touchent, il lui avait manqué, manqué, manqué, lui et sa voix et ses gestes, lui et sa douceur, lui et son soutien toujours aussi indéfectible même après tout ce temps, toutes ces semaines, tous ces mois. Lui qui ne lui en a jamais voulu, le fait culpabiliser de ne pouvoir lui offrir la réciproque parce qu’il lui en veut, putain qu’il lui en veut, pour les quelques jours où il a osé s’éclipser, pour les soirs trop sombres, les nuits à pleurer dans l’oreiller sans pouvoir être réconforté. Larmes de chagrin, Toad, de joie, Matei. Larmes de douleur, Ezra, perdu dans la nature, Ezra, seul et vulnérable, de colère, Caïn accusé, Caïn innocent, et Merle lui ment quand il lui dit qu’ils vont s’en sortir, il lui ment tellement qu’y a ses yeux qui se relèvent et se pointent sur lui pour la première fois depuis un siècle au moins. Il est beau Merle, quand il ment, y a son regard qui jette des étincelles, ses jolies lèvres qui esquissent un sourire, ses narines qui bougent légèrement, il est beau quand il ment et Asher aimerait avaler ses couleuvres aussi facilement mais il n’a jamais été très crédule, préférant qu’on lui crache la vérité même si elle fait mal, même si elle est moche, même si elle mériterait mille fois d’être déformée. Et visiblement Merle comprend, visiblement il perçoit, derrière les gestes et les regards, les mots informulés, me mens pas s’il te plait, alors il la donne la vérité, la jette à son visage. On va pas se noyer. Il aimerait être aussi sûr. C’est un putain de gros pari sur l’avenir, ça. Des risques qu’ils y perdent des ailes, qu’ils y gagnent des désillusions. Mais il ment bien, Merle. Il ment bien. Même quand il dit qu’il est heureux que Toad aille bien, même s’il le croit, au fond. Y a un truc qui sonne faux, qui donne l’impression d’un mauvais doublage, d’un décalé avec la réalité, les mots qui semblent creux lorsqu’il les prononce. Toad est vivant. Vivant. Pas de quoi s’attarder. Juste de quoi écouter, mâcher, digérer. Apprécier. Surtout lorsque le sujet change trop vite, quand le prénom de Caïn ressort. Y a une masse étouffante de sentiments qui submergent Asher, la colère terrible de savoir que des gens le penseraient capable de blesser quelqu’un, la culpabilité de n’avoir jamais parlé d’eux deux en présence de Merle, parce qu’il a le sentiment qu’il serait en droit de savoir, qu’il devrait avoir toutes les clés en main pour vraiment comprendre le tableau, savoir pourquoi il y a des non dans les oui du flic et pourquoi toutes les autres amours semblent aujourd’hui insignifiantes. « Bien sûr qu’il est innocent. » Ça coule de source, même pas besoin de le dire à voix haute, dans un milliard d’univers différents il serait toujours le même bougre incapable de faire le moindre mal à une mouche. Lèvres pincées, il devrait lui dire, tu sais y a eu un truc entre lui et moi, tu sais j’ai aimé, tu sais je l’aime toujours, il devrait avouer histoire d’en finir, que Merle se fasse une réelle idée de qui il est vraiment, le mec qui tombe amoureux de trop de gens, trop souvent, trop mal, mais il se ravise, baisse de nouveau le visage, regard sur ses chaussettes. « J’suis pas compétent dis pas n’importe quoi. J’sais pas comment le sauver. J’sais pas comment retrouver ces gens. J’suis bon à rien. » C’est vrai. Lui, Sid, tous les flics un minimum ouverts, un minimum impliqués. Tous aussi foutrement incapables de démêler le faux du vrai. Bizarrement, il est plus à l’aise lorsque les mains de Merle le lâchent, lorsqu’il peut recommencer à se triturer les doigts, à frotter désespérément ses paumes sur ses cuisses, geste nerveux, compulsif, parce que son ami évoque de nouveau son fils et qu’il n’avait pas bien écouté la première fois. Une connerie sur le fait qu’il soit beau gosse ? « Matei. » Voix éraillée, les yeux qui se lèvent sur Merle, ça ne sonne pas américain et il en tirera rapidement les conclusions qui s’imposent. Un prénom pareil, sur le coin, ça ne peut venir que des Popescu. Putain de Lena. « Il s’appelle Matei. » Trop de choses dans le cœur, c’est sûrement pour ça qu’il s’emballe, pour ça qu’il se jette dans la course en loupant des battements, les paumes rapidement trop moites. Il est sur le point de gerber de nouveau, comme s’il participait à la grossesse de la brune avec un an de décalage. Faible, tremblant. La proposition de Merle est accueillie les bras ouverts même s’il n’en montre rien, même s’il se relève sans faire de simagrées alors qu’il y a un putain de creux béant à la place de son cœur, au milieu de la poitrine. Ses pas le mènent à la chambre, il voit à peine le décor autour de lui. Tout est trop flou, trop blanc, trop lointain, même les sons qui lui parviennent d’un Merle à quelques mètres à peine. Il enlève les fringues qu’il vient juste de mettre, l’impression de nager en pleine gueule de bois, se glisse sous la couette. Compte patiemment les Mississippis dans sa tête jusqu’à ce que Merle arrive, se fraie un chemin à ses côtés. Ça a quelque chose de familier, quelque chose de douloureusement proche, il a une envie folle de s’accrocher à lui et de ne jamais lâcher, mains, lèvres, bras, le garder dans ses bras jusqu’à ce que mort s’ensuive, prétendre que le reste du monde a cessé de tourner. Tout serait plus simple. Il se tourne vers lui, l’observe. Toujours cette nausée au bord des lèvres, toujours cette voix sifflante du mec qui ne va pas bien mais qui ne veut pas l’admettre. « J’ai cru qu’tu reviendrais jamais. » Ce n’est même pas un reproche, juste une constatation. Il pose la paume contre la joue du gamin, se rapproche. Faudrait pas le pousser plus pour qu’il ait envie de l’embrasser, de s’oublier avec lui, contre lui. Ça serait si simple s’ils étaient réciproquement leurs seuls problèmes dans la vie. « Refais pas ça. J’t’en prie. » Et ça sonne comme une prière, oui.
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| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Lun 5 Mar - 2:43 | |
| Y a le mot innocent qui trébuche de la bouche d’Asher et tout le corps de Merle qui se détend, subitement, comme relâché d’une tension qu’il ne pensait même pas ressentir. Y a le mot innocent qui trébuche et Merle qui sourit, hoche de la tête, encaisse, sans moufter, le reste, la suite, Asher dépassé, Asher embué, Asher un peu flou. Merle le sait, lui, qu’Asher est compétent. Merle sait, aussi, qu’il ne sert à rien de discuter. Pas maintenant. Pas tout de suite. Pas comme ça. C’est pour ça qu’il ne dit rien, pour ça qu’il reste immobile, pour ça qu’il sourit, lorsque le prénom de son fils franchit ses lèvres, mateimateimatei, et ça tourne dans sa tête, mateimateimatei, et il se demande quelle fille Popescu a fait vibrer Asher. C’est forcément une Popescu. Enfin, pas forcément, mais certainement. Il ne pose pas la question, pour ne pas retourner le couteau dans la plaie, il ne demande rien, se contente d’absorber, de contenir, de retenir. Lorsqu’Asher daigne tituber en direction de la chambre, Merle part attraper une bouteille d’eau. C’est stupide, comme réflexe, mais c’est ce qu’il fait, lorsqu’il vient de vomir, boire beaucoup et espérer que sa gorge aille mieux, pas forcer, pas pousser. Il a pas peur, lorsqu’il se faufile à côté d’Asher, il a pas peur, lorsqu’il grimpe dans son lit, pas peur lorsqu’il se tourne vers lui, pas peur lorsqu’il ouvre la bouche, pas peur lorsque sa main trouve sa joue. Il a pas peur mais il a une douleur au coeur, une douleur au ventre, quelque chose d’aigu et de terrible, parce qu’Asher, lui, a eu peur et que la pensée lui donne envie de pleurer, parce qu’Asher est resté coincé des mois auparavant lorsque Merle a disparu pour ne plus jamais revenir, parce qu’Asher s’attend à ce que ce soit ce qui se passe maintenant et l’idée même lui est insoutenable. Il ferme les yeux, une seconde, appuie sa joue contre sa paume, un peu plus. Il partira pas. Il partira pas, il a promis. Il partira pas, il peut plus, maintenant, pas si ça veut dire l’abandonner, pas si ça veut dire le laisser derrière, pas si ça veut dire le trahir une nouvelle fois. Il se laisse glisser, contre le matelas, se cale contre lui, trace du regard son visage, les lignes fatiguées de ses yeux, tend la main vers lui, cette fois, pour glisser ses doigts dans ses cheveux, une seconde, les écarter de son front.
« Je suis revenu. » Il murmure et c’est stupide, stupide, stupide, mais il veut lui dire. Je suis revenu, parce que je reviendrais toujours, je suis revenu, parce que c’est sûr, certain, parce qu’il reviendra toujours comme le soleil se lève le matin. « Je t’ai promis, Asher. » Il lui a juré et il rampe, colle son front contre son épaule, soupire doucement. « Je suis désolé. » Désolé de lui avoir fait du mal, désolé de l’avoir fait souffrir, désolé de l’avoir fait douter. Il est pas désolé d’être parti, pourtant, parce que c’était nécessaire, il est juste désolé de pas avoir assez bien dit les choses, de pas avoir assez bien expliqué. « Je t’ai promis de plus disparaître, Asher. J’ai arrêté de courir. Je t’ai juré. Je tiens mes promesses, tu sais. »
Il est pas sûr qu’Asher sache, en fait. Il est pas sûr de lui avoir jamais promis quoi que ce soit. Il est pas sûr que ce soit important, à ce moment-là, parce qu’il s’écarte, pour le regarder, pour pas être trop près, pour pas tout faire foirer. Il a pas fait d’étude mais il a sûrement un diplôme en catastrophe, Merle, parce qu’il finit toujours par casser quelque chose, par érafler quelqu’un. Il a pas envie d’écorcher Asher un peu plus. Il a pas envie de jouer les poids, il a pas envie de lui filer ses angles contre lesquels se cogner, pas envie d’être de trop. Mateimateimatei, il pense, une seconde, se demande un peu stupidement où Asher va le coller, va foutre ses pieds contre les siens, pour rester en contact, pour éviter de trop le toucher, de tenter l’essaim de papillon qui lui bouffe le ventre. Il est pas pour lui, Bloomberg. Il est pas pour lui, il sera jamais pour lui. Ca a été dit, écrit, signé, et Merle a hoché la tête, et Merle a pas cherché à se battre. Il est pas pour lui, parce que y a tous les autres, il est pas pour lui parce que c’est trop compliqué. Il est pas compliqué parce qu’ils seraient pas capable de gérer.
« Asher. » Il appelle, doucement, les yeux à moitié clos et la joue enfoncée dans l’oreiller. « Tu comptes déménager, maintenant que t'es papa ? Y a pas la place, ici, pour lui, je payerais une part du loyer, si tu veux. »
C’est une façon de lui dire qu’il reste, une façon de lui dire qu’il lui demande pas de faire un choix, une façon de lui dire qu’ils vont se serrer les coudes, et survivre et pas boire la tasse, qu’il changera des couches, s’il faut, qu’il jouera les nounous s’il a besoin. Il fait des plans sur la comète, peut-être. Il sait pas trop. Il fait des plans, en tout cas, parce qu’il veut un futur, pour lui, pour Asher, pour eux, parce qu’il veut un après, un plus loin, un dans longtemps et il souffle doucement pour chasser de devant ses yeux une mèche qui s’acharne à retomber.
« J’ai envie d’être là. »
Ça veut rien dire et tout dire. Il veut plus d’une situation précaire, d’un bout de pièce qui pourrait lui être arraché, d’une fraction de canapé qui pourrait être à un autre s’il venait à s’évaporer. Ça veut rien dire et tout dire mais il le dit quand même, parce qu’il sait pas l’exprimer autrement, parce qu’il sait pas mettre des mots sur la façon dont son cœur bat à chaque fois qu’il fait tourner les clés de l’appartement entre ses doigts, sur la façon dont il sourit beaucoup trop largement à chaque fois qu’il pense à chez lui, sur la façon dont il se sent aimanté à l’endroit, sur la façon dont il rentre à chaque fois parce qu’aucun autre endroit ne l’appelle comme ça. J’ai envie d’être là, il lui dit, j’ai envie d’être avec toi, dans les rires et dans la galère et dans la merde, surtout, j’ai envie d’être là et d’être à tes côtés et je m’en fous du reste et de tout ce qui peut se passer, j’ai envie d’être là, il souffle, et ça veut dire beaucoup trop en trop peu de mots, et ça veut dire beaucoup trop et le sourire de Merle est un peu cassé, avalé à moitié par les replis de l’oreiller. Ça va pas aller, il pense, et il ferme les yeux. Ça va pas aller mais ils vont s’en tirer. Il le sait. |
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| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Lun 12 Mar - 11:41 | |
| C’est dingue comme une simple pensée peut faire perdre les pédales. Perdre Merle n’avait jamais été l’une de ses préoccupations, même dans les moments les plus graves, quand les nouvelles se faisaient rares, quand il jouait à l’homme invisible, quand il y avait une foule de raisons de croire qu’il avait pris son envol, s’était barré, l’avait oublié. Perdre Merle n’avait jamais vraiment été envisagé parce que Merle était vif et fougueux mais qu’il revenait toujours à bon port, parce qu’il ne partait jamais très longtemps, parce qu’il prenait toujours la peine de s’assurer qu’il ne laissait pas un champ de ruines derrière lui. Asher n’a jamais vraiment mérité autant d’altruisme, de sollicitude, autant de sincère implication, Merle toujours aux petits soins, toujours précautionneux à l’excès, veillant à ne pas le froisser, à le protéger. C’est juste son avis, bien sûr, mais il sait qu’il ne devrait pas bénéficier de ce traitement de faveur parce qu’il est un adulte, parce qu’il a eu une vie plutôt douce, parce que ses problèmes devraient sembler mineurs face à ceux du gamin, parce qu’il a plus souvent jeté de l’huile sur le feu qu’essayé de calmer les braises. Fatigue, essoufflement. Il est épuisé, ce n’est pas une métaphore, certainement pas quand il le regarde s’excuser platement, qu’il crève d’envie de lui dire que ce n’est pas grave, qu’il lui a pardonné depuis longtemps. Il n’en pense pas un mot, ça serait sacrément hypocrite de prononcer tous ces mots dans l’ordre à voix haute. Il n’en pense pas un mot, il lui en veut, mais ce n’est pas ce que ses gestes disent, non. Sa main vient se caler au creux de son cou, son pied chatouiller le sien, la distance éphémère qu’il avait tenté de leur imposer a été réduite en cendres. Il a juré de ne plus disparaître, les yeux dans les yeux. Ça devrait être suffisant, ça devrait permettre de redresser la barre, d’oublier qu’ils se sont fait mal, qu’ils ont brisé leurs dents sur le mur de l’attente. Ça devrait permettre de se dire qu’on prend la parole de l’autre comme argent comptant, qu’on lui fait confiance, yeux fermés, main sur le cœur, qu’on lui donne la possibilité de nous avoir une fois de plus, de rentrer trop tard, de ne plus jamais revenir. Il lui manque. Il lui manque et c’est presque étrange de l’entendre parler, de l’écouter débiter les mots à un rythme lent, patient, il lui manque alors qu’il est juste là, force de l’habitude, il avait commencé à se dire qu’il ne reviendrait peut-être pas. Et il lui promet, pourtant. Et elles sont belles, ses promesses. À une époque, Asher y aurait peut-être cru, il aurait fermé les yeux, aspiré un grand coup, il aurait dit que ce n’était pas grave, qu’il lui pardonnait. À une époque, ouais, plus maintenant. Maintenant, y a la ride qui se creuse sur son front quand il l’écoute parler, le maigre sourire quand il évoque la possibilité de déménager. Comme si c’était acté qu’il faisait partie du foyer, qu’il était là pour rester, malgré les fugues, malgré les adieux, trop fréquents, trop réguliers. « Merle », il commence, doucement, pas de façon réprobatrice mais juste pour lui faire comprendre qu’il a saisit, c’est bon. Tu ne partiras pas. Combien de temps faudra-t-il avant que le mensonge ne vole en éclats ? « J’sais pas s’il va vivre avec nous. » Il est même certain du contraire. C’est encore étrange, aujourd’hui, d’évoquer Elena, d’évoquer Matei, comme si leur présence dans sa vie était acquise, qu’ils n’étaient pas qu’un rond de fumée dans l’herbe, trop proches, trop loin. Il ne peut pas comprendre, Merle, parce qu’il n’était pas là au tout début, quand elle avait commencé à squatter son canapé, à s’accaparer son temps, sa vie, à s’incruster sur chaque minuscule parcelle de mobilier, les ongles plantés dans le bois. Il ne peut pas comprendre, Asher ne lui a jamais expliqué, préférant toujours éluder le sujet, trouver une excuse pour ne pas l’aborder, pour parler d’autre chose, quelque chose de plus simple, plus anodin, moins douloureux. Un seconde à peine, il cherche les mots, ceux qui seraient plus appropriés que d’autres pour évoquer Elena, parler de cette fille qui a tout ravagé, tout pris, qui l’empêche d’être totalement honnête avec chacune de ses relations depuis elle. « C’est Elena. La mère. Tu sais, Elena qui vivait chez moi, qui s’est barrée y a un peu moins d’un an. » Qui vivait chez lui et pas seulement, du coup, ça se comprend en filigrane, elle a partagé son lit et davantage, elle a partagé un bout de vie, un morceau suffisamment important pour qu’elle ait envie de continuer de composer la partition après avoir dépouillé le flic d’un bout de son ADN. C’est Elena, la mère, ça se glisse un peu trop vite hors de ses lèvres, comme s’il retirait un pansement d’un coup pour éviter que ça n’arrache l’épiderme. C’est Elena, le prénom roule sur sa langue, comme avant, comme la nuit où ça avait dérapé et toutes les nuits après. Jusqu’à Matei. « Si on s’était pas trouvé en pleine rue, elle m’aurait jamais dit qu’elle était revenue. Elle m’a à peine laissé le tenir. Il ne vivra pas avec nous, Merle. » C’est même pas triste, quand il dit ça, même pas mélancolique, c’est juste ferme et définitif comme un parent qui prononcerait une sanction trop dure. Il ne vivra pas avec eux, c’est suffisamment douloureux, suffisamment révoltant, n’importe quel père se battrait un minimum. Asher, lui, a baissé les armes depuis longtemps, a appris à ses dépens qu’il ne servait à rien de se battre contre Elena, qu’elle aurait toujours le dernier mot quoiqu’il arrive. Si elle veut que son fils reste un inconnu, c’est ce qu’il sera, et après tout il n’aurait aucun droit de s’offusquer, de taper des pieds, d’hurler, de crever, il n’aurait aucun droit parce que tout ce qu’il a fait pour en arriver là, c’est baiser sans préservatif, et ça ne lui accorde que la prérogative du silence. « Elle disait ça aussi, tu sais. » Elle disait qu’elle avait envie d’être là, qu’elle avait envie d’être avec lui, bien avant de partir, bien avant de s’envoler, s’échapper avec un colis sous le pull, sans lui en parler, évidemment. Elle disait ça aussi, Elena, dans ses bons moments, quand elle ronronnait à côté de lui, quand elle le regardait comme s’il représentait le monde entier, elle lui disait ça quand elle n’avait pas encore envie de mettre les voiles vers d’autres horizons. « Et Toad aussi. » Il aimerait arrêter de parler mais c’est plus fort que lui, trop de choses contre son cœur à cracher, trop de reproches à formuler même s’il n’a pas envie de le casser, même s’il crèverait mille fois avant de le faire souffrir autant que lui a souffert à cause d’eux, de ces autres, du monde entier. Il n’y a que Merle qui ne l’ait pas vraiment abîmé, pas vraiment jeté aux orties, il devrait le sentir, le comprendre, être reconnaissant, être aimable, doux, tendre. C’est quelque chose qu’il n’arrive plus à faire, faut croire, trop griffé, trop écorché. « T’es là jusqu’à quand, Merle ? » Histoire d’avoir une échéance, de savoir à quoi s’en tenir. « Tu te lasseras quand, toi aussi ? » Tu me quitteras quand ?
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| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Jeu 29 Mar - 23:49 | |
| C’est délicat, avec Asher, comme attraper un bout de verre et essayer de ne pas se couper, jongler avec des torches enflammées, essayer de vivre sans respirer. C’est délicat, avec Asher, parce que Merle n’a pas fait attention, parce qu’il n’a pas fait ce qu’il fallait, parce qu’il aurait fallu tourner le problème autrement, tout faire différemment, c’est délicat, avec Asher, et il n’a plus la place pour faire d’essais, plus aucune chance à recevoir, plus aucune possibilité des manquer. C’est délicat, avec Asher, et y a ce nœud dans sa gorge qu’il est incapable de dénouer. Il a beaucoup à avaler, beaucoup à assimiler, Matei et Elena, Elena putain, putain, putain, y a son visage dans les pupilles de Merle et les mots échangés entre deux poubelles, les nuits passées dans le froid et la solidarité qui se tissait. Il sait pas quoi penser, Matei et Elena et les yeux d’Asher qui ressemblent à des puits, enfoncés dans son visage, les larmes au bord des cils, le désespoir dans la gorge. Il est pas préparé pour ça, Merle. Il est préparé pour rien, en fait, avec sa gentillesse maladroite et ses mains qui tremblent, avec son envie de s’agripper à Asher pour ne plus jamais le lâcher, le visage dans ses cheveux et ses doigts enfoncés dans sa peau. Il mérite pas ça, Asher. Il mérite pas le bordel dans sa vie et le gouffre dans son vide, il mérite pas les cernes et la fatigue et la tristesse, le cœur qui se brise et qui se répare jamais, qui se fissure, encore et encore, parce que tout le monde finit par le piétiner. Il mérite pas ça, Asher, bien sûr que non, mais peut-être que Merle lui en veut, quelque part, parce qu’il fait office de cible facile, parce que Merle encaisse les balles dont Asher le crible, passe ses doigts le long des rebords de la rancœur qu’il sent au creux de ses mots. Il a pas envie d’y penser, Merle. Il veut pas penser à la rancoeur, il veut pas penser à tout ce qu’Asher retient contre lui, à son casier judiciaire imaginaire qui continue à s’allonger. Il veut pas y penser, Merle, mais Asher en remet une couche, mais Asher met un nœud autour d’Elena et de Toad et de lui, trois pour le prix d’un et trop de promesses brisées, le regard de Merle qui devient flou et sa gorge qui se noue.
Il veut pas lui en vouloir. Il veut pas se braquer. Il veut pas se tendre. Il peut pas s’en empêcher. Il peut pas retenir la raideur dans sa colonne vertébrale et son envie de pleurer, ses mains qu’il remonte un peu trop vivement vers son visage pour le cacher. Asher mérite pas ça mais Asher réussira jamais à lui pardonner. Il le sait, c’est comme ça. Il le sait, c’est trop tard. Il le sait, il a envie de se battre, de lutter contre ça, contre la fatalité qui lui noue le coeur, les tremblements qui agitent ses doigts. Il serre les dents, il baisse les mains. Il reste là, finalement, le visage ouvert et les émotions déposées nues aux pieds d’Asher, quelque chose de terrible et de triste et de désolant, des piles de mauvais choix et de pas-de-choix-du-tout, de départs pas calculés, de fuites qu’on pensait calculer. Il bouge pas, Merle, peut-être qu’il a arrêté de respirer, en fait, parce que la question a rebondi entre ses côtes et les a toutes brisées, parce que la question tourne et tourne et tourne encore et qu’il sait pas comment la traiter.
« Asher. » Il appelle, et y a quelque chose de plaintif dans sa voix qu’il déteste. Asher, il appelle, et ça lui donne envie de vomir, parce que sa voix le ramène à d’autres moments, d’autres lieux, à sa voix qui appelle Frank, les mots qui arrachent sa gorge. Asher, il appelle, et il le supplie presque. S’il te plaît me fait pas ça, s’il te plaît, s’il te plaît, mais il peut pas l’articuler et Asher le fait, de toute façon, et peut-être qu’ils sont tous les deux niqués, finalement, en miette et démoli, pas assez entier pour ne pas s’écorcher. Asher, et y a pas de suite, évidemment pas, parce qu’il ne veut pas le supplier, parce que y a un début de panique au creux de son torse, une course effrénée dans ses poumons. C’est pas le moment de craquer. C’est pas le moment de fondre. C’est pas le moment, pas le moment, pas le moment, et il lutte, les yeux fermés à faire fleurir des galaxies à l’arrière de ses paupières et la respiration qui se pète la gueule, tout le corps qui tente de se fermer. Il résiste, Merle. Il résiste parce que c’est Asher. Il résiste parce que c’est important. Il résiste parce que c’est plus important que lui, plus important que ce qui le retourne, plus important que ce qui lui donne envie d’hurler à ce moment-là. Il a la voix rauque, lorsqu’il se fait suffisamment confiance pour parler. « Je suis pas Elena, pas Toad. Tu. » Il secoue la tête, déglutit. « Tu ne me feras plus jamais confiance. C’est déjà fini et tu m’as déjà condamné mais je partirais pas. Tu peux me balancer mes torts à la gueule encore et encore. Ça changera pas. Y a pas de date de péremption au fait que je t’aime. »
Ça changera pas et Asher peut en douter. Ça changera pas, Merle le sait. Ça change jamais, ce genre de trucs, il oublie pas, il oublie jamais, trace pas de traits.
« Tu me fais mal, Asher. »
Y a un gouffre dans sa voix mais pas d’accusation, de la tristesse et des ecchymoses, l’envie de fuir mais la détermination de rester. Une seconde, il crispe ses doigts dans les draps.
« J’ai mérité ça. Je sais. »
Mais les mots d’Asher restent des couteaux enfoncés dans sa peau. Il croise les jambes, pour lutter contre le besoin de se lever, enfonce un peu plus ses épaules dans le matelas, presse soigneusement le plat de ses mains contre ses paupières à nouveau closes. Il peut pas pleurer. Il peut pas, il peut pas, il peut pas.
Il faut qu’il soit fort. Il faut qu’il soit fiable. Il faut qu’il arrête de trébucher.
Il mérite tout ça. |
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donne coeur, pas cher, déjà utilisé ▹ posts envoyés : 1889 ▹ points : 16 ▹ pseudo : Unserious/Agnès ▹ crédits : WHI, tumblr, bazzart / avatar : balaclava / AES : moi / gif : camille ▹ avatar : Ben Barnes ▹ signe particulier : un accent de liverpool, un tatouage "bad" au creux du coude, et une chevalière à l'index gauche. oh, et totalement casher. en théorie.
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| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Dim 1 Avr - 23:31 | |
| Blanc. Devant les yeux, éclat assassin, bruit dans les oreilles, bip continu, acouphène désagréable. Blanc, mettre l’ardoise au propre, tout effacer, repartir à zéro. On pourrait se balader, aller se payer des glaces, citron pour toi et pistache pour moi, on pourrait s’arrêter sur le bord et parler des multiples endroits où nos routes se rejoignent, Jael et Caïn et Lenny et tous les autres. On pourrait se mettre du sucre plein les doigts et fracasser nos rires dans l’habitacle, on devrait passer sur la banquette arrière et s’embrasser comme des gamins. Liste des choses non exhaustives qu’il crèverait de lui faire, de lui dire, toucher son corps et lui montrer qu’il le trouve beau, beau, beau, laisser la lumière allumée, plus de pudeur, plus de secrets, entrejambe contre entrejambe pour faire voler les galères, oublier le froid, la solitude, se mordre la peau pour ne plus se faire croquer par la vie. S’enchevêtrer les pieds, les mains, se parler des heures de la pluie et du beau temps, du destin, des souvenirs, se rappeler que la mélancolie n’est pas leur amie, qu’elle est généralement trouble, toxique, qu’elle se glisse dans leur sang pour les empoisonner. Avoir la tête qui tourne, les yeux qui se voient, vraiment, qui se voient à la lumière de leur vérité même quand elle est moche, même quand elle fait mal, qui se distingue dans la pénombre de leurs incidents, coups de sang, lame trop rouge à cacher entre les draps, à oublier l’espace d’un instant. Qu’est-ce qu’il aimerait, Asher, qu’ils cessent de s’assassiner, qu’ils arrêtent de se faire du mal. Ça fait une paye qu’ils savent, pourtant, qu’ils ne peuvent compter que l’un sur l’autre, qu’il y a trop de gens qui les ont baisés, qui en ont demandé trop, qui n’en ont pas donné assez, trop de gens qui se sont fait plaisir en enfonçant les aiguilles sous leurs peaux et en triturant lentement pour faire venir l’infection, le pus, pour les faire douiller autant de possible. Et qui ont réussi. C’est peut-être ça qui fait le plus mal, au fond, le fait de savoir qu’on a perdu, qu’ils ont triomphé, le fait de constater que quoiqu’on fasse, on reste bousillé, incapable d’aimer. De faire confiance. Blanc, ça se bouscule quand Merle appelle son prénom. Il sait déjà que c’est trop tard, qu’il ne pourra pas se rattraper. Il n’est pas Toad, il n’est pas Elena, et c’est évident, évident que Merle ne le brisera pas, qu’il l’épargnera autant que possible, qu’il est injuste de lui mettre sur le dos les erreurs des autres, de l’accabler du poids d’une responsabilité qui n’est pas la sienne. Blanc, il aimerait crier, hurler, lui dire qu’il se trompe, qu’il lui fait confiance, cent fois, mille fois. Prêt à aller choper un couteau dans la cuisine pour s’ouvrir la poitrine et en extirper son cœur, lui donner, tiens prends-le, tiens fais-en ce que tu veux. Confiance les yeux fermés, inébranlable, il lui collerait Matei dans les bras sans une seule hésitation, lui avouerait ses plus grosses hontes, ses plus terribles peurs, se foutrait complètement à poil devant Merle, figurativement, littéralement, sans aucune condition ajoutée à leur contrat, à leur amitié déjà trop abîmée, déjà trop écornée, trop tâchée. Et le pire, c’est que Merle ne voit pas. Et le pire, c’est qu’il pense qu’il le mérite. « Merle », réponse au prénom qu’il avait murmuré un instant plus tôt. Lui aussi il a mal, et il ne sait pas pourquoi il s’inflige ça, pourquoi il est l’auteur de sa propre déchéance, pourquoi ça ne lui fait rien, irrémédiablement anesthésié. Peut-être qu’il le repousse volontairement parce qu’il se sait en sursis, parce qu’il sait qu’il ne tiendra pas tellement plus longtemps, parce qu’il est conscient que le fil de sa vie est trop ténu et qu’il est celui qui tient les putain de ciseaux et parce qu’il est bien trop proche de le couper d’un simple pincement des doigts. Néophyte. Il aurait dû faire ça y a des siècles. Sa mère aurait dû faire ça avant qu’il ne naisse. Douleur dans le thorax, ne pas pleurer, surtout pas. Endurer, encore. Endurer pour que Merle ne s’aperçoive pas que lui aussi se brise, prestidigitateur de génie, à jongler avec les colombes. « Je te fais confiance, Merle, ok. Je te fais confiance. » C’est la vérité, même pas un mensonge, même pas une dissimulation, un moyen d’éviter de lui dire ce qu’il pense vraiment. C’est la vérité et il panique, Asher, parce que sentir Merle lui échapper est un sentiment qu’il pensait ne jamais connaître et qu’il a l’impression que c’est le cas, en ce moment, et qu’il est le seul fautif. Le seul. « J’veux pas te faire mal, pardon pardon pardon », soufflé maladroitement, balbutié, il fait n’importe quoi, se rapproche. Collision, lèvres contre lèvres, il se sent à sa place pour la première fois depuis trop longtemps et ne réfléchit pas aux répercussions, à ce que ça pourrait provoquer, à l’appétit que ça pourrait allumer dans leurs deux estomacs. Le pire c’est l’après, la bouche qui a un goût de reviens-y, il n’en aura jamais assez, jamais assez de Merle et jamais assez de bien-être et jamais assez d’eux, il a raison quand il dit que cet appartement est trop petit, il l’est pour des sentiments qui jouent aux feux d’artifice. Y a ses mains dans le bas de son dos qui l’attirent contre lui, les lèvres avides même s’il sait que ça bascule, encore, que ça se bouleverse, toujours, qu’y a un arrière-goût de vomi sur sa langue même si c’est juste lui qui le sent, même si on s’en fout. Il n’y a rien de réfléchi dans ses gestes et il n’y a pas grand-chose de pensé non plus dans la suite, le lendemain et les jours d’après, le vide qui se creusera dans son cœur quand il verra ce qu’il a semé, le champ de ruines qui remplacera le living-room et les bouts de son ami éparpillés un peu partout. Je t’aime, à la folie. Le baiser se stoppe aussi brutalement qu’il a commencé et il l’attire un peu plus dans ses bras, lève la tête pour appuyer sa pomme d’Adam contre le front de Merle. Il sentira forcément la boule qui grossit dans sa gorge, à moins que ça ne soit aussi le fruit de son imagination. « Je t’aime et j’veux pas te faire de mal, Merle. Vraiment. » Vraiment, pas sûr qu’il s’y tienne, trop habitué à jeter ses aveux dans le feu.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Mar 8 Mai - 17:56 | |
| Ces derniers temps, le monde passe son temps à s’effondrer. Ca commence aux bordures, lent effritement, le sol qui se craquelle dans des landes esseulés, les bouts qui tombent dans l’abîme, la stabilité qui s’enfuit, qui tangue, qui valse, c’est Jael qui pleure au supermarché, Otto qui lui répond jamais, Lenny avec qui il essaye de faire la paix, c’est River, dans la cuisine des Lost Boys, Ghost, au coin du Macdo. C’est Asher qui le retient du bout des doigts, l’empêche de s’effondrer, lui enfonce la tête dans l’eau, l’embrasse et le rejette, vomit ses reproches et ne parle plus, trop d’informations, pas assez, trop de mots, pas suffisamment. Merle aimerait arrêter de respirer. Ça lui gratte les avant-bras. Merle aimerait s’échapper. Ça lui démange les pieds. Il sait plus où il en est, c’est trop facile de se perdre, trop facile de se paumer entre ce que les autres veulent et ce que lui veut, entre ce qu’il peut, ce qu’il doit, ce qu’il aurait dû faire, trop de possibilités, trop de difficultés, son cœur qui bat contre ses côtes, sa cage thoracique qui menace de crever son cœur. Ça va pas. Ça va pas. Il a mal et il sait pas quoi faire de ça. Il a mal et avant il aurait juste tourné les talons, fui, caché. Il a mal et il l’a craché et il sait pas si c’était la chose à faire. Il a mal et y a Asher qui s’écrase contre lui, Asher qui l’a blessé, Asher qui essaye de le soigner, Asher qui sait pas non plus ce qu’il fait, Asher, Asher, Asher, et Merle a la bouche qui chauffe et la poitrine qui brûle et la peau qui flambe. Il aimerait demander une pause, hurler pouce, parce que c’est pas du tout ce qu’ils s’étaient dit, parce qu’il se souvient de la voiture et du bord de la route de Jacksonville, parce qu’il se souvient de la colère et des mots comme des lames, parce qu’il se souvient s’être dit qu’il ne le toucherait plus jamais, parce qu’il se souvient s’être promis que c’était déjà trop compliqué. Ils peuvent pas tout régler comme ça, même si Merle en crève d’envie. Ils peuvent pas tout pardonner comme ça, même si c’est plus simple, moins compliqué, même s’il colle sa bouche contre celle d’Asher, même si ses mains agrippent ses vêtements, même s’il se noie contre lui, lorsqu’il le lâche, reste étroitement plaqué contre son torse, incapable de reculer, incapable de refuser, incapable de s’écarter parce que ça voudrait dire parler et qu’il est incapable de le faire actuellement, la gorge trop serrée, les mots trop compliqués.
Je t’aime, souffle Asher, et ça lui vrille les oreilles, acouphène, tout qui vrombit, tout qui vibre, pas sûr qu’il survive à ça, pas sûr qu’il survive tout court, il a envie de courir loin, de courir, de courir, de courir, de plus s’arrêter. Je t’aime et bien sûr que Merle l’aime aussi, bien sûr, il a déjà dû lui dire, il sait plus bien. C’est pas pour rien que c’est chez lui qu’il a atterri avant même d’avertir le reste du monde, pas pour rien que c’est à sa porte qu’il a sonné, pas pour rien que c’est dans son lit qu’il a fini. C’est pas pour rien du tout. Merle a pas l’habitude de faire n’importe quoi de ce côté-là. Piquer des voitures, dealer de la drogue, faire les poches, rouler trop vite, pas attacher sa ceinture, oui, trois fois oui, se jeter dans les bras de quelqu’un à qui il tient, non, pas sans réfléchir, pas sans se demander, pas sans faire en sorte de pas en sortir écorcher vif. C’était pas prévu le Grand Bordel Asher. C’était pas prévu du tout, mais il est en plein dedans et y a ses bras qui s’enroulent un peu plus étroitement autour de lui, son visage qui disparaît contre son épaule parce qu’il sait qu’il va dire les mots de trop, parce qu’il sait que ça va faire mal, parce qu’il sait que ça n’existera qu’une seconde, dans cette chambre, qu’une fois la porte passée, Asher voudra plus y penser.
« J’peux pas continuer à me reprocher de m’être fait arrêter. » Il a la gorge qui se serre, les yeux fermés trop fort. Il est crispé, parce que c’est trop dur, trop compliqué. « Je me déteste déjà, Asher, je peux pas continuer à me détester pour quelque chose sur lequel j’avais pas prise. » Et y a sa voix qui hoquette, sa voix qui tremble, sa voix qui se fait trop aiguë, souvenir d’avant, la dysphorie qui lui vrille le ventre. « J’ai essayé de t’appeler mais je connaissais pas le numéro. »
Il se souvient de ses doigts qui hésitaient sur le téléphone de la prison, les premiers temps, les tentatives pour se rappeler, les essais qui échouaient toujours sur des mauvais numéros, sur des gens qui rappelaient pas, sur des gens qui étaient pas lui. Il se souvient d’une vieille dame qui avait répondu et à qui il avait demandé d’essayer de joindre Asher, la phrase même pas finie que l’appel était terminé. Il a pas retenté, après ça. Il a pas retenté, évidemment. Il avait trop peur d’apprendre qu’Asher était plus là.
« À chaque fois que je sors j’ai peur d’apprendre que t’es plus là. »
Il parle trop bas. Il parle beaucoup trop bas. Y a ses oreilles qui sifflent toujours.
« J’ai peur que l’hôpital appelle. C’est con parce qu’on m’appellerait pas moi. Mais j’ai peur quand même. »
Y a ses yeux plein de larmes et il tente de rien laisser passer, joue un jeu contre lui-même, règle du jeu : pas ouvrir les yeux.
« Je t’aime aussi. On peut pas continuer comme ça. »
C’est pas ça, aimer quelqu’un, il le sait. C’est pas les angoisses et la certitude de pas le retrouver quand viendra demain, c’est pas se persuader tous les matins qu’on va recevoir un appel, pas se persuader qu’on rentrera pour trouver un appartement vide. Il faut qu’ils fassent quelque chose, il faut qu’ils changent.
Il faut qu’ils fassent tourner la roue. |
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| Sujet: Re: lost and insecure (Merlasher) Mer 23 Mai - 20:24 | |
| T’es une putain de merveille, Merle, tu le sais au moins ? On te l’a dit aujourd’hui, ces dernières semaines ? On t’a fait comprendre à quel point tu es précieux, à quel point tu rallumes les cœurs, à quel point tu réchauffes les âmes ? T’es un feu de forêt qui crame tout sur son passage, tu ne laisses que des cendres et y a des fleurs qui éclosent sous les cendres, quand on gratte un peu, quand on souffle un coup sur la surface crayonneuse, qu’on enlève les aspérités qui cachent la beauté de ton art. T’es prodigieux, Merle, parce que tu arrives à rassurer et à désespérer à la fois, parce qu’il y a cet immense cœur que tu prêtes à qui le veut bien et qu’on ne te rend pas toujours en bon état, parce que ton être entier semble hurler aime-moi mais que tu ne le dis jamais à voix haute, même pas en murmures. Une merveille et Asher essaie de caler son souffle sur sa respiration, de calmer les soubresauts dans sa poitrine, d’éviter de se décomposer une nouvelle fois, s’échouer sur le bord. Une merveille et pourtant les mots qu’il prononce sont comme autant de lames qu’il lui plante en pleine poitrine, y aurait pas à triturer trop longtemps pour faire gicler le sang, la lymphe, derrière les premiers reproches, autoflagellation dévastatrice et la peur qu’elle insuffle, et s’il y croyait vraiment, et s’il se détestait vraiment, et qu’il en crevait vraiment. Ça agite des orages sous sa peau à mesure que les chefs d’inculpation sont déroulés, que Merle liste toutes ses erreurs pour pouvoir bien les marteler, s’en rappeler, les aligner comme de jolis souvenirs à faire cramer. Qui ne réchauffent pas mais sèment un froid polaire au milieu des bruits sinistres de leurs cœurs qui se craquèlent. J’me déteste, il dit, et ça raisonne un peu trop, j’me déteste et Asher serre la gorge et les dents, j’me déteste et il peine à respirer, ignore si ça vient des mots un peu trop durs, un peu trop miroirs, si ça vient plutôt des médicaments, si ça vient de Merle. Un mélange de tout ça, peut-être. J’me déteste et il déglutit, panique au bord des lèvres, l’envie de se carapater quelque part, très loin, d’aller au boulot ou n’importe où mais de ne surtout pas rester dans cette chambre, dans ce lit. Avec cette personne qu’il aime trop et qui ne s’aime pas suffisamment. « Je sais », il répond quand Merle lui dit qu’il a essayé de le contacter, il sait, c’est évident, qui d’autre aurait-il pu appeler après s’être foutu dans la merde ? C’est ce qu’il fait, Asher, sauver les gosses, c’est ce qu’il essaye de faire même s’il n’a pas grand-chose, à peine un insigne de police et un diplôme de droit, même s’il n’a que sa gouaille et son charisme, quasiment que dalle depuis qu’il a tout perdu au gré des déceptions. Ça brouille sa perception des choses, sûrement, le fait d’avoir trop sauvé Merle par le passé, le fait de l’aimer de façon si inconditionnelle, le fait de ne rien réclamer en retour, comme un rendu pour aucun prêté, une rétribution au simple fait qu’il existe. C’est déjà beaucoup, putain. Exister dans le même cercle que lui, se partager la même vie. S’aimer mal, mais s’aimer quand même.
Et ça se fracasse.
Quand il lui confie ses peurs, Asher se fige, incapable de savoir comment réagir. On ne lui a pas appris à gérer la dépression, pas appris à comprendre que les autres pouvaient ne pas vouloir qu’il meure, pas appris qu’il pouvait vraiment compter aux yeux de certaines personnes et surtout quand ces dernières le connaissent depuis aussi peu de temps. Ça s’entrechoque dans sa poitrine, balance des stimuli artificiels dans son cerveau, ça lui fait ressentir quelque chose à lui, l’anesthésié et l’amorphe, déjà un pied dans la tombe avant-même d’avoir écrit son testament. « Merle », une première fois, mais il continue et ça se brise quelque part dans ses oreilles, raisonne en autant de mots qu’il ne comprend pas vraiment. Son estime ne gagne pas plus de points à être mâchée dans la bouche d’autrui, pour un peu il aurait même l’impression que ce n’est pas sérieux. De la pitié. Ils ressentent tous de la pitié. Tous ceux qui restent avec lui, qui l’accompagnent alors que c’est un cadavre ambulant, qui prennent du temps pour le caresser dans le sens du poil, le rassurer. Tous deux qu’il ne mérite pas. Il ne retient pas les sanglots. C’est la première porte qui cède, celle qui lui fait dire que le trop-plein est atteint, que son crâne ne peut pas en supporter davantage, les bouffées de tristesse qui l’emplissent totalement et il explose, le corps secoué de soubresauts contre Merle. Il ne dit rien. Rien du tout. Il ne sait pas ce qu’il pourrait dire parce qu’il ne veut pas lui mentir, lui promettre qu’il sera là demain, parce que ce serait ignorer l’envie qu’il a d’en finir, parce que ce serait présumer de l’avenir et qu’il refuse de tirer des conclusions trop hâtives sur le futur, de se laisser emmener par des ambitions au-dessus de ses moyens. Pardon, il voudrait lui dire, pardon de ne pas être assez, assez bien, assez sage, assez heureux, pardon de ne pas être assez stable, pardon de ne pas pouvoir être celui sur qui tu peux t’appuyer quand ça va mal. Pardon. « Je », il hoquète entre deux sursauts, incapable de savoir quoi répondre, comment se justifier, parce qu’il n’y a rien qu’il puisse dire pour expliquer sa lassitude de la vie. C’est comme ça, c’est tout. Et ses phalanges se crispent dans le dos de Merle, le serrent un peu plus contre lui, « m’laisse pas », il gémit, parce que ça serait pire que tout, parce qu’il en crèverait encore plus vite, et qu’il n’est pas suffisamment altruiste pour sauver son ami avant de se sauver lui-même.
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