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 (pray for the wicked), nivak.

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MessageSujet: (pray for the wicked), nivak.   (pray for the wicked), nivak. EmptyLun 14 Mai - 22:06

T’es en train de faire quoi au juste, Niamh ?

L’alcool passe ses lèvres, glisse dans sa gorge, lui réchauffe l’estomac. Un énième verre, un énième de trop, même pour l’irlandaise endurcie. Voilà un bout de temps qu’elle est ivre, mais c’est exactement ce qu’elle veut. Des jours qu’elle ne fait que ça, boire, oublier, boire pour oublier. Les marques dans son cou guérissent lentement, sa voix a repris du mieux. Bientôt il ne restera plus aucune trace physique sur elle de ce qui s’est passé avec Novak. Bientôt il ne restera plus que les cicatrices à l’intérieur, que les cauchemars et l’amertume. Bientôt y’aura qu’elle pour se rappeler de ce qui s’est passé, elle et lui, et une poigneé d’autres. Le temps a passé drôlement depuis l’incident. Il semble s’être passé tellement de choses, et rien en même temps. Daire, Bran, Asher. Leurs paroles continuent de traverser l’esprit de Niamh sans qu’elle n’y fasse vraiment attention. Elle n’a pas envie de penser à Novak, pas envie de ressentir cette douleur cuisante, ça lui donne trop envie de pleurer, trop envie de se rouler en boule et d’envoyer chier le reste du monde. Il faut qu’elle ravale tout ça, qu’elle continue de sortir, que la vie continue. Sans lui. Elle a le coeur en lambeaux, mais ce n’est pas grave, ça ne l’empêchera pas de vivre. Elle les recollera toute seule, ces morceaux, comme elle l’a toujours fait. L’alcool est son refuge le plus fiable, et ça fait des jours qu’elle s’y frotte sans aucune notion de modération. Bouteille après bouteille, elle s’oublie dans les effluves de whisky, la rage au ventre et les larmes brûlantes jamais loin. Elle ne l’a pas revu depuis, ne veut pas le revoir. Elle le voit déjà suffisamment dans ses rêves, c’est assez comme ça. Alors elle boit, comme elle le fait ce soir. En entrant dans le pub, elle a immédiatement reconnu le visage de celui qui la tient par la taille à cet instant précis. Dave, un New Yorkais avec qui elle avait fait plusieurs braquages. Un gars à la gachette facile, au regard un peu détraqué mais avec une gueule de rebelle. Des tatouages, un sourire en coin, il la veut depuis des mois et elle le sait. Lui qu’elle a fait tourner en bourrique le soir où elle avait vu Novak dans le bar, à l’époque où il était encore juste l’inconnu qu’elle avait frappé avec sa bagnole. Dave s’était retrouvé dans les toilettes à attendre une Niamh qui n’était jamais venue, et qui s’était plutôt enfuie avec le serbe.

Elle l’avait toujours mené par le bout du nez, Dave, il était facile à berner. Elle lui faisait croire qu’elle le voulait aussi, et que ce soir il aurait la chance de mettre la main sur elle, et jamais il n’en avait eu l’occasion. Niamh préférait le jeu du peut-être pour finalement s’éclipser, ça avait toujours été plus drôle que de vraiment le ramener chez elle. Mais ce soir, ce n’est pas pareil. Ce soir, elle a trop bu, et ce soir, elle a besoin d’oublier Novak. Oublier le coeur fracassé, les espoirs brisés. Alors Dave était une alternative, pas la meilleure certes, mais il en était une. Niamh l’avait laissé lui glisser des propositions à l’oreille et même lui embrasser le cou, et voilà qu’il n’arrêtait pas de lui parler. Niamh n’écoutait qu’à moitié, concentrée sur l’alcool et la léthargie. Elle pose son doigt sur les lèvres du New Yorkais pour le faire taire. « Don’t you ever fucking shut up ? » qu’elle lui dit, mais c’est avec le sourire, et dans le brouillard de l’alcool il lui apparait séduisant. Alors, quand il se penche pour l’embrasser, elle le laisse faire. Son baiser est pressé et la langue se glisse avec trop d’insistance, mais Niamh ne le repousse pas. Chasse Novak de sa tête, Novak qui savait l’embrasser, Novak qui savait la toucher, Novak qui savait l’aimer. Elle le chasse et se vide l’esprit, fuck you, Zoranovic.

« Let’s go to my place » qu’elle dit au New Yorkais, et ce dernier acquiesce. Jette un billet ou deux sur la table du bar et ils s’éclipsent dans la nuit. La chambre de Niamh n’est pas bien loin, c’est merdique mais ça ira pour baiser. L’irlandaise ouvre la porte même pas verrouillée et c’est Dave qui la referme avant de l’empoigner pour reprendre les baisers. Plus de rigolades, plus de jasette, il est déjà excité et Niamh se laisse toucher. Elle parvient à se laisser aller, à apprécier les caresses, le laisse enlever son t-shirt. Il la fait basculer sur le lit et ferme les yeux, elle ne veut pas le voir, surtout ne pas le voir. Just do your thing, qu’elle se dit, espérant qu’il soit assez doué pour la faire oublier. Elle s’acharne à chasser Novak de sa tête, il n’arrête pas de revenir. Le gars est à moitié à poil, il lui enlève ses jeans, il est lourd sur elle, la respiration de Niamh accélère. Non. Non, pas comme ça. Pas alors que sa main est posée à côté de sa tête, qu’il l’écrase de son poids. Elle n’a pas mal, peut le supporter, mais peut-être pas après ça. Fuck. Fuck. L’image de Novak revient à la charge, vague violente, la douleur fantôme se pose autour du cou de la rousse. Stop. L’esprit de l’irlandaise s’embrouille alors que Dave ouvre sa braguette, et elle le repousse. « Stop. Get the fuck off me. » Le blond la regarde, les yeux vitreux de l’ivresse. « What ? » Niamh le repousse encore, mais il ne veut pas bouger. « Get the fuck off me, you fuck ! » Sa voix craque, comme elle le fait encore quand elle veut se mettre à crier. « Are you fucking kidding me ?! You’re gonna pull this fucking thing again ?! » Niamh lui jette un regard noir, la rage au ventre, la panique dans les veines. « Fuck off » qu’elle lui crache, mais un éclat de noirceur traverse le regard du gars. « Fuck no. Fucking bitch. »

Il la rabat sur le lit, sa main sur la gorge de Niamh. La rousse réagit instinctivement - ses poings se fracassent sur lui, plus violemment que jamais. « GET THE FUCK OFF ME » qu’elle hurle. Heureusement sa main disparaît rapidement, alors qu’elle se débat, mais il insiste, et remplace sa main par son poing sur le nez de Niamh. Le sang gicle mais elle s’en fiche, continue de se débattre. Finalement elle parvient à se relever du lit, mais il la rattrape et vient lui fracasser le crâne contre le mur. Le choc l’assome presque, et le monde devient flou - assez pour qu’il la ramasse pour la plaquer contre lui, par terre. « Stay still, you fucking tease. »  La main du New Yorkais se pose sur le visage de Niamh, l’écrase dans le plancher. « Fuck you » qu’elle parvient à articuler, mais le monde tourne trop pour qu’elle soit capable de vraiment se défendre, elle ne fait que continuer à se débattre, éternellement, jusqu’à la derniète minute. Crie, hurle. Ses yeux repèrent un objet lourd, pas bien loin. Une lampe. Peu importe. Ça fera l’affaire. Tend le bras pour l’attraper. Elle tuera ce salopard avant qu’il ne puisse faire quoi que ce soit. Hors de question qu’il la touche contre son gré. Not again.

Never again.


Dernière édition par Niamh O'Leary le Lun 21 Mai - 3:25, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: (pray for the wicked), nivak.   (pray for the wicked), nivak. EmptyMer 16 Mai - 6:00

▼▲▼

I'm sorry.
I'm sorry, Niamh.
I'm sorry.


Les mots qui tournent en boucle au fond de son crâne. Les mots qu'il aurait dû prononcer, qu'il n'avait pas dits, que ses yeux n'avaient pas su murmurer, que son corps avait été incapable de montrer. Des mots qui le tuaient.

Tout ce qu'il voulait, c'était lui dire qu'il était désolé. Trois mots suffiraient. Trois mots qui, pourtant, ne sortiraient jamais. Plus les secondes passaient, plus la distance entre lui et la chambre de Niamh diminuait, plus il le sentait. C'était vain. Ça l'avait toujours été. Le mal était fait, et aucune excuse ne pourrait l'effacer. Il avait failli la tuer. Il avait failli la tuer. Une réalité qui l'écrasait comme aucune ne l'avait fait depuis Katja. Terrible scénario dont il avait été le bourreau. Il s'était acharné à le tenir éloigné, à faire en sorte qu'il ne se reproduise jamais. Mais la réalité avait fini par le rattraper. L'horreur, par se répéter. On ne peut fuir éternellement les démons. Pas lorsqu'ils hurlent et cliquètent et grognent et hurlent encore plus, chaque nuit. Piégés au fond de son crâne, à n'attendre que le moment idéal pour se faufiler au bout de ses doigts et assouvir leur commune soif d'honneur et de sang.

Cela faisait quelques jours qu'ils s'en donnaient à coeur joie, maintenant. Depuis que la conscience de leur hôte n'avait pu l'empêcher de blesser la seule personne qu'il aurait souhaité ne jamais brusquer. Les chiens de l'Enfer étaient lâchés. Et chaque jour qui passait, la violence semblait davantage le rattraper. La douleur lancinante, permanente, qui lui déchirait le haut du bras gauche, juste au-dessus du coude, n'avait de cesse de le lui rappeler. De le lui confirmer. Ça guérissait lentement — trop lentement. Le laissant dans l'incapacité de se servir de son bras lorsque les choses dégénéraient, sous peine de rouvrir la plaie. Le membre pendait contre lui, alors qu'il avançait. Et il tentait d'ignorer la douleur qui en émanait. Concentré sur la rue, la porte, les escaliers, le couloir, l'autre porte. Petite, fragile sur ses gonds. Comme elle. Elle qu'il avait brisée. Elle qu'il avait laissée presque morte, gisant sur le lit. Gorge écrasée par la poigne furieuse des monstres. Oh, Niamh. Si tu savais comme je suis désolé.

C'est une mauvaise idée. Il ferait mieux de partir. De lui foutre la paix. Il entend des sons, des voix. Sait qu'elle est là. Mais elle n'a pas l'air seule. Il recule d'un pas. C'est une mauvaise idée. Va-t'en, Novak. Va-t'en. Incapable de bouger. Incapable de s'en aller. C'est l'heure de te rassembler, mon grand. Qu'importe qu'elle te rejette. Qu'importe qu'elle choisisse la distance, distance de toi — la plus sûre des sécurités.

C'est l'heure de t'excuser.


Mais pas maintenant. Pour le moment, la faible épaisseur du battant le laisse entendre les corps qui s'entrechoquent et les soupirs précipités. Alors, d'un pas, il s'écarte. S'appuie contre le mur à côté. Il ira quand elle aura terminé. Quand le type ressortira, et qu'il pourra être seul pour lui parler. Même si ce n'est que le temps de trois mots et d'un rejet acidulé — au moins, il l'aura fait. Et d'ici là, il attendra. N'a de toute manière nulle part ailleurs où aller. Pas alors que ses pensées le ramenaient inévitablement à elle depuis plus de deux semaines. I'm sorry, Niamh. Sorry I tried to kill you.

Sorry I killed us.


Soudain, les cris. Cris qu'il distingue. Corps qui se fracassent derrière la porte, avec un son différent. L'harmonie n'est plus là. Il connaît Niamh, sait qu'elle aime jouer, aime se faire brusquer. Mais pas là. Pas là. Pas comme ça.

Sortir de la tétanie. Il entend le type proférer des mots qui ne lui plaisent pas, pour ce qu'il en saisit. Entend des sons qui lui retournent les tripes. Lui donnent envie de défoncer la porte, et de le faire passer par la fenêtre en veillant à ce que le verre lui arrache chaque centimètre carré de peau. Envie de l'écorcher. De lui arracher les yeux. Les ongles. Les dents. Les lèvres. La langue. Les doigts. Ne la regarde pas. Ne lui parle pas.
Ne la touche pas.


Le sang qui bout. Dans ses veines, ses doigts, son coeur, sa tête. Il devrait rester à l'écart de ça. C'est peut-être juste un jeu. Non. Non, ça ne l'est pas. Ses tripes le lui hurlent, et il ne peut pas les ignorer. La colère qui le dévore. Et son épaule qui percute finalement la porte, sans plus hésiter. Choc violent. Le battant qui s'ouvre, la serrure arrachée au passage. Ça résonne dans son épaule, dans son bras valide, mais il l'ignore. Rien de grave. Et alors, il les voit. Niamh, maintenue au sol par le poids d'un type dont le visage lui est familier. Qu'il ne prend pourtant pas le temps d'essayer de replacer. Le fait qu'il soit sur Niamh, à l'écraser, la main sur son visage, est assez. Et la lutte que la rouquine semble mener est suffisante pour que le corps du colosse se remette en mouvement rapidement. L'esquisse d'un pas pour avaler la distance qui les sépare. Jusqu'à ce qu'à nouveau, le temps se fige dans son élan.

Un canif qu'on a tiré de la poche, et qu'on brandit désormais. Le gars se relève. Sa main a empoigné les cheveux de Niamh et il a posé la lame contre son cou. Tout va vite. Trop vite. Ils sont à peine debout qu'il commence à menacer. La lueur de surprise mêlée au défi, dans le fond de ses yeux. « Get the fuck out or I– » Non. C'est hors de question. L'élan s'était peut-être stoppé, mais la carcasse n'attend pas un mot de plus pour se remettre en action. L'autre ne comprend pas. Surpris par la violence et l'indifférence répondant à sa menace. Il veut lever sa lame pour accueillir le monstre qui fonce droit sur lui. Coupe la joue de la rouquine au passage. Canif freiné dans son mouvement par la peau. Trop tard pour planter le loup, maintenant. Loup que rien n'arrête. Et bientôt, les corps se percutent sourdement. De sa main valide, le serbe tord violemment le poignet du type pour le forcer à relâcher sa prise sur l'irlandaise. Son cerveau ordonne à l'autre bras de s'actionner — de bouger, prendre le gars à la gorge et lui arracher la trachée. Mais rien ne vient. Encore trop amoché pour ça.

Alors, la lame s'approche trop près. À peine stoppée par le bras déjà que trop blessé. L'effort lui rouvre la paie qu'il avait déjà à l'abdomen — et la douleur est fulgurante. Mais il se contente de serrer les dents. De lâcher le poignet pour attraper la gorge, et pour éloigner pour de bon le type de la rouquine. Le fracasser contre le mur. Et, étouffé, l'agresseur ne peut pas hurler. Poigne plus meurtrière encore que celle qui s'était refermée sur Niamh une quinzaine de jours auparavant. Dans le mouvement, le type a éloigné la lame du serbe. Un élan de désespoir, et il lève à nouveau le couteau. Cible le visage. Tentative stoppée par la main puissante, mains d'un bras blessé qui s'est enfin décidé à intervenir. Et les yeux de l'étranglé s'écarquillent alors que, face à lui, la lame s'est plantée dans la paume ouverte du géant. La pointe du canif ressort de l'autre côté, et le serbe serre violemment les dents pour laisser la souffrance irradier le reste de sa main. Une demi-seconde de flottement. La poigne sur la gorge ne se desserre pas. Les doigts de la main blessée, eux, se referment autour du poing faiblissant du violeur. L'air lui manque, son corps est en train de le lâcher. Et lorsque sa faiblesse est trop grande pour qu'il ne puisse continuer de rivaliser avec le loup déjà salement amoché, celui-ci le relâche finalement. Lui saisit le poignet pour le forcer à laisser le canif enfoncé dans la chair, même lorsque le géant retire sa main pour l'entraîner avec lui.

Poignet relâché.
Novak retire le couteau transperçant encore sa paume. Agrippe fermement le col du type et, sans parvenir à balayer le rouge dans ses yeux, enfonce le canif dans la gorge de l'agresseur. C'est terminé.

La vie qui s'échappe avec le sang. La bouche ouverte, l'autre ne peut plus respirer. Se débat un instant, fait gicler le rouge sur le mur, les quelques meubles. Et sur le visage crispé de son tueur, qui attend que le corps cesse de remuer. Attend que tout soit vraiment terminé.
Bon sang, Novak. Mais qu'est-ce que t'as fait ?

J'l'ai sauvée.


Ne pas se retourner. Laisser le canif planté là, et le corps retomber lourdement.

Ne pas se retourner. Ne pas croiser le regard de Niamh. Ne pas l'approcher. Respecte-la.

« Are you ok ? » Il n'a pas pu s'empêcher de tourner la tête. Ses yeux qui se posent sur elle. Veulent s'assurer qu'elle est en vie. Que rien n'a davantage dérapé, et que le sang qui goutte sur le plancher n'est pas celui de la rouquine. Regard sauvage, regard hanté. Regard doux. Regard désolé.

It's not what I wanted.
I just came here to say I'm sorry.

I'm sorry, Niamh.
I'm really sorry.

Will you ever be able to hear me ?

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MessageSujet: Re: (pray for the wicked), nivak.   (pray for the wicked), nivak. EmptyVen 18 Mai - 19:52

Get.
Off.
Me.


Se débattre. Jusqu’à la fin. Ne jamais lâcher, mais si les muscles brûlent, que le souffle s’épuise. Se débattre, ne jamais capituler. Même s’il parvient à ses fins, il n’aura pas son abandon. Il n’aura pas son corps qui se détend, épuisé, il n’aura pas le regard d’une fille qui a accepté la défaite. Never. Les doigts de Niamh s’étirent pour attraper la lampe. Ses jambes frappent le corps à califourchon sur elle. Elle tourne la tête pour enlever les doigts qui lui écrasent les joues, les yeux, le front, qui lui tirent les cheveux. Crie contre l’autre main qui glisse sur son corps, son ventre, qui descendent pour commencer le business. L’irlandaise continue de se débattre, ça sera jusqu’à son dernier souffle, hors de question qu’elle abandonne. Never again. Les mots repassent en boucle dans sa tête, trépignent la panique et la peur, le dégoût et l’horreur. À ses cris se mélangent des sanglots, not again, not again, not again. La foutue lampe est trop loin, elle n’y arrivera pas, personne pour la sortir de là, elle a encore merdé. Les conneries s’accumulent, encore et encore, et Niamh est seule. Seule, seule, s-

Le fracas de la porte défoncée les fait sursauter tous les deux. Niamh se paralyse et le gars se tourne. Dans le brouillard de ses larmes brûlantes, Niamh aperçoit une large silhouette, des épaules et une tête qu’elle n’a aucun mal à reconnaître. Quelque chose se tord dans ses tripes, elle doit être en train d’halluciner, ce n’est pas possible, ça ne peut pas être Novak. Et pourtant. Elle ne sait pas ce que c’est, mais ça lui donne l’énergie d’essayer de pousser Dave, profiter de l’effet de surprise pour se défaire de son emprise, mais le New Yorkais aussi a des bons réflexes. Le choc passé, c’est un couteau qu’il sort, et ses doigts empoignent la tignasse rousse. Niamh laisse échapper un halètement de surprise mélangé à de la douleur, alors qu’il la relève en même temps que lui. Elle empoigne un poignet et une main, refusant d’être traînée comme une gamine, et elle va pour se débattre mais le couteau se pose contre sa gorge. Not again. L’irlandaise se fige, soucieuse de ne pas laisser la lame s’enfoncer dans son cou déjà trop fragile. Sa lèvre inférieure tremble, de rage et de peur, ses yeux se brouillent, mais son regard se pose sur le serbe. C’est bien lui. Novak est là, devant eux, les yeux noirs et la rage au ventre. Elle sait reconnaître sa violence, elle l’a côtoyée de nombreuses fois, et de bien trop près. Deux semaines qu’ils ne se sont pas vus, et la poitrine de Niamh se serre à sa vue. Pourquoi il est là, elle n’en sait rien. Mais elle ne peut pas nier qu’elle est foutrement contente qu’il le soit.

« Get the fuck out or I - » Novak n’attend pas la suite, fonce. Niamh tressaille à peine quand la lame vient lacérer sa joue. Le géant serbe tourne le poignet et l’irlandaise est enfin libre. Avec un hoquet, elle retombe. Laisse Novak les éloigner d’elle, glisse sur le plancher, s’éloigne des deux corps qui s’entrechoquent. Elle cherche une arme, n’importe quoi, même si au fond elle sait que ça ne sert à rien. Se recroqueville dans un coin de la pièce, le souffle court, et ne peut rien faire sinon regarder la scène se dérouler. Les yeux de Niamh tombent sur la main de Novak qui serre la gorge de Dave, et le spectacle lui donne le vertige du déjà-vu. Déglutissant, elle se relève, tremblante, au moment où le couteau échoue dans la main de Novak, transperçant la peau. Elle vacille, veut se précipiter dans le combat par instinct, personne ne touche à Novak, mais elle s’arrête, le serbe ne perd pas le contrôle. Avant même que Niamh n’ait pu faire un pas en leur direction, le couteau se retrouve dans la gorge du New Yorkais. Perce la peau comme du beurre, et le sang gicle. Niamh reste là, contre le mur, haletante. Observe le sang tâcher les murs, les meubles, le sol, Novak. Observe Dave crever, la bouche ouverte, les yeux confus, le corps pendant. Elle tremble des pieds à la tête, frigorifiée, terrorisée, soulagée.

Le corps retombe en même temps que le silence s’installe. L’irlandaise ne peut que regarder le cadavre, même pas Novak, Novak et sa main blessée, Novak couvert de sang, Novak qui est venu la sauver. How the fuck did you know ? Il ne se retourne pas, et elle ne bouge pas. Elle ne fait que trembler, si pauvrement vêtue, et que fixer les yeux éteints de son aggresseur. Le couteau est toujours planté dans le cou, le sang s’échappe. Niamh déglutit. « Are you ok ? » La voix la fait presque sursauter, et elle lève les yeux pour réaliser que Novak la regarde. La rousse ne sait pas quoi dire, ne sait pas quoi penser. Qu’est-ce qu’il y a à dire ? Qu’est-ce qu’il y a à dire après tout ça ? You saved me. You almost killed me. You saved me. You saved me. I don’t want to see you again. You saved me. You saved me. « Yeah. » La réponse vient finalement, alors que Niamh relâche ses muscles. Se redresse, prend une longue inspiration, expire doucement. Veut éviter le regard du serbe, mais elle n’est pas capable de regarder ailleurs. Quelque chose dans ses yeux la captive, quelque chose qu’elle avait cru perdu. « You killed him. » C’est tout ce qu’elle parvient à dire, ce qu’elle parvient à articuler. Une évidence qu’ils peuvent tous les deux voir, qui n’a aucun besoin d’être dit. Et pourtant c’est ce qu’il lui vient. Une part d’elle est plus reconnaissante qu’elle ne saurait le dire, et une autre part d’elle est inquiète. La violence de Novak ne lui a jamais été étrangère, ne l’a jamais dérangée. Un part d’elle lui a pardonné dès qu’elle a passé la porte, l’autre soir. Et une autre ne peut s’empêcher de penser, en voyant le cavadre ensanglanté, it could’ve been me.

Elle voudrait lui demander, what are you doing here, what do you want. Tout ça se bouscule, mais elle ne dit rien. Resserre ses bras autour d’elle, le regard qui fuie, la distance qui demeure entre eux. Les paroles de Bran, les mots de Daire, tout lui revient en un fracas, et elle regarde le serbe. Incapable de dire les deux mots qui lui brûlent la langue. « How did you know ? » Sa joue la pique, le sang est partout. Niamh veut comprendre. You tried to kill me. So why are you here ?


Dernière édition par Niamh O'Leary le Lun 21 Mai - 3:26, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: (pray for the wicked), nivak.   (pray for the wicked), nivak. EmptySam 19 Mai - 4:00

« Yeah. » La réponse met un temps fou à sortir. Et ça fait mal à Novak, d'être là. Mal d'entendre la voix de Niamh, mal de pouvoir la regarder. De constater que les marques sur son cou sont toujours visibles, et que la lointaine lueur de crainte n'a pas disparu de son regard. Le fantôme de cette nuit-là y est présent. Trop fort, imprimé à l'aide d'une encre indélébile qu'il ne sera jamais capable d'aider à s'estomper. Et pourtant, elle ne rompt pas le contact visuel. Il n'y parvient pas non plus. Incapable de cligner des cils ou de bouger. Incapable de baisser la tête, d'attraper le cadavre et de s'en aller. Ce qu'il aurait dû faire, pour la protéger. Pour ne pas lui imposer une présence dont elle ne voulait certainement pas. Pas là. Pas alors qu'elle venait de manquer de se faire violer. Pas quand le sang repeignait la chambre de sa triste couleur écarlate, et qu'il allait sûrement falloir qu'elle trouve un autre endroit où crasher pour le reste de la soirée. Elle le regarde toujours. A l'air incapable de s'en empêcher. Et il sent la bête au fond de ses tripes se calmer peu à peu sous les prunelles intelligentes qui le fixent. Elle ne le laissera pas s'échapper. Il le voudrait, mais il sait que c'est trop tard. Il est entré et il a tué ce gars. Ce gars avec qui elle avait commis des braquages par le passé — il s'en souvenait, maintenant. Il l'avait vu dans ce bar où il aperçut Niamh pour la seconde fois. Le gars la désirait déjà, à l'époque. Et c'était au bras du serbe qu'elle était repartie. Qu'elle s'était accrochée quand était venu le temps de fermer les yeux et de se laisser aller. De planter les ongles dans la chair, et de soupirer. C'était lui. Pas ce type. Et fallait croire que la boucle était bouclée. Que le gars n'avait pas supporter d'à nouveau se faire rejeter. Et qu'une nouvelle fois, Novak tirait Niamh des griffes d'un abruti, qui, cette fois, avait franchi le point de non-retour de l'insistance.

« You killed him. » C'est un fait. Un fait douloureux, qui reste en travers de la gorge de Novak plus qu'il n'aurait voulu l'avouer. Ce n'était pas nécessaire, et il en avait parfaitement conscience. Sur le coup, il l'avait su aussi. Sur le coup, il n'avait pas eu envie de retenir la violence qui pulsait dans ses veines. Le désir d'exercer la vengeance de Niamh avec plus de véhémence qu'elle-même ne serait jamais capable de la porter. Il l'a touchée contre son gré. Il a essayé de la violer. De récupérer ce corps dont le serbe l'avait privé, une première fois tout d'abord, et désormais à jamais. Glissement de comportement que Novak ne pouvait pas pardonner. Que ce soit pour n'importe envers n'importe quelle autre fille sur qui le gang n'avait pas la main-mise — mais envers elle surtout. Elle et ses cheveux fous, elle et ses yeux voilés d'un brouillard qu'il ne leur connaît pas. Elle qui lui fait détourner le regard lorsqu'elle le confronter à la vérité. Tu l'as tué, Novak. Tu l'as tué.

Et il fixe désormais le type, sans être capable de ciller. Le dégoût qui se fraie un chemin au bout de ses doigts, pour trouver la direction de son coeur. Dégoût de lui-même. C'était pas utile. Dégoût de toute la situation. Il a eu le temps de la toucher. Tu le sais. T'aurais dû intervenir avant.

Pourquoi tu l'as pas fait ?


La gorge bloquée. Par la colère envers le type, la colère envers lui-même. La douleur d'être en présence de Niamh, et de ne pas parvenir à lui dire ce pourquoi il est venu en premier lieu. Ce silence contre lequel il ne peut pas lutter. La langue lourde au fond de sa bouche. À en bloquer sa trachée pour empêcher les mots de s'en échapper. Il sent le feu du regard de Niamh qui s'estompe, et il sait alors qu'elle a détourné le regard à son tour. Qu'elle ne s'est pas approchée, pourtant. Tassée dans son coin de la chambre, il peut presque se la représenter. Les bras enroulés autour d'elle pour se protéger d'un danger qui n'existe plus. Pour se réchauffer du froid brutal qui est retombé dans la pièce, après le feu de la colère et la violence de la mort. « How did you know ? » Son coeur se serre un peu plus encore. Il reste dos à elle, continue de regarder le pauvre type. Il a crevé la gueule et les yeux ouverts. Le sang s'écoule toujours de sa jugulaire percée, autour du canif qui n'a pas bougé. Novak déglutit. Tout son corps qui bout. Sa main qui lui fait un mal de chien, presque autant que son bras et son abdomen dont il peut estimer les agrafes arrachées sans grand risque de se tromper. Y a le sang qui coule dans sa manche, une nouvelle fois. Le sang qui coule sous son t-shirt. Le sang qui coule entre ses doigts. « I was waiting for you in the hallway. » C'est difficile de l'avouer. Mais il était là. Il aurait pu intervenir plus tôt. Il aurait pu, il aurait dû. Pourquoi t'as rien fait ? « I heard the screams. » Grondement sourd. C'est presque difficile de lui parler. Difficile d'admettre qu'elle est là, qu'elle est en vie, et que lui aussi. Qu'il n'arrive pas à lui faire face, mais qu'il peut au moins lui articuler quelques mots sans qu'elle ne lui demande de s'en aller. « I'm sorry for the blood. I'll clean up. » Il ne pourra sûrement pas appeler Vlad. N'arrivera pas à s'y résoudre. Mais nul doute qu'il le faudra. Avec l'état de son bras, il ne sera pas capable d'effectuer seul le ménage qui s'imposerait. Avec l'état de sa main, ce qu'il lui faudrait ce sont des soins. Mais il ne les demandera pas à Niamh. Pas avec tout ça. Pas alors que son plus grand désir est de mettre le plus de distance possible entre le monstre et elle, une nouvelle fois.

Ses épaules se voûtent légèrement. Son cou puissant qui se penche légèrement vers l'avant, alors qu'il lui fait toujours dos. Incapable de se retourner pour la regarder. Il n'en a plus la force. Une fois c'était de trop. C'était plus qu'il ne pouvait le supporter. Plus qu'elle ne le demanderait jamais. Il ne voulait pas lui montrer les taches de sang qui avaient éclaboussé son visage. Ne voulait pas qu'elle ait à voir le regard d'un homme qui venait de tuer. Et pour de bon, cette fois. Mais dans son corps replié, corps qui formait une ombre dans le coin de la pièce où il restait planté, l'excuse se répétait. Franche, pour ponctuer une réalité qu'il ne pourrait jamais lui cacher.

Désolé pour le sang.

Mais pour le meurtre, pas vraiment.

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MessageSujet: Re: (pray for the wicked), nivak.   (pray for the wicked), nivak. EmptySam 19 Mai - 6:06

Silence. Y’a que le foutu silence qui les entoure, les étouffe, les écrase. Pas capables de se parler, encore moins capables de se regarder. La chambre est froide et vide, elle pue la mort, elle tremble encore du meurtre. Novak et Niamh, si proches et tellement loin. L’irlandaise qui ne bouge pas, déchirée entre l’émotion de la soirée et ce que la présence de Novak fait brûler dans sa tête. Ne sait pas de quel côté pencher, ne sait pas de quel côté elle veut pencher. Son coeur bat encore trop fort, se fracasse dans sa poitrine, les échos font trembler son corps entier. On dirait qu’elle peut encore sortir les mains du New Yorkais sur elle, tout comme elle voit encore, imprimée sous ses paupières, l’image de Novak penché au-dessus d’elle, ses doigts autour de sa gorge. Ça fait beaucoup, ça fait trop, elle a envie de tout foutre en l’air, de hurler, de briser quelque chose, de le pousser, et pourtant elle ne fait que rester là. Lui aussi reste planté là, comme une statue, il dégouline de sang, gravement blessé, elle peut presque deviner les plaies sous les couches de vêtements à comment il se tient, et ça la frappe en plein visage comment elle le connaît. Elle voudrait lui dire d’aller se faire soigner, elle voudrait aller le soigner elle-même, mais elle arrive pas à décider alors elle reste plantée là. Comme une putain d’conne, entre le merci tu m’as sauvée, et le dégage t’as failli me tuer. Ce n’est pas de la colère qui fait trembler sa lèvre inférieure, c’est la piqure de la trahison, le brouillard de l’incompréhension, et surtout, la claque du silence. Novak qui n’a rien dit, Novak qui l’a laissée partir, Novak qui n’a jamais essayé de la revoir pour lui expliquer. L’acte de violence est demeuré sans réponse, elle n’a su en arracher des bribes qu’à Bran et Daire, mais à quelque part ce n’est pas leurs mots qui comptent, c’est ceux du serbe. Au moins un regard, un regard qui lui aurait dit, reste, le temps qu’il trouve les mots, le temps que les regards parlent suffisamment longtemps. Mais il n’y a rien eux, que du néant, et l’irlandaise est resté avec le goût amer du t’as failli me tuer, et tu m’as jamais dit pourquoi.

« I was waiting for you in the hallway. » Elle relève les yeux vers lui, sourcils froncés, lèvres entreouvertes. Dans le couloir, là, juste derrière la porte ? Mais qu’est-ce qu’il foutait chez elle à une heure pareille ? Pourquoi ce soir, pourquoi maintenant ? Une foutue coincidence, ou alors il y avait plus à l’histoire. Mais une chose est sûre, il est venu pour la voir, mais pour me dire quoi ? Elle meure d’envie de savoir, mais la question ne franchit pas le cap de ses lèvres, elle ne fait que rester là, ça lui remue les tripes qu’il soit venue la voir. « I heard the screams. » L’irlandaise déglutit, baisse les yeux. Une certaine honte lui colle à la peau, la honte de s’être fait avoir, la honte d’avoir permis au salopard de se faufiler jusqu’à son lit. Et en même temps elle ne devrait pas, elle devrait relever les yeux vers lui, regard électrique, bah ouais, t’as vu c’que tu m’fais faire, avec ton silence à la con ? Mais cette rancune ne vient pas, elle reste une fantaisie, se perd dans l’air entre eux. Et soudain ça la frappe de plein fouet, il a tué pour toi, le cadavre qui git là n’est là que pour elle, que parce que le New Yorkais a mis les mains sur elle, que parce que ses cris ont percés les murs de la chambre, et que Novak ne l’a pas supporté. Ça lui donne envie de pleurer, ça lui donne envie de hurler. Ça lui fait peur et ça lui tord le coeur. C’est pour toi qu’il a tué. Une vie pour rattraper celle qu’il a failli emporter. Est-ce que ça suffit ? Est-ce que l’équilibre est rétabli ? Elle n’en sait rien. N’en sait franchement rien. Ça lui donne la migraine juste d’y penser.

« I’m sorry for the blood. I’ll clean up. » Elle laisse son regard glisser sur le dos de Novak, sur sa nuque. Ses cheveux. Le découpage de sa silhouette sombre contre le mur blanc, maintenant tâché de rouge. Niamh déglutit. Il ne la regarde même pas. Le soupir passe les lèvres de l’irlandaise, et elle se dirige vers le lit pour empoigner un pull qui traîne. L’enfile sur son dos, d’un geste erratique qui lui fait accrocher la coupure à sa joue et son cou encore douloureux, et elle grimace de douleur, refusant cependant de faire un quelconque son. « Don’t bother. » Ça sort certainement plus brusque qu’elle l’avait prévu, mais au fond ce n’est peut-être pas une mauvaise chose. « I fucking hate this place anyway. » Longtemps qu’elle se cherche une excuse pour ne plus jamais y revenir, voilà que c’est chose faite. De toute façon personne ne la connaît par ici, ce n’est certainement pas son vrai nom qu’elle a laissé. L’irlandaise croise les bras à nouveau, essaie de reprendre la face, ignorant son corps qui tremble des pieds à la tête, son esprit brumeux, le drôle de goût qu’elle a sur la langue. Le serbe est là, à quelque pas. Il ne lui suffirait que de quelques gestes pour fermer la distance entre eux, retrouver la chaleur de ses bras. Déposer sa tête contre son large dos, glisser ses mains sur son torse. Le faire pivoter, l’embrasser malgré les blessures, celles qu’on voit et celles que l’on ne voit pas, malgré le sang, malgré la mort, malgré tout. Mais Niamh sait que quelque chose s’est brisé la dernière fois, que ce qu’ils étaient ne reviendra jamais, que peut-être bien que l’histoire est finie, et que c’est stupide et enfantin de croire autre chose. Alors elle reste plantée là.

Ça creuse dans sa poitrine. Ça grignote dans sa tête. C’est inutile. Elle est incapable d’être indifférente. Pas avec Novak. Déglutit. Elle le déteste. Elle se déteste. Elle déteste cette chienne de vie, elle déteste les violences du passé, elle déteste les démons des cauchemars. Elle déteste tout, absolument tout. « Novak. » Le prénom brise le silence, d’une voix tremblante et pleine de rage. Pas contre lui, même pas contre ses actes, mais contre tout le reste, contre quelque chose d’invisible et d’intangible. « Can’t you even look at me ? » C’est plus doux, peut-être un peu désespéré, mais encore plein de colère, Niamh qui ne comprend pas, Niamh qui veut comprendre, Niamh qui se débat dans le vide, Niamh qui chute sans jamais s’écraser. Aren’t we going to talk ? Won’t we ever look at each other again ? Ça ne peut pas finir comme ça. Il est là, il n’a pas bougé. Elle est là, elle n’a pas bougée. Et pourtant, ils n’ont pas bougé. Mais elle ne supporte plus la vue de son dos, c’est son visage qu’elle veut voir, désespérée d’y voir quelque chose à lequel se raccrocher, autant que l’hésitation et le distance demeure, autant qu’au fond, les doigts de Novak n’ont jamais vraiment quittés le cou de Niamh, et qu’ils y resteront tant qu’ils ne les reconnaîteront pas. C’est pour toi qu’il a tué.

Mais c’est aussi toi qu’il a failli tuer.


Dernière édition par Niamh O'Leary le Lun 21 Mai - 3:26, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: (pray for the wicked), nivak.   (pray for the wicked), nivak. EmptyDim 20 Mai - 5:30

Dans son dos, elle bouge. Il l'entend, et il peut presque suivre ses mouvements aux sons qu'ils envoient vers ses tympans. Elle s'est rapprochée du lit, elle a pris quelque chose. Il perçoit un froissement. Sûrement celui d'un vêtement. Et quel n'est pas son désir de se retourner pour regarder. De vriller ses yeux dans les siens, et de l'excuser. Ça continue de tourner en boucle au fond de son esprit. Ça, et les porc. Ça, et les monstre. Il lutte. Lutte contre le dégoût profond que lui insuffle la vue de ce cadavre. Dégoût de l'homme qu'il a tué, dégoût de l'humanité. Dégoût de lui-même, aussi. L'exécuteur. Il n'a jamais réfléchi, jamais pensé. Ne s'est jamais posé la question de l'épargner ou non. Tout ce qu'il a fait, c'est tuer. Ce qu'il faisait le mieux, depuis presque vingt ans déjà. Ce qu'on l'avait dressé pour faire. Ce qui faisait partie de sa nature, quelle que soit la violence avec laquelle il luttait. La mort s'était faufilée dans son ombre il y avait bien longtemps déjà, et c'était à croire qu'elle ne le laisserait jamais filer. Jamais s'en tirer. Il avait voulu faire profil bas en arrivant à Savannah. Et voilà qu'un autre cadavre s'empilait sous les fondations. Pour des raisons personnelles, cette fois. À quoi tu joues, Novak ?

« Don’t bother. I fucking hate this place anyway. » Elle le repousse. Refuse son aide. Elle a raison. Faut rester loin. Ne plus s'approcher. Se préserver. Et pourtant, ses muscles poussent ses poings à vouloir se serrer. Il ne s'en empêche qu'à grand peine, et la douleur le rappelle à l'ordre. Fais pas le con, Novak. Évite de bouger. Évite de tout empirer. Alors, son corps reste immobile. Ses bras pendent le long de ses flancs. Son sang qui s'écoule doucement d'entre ses doigts pour tomber dans la flaque que forme celui de sa victime. Il devrait se retourner. Devrait la regarder. Mais tout son squelette reste tétanisé, à l'idée de devoir l'affronter. À l'idée de devoir faire ce qu'il était venu pour faire. Pourquoi c'est aussi dur de s'excuser ?

« Novak. » C'est la colère de Niamh qui le sort finalement de son immobilité. Il entend le ton un peu trop emporté. Ce prénom prononcé si sèchement, dans une bouche où il avait coulé tant de fois. Passé révolu. Ne reste que la fureur, l'incompréhension. La rage de ne savoir ce qui s'était passé. Et, de son côté à lui, la culpabilité. Celle qui, chaque foutu jour, le bouffait un peu plus. « Can’t you even look at me ? » C'est la douceur au milieu de la colère qui le force enfin à se mouvoir. Son corps lourd qui pivote, très lentement. Son visage taché du sang du type à ses pieds qui se relève vers Niamh. Ses yeux qui trouvent les siens, comme la fureur de l'irlandaise le lui a demandé. Mais pas un mot ne sort d'entre ses lèvres. Pas un son. Les mots se refusent à s'assembler. Le serbe lui manque autant que l'anglais. Les langues étranglées au fond de sa gorge à lui, alors qu'il est forcé d'affronter les marques sur le cou de Niamh. Celles que ses mains, mains du meurtrier, ont fait. Ça le retourne violemment, et il doit lutter pour ne pas tourner la tête à nouveau. Fuir. Retourner à son silence et à son immobilité. À cette invisibilité cruelle qui lui offrait pourtant le plus sincère des contentements, avant qu'elle ne débarque pour tout faire basculer. Qu'est-ce que tu m'as fait, Niamh ?

Qu'est-ce que j't'ai fait ?


Elle a enfilé un pull. Il voit toujours son cou. Mais ne détourne pas ses yeux des siens. Droit. Franc. Il voit toujours son cou. Mais il ne dit rien. Les nuances morbides qui colorent la peau. Et au fond de sa poitrine, son coeur saigne. Il ne cherche plus à le comprendre. Ne cherche plus à l'expliquer. A abandonné l'idée d'un jour trouver les mots pour le faire. Ça le ramène à l'époque des plus grands silences. Aux moments où les mots avaient failli pour justifier les gestes. Ces moments où il avait senti Katja glisser, lui échapper. Où il n'avait même pas cherché à la retenir, par peur d'à nouveau la blesser. Et voilà que c'était au tour de Niamh. Voilà qu'elle héritait des marques bleutées. Voilà que la culpabilité, au fond de son esprit à lui, prenait un tournant qu'il n'avait jamais souhaité. Un tournant amplement mérité.

Elle ne veut pas qu'il nettoie l'appartement. S'en fiche. Elle le déteste, de toute façon. Elle lui a dit. Elle ne lui mentirait pas. Jamais. Mais face à ses yeux brûlants, face aux marques dans son cou et à la colère qu'il sent encore circuler dans la pièce, il ne peut pas faire autrement que de se raccrocher à ce qu'il lui reste. Rationaliser. Faire quelque chose pour oublier la douleur. N'importe quoi. « I should get rid of the body. » Tout ce silence pour ça. Ce long regard, chargé d'une culpabilité à en étriper le plus solide des hommes, teinté de tous ces désolé qu'il ne pourrait jamais lui murmurer — tout ça pour rien. Il en était revenu à son nettoyage. Revenu à l'idée de réparer les dégâts. D'éviter de mettre Niamh davantage en danger. De remettre les lieux à neuf, même si elle n'y remettrait jamais les pieds.

Et ses yeux quittent ceux de la rouquine. Incapables de soutenir son regard plus longtemps. Il voudrait disparaître. S'enfoncer dans la honte et le dégoût, jusqu'à ne plus être capable de respirer. Pouvoir fermer les yeux, et être oublié. Être en paix. Loin de Niamh, et du mal qu'il lui avait fait. Loin de sa colère, amplement méritée. Loin de ces marques qu'il avait dessinées autour de son cou sous le coup d'une violence qu'il ne contrôlerait jamais. Et il avait beau être désolé, rien ne changerait.

Ni la faiblesse des mains qui l'avaient étranglée. Ni le sang à leurs pieds.
Ni la mort, qui avait tenté de se frayer un chemin jusqu'à elle.
Ni les horreurs qui l'avaient poussé à poser un tel geste.

Les cauchemars subsisteraient. Continueraient de lui amener la vision de Niamh étouffée, Niamh tuée. Par ses mains à lui — lui qui se réveille trop tard, lui qui l'a déjà emportée. Qui doit vivre avec ce fardeau, et continuer d'avancer.

Les cauchemars d'une guerre trop longuement menée. Qui était en train de le tuer, à la force de la culpabilité. De la violence débridée et inconsciente qu'elle encourageait. Le tuer, en silence, et sans pitié. Laissant sur lui des traces que le temps lui-même ne parviendrait plus à effacer.

Mais Niamh n'a pas à payer. Elle n'a jamais eu à le faire. Et les mains sur son cou avaient été l'erreur de trop. Le pas de côté qu'il ne se pardonnerait jamais. L'écart qu'il lui faudrait payer. Et ça commençait par ce soir. Par le silence et la fuite des regards. Par le corps inerte aux pieds du géant, qui ne voulait que s'en débarrasser. Sachant la colère que cela ne ferait qu'attiser. Mais ne pouvant pourtant s'en empêcher.

C'est tout ce que tu mérites, Novak. Les cris, les coups contre ta carcasse fêlée — si proche de se briser. Sa violence à elle, pour te faire payer la tienne.

L'amertume, la colère.
Le rejet.
C'est tout ce que tu mérites, Novak.

Les flammes de Niamh ne sont qu'un avant-goût de l'Enfer auquel son cou brisé t'a condamné.


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MessageSujet: Re: (pray for the wicked), nivak.   (pray for the wicked), nivak. EmptyLun 21 Mai - 4:04

La tristesse fait mal. Fait davantage mal que n’importe quelle colère. Niamh ne veut pas d’un coeur brisé, ne veut pas de la douleur des larmes. Elle préfère la rage, préfère les poings qui se déferlent, préfère les hurlements. La tristesse, ça creuse trop vite et trop profondément, ça écrase et ça aveugle. Mieux vaut monter sur ses grands chevaux que pourrir six pieds sous terre. Elle s’est acharnée à éviter la peine pendant deux semaines, et voilà qu’il suffisait de la silhouette de Novak pour la ramener en un torrent. Niamh essaie de rassembler sa colère à nouveau, mais on dirait que ça lui manque, que les rochers fracassés ne font plus d’étincelles, que la pluie tombe trop fort. Novak. Look at me. Please. Look at me. Mais il ne le fait pas, et la question de l’irlandaise glisse sur les murs qui les entoure. Elle ne pense même plus à Dave, qui git dans son propre sang, qui a scellé son destin violent au moment où il a posé les mauvaises mains sur elle. Niamh ne repense plus à son souffle pressé dans son cou, à ses doigts se glissant aux mauvais endroits, plus rien de tout ça n’a d’importance, que Novak qui ne la regarde pas, que Novak qui ne veut plus la voir. If you wanted me dead, why are you here ? Elle ne peut s’arracher la pensée de la tête, elle a compris pourtant. Bran lui a dit, it’s not you, elle le sait. Et pourtant une partie d’elle est incapable de se raisonner, la partie d’elle qui ne peut effacer les yeux noirs du meurtrier, qui sent toujours les pouces sur sa trachée, toujours la lame contre sa jugulaire. La partie d’elle qui en rêve tous les soirs depuis, every fucking night, la partie d’elle qui se hisse quand on approche trop, la partie d’elle n’a pas été capable de se laisser toucher depuis, pas vraiment, not like that. La peine est forte, si forte qu’elle ressort en ondes électriques autour du corps de l’irlandaise, ça lui fait serrer les poings, mais elle n’a pas envie de frapper, juste de pleurer, juste de s’écrouler.

Il bouge. Niamh ne le quitte pas des yeux, alors que son corps se mouvoie lentement mais sûrement, et qu’il pivote pour lui faire face. Alors les traits du serbe lui réapparaissent, et y’a quelque chose qui se serre dans ses tripes, mais ce n’est pas à la vue du sang qui lui a éclaboussé le visage, ou même tout ce qui se déroule dans son regard. C’est juste de le voir lui à nouveau, après tout ça, après s’être demandé si elle le verrait à nouveau un jour. Niamh serre la mâchoire, relève légèrement le menton. Elle fait la fière, comme on lui a appris, mais à l’intérieur tout se déconstruit. À l’intérieur ça saigne et ça se fracasse, Novak est là, Novak la regarde, et il ne dit rien. Encore ce foutu silence de merde, qui lui embrouille l’esprit et l’empêche de penser, say something, just fucking say something. Elle serre ses poings, essaie de ne pas s’attarder sur le sang sur le visage du serbe, à repenser à ce qu’il vient de faire, he killed him, he killed him for you, et comment ça vient lui happer le coeur à l’hameçon, pour tirer, encore et encore, sans être capable de l’arracher de sa poitrine. Le coeur tient bon, il veut continuer à battre en solitude, la seule chose qu’il ait jamais fait. Et finalement, après ce qui semble être une éternité, la sentence tombe. « I should get rid of the body. » C’est comme une claque en pleine gueule, et Niamh vacille presque sous le choc. Ses poings se détendent, sa mâchoire se décroche. Dans ses yeux l’éclair de colère fait vibrer son regard, la peine balayée d’un coup de batte de baseball, are you fucking kidding me ? Le pire c’est qu’elle entend dans la voix de Novak tout ce qui s’y joue, voit dans son regard tout ce qui se bouscule en lui, tous les fantômes et les démons qui se hurlent à tue-tête, mais la colère est trop forte, déferle dans chacun de ses traits jusqu’à prendre possession de son corps.

« Really ? » C’est tout ce qui vient, alors qu’elle fixe le serbe avec les yeux plus noirs que jamais, tempêtes ambulantes, où le tonnerre et les éclairs s’emmêlent dans un chaos infernal. « That’s what you choose to say ? » Everything you could have said, everything you should have said. Everything I want to hear, everything I need to hear. Il choisit de se tourner vers le cadavre, le foutu cadavre, il a esquivé le sujet de quelques mots, mais ça ne passera pas. Niamh le lâchera pas le morceau. « You really won’t say anything ? » Elle continue, le visage tordu par l’incompréhension, la déception, la douleur, la peine, la peine, stop breaking my fucking heart you asshole. « That’s all you got to say after you nearly fucking killed me ? » C’est jeté en l’air, elle s’en fout de lui rappeler, c’est arrivé et elle lui rappelera toutes les minutes jusqu’à ce que ça change quelque chose, jusqu’à ce qu’elle obtienne ses réponses ou sa justice. Le coeur fendu en deux, elle s’embourbe dans une colère qui masque son désespoir. « Fuck you. Fuck you and fucking body. » Elle secoue la tête, recule, lève la main et pointe la porte. Le geste est violent, sec, brutal. Ça lui décroche presque l’épaule de le faire, mais sa lèvre tremble trop, les sanglots sont trop près, il faut ravaler ça, il faut masquer ça.

« Get out of here. I don’t want to see you fucking face again. »
Stay with me. Tell me you’re sorry. Tell me you don’t hate me.

« Fucking asshole. Go bleed out somewhere and see if I give a fuck. »
Take my hand. Hold me. Tell me something good. Tell me you’ll stay with me.

Une fois commencée, elle ne sait plus s’arrêter. Les émotions sont trop fortes, elle ne sait plus comment les gérer, elle ne fait que hurler, que hurler des choses qu’elle ne croit pas, mais ça lui fait du bien d’être en colère, ça fait moins mal que de souffrir en silence, ça lui fait du bien de lui gueuler dessus, lui faire comprendre, you hurt me, you hurt me, and you can’t even say you’re sorry. Larmes aux bords des yeux, Niamh traverse la pièce et se fracasse contre Novak, elle s’en fout qu’il soit blessé, elle s’en fout, elle veut juste qu’il comprenne ce qu’il est en train de faire, qu’il comprenne qu’elle souffre, autant qu’elle veut qu’il ne voie rien de sa peine, qu’il pense qu’elle s’en fout. Elle le pousse, une fois, deux fois, jusqu’à ce que le serbe heurte le mur fraîchement repeint en rouge, et y’a un sanglot qui lui échappe mais elle le ravale et le transforme en grognement, pas question. « I fucking hate you. Get the fuck out. » Et dans l’écho du venin de ses paroles, dans les alentours de la rage dans sa voix, une mélodie, presque effacée, mais pas complètement perdue.

Stay with me.
Don't leave.
Stay with me.


Mais il disparaît. Le corps aussi. Reste plus que le sang. Que le sang, la respiration sifflante, et le cœur meurtri.
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