1 ϟ la famille moyenne; maman est la ménagère de cinquante ans qui aurait aimé faire des études, peut-être. papa vit dans son canapé maintenant qu'il est licencié. oli rentre chez lui une fois par semaine depuis trois ans, pour voir son chien. il est plus causant qu'eux. 2 ϟ pile électrique, il parle trop vite, trop fort. trop. il ne s'arrête jamais, comme s'il avait toujours des choses à faire ; comme s'il devait toujours être ailleurs. il préférerait. et il rit, le sens de l'humour de travers, comme sa gueule amochée. et c'est moche, la plupart du temps, tellement moche que c'en est beau. 3 ϟ  trouble de l'attention. à l'école à la maison sous les ponts. oli, il ne peut pas se concentrer sur grand chose, à part lui-même. et il veut l'attention du monde entier. ce n'est pas de l'égo, c'est maladif. il devrait se soigner; il préfère se défoncer à l'amour, rechercher dans des visages creux une émotion; n'importe laquelle. 4 ϟ culture pubs, il a fait ses armes avec les films de tarantino et pokemon. magma stylistique, il aimerait resté un adolescent, encore un peu; il n'est qu'un gosse. 5 ϟ "ptit pd", oli en a vu d'autres, et ça le fait un peu rire, maintenant qu'il arrive à ne plus en grincer des dents. il les emmerde tous; et dieu existe dans les toilettes des bars à deux heures du mat, et il est définitivement gay. 6 ϟ la musique qui l'a bercé toute sa vie, d'abord dans les cassettes vidéos de skate, puis bien plus tard quand il s'est rendu compte qu'il pouvait lui aussi en créer. rouler jeunesse. 7 ϟ militant en carton pâte, oli fait genre d'être woke as fuck pour caresser dans le sens du poil jean-kevin sur twitter, et le chauffer dans ses dms. il serait prêt à faire la révolution française pour assouvir son besoin de chaos, on juste d'attention. mais la vérité, c'est qu'il en a un peu rien à foutre, oli, que le monde brûle; son monde à lui est déjà mort. 8 ϟ trop trouillard pour se faire une ligne trop grande, et y passer; au fond, love a salement envie de vivre mais est trop égoïste pour essayer de s'en sortir réellement. 9 ϟ un travail, mais pas de chez-lui, la réalité de beaucoup trop de personnes, et d'oli depuis quelques semaines. il se démerde; squatte chez son voisin de palier la plupart du temps, ou chez des faux potes à qui il doit déjà de l'argent. 10 ϟ toujours des magouilles des "t'inquiète pas, je te les rends bientôt" "t'inquiète c'est tranquille je connais le gars"; des mensonges, des emprunts de vie. oli, il pourrait tenir un carnet des gens qui veulent lui foutre une droite dans la gueule; au moins a-t-il le privilège de celui qui n'a plus rien à perdre. 11 ϟ les combines pour avoir des lieux de répet, des instruments - du vol? les autres se le demandent (sûrement), jusqu'aux bars qui acceptent de les faire jouer. et oli ne parle jamais autrement que pour ne rien dire. 12 ϟ les bandes dessinés, les seules qui arrivent à le calmer un peu - ça et l'amour. et si les drogues le feront crever, ces pages colorées auront au moins eu le mérite de le faire vivre un peu. 14 ϟ il vit la nuit, oli. se nourrit des néons trop criards, des rues allumées par les gyrophares. il vit la nuit parce qu'il a peur du noir. 15 ϟ l'habitude de taguer, les bombes de peinture dans le sac à dos. le but n'est pas artistique; il veut juste laisser une trace, quoi qu'il arrive. à tout prix. tellement fort que ça lui donne envie de crever, parfois. trop souvent. 16 ϟ love, il empeste, souvent, il pue la nuit et les passes à dix dollars, il pue la transpiration et l'herbe, le renfermé de chez ses parents, l'odeur de fond de cendrier. c'est comme ça depuis longtemps, trop longtemps pour qu'on s'y habitue. 17 ϟ s'il est moyen dans la musique, il est moyen-bon dans le skate, peut-être parce qu'il en fait depuis gosse, peut-être parce que ce n'est pas assez sérieux pour qu'il ait peur de rater. les résultats; jouer au connaisseur, épater les skaters mignons et le squelette cassé, réparé, cassé encore. de la même manière que son cœur - avec le sourire. la vérité, c'est que le skate a un goût de nostalgie, l'enfance oubliée. et ça lui fait du bien, de prendre sa board pour fuir ses problèmes. 18 ϟ son meilleur ami ; son chien, après jim qui est trop monté pour ne plus jamais redescendre. iggy pop, quatorze ans, un vieux mastiff qui décharge des litres de bave à la minute et qu'il aime plus que tout au monde. iggy pop, c'est les secrets murmurés dans son oreille douce, et les nuits d'orage blotti contre lui, dans son lit d'enfant. il aimerait s'en occuper au lieu de le laisser chez ses parents, c'est son chien après tout - non, ça ne l'est pas. il le prendra à sa charge quand il sera définitivement à la rue, sûrement. quand il n'aura plus personne chez qui crécher, et devenir l'ultime évolution du punk à chien. un projet de vie. 19 ϟ le style musical aussi bordélique que sa ligne de vie, du rap soundcloud à la country en passant par le grunge. il parsème ces bouts de lui dans ce qu'il fait, pourrait même être bon dans son propre genre, s'il s'en donnait les moyens et le temps, au lieu de vouloir la célébrité avant la reconnaissance. 20 ϟ la petite sœur qui a pu se développer, maintenant qu'il est parti, lui qui était trop extravagant pour que cette petite fleur éclot dans son ombre. il est presque content d'avoir rater sa vie, si c'est pour la voir, de loin, s'épanouir à l'université, même si elle s'est saigné pour y entrer, et il referait les mêmes erreurs sans hésité pour la voir sourire encore une fois.