▹ posts envoyés : 707 ▹ points : 29 ▹ pseudo : unserious/agnès ▹ crédits : avatar/aes : moi / signa : debout sur le zinc, gif tumblr / images WHI ▹ avatar : Taron Egerton▹ signe particulier : un tatouage représentant une molécule d'endorphine qui fait le tour de son avant-bras gauche, la clope au bec, toujours un bouquin de Shakespeare pas très loin. les mains qui tremblent depuis le sevrage forcé, pâle comme un linge, austère et froid.
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Sujet: dancing in the street (libre) Mer 21 Mar - 0:13
Sous l’écorce, la sève. Ça glisse dans ses veines, ça sillonne, dans les chiottes désertes du bahut, ça crache des toxines dans son sang, l’obligerait presque à rentrer chez lui pour préserver un bout de dignité. Ça embrume ses idées, ça le fait décrocher des exposés encore plus qu’à l’habitude, les yeux qui se pendent aux lèvres des étudiants pour capter trois mots sur vingt, la conscience faiblarde et souffreteuse, les restes d’une soirée difficile encore trop imprimés sur le visage, cernes et teint blafard. La cocaïne aide, parfois. Pas aujourd’hui. Il lance juste un vague « Sarah, surveille la classe », parce que c’est la moins conne, la plus sérieuse, celle qui se fera sans doute le plus esquinter la gueule par son alcoolique de père si elle fait un faux pas à l’école et que, cruellement, il en joue, lui donne trop souvent des responsabilités, la place régulièrement en première ligne en cas d’incident. Sarah surveille, il va voir le directeur, demande à se barrer parce que sa tête le fait souffrir, invente un virus inconnu pour échapper à une possible remontée de bretelles. Cache le rouge de ses yeux et ses pupilles dilatées avec des regards détournés, les mains qui remuent toujours un peu trop, qu’il planque rapidement dans ses poches, maintient l’illusion quelques minutes. Le temps de se justifier, puis de se barrer, prendre la clé des champs, aller voir le médecin pour être arrêté le lendemain, éviter de se pointer au lycée avec une gueule enfarinée et des psychotropes plein les veines. Suffirait d’arrêter. Il aurait suffi de ne jamais commencer. C’est trop tard, maintenant, l’heure n’est plus au regret ni à l’attrition, aux évitements douloureux, à coucher sur une page blanche les erreurs auxquelles il aurait dû échapper. L’heure est juste à l’air frais, à l’oxygène dans les poumons, à la vie. Il n’a pas pris sa voiture aujourd’hui, peut-être que ça pulsait déjà dans son sang, que ça se frayait un chemin dans ses artères, percutait son myocarde pour que le cœur vibre enfin, encore, qu’il ne se ratatine pas sur lui-même comme il aurait tendance à le faire s’il n’y avait rien pour l’inciter à battre plus fort. Il n’a pas pris sa voiture, non, il a pris son skateboard, l’a lâché sur l’asphalte au bas des marches et s’est jeté dessus, dix années de pratique qui reviennent au galop comme s’il n’avait jamais arrêté d’en faire, comme s’il n’avait jamais trahi ses quatre roulettes pour des jantes chromées, foutu parvenu, putain de privilégié. Il aime le bruit de friction sur le bitume, l’impression de filer comme le vent, les yeux à demi fermés pour ne pas se dessécher, la planche qui slalome entre les obstacles qui se dressent sur sa route, tout le trottoir mais pas suffisamment de place. Pas suffisamment, c’est ce qu’il se dit quand il essaie d’éviter quelqu’un qui sort de nulle part, dévie de sa trajectoire, manque de se manger un panneau mais finit par s’étaler sur le macadam, devant une voiture qui freine juste à temps avant que l’inévitable n’arrive. Mains pleines de sang qui ont tâché le bitume, à la longue il finira pas s’habituer à être couvert de plaies. Et les yeux qui se posent sur le piéton instigateur de la chute, sourire aux lèvres. « Valait mieux que ce soit moi plutôt que vous. » Il se relève, attrape la planche, fait un doigt d’honneur à l’automobiliste qui redémarre en trombe, le klaxon trop facile mais plus aucune gueule quand il s’agit d’assumer. Et Casper qui décoche un nouveau regard au piéton évité de justesse, la lippe recourbée. « Vous n’avez rien, du coup ? » Du coup, comme c’est lui qui a tout pris.
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Jeu 22 Mar - 14:50
« Et… Les portes sont fermées, c’est bon les enfants ! » Le même soupir invisible file d’entre toutes les lèvres. Le service du midi est enfin terminé. Et on y a pas chômé ; presque deux-cents couverts en l’espace de deux heures pour un client moyen dépensant une coquette somme de 25$. Polly nous fait de grands sourires en comptant la recette. Cool, mais ils sont où mes pourboires ? J’finis de débarrasser une table en l’observant attentivement. La question me turlupine depuis un moment : le nombre de couverts ayant doublés sur les trois dernières semaines, où est notre putain d’augmentation de tips ? Quand j’ai commencé ici la simple vue des billets verts me faisait saliver. Puis comme j’ai arrêté de les dépenser comme avant – c’est-à-dire en bières et autres alcools divers pour les soirées, ou pour répondre aux foncedalles quotidiennes des mecs en remplissant le frigo – j’ai fini par vraiment m’y intéresser. Plus ça allait et plus je m’apercevais qu’avoir toujours un peu de thunes dans sa poche arrière c’était quand même plus relaxant que de faire la manche. Mais j’ai aussi appris à me tenir à peu près sur mon lieu de travail.
Alors j’me contente de ramener les plateaux surchargés jusqu’au comptoir. Je jette un œil à l’horloge. Quatorze heures trente. J’ai finis depuis 15 minutes. « J’me tire, à demain Polly ! » Le battant claque dans mon dos avec insolence. J’ai réussi à pas péter les plombs en l’affichant devant les autres salariés, c’qui est déjà un exploit. Je me déshabille rageusement au vestiaire et fourre mes affaires en boule dans le casier. Je sais que demain je le regretterai au moment de me les recoller sur le dos. J’enfile mon blouson trop large. Mes mains s’enfoncent dans mes poches dont l’une crisse avec familiarité. Un p’tit tour aux toilettes avant de filer. Une fois le verrou tiré mes doigts réapparaissent crispés sur de quoi allumer des étoiles sous mon crâne, qui se dissiperont en fines bulles dans mes synapses. Toujours les mêmes gestes, toujours la même came. Mon mouvement est aussi fluide qu’un robot de chaîne dû à l’habitude. J'inspire tranquillement le long de la trace à même la peau tendre de la main. L'amertume me picote l'arête du nez tandis que je rejette la tête en arrière. Quelques secondes s’écoulent. Envolées. J’ai besoin d’exercice, histoire d’évacuer la frustration ancrée dans mes muscles. Alors je m’empresse de sortir. L'air frais me bat le visage, enroulant en un ballet fou ma crinière de jais. Aucun visage connu aux alentours afin de passer le temps. Je suspends un bâton de tabac à mes lèvres lorsqu’une lumière embrumée me fait de l’œil au loin. Les buildings vertigineux du centre ville scintillent d’une telle façon qu’ils en paraissent vivants. Après tout j’ai rien d’autre à foutre et ça fait bien longtemps que je suis pas allée saluer Salem. Salem c’est un chat errant miteux, hautain et pas très à l’aise avec les gens en général, mais pour une obscure raison il m’aime presque bien. P’t’être parce qu’à l’époque où je bossais dans un des cafés du coin je lui filais toujours des restes. J’déteste les félins. C’est pour ça que j’ai baptisé celui-là comme ça ; en hommage à ses racines démoniaques. Le truc chiant c’est que je vois tout le temps cette satanée boule de poils rôder dès que j’ai le malheur d’avoir envie d’un cappuccino correct, et que cœur de pierre ou non j’en viens à chaque fois à lui lâcher un bout de sandwich. Bon Dieu, j’suis tellement laissée pour compte que j’en suis à vouloir fréquenter des chats. Manquerait plus que j’aille boire un coup avec les Yobbo, tiens.
Le matou se pourlèche les babines après s’être rempli la panse. Il me regarde fixement sans aucune aménité, la queue s’agitant dans son dos. J’peux presque ressentir l’énergie qui lui parcoure le corps et ce coup de fouet momentané qui l’agite. Son air canaille est plus vaillant que jamais. Il tourne les pattes sans autre forme d’amabilité et disparait dans la ruelle. Génial. J’ai tué qu’une heure avec ces conneries et j’suis toujours perchée. J’me décide à bouger aussi et rejoint une avenue aux larges trottoirs. J’ai à peine le temps d’entendre le train familier de roulettes contre le goudron pour tourner la tête. Y a un type qui m’arrive pleine balle dessus. Instinctivement je ferme les yeux et lève mes avant-bras dans un geste inutile. Un choc sourd. La sirène du klaxon qui résonne presque simultanément. Ma respiration s’accélère et j’hésite franchement à regarder entre mes doigts écartés. Merde ! J’ai pas tué quelqu’un aujourd’hui quand même ! Ma journée est déjà suffisamment à chier sans en rajouter. Putain de karma. Mon rythme cardiaque se relance lorsque j’entends une voix masculine m’interpeller. Devant mes pupilles ébahies, le type se contente de se relever en adressant une dernière provocation au chauffeur qui aurait pu être son aller-simple. Puis il sourit le con. J’me précipite pas vers ma victime collatérale mais me contente de la laisser me rejoindre avec ses enjambées tranquilles. « Ben… J’suis désolée… » Mince, le cocktail d’adrénaline et de poudreuse m’aide pas. « En même temps t’aurais pas eu à m’éviter si t’avais pas déboulé aussi vite. » Le tutoiement est volontaire. J’me démanche le cou pour le planter du regard. Je suis pas la seule coupable dans ce bordel et il le sait. Et il sait que je le sais. « On peut aller leur demander de te rincer les mains là-dedans. » D’un geste du pouce je lui désigne le café en arrière-plan. « Tu saignes. » Une affligeante évidence.
Dernière édition par Eanna Gynt le Dim 1 Avr - 12:32, édité 1 fois
Casper Pryce
Voulez-vous coucher avec moi ?
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Sam 31 Mar - 0:15
Personne ne peut être aussi heureux. On lui avait dit un jour, il pense, une amie de sa mère ou quelqu’un d’aussi inexplicablement insignifiant à ses yeux, qui avait visiblement remarqué la couleur pastel que prennent ses iris les jours de soleil ou la désinvolture avec laquelle il tire des sourires à la moindre remarque. Personne ne peut être aussi heureux, elle avait affirmé, et Casper avait tendu l’oreille, à peine sept ans et déjà trop de matière grise, à s’en faire péter la boîte crânienne. Madame Pryce, dans sa grande sagesse, avait dodeliné de la tête, écrasé une main trop douce dans les cheveux de son fils, bout des doigts calleux à force de jouer de la guitare, apparence douce mais professeur redoutable au rudoiement facile, avant de souffler qu’il avait toujours été comme ça, que c’était un genre d’aura. Une connerie que seuls les hippies s’amusent à proférer, une vérité qui n’appartient qu’à eux et qui n’a pas vraiment raison d’être ni fondement, qui se contente d’un état des lieux en surface d’un sentiment plus profond. Trop profond. Il aurait aimé, à l’époque, leur dire que ses sourires n’étaient pas le reflet d’un bonheur véritable, qu’ils ne servaient qu’à donner l’illusion d’une vie sur les rails, d’un avenir pailleté, de douceur, de tendresse. Il aurait aimé avouer que s’il souriait c’était pour plein de raisons mais pas parce qu’il était heureux, heureux de courir dans l’herbe et heureux de manger des bonbecs, et heureux de vivre. S’il souriait, c’était parce que son cœur s’affolait, les trois-quarts du temps, parce qu’il n’arrivait pas à faire la mise au point sur sa propre vie, parce que tout se bousculait à la vitesse d’un Boeing et qu’il avait juste le temps d’essayer de rattraper son enfance, de faire des trucs de gosse à l’heure où on l’obligeait à grandir. On, c’était son cerveau, principalement, ses parents aussi, un peu. On, c’était la grande ronde de la vie, celle qui te donne les bonnes ou mauvaises cartes à la loterie, c’était le bingo du dimanche qu’il avait remporté haut la main en alignant tous les bons chromosomes et en ne s’avilissant pas à suivre la masse des autres enfants trop ordinaires. Personne ne peut être aussi heureux. Ça tombe bien, il n’est personne. Focus après la petite commotion, les mains qui se rappellent la chute d’il y a un instant et les yeux qui dévisagent la nana qu’il a sauvée in extrémis. Jolie. Chiante. « Je ne roulais pas vite, c’est mon rythme de croisière. » Sourire, les fossettes qui se creusent dans les joues, il cale le skateboard sous son bras et revient sur le trottoir. Ça tourne un peu, heureusement qu’il n’est pas venu en bagnole, ça serait presque pire que de rentrer chez lui bourré (non pas qu’il l’ait déjà fait). Tu saignes, elle balance. Pas faux, il saigne, suffisamment pour que ça ait collé des traces rouges poisseuses au bas de son sweatshirt. Il n’a jamais été très douillet, Casper, résistant à n’importe quel type de douleur, il n’y a rien qui puisse faire plus mal que les bleus de l’âme. Haussement d’épaules, il essuie ses paumes sur ses fringues, remarque que ça pisse toujours le sang une fois l’épiderme éloigné du tissu. Heureusement qu’il porte du noir. « Ouais », il dit juste, ouais il saigne et ouais c’est con et ouais il risquerait franchement de choper le tétanos ou pire. Les yeux qui se lèvent vers elle, sourire enfantin du gamin qui s’est trop écorché les genoux dans la cour de récréation, casse-cou et rêveur, le nez dans le ciel plutôt que sur ses pieds, habitué à trébucher sur le moindre caillou qui dépasse du sol. Rire au bord des lèvres. Trop de poudreuse, trop d’émotions, il appuie le dos de sa main libre contre sa bouche, le côté écorché qui lui trace comme des lèvres rouges à la place du sourire. « Je devrais peut-être aller les voir », haussement d’épaules et rire qui reprend de plus belle, les cordes vocales qui se secouent dans un léger gloussement. Il prend finalement une grande inspiration, se mord la lèvre inférieure. Clown. « Je te paye un verre ? » Aller là-bas, m’essuyer, te payer un café et te sauter, parce que Casper ne fait jamais les choses à moitié et que ce n’est pas la cocaïne qui lui ferait oublier le joli minois qui lui fait face. Attendre une réponse serait présomptueux, et c’est sûrement pour ça qu’il se hâte vers la devanture jaunie, pousse la porte du café et fonce vers les toilettes. Ça fait du bien, la sensation de l’eau fraîche sur ses mains endolories, ça fait du bien même si la drogue anesthésie tout, même s’il perd jusqu’à la notion du temps, les paumes dans le lavabo depuis au moins cinq minutes lorsqu’il entend quelqu’un entrer derrière lui. « C’est les toilettes des hommes, tu n’as rien à faire là », sans se retourner, il sourit dans la glace. Le café était désert quand ils sont entrés, et il sait avant même de regarder le reflet que ça ne peut être qu’elle.
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Dim 1 Avr - 12:27
Y a ses prunelles qui miroitent plein phare vers moi. Enfin, j’vois plus de pupille qu’autre chose en fait, alors même qu’on a un soleil presque éblouissant aujourd’hui. Et puis y a ses mains. Elles sont plutôt carmin pour l’instant, plutôt sales aussi. Mais ça m’a pas empêchée de noter des spasmes nerveux qui les lui agitent. Tout ça parce qu’il doit avoir l’impression de grouiller d’énergie avec tout ce que son système nerveux à mille watts lui balance. Je l’sais parce que je suis pareille quand j’viens de m’en envoyer une petite. Ça expliquerait d’ailleurs plus facilement son sourire placardé en façade. Il est lumineux et a pas bougé d’un iota. Même pas quand j’lui ai indifféremment proposé d’aller se débarbouiller du sang maculant ses paumes ; en espérant évidemment qu’il y aille tout seul comme un grand. J’en déduis donc qu’en dépit de sa gueule de premier de la classe dans son genre, son niveau de dopamine doit être au rendement maximum. Méfiance Nana. Alors certes, j’étais pas la plus attentive en cours de religion que nous dispensait notre paternel tous les jours saints. (Chaque dimanche sans faute, jusqu’à ce qu’on soit assez grand pour entrer en conflit ouvert avec lui.) Mais en tout cas, j’ai bien retenu un truc : le diable se revêt souvent de douceurs. Alors un type avec une gueule d’ange pareille et qui propose de vous payer un truc ? Sens interdit. Quoique dans l’genre ça m’a pas empêché de me coltiner JJ. De toute façon j’ai même pas le temps de me poser sérieusement la question. Il tourne les talons et se casse à l’intérieur sans un regard en arrière. Le mec doute de rien. Immédiatement, je décide qu’il faut absolument que je lui dise d’aller se faire foutre. Dans un langage plutôt fleuri de préférence.
Au même moment y a un effleurement le long de ma moelle épinière. Juste un petit sursaut pour me signifier le mal de crâne qui arrivera bientôt, juste derrière les orbites. Diffus mais tenace. Pour me dire aussi de faire attention au gros coup de fatigue que je vais forcément me taper alors que j’ai dormi que quelques heures y a… combien de temps déjà ? L’embrayage se fait sans effort : tous mes réflexes sont en pilote automatique. Je cogite tranquille dans mon coin alors que mes jambes m’emmènent déjà à la suite de l’idiot-qui-doute-de-rien. A peine la porte est-elle poussée que mes yeux se posent sur l'entrée des chiottes. Parfait. Je fonce dedans en dépit de l’indication masculine – y a pas grand monde que ça pourrait gêner de toute façon – et m’en vais m’enfermer dans la première cabine à portée de main. Sa voix grave résonne contre le carrelage pour me faire remarquer mon indiscrétion. « T’as quand même une sacrée grande gamelle pour un mec qui vient de se boîter lamentablement. Comment ça s’fait, t’essayais de faire un ollie ? » Mon ton est sarcastique. Parce qu’on sait tous les deux qu’il a plutôt su gérer pour m’éviter au dernier moment à la vitesse où il allait. Et qu'accessoirement, il a faillit se faire emboutir en le faisant. J’espère qu’il douille. « En tout cas pour info : le genre pleurnichard ça attire pas les filles. » OK, j’suis clairement en train de le chercher. Et je sais exactement ce que je fais. Après tout, la proposition de ce drôle d’inconnu me permet d’éviter de tourner en rond entre mes quatre murs. Ou de zoner pendant des heures sur les trottoirs. La perspective d’un verre avec un gars qui ne me connaît absolument pas est assez libératrice. Puis j’aurais pas à me repasser en boucle l’entrevue avec JJ. A chaque fois que j’y repense j’ai l’impression d’être aux fers avec lui.
Pendant que je parle, mes mains s’activent. Tout ça me donne envie d’une nouvelle tournée. Froissement du plastique. La poudreuse qui tombe. Franche inspiration. Je ressors de ma cabine comme si de rien était et viens me planter à côté de lui. Je m’observe ostensiblement dans le miroir pour vérifier qu’aucun grain n’entache mes narines. Côté discrétion j’en ai rien à foutre : j’suis quasi-sûre qu’il est dans l’même bateau. « Tu te décides à me dire ton nom ou j’dois te tirer ton portefeuille ? » Encore une fois, je lui sers un regard carrément hostile. S’il est pas foutu de faire preuve de second degré c’est que je perds mon temps.
Casper Pryce
Voulez-vous coucher avec moi ?
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Ven 13 Avr - 19:15
Indiscret. Ça se voit quand il jette un coup d’œil au miroir, essaie de deviner dans quelle cabine elle se cache. Entend le bruit distinctif du petit sachet qu’on ouvre, qu’on craque, ça le distrait un instant, au point qu’il oublie ce qu’elle vient de lui dire. En temps normal, il ferait comme s’il n’avait rien remarqué, se casserait de là vite fait, lancerait son skateboard au sol pour dévaler de nouveau les rues à une vitesse folle sans se préoccuper du massacre qu’il laisse derrière lui. En temps normal, une heure où il n’aurait pas eu les veines aussi blanchies par la poudreuse que Courchevel en plein mois de décembre ; ça arrive de moins en moins fréquemment, faut dire. A croire que la tendance se renverse, que l’exception devient la règle. En temps normal, ça s’applique encore quand on sniffe H24, le sang dopé aux stimulants, le blanc qui se verrait presque en coin de narine pour peu qu’on y fasse attention. « Ça tombe bien, je ne suis pas du genre pleurnichard », il murmure avec un sourire, rebondit juste sur sa dernière affirmation. Plus facile que de laisser la place à plein de possibles, s’étonner qu’elle s’enferme elle aussi pour s’en jeter une derrière la cloison nasale, ressorte en s’épongeant la truffe sans aucune honte. Elle cache quoi, cette nana. Elle cache quoi derrière ses cheveux courts qui pendouillent, son air de chien battu, elle cache quoi derrière son teint pâle, les cernes qui ressortent comme si elles étaient maquillées, ses pupilles trop dilatées pour savoir qu’on est en pleine journée. Elle cache quoi avec ses airs de ne pas y toucher, de ne pas savoir, son côté innocent naïf qui bombarde de signaux contradictoires, l’évidence quand elle tire sur sa lèvre, inspection des travaux publics. « Tu peux toujours essayer de me voler mes papiers », il balance, pas inquiet, trop habitué aux mains habiles, puisqu’il en est une lui-même. Connaître le marché pour savoir se faire son trou, sa place. Il ne compte pas les années qu’il a passées à voler à la tire juste pour se marrer, échapper aux flics quand les choses se corsaient, parcourir les rues de Savannah sans avoir le temps de regarder les vitrines, coureur trop véloce, brigand fantôme. « Ça peut m’amuser. » Ça peut, ouais, choper sa main quand elle l’aura plongée dans la poche arrière de son jean, lui décrocher un sourire quand ses phalanges enroberont son poignet. Ça peut l’amuser, un rien le distrait, le garçon. Draguer une inconnue dans les chiottes d’un bar, par exemple, précepte qu’il applique minutieusement lorsqu’il tourne complètement son regard vers elle, accroche ses pupilles de junkie, la lippe recourbée histoire de lui montrer qu’il n’est pas dupe. Cœur trop mou, trop sucré. « Caz », il incline la tête comme s’il se présentait formellement alors qu’il n’a même pas donné son vrai prénom, juste un diminutif. Caz, ça passe plus facilement, il a envie d’entendre sa voix se craquer en le prononçant, effeuiller les lettres comme des feuilles d’or. Il n’a pas vraiment envie de lui demander le sien, de prénom, ça ne lui effleure même pas l’esprit. La drogue, l’arrogance, un joli mélange des deux qui peut rapidement donner des accents explosifs à leur échange, si elle continue de voguer sur le fleuve de cynisme qui porte sa barque. Ses mains lui font mal, sûrement, il n’est pas sûr de les sentir encore, le cœur qui pulse trop sous l’effet de sa drogue, son addiction, la seule chose qui le pousse trop souvent à agir sans réfléchir, foncer dans le tas la tête la première. « On fait quoi alors ? » Ça se pète sur ses lèvres, dégringole sur la pulpe, y a un brasier dans ses yeux et pas grand-chose dans son cœur, pas de frisson et pas d’adrénaline, rien de bien notable. L’envie de s’amuser, de bousculer les meubles, se faire virer d’un bar dans lequel il aurait trop pris ses aises. On fait quoi. Pas l’habitude de laisser les autres décider pour lui. Avec un peu de chance, ça sera payant, histoire de lui donner envie de renouveler l’expérience.
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Ven 20 Avr - 21:52
Il a encore l’sourire pendu aux babines. C’est presque contagieux ces conneries. Le coin de mes lèvres frémissent, résistent : le jeune inconnu ne l’mérite pas encore. « T’aurais l’air con sans thunes pour payer mon verre… J’t’épargne va. » Il a l’air bien sûr de lui. C’est louche. Et charmant. Nos regards s’égratignent dans la glace souillée par les coulures. Je le palpe sous toutes ses coutures sans chercher à me dérober à sa réciproque inspection minutieuse. Sous la lumière sordide des néons y a des cernes qui lui bouffent le visage et lui donne un air canaille. Il s’accorde finalement assez bien avec sa chemise joliment coupée mais dégueulassée par sa récente chute. D’habitude j’arrive rapidement à cerner les gens, mais lui le mystère qui l’auréole est bien trop épais pour que j’parvienne à le percer. Ça me titille. Enfin soit ça, soit sa voix rauque qui s’introduit entre nous pour me livrer son prénom. Caz. Trois lettres. Uniquement. C’est encore plus louche. Ça sent l’blase qu’on balance pour pas s’faire prendre. Monsieur est pas tout propre sur lui visiblement, au figuré comme au sens propre. J’me demande s’il s’agit d’un diminutif ou d’un surnom. Pas impossible que le skateur soit également graffeur par exemple, et donc qu’il ait quelque intérêt à devoir garder son identité. Je le vois bien sous couvert de l’obscurité à repeindre les murs de symboles cabalistiques, bombes métalliques aux mains et black book dans l’sac à dos. J’devrais faire plus attention aux fresques qui ornent Savannah. Ou alors j’suis tout simplement trop négligeable pour qu’il me donne son véritable prénom.
J’hésite à prendre la peine de lui renvoyer l’amabilité, mais comme j’détesterai qu’il m’appelle par un « toi » carrément grossier j’préfère le lui dire en articulant à peine. « Nana. » Après tout, il a pas besoin d’en savoir plus et moi non plus. Deux inconnus, un bar, des pseudonymes. Drôle d’équation. Ravissante équation. Caz donc, choisit de s’laisser porter. Et j’accepte de mener la danse. « Tu viens d’me dire que tu m’offrais à boire, nan ? » Évidemment, j’précise pas que j’vais prendre le truc le plus cher. Celui qui défonce le plus aussi ; vu c’qui circule dans mes veines j’pourrais coucher le dernier des poivrots haut la main. Avantage indécent de la coca. J’retrouve de vieux réflexes. Hirondelle impatiente, je tourne les talons aussi sec pour ressortir de là le menton hautain. Juste retour, j’vérifie pas que mon nouveau copain m’embraye le pas. Le coin est toujours aussi désert, voir carrément déprimant. Mais il en faudrait plus pour me détourner. La démarche affirmée j’file droit jusqu’au comptoir et interpelle le barman en tapotant sur l’zinc. « Mettez-moi c’que vous avez de mieux. Double dose. C’est lui qui raque » Je désigne d’un pouce l’espace dans mon dos. J’ai décidé d’être grossière pour voir jusqu’où j’peux aller avec mon acolyte tout neuf. Le serveur ne relève même pas et se contente d’acquiescer, une expression de franche indifférence collée sur les traits. Je l’observe faire sauter un bouchon, piocher dans les glaçons et faire glisser un verre remplit de liqueur jusqu’à mes doigts. Je l’empoigne et me retourne nonchalamment. « Alors Caz. Tu fais quoi dans la vie, en dehors d’essayer de foutre la frousse aux jeunes filles et de t’faire renverser ? » J’m’en fiche. Mais ça m’intéresse un peu quand même. Tout ce dont j’ai besoin c’est dix minutes de divertissement. J’ai toujours pas touché à mon récipient où la condensation s’accumule contre les parois. Je sais toujours pas non plus ce qu’il y a dedans. En revanche j’ai la surprenante politesse d’attendre qu’il commande à son tour pour trinquer avec lui et pouvoir descendre triomphalement ma première gorgée. J’crisse des dents en essayant de lui faire comprendre de se magner. Ma patience n’a pas bonne réputation.
Casper Pryce
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Dim 22 Avr - 19:33
Un gosse. Les mains pleines de sang et le sourire plein de dents, un gamin qui trébuche dans la boue, s’empale sur les erreurs mais qui fait attention à ne pas s’blesser de trop, maman regarde sûrement au loin. Un enfant obstiné, obstinant, les yeux qui cherchent quelque chose dans le visage de l’inconnue qu’il essaye de retrouver sur toutes les bouilles qui croise, un brin de similitude, histoire de savoir s’il peut jouer de son humour avec elle. Visiblement oui, vu sa réponse à la remarque sur son portefeuille. S’il avait oublié le verre formellement promis quelques minutes plus tôt, elle le rappelle rapidement à l’ordre, l’obligeant à remettre à plus tard ses frivoles ambitions. Payer un verre à Nana. Apparemment, un vrai prénom, aussi authentique que Caz au demeurant. Il n’a pas tellement à se plaindre, au fond, ça serait l’hôpital qui se fout de la charité, qui n’ose pas se présenter mais reprocherait la réciproque. « Enchanté », ça se glisse sous son souffle, discrétion qui se veut charmeuse parce qu’il a l’impression que donner dans le grandiose serait plutôt malvenu, quand on sait la dose de stupéfiants qui coule dans ses veines. Plein de bonnes manières, Casper, habitué aux courbettes, à la plus absolue des politesses, au contraire de son interlocutrice qui tourne déjà les talons en direction du bar. Amen.
Il la suit docilement, écoute attentivement les directives balancées négligemment au barman déjà passablement énervé par leur irruption fracassante d’il y a quelques instants. A croire que certains commerçants n’aiment pas les clients, préfèreraient rester seuls derrière leurs zincs à n’encaisser que les verres de pignole en douce. Casper n’a jamais compris pourquoi ils faisaient ce taff si c’était pour cracher sur les gens qui leur permettent de gagner leur croûte. Faut croire que certains préfèrent prétendre aimer le social, aimer les gens, se faire du pognon le plus honnêtement possible. Il suppose que c’est mieux, sûrement, que de traîner dans la rue et piquer des bagnoles, mieux que ce qu’il aurait pu faire s’il n’avait pas un seul instant remis sa vie en perspective, repensé ses mauvais choix pour éviter de les reproduire à l’infini. Il n’a jamais été un bon faussaire, Casper, trop inventif. Electron libre. Être prof c’est peut-être pas bien glorieux, mais ça permet de se faire son beurre de la manière la plus légale qui soit. Mieux que ça, il rend service à l’humanité, quelque part, en éduquant des esprits encore trop malléables, influençables, en leur montrant que tous les adultes ne sont pas des fruits pourris qui tentent de contaminer le panier. Si on ne compte pas la poignée d’étudiants qui sont passés entre ses draps, mais pour sa défense ils étaient a) tous majeurs et b) tous consentants. De toute façon, Nana n’a pas besoin de savoir ça. Tout ce qu’elle veut c’est un portefeuille, et il est plutôt prêt à assumer ce rôle, tant que. Ah, merde. Tant que ça ne risque pas de le ruiner, raté. Il s’est déjà approché, a fait pivoter du bout des doigts la bouteille de scotch, sait parfaitement combien elle doit coûter. Bien. Ils ont juste intérêt à faire une percée héroïque quand viendra le moment de poser les billets sur le comptoir vu qu’il n’a franchement pas envie de passer toute sa paye dans de l’alcool, quoique l’idée lui effleure un instant l’esprit. L’alcoolisme qui parle.
« Pas besoin de mettre l’emphase sur le Caz, tu sais. C’est vraiment mon surnom. » Sourire au coin des lèvres, soleil dans les fossettes, il voit bien qu’elle n’y croit pas même si pour une fois, il ne ment pas. De toute façon, très peu de personnes l’appellent par son prénom complet, alors autant lui faire prendre les bonnes habitudes tout de suite. « La même chose, s’il vous plait, sans les glaçons », il demande au barman en désignant la bouteille des yeux, pas de raison de laisser perdre un aussi délicieux nectar, même s’il réfléchit déjà consciencieusement à son plan d’évasion. Il attend que ça soit servi, fait claquer son verre contre celui de la demoiselle avant de le boire cul sec, le reposer à l’envers sur le zinc. Une putain de bonne descente, ouais. Heureusement qu’il se fout pas mal de l’image qu’il peut renvoyer. Un peu plus et Nana penserait qu’il trempe ses tartines dans le whisky le matin. « Je suis prof. » Il s’assied sur le tabouret de bar, tapote du bout de l’ongle le cul du verre qu’il vient de retourner. Ouais, prof, elle va sûrement commencer à cogiter un peu trop, se demander ce qu’il fout en dehors d’une salle de classe à cette heure de la journée. « Pas prof de maths hein. Même si j’adorais ça. » Il adorait, ouais, se tapait un sprint pour le podium à chaque contrôle. Mais il préférait la littérature, c’est toujours le cas d’ailleurs. Encore plus quand il a une jolie fille à qui réciter des vers, peu importe qu’elle soit moins réceptive que ce qu’il espérait. « Littérature classique. » Les dents qui mordent doucement sa lèvre inférieure, toujours cet exaspérant sourire sur le visage. Comme si ça pouvait séduire. Même s’il lui déclamait le monologue du balcon dans Roméo et Juliette, il est persuadé que ça ne lui ferait pas lâcher un seul battement de cils. « Et toi, Nana, tu fais quoi dans la vie à part te faire payer des verres par de sombres inconnus ? » D’autres trucs, il espère. Ça l’intéresse, quelque part, suffisamment pour qu’il se tourne complètement vers elle et devienne absolument silencieux. Ça ne lui arrive pas très souvent, trop bavard pour vraiment savoir quand il serait bon ton de serrer les dents. Quand il est intéressé, pourtant, il resterait plusieurs heures sans prononcer le moindre mot. A voir si elle tiendra la distance, maintenant.
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Mer 2 Mai - 19:45
Son surnom donc. J’espère pour lui qu’il se prénomme pas Casimir, j’aurais du mal à pas m’foutre de lui si je l’apprends. Il a la mâchoire qui fleurit en fossettes. Pas désagréable à regarder l’garçon. Ça m’donne envie d’y planter mon doigt en plein dedans pour les faire disparaître. J’ai du mal avec les gens trop heureux. Il m’imite pour la boisson. Tout pareil, sauf le tintement de la glace qu’il remplace par celui des verres s’entrechoquant et la descente d’une fluidité hallucinante alors que j’ai juste le temps de grimacer sous l’effet de la première gorgée. J’lui accorde un sourire plus franc que les précédents : la prestation l’vaut bien. J’manque de m’étrangler quand il m’annonce son job. L’étirement des lèvres se transforme en ricanement moqueur. Lui ? Prof ? Avec sa tronche de bandit, l’haleine éthylique et les iris qui se résument à un minuscule cercle ? Sans déconner. Je tiens la meilleure de l’année. Je le suis du regard lorsqu’il s’installe nonchalamment. Je l’imagine en blouse blanche, potentiellement en train d’apprendre à fabriquer de la meth à ses étudiants. Il me détrompe presque immédiatement. Y a un côté romantique qui colle pas avec ce qu’il me raconte. J’le vois mal s’esquinter les yeux sur les caractères et rester en place suffisamment longtemps pour disserter dans le vase-clos d’une classe. J’le cerne pas en fait. Y a plein de zones d’ombre et de paradoxes. Il m’intrigue. « C’est cool. Et du coup ? Tu couches avec tes élèves ? » J’me décale légèrement en lovant on menton contre ma paume, la moue moqueuse, les prunelles faussement sérieuses.
« Moi… Si j’te dis cocktails, peu d’pourboires et beaucoup de mecs lourds ça t’évoque quoi ? » J’m’envoie une nouvelle rasade. J’ai aucune honte à déballer mon statut de serveuse. Après tout, il est pas plus clean que moi. Il peut bien se la jouer intello mais l’professeur est manifestement en train de faire l’école buissonnière là tout de suite. Déjà la raillerie suivante s’faufile au bout de la langue et des papilles engourdies par l’alcool. « Mais j’préfère de loin en effet, me retrouver à boire des coups outrageusement chers aux frais de la princesse avec de sombres inconnus. Surtout quand ils ont un p’tit nom marrant. » J’avale une autre gorgée. Elle passe mieux que la précédente. « D’ailleurs t’as les ronds pour nous payer c’luxe ? » J’lui montre la bouteille bien entamée. C’est pas que j’ai des doutes, mais il m’semble pas que l’éducation nationale soit forcément rentable. Notamment quand on a des travers qui coûtent chers à l’entretien. « Ou faut que j’me prépare à courir ? » J’baisse la voix pour que le barman m’entende pas, parce qu’il a une carrure d’athlète vieillissante. Le genre de gars qui peut vous faire la surprise de vous rattraper et d’vous plaquer au sol pas très gentiment. Fort heureusement j’ai des baskets toutes pourries aux pieds. Sans classe, OK, néanmoins pratiques pour prendre la tangente. En même temps j’me rapproche de Caz. Tout en fluidité, comme si ça coulait de source. Un air conspirateur sur le visage, les souffles qui se croisent. Mes hanches qui s’alignent se heurtent presque ses genoux relevés sur le barreau du tabouret. De loin on pourrait croire à de la drague. De près aussi. Pourtant c’est plus léger que ça. Sûrement car l’avoir vu vautré par terre a estompé les inhibitions naturelles que connaissent deux inconnus fraîchement rencontrés. « Non parce que ça, ça m’plairait carrément. » S’perdre dans les ruelles, à bout d’souffle, l’expression hilare en regardant par-dessus nos épaules pour vérifier qu’on a semé les chasseurs. La chaleur qui condense en perles iridescentes sur la peau et l’goût du danger sous les dents.
Casper Pryce
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▹ posts envoyés : 707 ▹ points : 29 ▹ pseudo : unserious/agnès ▹ crédits : avatar/aes : moi / signa : debout sur le zinc, gif tumblr / images WHI ▹ avatar : Taron Egerton▹ signe particulier : un tatouage représentant une molécule d'endorphine qui fait le tour de son avant-bras gauche, la clope au bec, toujours un bouquin de Shakespeare pas très loin. les mains qui tremblent depuis le sevrage forcé, pâle comme un linge, austère et froid.
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Mar 8 Mai - 21:10
C’est assez drôle d’écouter la façon qu’ont les mots de se tordre entre les lèvres de Nana, assez drôle et fascinant, suffisamment pour qu’il plisse les yeux et tende les oreilles en bon élève discipliné. Suffisamment pour qu’il esquisse un sourire quand elle lui demande s’il couche avec ses élèves. Ça se voit vraiment ? Enfin, ça se lit sur sa tronche ? Il n’espère pas, en tout cas, conscient que sa place ne tient qu’à un fil beaucoup trop ténu, rogné par ses diverses incartades, qu’elles impliquent ou non sa fidèle poudre blanche. Sûrement qu’il vaut mieux ne pas répondre, se contenter de sourire en haussant les épaules, sûrement parce qu’il y a un barman à côté qui n’en perd pas une miette et qui serait plus que ravi de les balancer aux flics si l’envie lui prenait. Nonchalamment, Casper attrape la bouteille et renverse son verre pour le remplir de nouveau. C’est un ensemble, faut croire. La coupe au carré de Nana, son air faussement innocent, le sujet qui fâche vaguement évoqué, comme un rappel à l’ordre perpétuel. On pourrait lui lister l’ensemble de ses erreurs que ça ne lui sauterait pas autant aux yeux. C’est un ensemble, oui, Nana qui parle de nouveau, lui laisse deviner son boulot en charades, le corps qui penche inconsciemment vers elle, langage terriblement explicite qui donne plus d’indices que le feraient des mots. « Ah », petit soupir entre ses lippes courbées, ah il a compris, ah c’est même pas surprenant, ça lui colle plutôt bien à la peau. Ah, et pourtant il ne lâche pas le mot, ne répond pas vraiment à sa question, mauvais joueur quand l’épreuve est trop facile, quand on lui file la solution toute cuite dans la bouche. Ah, évidemment qu’elle préfère boire des verres avec des inconnus, c’est toujours mieux que servir des verres à des inconnus, se faire reluquer trop longuement et n’avoir droit qu’à des remarques salaces pour tout remerciement. « Et bien », il commence à répondre quand elle lui demande, rebascule la bouteille à peine posée sur le verre de la demoiselle pour étancher sa soif. Il a les ronds, en réalité. Il les a parce qu’il ne dépense pas beaucoup à part pour la drogue, parce que son loyer est plutôt raisonnable, parce qu’il a quelques sous de côté et parce que papa et maman continuent de l’arroser copieusement tous les mois. Il a les ronds, oui. Mais il ne compte clairement pas les dépenser là-dedans. Et lorsque les mots de Nana suivent sa propre folie, il sourit, claque son verre contre le sien et l’avale de nouveau cul-sec. Il n’a pas tellement d’hésitation lorsqu’il s’agit de brûler les planches, Casper, lorsqu’il est question de se jeter sur la scène et de jouer le rôle qu’il connaît le mieux, qu’il connaît par cœur. Celui du menteur. Il ne met pas sa comparse dans la confidence, parfaitement conscient qu’elle comprendra la finalité de sa fourberie le moment venu. Le tabouret valdingue presque quand il se relève, s’agrippe soudain au bar, une main contre les côtes. « S’il vous plait », il grommelle entre ses dents à l’adresse du barman, des frémissements dans la voix et le souffle court. Un coup d’œil vers lui suffit à lui faire comprendre qu’il ne parvient qu’à attirer partiellement son attention. Soit, il n’avait pas prévu de la jouer fine de toute manière. Il y a un gémissement qui se fraye un chemin à travers sa gorge, se transforme en cri de douleur au dehors, reportant immédiatement le regard du commerçant sur lui. Il oscille, semble-t-il, entre perplexité et mépris. « Je suis tombé tout à l’heure, je pense que je me suis fêlé quelque chose. » Claudiquant, il se dirige de lui-même vers une banquette, largement plus confortable que les banals sièges de bar, le plus près possible de la porte. Une feinte ridicule que le barman accueille avec un froncement de sourcils, les mains qui se vissent soudainement à son zinc comme s’il était prêt à bondir. « Merde », il souffle comme s’il était à l’agonie, fait un discret signe de la tête à l’adresse de Nana pour qu’elle le rejoigne. S’ils veulent tenter une percée héroïque, il faudra être rapide, ne pas laisser une seule chance à ce type de les rattraper. Il a carrément la tête d’un mec qui tuerait pour moins que ça. « Vous pouvez appeler une ambulance ? » Ton presque suppliant, il voit l’hésitation dans les yeux du quinquagénaire. Ça ne dure pas longtemps, un bref instant avant qu’il ne pointe un index vers eux en guise de mise en garde (qui ne trouve pour réponse qu’un vague hochement de tête de la part de Casper), et s’éloigne en direction de l’arrière boutique. Casper tend l’oreille, se penche pour être sûr qu’il ne risque pas de les entendre et se redresse presque d’un bond. « On y va. » Un clin d’œil à Nana et il est déjà parti, son skateboard sous le bras, courant comme un dératé dans les rues de Savannah. Et il espère très sincèrement qu’elle est juste derrière.
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Ven 18 Mai - 14:41
Nos deux verres tintent encore et l’sien se vide à nouveau. Je sirote une gorgée, plus lentement pour en savourer la tourbe qui se coince dans chaque papille tandis que les différentes molécules qui s’baladent dans mon organisme m’enjoignent à sourire. J’ai parfaitement identifié l’éclair de génie qui lui a travesti des traits malicieux. Caz va p’t’être s’avérer bon compagnon de jeu. Immédiatement il enfile son rôle avec souplesse, sourcils froncés et la bouche tordue en grimace douloureuse. J’sursaute quand sa chaise fait un brusque écart et m’retiens de pas me marrer devant sa mine théâtrale. Le barman daigne nous accorder son attention, à peine assez longtemps pour détailler l’homme chancelant jusqu’à une couche improvisée. J’suis sûre que l’employé se demande surtout s’il va pas avoir à nettoyer du sang, d’la pisse ou du vomi qui risquent d’en souiller le tissu. Ou l’embellir vu sa couleur déjà douteuse.
J’en profite pour siffler le reste de ma liqueur et rejoindre Caz - qui opine discrètement du chef - à grand renfort de piaillements désolants. Je plaque une main sur mon visage en dissimulant les commissures de mes lèvres dangereusement relevées. L’autre nous fait un show toujours plus dramatique : j’pourrais presque croire qu’il souffre vraiment si je l’avais pas vu juste s’abîmer les paumes comme un môme maladroit. J’viens m’accroupir à côté de lui, les yeux levés au ciel quand j’l’entends réclamer une ambulance avec sa voix d’outre-tombe. L’employé derrière nous hésite encore à rejoindre ce cirque. Il doit en avoir vu d’autres, et des plus tordues pour éviter de payer la douloureuse. « Putain mais bougez-vous là ! Il peut s’perforer un poumon avec cette connerie ! » J’lui gueule dessus, des trémolos dans les voyelles. Madame est inquiète et on sait tous comment les femmes peuvent réagir quand leur cher et tendre souffre. Les hormones qui nous transforment en furies, il paraît. Le barman finit par rendre les armes. A mon avis on a trois minutes et pas une de plus, le temps qu’il se rende compte de la supercherie. Tous mes muscles sont déjà tendus, prêts à partir au top départ. Caz relève prudemment la tête avant de détaler d’un coup. Sa voix se perd derrière-lui et je n’parviens qu’à en attraper quelques bribes en m’élançant à sa suite.
J’ai l’cœur qui cogne fort sous le plexus. Le vent qui siffle aux oreilles. J’déboule sur le trottoir en vrillant mon regard à gauche, à droite, jusqu’à apercevoir enfin la tignasse brune que j’recherche. Dans mon dos la porte vitrée tinte et le commerçant en surgit, l’regard fou, l’écume aux babines en nous traitant de tous les noms. J’me dépêche de foncer jusqu’à Casper avec son foutu skate et sa mine hilare qui ont déjà traversé la rue – et sans se faire renverser s’il vous plaît. Je m’arrête à côté de lui les mains sur les genoux pour essayer de retrouver ma respiration hachée par le fou-rire qui dégringole de mes lèvres. Le type du rade est toujours sur le seuil, cramoisie de hargne. J’lui souffle un baiser accompagné d’un geste franchement obscène du majeur. Comme si j’étais exemptée des conventions. Vilaine môme. J’me sens libérée d’un poids énorme l’espace de quelques secondes. J’suis redevenue l’adolescente sinoque qui se fout du monde entier et qui cherche une récréation en faisant chier l’intégralité du genre Humain. « Merde ! » J’donne un coup de coude à Caz en lui montrant le barman racoler à cors et à cris un type de la sécurité publique. Il nous braque du regard. C’est pas bon pour nous. « COURS ! » J’pars devant comme une flèche, toujours le rire pas très loin, en cherchant une ruelle où s’engager. Y en a une qui nous tend les bras avec ses bennes crades. J’bifurque sans hésitation, à peine un coup d’œil par-dessus l’épaule pour constater mon skateur sur mes talons. L’embrasure d’une porte de service se dessine : l’occasion parfaite pour se dissimuler. J’me jette contre le battant en m’coupant presque la respiration. Caz tarde pas à surgir à son tour et je l’agrippe par la manche – quitte à lui décrocher carrément – par peur qu’il me loupe. « Viens par là toi ! » On s’retrouve blottis au creux des briques, l’œil à l’affût d’éventuels poursuivants. Y a son skate qui m’égratigne la hanche. Et son souffle qui m’chatouille la nuque. J’prends brusquement conscience de notre totale proximité. J’ai chaud. J’ai besoin d’une clope putain.
Casper Pryce
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Lun 21 Mai - 15:53
Le ciel est bleu et il vole. C’est ce qu’il fait de mieux, Casper, au sens propre comme figuré, voler pour que ses pieds touchent un peu moins le sol, voler pour se sentir vivant, carburer à plusieurs mètres au-dessus des gens. Il a l’impression d’avoir des ailes quand ça lui arrive, quand il plane et que c’est un mélange de plusieurs choses, la cocaïne, l’alcool et Nana qui le rattrape bientôt, qu’il entend courir après lui, pour laquelle il ralentit le rythme afin qu’elle le rattrape éventuellement. C’est ce qu’elle fait, le souffle court et les mains appuyées sur ses genoux, pliées en deux par la soudaineté de l’effort, et il jette lui aussi un œil en arrière pour voir si le barman s’est jeté à leurs trousses. « Allez, on y va, dépêche », il souffle en riant, la respiration saccadée et le teint écarlate, à observer sa compagne d’infortune faire des gestes obscènes au commerçant furieux, les faux baisers qui se mêlent aux doigts d’honneur. Il se dit un instant qu’elle est belle, vraiment belle, quand le rouge mord ses joues et que son sourire y creuse des fossettes, quand elle jongle à merveille entre l’adorable et l’indécent. Coup de coude, il a un peu trop laissé trainer les yeux sur elle, s’aperçoit suite à son rappel à l’ordre que le colosse qui leur hurlait des insultes quelques secondes plus tôt alpague soudain un agent de police. Réponse instinctive à l’ordre qu’elle lui hurle, il se remet à courir à grandes enjambées, la suit à la trace. Son dévolu se porte sur une ruelle et il emboite le pas sans se faire prier, se lance à sa poursuite jusqu’à ce qu’elle lui agrippe la manche et l’attire dans l’embrasure d’une porte. Il a mal aux côtes, Casper, la respiration encore chancelante alors qu’il se réfugie contre elle, sans faire attention à son skateboard ou à leur toute nouvelle et déroutante proximité. Un dernier éclat de rire et déjà, il tend l’oreille, s’apprête à devoir repartir en cavale d’un instant à l’autre. Un bout de lui continue de se demander comment ils ont pu se foutre dans une merde pareille en toute connaissance de cause. L’autre est encore galvanisé par la fraîcheur de leur escapade, le sentiment d’avoir de nouveau quinze ans, vandale, voleur, dealeur, ses plus belles années et sûrement les pires. Dans tous les cas, elles n’ont jamais eu un aussi joli visage que leurs bouilles cramoisies et dégoulinantes de sueur. Un instant, Casper tend l’oreille, s’apprête à voir surgir le flic à tout instant, une main crispée sur le mur de briques, après avoir pris soin de poser le skateboard à côté d’eux, et l’autre vissée sur le bras de Nana. Trop de bruit, Savannah respire trop vite, trop fort, Savannah vit et c’est sûrement ce qu’il aime habituellement, ce qu’il déteste aujourd’hui. Savannah vit et eux aussi, encore essoufflées, l’odeur des poubelles à proximité qui vient se mêler à leur parfums si distinctifs et au sang qui tâche encore les mains du prof. Et il s’apprête à sortir de leur cachette improvisée mais il entend des voix s’approcher, croit voir une silhouette amorcer un détour par leur ruelle. « Chut », il souffle dans l’oreille de Nana, se colle un peu plus contre elle, le bassin contre ses fesses et le nez dans ses cheveux, à se doper à l’odeur de son shampoing plutôt qu’à une énième drogue. Il a glissé son index sur ses lèvres pour accompagner sa supplique, laissé les phalanges s’attarder à la naissance de son cou, dessiner le contour de sa clavicule. Y a plus que le bruit des pas qui raclent sur les pavés, plus que le son du policier qui s’approche, s’arrête à quelques centimètres de leur planque. Le bruit seulement, oui, parce qu’ils sont collés à la paroi, parce qu’ils ont presque fermé les yeux, parce que le cœur de Casper tambourine dans sa poitrine et qu’il est persuadé que c’est suffisant pour les trahir.
Ça dure une éternité. Une éternité ou quelques secondes, c’est tout comme. L’adrénaline descend en avalanche dans ses veines, rend ses jambes flageolantes, il est à deux doigts de se casser la gueule quand le flic décide finalement de faire demi-tour, et il s’assure que le bruit de ses pas se fond totalement avec les sons si familiers de la ville pour lâcher le bras de Nana. Ça cogne. Ça siffle. Ça pique, quelque part dans son abdomen ou un peu plus bas. Il n’arrive pas à reprendre vraiment son souffle et il se demande si c’est dû à leur course-poursuite où à la fille encore trop proche de lui, au foutu parfum de lavande qui explose encore dans ses narines. « On dirait qu’on s’en est sorti », il murmure, toujours aussi proche d’elle, le sourire dans ses cheveux. Il a perdu ses gestes quelque part en route, la main désormais posée sur sa hanche, conscient que cette proximité est insolite parce qu’ils ne savent rien l’un de l’autre, parce qu’ils ont tout juste partagé un verre et un coup de folie, parce qu’ils planent tous les deux à des univers d’ici et que leur seul point commun est qu’ils consomment le même poison. C’est peut-être pour ça que c’est plus simple. Pour ça que c’est plus doux. Alors il ne la lâche pas, l’incite à se retourner le plus délicatement du monde, comme s’ils cherchaient toujours à échapper à un prédateur trop proche, trop sournois, comme si la discrétion était toujours de mise. Le souffle court, les paumes moites, les yeux perdus dans les siens et le sourire trop tendre et trop fort à la fois, qui creuse des sillons sur ses joues rouges. Et maintenant, hein ?
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Dim 27 Mai - 12:34
Chaque expiration de Caz m’envoie une onde brûlante le long de la colonne en soulevant les cheveux fous qui traînent dans mon cou. Mais j’suis trop préoccupée par les pas lourds du flic à nos trousses s’engageant dans la ruelle pour y prêter vraiment attention. Pas plus qu’à nos deux corps sur tension pressés l’un contre l’autre. J’ai l’impérieuse envie de sortir le bout d’mon nez pour voir où notre poursuivant se situe, s’il s’est bien engagé dans notre ruelle. S’il est à deux doigts de nous débusquer. Le myocarde surenchérit encore en engrenant un nouveau rythme, toujours plus rapide. J’esquisse à peine un geste quand le doigt de mon acolyte fuyard se presse contre mes lèvres. Je tressaillis. J’ai plus l’habitude qu’on m’touche, ni de ressentir une agréable crampe sous le nombril. La proximité de sa chair, la texture de sa peau m’apparaissent soudainement beaucoup plus importants que la menace qui rôde.
J’acquiesce imperceptiblement en hochant du chef quand il m’enjoint de m’taire. De toute manière j’ai aucune intention d’écourter ce moment ou de débouler en criant « coucou ! » au beau milieu des bennes. Mes poings sont si serrés qu’ils m’semblent bien craquer de façon parfaitement audible. Mes tempes bourdonnent sous l’afflux du sang affolé. J’suis sûre que le type pourrait entendre les mille battements-seconde s’il tendait l’oreille. Je clos mes paupières. Fort. Jusqu’à ce que les lumières zigzaguent dans le noir et que mon environnement apparaisse modelé dans une myriade de couleurs inconnues. J’m’adosse plus franchement contre Caz. Désir de disparaître dans l’décor. Dans sa chaleur.
Enfin, enfin, le signal arrive. Le danger passe et on s’autorise tout les deux à se laisser aller dans un soupir en concerto. Pourtant il chuchote encore, l’homme qui murmurait à l’oreille des femmes. Ça me colle des frissons dans les reins et j’proteste pas en me retournant sous ses doigts. Mon regard circule le long de son col de chemise froissé, de son pouls que j’peux presque voir s’agiter contre les carotides. La courbe de sa mâchoire qui est encore crispée par l’adrénaline de l’attente. J’me mords la lèvre en réflexe nerveux. A quel moment la course-poursuite s’est-elle changée en collision ? Et maintenant, j’me dis qu’au final tu m’as pas payé d’verre. C’est ce que je pense au moment où mes lèvres sont déjà sur les siennes. Sans brusquerie, sans délai non plus. Y a pas d’autre émotion que l’envie là-dedans. La fringale furieuse de la convoitise. La faute à cette foutue voiture et au barman revêche. La faute à ce type en skate et ses pupilles miroirs. La faute à la came qui allume tous les voyants au vert. J’dépose par terre le masque de lassitude en m’raccordant avec mes vieux instincts. De retrouver la nana – Nana – qui veut tous les connaître, les comprendre, les expérimenter. Juste une minute. Juste la langue qui l’effleure en pointe doucereusement intrusive et les doigts crispés sur le tissu de ses vêtements en les marquant de faux-plis. J’ai l’impression d’avoir quinze ans et de subir les premiers émois qui vont avec. Quand on s’laisse faire par les circonstances, les hormones dansant la lambada, sans penser aux conséquences éventuelles. Ou plutôt, en s’en foutant éperdument.
Mais ça dure pas longtemps. Y a pas assez de magie dans l’air pour maintenir l’instant en suspension et je m’écarte en souriant un peu. J’ai encore son goût embué par l’alcool sur l’bout des papilles. « Ça c’était pour l’effort que j’ai dû fournir alors qu't’étais sensé allonger la monnaie. » Y aura pas d’excuse pour avoir outrepassé les limites. Et nul remerciement en m’ayant donné l’occasion inopinée d’me sentir vivante. « Tu m’en dois une Caz, c’est tout c’que j’ai à dire. » Et cette fois-ci, son prénom est prononcé sans aucune grandiloquence.
Casper Pryce
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Dim 27 Mai - 17:15
Nana. Sous ses mains et sous la peau de ses paupières qu’il a fermées instinctivement en la sentant pousser sur la pointe de ses pieds pour l’embrasser. Nana sous ses lèvres et le pouls qui devient tachycardie, les paumes encore égratignées qui brûlent sur son épiderme. C’est comme ça qu’il sait le mieux parler, Casper, pulpe contre pulpe et la pointe de sa langue qui rencontre naturellement celle de sa partenaire de cavale, Bonnie et Clyde à s’enflammer au milieu d’une course-poursuite. C’est ce qu’on obtient quand on met deux allumettes ensemble, elles s'embrasent par friction, simple contact, se mettent à cramer tout le décor autour d’elles. Casper embrasse Nana et plus rien ne compte à part leurs deux silhouettes qui se meuvent à peine et l’envie qui palpite dans son bas ventre, les phalanges qui creusent des traces contre ses hanches et le cerveau qui pense déjà à lui enlever ses fringues. Lubrique, incohérent. C’est tout ce qu’il a trouvé pour se sentir vivant, ça et la poudreuse, leur amie commune, mille fois plus puissant que l’adrénaline provoquée par une virée en skateboard, à raser les voitures, à griffer les carrosseries du bout des ongles. Une main qui effleure le bas de ses reins, c’est plus tendre qu’un bout de métal, plus chaud, ça glisse des soupirs dans son baiser mais déjà elle recule, le nargue. Y a un sourire solaire qui barre son visage alors qu’il l’observe, qu’il l’écoute. Elle n’a pas tort, faut dire, il était censé payer. Il aurait pu le faire. Y aurait juste fallu qu’il bouffe des pâtes pour la fin du mois. Forcément, il lui en doit une ; forcément aussi, il la prendra aux mots, un prêté pour un rendu. « Je ne roule pas sur l’or », il souffle, s’accoude au mur après avoir calé une cigarette entre ses lèvres, le paquet tendu pour l’inviter à s’intoxiquer aussi. Le briquet tourne entre ses doigts, allume la cigarette de Nana puis la sienne, il expire un peu de fumée blanche avant de reprendre avec la même gouaille. « Ça fait partie de mon charme. » Il pense. Ce qui est sûr, c’est que les filles ne mouillent pas vraiment en l’écoutant lire du Shakespeare. C’est drôle comme ce qui paraît irrésistible pour lui ne l’est souvent pas pour les autres, alien au milieu d’une masse trop vulgaire. Aujourd’hui pourtant, il s’en fout. Nana pulse un peu trop dans ses veines pour qu’il puisse lui reprocher de ne pas forcément être en parfait alignement intellectuel avec lui.
Il laisse quelques dizaines de secondes se dérouler sur leurs bâtons de nicotine, les consumer jusqu’à la moitié. Sa bouche goûte un mélange de whisky, de tabac et de Nana, quelque chose de sucré, d’acidulé, quelque chose qui s’égare sur ses papilles et vient chercher des souvenirs pastels dans sa boite crânienne. Ses yeux papillonnent vers sa nouvelle amie alors qu’un nouveau sourire nait sur ses lèvres, peut-être parce qu’il a l’impression de communiquer avec elle sans avoir à parler et que c’est reposant, tellement reposant. Un instant d’hésitation, il cherche un stylo dans sa poche, s’approche de Nana et s’empare délicatement de sa main, paume tournée vers le ciel. Il laisse sa cigarette pendre au coin de ses lèvres, ancre son numéro de téléphone sur la peau de la jeune-femme, quelques petits chiffres qui se côtoient en arabesque. Sourcils froncés, il souffle du bout des lèvres après avoir éloigné la clope, histoire de faire sécher l’autographe. « Je m’appelle Casper. Au cas où tu voudrais savoir. » Timidité feinte ou réelle, sa canine vient agacer sa lèvre inférieure. Ça se barre toujours en frissons dans son bas-ventre. « J’ai pas mal d’idées pour me rattraper », qu’il dit en balançant sa cigarette un peu plus loin. Les sous-entendus suintent de ses mots et du sourire qu’il lui sert. Ça se sent qu’il a le cœur en équilibre, qu’il y a des non-dits dans sa voix. Des vœux, des désirs. « J’ai toute la journée. Et toute la nuit. »
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Sujet: Re: dancing in the street (libre) Mer 11 Juil - 18:56
J’me marre en douceur quand il me répond avec son air de gentleman désuet et charmeur. Accepte lorsqu’il me tend une blonde puis viens l’enrouler au milieu des étincelles. Nos fumées se mélangent lascivement d’une manière encore plus érotique que celle de nos langues à l’instant. J’le bouffe du regard en essayant d’imprimer ses traits. Simplement pour avoir un souvenir à me mettre sous la dent avant de dormir. Je sais que j’assimilerai son visage à un sentiment de liberté chérie et une élocution madrée.
Une pause s’installe en douceur, naturellement. L’adrénaline se fait la malle et laisse mes nerfs désœuvrés. S’en est presque douloureux. L’homme sort un stylo – j’imagine que ça doit être le genre à en avoir dans tous ses futals et les flinguer à cause des taches d’encre – avant de m’attraper les doigts. Il a la tête qui se penche vers moi, et j’arrive à déceler une nouvelle note de son odeur. Celle plus musquée et mille fois trop attirante du désir. On l’reconnaît bien, nous les nanas. On sait identifier les signes – les coups d’cœur à la va-vite et le brusque crépitement dans l’air. Il me tatoue à coup de chiffre, comme un code barre manuscrit qu’on appose sur un produit de fin d’série. Je garde une tronche stoïque mais j’frissonne à chaque fois que la pointe se courbe contre ma peau. Et qui cède la place à un large sourire méconnu quand il me révèle son vrai blase. « Sérieux ? Comme le fantôme… » J'espère juste qu c'est pas en référence à un obscur auteur du douzième siècle. Et j’trouve ça mignon, putain. J’oublie les premiers réflexes. J’me ramollis.
J’rattrape aussi sec mon air flegmatique. J’voudrais pas qu’il se fasse des idées. Et justement j’ai la confirmation de bien faire avec sa proposition suivante. Casper m’donne l’impression de croire qu’il a tout gagné. Un peu trop vite à mon goût. Et il a suffisamment éveillé mon intérêt pour pas finir tout d’suite dans les articles usagés. « Quoi, tu penses que j’fais partie d’ces nanas du premier soir ? » Plutôt de la première minute. Oublions pas que Nana s’orthographie avec une majuscule : la reine des entraîneuses. « Tu verras bien si j’t’appelle. A plus Caz ! » Je suis déjà en train de m’retourner en agitant une main nonchalante. Les hanches chaloupent de façon étudiée, juste histoire de marquer le coup.
J’fais cinq cents mètres avant de rejeter un coup d’œil à ma paume griffonnée. Y a du potentiel, c’est indéniable. J’hésite trois secondes et rentrer le numéro dans mon portable : « Mon adresse. Passe quand tu veux mais envoie un msg avant. » J’le ressens comme une prise de risque délicieuse. Inviter dans mon antre le dernier sombre inconnu à peine rencontré… faut être barge. Mais après tout, c’est pas une nouveauté pour moi d’présenter les symptôme inquiétants d’une fêlée.