Invité ☽ ☾
| Sujet: (père noël) comme dans un songe on croit trouver de l'or Mar 5 Déc - 16:44 | |
| Réveillé par le bruit comme souvent. Nibs qui crie sur quelqu’un, rien d’inhabituel. Mais ce sont des cris de joie et ce matin quelque chose est différent, comme une impression qu’il y a un vide de moins entre tes côtes. Quand tu te redresses c’est presque imperceptible mais il manque un poids sur tes épaules. Dans ton placard y a des pulls de Noël que tu n’as jamais acheté, tricotés avec des dinosaures et des rennes dessus, le truc improbable. C’est vrai que c’est Noël putain, un sourire étire ton visage, les musiques te viennent en tête et ça donne des envies de champagne. Quand tu sors du noir, ouvres la porte sur ce jour, ils sont tous en train d’accrocher les dernières décos de Noël, il y a un sapin. Un vrai, pas en plastique, qui fait presque deux mètres, qui brille de plein de guirlandes et qui a l’air d’avoir été coupé hier. Putain. Un vrai sapin. Au lieu du canapé pourri et de la table basse il y a une grande table en bois au milieu de la salle. Une nappe carmin, liserée de dorée. C’est de la soie ça ? C’est de la soie. Même brillant que les robes de toutes les putes snobs aux galas que tu surveilles. Des gosses y en a pas un seul qui sourie pas. Ils sont tous là. Depuis quand ils viennent tous au même moment ? River et Otto n’ont plus un seul bleu sur leur peau. Jordie est avec son frère, il est jamais là pourtant. Lenny est revenu, il a changé d’avis ? On s’en fout. Il est là. Et puis elle est là aussi elle, elle découpe des dinosaures dans du papier vert pour en faire des guirlandes, elle a un sourire à en faire pâlir des étoiles. Ils sont tous là et tu ne sais pas pourquoi mais c’est pas grave, pas besoin de raison, il faut juste en profiter. Y a la porte qui s’ouvre sur Cain qui a un sac rempli de bouteilles – autant dire que c’est pas de l’eau – parce qu’il devait pas avoir d’autres idées mais on lui en voudra pas. Toi aussi tu ris, c’est contagieux, c’est viral, c’est peut-être mortel, tant pis tu crèveras le sourire à la gueule. L’odeur de la volaille qui cuit, Tinks qui te rappelle à l’ordre parce que t’as encore des trucs à cuisiner. C’est de bon cœur. Bordel, tu détestes ça les chansons de Noël, les pulls de Noël, tout ce qui touche trop au cliché, le plus que tu puisses faire d’habitude c’est mettre un poulet sur la table et donner une tape sur l’épaule en guise de cadeau. Sauf que cette année ça te dérange pas.
comme quand on croit que tout peut arriver au matin au réveil c'est un peu de soleil fondu au matin au réveil L’air te semble étranger, pourtant trop familial. Trop humide dans la maison, trop de buée sur les vitres, c’est pas le climat habituel. Alors tu regardes par la fenêtre pour poser les yeux sur cette rivière aimée, ces bâtiments de brique que tu connais par cœur, la pluie éternelle, les gens qui sont des dizaines à attendre un bus qui doit être en retard comme d’habitude, et au loin dans la brume la lueur qu’ils mettent en haut de la Spire pour que les hélicos rentrent pas dedans. Il y a des trucs qui ont changé, comme si ça faisait longtemps que t’étais pas venu, cette aiguille ils avaient pas fini de la construire dans ton souvenir, non ? Et puis cette boutique là, elle était pas là il te semble, celle d’à-côté non plus. T’as jamais vécu dans ce quartier, t’avais pas la thune. Juste en face de l’hôtel de Bono en plus. Tu comprends pas. Tu comprends pas mais c’est comme si tu n’étais jamais parti, que tout cet exil n’avait été un cauchemar. C’est moche Dublin à Noël mais Savannah c’est pas bien mieux quand on y pense. Une sonnerie à la porte te sort de ta contemplation, c’est comme dans un rêve éveillé, avec le sentiment de marcher au ralenti, que tu vas l’ouvrir. C’est Niamh, encore plus belle que sur les photos, qui est en train d’insulter Seàn, toujours en train de se plaindre celui-là. Ils ont noyé Brían sous les cadeaux tu le vois à peine, tu sens juste qu’il galère. Dans le fond Willis, qui les domine comme d’habitude, lui aussi servant de mule. Ils se font tous écarter par Tallula qui se jette dans tes bras, y a un temps de latence mais t’acceptes et tu la soulèves. Tu sais pas quoi dire, y a rien qui sort, tu restes là à les regarder comme si t’attendais qu’ils te disent que c’est une mauvaise blague. « Bon alors, tu nous laisses rentrer ou tu restes là avec ta gueule de con ? » Et soudainement tu te demandes comment ta vie aurait jamais pu se passer autrement. |
|