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 biiible, coke & seum (toad)

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Teddy Dobson

Teddy Dobson
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MessageSujet: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptySam 28 Oct - 18:50


C’était une danse folle. Ses travers s’étaient échaudés contre le mur d’ennui de ses abîmes. Puis ça a cogné contre sa cage, celle qui retient les battements de fureur, abruptement sauvage. L’éclat entre ses lippes : elle a ri. Tellement ri... Quand elle l’a croisé il y a quelques semaines, dans cette tenue d’apparat qu’il customise comme le plouc qu’il a toujours été. Et elle n’y a pas cru. Elle n’y croit toujours pas. Toad… Pasteur ? Le voyou en carton avec qui elle déconnait gentiment il y a six ans ? Y avait forcément une caméra cachée.
Mais quand la créature maligne se dirige vers la petite église de quartier où il l’a difficilement invitée, c’est pour en avoir la rage nette. Il n’ose tout de même pas réellement la rédemption ? Pas pour tous les petits larcins et les abus qu’il a commis ? Pas juste pour ça ? L’oeillade vers l’amoncellement de nuages au-dessus de sa tête est pleine de défi avant de passer ce seuil. Il paraît que les sorcières ne sont pas les bienvenues dans ce genre d’endroit, mais alors elle est où cette colère divine si menaçante ? Y a rien qui frappe, juste la porte qui claque, la bâtisse qui gémit. Peut-être parce qu’elle peut encore être pardonnée ? Elle aurait encore tant de marge que ça ? Il a bien dû voir que non quand il a croisé le clair de ses yeux il y a quelques semaines. Mais peu importe, elle n’est pas là pour trouver le pardon ni même l’absolution. Elle est venue provoquer un retour vers le passé, à une époque peut-être encore trop douce pour elle, pas assez pour lui.

Damn, la dégaine de moine te va encore moins quand y a le décor. Les boots martèlent le plancher avant de s’ancrer dans sur le bois du banc d’en face, chevilles croisées sur l’espèce de dossier qui doit niquer les omoplates des brebis dalleuses à chaque messe. C’est l’heure du goûter ! Il est 16h et Wini brandit sa bière préférée à lui et son whisky à elle. Un couteau sous la fesse et des fleurs rouges dans le cou. La fossette prête à se creuser. Comme à l'époque. L’impression d’avoir à nouveau vingt ans et de pouvoir le suivre dans son prochain braquage merdique. Mais avant, elle laissera forcément sa trace ici. Peut-être bien en gravant un truc dans ce fameux bois du style “Trixia suce pour 5$”. Ou alors ça sera sur le cuir abîmé du nouveau bouquin fétiche de Toad. Bible qu’elle pique déjà pour y jeter un oeil comme si ça l’intéressait vraiment. T’as appris à lire depuis l’temps ? Elle l’a lu. Y a longtemps. Dans une autre vie. Où elle avait un chauffeur, des cours privés et du cathé de 8h à 9h tous les vendredis. Mais ce bout d’mort-là, même Toad ne le connaît pas. Ou que de ce qu’elle a pu en dire après trop de lignes insufflées dans l’nez.
Ses yeux coulent sur la charpente comme de la lave. Alors tu déconnais pas ? C’est vraiment ici ta couverture pour un réseau de drogue ? Ou de pornographie infantile ? Parce qu’elle l’a bien vu le gamin qui le suivait de loin comme un p’tit chien. Elle se souvient plus de son visage, mais il avait un plumeau sur la tête. Ou tu t’essayes vraiment à une version 2.0 de Toad le branleur ? Comme elle et sa version du “Hey, qu’est-ce que tu deviens, frère ? Ta sale gueule et ton rire de traviole m’ont à peine manqué, tu sais.” T’inquiètes, après l’update, on parlera du bon vieux temps et ça fera comme si on ne s’était pas perdus de vue pendant six ans.

Ou pas.
Parce qu’ils sont encore eux.
Lui pour le meilleur et elle pour le pire ?
Heureusement que non. Y a que lui qui a été assez con pour se marier.
(Et s’faire larguer)
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MessageSujet: Re: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptyMer 1 Nov - 18:17

Y’a des personnes qu’on n’a pas spécialement envie de revoir, parce qu’elles sont trop déglinguées ou parce qu’elles nous rappellent des mauvaises passades de notre existence, parce qu’elles réveillent des blessures qui se sont jamais vraiment refermées, parce qu’elles pourraient tout faire s’effondrer au nom de la nostalgie d’une époque où tout allait foutrement mal. Wini est une de ces personnes, pour moi, reliquat des pires mois de ma vie, entre l’abandon de Seth et la cure de désintox, quand j’me laissais mourir et que je tentais par tous les moyens de me faire choper par les flics, multipliant les conneries et elle qui suivait toujours, curieux petit diable sur mon épaule. La drogue qui empoisonnait mes veines me la rendait plus douce, à l’époque, je crois, elle me faisait marrer même quand elle se foutait de ma gueule. Ça avait pas été le cas, il y a quelques semaines, mon sang qui s’était glacé en la croisant au beau milieu de Savannah, comme si elle n’avait été qu’un fantôme. Malheureusement, elle était bien tangible, Wini, cette même lueur malsaine au fond du regard dont j’avais pas le souvenir, mais l’héroïne aide pas la mémoire, elle déforme tout, adoucit les contours, rend tout plus euphorique, plus supportable. Elle avait éclaté de rire, à l’annonce de ma reconversion, le coup classique du Toi ? Pasteur ? Laisse-moi rire que même de parfaits inconnus me servent à longueur de journée. J’aurais dû rien dire, j’aurais dû en rester là. J’aurais certainement pas dû l’inviter dans mon église au nom d’une quelconque amitié merdique qu’on aurait partagée y’a beaucoup trop d’années pour que ça puisse encore compter. Pourtant, je l’ai fait, j’lui ai donné l’adresse pour qu’elle vienne vérifier par elle-même, par orgueil, peut-être, pour lui montrer que j’mens pas et que j’essaye vraiment d’être un type bien. Mais ça sert à rien de prouver ça à des gens qui n’en ont rien à foutre, qui pensent qu’à cracher sur les bien-pensants et sur ceux qui tentent de s’en sortir. J’lui en veux pas, j’étais comme ça, j’suis mal placé pour filer des leçons et donc je n’en file pas. J’espère seulement que ça passera vite et qu’on en restera là.

J’suis en train d’écrire mon sermon pour le dimanche à venir, quand elle débarque, assis sur le banc, entre ma Bible et des feuilles éparpillées recouvertes de ratures parce que ça me prend toujours des heures pour formuler des phrases qui sonnent juste. Je lâche mon stylo et attrape la bière qu’elle me tend sans rechigner, arrache la capsule avec les dents comme je le faisais du temps où je volais des supérettes, le geste de cassos par excellence consistant à la cracher le plus loin possible. Bingo, elle atteint l’autel de plein fouet. On détonne tous les deux, dans cette église, comme si c’était qu’une ruine qu’on est venus squatter pour se bourrer la gueule. Elle s’empare de ma bible comme d’une bête curieuse, la retourne pour l’observer, comme si y’avait quelque secret à y cacher. Je roule des yeux, répond du tac au tac : « Nan, c’est juste pour faire genre. J’ai acheté le livre audio. » Soupir, j’ai pas tellement envie de rire. Pas avec elle, pas avec ses sarcasmes et son air de manigancer un mauvais coup. J’la laisse finir avant de lâcher « j’me drogue plus » dans un souffle, comme pour pas raviver les plaies béantes, pour pas penser aux réunions auxquelles je vais toujours, au moins une fois par semaine, pour pas replonger. « Et ouais, Toad le branleur est vraiment pasteur. Shit happens. » Je bois une gorgée de bière pour faire passer le goût amer que j’ai dans la bouche. Super, les retrouvailles, je sais déjà plus quoi lui dire. J’m’attends pas à ce qu’elle comprenne, j’vais pas non plus essayer de la remettre sur le droit chemin ou lui demander de s’mettre à croire en Dieu. C’est pas tellement un truc qui se commande, et on m’aurait dit y’a six ans que j’allais devenir pasteur, j’aurais juste craché à la tronche du connard qu’avait osé dire ça. « Et toi, tu d’viens quoi ? Ça fait longtemps qu’t’es à Savannah ? » C’est encore mieux qu’une discussion de petites vieilles dans un salon de thé, qu’on me donne la palme de l’éloquence, merci.
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MessageSujet: Re: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptyMer 8 Nov - 10:29


Il ne l’avouera jamais, mais elle le sait qu’à l’époque, elle était probablement sa persifleuse préférée. Ou alors la seule assez insouciante pour le suivre, le supporter ou l’entraîner dans ses conneries. Peut-être bien un peu tout ça à la fois. Qui sait. C’est loin. C’est flou. Édulcoré. C’qui est sûr c’est qu’il y avait moins de sarcasme et de foutage de gueule dans leurs blagues de l’époque. Mais elle ricane tout de même. C’est bien parce que c’est lui et parce qu’elle est probablement convaincue que la bible en livre audio doit bien exister pour les illettrés qui veulent y croire. Offre, demande, tout ça. Bref. En tout cas, elle n’a jamais vraiment su faire la part des choses. Fille manichéenne, soit tout soit rien, y a des trucs ça lui passe au dessus, et d’autres qu’elle attrape au vol pour les prendre à cœur de son plein gré. On dirait qu’elle fait exprès. On lui a souvent dit “tu l’as cherché”. Alors maintenant, oui elle cherche. Un coup, elle se marre, un coup elle a une expression de cauchemar, et elle crache des horreurs, des mots qui font mal -normalement, quand tout va bien. Sauf qu’elle arrive à tout balayer rien qu’avec une risette, c’est ça le plus agaçant. Quand elle s’éparpille en éclats de rire. Elle ferme souvent les yeux. Cécité euphorique momentanée. Comme si elle arrivait pas à se voir aussi offerte. Et on a du mal à la saisir -volatile- et ça l’arrange, comme ça elle choisit à qui elle donne, à qui elle s’donne et ça le lui rend bien, ça lui permet d’penser qu’elle a le contrôle. Mais avec Toad, c’est plus très drôle tout ça. Parce que maintenant il fait partie des gens heureux, des traîtres. De ceux sauvés par l’amour de Dieu ou l’amour tout court. Quelque chose lui dit que le rivival de leur amitié, ça ne sera pas pour aujourd’hui. Parce que là, Toad, sa vie, ses questions : c’est à chier. Et puis comment ça, il se drogue plus ?!

J’ai un job respectable moi aussi maintenant. Plus rien à voir avec le bourbier des chambres de motel qu’elle hantait pour de l’argent facile ou, quand à l’inverse, ce sont ces lieux qui la hantaient jusqu’aux os l’obligeant à s’y enfermer et s’perdre dans les cauchemars à qui elle redonnait vie. Pour mieux les faire taire. Pour mieux les contrôler. Pour mieux le faire taire. Pour mieux le contrôler. Pour rêver de le tuer. C’était pour ça à l’époque. Et aujourd’hui, quand Seth n’est pas là ou quand il ne devrait pas savoir. Quand l’alcool et la drogue et les médicaments ne suffisent pas à la rendre supportable, quand elle n’arrive plus à supporter sa propre peau, quand sa haine est trop concentrée, Wini reprend quelques vieilles habitudes. Mais cette vérité, elle n’a pas envie de la dire. Et elle n’entre pas non plus dans les détails. Et j’sais pas quelques mois. J’compte pas. Elle n’a plus l’temps de compter. Ça n’a jamais vraiment valu la peine de toute façon. D’autres priorités. Comme fouiner dans ses papiers, agripper quelques mots raturés pour mieux les laisser filer par terre. Comme afficher ce sourire désinvolte lorsqu’elle tire un petit sachet de poudre blanche de sa veste pour mieux tracer une première ligne sur le cuir biblique. Et le gamin qui te suivait… T’as adopté pour compenser ton mariage raté ? Les enfants l’aiment pas et c’est réciproque. Wini ne peut pas les saquer. J’parie que t’as toujours pas signé les papiers du divorce. Sans-couilles un jour, sans-couilles toujours. La preuve, il se planque dans une église, derrière une croix, essaye de se convaincre lui-même qu’il n’est pas seul, qu’il a réussi à arrêter la drogue… qu’elle lui propose malgré tout. Juste pour être sûre. Juste pour voir qui est-ce qu’il essaye de berner le plus ? Un p’tit défi pour jouer comme avant ? En souvenir du bon vieux temps ? Ou pour voir si elle doit lui faire l’honneur de croire à sa petite vie rangée ? Que c’est vraiment derrière lui ? Qu’il a vraiment avancé ? T’es sûr de ce que tu veux, Toad ? De qui tu es maintenant ?
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MessageSujet: Re: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptyDim 12 Nov - 17:45

J’fais craquer ma nuque, pour tenter de me détendre, mal à l’aise de la voir là, dans mon église, relique humaine d’un passé que j’aimerais bien rayer de ma mémoire. C’est plus facile de penser à Seth, les bons souvenirs auxquels j’me rattache comme à une bouée de sauvetage, qui font oublier à quel point j’étais une merde à l’époque, la culpabilité en moins. Penser aux autres, c’est penser au gouffre dans lequel j’m’étais jeté la tête la première, la violence qui avait peu à peu conquis le quotidien, l’héroïne qui engourdissait le cœur et le cerveau, malfrat de bas étages avec trois neurones à tout casser. C’est penser au mal que j’avais fait à Seth sans même réaliser, trop défoncé pour comprendre que c’était pas si drôle que ça de me retrouver par terre dans les ruelles de Boston à moitié mort. Et moi j’me marrais, j’lui disais que c’était rien, qu’il en faisait tout un drame alors que non, j’avais pas un problème, j’arrêtais quand j’voulais et qu’c’était lui le problème, à refuser qu’sa vie soit simple, à pas m’laisser m’occuper des emmerdes financières avec le vieux flingue que j’avais piqué à mon père. Winifred, c’était après, c’était l’Enfer sans plus aucun être pour illuminer mon existence, disparu l’ange gardien, adieu Seth, après l’avoir usé jusqu’au dernier os. C’est pour ça que j’aime pas la voir là, ombre au tableau de ma rédemption, le sourire d’une veuve noire prête à bouffer sa proie. « Tueuse à gages c’est pas un job respectable. » Sourire contrit, pitoyable tentative d’humour pour alléger l’atmosphère lourde. Même si je sais pas ce qu’elle fait de sa vie, j’sais bien que le mot respectable à pas tellement de sens pour des gens comme nous, et je doute qu’elle soit devenue bonne sœur entretemps. La vérité, c’est qu’on est pas beaucoup à s’en sortir une fois qu’on atteint les bas-fonds, que c’est plus facile de rester à terre quand on a tout perdu, que j’ai eu la chance d’avoir Skeeter pour m’engueuler et me foutre des baffes quand j’disais que j’voyais pas l’intérêt d’arrêter la drogue. Arrêter pourquoi ? Pour me retrouver seul avec moi-même, face à mes actes, sans rien pour troubler ma lucidité ? Pour me rendre compte à quel point j’avais bousillé l’amour de ma vie, que j’avais un truc merveilleux entre les doigts et que j’m’étais employé à le détruire morceau par morceau, jusqu’à ce qu’il n’en reste que des miettes même pas bonnes à filer aux pigeons ? Y’avait aucun bonheur qui m’attendait après la désintox, juste un mec dans un corps plus sain qui avait plus qu’à espérer que Dieu pardonne vraiment tout.

Puis mes yeux tombent sur le petit sachet de poudre blanche qu’elle sort de sa veste, l’envie de pas comprendre tout de suite, de l’ignorer, de juste répondre aux questions platement, « Il a dix-neuf ans, il m’aide à retaper l’église, et j’vois pas comment j’aurais pu les signer, j’te rappelle que j’les ai cramés. » Pas qu’on avait une cheminée dans notre une-pièce misérable, j’avais failli foutre le feu en collant les papiers sous la flamme de mon briquet en plein milieu de l’appartement, la couette qui avait contenu l’incendie en avait gardé de jolies brûlures. Je sais que ma voix tremble, je sais que mes mains aussi. Mes sourcils se froncent, mes doigts se crispent contre le banc pour atténuer le tremblement, les pupilles qui lâchent pas le rail de coke tracé sur ma bible, et la boule qui commence à se former dans ma gorge, déglutir qui devient une torture. Pourtant la coke, c’est pas ma came de prédilection, j’ai toujours été plus downers, quand ça engourdit les muscles et qu’on arrive plus à penser, quand ça fait oublier qu’on est un connard et qu’on s’laisse partir dans d’autres univers. Même si j’touchais un peu à tout, faut bien l’avouer, j’étais jamais très clean et j’prenais tout c’que j’pouvais acheter, alternant l’héro avec les stimulants parce que les bagarres et les braquages à l’héroïne c’était pas le top. Et Wini qui me présente son œuvre comme pour m’en proposer une part, bible et coke, mélange digne d’un musée d’art contemporain. « Tu t’fous d’moi ? » Je me redresse, soudain plus capable d’être assis à côté d’elle, la surplombe de mon mètre nonante-cinq, les prunelles qui s’accrochent aux siennes, le ton vaguement plaisantin de notre discussion définitivement envolé. Y’a la bible qui valse sur le plancher, geste aussi brusque que violent, poudre éparpillée entre les lattes de bois. Tout ce gaspillage, quel dommage. « J’t’ai dit que j’étais clean, et tu me fous ça sous le nez, c’est quoi ton problème, putain ? Désolé d’plus être le gros branleur qui a envie de s’piquer avec toi, mais si ça t’emmerde tu peux te barrer. » Désolé, pas désolé, j’ai déjà du mal à croire moi-même que j’suis pas un imposteur, pas besoin de pseudo-amis pour me ramener plus bas que terre, le bras qui indique la sortie comme si elle allait pas s’en souvenir.
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MessageSujet: Re: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptyLun 20 Nov - 19:08


Elle n’a jamais voulu s’en sortir et c’est peut-être ça qui le dérange finalement. Il le sait qu’elle a plongé trop loin, bien avant qu’ils se rencontrent. On l’y a jeté à vrai dire, mais personne pour la repêcher, elle y est restée et a fait son nid dans ces bas-fonds qu’il semble vouloir renier. Et à sa façon, elle s’en sort. Elle juge même s’en sortir mieux que lui. Elle a toujours été claire dans ses intentions, dans ce qu’elle est. Elle ne ment pas. Elle sait qu’elle est mauvaise, qu’elle est déglinguée, et que ça n’ira jamais mieux, alors pourquoi se faire chier ? La rédemption, elle n’y aura pas droit. Pas après ce qu’elle a déjà fait. Pas après ce qu’on lui a déjà fait. Elle est juste souillée, faut pas chercher. Les gens ne changent pas. Ooh tout de suite... Elle aurait jamais parié qu’il kiffait le cuir et les flingues. Vieux fantasme tendancieux aux allures de village people ? Mix entre le flic à la moustache et le motard hors-la-loi ? Pourquoi pas hein, chacun son trip, elle a les siens. Et la mémoire qui flanche apparemment. Bouffée du cerveau. Huntington ne doit pas aider depuis un an. Elle n’a aucun souvenir qu’il ait cramé ces papiers. Si tu le dis. Mais à croire que le sujet est toujours sensible, même après six ans. Ce mec lui a vraiment brisé le palpitant, et c’est probablement réciproque, mais du coup, elle ne sait pas lequel des deux elle doit admirer le plus. Les dégâts provoqués ou les débris laissés. Son regard qui coule sur Toad en dit long sur sa réflexion. Mais ça ne l’empêche pas de tracer des rails de coke clean. C’est devenu naturel comme respirer, mais en réalité, depuis qu’elle a tous ces médoc à portée de mains, c’est encore plus fun. Suffit de mélanger, s’improviser chimiste et le tour est joué. De nouveaux dégâts à répertorier, de nouveaux délires affamés à nourrir. T’es sûr de pas en vouloir ? Offrande à l’apôtre de la débauche qu’il a été. C’est un geste simple, gentil, généreux. Mais il ne voit rien de tout ça. Rien du souvenir qu’elle niera garder soigneusement en elle parce que tiré d’une époque plus nuancée que ce présent décadent. Qu’est-ce qu’elle pouvait rire à cause de ses conneries… Qu’est-ce qu’elle pouvait adorer les galères dans lesquelles il les fourrait… C’était des percées de nuages plus gris que noir. Et c’était beau ou du moins ça lui suffisait à l’époque.

Mais apparemment, pas pour lui. C’est lui qui ne s’en souvient pas, ou mieux, il n’en veut pas, peut-être même qu’il est également prêt à les cramer ces souvenirs. Le rejet encore et encore. Sale ritournelle de l’enfance qui hante le sang et étourdit l’esprit. Pourtant elle ne bouge pas, corps statique. Les yeux acier se lèvent simplement. Y a clean et clean... et tu le sais. Et même si les mots pourraient tonner avec insolence ou humour, lui aussi a disparu. Comme pour lui quelques secondes plus tôt. T’as toujours pas compris..., qu’elle susurre. Sauf que suit instantanément, une levée, son élan, un coup direct dans son menton. La bague en métal s’écrase contre sa chair autant que dans la sienne. Impact vif et douloureux pour eux deux. T’as toujours pas compris que tout a un putain de prix ! Mais ça lui fait plus rien à Wini depuis l’temps. Et elle enchaîne facilement, nonchalamment. Son genou au fond de son estomac. Qu’il les crache les couilles qu’il a cru laisser pousser. T’as pas changé Toad. Tu fais toujours autant d’merde ! Y a que dans ces moments-là qu’elle est fourbe Wini. Quand elle chope par surprise, c’est le seul moyen qui lui a permis d’en être là où elle en est alors que lui s’retrouve à terre, face appuyée contre la poudre qu’il a fait valser. Ou pas. Elle avait bien envie de l'étaler au sol, de l'y planter avec le poids aiguisé de ses mains sur son crâne. Élan de rage pour graver son visage dans l’bois miteux d’son église. Mais sa voix a beau éclater comme elle claquerait volontiers sa tête par terre, elle ne connaît pas le Toad d'aujourd'hui. Solide et soi-disant clean. Y a des "avant" qui ne reviendront définitivement pas. C'était même faible de sa part de vouloir qu'ils revivent, elle le réalise en une seconde. Alors, il ne reste plus qu'à le mettre même niveau que tous les autres. Là où l’amour égale la haine. Là où elle sait qu’il y aura des conséquences aussi pour elle. Pile quand elle n'attend que ça.
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MessageSujet: Re: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptyMer 29 Nov - 15:23

Y’a clean et clean, ouais, y toucher de temps en temps, c’est pas pas y toucher du tout, mais un camé se contente jamais de de temps en temps, un ex-camé se farcit pas des réunions toutes les semaines pour se faire un rail le dimanche quand même, et il suffit d’un rien pour que ça devienne deux fois par semaine, trois, quatre, et puis deux fois par jour dans les bons jours. Clean même si y’a encore un peu de marijuana, derrière l’église, pour ses vertus thérapeutiques, pour calmer l’ancien moi qui menace toujours de réapparaître. Il est juste là, sous ma peau, toujours là, dans le cœur qui bat trop vite, les réflexes qui reviennent trop facilement malgré les années et l’absence d’entraînement. L’esprit clair, ça aide à voir les coups arriver une fois que le premier a atteint sa cible, impact sur la mâchoire, la bague qui pourrait péter quelque chose mais pas de craquement. Le bleu tardera pas, pourtant, la douleur est vive, ça lance, ça pulse. Elle vise bien, Winifred, j’m’en souviens, même si on s’est jamais battu ensemble, même si on se regardait faire, même si on détruisait ensemble plutôt que de se détruire mutuellement. Mais maintenant, c’est plus pareil, maintenant, il faut tendre les muscles pour réduire l’impact du coup de genou, souffrir quand même mais ne pas s’effondrer – putain ça fait mal, sans héroïne dans les veines –, et j’chope son bras pour l’empêcher de provoquer ma chute. C’était si bien, à l’époque, d’avoir quelqu’un pour m’accompagner dans ma déchéance finale. C’était si bien, la chute avec un petit démon pour rendre tout ça plus doux, pour accepter la fatalité de l’existence, que le monde était pourri et que nous étions pourris aussi, tant pis. Je m’en foutais, elle s’en foutait, ça nous faisait marrer, d’être toujours plus imprudents, et mes conneries la faisaient rire, toujours, quand j’me donnais en spectacle pour plus penser à Seth, pour accélérer ma mort. Mais aujourd’hui c’est différent, c’est plus ce Toad-là, face à elle, c’est plus la violence qui domine ma vie, y’a plus rien d’illégal, plus rien de trop mal. J’ai pas voulu de sa coke. Rédemption réussie ?

Pourtant y’a mon poing qui se lève, les dents serrées, prêt à s’abattre sur le visage blanc porcelaine. On frappe pas les femmes, Toad. Mais c’est pas une femme, c’est la mort en personne, cette meuf, le diable au corps et la force infernale qui va avec. L’ancien Toad aurait frappé, sans hésiter, qu’est-ce qu’on en a à foutre qu’elle ait des nichons et un vagin, c’est elles qui veulent l’égalité. Faut pas, c’est mal. J’ai tout réappris, en désintox, réappris à vire sans les éclats brillants de la drogue, ne plus avoir besoin du calme que ça apporte, du soulagement, le fardeau qui s’envole des épaules quand on s’enfonce dans le coltard. Faut tout réapprendre, de A à Z, que les couleurs du monde sont loin d’être plus belles sous ecsta, que se sentir bien c’est possible sans héro, que y’a pas besoin de coke pour avoir de la conversation, qu’les délires sont pas moins drôles quand on a pas pris de speed. C’pas évident, pourtant, parce que le monde devient terne, alors, parce que y’a plus rien pour atténuer la douleur, parce qu’on s’rend compte du déchet qu’on a toujours été, du mal qu’on a fait. J’ai réappris à vivre avec les autres, à pas tout résoudre par la violence ou par une seringue, à pas pointer de flingue sur les gens ou les tabasser pour avoir du fric, à écouter. A être un mec bien. Et je doute, baisse la main, préfère la maîtriser, attraper ses poignets pour l’entraver, pour qu’elle ne puisse pas riposter, et la regarder dans les yeux. « J’suis plus comme ça, Wini. » Pour de vrai, pas pour rire, pas dans un monde parallèle et étrange, j’suis pasteur maintenant, et j’veux pas redevenir celui que j’ai pu être pour elle, j’veux pas céder à la violence, aux pulsions faciles qu’on regrette après. « Si ma merde te fait plus rire, tant mieux. Maintenant prends ta merde et barre-toi, j’comprends même pas c’que tu fous là, sérieux. » Pourquoi elle vient essayer de pourrir mon existence, niquer mon abstinence, à quoi ça peut bien l’avancer, qu’est-ce que ça peut bien lui foutre que j’aie décidé de changer ? « On était potes. Clairement, on l’est plus, alors casse-toi. »
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MessageSujet: Re: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptyVen 1 Déc - 15:05


Ahlalala. C’est pas drôle. C’est d’un chiant. Il n’a pas craqué. Ni pour la came, ni pour elle. C’est un manquement aux devoirs de tout connard. Sauf que le reboot de Toad, c’est comme ces ados attardés qui se lancent dans des programmes pour “retrouver leur virginité”. Mais écoutes, tu t’es fait troncher trop d’fois déjà, t’as péché, il te reste qu’à assumer. Qu’est-ce que tu t’fais du mal à chercher plus loin une rédemption quelconque ?! Elle devrait s’faire embaucher pour conseiller les jeunes, ça éviterait ce genre de désastre mélodramatique à l’âge adulte. Regardez-le. Regardez combien il se contient. Il va faire un ulcère. Parce qu’elle ne doit pas être la seule raison de toute cette retenue. Elle a quasiment rien fait encore. Tu t’fais du mal..., qu’elle susurre doucement, le regard bouillant alors que lui sers les dents et l’entrave de toute sa hauteur. Elle sait déjà qu’il n’ira pas plus loin. Et qu’ils ont tous les deux perdus dès qu’il est devenu ennuyant. Pourtant ça devrait m’plaire que tu sois déjà mort… Mais là non. L’acide au coin des lèvres. L’amertume qui rouille le sang. C’est pas fini. Faut bien veiller à l’extinction de la race humaine par les nerfs. Il n’y coupera pas. Il l’a cherché.

Okay okay relax’ fais pas ta queen, j’m’en vais. Le coup de bassin qui ponctue le détachement, et pour qu’il la lâche également. Défiance et déception broyées au fond des iris. Elle en piétine les cadavres de cocaïne à leurs pieds, sans s’en soucier, comme leur amitié passée. Tu m’avais manqué, c’est tout. Haussement d’épaules marquant le mépris. Pourtant, quelque part, c’est vrai. La sincérité imprimée dans le ton d’sa voix, y a rien de faux. Sinon pourquoi elle serait venue l’emmerder ? Passer l’temps ? Aussi. Il n’y a probablement pas qu’une seule bonne réponse. Mais il ne mérite pas d’explications le vilain garçon. Va falloir un peu de réconfort après tous ces efforts vains. Alors elle récupère sa bouteille de whisky et bouscule Toad en passant, le goulot déjà à la bouche et des envies à couper à la hache dans ses talons. Elle a vraiment envie de lui faire bouffer ses bonnes résolutions. Me dis pas que c’est pour ton ex que tu fais tout ça ? Ou l’poussin qui te suivait l’autre fois ? Question suspendue une seconde comme son arrêt et le presque demi-tour au milieu de l’allée centrale. Mais elle lève finalement les mains brusquement. Laisse tomber. J’m’en fous. Il lui fait pitié. Donc c’est vrai : ils n’ont plus rien à foutre ensemble. Au moins c’est clair. Mais y a tout de même une petite clarification à apporter. Dernière chose. Sur le seuil de son église pourrie, une nouvelle gorgée pour ne pas oublier la brûlure de cette amitié ratée. En fait, si t’as pas été capable de comprendre tout seul pourquoi j’suis là... C’est qu’on n’a jamais été potes. Elle déroule sa phrase comme si ce n’était qu’une liste de courses, cherchant son téléphone dans ses poches en même temps. Donc t’inquiètes. Sans regrets. Et d’un geste las, la bouteille de whisky s’échoue au sol, se déverse sans s’être brisée. Puis c’est la pierre du zippo qui s’agrippe, la flamme qui jaillit avant de tomber plus bas, au même niveau que son partenaire de prédilection. Comme eux. Sans rancunes. Deux derniers mots. Deux petits mots claqués, contrariés. Comme la porte de l’église dans son dos. Qu’il assume son renouveau tout seul. Et elle gardera ses distances pour regarder comment il s’en sort.
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MessageSujet: Re: biiible, coke & seum (toad)   biiible, coke & seum (toad) EmptyJeu 7 Déc - 13:27

J’me fais du mal, ouais. Trop de mal. C’est ça d’arrêter de s’camer, c’est pas savoir si c’est pire de s’droguer ou de s’sevrer. C’est ça d’vouloir être un mec bien, c’est résister aux envies immédiates, à la rage qui empoisonne les veines, frustrer les pulsions de base. C’est pas facile. C’est douloureux. C’est plus simple de s’piquer, de taper, de s’complaire dans le péché. Y’a pas photo, la rédemption c’est pas une partie de plaisir, j’sais pas comment j’ai réussi. J’ai pas tellement réussi, au fond, parce que j’l’ai pas fait pour moi, j’l’ai fait pour quelqu’un d’autre. Pour Seth. Pour qu’il revienne. Peut-être que j’aurais pas eu la force, s’il s’était pas barré, peut-être que j’serais mort un jour dans ses bras, un autre toxico qui crève d’overdose, drame de bas-étage dont tout le monde se fout. Wini elle était pas venue me voir, en désintox, non plus, Wini elle s’était volatilisée, disparue avec les vapeurs brumeuses de l’héroïne, parfois j’me disais qu’elle était pas réelle, qu’c’était juste le produit d’ma conscience bousillée qui voulait s’enfoncer plus bas que terre, là où j’pourrais plus jamais remonter. Et j’peux pas empêcher un rire amer de franchir mes lèvres quand elle me lâche que j’lui avais manqué. Ben pas toi, j’me retiens de lui cracher à la gueule, les pieds dans la merde qu’elle a amenée dans mon église. Et c’est moi qui vais d’voir tout nettoyer, ex-camé balayant d’la coke, si c’est pas beau, ça. Au moins j’aurai une histoire à raconter à la prochaine réunion j’me suis même pas couché par terre pour sniffer. Faut aimer sniffer d’la poussière, déjà, mais ça a jamais beaucoup d’importance quand on est accro, on prendrait n’importe quoi du moment qu’ça fait passer la manque qui creuse tout le corps, l’être tout entier qui en redemande. J’réponds pas, campé sur mes pieds au milieu du chemin, l’ayant libérée juste pour qu’elle débarrasse le plancher, sachant très bien que si elle reste là, y’a plus de chance que ça dérape, que je déraille, que les envies de violence bouffent tout et m’aveuglent totalement. Pars, pars, pars, connasse, casse-toi.

J’la suis des yeux, observe son petit manège les dents et les poings serrés, la veine qui pulse dans mon cou, pseudo-Hulk qui supporte pas qu’elle soit aussi lucide. Bien sûr que c’est pour lui, bien sûr que c’est pour Ezra, aussi, qu’j’me donne l’apparence de la bonté incarnée, l’attitude irréprochable, sans aucun péché pour souiller la belle image. Bien sûr que c’est pas tout à fait vrai, que j’bois, que j’fume, de la weed, que j’baise n’importe qui, mais c’est moins grave qu’avant, j’suis un peu moins un déchet, j’me rends un peu utile à la société, j’aide un peu mon prochain. J’espère, j’veux y croire. J’veux pas l’écouter elle et ses idées noires. J’m’en fous, tant mieux, toute façon j’ai pas de comptes à lui rendre, puis elle comprendrait pas, elle peut pas comprendre ça, qu’on puisse aimer quelqu’un aussi fort, qu’on puisse s’améliorer pour quelqu’un d’autre, par amour, par espoir. L’espoir fait vivre, c’est vrai, sans lui le cœur bat peut-être, mais on est mort dans l’fond, alors pourquoi rester parmi les autres, si ce n’est par lâcheté. C’est qu’on a jamais été potes, qu’elle dit, c’est pas comme si j’m’en souciais vraiment, c’est pas comme si j’avais envie de parler du bon vieux temps comme si ça avait existé. Y’a le whisky qui s’écoule sur les lattes de bois, le briquet entre ses doigts, mon regard noir qui semble vouloir lui dire t’oserais pas. Le réflexe d’attraper la nappe sur l’autel, le feu qui se propage pas si vite à cause du plancher vermoulu, l’humidité ça a du bon, parfois. Le tissu l’étouffe, soupire, et je gueule à travers la porte « Et après c’est moi la drama queen ? Putain de salope », peu importe si elle m’entend, c’est pas le but.
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