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 and now it's too late for a soliloquy (Scash)

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Asher Bloomberg

Asher Bloomberg
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MessageSujet: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyMar 3 Oct - 18:58



Scarlett & Asher
it's time for apologies
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Trop tôt, trop tard. Les aiguilles tournent et il sait plus vraiment si on est le matin ou le soir, c’est dire à quel point y a une partie de son cerveau qui est ravagée, qui s’est paumée entre les neurones. Le génie qu’il était s’est carapaté dans l’un des petits tiroirs dans sa tête, celui des archives, l’ancienne version, Caleb1.0, ça sera pas facile de l’y retrouver d’ailleurs parce qu’on dirait qu’il ne veut pas en être délogé. Ses doigts percutent les touches, il crie, on ne sait pas pourquoi. « Putain », ça sort de sa bouche sans prévenir, le poing s’explose brutalement sur le piano comme si ça servait à quelque chose. Il tend la main au-dessus de l’ivoire, la pâleur presque assortie à celle des notes, bien qu’il enchaine plus les croches que les blanches quand il joue la sonate au clair de lune de Beethoven. Ses doigts s’agitent comme des feuilles au vent d’automne, faudrait peut-être qu’il consulte, le médecin n’avait pas parlé de cet effet secondaire. De plein d’autres, ouais. Sa perte d’appétit, conséquemment sa perte de poids, son hypersensibilité et ses troubles du sommeil. Il n’avait pas prédit qu’il deviendrait parkinsonien avant l’heure et c’est peut-être une conséquence de la prise d’alcool aux heures de médication, il sait pas, il préfère pas y penser. C’est plus facile de prétendre que c’est un effet de son imagination, qu’il ne tremble pas vraiment, que ça va passer en se détendant, en buvant un peu de lait, en respirant profondément. Il secoue sa main dans le vide, comme s’il pouvait chasser le mal comme on fait partir une bestiole qui se serait attardée sur l’épiderme. C’est pas efficace pour un sou, ses gestes sont toujours incertains et imprécis, bruts, mal dégrossis. Ça ne lui ressemble pas, il est trop méticuleux pour ça, il a l’habitude des mouvements tracés avec une extrême précision, des entrechats dansés du bout de ses doigts sur le clavier. Ça ne lui ressemble pas et ça l’énerve au plus haut point, cette inaptitude à agir normalement depuis lacordeautourducoulhostolescachets, ça va mieux quand c’est lâché d’un coup comme on retire un sparadrap. Il repose le bout des doigts sur l’instrument, ferme les yeux, expire lentement. Y a son cœur qui est au bord de la tachycardie donc c’est pas super efficace, et il le voit parfaitement lorsqu’il loupe la troisième note. La rage est plus forte cette fois, la rage, la déception, le dépit, appelez-la comme vous voudrez, toujours est-il qu’il se lève en furie et franchit les deux pas qui le séparent du frigo pour attraper une bière. A onze heures cinquante-huit, ouais. C’est pas grave, il pourrait très bien être dans un bar à cette heure-là, avec Peadar ou Caïn, à s’foutre de la gueule des poivrots qui y passent leur temps en permanence, à commenter les tenues des adolescentes qui n’ont rien à foutre là. Bière, décapsuleur, canapé. Son cul est même pas posé que ça sonne à la porte, un instant il se demande si c’est pas son coup de sang d’il y a quelques minutes qui aurait dérangé la mamie d’à côté. Naïf il est lorsqu’il ouvre la porte. Con il se trouve quand il reconnait le visage qui lui fait face.
Trois ans putain. Trois ans depuis le mariage, depuis New-York, depuis Savannah, depuis l’appart pourri et la vie de miséreux, depuis le boulot de merde, depuis les gamins à la dérive. Trois ans depuis le départ, le sale pédé lancé par papa et le regard noir de maman, trois ans depuis l’isolement, la solitude et le manque des autres, de ceux qui l’avaient accompagné depuis toujours. Trois ans qu’il ne peut en parler à personne parce qu’il a mérité ce qu’il lui arrive, parce qu’il aurait même mérité pire. Scar peut pas être là. Scar peut pas être là parce qu’il se souvient de leur séparation, des assiettes qui ont volé, des cris et des pleurs, de lui qui tentait de rattraper le coup comme le gros connard qu’il est et d’elle, si belle et si fière dans la trahison qui nappait l’air autour d’eux comme un brouillard nauséabond. Il se tait mais c’est juste parce qu’il n’arrive pas à parler. Y a tout le passé qui remonte, les sauts dans les flaques et les gâteaux de mamie, les soirées pyjama où ils dormaient tête-bêche dans le lit et les fois où ils avaient joué au papa et à la maman pour rigoler, l’adolescence et la fois où ils avaient vraiment failli jouer au papa et à la maman, le planning familial en secret, les lèvres scellées, pas l’dire, pas l’faire savoir. Les nuits en larmes serrés sous la même couette, le diplôme de fin d’année, l’entrée en fac, on rompt et puis on se rabiboche, la demande en mariage au dernier étage de l’hôtel le plus prestigieux de New-York, la bague à six-cent mille dollars dans l’étui de velours rouge et l’enterrement de vie de garçon. Le noir complet après tout ça, après la lumière, après le bonheur. « Scar », il finit par murmurer. Il ne sait pas quoi dire d’autre, le bel idiot. Il pense même pas au fait qu’il ait perdu dix kilos, qu’y ait ses os qui se voient un peu trop, ses lèvres trop pâles, ses cernes trop sombres. Il pense même pas qu’il a l’air foutrement con, à s’écarter pour la laisser rentrer alors qu’il n’a pas fait le ménage, que c’est pas super bien rangé, qu’y a des partitions qui jonchent le sol et des assiettes plein l’évier. Il a l’air encore plus abruti quand il détourne le regard pour ne pas avoir à affronter les yeux de Scarlett qu’il connait pourtant trop bien.

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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyMer 4 Oct - 22:12


Sales choses, les rumeurs. Sales, sales choses vraiment. Et elle aurait du songer à emporter une paire de gants avant d'y plonger le vernis de la manucure, juré qu'elle l'aurait fait si seulement elle avait eu plus de temps. Plus de temps, rien que du temps, une dose normale de temps, la deuxième-démarque-il-nous-reste-plus-que-de-la-taille-unique-c'est-con-vous-êtes-pas-un-34 de temps. Elle aurait accepté n'importe quelle offre au black sur le tarmac, le grincement des roues de la seule valise qu'elle a pu emporter comme une piste en bruit de fond qui refuse fermement de passer à autre chose. Passer à autre chose. C'est intéressant, sûrement, d'être aussi émotionellement stable que dix kilos de valise en bagage cabine sur un low-cost. Passer à autre chose. Chose. Sales choses, les rumeurs. Sales, sales choses, vraiment et le temps n'est pas plus propre. Le temps se traîne à plat ventre dans la poussière, le temps est bouffé par les impuretés qu'il se ramasse à force de s'échapper par les conduits d'aération. Le temps file, le temps oublie, ça leur fait un point commun, peut-être. Trois ans. Mille quatre-vingt-quinze jours, et les heures qu'elle ne comptera pas. Si elle comptait, ça en ferait vingt-six mille deux cent quatre-vingts, d'heures. Mais elle ne compte pas. Non. On n'aime pas tenir de compte, chez les Hayes, faut savoir. Bien sûr, personne n'a retenu le prix de la robe. Ni le prix de la salle de réception. Du personnel. Du champagne. Des fleurs. Du traiteur. Du grand-oncle qu'il a fallu rappatrier d'Europe. Non. On n'aime pas en parler, chez les Hayes, faut savoir. On a peur de faire un pas de côté; un pas, ou tout un enchaînement entier. On a peur que les gens se souviennent de la tête de la mariée – tu savais qu'elle avait pas pleuré la mariée, toi ? Pas sur le coup. On n'aime pas les rumeurs, chez les Hayes, faut savoir. Parce qu'elles se rapprochent trop de la réalité, au fond. Parait qu'elle a pas pleuré, la mariée. Pas sur le coup. Parait que l'ancien fiancé a cherché à se flinguer. Bien sur le cou, en l'occurence. Saletés de rumeurs. Saletés mille quatre-vingt-quinze jours en vingt-six mille deux cent quatre-vingts heures.

Le vernis, il est accroché aux doigts, accrochés à la main, accrochée au vide, accroché entre la porte et son corps. Y en a qui sont morts comme ça, à ne pas savoir se décider. Un coup de vent, et tu restes bloqué à vie. C'est con. Heureusement, ça ne souffle pas trop fort sur Savannah, elle n'invente rien, c'est le pilote qui l'a annoncé sur la descente. C'est la radio qui a insisté dans le taxi entre l'aéroport et l'hôtel. C'est le chemisier blanc qui l'a confirmé quand elle a traversé la rue et que le tissu lâche n'a même pas sourcillé. Elle ne restera pas bloquée à vie, donc. Peut-être cinq minutes; cinq très longues minutes. Et si la tendinite n'en vient pas à bout, on laissera l'inquiétude faire paniquer le bon sens et peut-être là, seulement là, elle osera décrocher la tension et frapper à la porte. Trois ans. Trois ans de silence, trois ans de rien, trois ans plus trois ans plus trois ans plus tant d'autres foutus en l'air en une seule et unique cérémonie. Que Dieu en témoine, parce qu'ils ne la referont pas, celle-là. Une prise. On remballe tout. Trois ans, ça rendrait n'importe qui dingue. Elle suppose qu'on doit être à des kilomètres de l'apogée de sa forme mentale au moins quand on tente d'établir un nouveau record d'apnée. Hors de l'eau. Hors chronomètre. Que de difficultés supplémentaires. Elle sait, simple n'est pas Caleb; Caleb n'est pas simple. Caleb est derrière la porte, elle espère. Elle frappe. C'est pas la tendinite qui achève la distance et crève l'air; et l'inquiétude n'a aucun mérite non plus. C'est une curiosité maladive, et l'espoir qui fait vivre tous les idiots de ce monde. « Scar » Caleb. « Bonjour. » Au revoir. « Je peux entrer ? » Je peux partir dans l'autre sens ? Maintenant ? Oh, elle ne sait jamais de quel côté il s'enfuit vraiment, c'est peut-être pour ça qu'à chaque fois, elle finit toujours pas retomber dessus. Il esquisse un mouvement pour s'écarter du chemin; elle aurait pu battre des cils et manquer le geste. Ça fait à peine de chahut quand ça se déplace, l'ombre d'une ombre. Le souvenir délavé d'un négatif. Elle redoute ce que les joues creuses essaient de lui faire comprendre. Elle est à deux doigts de se plaquer les paumes de chaque côté de la tête pour ne pas avoir à écouter le chant macabre qui émane des abysses de ses yeux. A une autre décennie, elle aurait plongé dedans comme on entre dans la mer en été. Facilement. Parce qu'on peut. Cette décennie là lui flanque la phobie des profondeurs. Qu'est-ce qui lui assure qu'on ne lui attrapera pas la jambe pour mieux la tirer vers le fond ? « Tu as l'air ... » Mort. T'es certain de t'être loupé ? « Est-ce que c'est vrai ? » Ce qu'on dit jusqu'à New-York, ce que t'as fait, les saletés de rumeurs, dit, c'est vrai ?
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Asher Bloomberg

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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyDim 8 Oct - 21:03



Scarlett & Asher
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Bonjour. Y a ses yeux qui dévient sur l’horloge fixée au mur, puis sur les rideaux tirés qui laissent deviner un grand soleil au dehors. Pas minuit donc, midi. Il a passé la nuit éveillé et il ne s’en est même pas rendu compte, il n’a même pas vu les heures défilées, il n’a même pas senti le poids de la fatigue sur lui. C’est de la faute aux tremblements, sûrement, à l’anxiété aussi. S’il avait su ce qui l’attendait aujourd’hui, il aurait au moins fait une sieste, histoire d’avoir les idées claires. Trois ans sont passés depuis la dernière fois qu’il l’a vue, les mots assassins lâchés sur le pas de la porte, les cartons qui passent directement par la fenêtre et les bruits de verre brisé, trois ans depuis qu’il avait répété en boucle désolé, j’ai fait le con désolé, j’veux pas qu’on se quitte désolé, laisse-moi t’expliquer et redire que j’suis désolé, la colère froide de Scarlett qui n’écoutait déjà plus ce qu’il pouvait bien lui raconter. Il n’a jamais vraiment eu l’habitude qu’elle prête une oreille attentive à ses mots, mais le désolé fut sûrement le plus important d’entre eux et pourtant, le seul qu’elle n’entendit jamais vraiment. Il est catapulté trois ans plus tôt, dans une voiture lancée à 200 km/h, à la place du mort, les yeux dans le vague et la main accrochée à l’attache qui pendouille du plafond, prêt à affronter les tonneaux dans sa boîte de métal, y a même la sensation de vitesse, le bruit du moteur, Scar qui garde le talon enfoncé sur l’accélérateur. Il aimerait lui dire de freiner, a l’impression qu’un grand mur se dresse devant eux. Ils pourront pas le passer, ils pourront pas s’envoler par-dessus, y a plus qu’à faire sauter les parpaings sous l’effet du choc, à envoyer la poussière de ciment dans les airs et à bouffer le bitume, tête la première. Le bonjour reste suspendu à ses lèvres, y a pas de réponse qui vienne. Quand on lui rappelle ce qu’il a fait, pourquoi il l’a fait, pourquoi il s’est barré, pourquoi il en est là, il n’a pas envie de dire bonjour, c’est une journée de merde oui, une journée de plus pour le détruire, pour l’enfoncer sous terre, du bout des orteils. C’est pas un bon jour, non, c’est la silhouette de Scarlett qui le frôle en passant et lui qui se glace, son cœur qui s’arrête, son souffle qui se coupe, les mêmes odeurs qui lui sautent aux narines et les mêmes couleurs qui agressent ses yeux avec la même grâce, la même douceur, le même mordant, les mille facettes de Scarlett qu’il connait beaucoup trop. C’est ça d’avoir grandi ensemble, c’est ça de ne faire qu’un. Tu peux le dire, Scar, j’sais ce que tu penses, il hausse les épaules, ose un sourire, et ses yeux qu’osent toujours pas l’observer, comme s’ils ne s’en sentaient pas légitimes. « Ouais, j’sais. Toi par contre, t’es belle. » C’est dit sincèrement, sans pincettes, il l’a toujours trouvée belle, même quand elle est rouge de colère, Scarlett écarlate. Même la dernière fois, quand elle l’a giflé et lui a hurlé dessus, même avec tous les noms d’oiseaux qui s’étaient faufilés au-delà de ses lèvres carmin. Il referme la porte, laisse un moment sa main sur la poignée. C’est peut-être pas une bonne idée, c’est juste un truc pourri de plus à ajouter à la liste de ce qu’il lui arrive depuis quelques jours, quelques semaines, ce serait mieux qu’elle parte, qu’il la foute dehors, mais il n’y arrive pas parce qu’elle est là, parce qu’elle lui demande si c’est vrai, qu’est-ce qui est vrai il a envie de répondre, histoire de lui faire cracher la vérité. Ce qui est vrai, c’est qu’il a essayé de se tuer, ce qui est vrai aussi, c’est qu’elle en est partiellement responsable, mais elle le sait sûrement. Leurs yeux se croisent, s’esquivent, s’ignorent. Il se barre vers la cuisine, ça dure trois secondes, juste le temps d’attraper la cafetière et deux tasses. Il ignore si ça se fait entre ex, entre davantage, entre quasi riens du tout. « Tu peux l’dire, c’est pas un gros mot. Et oui, c’est vrai. » Il pose son attirail sur la table basse du salon, sert le café. Et sa putain de main qui tremble. Et l’autre qui vient à la rescousse pour tenir l’anse, histoire que Scarlett ne remarque rien. Elle aura vu. Elle voit toujours tout, elle sait toujours tout. Elle aura remarqué le blouson de flic pendu au porte-manteau, les antidépresseurs posés sur le comptoir du bar, les bouteilles d’alcool vides à côté de la poubelle. Elle aura vu la main qui tremble, elle aura entendu la voix qui l’imite, qui camoufle mal les soubresauts, les trémolos. Il est comme une mélodie jouée par un orchestre de débutants, Asher, y a quelque chose d’hésitant dans sa manière de souffler les mots, d’esquisser les gestes, ça en serait presque touchant si ce n’était pas tellement différent de ce qu’il montre habituellement. Pour quiconque le connait suffisamment, c’est inquiétant. Pour Scarlett, ça doit être mortifiant.

« Pourquoi t’es là, Scar ? » La question qui claque dans l’air en même temps qu’il s’assied sur le canapé et attrape la tasse, la garde un peu dans ses mains comme s’il avait froid et attendait que la chaleur passe à travers la céramique. Elle est dans son salon, elle est dans sa vie, et il ne peut pas l’en déloger parce que ça fait beaucoup trop longtemps qu’il attend ça, qu’il attend de la revoir, de lui parler, de s’excuser encore et encore et un milliard de fois si nécessaire. « Je comprendrais que tu me haïsses. » C’est soufflé discrètement, un courant d’air dans la pièce, faudrait faire gaffe à ne pas s’enrhumer avec ce genre d’aveu à moitié murmuré. Oui, il la comprend, même si ça ne semble pas être le cas les trois-quarts du temps, il la comprend comme quand ils avaient six ans et qu’elle chialait parce qu’elle avait perdu sa figurine de Pocahontas dans la cour de l’école, il la comprend comme quand ils avaient seize ans et qu’elle avait choisi de ne pas garder la vie qui grandissait en elle. Il la comprend comme il l’a toujours comprise, comme un meilleur ami, comme beaucoup plus, comme tellement moins.
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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyDim 8 Oct - 23:18


Et il sourit, le con. Elle pourrait le gifler dans la seconde qui suit, mais elle évite. On devrait toujours éviter de claquer sa main sur la joue d'un gars qui a cherché à se flinguer récemment; et dans tous les cas, il est trop loin pour qu'elle puisse espérer l'effleurer. C'est une distance de sécurité, un avertissement entre eux, posé ici comme de rien. Ne m'approche pas, Caleb, je te jure que si tu t'approches de moi ... La dernière fois, c'était posé entre deux cartons pleins à craquer. Dans un couloir familier. Devant une porte à demie close. Elle n'était pas maquillée ce jour là ; c'est idiot de se souvenir de ce détail en particulier. J'ai fait le con, désolé – ne m'approche pas. Elle n'était pas maquillée ce jour là, parce qu'elle n'avait rien trouvé d'assez tenace pour retenir le sel des larmes incessantes, corrosives, et comme tout ce qu'ils avaient était déjà abîmé au point de non-retour de toute façon ... Le dernier effort, la dernière pointe de côté, elle l'avait placé là-dedans. La distance. De quoi la protéger, elle et le blesser, lui. Oh combien de fois elle avait rêvé de le blesser. Des nuits entières, des insomnies assassines. Elle pourrait le gifler dans la seconde qui suit, mais elle évite. Elle l'a déjà fait, il y a des années de cela. Comme quoi, ce qu'on dit est vrai. La violence n'a jamais rien résolu. Y a déjà trop de cette violence en Caleb, elle est certaine que ça rendrait son aura suffocante s'il la dirigeait vers les autres plutôt que vers lui. « Ouais, j’sais. Toi par contre, t’es belle. » Y a un soupir qui vaut toutes les tempêtes du monde et les yeux qui tracent un semblant d'arc de cercle dramatique en orbite. « S'il te plait », elle articule à l'excès. Arrête. Il n'est plus assez pour elle mais encore de trop pour se permettre de lui balancer ça. Sait-on jamais, des fois que ça réveillerait des choses enfouies pas si profond que ça. C'est le problème sans solution de ce genre d'histoire, ça ne dort jamais vraiment. Les sentiments ont le sommeil léger; lui et elle ont toujours été des oiseaux de nuits. Alors debout, debout tout l'monde. Remuez-vous. Il est venu l'heure grandiose de sortir les violons.

« Tu peux l’dire, c’est pas un gros mot. Et oui, c’est vrai. » Il revient de la cuisine avec une cafetière et deux tasses, et dans l'absurde du contexte elle s'attend presque à ce qu'il lui sorte un exemplaire du journal local, une date entourée au marqueur indélébile, et un espèce de rictus fier alors qu'il lui adresse un « regarde, regarde, c'était ce jour là, t'as vu ». Dans une réalité à peine moins dingue, elle le regarde se tuer à convaincre Parkinson de lui laisser servir le café en paix. Et Parkinson lui fait bouffer la poussière, de toute évidence. « Très bien. » Elle s'installe à la table, s'empare d'une tasse, prend racine contre le dossier parce qu'elle ne peut pas promettre d'écouter sans flancher. Est-ce qu'il mange bien, est-ce qu'il dort un minimum, est-ce qu'il peut encore jouer ? La présence du piano aurait du la rassurer, mais elle remarque plus facilement les bouteilles qui traînent à côté plutôt que les partitions froissées. Et les médicaments, aussi. « Que tu as essayé de te pendre. Certains disent que c'était plutôt par balle mais tu ne peux pas me la faire, je te connais. Tu as toujours eu un penchant pour le romantisme. » La bague dans la coupe, la coupe dans le restaurant de New York. Le tableau du voyageur contemplant une mer de nuages. La mélancolie, le lyrisme, la souffrance, ... Ouais, le bon vieux romantique. Même dans le sens le moins glorieux du terme. « Tu n'aurais pas gâché ta seule chance de partir en beauté sur un flingue. » Elle prend une gorgée, repose la tasse dans un bruit monstre qui trahit le fond véritable de sa pensée. Dieu merci, c'était la corde. A moins de ne pas appuyer sur la gâchette, c'est plus compliqué de se louper à l'arme à feu. « Pourquoi t’es là, Scar ? » Pourquoi t'es là, Caleb. Qu'est-ce qui lui prouve que c'est vraiment toi ? Parce qu'elle ne te reconnait pas, de près, de loin, de rien. Voyageuse dévisageant une mer d'étrangetés. Elle veut superposer les souvenirs sur ce qu'elle voit, peut-être par chance raccrocher quelques wagons. Mais c'est qu'un train qui déconne ; elle vient de se payer un aller simple pour le rôle de la femme ligotées aux rails. Drôle de pacte, qu'il continue de lui faire signer. C'est pas sur ce genre de papier qu'elle se voyait inscrire ses initiales, quand il a posé un genou à terre. « Je comprendrais que tu me haïsses. » De nouveau l'envie prenante de gifle ; non, mieux, de le secouer. Un peu, fort. Elle l'a haï, sur le moment. Et le moment d'après, et celui d'après, et celui d'après. Elle a haï qu'il soit ce qu'il est, martyr dans toute sa splendeur. Elle a haï s'inquiéter de comment il allait, alors que le monde entier attendait des réponses de sa bouche seulement. Qu'est-ce qu'il s'est passé, Scar, qu'est-ce que tu vas faire, Scar, qu'est-ce que tu vas devenir ? Il veut comprendre ? Il veut vraiment ? « Tu pensais quoi ? Que je n'en saurai rien ? Que j'enverrai une carte de condoléances à ta famille ? Qu'on en parlerait tristement autour d'un brunch le dimanche, oh non excuse-moi, on a arrêté de faire ça il y a trois ans. » C'est pas ça, le point important. Ça reste un point, néanmoins, mais perdu dans un nuage qu'elle n'arrive pas à relier correctement. Elle est moche, la silhouette que ça dessine. Beaucoup trop cabossée. « Tu m'as laissée seule », on avait dit qu'on ne se laisserait jamais « T'as pas le droit de me laisser seule. » T'as pas le droit de crever.
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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyLun 9 Oct - 19:12



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La voilà qui le prend au cou, la réminiscence douloureuse du concert d’assiettes cassées, de meubles explosés, la cantatrice qui s’apprête à donner son récital de reproches. La voilà la belle Scarlett, le bijou de New-York, rubis dans un écrin aussi rouge que lui. Elle s’est toujours amusée à lui rappeler l'éclat écarlate de son cœur, aussi chaleureuse qu’agressive, assortie au bordeaux de son vin et à l’ocre de ses yeux lorsqu’elle est en furie, elle a souvent pris plaisir à lui faire comprendre que rien ne pourrait échapper à ses griffes couleur sang et certainement pas lui, Caleb Bloomberg. Y a du ressentiment dans les mots qu’elle lâche, notes vouées à s’évanouir dans le clair-obscur de la pièce, il devrait ouvrir les rideaux pour mieux la voir, pour qu’elle paraisse moins sombre, mais ça ne lui vient pas à l’esprit et déjà elle feule, déjà elle susurre ses offenses. Il aurait dû s’y attendre parce que Scarlett n’offre aucun répit, aucune consolation, Scarlett attaque et mord, dévisage, défigure, Scarlett laisse en miettes et ça ne la dérange pas le moins du monde. Ça ne devrait pas la déranger. Il la connait suffisamment pour savoir qu’elle pense chaque minuscule parole qu’elle prononce et qu’elle ne laisse jamais rien au hasard. Donc, quand Scarlett dit quelque chose, c’est presque toujours vrai. Elle ne prendrait pas le risque de se planter, la jolie fleur, de balancer des aberrations sans fondement. Ce sont deux règles qu’on apprend rapidement lorsqu’on côtoie l'héritière depuis trop d’années : y a pas de fumée sans feu, et Scarlett Hayes a toujours raison. Ça ne l’empêche pas de manquer de délicatesse, notez. Il a envie de lui dire d’arrêter mais il sait qu’elle dit tout ça pour lui faire mal, pour enfoncer la lame dans la plaie encore purulente, et il refuse de lui montrer que ça fonctionne. Tant qu’à jouer les acteurs, les chanteurs d’opéra, tant qu’à faire semblant et enfiler un rôle, il préfère être le personnage fort plutôt que l’écuyer qui se barre au tout début parce qu’il a peur du vent. « C’est tout moi, le grand romantique », il souffle dans sa barbe en soulevant la tasse, avant de boire une gorgée de café. C’est du sarcasme, ouais, leur relation a prouvé à maintes reprises qu’il n’avait rien du prince charmant, costume qu’il n’a jamais prétendu revêtir. Et puis le flingue, ça a quelque chose de poétique, s’faire exploser la cervelle comme une pastèque, en foutre un peu sur les murs. Y a des artistes contemporains qui paieraient sûrement cher pour une aquarelle explosive des maisons Bloomberg, c’est un savoir-faire qui se transmet de génération en génération, répéter aux enfants qu’ils ne valent rien jusque l’un d’eux craque. Asher, le premier de la lignée, c’aurait fait une belle épitaphe, mort sous le coup de l’amour. C’est ce qui fait peur chez lui, quand on regarde mieux. Il est le résultat d’une enfance heureuse, d’une enfance riche, il n’a pas vraiment connu de malheurs. Il a toujours eu tout ce qu’il voulait, Scarlett en premier, avec ses yeux qui ont mis des années à le bouffer mais ont finalement eu raison de lui. Le premier baiser à l’aube de l’adolescence, la certitude de finir ses jours avec elle. Et maintenant ? Maintenant que dalle. Maintenant les insultes, maintenant les reproches. Maintenant Scarlett qui lui gueule dessus, les mots qui s’écrasent contre lui comme des coups de poings, de pieds, de sang, des coups de foudre aussi, parce qu’eux c’est surtout ça, parce qu’eux c’est seulement ça. Il avait dit qu’il ne la laisserait pas seule, il l’avait promis, il s’en souvient comme si c’était hier parce que ce n’est pas le genre de promesse que l’on oublie, quand on est sincère. Il l’avait dit une fin d’après-midi, ils étaient assis au pied d’un arbre, le soleil faisait des reflets orangers dans ses cheveux et ils avaient ri. Sa main s’était posée sur la joue de la jeune fille et il avait dit j’te laisserai pas, Scarlett, même dans cinquante ans, même quand on sera vieux et qu’on s’aimera peut-être plus, j’te laisserai pas. « Ouais, j’te laisserai pas. Je disais ça souvent, pas vrai ? » C’est presque pas sarcastique, il l'a trop dit pour se souvenir de toutes les fois où il a déclamé ces mots. Y a eu trop de choses depuis, trop d’ondes brouillées, y a eu trop d’incompréhensions et trop gâchis. « C’était avant de baiser Sam et de te prendre pour une conne. Et de te plaquer le jour de notre mariage. » C’est dit froidement, lâché sans préliminaires, sans arrondir les bords. Et ce n’est pas à elle qu’il en veut mais bien à lui. Lui qu’a pas su tenir son cœur, sa queue, son cul, lui qu’a pas su se foutre dans la tête qu’il allait se marier avec la personne qu’il aimait le plus au monde et que c’était mille fois suffisant.
Il y a ses mains qui tremblent lorsqu’il repose sa tasse sur la table, lorsqu’il garde les yeux baissés pour ne pas avoir à se prendre le regard de Scarlett comme un trente-trois tonnes. Y a trop de choses dans ses iris sombres, y a des souvenirs et des regrets, des toujours, des jamais, des à côté et des en plein dans le mille. Y a des moments d’extase et des moments de panique, des tristesses, des joies, une vie ensemble, une vie vécue et le reste qui n’aura jamais lieu, à cause de lui. A cause de tout un tas d’autres trucs aussi, sûrement, Samuel, le temps, la routine, l’ennui, à cause du doute et de la colère, de l’envie, de la jalousie. Mais surtout, oui, à cause de lui. « J’suis plus ton meilleur ami, Scar. Je resterai toujours le mec qui t’a laissée à l’autel. Et on s’en fout que j’aie envie de crever. J’devrais plus compter. J’devrais plus être important. » Et ses yeux qui se lèvent, qui la regardent. J’devrais plus te faire dire ça, tu devrais plus me faire cet effet, me clouer sur place, me donner envie de te serrer contre moi. Tu vois, c’est plus jouable, s’est du perdant-perdant, on se quitte, on s’attend, on se tue lentement. C’aurait été mieux que t’envoies la carte de condoléances, ça t’aurait économisé le billet d’avion. C’est ce qu’il pense, c’est pas ce qu’il dit. Il dit rien, Asher, il fixe, il souffre, il meurt une seconde fois.

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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyMar 10 Oct - 21:53


Certaines personnes insistent pour dire que tomber amoureux est l'un des meilleurs moments dans une vie. Indéniablement, ces deux idiots ont un talent tout particulier pour la

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Pour ce qui est de l'amour, on repassera plus tard. « Ouais, j’te laisserai pas. Je disais ça souvent, pas vrai ? » Seulement toujours, Caleb. Seulement toujours. Elle se demande, des fois, si toujours mérite vraiment sa place dans un monde où un rien seulement suffit à flinguer le concept. A ce propos si vous le permettez, elle aimerait réécrire un passage en particulier. Trois fois rien, promis. Je fais promesse solennelle de te trahir, de t'abandonner et de te tromper dans la richesse de tes parents comme dans la richesse de mes parents comme dans la peine de nous amants jusqu'à ce que la vie nous sépare. Amen. C'est bon, elle a fini, j'vous l'avais dit. Trois fois rien. « C’était avant de baiser Sam et de te prendre pour une conne. Et de te plaquer le jour de notre mariage. » Ça grince à ses oreilles comme des ongles sur un tableau. Elle sait ce qu'il compte faire, essaie de faire, fait affreusement bien. Et si elle prêtait réellement attention au café qui réchauffe sa gorge, elle sentirait l'arrière-goût salé de la culpabilité. C'est mal dilué, à peine subtil, arôme de raté au fond de la tasse. Elle repense au tableau, et à Caleb qui se tape lui-même sur les doigts. Le paroxysme du masochisme, emprisonné dans un seul corps faiblard. Elle fait grincer ses dents. « Je t'en prie, ne te retiens surtout pas pour moi. » La liste des doléances est non-exhaustive ; le mariage a beau camper sur trois lignes, il y aurait de quoi annoter dans la marge. Recto et verso. Elle commencerait par se plaindre de son cœur, cette chose qu'elle pensait connaître cliniquement, méthodiquement. L'organe vital qu'il possède forcément, comme tout le monde. Et elle en a relevé chaque courbe, les pics vertigineux de sa main dans la sienne, de leur premier baiser qui a fait planté le système, du deuxième qui a tout relancé à neuf, du crescendo interminable de la ligne ce fameux soir, à quinze ans. Monte, monte, monte mais jamais ne redescend. Je n'avais pas vu ; et comment est-ce qu'elle avait pu passer à côté de quelque chose d'aussi grand ? A côté de ces gratte-ciels, bien plus imposants encore que leur premier appartement, en calque derrière ses graphiques de première de la classe ? Caleb et son cœur, son foutu cœur. Trop grand, trop bon, trop con. Son cœur qui flanchait pour elle, autant que pour d'autres ; et obnubilée par sa propre courbe, elle pensait inutile d'en analyser plus. Erreur fatale, la toute première. La deuxième ? D'avoir pensé être la seule capable de satisfaire un cœur de géant. C'est le bon moment pour préciser qu'elle fait deux centimètres de moins que la moyenne le prévoit ? Comme ça, parce que ça paraît toujours plus important, quand c'est lancé dans le contexte. « J’suis plus ton meilleur ami, Scar. Je resterai toujours le mec qui t’a laissée à l’autel. Et on s’en fout que j’aie envie de crever. J’devrais plus compter. J’devrais plus être important. » Lève les yeux, lèvera pas les yeux, lève les yeux et ... maintenant. Elle l'a enfin trouvé, le nouveau départ de leur courbe. Ça ressemble à une tâche d'encre sur un bout de papier oublié. Les psychologues auraient sûrement beaucoup trop choses à dire dessus. « C'est quoi ton concept de meilleurs amis ? » qu'elle demande en refusant de le lâcher du regard. Les gens qui savent aussi bien prendre la fuite, il ne faut jamais les lâcher. Ne serait-ce qu'une seconde, une seconde par charité, et c'est déjà trop tard. Même menottés à eux, ils seraient capable de se ronger le poignet pour s'échapper. Alors elle le regarde, même si ça brûle. Elle apprécierait franchement qu'il évite de perdre un bras dans la journée. « Hum ? C'est quoi, nos prénoms sur un t-shirt avec la statue de la Liberté en arrière-plan, une tasse personnalisée à noël, un pèle-mêle de photos à ton anniversaire, c'est quoi pour toi ? S'il te plaît, franchement. » Pour elle, c'est une sorte de pacte. Un pacte avec le diable, elle réalise, avec le temps. Une forme de compréhension mutuelle. Je ne te laisse pas. Et oui, même dans cinquante ans, même quand on sera vieux et qu'on s'aimera peut-être plus. Je ne te laisse pas. Même quand t'iras marcher sur mon cœur pour aller en mater d'autres. Je ne te laisse pas. Qu'on se le dise, c'est toi et moi. T'as peut-être réduit ta partie du contrat en cendres, elle a gardé la sienne encadrée sous verre. C'est sympa, au-dessus de la cheminée. « Disons que t'es un connard. » Un bon connard. Le connard des connards. Le connard qui rend jaloux tous les autres connards de la terre et du système solaire autour. Bref, un connard. « Disons que tu ne devrais plus compter. Dans quelle version tordue de ce monde je ne reviens pas pour toi ? » De tâche en explosion ; l'encre décampe sur le papier. A considérer que l'encre fuit de un litre à la minute, et que la baignoire elle-même est trouée, en combien de temps est-ce que Scarlett et Caleb vont couler ? Indice, en trois fois rien. Y en a toujours un pour appuyer sur la tête de l'autre. « Tu as voulu ça, Caleb. Félicitations, bienvenue en enfer. C'est moi qui gère les choses par ici. »
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Asher Bloomberg

Asher Bloomberg
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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyJeu 12 Oct - 0:10



Scarlett & Asher
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Meilleurs amis, putain de pacte, putain de vie. Meilleurs amis qui se promettent la lune mais se donnent la poussière, étoiles filantes qui filent rien du tout, qui gardent égoïstement tout ce qu’elles auraient pourtant à offrir, la planète et le satellite qui se tournent autour mais ne se rencontrent jamais. On pourrait dire qu’ils se sont connus trop tôt mais c’est même pas ça. Ils se sont aimés trop tôt, aimés mal, le flirt d’adolescent et les hormones qui explosent dans le bas-ventre, le trop-plein d’affection avant l’envie, c’est pas forcément ce qu’il faut, c’est pas forcément ce qui est bon. Ils auraient peut-être mieux fait de ne pas se connaître gamins, de ne pas grandir ensemble, de ne pas partager la même balançoire et les mêmes billes. Ils auraient mieux fait de ne jamais partir en vacances, de ne pas dormir tête-bêche dans le même lit, de ne pas penser qu’ils étaient seuls contre le reste du monde. Pinky swear, j’resterai toujours là, même si c’est que dans un petit coin de ta tête, même si j’suis loin et qu’on s’oublie. Les auriculaires qui se touchent, s’accrochent, trois petits coups en l’air et puis s’en vont, c’est pas un serment de sang mais presque. C’est quelque chose qui a plus de sens que tous ces contrats que les adultes signent entre eux, qui leur disent quoi faire et quoi dire et comment le faire et le dire. Pinky swear, les petits doigts accrochés dans la salle d’attente du planning familial, j’te lâcherai même pas maintenant, même pas alors que tu portes un bout de moi en toi mais qu’t’en veux pas, j’t’abandonnerai pas alors qu’on a juste commis le crime de s’aimer trop jeunes, et c’est même pas quelque chose que j’regrette, qu’on me passe les menottes, je plaide coupable. T’as raison Scarlett, c’est nous deux contre l’univers, ça l’a toujours été, nous deux et même Sam n’y a pas survécu, même Sam n’est pas revenu. Sam, il s’en souvient Asher, il est enfoui dans un recoin de son esprit, il gratte des fois les murs pour être sûr qu’on ne l’oublie pas. Il était beau, Sam, il doit toujours l’être, il était beau et tendre et gentil, il avait moins de caractère qu’eux et c’est peut-être comme ça qu’il avait réussi à se faire une place dans leur duo, impossible de le remarquer, bien trop discret, bien trop fourbe si on veut être méchant, si on veut se souvenir qu’il a marqué le début de la fin. Il n’est pas venu à l’hôpital, Sam. Il est pas venu parce qu’il en veut sûrement terriblement à Asher pour avoir choisi l’exil plutôt que l’amour avec lui, ça peut se comprendre mais ça ne se justifie pas. Scar est revenue, elle. Scar a enfilé ses escarpins, est montée dans l’avion, a débarqué dans une ville inconnue juste pour le retrouver. Dans quelle version tordue de ce monde elle ne revient pas ? « Dans celle où je t’ai trahie, Scar », il souffle avec toute la résignation de l’homme qui sait qu’il a raison et qu’elle a tort, mais qui ne peut malheureusement pas la convaincre, parce que Scarlett est terriblement, outrageusement têtue, parce qu’elle fait de cet entêtement une fierté et jamais un défaut. Il est peut-être lui aussi tordu, comme le monde, tordu de vouloir lui montrer qu’elle a tort de lui pardonner aussi facilement, qu’elle ferait mieux de ne pas disséminer sa confiance aux quatre vents et de l’accorder uniquement aux gens qui en sont dignes. Il est peut-être aussi terriblement confus que cet univers parallèle dans lequel leur amitié n’a plus sa place, parce qu’une partie de lui rêverait de voir Scarlett lui cracher au visage et le gifler, lui donner simplement ce qu’il mérite pour tout le mal qu’il a causé. Il n’est peut-être pas confus du tout, juste très con, sans le -fus, ou très lucide. « J’aurais dû revenir pour toi avant. » Il aurait dû honorer toutes leurs promesses parce que ce n’était pas que des paroles en l’air, que leurs doubles d’il y a vingt-cinq piges étaient visiblement bien plus sensés qu’eux, qu’ils avaient compris bien mieux la vie que leurs alter-egos trentenaires. Il aurait dû revenir pour elle et elle l’aurait foutu dehors, sûrement, elle lui aurait dit de se barrer et de ne jamais revenir, et puis elle aurait fini par céder à son odieux chantage, parce que ç’a toujours été le cas, parce que Scarlett est bien trop miséricordieuse quand il s’agit de lui et qu’il n’est pas assez bien pour ça, qu’il n’en mérite pas la moindre miette. Et peu importe ce qu’elle pourra lui dire, le sentiment de culpabilité finira sûrement par l’achever, bien avant l’alcool et les médicaments.
C’était un jour d’automne, la première fois où il lui a dit qu’il préfèrerait s’appeler Asher. C’était en septembre ou en octobre, en 1996, peut-être ? 1997 ? Tu sais que Caleb était le prénom du bébé qui est né avant moi et qui est mort ? Ouch, la vérité qui blesse, les mots qui tranchent. C’est peut-être pour ça que Scarlett n’a pas retenu, qu’Asher s’en est accommodé. Pour ça qu’elle l’appelle toujours Caleb et que ça le fait tiquer. Y a plus personne qui l’appelle comme ça ici, même Jael qui le connait depuis des années, qui est au courant qu’on ne l’appelait pas Asher avant, qu’il y a eu un avant, une époque qu’on essaie d’oublier mais qu’on n’arrive pas vraiment à rayer de sa mémoire. Il dit rien pourtant, se contente de grimacer, d’avaler un peu de café pour faire passer le prénom qui écorche ses oreilles, qu’il a entendu pour la dernière fois il y a quelques semaines, à l’hôpital, de la bouche de sa mère, infoutue de vraiment le réconforter alors qu’il venait de se passer une corde autour du cou. Caleb, il aurait préféré qu’elle l’appelle Trouduc. « Tu gères les choses ? » Et les mots s’entrechoquent dans sa tête, se percutent, s’explosent les uns contre les autres. Elle veut dire qu’elle va rester, elle veut dire qu’elle veut rester ? « Tu vas rester ? Tes parents sont au courant ? » Et plein d’autres questions à la con qui lui viennent, du genre tu vas loger où qu’il n’ose pas lui poser parce que le sujet est délicat. Bien sûr, il pourrait lui proposer de venir. Il a un canapé convertible et une chambre séparée pour lui. Ça serait juste bizarre, de se retrouver avec son ex-fiancée, sous le même toit, sans relations sexuelles. Etrange et pourtant touchant, comme retrouver une vieille amie perdue depuis trop d’années. « J’ai pas besoin qu’on veille sur moi, Scar. Tu ferais quoi ici toute la journée ? » Toute la journée, ouais, parce qu’il n’a même pas repris son job, le déchet. Tu ferais quoi, Scar ? Tu me laverais, tu me ferais la bouffe, tu me torcherais ? « J’peux me débrouiller. Vraiment. » J’peux me débrouiller et j’sais pas si te laisser entrer de nouveau dans ma vie est une bonne idée. Et toi ?

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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyMar 17 Oct - 21:13


J’aurais dû revenir pour toi avant. Il aurait dû – enfin, vraiment ? Elle repense brièvement aux heures qui ont suivi, aux jours, aux semaines. Au poing dans la vitre, à l'écarlate qui est venu remplir les fissures de la toile d'araignée. Aux points de suture, à ce qu'il a fallu expliquer à l'infirmier. J'ai enfoncé la vitre de ma voiture. Vous avez quoi ? Enfoncé, frappé trop fort, c'était ça ou la tête de mon ex-fiancé. L'assurance aurait sûrement moins apprécié qu'elle encastre son poing dans quelque chose de vivant. Scarlett fait la moue, Scarlett y repense brièvement comme un gamin qui n'aime pas mettre la tête sous l'eau. Deux doigts sur l'arrête du nez, les paupières fermement closes, une odeur de chimique saillante mais qui vient plus de la solution anti-bactérienne dans sa poche que du fond de la piscine. Peut-être qu'elle l'aurait tué, s'il était revenu. Pour de faux, comme au théâtre, une poche de sang sous la chemise et on en parle plus. Et tu, Brute ? Peut-être qu'elle lui aurait dit. De dégager, d'aller crever plus loin, là où l'herbe est plus verte et le soleil plus chaud et les amours moins exigeants. C'est l'habitude d'en attendre trop d'une vie qui donne sans compter les zéros en fin de chèques. C'est la routine, le quotidien qui le lui a fait à l'envers. Peut-être qu'il aurait dû revenir pour elle après tout, parce que dans l'état dans lequel elle baignait, ça aurait fini de couper les liens. Définitivement. Enfin. Et d'une deuxième vitre cassée elle aurait construit par-dessus les ruines de son palpitant, un autre métier, une autre ville, un nouveau fiancé, qui sait. Caleb ? J'en ai connu un, il y a très longtemps. Et elle vécut heureuse et eut 1,85 enfants, conformément à la moyenne du pays. Il aurait du revenir pour elle avant, mais au lieu de ça, elle est assise dans son salon et s'amuse tristement avec les fils d'Ariane au bout de ses doigts fins. Suffit de tirer un centimètre pour voir l'accroc se défaire de deux. Ainsi de suite, suite, suite ; elle va finir avec une pelote entre les mains à la fin de la journée.

« Tu gères les choses ? » Il devrait savoir, il la connait, non ? Elle et son sens incorrigible de l'autorité. Elle croise les jambes, les bras dans la continuité du mouvement. Ne me contredis pas, crie la tension. J'essaie seulement de t'aider, ajoutent faiblement les ongles qui tapent nerveusement au tissu. Ça s'emmêle les pinceaux, et elle sent les fils tirailler dans ses instincts de recul. C'est à son tour de s'effilocher. Elle prend froid. « Tu vas rester ? Tes parents sont au courant ? » Et les siens de parents, elle n'a pas demandé. Ils ont appelé pour prendre des nouvelles de leur fils, ou la fierté n'a pas encore assez délavé ? Suffirait de faire une tournée générale de tous leurs problèmes sans distinguer les couleurs, au fond du tas, ils finiraient par trouver dans le gris du courage de quoi composer le numéro. « Je sais que j'ai encore une forme excellente, donc on pourrait presque avoir tendance à oublier, mais j'ai bien trente-deux ans. Oui, mes parents sont au courant. Non, j'ai bien peur qu'ils n'aient pas leur mot à dire. Autre chose ? » Un peu de sucre dans ton café ? On dirait que tu vas t'évanouir. De son côté elle voit déjà la migraine débarquer, deux valises pleines à craquer et un sourire qui tape, tape, tape. Il aurait du rester dans le droit, Caleb, Asher, ce qu'il veut ; il a le répondant des clients chiants qui ne s'avouent pas vaincus, même posés derrière les barreaux et menottés devant tout le monde. Elle refuserait ferme de se battre contre son cas. « J’ai pas besoin qu’on veille sur moi, Scar. Tu ferais quoi ici toute la journée ? » Des papiers, des papiers, et peut-être encore des papiers si elle s'ennuie. Deux ou trois aller-retours à New-York bien placés dans le mois, et ça devrait le faire, non ? Elle s'en va pour répondre, mais il ne peut s'empêcher de reprendre sa plaidoirie. Le cauchemar ultime d'un avocat, elle l'a dit. « J’peux me débrouiller. Vraiment. » Objection. C'est l'argument final qui ne passe pas, et elle qui s'étouffe sur un rire dénué d'humour. Aussi sur le café, un peu. « Si tu comptes rester aussi mélodramatique, Asher, essaie au moins d'en faire quelque chose. D'en tirer profit, ou un peu d'argent. Je sais pas, va gagner un Oscar. » Asher. C'est un nom d'acteur, Asher. C'est un nom de bon acteur ; parce qu'il y a bien un mec qui lui parle depuis une demie-heure, mais c'est pas Caleb. Et puis Asher porte comme une écharpe écarlate autour de son cou. Caleb a jamais froid. « Tu sais ce qu'on dit ... » Elle laisse traîner en balayant l'air d'une main « ... le passé est passé, où quelque chose dans ce genre là. » Et va mettre le passé de côté. Va l'enfermer à double tour, bien serré, au pain sec et à l'eau, jusqu'à ce qu'il finisse par s'étouffer et se taire. C'est ce que tu fais avec le passé, Caleb. Tu le sentences à mort, ou à perpétuité. Comme tu préfères, après tout, c'est toi ou lui. Lui ou toi.
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Asher Bloomberg

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MessageSujet: Re: and now it's too late for a soliloquy (Scash)   and now it's too late for a soliloquy (Scash) EmptyMar 17 Oct - 22:45



Scarlett & Asher
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Ça a quelque chose de Shakespearien, tout ça. Pas seulement la manière si peu délicate avec laquelle Scarlett le compare à un acteur, elle est égale à elle-même et il l’a toujours connue comme ça, y a juste une pointe d’amertume en plus et c’est lui qui a foiré la recette. Toute leur histoire d’amour a ce côté dramatique qu’ils ont souvent essayé de cacher par tous les moyens possibles, pour se protéger l’un l’autre et pour épargner leurs familles, peut-être. L’amour et Scarlett, ce sont deux choses qui vont ensemble, aussi bien que les citrouilles avec le vent d’automne et la mer avec le sable, deux parties d’un même ensemble si étroitement liées qu’on pourrait les confondre. Scar, on saute dans cette flaque s’est rapidement mué en Scar, on s’embrasse pour finir par Scar, on s’épouse. Peut-être qu’ils n’étaient pas faits pour ça, jamais, pas hier ni maintenant, ni dans un futur plus ou moins lointain. Ils avaient peut-être confondu les signaux, attendu trop de choses d’une simple amitié, avaient trop voulu retrouver chez l’autre ce qu’ils attendaient de la personne idéale. Vous savez, le truc qu’on fait quand on est gosse, à griffonner sur une feuille de papier la personnalité de celui ou celle avec qui on voudrait passer le reste de sa vie ? Asher y aurait décrit Scarlett, trait pour trait, chacun de ses défauts minutieusement copié et l’expectation au rabais en ce qui concerne ses qualités, parce que la vraie version est inégalable. On est beau à rêver de la femme parfaite quand on a douze ans, putain. S’il avait su où ça le mènerait, il n’aurait jamais fait ça. Il aurait spécifié doit être pourvu d’un pénis, ça aurait éliminé Scarlett et la douloureuse confusion de ne pouvoir choisir entre les mecs et les nanas. Ça lui aurait, surtout, évité de la perdre. Ça n’aurait marché qu’un temps, remarque. Il arrive bien à avoir le cœur qui penche entre plusieurs mecs, putain de girouette.
Les clopes sont trop près, le briquet aussi. Il ne faut que quelques secondes pour qu’y en ait une plantée au coin de sa bouche. Déchet. Déchet qui mérite pas qu’on s’intéresse à lui, déchet qui s’fout très bien en l’air tout seul. Bien sûr qu’elle n’a pas besoin de l’approbation de ses parents, bien sûr qu’elle ne l’aurait pas eue de toute façon. Ils le détestent et c’est normal, il a brisé le cœur de leur précieuse poupée. Y a une partie de lui qui envie la relation de confiance et d’amitié qu’elle entretient avec eux, parce qu’il n’a jamais connu ça avec les siens, parce que Maxine non plus, c’est peut-être pour ça que ça a longtemps été eux contre le monde entier, même avec leurs douze ans d’écart et les rares visites d’Asher dans l’Upper East à partir de ses vingt ans. L’autre partie, donc, est plutôt satisfaite de cette situation d’indépendance émotionnelle, ils ont pas besoin de moi et réciproquement, ça permet de rendre la rupture avec eux plus facile. Un peu moins depuis qu’il s’est mis une corde autour du cou et que papa et maman ont décidé de réapprovisionner son compte de quelques milliers de dollars par mois. Comme si l’argent guérissait tout. Comme s’il en voulait, de ce pognon. « D’accord, t’es une grande fille, j’ai compris, tu peux faire tes erreurs toute seule », il souffle après avoir aspiré sur sa cigarette, libérant un mince filet de fumée alors que les mots roulent sur sa langue. Les regards se défont, s’échouent ailleurs. Putain de bon acteur, hein Scar ? Suffisamment bon pour te faire croire qu’il n’en a plus rien à foutre. De toi, du monde. Surtout de toi. Il mériterait ce putain d’oscar, hein, faudrait penser à lui filer un jour, à titre honorifique au moins. La petite statuette siérait tout aussi bien à elle, remarque. Scarlett Hayes dans Le passé est passé, meilleure actrice dans un drame romantique. 10 contre 1 qu’elle lamine tous ses concurrents, tous ceux qu’ont trouvé des noms aussi pourris à leurs nanars. Il fait mine d’être impressionné, avale de nouveau un peu de tabac. « T’es pas mal non plus, Scar. J’ai presque pas vu que t’as failli vomir en m’appelant Asher. » Si elle veut faire des cachotteries, ça ne passera pas par lui. Il la connait, saurait décrire son visage à un parfait inconnu dans toutes ses rides, ses imperfections, ses cicatrices, dans tous les détails auxquels personne d’autre ne prêterait attention. Il s’est trop perdu dans ces iris pour ne pas reconnaître le sarcasme quand il s’invite entre eux. « That which we call a rose by any other word would smell as sweet », sourire au bord des lèvres, il a toujours été l’intellectuel de service, à cracher du Shakespeare au moment le moins importun, au point de s’en rendre insupportable. Y a une certaine ironie à citer Roméo et Juliette quand on connaît leur situation, quand on sait que Roméo se tue à la fin et que Juliette le suit bien assez rapidement, quand on comprend que ça pourrait s’appliquer à eux dans un univers où Scarlett l’aimerait toujours et où il ne serait pas un connard fini.

Il y a quelque chose de cruel dans la manière avec laquelle Asher cesse de l’observer, fume sa cigarette en silence, l’esprit embrumé par un tas de signaux perturbateurs. Il aimerait lui demander comment Samuel se porte, si elle a des nouvelles, est-ce qu’il a quelqu’un dans sa vie et est-ce qu’il est heureux, mais il peut pas. Il peut pas parce que Samuel est un peu leur ange de la mort, parce que c’est lui qui a mis le feu au poudre, lui qui a tout fait remettre en question, lui qui a engendré la putain de crise de la trentaine qui a fait dire à Asher « je ne peux pas » au lieu de « je le veux. » Elle mérite mieux que ça, Scarlett. Elle mérite mieux que le dédain et le mépris, les minutes qui s’allongent comme des heures alors qu’ils se regardent sans se voir, sur leurs sièges respectifs. Putain de pulsion qui lui donne envie de la serrer contre lui, de respirer son parfum et de laisser ses lèvres traîner sur la peau de son cou, putain d’envie qu’il réfrène comme le propriétaire d’un chien tirerait sur sa laisse pour l’empêcher de pisser sur la jambe d’un passant. « Merci. » Aveu inattendu. Et il la regarde enfin, ose planter le noir de ses iris dans ceux de Scar, deux connes de mules qui s’observent et qui n’arrivent pas à décider laquelle cèdera en premier. Sauf que c’est lui. Sauf qu’il baisse les bras, que les vannes cèdent. « D’être venue, d’oublier que j’le mérite pas. Merci. » De m’aimer toujours un petit peu. C’est un souhait qu’il a, qu’est peut-être pas vraiment réalisable. L’ambition abstraite et confuse qu’une partie d’elle regrette ce qu’ils étaient. « Et je suis désolé. Pour tout. »

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