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| don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) | |
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Ricolaaaaaaaaa ▹ posts envoyés : 1051 ▹ points : 7 ▹ pseudo : Kenny ▹ crédits : lonewolf (ava) ; astra (sign), pastel breathing (icons) ▹ avatar : Izzy Brierley ▹ signe particulier : perchée
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| Sujet: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Mer 14 Juin - 23:49 | |
| Atticus. Nemo est mort.
Il aime bien lui faire des coups comme ça, Nemo. Il n'est pas idiot, il sait qu'Atticus ne va pas le prendre au sérieux, mais il le fait quand même, peut-être pour tester ses réactions, peut-être à défaut de réussir à dire autre chose, ou peut-être seulement parce que c'est un petit con. Atticus a pas mal de théories sur le sujet et il n'arrive pas à se fixer. Il se demande aussi s'il n'espère pas lui causer des crises avec ce genre de textos, ça doit lui sembler marrant comme jeu. De tout son entourage, Nemo est celui qui connaît le mieux sa maladie et anticipe le mieux ses réactions. Avoir joué à l'infirmier personnel de son grand frère pendant les premières années aide un peu, d'autant qu'il s'amusait déjà à faire des expériences et notait ses observations. Et puis il est celui qui le connaît le mieux tout court et ça joue, puisque ses crises sont étroitement liées à ses émotions.
Nemo n'est pas mort, donc. C'est son poisson rouge qui est mort. Les yeux bouffis de sommeil, Atticus pianote sur son téléphone merdique et Nemo ne tarde pas à lui répondre. Manque de chance, tout ça se passe au réveil, et la mémoire d'Atticus lui joue des tours lorsqu'il est mal réveillé — encore un symptôme à la con de la narcolepsie. Il réalise donc plusieurs heures plus tard qu'il a oublié de répondre au dernier texto de Nemo, quand celui-ci le relance. Il veut offrir des funérailles viking à son poisson rouge. Atticus éclate de rire vautré sur son lit, un livre ouvert à côté de lui. Qu'il est con. Si seulement il aimait la vie, il serait parfait. Mais il ne serait pas Nemo, bien entendu. Il vide le mug de café froid posé sur sa table de chevet et parvient enfin à se lever.
C'est comme ça qu'une heure et demi plus tard, Atticus se retrouve chez lui après une virée en ville. Il est revenu avec des bières qu'il a collé immédiatement au frigo et des tentures noires qu'il entreprend de tendre partout autour de la cabine de son bateau, à défaut d'avoir trouvé de quoi composer un décor viking digne de ce nom. Il faut quand même marquer le coup. Une fois qu'il est dans l'ambiance, il attrape son violon et les partitions de Float, pas très viking mais les désirs de Nemo sont des ordres. Ça n'est pas son registre de prédilection, plutôt ce qu'il rangerait dans la case de ses péchés mignons. Et il devrait peut-être être malheureux pour Nemo (le poisson), mais jouer le morceau aux accents celtiques le rend carrément guilleret. Et comme il veut rendre Nemo (le petit frère) heureux, il essaie même d'en apprendre les paroles. Atticus chante mal, c'est un fait, mais il s'en fout et Nemo chantera mal avec lui, de toute façon. Moins par moins, ça fait plus, surtout quand les deux moins sont des Hornigold.
Il a demandé à Nemo de le rejoindre à la tombée de la nuit. Quand l'heure arrive, il est excité comme un gosse. C'est l'effet Nemo, the fun in funeral, sans doute. C'est l'idée de passer une soirée à boire et jouer de la musique avec son petit frère en ayant trouvé le prétexte le plus improbable du monde. Les funérailles celtico-viking d'un poisson rouge. Quand il entend ses pas résonner sur le pont, il lui ouvre la porte de la cabine avec un sourire solaire et décapsule deux bières avant que Nemo ait eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait.
Dernière édition par Atticus Hornigold le Ven 14 Juil - 12:19, édité 1 fois |
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s’il a de l’humour il finira mort noyé ▹ posts envoyés : 1595 ▹ points : 26 ▹ pseudo : Camille ▹ crédits : av Xerxes ♥ + aes Kenny ♥ ▹ avatar : Archy Marshall (King Krule) ▹ signe particulier : roux sorti des enfers, abonné aus suicides manqués
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Dim 18 Juin - 17:24 | |
| Toc-toc. C’est le bruit de l’ongle de Nemo qui cogne contre la paroi de l’aquarium. Il a la tête en vrac, le cerveau dans le brouillard. Faire passer les somnifères avec la bouteille entière de vodka n’est pas la meilleure idée qu’il ait eue. Surtout que ça l’a pas fait mourir, encore une fois. Surtout qu’il a pas de quoi en acheter une nouvelle, ce mois-ci. Six jours avant sa paye. Va falloir qu’il mange le fromage en tranches qui trône en seul survivant dans son frigo avec parcimonie. Il voit flou, un peu, et il a beau se frotter les yeux encore et encore, il met un temps fou à capter que son poisson rouge ne nage définitivement pas dans le bon sens. Le ventre en haut, la nageoire dorsale en bas, et c’est ridicule, parce qu’il se fait inlassablement entraîner par le courant de la pompe, dans un manège un peu glauque. Nemo en veut à son père, pour lui en avoir racheté un après les deux derniers. Il en veut à son psy pour avoir suggéré cette débilité sans nom à son père. S’occuper de quelque chose, ça lui fera du bien. Il ne s’est pas vraiment attaché à Nemo III comme il ne s’est pas attaché à ses deux prédécesseurs, mais ça le saoule de retrouver des cadavres dans son appartement. Surtout quand c’est pas lui, le cadavre. C’est pour ça qu’il les appelle Nemo, il sait qu’il va foirer, oublier de les nourrir ou leur filer de la mort aux rats à la place de leurs granulés, et qu’ils crèveront tôt ou tard. C’est plutôt ça, qui lui fait du bien. Au moins, ces Nemo-là ont le droit de mourir en paix.
Comme toujours, il prévient Atticus. A la moindre connerie qui se produit dans sa maigre existence, il prévient Atticus. Il ne se produit pas souvent grand-chose de mieux que la mort d’un poisson rouge, mais il prévient toujours Atticus. Faut dire, il n’a pas beaucoup de personnes à prévenir, ni beaucoup de personnes qu’il a envie de voir. Atticus étant l’exception à tout le mal que Nemo peut penser des gens. Nemo s’habille tout en pianotant une explication digne de ce nom à son grand frère, fourre son téléphone dans sa poche et sort pour aller crever d’ennui à son job, un dentier de vampire collé dans la bouche. Il passe le trajet en bus à sourire à des vieilles dames offusquées et finit devant sa caisse, l’uniforme synthétique qui lui file la gerbe sur le dos. La vie d’un caissier n’est pas spécialement trépidante, et, à sa pause midi, il trouve une meilleure idée que de laisser pourrir Nemo III dans son eau déjà verte. Il envoie ça à Atticus, retrouve sa caisse et entreprend de construire un radeau avec des crayons et de la ficelle vendus dans le magasin devant les clients. C’est pas comme si c’était inhabituel, avec lui.
La journée s’achève avec la même lenteur que toutes ses journées depuis vingt-deux ans. Il retire sa veste bleue pétante, la jette dans son casier et prend le bus retour, crachant son dentier en cours de route. Chez lui, il enfile une chemise décente – Hawaii, bonjour –, attrape sa guitare, glisse le poisson mort dans un sachet plastique avec le fameux radeau, avale une demie tranche de fromage et dégote un reste de weed dans un coin. A défaut d’apporter de l’alcool, il est sûr qu’Atticus sera content du cadeau. Nemo a toujours été un oiseau de nuit, et quand celle-ci arrive, il a enfin l’impression d’être réveillé. C’est aussi parce qu’il aime retrouver Atticus et il a un sourire en coin à la seconde où son frangin ouvre la porte de la cabine alors qu’il n’a même pas encore atteint cette partie du bateau, visiblement pressé de le retrouver, lui aussi. « Je te manquais tant que ça, bro ? » Il échange le sac du poisson mort contre une bière, entrechoque sa bouteille avec celle d’Atticus avant de boire une gorgée et de laisse tomber sa vieille guitare sur le fauteuil. Il plaque ensuite un baiser sur la joue d’Atticus, parce que c’est un truc qu’il n’oublie jamais de faire, fouille dans sa poche avant d’en sortir le shit et de le lui filer. « Tiens, cadeau. On vient jamais les mains vides chez quelqu’un, t’as vu comme j’suis poli ? » Il récupère Nemo III, le regarde un instant à travers le plastique. C’est moche, un poisson. Aussi moche que lui. « Faudrait que j’m’achète un de ces jouets qu’on mettait dans la baignoire quand on était gosses. Tu crois que papa verrait la différence ? » Il lui lance un clin d’œil en rouvrant la porte de la cabine, trop impatient de commencer leur expédition en mer. Il n'aime pas traîner, Nemo, c'est déjà ce qu'il fait à longueur de journée. « Allez, on démarre la bête, j’vais peut-être me noyer pour de vrai, cette fois. » |
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Ricolaaaaaaaaa ▹ posts envoyés : 1051 ▹ points : 7 ▹ pseudo : Kenny ▹ crédits : lonewolf (ava) ; astra (sign), pastel breathing (icons) ▹ avatar : Izzy Brierley ▹ signe particulier : perchée
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Ven 14 Juil - 15:27 | |
| « Tu sais bien que tu me manques toujours Nemo. » Il lève le sachet en plastique au niveau de son visage pour contempler le poisson rouge délavé et son embarcation funéraire drôlement colorée. Chez Nemo, les couleurs et les accessoires bariolés n'ont rien de festif, ils n'évoquent pas la vie, il n'y a qu'à voir sa façon toute personnelle d'accorder chemises hawaïenne et tête d'enterrement — ou de mort, zombie, vampire et compagnie. C'est quelque chose qu'Atticus admire chez son petit frère, la façon dont il s'approprie les choses sans rien se laisser dicter par les lieux communs et les convenances. Il a une vision, une vision unique et propre que personne, pas même lui, ne peut lui enlever. Nemo ferait un meilleur artiste que lui, mais l'art est une raison de vivre.
Ses joues s'étirent d'un sourire nostalgique quand Nemo y dépose un baiser. Il n'a jamais perdu cette habitude enfantine malgré le temps, les tensions, les difficultés qui les ont secoués et éloignés l'un de l'autre depuis des années. Ça le rassure à chaque fois, c'est comme si Nemo lui disait qu'il l'aime toujours et, du coup, qu'il va continuer à tenir bon pour lui. Ce n'est pas exactement ce qui a ramené Atticus à Savannah, mais c'est bien pour ça qu'il a décidé de rester. Il a déjà trop abandonné Nemo et il a compris, assez récemment finalement, qu'il ne peut plus se le permettre, qu'il est plus que n'importe quoi d'autre ce qui raccroche Nemo à la vie. C'est une lourde responsabilité qu'il ne sait pas vraiment comment assumer, parce qu'il ne sait pas ce qu'il doit faire pour l'aider, mais il ne fait pas confiance aux psys et autres fous professionnels pour leur confier la vie de son petit frère. Atticus sait qu'il ne le tient qu'à coups de piques culpabilisantes et de chantage affectif et que ce n'est pas une solution, sur le long terme, mais il ne peut pas aider Nemo à guérir puisque lui-même ne croit pas qu'il existe de guérison possible à sa pulsion de mort, seulement des moyens de retarder l'échéance, du marchandage. Peut-être qu'avant, il y avait leur mère qui agissait comme le pilier de la famille, pilier névrosé fait d'une matière friable, mais pilier quand même. Atticus n'arrive pas à identifier ce qui chez elle faisait qu'ils tenaient, lui, Nemo et leur père dépressif, mais il a l'impression qu'elle lui a interdit de poursuivre sa vie de vagabond égocentrique lorsqu'elle est partie.
Il lui en veut, parfois. Il en veut à Nemo aussi. Mais s'il y a un être sur Terre auquel il est capable de tout sacrifier, c'est lui. Nemo, il ne l'aime pas d'une passion aussi dévorante qu'éphémère, comme il aime le plus souvent, d'un amour fugace qui se consume aussi vite que la mèche d'un bâton de dynamite. Nemo, c'est sa vie, son sang, et il ne sait pas si ça compte vraiment, le sang, mais Nemo est indéniablement à part, au-dessus du reste du monde. Il se souvient des histoires qu'il lui racontait alors qu'il occupait encore le ventre de leur mère, il se souvient du jour de sa naissance, du duvet déjà roux qui recouvrait sa tête, ses tempes et même un peu son dos, petit singe carotte. Il se souvient qu'il considérait que Nemo était à lui, son petit frère, rien qu'à lui. Et s'il n'est pas doué en amour c'est peut-être parce qu'il donne tout à Nemo et qu'il n'en reste assez pour personne d'autre, mais même Nemo il ne sait pas l'aimer, parce qu'il l'aime aussi égoïstement que tout ce qu'il aime, même si plus durablement. Il se demande parfois ce qu'il deviendrait s'il n'avait plus de Nemo à aimer. Il n'arrive même pas à l'envisager. À peine il se pose la question que son esprit se brouille et qu'il sombre dans un sommeil tourmenté.
Alors il s'empêche de s'attarder sur la question et tâche de se concentrer sur le présent et la tête rousse qu'il a sous les yeux. Et la boulette que Nemo lui tend comme on offre une bonne bouteille de vin à ses hôtes. Il rit et l'échange contre le poisson mort. « Quel petit frère attentionné, je t'ai bien élevé. » Il plaisante, mais il considère réellement qu'il l'a élevé, un peu. Il n'a pas fait du bon travail sur tous les plans, c'est sûr. Il boit une gorgée de bière et dépose la boulette de shit dans une coupelle sur la table. « OK, on garde ça pour plus tard. Papa vient souvent chez toi ? » Ce serait bon signe, même si ça le surprend. À chaque fois qu'il se rend à la maison parentale, son père y est, assis dans son rocking chair avec un livre ouvert à la page 59 sur les genoux et un verre de whisky dans une main. Quand Atticus repart, il n'a généralement pas dépassé la page 59 mais le verre est vide ou rempli pour la troisième fois. Papa Hornigold a su jouer au pilier de secours tant que Maman était malade, mais il s'est effondré en même temps qu'elle. Finalement, jusque dans ses dernières heures, c'est encore elle qui le tenait debout.
Atticus suit Nemo sur le pont, allume deux lampes fixées sur le bastingage pour mieux y voir dans la lumière du soleil couchant, et entreprend aussitôt de hisser la grand voile. Après quelques minutes, les voiles ont pris le vent et le bateau glisse le long du large fleuve, en direction de la mer. La vue est belle mais il manque quelque chose. Il fait une moue et se retourne vers Nemo. « C'est dommage que le soleil se couche à l'Ouest. » Il le dit avec le ton d'un gamin qui voudrait que son grand frère lui prouve qu'il est assez fort pour changer le sens de rotation de la Terre. Le genre de chose que Nemo lui faisait souvent, il était une fois. Il reste concentré sur ses gestes jusqu'à ce que le fleuve débouche sur la mer puis, lorsqu'ils sont moins à l'étroit, il fait cap sur la pleine mer. « Bon, on devrait être assez tranquille, si les riches en yacht sont pas tous de sortie. T'as faim ou tu veux fumer d'abord ? Où t'as mis Nemo d'ailleurs ? » Oui, « d'ailleurs », pas qu'il ait envie de manger ou fumer Nemo le poisson, mais il vient de se dire qu'il aurait pu le mettre au frigo en attendant qu'il fasse suffisamment sombre pour la cérémonie.
Dernière édition par Atticus Hornigold le Dim 16 Juil - 18:37, édité 1 fois |
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s’il a de l’humour il finira mort noyé ▹ posts envoyés : 1595 ▹ points : 26 ▹ pseudo : Camille ▹ crédits : av Xerxes ♥ + aes Kenny ♥ ▹ avatar : Archy Marshall (King Krule) ▹ signe particulier : roux sorti des enfers, abonné aus suicides manqués
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Dim 16 Juil - 16:59 | |
| Papa vient souvent chez toi ? et Nemo laisse échapper un ricanement, comme si son frangin avait sorti la dernière blague à la mode. Non, son père – leur père – ne vient pas souvent le voir. Nemo n’accepterait jamais qu’il entre dans son misérable deux-pièces, d’abord parce que c’est à lui, ensuite parce qu’il ferait une crise cardiaque s’il voyait dans quoi il vit, entre le frigo vide si on fait abstraction des champignons (et on parle pas de chanterelles), le papier-peint déchiré ou bouffé par l’humidité sur lequel Nemo a étalé son art et son coin maquillage fx qui engloutit au moins un quart de l’appart. Il a déjà perdu sa mère, il a pas spécialement envie de perdre son père, même si ça fait bien longtemps qu’il n’est plus à la hauteur du rôle. « Rêve pas, Papa se rappelle que j’existe que pour les trucs chiants comme me traîner à la thérapie de force quand tu peux pas. J’suppose que c’est bien qu’il bouge de la maison. » Il hausse les épaules, parce qu’il n’y a rien qu’il puisse y faire. Il sait qu’Atticus l’a vu dans son état normal, lui aussi, le regard dans le vague et le verre d’alcool dans une main. Nemo n’a jamais beaucoup aimé la dépression chez son père. Ça aurait été étrange qu’il l’aime, évidemment, mais c’est plus qu’il la trouve ennuyeuse à se tirer une balle qu’une réelle histoire de compassion d’un fils envers son père. Nemo trouve que sa dépression chronique le rend très amusant, là où son père est juste triste et pathétique. Tout est relatif. « C’est la troisième fois qu’il me fait le coup du poisson rouge, je sais pas si c’est moi ou si c’est lui qu’il cherche à aider, mais il veut que je lui fasse des vidéos pour prouver que ça bouge encore dans l’aquarium. J’veux pas qu’il m’en rachète un autre. » C’est vide de sens, vide d’émotions, il a l’impression que c’est seulement un réflexe qu’a pris leur père depuis la mort de Mam, pour essayer de pas oublier qu’il a deux fils pas des plus accrochés à la vie non plus. Nemo a toujours été plus proche de sa mère que de son père. C’est sans doute un comble, parce qu’il n’avait rien en commun avec Mam. Peut-être qu’il aurait dû se reconnaître dans les dépressions de son père, peut-être que cette formidable tare familiale aurait dû les rapprocher. Mais Nemo n’a jamais trouvé ça agréable, de se regarder dans un miroir, il a toujours préféré la folie de Mam, et la folie d’Atticus par-dessus tout.
Il aide Atticus à hisser la grand-voile, mimant les gestes répétés beaucoup de fois dans son enfance et l’adolescence, du temps où les sorties en mer étaient synonymes de week-end en famille. Il sourit doucement, en regardant son frère faire le plus gros du travail. Il se demande quand il mettra à nouveau les voiles, quand il disparaîtra, quand il ne lui restera de lui que des cartes postales grotesques et des mots écrits à la va-vite dans une station d’essence. Y’a toujours le flingue planqué dans le troisième tiroir de la commode maltraitée qui contient sa maigre garde-robe qui lui revient en tête. Il se demande qui sera le premier à arriver sur les lieux le jour où il le fera. Sa voisine, probablement. L’ambulance, la police, le médecin légiste. Atticus aura droit à la morgue, au drap blanc qu’on soulève théâtralement pour identifier le corps, pour être sûr que ce soit bien lui, le mort, cette fois. Il se demande si Atticus y croira. Il se demande ce que ça lui fera. Il secoue la tête, siphonne la fin de sa bière et jette un œil à l’horizon qui se fait de plus en plus sombre. « Les couchers de soleil, c’est pour les faibles. J’aime assez bien l’idée d’avancer vers l’obscurité et le néant. » Les pensées noires lancées sur un ton sarcastique, l’ironie, toujours, pour cacher qu’il y pense vraiment. Il ramasse Nemo III qu’il a laissé moisir sur le pont, brandit le sachet à bout de bras et l’agite comme un trophée. « Pas de résurrection en vue, t’inquiète. J’ai pas faim. » Et c’est vrai, même s’il n’a rien avalé de la journée. Une vieille tranche de fromage suffit à son organisme, faut croire. « J’vais nous préparer le pétard de la mort. » Il redescend dans la cabine, dépose Nemo III et sa bouteille de bière au passage, roule le joint avec l’agilité de quelqu’un qui le fait trop souvent avant de remonter, le briquet déjà dehors pour l’allumer et une nouvelle bière à la main. Il prend une première bouffée, relâche la fumée au vent en rangeant son briquet, puis le tend à Atticus avec un sourire faussement désolé. « C’tait pas très poli d’avoir commencé, mais j’vérifiais la qualité du produit, t’vois. » Clin d’œil complice, avant de se remettre à mater l’océan d’un air absent. « J’aurais p’têtre dû fumer avec Nemo III, sa mort m’aurait p’têtre fait quelque chose. » |
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Ricolaaaaaaaaa ▹ posts envoyés : 1051 ▹ points : 7 ▹ pseudo : Kenny ▹ crédits : lonewolf (ava) ; astra (sign), pastel breathing (icons) ▹ avatar : Izzy Brierley ▹ signe particulier : perchée
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Dim 23 Juil - 16:20 | |
| Il lâche un soupir mais la réponse de Nemo n'a rien pour l'étonner. La dépression rend souvent égoïste et c'est déjà étonnant de la part de leur père qu'il s'occupe un tant soit peu de Nemo, à sa façon inepte et inutile. « Ouais, il doit se rassurer comme ça. » À croire que Nemo est le poisson rouge de Papa. Sans doute que lui aussi se sent responsable de la mission « sauvez Nemo » depuis la mort de Mam. Il a déjà sous-entendu à Atticus qu'il ne lui faisait pas confiance pour ça, qu'il s'attend à le voir disparaître sans un mot d'un jour à l'autre. Il ne veut pas croire qu'il est revenu pour rester, et Atticus ne peut pas lui en vouloir. Lui non plus, il n'y croit pas. Il n'est pas naïf. Il sait que ce qui doit arriver finira fatalement par arriver, et à ce moment-là Atticus partira lui aussi, d'une façon ou d'une autre, à moins qu'il ne soit déjà mort. Il espère juste que ce sera dans cinquante ans. « Je vais lui dire que ça sert à rien, mais il m'écoute pas. Mais sois pas crétin s'il t'en offre un autre. Prépare un maximum de vidéos à l'avance tant qu'il est encore vivant et envoie ça à papa au compte-goutte. » Après une pause, il ajoute dans un demi-sourire. « Et au pire s'il crève t'as qu'à me l'amener au taf et je te l'embaume. » Non, il n'est pas sérieux. C'est difficile d'être sérieux. Il a raison, Nemo, ça n'a aucun sens cette histoire. Il ne voit pas comment une hécatombe de poissons rouges va améliorer les rapports de son frère avec la vie et la mort. « Il aurait pas pu te prendre un cactus plutôt ? » il fait avec un nouveau soupir. Mais on ne va pas laisser les insuffisances paternelles gâcher la soirée.
Alors qu'il déplore le fait qu'ils s'éloignent du joli coucher de soleil dont profitent mieux les Californiens, Nemo lui prouve encore cette vision d'artiste génial. Avancer vers l'obscurité et le néant. Il ne devrait pas tant aimer les idées noires de son petit frère mais il n'y peut rien, elles l'ont toujours charmé. « T'es un génie Nemo. » Ça lui échappe, même si en bon grand frère il devrait sûrement le gronder ou prétendre l'ignorer ou croire qu'il ne fait que plaisanter, il n'en sait trop rien, il n'a jamais été un bon grand frère. Il sait que Nemo ne plaisante pas, pas plus qu'il ne plaisantait tout à l'heure quand il a dit qu'il espérait se noyer. Il sait que Nemo souhaite plus que tout qu'un accident vienne l'arracher à la vie sans qu'il ait à se suicider, pour que personne ne puisse lui en vouloir, parce que ça n'aurait pas été son choix. Peut-être surtout pour qu'Atticus ne puisse pas lui en vouloir. Sûrement. Mais c'est un peu trop tard pour ça, même si c'est injuste et irrationnel. Ça lui fait mal de n'être qu'un fil de chair qui retient Nemo à la vie contre son gré et ça lui fait mal de sentir que Nemo aussi éprouve de la rancœur à son égard, à cause de ça. Il voudrait que vivre ne soit pas une telle plaie pour lui. Il voudrait suffire. Mais Nemo n'y est pour rien et il le sait. Il est né avec un organe atrophié qui l'empêche de supporter l'idée de vivre encore un an, un jour, une heure, là où Atticus veut bien vivre un siècle même s'il y des jours où il contemple la mort au bout du chemin avec impatience et fascination. Le sien aussi est défaillant, d'organe, il a bien failli le lâcher quelques fois, mais celui de Nemo n'a jamais fait que décliner. Et il le croit quand il lui dit qu'il n'a pas faim, même s'il est sûr qu'il ne mange pas assez, comme si son corps s'imaginait parfois qu'il était déjà mort et qu'il n'avait plus besoin de se nourrir. Il le regarde redescendre pour rouler le pétard de la mort - les superlatifs selon Nemo - en se disant que ça, au moins, ça lui creusera peut-être l'appétit.
En attendant, il fait le tour du pont pour allumer ses feux de navigation, puis il retourne à ses voiles et ses cordages. Ils font cap vers l'Est et le néant tandis que le soleil meurt dans leur dos. Dans quelques minutes, ils seront véritablement au large. Quand Nemo revient, il vient de vider sa bière et accueille le joint avec un sourire. « Ouais, mon dealer aussi fait du zèle comme ça. » Parce qu'il l'invite à se défoncer avec lui, soit. Il le rend à Nemo après seulement deux lattes. « OK, de la mort, tu t'es pas foutu de moi, » il fait d'une voix un peu étouffée par l'épaisse fumée. « J'honore pas plus ton cadeau pour l'instant, tu sais que ça me casse. Bigre, j'suis vieux. » Et malade surtout. Il fume plus souvent pour s'endormir qu'autre chose, et il se souvient qu'un médecin lui avait plutôt déconseillé de le faire, mais les médecins n'ont jamais trouvé un remède efficace non plus alors il ne les écoute pas trop. Il devrait peut-être vu comme les choses ont empiré ces derniers temps. Il sent déjà la tête qui lui tourne et, pendant un instant, il se dit qu'il n'aurait pas du y toucher du tout. Mais l'instant passe et Nemo lui arrache un rire. « Si y a un Nemo IV tu voudras le faire fumer ? Mais franchement, le but c'était que tu t'attaches à lui ? Pour qu'il te crève entre les doigts... » Il a du mal à comprendre le principe des animaux de compagnie en général, mais alors les poissons, tout ce qui n'est pas mammifères, en fait, ça le dépasse. Quant à l'aspect thérapeutique de la chose, il ne voit pas en quoi il peut s'appliquer à Nemo. Ce n'est pas un poisson prisonnier d'un bocal qui va lui apprendre à célébrer la vie. Il fixe le bout incandescent du cône quand Nemo tire encore dessus, ça laisse une petite tâche dans sa vision quand il reporte son regard sur la mer noire. Il voit une bouée assez proche mais il a envie de s'enfoncer plus loin dans la nuit. « On va jusqu'en Enfer NemNem ou tu veux t'arrêter là ? » Il pianote des doigts sur le bastingage. « J'ai envie de jouer. »
Dernière édition par Atticus Hornigold le Lun 31 Juil - 14:22, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Lun 24 Juil - 17:22 | |
| Il aurait préféré que le paternel l’oublie un peu, que sa propre dépression l’occupe suffisamment pour qu’il zappe son existence. Il a dû être trop bien drillé par Mam de son vivant, pour qu’il retienne toutes les dates des rendez-vous de Nemo avec son psy et pour qu’il se pointe au Walmart ou en bas de son immeuble à chaque fois. Il se demande s’il se fait soigner, lui, ou s’il se laisse couler tranquillement puisque personne n’est là pour le fliquer. Nemo aurait aimé qu’il faille totalement à son devoir parental, pour pouvoir se débarrasser des conversations hors de prix et à sens unique (indice : c’est pas lui qui cause) avec son psy pour de bon et surtout de la thérapie de groupe, mais pour ça il faudrait qu’Atticus se barre aussi. Enfin. Au moins, Atticus suit pas les conseils du psy à la lettre. Il note la bonne idée de son frangin dans un coin de sa tête pour plus tard, s’il y a véritablement un Nemo IV. « C’est toi mon cactus », qu’il fait avec un sourire narquois. C’est toi, le joli truc un peu vivant que j’aime et dont j’dois pas trop m’occuper. Même si, fut un temps, il s’en occupait beaucoup d’Atticus. Petit frère infirmier, un peu trop zélé parfois. Puis Atticus est parti et ça n’a plus jamais été le cas.
Tu es un génie, Nemo. Et y’a son ricanement qui répond. Un génie, oui, un génie de la dépression, le meilleur des losers, la palme de l’existence la plus pourrie, le génie des tentatives de suicide ratées, aussi. Ouais, Nemo est un génie, il le pense lui-même, parce qu’il est très fier de lui, de tous ses plans foireux pour faire fuir les gens. Il a toutes les armes pour arriver à ses fins, mais peut-être que c’est pas si génial que ça, peut-être que c’est trop facile de se faire détester, parmi tous ces cons ingrats, égocentriques et effrayés par la différence. Il est ingrat et égocentrique lui-même, alors bon, il sait ce que c’est. Puis y’a aussi tous les débiles qui croient qu’il est pas comme ça, qu’on peut pas être aussi salaud sans raison, que c’est un genre qu’il se donne, son côté dark et rien à foutre de la vie. Nemo, il dit tant mieux, c’est une façon comme les autres de pas se faire apprécier. Personne n’aime les gens faux. Il ramène le joint à Atticus, et il se dit qu’il fume sans doute trop, pour pas sentir que c’est du bon. Ou alors c’est sa tendance naturelle à être blasé de tout qui prend le dessus, tout ça fait partie de la vie, et lui il n’aime que la mort. « Bigre, ouais », il imite, sourire en coin en reprenant son pétard. « T’as carrément nonante ans, bro. » C’est un truc qu’il kiffe chez Atticus, sa manière précieuse de parler, son manque de goût pour les jurons populaires qui nichent si facilement dans la bouche de Nemo. Encore une fois, chez Atticus, ok, chez les autres, qu’ils aillent se faire foutre.
Y’a son rire qui résonne, parce qu’il a l’image mentale, tout à coup, du poisson rouge avec son pétard dans la gueule, des bulles à la place de la fumée. Ouais, peut-être que son shit est pas si mal que ça, finalement. « Faudra que j’essaye. Un poisson camé, ça suscitera peut-être plus mon intérêt. Mais ouais, c’est un machin de psy. J’suis censé au moins m’en occuper. Mais j’crois que y’a une raison pour laquelle il a proposé un poisson rouge et pas un chiot. » Il en aurait presque de l’empathie pour ces pauvres poissons, jugés moins importants que des animaux à poils ou à plumes, au point de les foutre entre les mains d’un mec qui oubliera toute façon de les nourrir. Tous des connards. « J’suis déjà en Enfer, donc j’espère qu’au moins on s’marre bien où tu m’emmènes. » Il dirait pas non à l’Enfer, Nemo, si c’est vraiment comme dans la Bible et dans le bouquin de Dante. Problème, il y croit pas. Ou plutôt, il considère que l’Enfer, c’est sur Terre, que le Paradis, c’est après, quand y’a plus rien, qu’on pense plus, qu’on se fait seulement bouffer par des asticots. Son rêve. Et puis, y’a les derniers mots d’Atticus, et y’a le visage d’Alice qui se fout là en surimpression. Pourquoi il pense à elle, pourquoi elle vient gâcher sa putain de soirée. « Tant que tu proposes pas de jouer à action ou vérité. Ce jeu est prohibé ad vitam eternam. Enfin, jusqu’à ma mort. » |
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Ricolaaaaaaaaa ▹ posts envoyés : 1051 ▹ points : 7 ▹ pseudo : Kenny ▹ crédits : lonewolf (ava) ; astra (sign), pastel breathing (icons) ▹ avatar : Izzy Brierley ▹ signe particulier : perchée
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Lun 31 Juil - 19:34 | |
| S'il est le cactus de Nemo, Nemo est son poisson rouge, pauvre gosse coincé dans un globe beaucoup trop petit pour lui, qui aurait pu être gigantesque et vivre des décennies de plus si on lui avait laissé sa liberté, et Atticus celui qui s'obstine à l'y contenir. Mais la liberté pour Nemo, est-ce que ça a déjà été autre chose que la mort ? Est-ce que c'est la génétique qui a pourri son désir de vivre dès le début, est-ce qu'il était condamné aux envies de suicide avant même d'avoir pris sa première bouffée d'air ? Dans ce cas peu de choix s'offrent à ceux qui l'aiment. Soit on décore son terrible bocal de broutilles en plastique coloré pour tenter d'y apporter un peu de gaieté, même en sachant que ce sera toujours dérisoire, jamais assez, que ça aura même souvent l'effet inverse, et on se donne bonne conscience au passage, soit on lui donne ce qu'il veut le plus et on met fin à ses peines. Bien sûr que même ça, ça a déjà traversé l'esprit d'Atticus. Bien sûr qu'il s'est déjà demandé si ce ne serait pas l'acte d'amour le plus pur qui soit, pas dénaturé par la morale, par des valeurs sociales. Après tout, l'euthanasie gagne du terrain dans les sociétés occidentales et on condamne l'acharnement thérapeutique, parce qu'on se rend compte qu'il ne sert à rien de maintenir en vie si la vie n'a plus de saveur, si la vie n'est que souffrance et humiliation. Parce qu'on achève bien les chevaux. Toute la question est de savoir quand l'envie de mourir peut être considérée comme une maladie en phase terminale, quand l'espoir de voir quelqu'un se rétablir devient du simple acharnement. Il y a beaucoup réfléchi, Atticus. Il y réfléchit encore. Il en arrive toujours à la conclusion qu'il est trop égoïste pour y voir clair. Il veut Nemo dans sa vie. Il voudrait que Nemo aille bien, il voudrait être plus qu'un joli cactus dans son bocal, il voudrait trouver le remède miracle, il voudrait pouvoir le tuer mais être encore avec lui après. Dommage que lui non plus ne croie ni à l'Enfer, ni au Paradis.
Ce jeu est prohibé ad vitam eternam. Enfin, jusqu’à ma mort. « Jusqu'à la mienne alors. » Il le regarde droit dans les yeux avec une intensité qu'il n'y avait pas là quelques secondes plus tôt, quand le joint venait de l'assommer. C'est mesquin de sa part, il le sait, ce n'est pas la chose à dire, mais il n'y a rien d'autre à dire parce qu'il y pense souvent, parce que peut-être bien que c'est vrai qu'il l'y suivra, dans la mort. S'il le lui dit ce n'est pas par calcul, il ne ferait pas l'affront à Nemo de lui faire du chantage au suicide, et avec un tel manque de subtilité en plus. Ce n'est pas du chantage, même si ça aura sans doute le même effet. C'est presque une promesse. C'est juste qu'il ne voit pas sa vie sans lui, sauf les jours où il pense que tout aurait été plus simple, mais ces jours-là c'est lui qui touche le fond. Il jette un nouveau regard vers la mer d'encre le temps de virer le trop sérieux de son esprit et de son visage, et puis il force un sourire. « Non, j'voulais dire que j'ai envie de jouer de la musique. J'ai même travaillé mon accent irlandais, j'suis très mauvais. On a qu'à se poser là puisqu'on est déjà en Enfer. » Il amorce les manœuvres pour mouiller le voilier, profitant des dernières lueurs orangées du soleil qui tape dans leur dos. « Mais t'as joué à action ou vérité récemment ou ça te prend comme ça ? » il finit par ajouter, les mains occupées sur le palan d'écoute pour orienter la grand-voile. Il ne pensait pas que Nemo s'était beaucoup adonné à ce genre de jeux et encore moins ces derniers temps — quoique, ce n'est pas comme s'il avait eu plus d'amis pour y jouer lorsqu'il était adolescent. |
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Lun 28 Aoû - 17:40 | |
| Jusqu’à la mienne, alors. Et les yeux bleus de Nemo qui se perdent dans ceux d’Atticus, le soupir désabusé qui s’échappe de sa bouche, en même temps qu’un coin de sourire s’imprime furtivement à la commissure de ses lèvres. Il devrait s’offusquer, sans doute, si pas du chantage affectif, au moins de l’idée. Si tu meurs, je meurs aussi, comme s’ils faisaient partie d’une belle tragédie. Atticus et ses versions romanesques de la vie, le tragique comme piment de l’existence. Mais Nemo n’en sait rien, s’il le fera ou pas, peut-être que sa mort l’inspirera, peut-être que la souffrance lui plaira, à Atticus, peut-être qu’il trouvera enfin ce qu’il veut dans ce monde trop dépassionné à ses yeux. Atticus, c’est la vie, c’est la mort, il y a les deux en lui, et il aime les deux, surtout, là où Nemo en préfère une à l’autre. Atticus, il cherche quelque chose qui n’existe pas, quelque chose que ni la vie, ni la mort peut lui donner, parce qu’il cherche une chose irréelle, une chose surréaliste, qui accepte pas de définition. Alors Nemo ne proteste pas, ne cherche pas à lui faire changer d’avis ou lui faire dire le contraire. Il ne lui dit pas tu peux pas crever, il ne lui dit pas sois pas con, il ne lui dit rien de tout ça, rien de ce qu’il devrait dire, de ce qu’il faudrait dire, mais juste : « Tu sais que j’t’aime », comme une promesse, comme une réponse-miracle. Tu sais que j’t’aime, ça a toujours été comme ça, les frères Hornigold versus le monde, versus la terrible et emmerdante réalité. Il sait qu’Atticus comprend ce que ça veut dire, il sait que c’est presque aussi salaud, dans un sens, que jusqu’à la mienne, alors. Que dans son j’t’aime, y’a un pas tant qu’tu seras dans l’coin, qui implique un dès que tu t’casseras par contre. Et peut-être même que cette fois, Atticus devra revenir pour l’enterrement.
Il sourit, quand son frère se remet à sourire, et parle de la musique comme si la mort n’était plus là, toujours à s’inviter de guingois dans leurs conversations, à planer comme un vautour sur leurs têtes sans que ça les mine, sans que ça les angoisse. Peut-être bien qu’ils sont bousillés, qu’ils sont ratés, qu’ils sont inhumains, tous les deux, avec leurs idées et leurs lubies. Peut-être bien. Mais qu’est-ce que Nemo s’en fout. Pendant que le frangin s’applique à jeter l’ancre, Nemo redescend dans la cabine, passe sa guitare sur son dos, empoigne le violon et l’archet d’Atticus avant de remonter et de lui remettre solennellement le tout, moment presque tragique si ce n’est qu’Atticus a tiqué, sur action ou vérité, et que maintenant, il pose la question. Nemo ne répond pas, d’abord, il grommelle juste un truc incompréhensible, que lui-même ne capte pas. Il ne veut pas penser à l’autre blondasse, il ne veut pas vraiment en parler. Il ne partage pas tout avec Atticus, contrairement à ce que les autres s’imaginent de malsain entre eux. Ils ne partagent pas tout, et en même temps, c’est comme si Atticus savait, connaissait chaque recoin obscur de son cerveau, tous ses petits secrets et toutes ses douleurs. Il sait sans doute plus que tous les autres réunis, Atticus, mais il y a des choses qui ne se disent pas tout haut, le flingue dans le tiroir et le flirt avec des psychopathes et les coups d’Alice qu’il accueille avec trop d’enthousiasme, son corps qui s’en souvient encore. « Juste joué avec une meuf. C’était chiant. » Il se contente de ça, pour pas qu’Atticus pense qu’il fait son mystérieux ou qu’il a un truc à cacher. Il sait même pas lui-même pourquoi ça l’emmerde tant que ça. Il attrape le radeau en crayons arc-en-ciel et le poisson, ligote celui-ci à celui-là, sort le briquet de sa poche puis se rend compte que ça va pas être facile à brûler comme ça. « T’as d’l’alcool pour cramer le cadavre ? », qu’il fait, comme s’ils étaient deux mafieux se débarrassant du cadavre d’un rival, en retournant à l’avant du navire auprès d’Atticus, sa création à la main. Il la dépose sur le pont, met sa guitare devant et commence à gratter les cordes pour les accorder plus ou moins, même si aucun des deux ne s’en formalisera si ça sonne faux. |
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Mer 30 Aoû - 9:22 | |
| Il sait que Nemo l'aime. Ce n'est pas assez pour lui faire aimer la vie, mais c'est assez pour qu'il vive. En général. Ils ne sont jamais à l'abri d'un épisode plus violent que d'ordinaire dans sa dépression, de ceux qui forment plus que le voile qui obscurcit déjà son regard sur la vie, de ceux qui le rendent carrément opaque, de ceux qui oppriment ses poumons, de ceux qui le noient, et dont il ne peut se libérer qu'en lacérant. Atticus est là pour le sortir du prochain bain de sang avant qu'il soit trop tard, pas seulement pour l'égoïste piqûre de rappel quotidienne : je suis là, j'existe, vis pour moi si tu ne le fais pas pour toi.
Il sait que Nemo l'aime mais ce n'est pas assez pour Atticus non plus, de le savoir. Il adore l'entendre. Il adore l'entendre parce qu'il sait ce que ça veut dire, que ça veut dire que Nemo reste fort, qu'il ne basculera pas tout de suite, à moins d'un incident, et c'est toujours ça de gagné même si ce n'est jamais plus qu'un répit. Il adore l'entendre parce qu'il adore Nemo, parce qu'il a beau très bien le connaître il ne sait pas ce qui lui passe par la tête, il ne sait pas si, parfois, Nemo ne l'oublie pas, ne le déteste pas un peu plus qu'il l'aime, et ça le rassure de l'entendre lui dire, tout simplement. Les mots lui suffisent parce que Nemo ne les jette pas à la légère, pas à lui, même s'il le connaît assez bien pour le manipuler. Il ne jouerait pas à ça, hein ? Et Atticus plus ça va et plus il l'aime, son petit frère, peut-être parce que plus le temps passe et plus ils se rapprochent de la séparation. Peut-être parce qu'il veut tout lui donner avant la fin. Peut-être parce qu'il espère encore le retenir. Il se demande s'il y a une limite à ce qu'il ferait pour Nemo, maintenant.
Il fait mine de ne pas remarquer l'effort que met Nemo dans la légèreté de sa réponse. « J'la connais ? » Il fait comme n'importe quel grand frère intéressé par les amours potentiels de son cadet. « Euh, pardon. On dit elle est bonne ? C'est ça ? » Il se demande s'il est aussi peu doué que Nemo pour dissimuler la profondeur de ses mots. Il ne veut pas l'acculer mais il a l'impression qu'il y a anguille sous roche, et il fait trop souvent la sourde oreille pour ne pas contrarier celui pour lequel il est censé être un roc.
« Ouais. » Il fouille dans un petit coffre sur le pont pour en sortir une bouteille poisseuse qui sert à alimenter les lampes-tempête à pétrole, le vieil éclairage du pont. Leur père les a remplacées, mais Atticus en a réinstallé une ici et une dans la cabine, pour des raisons plus décoratives que pratiques — il ne prend quasiment jamais la peine de les allumer. Il attrape aussi une sorte de pince à barbecue pour éviter de s'immoler par le feu au passage. Laissant Nemo à son accordage, il saisit le petit radeau auquel est ficelé le poisson et verse un peu d'alcool dessus. « Bon, j'espère que ça va pas s'éteindre trop vite, ce serait anticlimactic. » Il est frappé d'une idée et descend quelques secondes pour remonter avec une petite poignée de vis. Il en glisse entre les cordes sous le radeau pour le lester et soupèse son œuvre pour l'ajuster. Normalement, ça devrait tomber du bon côté mais pas couler. « Parfait. Allez, lâche la gratte un coup, t'as préparé un discours ? » Il lui lance un regard interrogateur et lui tend le briquet et la pince. « À toi l'honneur. »
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Dim 3 Sep - 18:26 | |
| « Ouais. » Il est pas plus éloquent que ça au sujet d’Alice, il a pas envie d’en parler, Nemo, même s’il voit bien qu’Atticus en demande plus, l’air de rien. Alors il dit ouais, comme on dit ouais, elle est bonne d’une fille qui passe et disparaît au coin de la rue. Même si son ouais peut signifier aussi ouais, tu la connais, mais il laisse l’ambiguïté planer exprès, parce qu’il veut pas mentir à Atticus, mais il ne veut pas lui dire la vérité non plus. Tu sais, la fille de la thérapie qui ressemble à un zombie version sexy ? Il sait même pas pourquoi il pense encore à elle, il planait trop, ce jour-là, ce jour où il s’est retrouvé en tête à tête avec elle dans un hôpital désaffecté. Il se souvient trop bien de la douleur sur ses joues, les gifles violentes, le coup de pied qu’il avait préféré, comme si la marijuana l’avait rendu extralucide, tout à coup, mais le reste est flou, le reste, son cerveau n’a gardé que des bribes, des flashes, les dialogues n’ont plus aucun sens et il se demande bien comment il avait réussi à lui faire péter un câble, ce jour-là. Ouais, comme ouais, parlons d’autre chose, plutôt et il accorde sa guitare en faisant comme si c’était jamais venu sur le tapis.
Les cordes sonnent toujours pas très bien, au final, guitare qui vaut rien dégotée dans un vide-grenier, quand Atticus revient après avoir sorti de l’alcool à brûler d’un coffre sur le pont. « Anticlimactic », il répète machinalement, pour savourer le mot. Il faisait tout le temps ça, répéter les mots trop compliqués qu’Atticus lui apprenait, quand il était gosse. Il voulait parler comme lui, il voulait avoir sa culture, savoir réciter des poèmes par cœur et sortir des citations au bon moment. Mais il a jamais réussi à aller plus loin que répéter les jolis mots. Il le fait encore, maintenant, pas parce qu’il n’en comprend pas le sens, mais parce qu’il aime toujours le choix de mots d’Atticus, toujours ce don de savoir trop bien quoi dire, chaque mot soigneusement sélectionné pour que ce soit plus beau, plus tragique. Sauf qu’Atticus n’a pas besoin de sélectionner, c’est inné, chez lui, et peut-être bien que Nemo a toujours été jaloux de son frère, au fond, peu importe ce qu’il faisait, Atticus a toujours été plus intéressant que lui.
Il n’a même pas remarqué qu’Atticus était redescendu dans la cabine lorsqu’il réapparaît à ses côtés. Il remet sa guitare dans son dos, attrape le briquet et la pince à barbecue qu’il considère avec un regard sceptique, finit par comprendre que c’est pour ne pas se brûler et la laisse tomber sur le sol après avoir récupéré le radeau entre ses doigts. Tout ce qui lui permet d’avoir mal est bon à prendre, puis on ne sait jamais qu’il provoque un accident plus grand, du genre qui entraînerait sa mort inopinée. Les fringues en polyester, c’est hautement inflammable, non ? Il réfléchit un instant à si sa chemise est en coton ou en polyester, mais il ne sait plus et il soupire doucement. « Nemo », il commence, comme s’il était en train de dire son propre éloge funèbre, « je ne t’ai jamais aimé, t’étais plutôt naze comme poisson, puis t’es mort avant moi alors j’te déteste, espérons que je te rejoigne bientôt dans la mort, voilà. » Clic, flammèche au bout du briquet. Woush, les crayons qui s’enflamment, les phalanges qui rougissent parce qu’il le tient trop longtemps, fasciné par le brasier. Plotch. Le radeau qui tombe dans l’eau quand il se rappelle qu’Atticus est à côté de lui. Il flotte, d’abord, presque miraculeusement, les vagues qui le portent avec délicatesse, semble-t-il, douces mères qui ramènent Nemo à la mer, merci Disney-Pixar. « J’ai même plus envie d’chanter. » Le regard vide alors qu’il suit le radeau qui brûle encore, au bord du précipice, encore, comme s’il voulait dire j’ai envie de sauter à l’eau, moi aussi, et peut-être qu’il est sur le point de, penché en avant contre la rambarde, il entend presque les sirènes l’appeler. |
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Ricolaaaaaaaaa ▹ posts envoyés : 1051 ▹ points : 7 ▹ pseudo : Kenny ▹ crédits : lonewolf (ava) ; astra (sign), pastel breathing (icons) ▹ avatar : Izzy Brierley ▹ signe particulier : perchée
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Dim 3 Sep - 23:51 | |
| Il écoute le discours déprimant de Nemo avec une grimace. C'est vrai qu'une fois en bas, sur l'eau, le radeau minuscule perd de sa superbe. Il brûle encore, ne coule pas tout de suite, c'est déjà une belle prouesse mais elle a un goût de cendres. Il n'aurait pas dû proposer à Nemo de dire quoi que ce soit. Il aurait dû enchaîner directement avec le violon, qu'il tient lâchement à la main quand Nemo déclare qu'il n'a même plus envie de chanter. Atticus avait espéré que son petit frère fasse de l'humour noir comme il en a le secret, mais là c'est juste noir, sans humour, il le voit bien. Si l'humour noir façon Nemo fonctionne mieux que chez quiconque, c'est justement parce qu'il y a toujours une part de sincérité dans ce qu'il dit, mais il y a un pallier à ne pas dépasser pour que ça reste drôle. Et en l'entendant maintenant, qui le passe et le piétine son pallier du comique, Atticus réalise qu'il a mal évalué l'état de Nemo ce soir. Ou peut-être que l'accablement vient de lui tomber dessus d'un seul coup. Pour Atticus, parler de la mort et la côtoyer régulièrement, c'est cathartique, mais en jouant à ce jeu avec Nemo, il se demande parfois s'il ne fait pas qu'entretenir son désir de faire le grand saut. Ça a pourtant l'air d'avoir un effet positif, parfois. Pas ce soir évidemment. Nemo est fatigant. Il faut toujours être sur le qui-vive, il faut peser ses mots et ses actions, il faut anticiper l'imprévisible et le contenir avant qu'il n'éclate, parce qu'un jour il n'y aura plus moyen de recoller les morceaux. Nemo est fatigant, le maintenir en vie est fatigant, et c'est trop pour un frère toujours fatigué. C'est trop mais il n'y a que lui.
Il n'y a que lui maintenant pour le voir fixer les flots du regard. Il n'y a que lui pour remarquer l'écho entre les yeux noirs à cause des pupilles dilatées et l'eau couleur d'encre dans l'absence de lumière. La seule lueur qui se reflète sur les iris de Nemo, elle est artificielle, c'est celle du pont. En se faisant cette réflexion Atticus regarde en bas et le radeau a disparu, invisible maintenant qu'il ne flambe plus et peut-être déjà englouti. Il retient un bâillement et entoure Nemo d'un bras pour lui rappeler sa présence. « On n'est pas obligés de chanter. » T'es juste obligé de vivre. Il le détourne de l'extérieur, le ramène vers le milieu du pont et l'enlace pour enfouir sa tête dans le creux de son épaule, laissant tomber son violon à leurs pieds sans y penser. C'est confortable les câlins avec Nemo, l'avantage de faire la même taille. « Nemo, ce serait un comble que tu finisses à l'eau, tu trouves pas ? » Ce n'est même pas une tentative d'humour, il a trop sommeil pour essayer de le dérider, trop sommeil pour entreprendre une tâche impossible. C'est juste une remarque qui lui passe par la tête et qui devrait lui parler, s'il le connaît un minimum. « Tu sais que je ferai n'importe quoi, tout ce que tu veux. Si j'arrive à pas m'endormir sur toi. » Il y a des larmes dans ses yeux explosés par le joint et la fatigue mais pas encore de sanglots dans sa voix. Il retient Nemo avec les pires moyens du monde mais rarement avec quelque chose d'aussi banal que des pleurs. Il préfère les déclarations d'amour mélodramatiques. Ça l’écœure d'avoir si peu de répondant, d'être incapable de faire quoique ce soit pour la personne qu'il aime le plus sur terre. Sur mer. « Tout ce que tu veux Nemo. » À une seule condition bien sûr, mais il la connaît déjà. Reste.
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Mar 5 Sep - 14:16 | |
| Nemo ne quitte pas le radeau des yeux, tant qu’il brûle, feu follet sur la mer, comme une âme flottant à la surface de l’eau. Il ne sursaute pas, quand une petite vague sournoise surgit pour l’engloutir, avale le feu et Nemo III d’une goulée. Il ne sursaute pas, ne grimace pas, ne réagit d’aucune manière, le néant dans le regard, le cerveau et le cœur. Juste une pensée, j’aimerais bien me noyer. C’est doux et brutal, la noyade, c’est la douleur quand l’eau envahit les poumons, quand l’air manque, c’est le silence et la pénombre de l’océan qui enveloppe le corps comme un linceul, suaves assassins. Une belle mort. Tant de belles morts, pour Nemo, mais s’il devait se noyer dans une flaque d’eau, il s’en contenterait bien. Il se demande s’il aurait encore un quelconque instinct de survie, la tête sous l’eau, plongé dans l’obscurité, s’il se débattrait, s’il lutterait pour vivre. Sans doute pas. Il aime trop la sensation de la vie qui s’en va pour ça, cette vie qui lui revient toujours, comme pour lui dire tu pensais vraiment pouvoir te débarrasser de moi comme ça ? Sourire amer, sourire absent, il a envie de sauter, de suivre son poisson, de mourir avec lui, pour retourner à la mer, lui qui a été nommé d’après le capitaine du Nautilus. Ce serait une mort opportune, ça ferait une bonne chronique funéraire, Nemo tombe à l’eau, y’a plus personne sur le bateau. Mais si, y’a encore quelqu’un sur le bateau, y’a Atticus, y’a son bras qui l’entoure et Nemo relève les yeux vers lui comme s’il venait de le sortir d’une trop longue léthargie.
Nemo met un temps fou à se rappeler qu’il y a un sol sous ses pieds, qu’il est pas en train de se noyer et qu’Atticus est là, et qu’Atticus sait. Il ne se souvient plus trop comment c’est arrivé, comment l’ironie a cessé d’être de l’ironie, comment son esprit s’est mis à voguer en pleine mer, sous la mer. Il devrait dire qu’il est désolé. Il ne le dit pas, quand Atticus l’attire loin de la rambarde, loin du bord, loin de l’eau, du moins le plus loin possible sur un voilier en plein océan. Il le laisse faire, quand il le l’enlace et colle son menton sur son épaule, il le laisse faire comme s’il était un bout de bois mort, sans volonté, sans sentiment. Il se sent vide, il se sent las, et peut-être même que la fatigue de son frère est contagieuse. Dormir, dormir pour toujours, du sommeil éternel. Ça serait bien, oui, ça serait bien. Tout ce que tu veux, Atticus répète, et Nemo sait ce qu’il ne doit pas répondre, mais il répond quand même : « Laisse-moi couler. » C’est froid, pas suppliant, c’est froid et net et précis et concis, c’est comme ça qu’il imagine le job d’Atticus et il se dit qu’au moins il sera plus ou moins regardable le jour de son enterrement. Il est aussi pragmatique que ça, pour une seconde, pour un instant, juste avant qu’une larme s’écrase dans le creux de son cou et qu’il tressaille, ses bras se glissant machinalement sous ceux d’Atticus pour le serrer contre lui. « Excuse-moi », il murmure, excuse-moi, ce n’est pas ce que je voulais dire, mais c’était exactement ce qu’il voulait dire, et ils le savent tous les deux. Alors il embrasse la tempe d’Atticus, comme pour demander pardon, encore. « Je veux rentrer », il dit, doucement, presque avec délicatesse, tendresse. Je veux me noyer, qu’il veut dire, mais il ne peut plus le dire tout haut, parce que ce n’est plus pour rire comme quand il l’avait dit au port, cette fois, c’est trop vrai, c’est trop réel, et y’a que la terre ferme qui pourra lui rappeler qu’il ne doit pas faire ça à Atticus. Il récupère le joint qu’il a laissé s’éteindre derrière son oreille de deux doigts fébriles, le rallume dans le dos d’Atticus et tire une longue bouffée, pour y trouver le salut, pour qu’ils puissent rire à nouveau, faire comme si y’avait rien eu d’autre ce soir. « Je t’aime, bro », maigre tentative pour ramener un peu de légèreté. « Tu sais que j’ferais n’importe quoi pour toi aussi. » Y compris vivre quand tout ce que je veux c’est mourir. |
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Mar 5 Sep - 16:07 | |
| « Laisse-moi couler. »
Il s'y attendait. C'est sa faute, il lui a tendu la perche, mais au moins il sait que Nemo l'a entendu. Tout ce que tu veux. Il ne répond pas et sa seule réaction à son excuse-moi est de le serrer encore un peu plus fort contre lui. Il sait, il a compris. S'il est désolé ce n'est pas pour ce qu'il a dit, c'est parce que c'est trop vrai, c'est pour ce qu'il est. Et Atticus a envie de lui demander pardon aussi, les mots lui chatouillent les lèvres mais il les retient parce que ça ne servirait à rien. Ça ne ferait que culpabiliser Nemo davantage et il n'en a pas besoin. Sa cruauté a des limites. « Tout ce que je peux. » Il se corrige après coup. Mais c'est peut-être exagéré ça aussi, c'est peut-être un mensonge, parce qu'il pourrait sans doute faire beaucoup plus, beaucoup mieux, et il devrait faire tout ce qu'il peut. Mais comment on aide quelqu'un qui veut seulement qu'on le laisse sombrer ? Et est-ce que ça en vaut la peine, est-ce que c'est la meilleure chose à faire pour lui, pour Nemo ? S'il le regarde souffrir pendant cinquante ans il aura simplement l'impression d'avoir été le pire des bourreaux.
Il entend le déclic du briquet tout près de son oreille, la flamme doit lui frôler les cheveux. Malgré la surprise, il a la présence d'esprit de ne pas bouger le temps que Nemo rallume son joint, et puis il l'embrasse sur la pommette avant de le laisser s'écarter. Il lui fait un sourire triste, les yeux bouffis mais ça n'a rien d'inhabituel, ils sont juste un peu plus humides qu'il y a quelques minutes. « Tu veux rentrer. Ça, je peux faire. » Il lui pique le joint le temps de tirer une latte et le lui rend immédiatement. C'est la latte de trop, c'est toujours de trop mais là il sent son cerveau vriller et il perd l'équilibre un instant. Il écarte un peu les bras pour se stabiliser, comme s'il se tenait sur une poutre, et se retourne vers le palan d'écoute comme si de rien n'était. Il a déjà commencé ses manœuvres quand il se rappelle qu'il n'a pas levé l'ancre. « Oh merde. » Il arrête tout et s'attaque donc à ça, recommençant tout dans le bon ordre. Au bout de quelques minutes le bateau fait demi-tour, direction la terre ferme. Ils iront se perdre dans l'éternité une autre fois. « Tu sais, je finirai peut-être par le faire. » Ça sort tout seul, il ne savait même pas que ça lui trottait dans la tête depuis tout à l'heure. Il ne sait pas non plus combien de temps ça fait que Nemo lui a demandé de le laisser couler. Il peut seulement espérer qu'il ne fasse pas le rapprochement entre sa requête et cette réplique tardive, qu'il n'y entende pas une promesse même si c'en est une. Quitte à ce qu'il coule, il veut être là, il ne veut pas qu'il soit seul, qu'il parte dans la honte et le secret coupable, il veut être assez fort un jour pour l'accompagner si c'est la seule chose qui reste à faire. Mais il hésite, la question demeure. Quand est-ce qu'on sait que c'est la seule chose à faire ? D'habitude il ne parle de rien de tout ça à Nemo, surtout pas. Surtout ne pas lui donner cet espoir, cette attente. Et maintenant c'est trop tard et lui aussi voudrait bien se noyer si ça pouvait lui faire retirer ses mots. Il est en panique et il s'étonne de ne pas avoir déjà fait de crise. « Je t'aime aussi, t'es tout ce que j'ai. Mais je t'ai pas vraiment hein ? J'suis désolé. » Pour tout ce qu'il dit, pour tout ce qu'il fait de mal. Pour ses paupières qui se font lourdes alors qu'ils ne sont pas encore arrivés. |
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s’il a de l’humour il finira mort noyé ▹ posts envoyés : 1595 ▹ points : 26 ▹ pseudo : Camille ▹ crédits : av Xerxes ♥ + aes Kenny ♥ ▹ avatar : Archy Marshall (King Krule) ▹ signe particulier : roux sorti des enfers, abonné aus suicides manqués
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Mar 5 Sep - 18:19 | |
| Il déteste ça. Être là, avec Atticus, dans cet état déplorable dans lequel il se laisse glisser trop souvent. Dépressif chronique, c’est pas sa faute, pourtant il s’en veut, il s’en veut tout le temps, d’être encore là, de pas être parti plus tôt, commettre l’irréparable pour de bon, comme on arrache un pansement qui colle trop. Pourquoi il est pas foutu de le faire, pourquoi il se réveille toujours à l’hôpital, des regards tristes autour de lui et trop de compassion, toujours trop de compassion, les bons sentiments qui lui font grincer des dents et lui incapable de réitérer son propre meurtre dans la minute qui suit. Sa vie est une putain de comédie noire, et il déteste ça. Il déteste ça, être face à Atticus quand la dépression reprend le dessus, quand il sait que rien de ce qu’il dira ou fera ne va, ne peut lui arracher ses idées noires, ses envies de suicide, ses envies de néant. Il déteste ne pas pouvoir lui dire je vais bien, il déteste savoir que ça n’ira jamais mieux, qu’il ne fera jamais le moindre effort pour aller mieux, qu’il ne pourra jamais lui promettre de prendre ses médicaments ou d’essayer d’être heureux. Même pas l’être, juste essayer, mais c’est déjà trop, c’est déjà au-dessus de ses forces, c’est la mort et la douleur et l’humour acerbe qui le rendent heureux. Heureux comme lui sait l’être, heureux comme personne d’autre. Il aime avoir mal, pourtant la vie lui est insupportable, pourtant c’est souvent trop, pourtant un rien rouvre la brèche, trop grande, dans sa poitrine, cette noirceur indicible qui le hante depuis qu’il est gamin. Ça l’a jamais quitté, et il a jamais voulu s’en débarrasser. C’est peut-être ça le problème, au fond. Il a jamais voulu aller mieux, Nemo, même pour sa mère, même pour son frère. La seule chose qu’il pouvait faire pour eux, c’était espérer crever accidentellement, qu’ils puissent pas se blâmer pour sa mort, qu’ils puissent pas se dire j’aurais pu. Et lui non plus, il n’aurait pas à se blâmer, à se reprocher ce qu’il est. Parce que Nemo ne se sent pas malade, il s’est jamais senti malade, c’est juste lui, lui et rien d’autre.
Il déteste voir Atticus mélancolique, ses yeux fatigués qui retiennent trop d’eau. Il déteste le voir attraper son joint comme si ça pouvait lui faire du bien alors qu’ils savent tous les deux que ça ne lui en fera pas, il déteste le voir vaciller, le voir si épuisé qu’il pourrait faire une crise à tout moment. Il est loin le temps où il s’amusait à les lui provoquer, les crises. Il ne bouge pas, pourtant, quand il s’écarte, commence des manœuvres sans lever l’ancre, reprend l’opération depuis le début. Il reste un moment immobile sur le pont, Nemo, perdu et presque inconscient, il a l’impression, le joint entre les lèvres, avant de laisser sa guitare choir aux côtés du violon. Il relève le nez vers Atticus, quand il lui dit que peut-être un jour il finira par le faire. Et Nemo comprend trop bien, trop vite, un sombre sourire qui fleurit sur sa bouche, éphémère, les yeux qui se détournent sur l’horizon invisible à présent. Les lumières du port sont de l’autre côté, vers là où ils avancent. Il ne veut pas lui dire de ne pas faire des promesses qu’il ne tiendra pas, et il déteste Atticus pour ça au moins autant qu’il l’aime. Il lui fout le cœur en vrac, il fait pareil, finalement c’est équitable, ils sont aussi cruels l’un que l’autre. « Atticus. » Il se rapproche de lui et glisse un bras dans son dos, chatouille sa nuque au passage. « T’as besoin de dormir. » Petit frère infirmier, c’est pas moi le malade, c’est toi. « J’vais nous ramener, va t’allonger. J’tiens mieux la marijuana que toi. Tiens, pour faire de beaux rêves » Il lui tend le joint, histoire de pas être trop dans les vapes et de pas se planter de port non plus. Il se dit qu’avec un peu de chance après avoir assez fumé, Atticus pensera que la fin de soirée n’était qu’un mauvais rêve.
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Ricolaaaaaaaaa ▹ posts envoyés : 1051 ▹ points : 7 ▹ pseudo : Kenny ▹ crédits : lonewolf (ava) ; astra (sign), pastel breathing (icons) ▹ avatar : Izzy Brierley ▹ signe particulier : perchée
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Mar 5 Sep - 22:05 | |
| Une vision du passé qui s'invite dans le présent, Nemo qui joue à l'infirmier. Où est son petit calepin pour noter ses observations ? Il rajeunit, ils rajeunissent tous les deux. Atticus est déjà malade mais il n'est pas encore un drogué. C'est lui le plus dépressif des deux, du moins il le croit encore parce que Nemo n'a pas encore fait de tentative de suicide dont il ait connaissance. Il ne sait pas qu'il traverse la route quand les voitures arrivent trop vite en espérant qu'elles n'aient pas le temps de freiner. Il ne voit rien.
De beaux rêves. Au mieux le joint l'assommera trop pour qu'il fasse des cauchemars ou lui évitera des hallucinations, mais il peut tout aussi bien les empirer. Parfois le cerveau d'Atticus ne sait pas faire la différence entre rêve et réalité et il ne fait rien pour l'y aider. Il n'y a qu'à voir, il n'est pas encore tombé de fatigue et il commence déjà à rêver du passé. Il adresse quand même un sourire endormi à Nemo et l'embrasse encore sur la joue, pour faire comme lui quand il lui dit bonjour, avant d'accepter le cône presque consumé. Nemo n'a pas relevé ses mots de trop. Il aurait pu. il aurait pu lui gueuler dessus, l'accuser d'être un salaud manipulateur et tordu, même si pour une fois il ne l'a pas fait exprès. « Merci. Réveille-moi si tu... » Il tangue. « J'reste là, » il dit d'une voix pâteuse, comme s'il avait trois grammes d'alcool dans le sang et qu'il essayait encore de philosopher. Il se laisse tomber et s'allonge en position fœtale sur le bord du pont, le dos calé contre la partie pleine du bastingage. Il n'a pas envie de le laisser tout seul en haut et quand bien même il en aurait eu envie, il n'est pas sûr qu'il aurait atteint le bas des marches avant de sombrer. Il ne se sent pas partir. Il s'entend répéter « Je t'aime Nemo » mais peut-être qu'il l'a rêvé.
Quand il rouvre les yeux il est complètement largué. Il lui faut un moment pour se rappeler pourquoi il est allongé sur le pont du bateau, ce qui s'est passé juste avant, avec qui il était. Il n'entend plus le son des flots, Nemo a dû les ramener. Il a encore l'impression de tanguer mais, en se redressant, il sent bien que le bateau est immobile, c'est juste la terre qui continue de tourner même quand tout va mal. Il balaye la nuit du regard et, comme s'il était apparu d'un coup en face de lui, il remarque soudainement la silhouette de Nemo assis sur le bastingage, les yeux tournés vers lui. Il se frotte les yeux. « T'attendais que j'émerge ? Ou t'es déjà rentré mais j'hallucine. Viens me pincer. » C'est probable aussi, ça lui arrive parfois au réveil de voir des absents. Il lâche un long bâillement. « Dors ici. » Il n'a pas envie de le laisser rentrer seul ce soir. Il voudrait le tenir dans ses bras jusqu'à ce que le soleil de midi brûle là-haut. La mort est un peu moins menaçante au soleil, même si la vie n'est pas plus belle. |
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) Mer 6 Sep - 22:33 | |
| C’est marrant, Atticus le narcoleptique, et lui l’insomniaque, Atticus qui dort pour deux, Atticus qui vit pour deux. Nemo a un semblant de sourire, en le regardant sombrer doucement, au gré des vagues, sourire nostalgique, en se souvenant du bon vieux temps qui n’a jamais été vraiment bon, mais qui l’est toujours dans les mémoires. Y’a trop de souvenirs, sur ce bateau. Il se souvient de leur mère qui les attendait toujours au port parce qu’elle n’avait pas le pied marin, auto-proclamée Pénélope des temps modernes. Il se souvient de la fois où il était vraiment tombé à l’eau, parce qu’il avait grimpé sur le bastingage et qu’une vague trop forte avait secoué le voilier. Il se rappelle qu’il avait eu peur de la mer, ce jour-là, et qu’il n’avait plus voulu monter sur le bateau durant des mois. L’instinct de survie était encore là, à l’époque. Il se souvient aussi de la fois où Atticus avait fait une crise en pleine mer et son crâne avait heurté violemment le pont. Il avait tenu sa tête sur ses genoux pendant tout le voyage retour, fasciné par le sang chaud qui pulsait contre sa paume. Quand il repense à tout ça, il se dit qu’il a survécu longtemps en se disant qu’Atticus avait besoin de lui. Il avait pris son rôle d’infirmier trop à cœur, c’était devenu sa raison d’être, sa raison de ne pas céder aux lames de rasoir qui l’attiraient un peu trop dans l’armoire au-dessus du lavabo dans la salle de bains. Il fait toujours comme s’il ne savait pas comment ni pourquoi ça s’était arrêté, tout ça. Mais il sait très bien pourquoi. Atticus était parti, Atticus l’avait lâché, Atticus l’avait abandonné. Fin de l’histoire, fin de la vie aussi, si tout s’était passé comme il l’avait souhaité. Et pourtant il ne lui en voulait pas tellement, et pourtant il ne lui en veut toujours pas assez.
Quand ils atteignent le port, il descend, d’abord, toujours trop vif malgré l’heure, malgré la marijuana, malgré tout ce qui aurait dû l’accabler, l’épuiser. Ce sont ses envies de mort, qui lui font cet effet-là, qui l’animent, le néant pour seul horizon, et il se demande toujours quand est-ce que ce sera trop, quand est-ce qu’il n’écoutera plus Atticus, quand est-ce qu’il le traînera par le fond, avec lui. Il l’aime, c’est vrai, il l’aime, mais ça a toujours été égoïste, et peut-être qu’un jour il sera assez égoïste pour décider de l’emmener avec lui. Mais pour l’instant, il l’aime, et c’est pour ça qu’il revient sur le bateau, se perche sur le bastingage, à observer le ciel dépourvu d’étoiles, noir d’encre comme les cheveux d’Atticus. Puis ses yeux se posent sur Atticus qui émerge, et il rit doucement à sa remarque, saute sur le pont pour l’aider à se relever. Il n’a pas envie de dormir là, mais il ne proteste pas. Peu importe. « Je suis là », il fait tout bas, pour lui dire je ne suis pas encore mort. Peut-être qu’un jour il le sera, et peut-être qu’Atticus le verra quand même, assis là sur le bastingage, à attendre que la mort daigne venir le cueillir. Cette pensée le réconforte, il ne sait pas pourquoi, et, avant de descendre dans la cabine, il enlace son frère une dernière fois.
FIN |
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| Sujet: Re: don't sink the boat that you built to keep afloat (nemoticus) | |
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