T’es jeune Caïn, le sang qui bouillonne dans tes veines, un quart de siècle achevé et une éternité devant toi. T’es jeune Caïn, ça vibre en toi, ça se voit à ton sourire de con, ton sourire stupide quand tu la fais tourner, valser entre tes doigts. Y a pas besoin de mots, juste une alchimie, peau contre peau, cœur contre cœur. C’est ça quand on rencontre une âme qui joue la même partition que la sienne ? Elle est belle Serena, entre tes bras, les cheveux blonds comme les blés, au risque de faire cliché. Combien d’années dans les dents elle a ? Un peu moins que toi tu dirais, mais au fond qu’est-ce que t’en sais ? Et qu’est-ce que t’as besoin de savoir. Tout ce que tu demandes c’est danser, salsa ou bachata, tes pas entrainés qui se mêlent aux siens. Moins professionnels, mais pas pour le moins endiablés. Danse, danse. Jusqu’à en user les corps, jusqu’à en user les veines. C’est Cuba après tout, tout est permis ici, le collier de fleur stupide autour du cou et l’alcool aux souvenirs de menthe dans les veines. Elle se fatiguera avant toi surement, parce que t’es le diable Caïn, plus que la Mort marquée sur tes mains, ce soir ta carte porte le numéro quinze et t’es prêt à le montrer. Y a la main qui glisse dans le creux des reins, la rapprocher un peu plus courber pendant que tu la fais valser. T’entends les rires de tes amis, la troupe au complet qu’est là cette nuit, à boire pour oublier le stress, la représentation de demain, Carmen et l’odeur des cigares, et l’Espagne qui s’enflamme. Une adaptation pas si sage que ça, un succès à venir selon les journaux spécialisés. Qu’est-ce qu’il en sait Caïn, lui il peut voyager, et rencontrer des gens. Des filles. Serena. Et les âmes qui s’entrechoquent parce que c’est trop pareil. Danse, encore, encore, jusqu’à la mort.

Make the most of your time here. Dance your life.
Deux petits leitmotiv qu’elle calligraphierait bien sur sa peau, avec les plus belles courbes qu’elle n’ait encore jamais faites à l’encre comme celles qu’il lui impose à chaque déhanché.
Il l’a faite rire, il la fait danser. Il est sexy, il a le regard malin, à en faire aussi courber les coeurs. Ils n’ont regardé que le soleil et ont oublié les tempêtes. Ou quelque chose comme ça. Ou au moins pour un temps. Juste quelques pas, sur un rythme salsa.
Tout démarra de la piste de danse, de cet endroit où se regroupent les énergies et se dévoilent les corps. Tout ce qu’elle voit, tout ce qu’elle sait, tout ce qui transparaît du spectacle offert ainsi, c’est cette idée de la danse. Danser pour réveiller son coeur et sa conscience, pour affirmer son bonheur d'être en vie, pour séduire de tous ses membres ou pour s'abandonner à la musique, jusqu'à l’épuisement… Les tours de danse qui se trament sur la piste lui rappellent que c’est un art du corps, qu’il célèbre le plaisir de la vie, de la fête et de l'amour. Alors, ils dansent. Ils dansent comme ils combattent et affirment une parole de résistance, ils dansent pour enjôler et parfois se perdre dans le culte de soi, ils dansent enfin comme ils s'abîment dans la joie d'une fête, comme s’ils dansaient sur un volcan. Et il n’y a rien d’autre que cet instant où il l’a entraîné sur la piste. Pas de passé, pas d’histoires compliquées, pas de douleurs, rien. Juste une question bondissant dans ses iris, sur la pulpe de ses lèvres. Et toi dis-moi... À quoi tu danses ?
Elle ne sent déjà presque plus ses jambes, mais ses hanches le suivent toujours. Elle s’accroche à ses bras, ses épaules, ses mains qui font vivoter comme si elle était aussi douée que n’importe qui d’autre. Il guide parfaitement et elle suit docilement, facile. L’osmose dans l’écoute de son corps, à chaque fois qu’ils se touchent, à chaque point de contact entre leurs peaux. Mais ça donne chaud. Elle en a oublié le temps qui passe et l’orage qui craque au-dessus d’eux sans jamais réellement céder. Cette électricité ambiante pèse un peu plus sur ses muscles. Tu veux que j’me liquéfie à tes pieds en fait ? Plaquée contre lui sur le dernier beat de la chanson, elle lui rend son sourire mordant et généreux. Mais je pourrais me contenter de tes genoux dans une chanson ou deux. Qu’elle rassure en remarquant sa clique rire de bon coeur par-dessus son épaule. Ce qui ne l’empêchera pas de lui offrir une bouteille de la meilleure tequila de ce bar aux allures clandestines pour le remercier de l’avoir mise à l’épreuve des danses latines. Mais c’est bien pour ça qu’elle est toujours là quand la musique reprendre déjà et qu’il l’entraîne à nouveau. Toujours découvrir plus et s’imposer doucement à sa façon. Parce qu’il y a des êtres qui ne changeront pas peu importe ce qui les percutera.

Tu veux que j’me liquéfie à tes pieds en fait ? « C’est le plan oui et je crois que ça fonctionne» qu’il lui murmure à l’oreil, le torse un peu gonflé, tout fier qu’il l’est. Qui ne serait pas heureux d’entendre des mots pareils prononcés par une blonde pétrifiante ? Caïn en tout cas saisit sa chance, se rapproche encore un peu, sans le rythme qui bas sous ses pieds, dans son corps, ça pulse un peu partout. Mais je pourrais me contenter de tes genoux dans une chanson ou deux. C’est qu’elle est mordante, Serena. Le prénom qu’il a volé au détour d’une boisson, après une danse déjà bien brûlante. Jamais il ne la laissera se reposer désolé t’as parié sur le mauvais cavalier. Parce que c’est plus que des pas et des mouvements de bras, c’est une autre façon de respirer, d’exister, c’est ce qu’il fait le mieux depuis qu’il est parti. Depuis qu’elle est plus là. Elle lui manque sa mère parfois, et il se souvient des soirées passées à danser maladroitement dans leur salon trop petit, sur un air de jazz en mémoire des années folles de celle qui l’a enfanté. « T’es sur que tu vas tenir ? J’voudrais pas t’user ça serait dommage » une fille comme elle, au sourire trop solaire, putain de soleil ouais. Il s’en brulerait presque les mains, des UV que sa peau dégage. Alors il ralenti un peu le rythme, parce qu’il n’est pas si égoïste, et puis on s’en fout du rythme hein ? A eux de faire le leur. « Pourquoi Cuba ? » pourquoi pas ailleurs, dans tous les endroits du monde. Pourquoi Cuba si ce n’est pour le rêve.

Son rire éclate quand il lui dit que c’était le plan et que ça semble fonctionner. Bien sûr que ça fonctionne, comment il pourrait en être autrement avec un diable pareil comme marionnettiste ? Il se raproche, elle se rapproche. Y a le rythme entre eux, vibrant, vivant, aimant magnétique tirant sur leurs polarités déjà bien courbées l’une vers l’autre. Et puis, parfois ça se désagrège pour concentrer une autre magie, une autre harmonie. Surtout quand sa voix grave vient chercher la sienne. Tu peux toujours tenter. J’suis presque sûre que bientôt… j’pourrais plus m’en passer. Cette énergie, cette vie. Dieu ce qu’elle aime ça. Dieu c’qu’elle s’y accroche, les mains bien plantées dans sa chair qu’elle ne lâche pas.
Pourquoi Cuba ? Elle dodeline de la tête, tentée de répondre “et pourquoi pas ?” mais non. Au lieu de ça, elle inspire, se colle à son odeur, lascive contre lui, presque à forcer sur son partenaire un autre lead d’une simple ondulation de bassin. Et son visage se fait tragiquement sérieux. Pour la plage. Le rhum. Les cigares. Les danseurs musclés. Tous les trucs pas chers que je pourrais trouver. Bref que des choses très pragmatiques et matérielles. Sérieusement. Qu’est-ce qu’elle en a faire de la musique, de l’âme du pays et de ses habitants qui vivent sous embargo depuis des générations ? Leur capacité à toujours se débrouiller, toujours s’en sortir, à toujours trouver un rythme qui leur permets de vivre, ça ne l’atteint pas. Ce n’est pas ce qu’elle est venue rencontrer. Ce n’est pas ce qu’elle est venue chercher. Oh et l’envie de baiser sous d’autres latitudes évidemment. Tout aussi sérieuse, elle appuie ses dires d’un oui de la tête. Beaucoup, beaucoup de latitudes si tu vois ce que je veux dire. Elle insiste solidement. Elle s’enfonce dans sa peau. Elle tient encore un peu à sa mauvaise mascarade, juste assez pour que son rire cascade, que son sourire lui entame l’âme.

Tu peux toujours tenter. J’suis presque sûre que bientôt… j’pourrais plus m’en passer. un nouveau rire le traverse, le transperce. Il rejette la tête en arrière, ne relâchant pas pour autant sa prise, ses doigts qui se faufilent. Il brille, elle brille. C’est sucré et brûlant, le genre de sucrerie qu’on dévore jusqu’à s’en péter les dents.
Il finit par poser la question fatidique. Pourquoi ici ? pourquoi pas là bas, pourquoi pas à l’autre bout du monde. Il sait pas Caïn, il n’a commencé à voyagé qu’il y a seulement quelques années, sans avoir pris l’avion avant que tout commence à démarrer pour lui. Pour la plage. Le rhum. Les cigares. Les danseurs musclés. Tous les trucs pas chers que je pourrais trouver. Bref que des choses très pragmatiques et matérielles. Il la sent se coller un peu plus contre lui, comme si elle cherchait à imposer son propre rythme. Désolé bella qu’il a envie de murmurer, ça n’arrivera pas.
Oh et l’envie de baiser sous d’autres latitudes évidemment. S’il était un peu plus timoré, sans doute qu’il se serait étouffé. Elle se fait succube, la blonde, avec son aura qui vous cramerait les os. Beaucoup, beaucoup de latitudes si tu vois ce que je veux dire. « Oh oui » qu’il souffle tout bas alors que ses lèvres se perdent le long du coup de Serena. Faut pas lui faire ça Caïn. Il est faible quand on lui met une jolie blonde entre les bras, surtout quand elle a les dents du bonheur en plus.
Mais il est joueur. Alors il se recule, un peu, laisse une trainée éphémère sur sa peau alors qu’il se reprend à sourire. « Alors ? voyage fructueux pour le moment ? » clin d’œil il la fait tourner. « Par contre je pourrais le prendre mal que tu classe les danseurs musclés dans la catégorie trucs pas chers. » c’est vrai quoi, il faut le mériter, il se donne pas comme ça voyons. Il a des principes. Blague di siècle Caïn, tu trompe personne

Elle a senti ses mains glisser sur ses reins, pour assurer le tempo, la courbe, guide et partenaire. Alors elle se laisse faire, docile et partenaire à son tour. Même si ils se taquinent et enrobent leurs mots de sourire, ils savent lire la sincérité qui s’y cache derrière. C’est ce genre de rencontre, de feeling, où même si c’est la première fois qu’ils se voient, se parlent : ils se connaissent déjà, un lien prédestiné à exister, dans cette vie ou dans d’autres.
Maître du jeu, maître du destin à l’essence un peu trop railleuse, il comprend, il acquiesce, il la rejoint pour la faire chavirer pour la renverser. Par contre je pourrais le prendre mal que tu classe les danseurs musclés dans la catégorie trucs pas chers. Aww il fait sa pucelle vexée… ? C’est mignon. Qui a dit que tu faisais partie d’une seule catégorie ? La voix chaude, suave et éraillée à la fois, un sourire à demi-étiré, espiègle, peu impressionnée, mais presque à ronronner entre ses bras, suspendue à ses épaules. Ou que tu as un prix ? Elle a le pas léger, l’impression d’à peine toucher le sol grâce à lui et sa force tranquille. Elle est bien là, à sa place, accordée à lui, à danser sur les battements de son coeur, sa pulsation, l’imrpession d’être un bout d’sa symphonie.
Et Serena se délecte du moment, de ce présent. Toujours à s’immiscer, s’incruster, jeter un oeil entre les côtes, cajôler les centres de gravité, s’assurer que le soleil y chauffe bien librement, puis s’envoler. Mais Caïn, il a une mélodie intemporelle qui attire. C’est inéluctable. Des envies de presser repeat, de trouver la clé d’sa partition pour la perdre quelques gammes plus tard, la jeter plus loin, aux confins de leurs univers fondus l’un dans l’autre. Alors elle veut faire plus que le connaître. Elle veut toucher des doigts pourquoi elle a cette sensation irradiante dans la poitrine qui lui dit he could be here every day and you two could be livening up every day. Et toi ? Pourquoi Cuba ? Pourquoi une troupe ? Oeillade complice vers les concernés, alors qu’elle se rapproche comme si elle s’avançait sur un matelas moelleux. Il faut que je te demande de me laisser une trace… une signature de toi quelque part ? Et son regard clair dérive sur l’encre qui constelle sa peau, curieuse et distraite à la fois. Est-ce que tu as des tas d’histoires à raconter ? Mais rien que la vérité cette fois. Sourire fondant. Sourire mordu. Elle a posé son front contre le sien, effleurant son nez du sien, les yeux qui s’emmêlent, prêt à tisser une nouvelle réalité. IToute la vérité, rien que la vérité, et jure.

Qui a dit que tu faisais partie d’une seule catégorie ? Il rigole, fait semblant d’être offusqué. Si elle savait, aucune catégorie vraiment pour l’enfermer, foutu marginal depuis sa naissance, pas capable de tenir dans une case en particulier. Ou que tu as un prix ? Et de nouveau elle lui tire un rire, drôle de trouvaille que cette blonde pleine de mordant, il pensait pas en rencontrer une comme ça à Cuba. Comme quoi, ils se sont trompés tous les deux. « Oh mais j’en ai un » qu’il vient murmurer à son oreille, le pire c’est que c’est vrai. Pas ici, mais à New York, dans le club où il danse parfois, mais ça elle le saura sans doute pas. « Et comme toutes les choses trop chères, il n’est juste pas indiqué » garnement il la provoque un peu plus, se fait mousser parce qu’il aime ça, Ken comme une blague avec sa gueule un peu cabossée, pas beau gosse mais au fond c’est pas toujours ça qui les fait rêvées.
[b] Et toi ? Pourquoi Cuba ? Pourquoi une troupe ? Il s’arrête un instant pour la regarder, avant de poser ses yeux sur ses camarades affalés plus loin. « Un contrat. C’est mon métier, on nous a dit : les gars – et les filles – préparez vos passeport, on part pour Cuba et nous voila les pieds dans le sable, pour nous récompenser de notre dur labeur » le spectacle terminé, la prochaine représentation n’est que dans deux jours, alors ils ont quartier libre pour une fois, se détendre un peu, profiter, entre deux répétions menées à la baguette. Il faut que je te demande de me laisser une trace… une signature de toi quelque part ? elle se rapproche un peu plus, comme si il restait encore de l’espace entre eux, jamais assez. « Ca s’appelle un autographe ma belle » mauvaise blague mais ça le fait rire quand même, après tout faut bien qu’il reste dans son rôle de mec pédant. Le truc c’est qu’il est pas vraiment crédible. Pas grave, il a connu pire. . Est-ce que tu as des tas d’histoires à raconter ? Mais rien que la vérité cette fois. ah la vérité maintenant ? Il ferme les yeux quand il sent son front venir poser contre le sien, garde le silence un instant. C’est pas pour ça qu’on part en vacance ? Qu’on va autre part que chez soi ? Pour faire semblant d’être quelqu’un d’autre ? oublier nos vérités ? Toute la vérité, rien que la vérité, et jure. « T’auras jamais toute la vérité Bella, ça briserait mon personnage » les doigts qui viennent effleurer sa joue, replacer une mèche derrière ses cheveux. « Mais j’peux t’en offrir une » juste une seule parce que c’est déjà trop. « Je savais déjà que j’allais te rencontrer ce matin » et il s’écarte un peu en rigolant, moqueur, il laisse le mystère planer, à elle de deviner ce qu’il veut dire par là. Avec un peu de chance il le lui expliquera.

Elle rit, fait semblant d’acheter et d’accepter qu’il y ait un prix sur quelqu’un parce qu’elle sait qu’il rit lui aussi. Et au moins, l’estimation vaut son peson d’or apparemment. L’espace d’une seconde, Serena a imaginé une vente aux enchères où il serait l’un des lots, devrait faire son show pour faire grimper les prix. Aucun doute sur le fait qu’il sache s’y prendre et que la foule d’hommes et de femmes y soit réceptive, tous prêts à acheter le danseur ou un moins, un p’tit bout de lui, ce qu’il laisse consciemment accessible, à portée de mains… baladeuses alors qu’il lui explique sa réalité, un métier, un contrat et une récompense. Sa silhouette se dessine un peu mieux dans la tête de la blonde, mais y a toujours un rythme, un mouvement qui l’empêche de bien tout capturer. Impossible à croquer. Une nuance qu’elle acceptera de laisser telle quelle, sans définition, sans nom, parce que ça doit faire partie de son identité mystère. Oui c’est ça un autographe… Tu m’en donneras un ? Que je le revende au prix fort pour pouvoir t’acheter un de ces jours si l’envie m’en dit, si la vie le dit. Mais derrière tous ces petits jeux d’enfants pas bien méchants frôlant l’envoûtements et secouant leurs charmes, l’italienne ne peut pas s’empêcher de chercher au moins une pointe d’authencité, un endroit vrai, quelque part, ici, en lui. Ils se sont dit tellement choses depuis qu’ils ont commencé à danser tous les deux, des sincères et des déguisées, ou plus ou moins un peu des deux. Mais elle demande, exige doucement un trait de véracité à son portrait. Pour être sûre de bien tout garder en mémoire. T’auras jamais toute la vérité Bella, ça briserait mon personnage. Elle ferme les yeux à son tour en sentant ses doigts sur sa joue et dans ses cheveux. Elle sourit, attend tout de même docilement dans un souffle lent qu’il y ait une suite parce qu’elle est persuadée qu’il en donnera une. Mais j’peux t’en offrir une. See ? La même onde. Je savais déjà que j’allais te rencontrer ce matin. Et elle rit encore en l’observant, sourcil haussé. Devin ?, qu’elle questionne tout de suite. Tu es sûr que tu ne sors pas ça du volume 2 de “Draguer en soirée pour les nuls” ? Le sourire carnassier qui s’étire encore plus comme si c’était encore possible. Et cette fois-ci, c’est elle qui replonge ses mains dans les siennes pour l’attirer à nouveau contre elle. Les nez qui se frôlent un instant et une main qui se délie pour dériver sur sa mâchoire. Elle n’attend pas bien plus longtemps avec de l’embrasser. Avec toute la langueur tissée à une soirée comme la leur. Et est-ce que tu sais déjà aussi tout ce qui va arriver entre nous ? Souffle contre ses lèvres. Parce que moi aussi j’savais que j’allais t’embrasser dès que j’t’ai vu. L’espièglerie au coin de sa bouche, elle se détache finalement. Allez viens, je t’offre un verre pour que tu m’en dises plus sur tes pouvoirs magiques.

Oui c’est ça un autographe… Tu m’en donneras un ? Il rigole Caïn, sans doute une des premières fois qu’on lui demande ça, et même si c’est pour la blague ça fait gonfler un peu son orgueil car au fond, personne n’est parfait. Le sourire qui s’étale sur son visage, l’impression qu’à la fin de la soirée il aura mal à la mâchoire à force d’avoir tant rigolé. « Bien sûr. Tout pour toi, si c’est ça qui te ferait plaisir » faux prince, galant en carton, il fait semblant de faire une révérence et mime dans l’air une signature inventée. Il rigole, elle rigole, et tout va bien. Il est heureux.
Puis ça s’enclenche, il continue le rôle, acteur raté il met toute son émotion quand il est sur scène, dans la rue aussi ou quand il tient une fille trop belle entre ses bras. C’est maladif. Devin ? Claquement de langue sur le palet, il ne la reprend pas tout de suite. Tu es sûr que tu ne sors pas ça du volume 2 de “Draguer en soirée pour les nuls” ? « Pas devin. Taromancien. Nuance. Et je crois que ton bouquin n’a jamais fais parti de ma bibliothèque si tu vois ce que je veux dire » sourire en miroir, clin d’œil amusé, le geste de la blonde qui confirme ses dire quand elle l’attire contre elle et pendant un instant le temps se met sur pause. Souffles mélangés, il la regarde, elle le regarde. Elle l’embrasse. Les mains qui se posent tranquillement au creux de ses reins, glissent un peu trop bas, baladeuses, vilaines, c’est pas sa faute si c’est si tentant.
Et est-ce que tu sais déjà aussi tout ce qui va arriver entre nous ? Elle est terrible. Brulante. Il aspire tout, comme il peut, profite de ses rayons pour se chauffer, le rire qui nait encore une fois, il savoure. Parce que moi aussi j’savais que j’allais t’embrasser dès que j’t’ai vu. « C’est pas bien compliqué ça » qu’il répond contre ses lèvres, deuxième baiser un peu plus court qu’il initie, parce qu’il aime fanfaronner comme un foutu coq de bassecour. Finalement il la laisse partir, pas trop loin, juste assez pour respirer à un et pas à deux. Allez viens, je t’offre un verre pour que tu m’en dises plus sur tes pouvoirs magiques. Il ne se fait pas prier et la suit vers une table faisant signe au serveur de venir prendre commande. En attendant il se glisse sur le siège et tire le deuxième pour qu’il se retrouve à côté de lui et non en face. Plus drôle comme ça pas vrai ? « Donc tu comptes me saouler pour que je dévoile tous mes secrets ? Ambitieux comme plan. » Défi dans la voix, rire dans le regard.

Oh oui… Qu’il fasse tout ce qui lui ferait plaisir, ça donne envie, ça fait rêver, ça étourdit. Agréable perspective. Même si ce n’est que le temps d’un rôle trop parfait. Heureusement qu’elle sait que ça n’existe pas et qu’ils n’ont pas besoin de ça. Mais juste quelques secondes de plus, ils s’y croient tous les deux. Lui le célèbre talentueux et elle l’anonyme subjuguée. Jusqu’à ce qu’un premier mystère pointe le bout de son nez au coin du coeur battant, entre deux rythmes toujours dansants mais un peu plus lents. Ils profitent. Tous les deux, l’un de l’autre, de ce moment pur de découverte de l’autre, de connaissance, légère avidité sur les peaux, la soif dans le sang qui se réchauffe. Alchimie. Et peu importe que ce soit élaboré ou d’un naturel bigarré, la technique fonctionne. Y a pas à dire. Péché très humain que de succomber. Surtout quand c’est si simple et si bon. C’est pas bien compliqué ça. Quelle confiance. Mais il a raison. C’est peut-être bien pour ça qu’elle l’invite et que lui la suit.
Assis l’un à côté de l’autre comme une évidence, l’italienne passe naturellement une jambe en travers de ses cuisses, familière comme avec un ami de longue date -âmes anciennes, déjà liées. Donc tu comptes me saouler pour que je dévoile tous mes secrets ? Ambitieux comme plan. Elle rit encore. Totalement. Mais te nourir aussi, parce qu’on sait depuis longtemps tout ce qu’il faut contenter chez un homme pour avoir son attention. Sa main se dresse pour ameuter un serveur et lui commander -dans un espagnol bancal mais blagueur- de quoi remplir leurs estomacs. Et apportez une bouteille directement, on se servira. Le sel et le citron vert en alliés. Un énorme saladier sur les cuisses de la blonde où ils picorent directement avec les doigts, font des dégâts à chaque bouchée enflammée. Et ce sont leurs histoires qui s’éparpillent entre deux foux rires et trois anecdotes. Des traits de vérité qui traînent, union tacite authentique, et trop d’expériences déjà dans les os pour ne pas en parler. Mais si j’te jure. La veille j’venais de rêver que j’étais une cigale ou un grillon j’sais pas. Mais ma vision était au niveau du sol et bondissait de temps en temps sur des feuilles. Et y avait ce ksskss qui émanait de moi j’pense. Bref, pourquoi j’te dis ça ? Ah oui ! Et donc le lendemain, y avait un de ces exposés à la con où tu passes devant tout le monde et pour prouver l’élasticité du tissu que j’avais choisi, j’sais pas ce qu’il m’a pris, mais j’ai sauté d’ssus ! Persuadée que ça allait être comme au trempoline ou dans mon rêve. Donc oui tout ça pour dire que les réincarnations, les énergies qui passent de vie en vie, j’y crois tel-le-ment. Mais bon un grillon quoi. J’suis un peu déçue si c’est ça l’essence de mon âme. J’sais pas une loutre ? Un sphynx... euh non lynx. Grrr grr ! Nan ? Bref tanpis. Finalement ça n’a pas l’air grave. Les mains qui miment, l’accent du sud qui ressurgit, éraille les cordes vocales à mesure qu’il faut se faire entendre sous la musique et l’alcool qui fait tanguer les pensées. La régression qui entraînent aux frontières de l’adolescence. À rire pour rien, à perdre le fil de ses propres mots. Et puis juste trouver l’autre beau. Se laisser aller à la contemplation quand c’est l’autre qui parle. N’écouter qu’à moitié et l’avouer. Se faire pardonner d’un trop grand sourire. Alors que les mains voyagent à nouveau, tracent déjà leur propre route, dessinent des chemins de traverse du bout des doigts entre les encres et les reliefs de sa peau. Un sens happé, Serena s’y noie volontiers un peu plus. Hm… j’adore m’égarer..., qu’elle admet, aimer ça d’un sourire flou, coupable. Ça t’dit qu’on s’perde ensemble ? T’as du temps demain ? Enfin dans quelques heures ? J’t’invite à te dérober de tout le reste. J’t’emmène et on déambule jusqu’où on peut ? Et si on s’lâchait pas finalement ?