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 what if we don't have to be tough (abram)

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Teddy Dobson

Teddy Dobson
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▹ signe particulier : les yeux bleus percutants, les traces de brûlures visibles au niveau de son coude et sous le poignet gauche. le restant de la cicatrice s'étend du même côté, presque tout le long de ses côtes jusqu'au creux de ses reins, mais bon ça faut qu'elle se désape pour que d'autres le remarquent. les sons paraissent de plus en plus étouffés quand ils lui arrivent par la droite.
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MessageSujet: what if we don't have to be tough (abram)   what if we don't have to be tough (abram) EmptyJeu 10 Aoû - 17:06


(( it just hit me wrong today, like every other day ))

Encore et encore. C’est toujours la même chose. Derrière les strass qui éblouissent avant de tomber, derrière les gestes lascifs mais calculés au millimètre, tous les stripteaseurs du Gentleman’s Club savent voir l’avidité malsaine au fond des yeux de clients spectateurs. Une noirceur possessive qu’ils reconnaissent tous. Les chorégraphies flirtant avec le burlesque n’y changeront rien aux yeux de Dani. Et il y en a toujours à qui le spectacle n’est jamais suffisant. Pourtant ils connaissent les règles : ne toucher qu’avec les yeux ou à travers les billets. Mais finalement, ils doivent sentir qu’à l’intérieur du club, ce sont les danseurs les êtres supérieurs. Ils n’apprécient pas cette confiance toxique qui permet d’alléger les portefeuilles de ces messieurs. Le tout perché sur un piédestal, sur des talons plus grands que la virilité des clients. Éternel besoin primaire de domination. Et cette nuit, y a pas Peadar au poste de garde. Et quand bien même il serait là -lui ou un autre vigile, leur zone de surveillance ne s’étire pas jusqu’à cette ruelle en parallèle. Ombre vagabonde, Dani pense toujours à se fondre dans le décor quand elle sort du club -particulièrement quand elle sort du club avec autant d’argent sous le bras. Mais quand on a Scarlet dans le viseur, on la remarque peut-être un peu plus. Maquillage rapidement effacé, elle avait à peine refourguer sa perruque dans son sac à dos... libérait seulement maintenant sa tignasse difficile à dompter qu’une main trop ferme chopa son bras pour la tirer en arrière. Une grenade familière de haine se matérialisa au creux de son estomac, que le volte-face fut assez brutal pour qu’elle n’entende pas ses propos de prédateur de bas-étage.

(( the more territory you want, the more ennemies you make ))

Elle ne s’attendait pas à un gabarit pareil. Des os aussi durs dans la mâchoire. La douleur habituelle quand ses poings en rencontrent se propage beaucoup trop vite, beaucoup trop loin, comme le virus de la peste. Mais elle refuse de perdre. Pas encore. Pas déjà. Elle vient de se remettre de sa dernière refaite. C’était son deuxième soir au club. Elle refuse. Parce que ce n’est pas tant ce qu’il dit qui la met en rogne, c’est ce contact qu’elle n’a pas autorisé. Celui qui dit ‘viens par-là, tu vas me céder, tu vas être à moi’. Jamais. Jamais plus. Elle connaît trop ce goût sombre et paralysant d’une vie qui ne t’appartient pas. Et elle respire mal à cause de cette poigne si familière ; elle tire et tire pour se sortir de là. À nouveau chassée, à devoir battre en retraite, à devoir se protéger. Alors elle se tranchera le bras si il n’y a plus que ça a faire. Elle s’arrachera la peau si il le faut. Ses protestations ressemblent peut-être plus à des grognements et elle lance son pied dans son genou pour le faire lâcher. Ce qu’il fait dans un râle plaintif. Ce qui lui fait perdre l’équilibre dans un souffle surpris. Mais elle sait que les obstinations surpassent les maux. Elle sait très bien. Elle le voit très bien quand sa main chope ses cheveux et qu’elle se paralyse à ce moment-là. Parce qu’elle sait aussi qu’il va la tirer dans le fond de la ruelle sans issue, qu’il va jeter sa carcasse derrière les poubelles, frappera son visage d’un revers de main, que les chocs successifs vont l’étourdir assez longtemps pour qu’il plonge de tout son poids sur elle, et que sa main viendra bâillonner sa bouche. Déjà-vu ou prémonition ? Sale goût d’un souvenir presque trop identique. C’est sale et moite quand il te lèche le visage et qu’il déchire des choses qu’on ne pensait pas avoir.

(( bending through her sensory overload ))

Le vestige dans sa mémoire se gomme pourtant. Pas cette fois. Ça n’arrivera pas une deuxième fois. Si elle fait stripteaseuse et pas catin, c’est pas pour rien. On ne la touche pas. Alors elle frappe plus fort dans son ventre pour l’éjecter loin d’elle. Il retombe contre la benne et l’insulte fuse entre ses dents. Pute ! Oh, il ne sait pas à quel point elle le sera quand elle lui plantera la lame de son canif’ dans les couilles. … Enfin une fois qu’elle aura sorti le métal défensif… Et seulement quand elle le tiendra un peu plus fermement qu’à cet instant.

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MessageSujet: Re: what if we don't have to be tough (abram)   what if we don't have to be tough (abram) EmptyVen 11 Aoû - 0:17

WHAT IF WE DON'T HAVE TO BE TOUGH
DANI VALENTINE + ABRAM KASPÁROV
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T'en as marre. Parce que Gengis fait sa loi, parce qu'elle est d'une humeur massacrante et qu'elle casse les couilles à tout le Troisième Œil. Tu sais pas vraiment si c'est la mauvaise période du mois ou juste une case qui lui manque dans la cervelle, mais t'en peux plus. Beaucoup trop d'œstrogène dans le coin. Surtout quand Ken n'est pas là. T'as beau t'enfermer à la cave, te défouler sur ton banc de muscu, tu l'entends quand même gueuler à l'étage. Sur qui ? T'en sais rien. Pourquoi ? T'en sais rien non plus. Tout ce que tu sais, c'est qu'il faut que tu te casses d'ici pour ce soir, ou pour la nuit. Alors t'éteins tout, tu verrouilles les portes, parce que manquerait plus qu'elle en vienne à foutre en l'air ton labo ou tes récoltes. T'enfiles ta veste de cuir et tu t'échappes, pas vraiment discrètement, pas non plus sans un regard à Madame, puis un autre à Diamond, et t'enfourches ta bécane, garée devant. Les hurlements du moteur te procurent une satisfaction presque malsaine, parce qu'ils sont plus agréables que ceux de Gengis, et parce que tu sais que tu vas retrouver le silence de la nuit. Alors tu démarres, tranquillement, mais sûrement. Sans vraiment savoir où tu vas.

Ça fait déjà un moment que tu roules. Sans casque bien sûr, ta mauvaise habitude. Tu sens tes cheveux claquer derrière ton crâne, tu sens l'air frais caresser ton visage, et tu te surprends parfois à fermer les yeux. Une seconde. Puis deux. T'es même pas inconscient du danger, tu le fais juste exprès. Pour tenter le diable, voir si il veut te rattraper. Mais rien n'y fait, t'es toujours en vie et tu roules, t'échappant des écumes de Tybee Island pour mieux retrouver l'effervescence de River Street. Les lumières des néons t'agressent la rétine, le brouhaha des touristes alcoolisés se perd en arrière-plan. Tu fais abstraction de tout. Sauf de ton manque de nicotine. Déjà. Faut dire que t'es jamais en manque de drogues dures, puisqu'elles trouvent refuge dans ton chez toi; mais les clopes, elles, ne poussent pas sous des lampes à chaleur. Malheureusement.

Le grondement de ta bécane s'arrête devant un pub; t'as pas vraiment l'habitude d'y aller, tu sais pas non plus s'ils sont encore ouverts, mais tu gardes bon espoir, parce qu'un type vient d'en sortir les poches pleines. À moins qu'il ne s'agisse d'un braqueur un peu trop serein. Mais chacun sa merde et tu t'avances vers l'entrée. Du coin de l'oeil, t'aperçois des silhouettes, il doit être assez tard pour que même les clubs ne ferment leurs portes; mais bingo, le pub est ouvert toute la nuit, sans doute grâce aux touristes. L'affaire est bien vite pliée, tu ressors quelques secondes plus tard. Seulement cette fois les silhouettes te font face et tu remarques que quelque chose cloche. Y'a une nana qui fout une droite à un type. D'abord ça te fait sourire, parce qu'il l'a sans doute mérité; le hic, c'est qu'il se laisse pas faire, qu'il l'emmerde, et vu comme elle se débat, elle n'a pas l'air de le connaître. Tu observes un peu, quelques secondes. Tu jauges le degrés de dangerosité, parce que malgré tout la petite a l'air de se débrouiller, qu'il risque de lâcher prise... Seulement cet enfoiré revient, l'attrape par les cheveux, et là tu comprends que c'est le signal, plus encore lorsqu'elle l'envoie se vautrer dans les poubelles. Parce qu'une nana qui se défend, ça plait pas aux connards de son espèce, et d'expérience, t'as bien peur qu'il décide de la planter, plus encore lorsqu'il s'autorise à la traiter de pute.

Ton cuir jeté sur le siège de ta moto, tu traverses, directement vers le type, sans crier gare, une haine palpable sur les sillons de ton visage. Il a à peine le temps de se relever, à peine le temps de l'ouvrir pour gueuler ses obscénités, que tu lui envoies ton poing dans la gueule. De toutes tes forces. Tellement qu'il en tapisse le sol de son sang. T'as la haine. La haine de voir que son espèce continue d'exister. Parce que les types comme lui n'ont pas le droit de vivre dans le même monde que toi, parce que t'en feras qu'une bouchée, de lui et de ses congénères. « Fils de pute ! Tu vas m'le payer ! » Crochet du gauche. Il n'avait qu'à pas te matter avec sa sale gueule de violeur. Tu le surplombes de toute ta hauteur, de toute ta carrure, de ton visage emplit de haine. Tu lui fais comprendre par ta posture, par ton regard, qu'il a plutôt intérêt à se casser sans demander son reste. Seulement c'est vraiment un petit enfoiré, parce que comme tu l'avais prévu, il s'empare d'un couteau à crans. Couteau qui aurait pu trouver sa place dans la trachée de la nana qui t'observes sur le côté, les yeux ronds, toutefois aussi emplis de haine que les tiens.

« Tu ferais mieux de rentrer chez toi avant de finir à l'hosto, gilipollas. J'te préviens. » Tu relèves tes manches. T'empares une bouteille de verre que tu brises contre les bennes. « Tu veux vraiment qu'on s'la joue comme ça ? » T'as pas peur, jamais. Parce que tu sais que ce type connaît ton nom, qu'il sait que tu pourrais le tuer à mains nues, comme t'aurais pu le faire avec le salaud qui a ruiné ta vie. Tu le devances. Tu t'avances vers lui, bouteille en main, et le faiblard recule, apparemment plus effrayé qu'il ne l'aurait espéré. Il ne t'aura fallu que quelques menaces pour qu'il prenne ses jambes à son cou, non sans vous insulter au passage, la fille et toi. Mais le principal, c'est qu'il se soit cassé, et tu balances la bouteille de verre près des poubelles; un sentiment de satisfaction ancré dans chacun de tes muscles. Le regard toujours sévère. Et tu te tournes vers ladite victime, quoique pas vraiment impressionnée par la scène. « C'était qui ce gars ? Tu le connaissais ? » que tu lances, évaluant du regard les éventuels dégâts que la jeune femme aurait pu subir. Elle n'a rien, si ce n'est une arme blanche dissimulée dans sa manche. « J'pense que tu peux ranger ça. J'suis pas là pour emmerder les gonzesses à la sortie des clubs. » Et d'ailleurs quel club... Tes sourcils se joignent d'incompréhension alors que tes prunelles regagnent l'enseigne du bâtiment. « Gentlemen's club ? T'es une sorte de... danseuse ? » La question se veut tout à fait innocente, mais réellement intéressée par l'histoire qui se cache derrière cet... emploi. Parce qu'elle n'a ni l'apparence, ni l'attitude d'une de ces femmes qui se déhanchent contre quelques billets.

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Dernière édition par Abram Kaspárov le Mer 16 Aoû - 19:56, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: what if we don't have to be tough (abram)   what if we don't have to be tough (abram) EmptyMar 15 Aoû - 0:16


On est au 21e siècle. Les femmes ont une espérance de vie plus longue que les hommes, elles ont plus diplômes, elles ont plus de qualités dans plein de domaines. Pourtant, il y a encore ce type d’hommes, de l’espèce du cro-magnon. Pas celui à qui on a appris “tu trouves une femme, tu l’épouses, tu lui fais des enfants et pendant le reste de ta vie, tu prends soin d’elle.” Pas celui qui s’dit “je suis son homme, je suis censé la protéger”. Non. Plutôt de ceux qui croit toujours en cette histoire de sexe faible. De ceux qui vont même plus loin. Le corps qui devient territoire. La chair qui devient bout d’viande. Rien de plus. Rien de moins. Et Dani n’a souvent été que ça. Traînée sur le carrelage d’une “maison”. Chassée sur le macadam. Heurtée contre le béton. Jetée dans les décombres. Laissée dans l’ombre. Et elle s’y est habituée à tout ça. Elle a appris à rester dans tout ce bourbier, même si elle s’essaye toujours à la résistance, dans ces purs instants de nuit noire… où les rages grognent et où on ne peut qu’écouter les vraies morsures.

Et puis il y a ces moments où la foudre s’abat. Le prédateur qui devient proie. Le tonerre qui éclate et gronde à notre place. Parce qu’il y a toujours quelqu’un de plus fort, quelqu’un qui prendra la place. Elle ne l’a même pas vu arriver. Elle n’a même pas vu le poing se décocher. Y a juste eu ce bruit sourd et reconnaissable d’os contre os, comme si la peau n’existait pas, comme si aucun rempart ne pouvait exister et que seul le sang pouvait sortir de tout ça. Et c’est le cas, c’est vrai. Dani arrive enfin à se concentrer sur la masse de muscles qui s’est interposée et qui frappe encore pour faire taire la vermine. L’annihiler, si elle devait même parier. Il exulte de cette haine qu’elle reconnaît pour le voir dès qu’elle croise son reflet. Ses mots sont faits de roches, probablement comme le reste de sa carcasse. La dureté et l’intransigeance de ce type suintent de sa peau avec férocité. Bris d’os, d’sang, bris d’verre, c’est du pareil au même. Mais même elle, elle recule. Pas vraiment de peur, mais peut-être bien impressionnée. Parce qu’elle le reconnaît enfin. Son histoire avait fait la une des journaux à une époque, et même quand on court les rues, on trouve toujours un bout d’papier journal pour rester connecté au monde. Y a aussi ces boutiques aux devantures encore remplies de vieux moniteurs télé qui diffusent de tout et de rien, mais plutôt utiles pour les vagabonds comme elle. Elle sait qui il est et pourquoi il a réagi alors que d’autres ont passé leur chemin. Et étrangement, ça la calme, la rassure, flambe même à nouveau sa propre rage. En résonnance.

Elle aurait aimé avoir le temps de se relever et l’effrayer elle-même. Le menacer et le planter de ses propres mains. Mais il l’a privé de sa revanche et c’est son regard revêche qui croise sa séverité quand elle se relève. J’le connais pas. C’est juste un client frustré. Ça devrait l’emmerder d’avouer qu’elle a des clients, mais même pas. Pas après le spectacle pitoyable auquel il a assisté. Et c’est comme si elle obtempérait docilement quand elle remballe son canif’ sorti trop tard. Ses sourcils se froncent et sa colère se retourne contre elle pour bouffer ses tripes qui se sont jouées d’elle pendant une seconde, mais une seconde de trop. Un souvenir trop longtemps ignoré et enterré. C’est plutôt poli comme façon d’dire. Qu’elle lâche brutalement. Stripteaseuse. Qu’elle renchérit tout aussi fermement en renfilant sa capuche, comme pour dissimuler tout son être. Mais c’est probablement trop guindé pour un ex-taulard comme toi. Faut pas croire que parce qu’ils ont les moyens de payer le droit d’entrée, de mater des nanas se désapper sur des chorégraphies un peu recherchées, le cul vissé dans des sièges de velours qu’ils n’en sont pas moins des bêtes. Comme elle ou comme lui qu’elle écorche sans gêne en le détaillant. T’es pas censé faire profil bas et éviter les ennuis ? Elle sait qui il est. Abram Kaspárov. Mais elle n’a pas suivi. Si ça se trouve il est en probation. Ou si ça se trouve, il n’en a rien faire de retourner en prison pour n’importe quoi et n’importe qui.
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MessageSujet: Re: what if we don't have to be tough (abram)   what if we don't have to be tough (abram) EmptyMer 16 Aoû - 20:27

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DANI VALENTINE + ABRAM KASPÁROV
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La fille se lève et te fixe par-delà son rideau de boucles brunes. « J’le connais pas. C’est juste un client frustré. » Tes sourcils se joignent. Un client, hein ? Tu crains d'abord le pire, mais les quelques paillettes qui s'échouent sur le coin de ses yeux te font de nouveau tourner la tête vers le club, que tu toises de toute ta hauteur. « C’est plutôt poli comme façon d’dire. Stripteaseuse. » Tu rabats les manches de ton sweat, donnant ton attention à l'inconnue devant toi. « Y'a pas de façon polie de le dire. Être stripteaseuse n'a rien d'une insulte. » Et soudainement tu penses à Ken. Et tu sais que ces gens-là ne font pas ça par plaisir; qu'elle doit être dans la merde. « Mais c’est probablement trop guindé pour un ex-taulard comme toi. » Ah. Encore une qui connaît ton visage. Sans doute aussi ton nom. Mais tu ne fais pas de commentaire. Inutile de ressasser le passé. « Ouais. Sans doute qu'on préfère le contact. » Et d'ailleurs, ta phrase manque cruellement de tact, mais tu t'en fous. Tu sens bien qu'elle n'a pas peur. Pas après ta petite intervention.

« T’es pas censé faire profil bas et éviter les ennuis ? Abram Kaspárov. » Tu soupires, ennuyé par cette vilaine notoriété. Cette admiration ou cette pitié qu'on t'offre alors même que tu n'as rien demandé à personne. Que ton acte n'a rien eu d'admirable, et que tu n'as que faire du côté pitoyable de la chose. « Rien à foutre. » Parce que t'as toujours cette envie, ce besoin de rendre justice par tes propres moyens. T'es un peu comme un super-héros, que t'a dit une gonzesse une fois, mais tu vois pas forcément les choses de cette façon. T'es juste au bon endroit au mauvais moment. Et tu ne vaudrais sans doute pas plus que tous ces connards si tu ne faisais qu'ignorer les faits.

Puis tu changes de sujet, parce que t'aimes pas qu'on parle de toi. Qu'tu ne la connais pas, et qu'elle n'a pas à savoir. « Tu crèches où ? Tu veux que j'te raccompagne ? » Tu désignes ta bécane, sur le trottoir d'en face. Parce que tu connais pas sa situation, et que ton instinct protecteur t'incite à lui proposer, tout naturellement. Vous commencez à marcher en sa direction et t'attrapes bientôt ton cuir, fouillant tes poches. T'en tires un paquet de clope, t'en coinces une entre tes lèvres et tu lui tends le paquet. « T'en veux ? » Elle a le teint frais, les joues pouponnes, et le regard doux. Un instant, tu doutes qu'une nana de la sorte ne puisse consommer son cancer à petit feu; seulement, par politesse, tu gardes la main tendue vers elle. Sait-on jamais. « Si tu veux, on peut juste sillonner dans les rues. C'est ce que j'étais en train de faire avant de m'arrêter ici. J'vagabondais, j'me vidais la tête... ça m'dérange pas que tu grimpes derrière. Mais seulement si t'es pas le genre de nana à pas savoir la fermer deux secondes. » Parce que si c'était pour avoir une Gengis numéro deux cramponnée à toi, t'aurais mieux fait de la fermer. Au fond, ta bonté t'perdra sans doute un jour. Tant pis. Ou tant mieux.

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MessageSujet: Re: what if we don't have to be tough (abram)   what if we don't have to be tough (abram) EmptyMer 23 Aoû - 19:38


Pas de pitié. Pas d’admiration. Plutôt une curiosité mal placée. Parce que les héros, ça n’existe pas. Pas dans sa vie. Même encore maintenant, après ce qui vient de se passer. Dans deux secondes, il aura passer son chemin, elle reprendra le sien et ils s’oublieront comme ils se sont croisés : en un instant.

Tu crèches où ? Pas tes oignons. Tu veux que j'te raccompagne ? Jamais d’la vie. À quoi il joue ? Le sauveur ? Le grand-frère improvisé jusqu’au bout ? Elle fait à ce point pitié ? Alors Dani se renfrogne, ignore ses questions, scelle ses lèvres et se contente d’observer sa moto, le cuir et le métal. La clope est saisie sans un merci, puis soigneusement rangée pour pas l’abîmer, la ressortir plus tard quand elle en aura besoin. Parce que oui, elle ne fume pas, mais c’est toujours utile. Si tu veux, on peut juste sillonner dans les rues. C'est ce que j'étais en train de faire avant de m'arrêter ici. J'vagabondais, j'me vidais la tête... ça m'dérange pas que tu grimpes derrière. Mais seulement si t'es pas le genre de nana à pas savoir la fermer deux secondes. Elle le dévisage comme si il était un extraterrestre et qu’il venait de lui donner la gale. La suspicion s’infiltre dans ses yeux et elle recule d’un pas. C’est pas parce que j’connais ton nom ou qu’tu viens de m’aider que j’vais te suivre sans broncher. Y a c’qu’on appelle la confiance, ce truc abstrait et un peu trop absent d’sa vie. J’te connais pas. Et qu’il ne se méprenne pas. C’est pas d’la peur qu’elle éprouve à son égard. C’est pas parce qu’il doit probablement approcher les deux mètres ou être dix fois plus épais qu’elle -qui a des biceps de cette taille de toute façon ? c’est inhumain. Que dans un sens, c’est une autre forme d’homme des cavernes. Ça n’a rien à voir. C’est juste de la méfiance. Le traitement habituel, accordé gentiment à n’importe qui.

Pourtant, elle comprend l’idée de vagabonder pour se vider l’esprit. Pour ça, Dani marche, court. Encore plus que d’habitude. User ses muscles, c’est ce qui a toujours le mieux fonctionné. Alors visser son cul sur une moto ? Elle a un sérieux doute que ça ait un quelconque effet. Elle n’a d’ailleurs jamais grimpé sur un de ces engins bruyants, intrigants. Elle laisse courir ses yeux sur la bécane avec une toute nouvelle fascination. Ça a l’air lourd, difficile à manier, sauf pour lui évidemment. Ça a des airs de liberté, faut l’avouer. Alors au lieu de le planter là, la métisse s’installe le plus loin possible à l’arrière, ses doigts s’accrochant à la barre métallique dans son dos. Juste un tour. Si il lui voulait du mal, il n’aurait pas pris la peine d’intervenir tout à l’heure. Ou alors il a un plan un peu plus tordu. Mais il sait qu’elle a un couteau et que rien ne l’empêcherait de le planter pendant qu’il conduit si elle avait le moindre doute sur ses intentions. Et tu t’arrêteras à un truc où on peut manger pas cher. Exigence silencieuse. Parce qu’il n’a pas l’air dangereux. Parce qu’elle peut peut-être essayer d’apprendre à connaître quelqu’un comme elle, qui sait ce que c’est d’être entouré de rage, quelqu’un qui sait que pour survivre, il faut la bouffer et l’accueillir cette rage. Peut-être que ça ferait pas de mal, pour une fois.
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MessageSujet: Re: what if we don't have to be tough (abram)   what if we don't have to be tough (abram) EmptySam 26 Aoû - 13:52

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Elle prend ta clope et tu l'observes, surpris, alors qu'elle la range sagement dans la poche de sa veste. Sans doute qu'elle la garde pour plus tard. Tu t'en fous. T'allumes la tienne, t'en prends une grande bouffée et tu l'écoutes râler, comme toutes les meufs. « C’est pas parce que j’connais ton nom ou qu’tu viens de m’aider que j’vais te suivre sans broncher. » Nianiania... Elle recule même d'un pas et tu pouffes discrètement. Sérieux, tu fais peur à ce point ? « J’te connais pas. » Tu tires sur ta clope, adossé contre le mur. Tu regardes les quelques passants qui vous frôlent, ton souffle de tabac comme seul dérangement du silence qui s'installe entre vous. « J’te connais pas non plus. » Et pourtant tu lui proposes, par sympathie. C'est pas parce que t'es un homme que t'es forcément le prédateur. C'est pas parce que t'es une armoire à glace que la gamine peut pas te planter. Elle est armée, pas toi. Et pourtant tu oses. Parce que t'as pas grand chose à perdre, dans le fond.

Seulement, la fille s'approche - de ta bécane, pas de toi - elle observe, elle caresse même légèrement. Et tu laisses faire. Tant qu'elle s'amuse pas à la rayer ou à jouer les hystériques. Sans un regard vers toi, elle s'installe, presque timidement à l'arrière de l'engin, et tu esquisses un sourire. « Juste un tour. » Une petite victoire. « Un tour, c'est plutôt abstrait. On n'est pas sur un circuit. » Tu jettes ta clope déjà rapidement consumée, écrasée sous le poids de ton pied, et tu t'installes à ton tour, aux commandes, relevant le pied de sécurité. T'avances doucement sur le rebord du trottoir et tu fais gronder le moteur; véritable cri de guerre. VRRRR VRRRR ! « Et tu t’arrêteras à un truc où on peut manger pas cher. » « J'AI PAS ENTENDU ! ACCROCHE-TOI ! » Et tu démarres, doucement, le temps qu'elle s'habitue. Qu'elle se décide à garder les mains sur la barre, ou qu'elle flippe et qu'elle s'accroche finalement à tes épaules. D'habitude, c'est Bambi ou Diamond que t'emmènes. L'une s'accrochant à la barre, par habitude; l'autre se cramponnant à ta taille, reposant même sa joue contre ton dos - pas de peur, mais plutôt par affection; une petite fleur au milieu des mauvaises herbes de ce monde.

Ça fait déjà cinq minutes que tu roules. Que tu retrouves le silence de la nuit, l'air caressant ton visage. Derrière toi, pas un mot, pas un son. Tu sais pas si c'est de la peur ou de la tranquillité, alors t'oses une question. « Ça va ? » Simple, efficace et pleine de sens. Pas la peine d'en rajouter. Vous n'êtes pas là pour discuter, mais surtout pour vous vider la tête. Ne rien faire, à deux. Tu ne sais pas qui elle est, tu ne connais rien de sa vie, tu sais pas si elle souffre ou si elle s'en cogne. Et peut-être qu'au fond c'est mieux comme ça. Tu lui offres un tour et tu la revois plus jamais. L'un de ces moments éphémères, imprévus, mais toujours gravés. C'est peut-être ça, les instants de bonheurs. Qu'est-ce que t'en sais ? « D'ailleurs, c'est quoi ton nom ? » Pas celui de scène, le vrai. Celui dont tu te souviendras quand tu repenseras à c'moment; dans cinq ou six mois. Qui sait.

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