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 En apesanteur (nerki)

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Ruby Holmes

Ruby Holmes
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▹ signe particulier : un couteau papillon qu'elle a tendance à dégainer trop vite, béret et marinière pour se donner un look de française décalée, des cheveux bien trop roux et la clope toujours allumée.
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MessageSujet: En apesanteur (nerki)   En apesanteur (nerki) EmptyDim 25 Juin - 17:40

Deux heures du matin et le réveil qui sonne, une fois, deux fois, et je l’éteins le plus vite possible pour éviter de réveiller Adela qui dors un peu plus loin. Elle a des oreilles supersoniques et parfois elle se réveille avant même que moi j’ai pu entendre le bruit. Mais pas ce soir. Ou ce matin. Je la regarde rouler sur son lit, grogner un peu dans son sommeil avant de se détendre de nouveau. Parfait. Sans faire de bruit je me glisse hors de mon lit et attrape mes vêtements pour me changer dans la salle de bain : justaucorps brillant chose que je ne mets jamais devant le reste du monde, trop prude, trop discrète, trop occupée à cacher mon corps. Mais aujourd’hui j’ai besoin de mouvements, et ce ne sont pas mes vêtements trop amples qui vont m’aider à faire ce que j’ai envie de faire. Alors vite je cache le tout avec un jogging et un pull.
Rapidement je relève mes cheveux en chignon, au fond on y croirait presque, sans la canne, une artiste comme les autres et le corps fin et gracieux qui pourrait faire rêver plus d’une ballerine. Sauf que moi ce qui me manque c’est les muscles, c’est la solidité de la chaire, c’est l’assurance de pouvoir m’envoler vers les étoiles avec la force de mes bras. Poupée de porcelaine, qui se brisera au moindre choc. Mais je suis prête à leur prouver le contraire.
Je ne sais pas si c’est la discussion avec Jax, les révélations qu’il m’a faite ou l’engueulade avec Zykki. Je ne sais pas si c’est Halina et ses coups, si c’est l’innocence d’Izia, ou si c’est Merle et sa force de caractère ; Je ne sais pas pourquoi je recommence encore, à vouloir jouer à celles que je ne suis pas. Mais c’est comme ça. Discrètement j’attrape mon sac et me glisse hors de la caravane, m’assurant qu’il n’y ai personne debout encore, à cette heure c’est fort possible certes, mais le cirque est tellement grand la nuit que je risque pas vraiment de croiser grand monde.
Finalement j’atteins le chapiteau de répétition, celui avec le grand bassin qui est monté pour faire répéter les otaries. J’ai ma petite idée et les encouragements de Jax me reviennent. Je suis décidée à y arriver, au moins ce soir, puis demain puis après demain et ainsi de suite, jusqu’à pouvoir montrer aux autres que moi aussi je peux faire quelque chose, autre que broder. Je fais tomber mon sac à terre et enlève mes vêtements pour me retrouver en justaucorps. Je frissonne légèrement en sentant le vent frôler mes jambes nues et mon regard se porte sur celle de droite, cabossée, mal formée, les cicatrices qui ondulent autour de mon genoux. Ce soir elle ne gagnera pas. Ce soir c’est moi qui gagne.
Je n’allume pas la lumière, la lune est suffisante pour m’éclairer, je sais ce que je veux, ce dont j’ai besoin, j’ai fais du repérage pendant toute la semaine. Alors pendant une petite demie heure j’installe la pièce du mieux que je peux, la jambe qui traine derrière mais et la douleur qui remonte jusqu’à ma poitrine mais je ne baisse pas les bras. Je tire le plongeoir, remplie la cuve d’eau, allume les lumières au fond de l’eau. Puis finalement je me hisse sur l’échelle, manque un instant de chuter quand mon pied ripe sur la marche mouillée et me rattrape de justesse au rebord. Pas question. Pas question de rater. Finalement je m’installe sur le rebord, le souffle court, le cœur qui bat à cent à l’heure. C’est pas très haut, ptêtre quatre mètres au dessus du sol mais je me sens déjà gagnante. Je crois que je souris. Oui. Je souris. Tremblante je me relève, me tiens debout sur le rebord de la cuve, avant de me laisser tomber en arrière dans l’eau.
Le froid m’arrache un cri de surprise, glapissement qui résonne dans le chapiteau, qui se transforme bien vite en rire de joie. J’ai toujours aimé nager. C’est ma petite surprise, ma petite spécialité. Mon secret. Sauf que ça ne suffira jamais pour un spectacle, il faut plus, du spectaculaire, et je compte bien le réaliser ce soir.
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MessageSujet: Re: En apesanteur (nerki)   En apesanteur (nerki) EmptyMar 18 Juil - 22:11

Il a perdu la notion du temps, peut-être aussi celle du lieu. Il sait juste qu'il fait nuit et qu'il est pas très loin du cirque – très franchement ça lui suffit. C'est toujours la même chose quand il s'emmêle avec les médicaments, les pilules s'mélangent comme ses pensées et au final il sait plus où il en est. Il sait juste qu'y a trop d'idées qui s'entrechoquent dans sa tête et p't'être que ça fait mal ou p't'être que ça lui donne trop de forces, à vrai dire il sait même plus. Il a pris des trucs différents et il a oublié le nom mais il se souvient que c'est long et imprononçable et très franchement pourquoi on laisse les fabricants choisir des blazes pareils ? Il comprendra jamais. Pas qu'il veuille particulièrement comprendre non plus. Là tout d'suite, la seule chose qui lui importe c'est de marcher sur les lignes. Ou de les éviter. Il sait plus quelle règle il a choisi et il finit par lever les yeux vers le ciel parce que les étoiles, c'est quand même plus classe que le goudron.

Mais selon Zyki, dans c'monde, y a vraiment rien de mieux que le cirque. Alors quand il se rend compte qu'il est enfin arrivé à destination y a un sourire trop large qui vient étirer ses lèvres, ses yeux qui s'illuminent comme chaque fois. Il pourrait s'en lasser, s'y habituer, n'plus trop y faire attention. Pourtant chaque fois son cœur se gonfle et il espère que ça changera jamais.

Et puis il l'entend. D'abord le splash, ensuite le cri, et enfin le rire. Il se tourne dans la direction du chapiteau d'entraînement et il a l'impression que tout est éteint, mais il est persuadé que ça venait d'là – sûrement le grand bassin. C'est un môme. C'est forcément un môme qui a décidé de venir faire un bain de minuit en se croyant sûrement très malin. Il le sait parce qu'il l'a fait tellement de fois qu'à la fin, l'adrénaline n'était même plus au rendez-vous. Avec Jax ils ont même failli se faire prendre plus d'une fois, mais il veut pas penser à ça. De toute façon il a l'esprit tellement embrouillé que pour une fois il s'attarde pas sur le prénom qu'il fait trop souvent mine d'oublier. Il se met simplement en marche, le pas léger et les mains dans les poches, prêt à jouer à l'adulte terrifiant. Peut-être même qu'il réussira à imiter Marek ou même son père – il a essayé plus d'une fois.

Il se faufile discrètement et la première chose qu'il voit c'est la chevelure de jais. Puis la silhouette trop fine. Puis le visage habituellement figé, dont les lèvres sont beaucoup trop étirées. C'est Nergüi et en vingt ans c'est la première fois qu'il la voit sourire comme ça.

Changement de plan. Il a pas besoin d'intimider, maintenant il a plutôt envie d'applaudir ou de rire ou de lui demander si elle fait ça souvent, mais au final il fait aucun des trois. Il reste dans l'ombre pendant qu'elle barbote comme une sirène, et il enlève une chaussure, puis il bataille avec son t-shirt, puis il abandonne et enlève l'autre chaussure, puis il réitère avec son t-shirt et gagne cette fois-ci, puis une chaussette, puis son pantalon et l'autre chaussette en même temps. C'est laborieux, mais il finit en caleçon. Et il fait toujours pas un bruit quand il s'avance, vérifiant qu'elle ne le voit pas, trop occupée à faire il n'sait trop quoi. Ce n'est qu'une fois arrivé au pied de l'échelle qu'il s'annonce enfin. « Alors comme ça tu t'fais une pool party sans m'inviter ? » Il se marre en devinant sa surprise, sauf qu'en réalité il prête pas franchement attention à sa réaction. Il est trop occupé à grimper les marches à toute vitesse, manquant de tomber une fois ou deux. Une fois qu'il est en haut, il lève la voix pour qu'elle l'entende – il fait beaucoup trop de bruit mais il s'en rend même pas compte. « Vise un peu ça ! » Il se place au bord, la regarde, fait mine de taper une pose ridicule. Et puis il s'élance, fait un salto, et atterrit dans l'eau.

Quand il remonte à la surface il s'met à rire comme un môme, visiblement très fier de lui. Et c'est là qu'il réalise. Elle est en justaucorps. Il voit pas très bien parce que les mouvements d'eau rendent son corps flou, mais il reconnaît parfaitement un justaucorps. Nergüi. Justaucorps. C'est deux mots qu'il pensait jamais pouvoir assembler, sauf si on ajoute le verbe coudre au milieu. « Bah regarde t'écoutes mes conseils ! » Il se souvient vaguement lui avoir dit d'aérer ses jambes alors c'est sûrement ça. Peut-être pas. En fait il s'en fout. Il est juste content d'être là, de se baigner, d'autant plus s'il est accompagné. Il aurait jamais cru faire ça avec Nergüi mais clairement, il s'en plaint pas. « T'sais que si Loyal nous crame, on est morts. J'savais pas que t'étais une délinquante. » Et il rigole encore, à lui envoyer de l'eau dessus avec son insouciance habituelle. Mais p't'être que ses yeux sont un peu trop injectés, p't'être que les cernes sous ses yeux sont trop violacés. P't'être qu'il est pas tout à fait comme d'habitude, à parler trop vite et à rien écouter – déjà qu'en temps normal c'est dur de s'faire entendre avec lui.

Elle aussi, elle est pas comme d'habitude. Il l'a vue sourire, il l'a même entendue rire. Elle est en justaucorps et elle se baigne en pleine nuit, avec lui. Faut croire que tout peut arriver. À ce stade elle pourrait peut-être même finir par le complimenter.
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Ruby Holmes

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MessageSujet: Re: En apesanteur (nerki)   En apesanteur (nerki) EmptyLun 24 Juil - 23:08

Je nage, comme une gamine qui retrouve sa liberté. Je nage, je plonge, touche le fond en verre avant de ressortir, encore, encore, tourne sur moi. Je me sens libre, tellement libre, bien plus libre que sur terre. Dans l’eau on s’en fiche de mes jambes, on s’en fiche de ma faiblesse et de mon corps barbouillé de couleurs déprimantes. Dans l’eau j’ai le sourire, j’ai la sensation d’être quelqu’un d’autre, quelqu’un d’entier. Je suis entière. Voilà. J’aimerais que cet instant dur l’éternité, ne pas retourner dans une routine habituelle, en sortir définitivement.
Alors comme ça tu t'fais une pool party sans m'inviter ? Une voix me fait sursauter, pendant un instant je perds pied de surprise je m’enfonce sous l’eau, bataillant pour revenir à la surface, crachouillant quelques gouttes chlorées. Je nage vite vers le bord pour y prendre appuis, et puis aussi pour regarder qui vient de parler.  « Zyki ! » en même temps ça m’aurait pas étonné. Qui d’autre que lui pour venir gâcher mon moment de sérénité hein ? « Va-t-en ! Non t’es pas invité ! » Et bien sur que je ne l’inviterais jamais. Si je devais inviter quelqu’un ça serait Jax, pas Zyki. Y a que Jax pour  me voir comme ça, y a que Jax qu’a le droit à mes rires, à mes sourires. Pas Zyki. Encore moins Zyki à moitié nu qui décide de venir s’incruster là où j’ai pas envie qu’il vienne. J’essaye de ne pas le regarder, de ne lui accorder aucune importance pour qu’il se lasse. Il est comme ça Zyki, si personne le regarde il disparait. Mais j’y arrive pas. C’est plus fort que moi. C’est un Kida, un foutu Kida. Et comme les Kida il brille terriblement, tellement que ça fait mal aux yeux.
Vise un peu ça ! « Arrête d’hurler tu vas nous faire repérer ! » Mais mes mots disparaissent dans les éclaboussures, pas sur qu’il m’ai entendu cet idiot, et l’eau me recouvre une nouvelle fois, me brulant les yeux au passage. Je tousse, essuie mon visage et range une mèche rebelle derrière mon oreille. Il m’agace. Il m’énerve. Il a le don de transformer tout en un jeu, en quelque chose qui sera mieux pour lui plutôt que pour les autres, un truc où il peut exceller. Stupide Zyki, je hurlerais bien si j’avais pas peur de réveiller les gens.
Je reste dans mon coin, accroché au bord, comme si tout le reste de la piscine était empoisonné. Qu’il vienne pas dans mon coin, je suis prête à le mordre s’il décide de m’embêter. Notre dernière rencontre s’est pas vraiment bien passé et j’ai peur, tellement peur que ça recommence pareille, que je finisse en larme et blessée, humiliée sur son épaule à le supplier de rentrer. J’ai pas envie. J’ai plus envie.  Bah regarde t'écoutes mes conseils ! De quoi ? Et soudain je vois son regard sur mon corps, sur le tissus brillant et moulant. Comme une gamine je plonge sous l’eau, ne laissant que la tête dépasser. Regarde pas, regarde pas. Y a que deux personnes qui ont vu autant de peau. Deux personnes qui comptent vraiment. Adela évidemment, et puis Jax. Personne d’autre en dehors des médecins. J’aime pas qu’il puisse voir mon corps, et jme sens rougir de la tête aux pieds. Putain. C’est terrible. « Quels conseils, j’me souviens pas, je vois pas de quoi tu parles » que je murmure avant de soupirer, incapable de tenir son regard. Au final ptêtre que son regard c’était mieux, parce que je me retrouve à fixer son torse comme une idiote et je crois que je deviens encore plus rouge. Rouge écrevisse, rouge homard, rouge pas glamour quoi. Je l’ai déjà vu trop de fois comme ça quand je prenais les mesures pour ses costumes où quand je faisais les essayages. Mais là c’est différent. Là c’est nous deux dans l’eau et personne d’autre et jme sens soudain extrêmement mal à l’aise. « T'sais que si Loyal nous crame, on est morts. J'savais pas que t'étais une délinquante « T’es mort, je dirais que tu m’as forcé et que tu m’as lancé dans l’eau. Il me croira bien plus que toi »  que je bafouille avant de plonger sous l’eau complètement, nageant jusqu’à l’autre côté du réservoir avant de ressortir. « Et je suis pas délinquante nous confond pas. »  Non. Pas délinquante du tout. Tu parles. En réalité j’ai rien d’innocent, je suis pas la petite souris que tout le monde s’imagine, pas cette gosse toute timide qui disparait dans un coin quand on l’ignore. Y a trop de choses que je dis pas, trop d’aventures solitaires que je raconte pas. Alors que Zyki me prenne la main dans le sac je sais pas si c’est bien ou si c’est mal, mais au fond je sais que personne ne l’écoutera s’il décide de parler. Une chance pour moi.
Je laisse passer un temps, me remet à nager pour pas frissonner, avant de me rapprocher un peu plus, comme si j’étais certaine qu’il n’allait pas me mordre. Sans doute que je lui filerait entre les doigts s’il essayait de toute façon, je suis bien plus rapide dans l’eau que sur terre et sans doute qu’il l’ignore encore.  « Tu fais quoi ici Zyki. Il est tard, tu devrais dormir »  j’ai le cœur qui bat un peu moins vite, les nerfs qui ne menacent plus d’exploser. L’eau m’apaise comme toujours et ptêtre que ça me rend plus encline à parler. Puis j’ai encore le goût amer de notre dispute, de ses mots, des miens, et j’aimerais essayer d’adoucir un peu les angles, être moins rugueuse, juste une fois, pour essayer. Encore un peu, juste de quoi le dévisager, lui et son visage de grand enfant débile, sourire qui vaut dix millions de dollars et l’envie de le lui arracher pour le garder. Puis y a ses yeux. Ses yeux un peu fous, ses yeux différents, les pupilles dilatés et l’impression que y a un truc qui cloche, un truc pas normal.  « T’as pris un truc ? »  que je finis par murmurer tout bas, comme quand je m’adresse aux lions du cirque, pour les mettre en confiance, ne pas me faire mordre. Parce qu’il agit un peu comme ça Zyki, dès qu’on prononce le mot cachets.
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MessageSujet: Re: En apesanteur (nerki)   En apesanteur (nerki) EmptyLun 14 Aoû - 20:02

« Zyki ! Va-t-en ! Non t’es pas invité ! » P't'être bien qu'il devrait être blessé – elle y met trop de hargne, on dirait qu'elle donnerait tout pour le voir se tirer. Mais ça l'fait juste rire, parce qu'elle a ce petit air indigné, son nez plissé ses sourcils froncés ses yeux prêts à le mitrailler. « Bah non, maintenant que j'suis là autant en profiter ! » Et c'est bien ce qu'il a l'intention de faire en grimpant tout en haut du plongeoir, l'air aussi fier qu'un môme qui montre le nouveau jouet qu'on lui a acheté. Il en profite même pour frimer, à prendre la pause et faire un salto pour disparaître sous l'eau. Il entend vaguement la voix de Nergüi résonner et ça sonne comme si elle l'engueulait mais il comprend rien et il s'en fout. Sûrement qu'elle sait qu'il s'en fout.

Elle se cramponne au bord du bassin à l'opposé d'lui, à s'agripper comme si elle avait peur de se noyer ou de le voir approcher. C'est à s'demander quelle option la terrifie le plus et il continue de rire en la regardant. Elle a cet air un peu sauvage qu'il ne prend pourtant pas au sérieux, comme un p'tit chien qui se prend pour un molosse en montrant les dents. Elle lui fait pas peur Nergüi, elle lui a jamais fait peur, même quand elle sort les crocs même quand elle griffe même quand elle utilise les mots comme des couteaux. Là tout d'suite il a surtout l'impression que c'est lui qui l'effraie même s'il est pas sûr de comprendre pourquoi. Une remarque et déjà elle plonge sous l'eau comme si elle voulait pas qu'il la regarde comme si elle voulait pas qu'on la voit. « Quels conseils, j’me souviens pas, je vois pas de quoi tu parles. » Il hausse un peu les sourcils – d'habitude c'est lui qui se souvient de rien et pas l'inverse. Pour le coup il est presque fier, pour une fois que c'est lui qui a les clés en main il va s'faire un plaisir de lui rafraîchir la mémoire. « Mais si, quand j't'ai dit de montrer tes jambes ou j'sais plus quoi là. D'ailleurs tu fais même mieux en fait, on voit tout et c'est plutôt cool. » Le pire c'est qu'il est sincère, les lèvres étirées en grand, une étincelle dans l'fond des yeux. Il est content d'la voir comme ça parce qu'une part de lui sait que c'est un privilège. Il sait aussi que si elle avait le choix elle l'aurait jamais laissé assister à ça.

Et puis elle prend des couleurs Nergüi, on dirait qu'elle vire au rouge et il est pas sûr de tout piger mais encore une fois il peut pas s'empêcher d'se marrer. « Eh respire, on dirait qu'tu vas exploser là. » P't'être que c'est le manque d'air, p't'être qu'elle retient sa respiration pour pas le tuer. Il en sait rien et de toute façon il a déjà oublié.

« T’es mort, je dirais que tu m’as forcée et que tu m’as lancée dans l’eau. Il me croira bien plus que toi. » Elle menace et pourtant il se marre toujours autant. « Ah ouais ? Et tu lui diras qu'c'est moi qui t'ai enfilé le justaucorps de force aussi ? » Tout l'monde sait qu'elle met pas des trucs comme ça Nergüi, elle en met jamais et il aimerait bien voir la tête de Mr Loyal s'il découvrait ça. Et même si elle mettait ses menaces à exécution, ça l'dérangerait pas. Il se fout bien d'avoir des ennuis il a l'habitude il n'fait que ça, il fait partie des plus turbulents du cirque et elle le sait. C'est pas ça qui va l'faire reculer. « Et je suis pas délinquante nous confonds pas. » Il arque un sourcil comme un défi, parce qu'il sait très bien qu'elle est pas aussi sage qu'elle en a l'air. Il l'a toujours su et il comprend même pas comment on peut penser qu'elle est un ange – ça lui paraît tellement absurde. « Pia allez arrête de mentir, j'sais très bien qu't'es pas sage. »

Il enfouit son visage à moitié sous l'eau, bloquant sa bouche et son nez pour voir combien d'temps il peut tenir sans respirer. Il est surpris d'voir que son endurance est si mauvaise – d'habitude il tient plus de dix foutues secondes. Et il sait pas si c'est parce qu'il arrive pas à se concentrer ou parce qu'il est trop excité ou parce que son cœur bat de ses tempes jusque sous ses ongles, il le sent partout partout partout il se sent comme une bombe dont le décompte est presque terminé. « Tu fais quoi ici Zyki. Il est tard, tu devrais dormir. » La voix de Nergüi l'ramène subitement sur terre – encore une fois il l'avait presque oubliée. Et ça l'fait sourire parce qu'elle est là parce qu'elle mord pas, elle a l'air presque calme. « J'sais pas. J'me baladais et j'ai entendu du bruit donc j'suis venu voir c'que c'était. » C'est pas une heure pour se balader, c'est juste qu'il rentrait d'il ne sait trop où et il est pas assez fatigué pour aller s'coucher. En cette seconde il a l'impression qu'il ne sera plus jamais fatigué comme s'il avait un pouvoir comme s'il était immunisé ; dans l'fond il sait que c'est juste à cause des cachets.

Elle le regarde et il sourit, elle le regarde et il essaie d'faire pareil mais ses yeux ont du mal à faire le point. « T’as pris un truc ? » C'est qu'un murmure et sur le coup il est pas sûr d'avoir entendu ou même compris, il penche la tête sur le côté avec un air un peu paumé. « Hein ? » Prendre un truc ça veut rien dire, c'est trop vaste comme question et son cerveau mouline à l'envers, il arrive pas à traiter l'information il arrive pas à comprendre ce qu'elle veut dire. « Quoi comme truc ? De quoi tu parles ? » Et puis ça l'frappe. Le regard qu'elle a, la façon dont elle s'attarde sur ses traits sur ses yeux on dirait presque qu'elle est en train de l'analyser. Comme le font tous ceux qui s'inquiètent au sujet d'ses médocs. Son visage change instantanément, les traits qui se durcissent et les prunelles qui s'assombrissent, il a perdu son sourire il a perdu son insouciance. « Tu vas pas t'y mettre toi aussi, p'tain. » Il pige pas pourquoi tout l'monde veut lui faire la morale à ce sujet – même Jax a osé essayer.

Il gère. Il gère parfaitement.

« Explique-moi c'que tu fous dans la flotte en pleine nuit au lieu d'vouloir me sermonner. » C'est un peu trop ferme un peu trop dur, ses poings serrés ses mâchoires crispées. Pourtant l'interrogation est sincère, il comprend pas ce qu'elle fiche ici Nergüi. C'est pas son genre de venir jouer à la sirène, même en pleine nuit.
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MessageSujet: Re: En apesanteur (nerki)   En apesanteur (nerki) EmptyVen 25 Aoû - 23:41

Bah non, maintenant que j'suis là autant en profiter ! Non va-t’en que j’ai envie de hurler, de lui cracher à la figure. C’est mon heure à moi, pas la sienne, c’est ma solitude et pas lui qui vient tout gacher. Va-t’en Zyki parce que je sais comment tout ça va se terminer : mal. Extrêmement mal. Comme à chaque fois qu’on se retrouve à danser ce tango insensé. Pourtant il n’en fait rien, il se contente de plonger dans l’eau, hurlement victorieux et moi qui voudrait crever, disparaitre, être en paix. Parce que je sais pertinemment qu’on va finir comme la dernière fois, moi à gueuler, lui à râler, de nouveau on va s’embraser et ça sera pas joli à regarder.
Il commence déjà, les mots qui sortent trop vite et le sourire qui s’étale sur son visage quand il regarde ma tenue. Merde. Manquerait plus qu’il pense que c’est grâce à lui que je suis comme ça. Pas question, putain, pas question. Pourtant je vois déjà les connexions qui se font dans son cerveau fatigué, la fierté dans son regard, j’en crèverais de honte. Mais si, quand j't'ai dit de montrer tes jambes ou j'sais plus quoi là. D'ailleurs tu fais même mieux en fait, on voit tout et c'est plutôt cool. ou j’sais plus quoi là. C’est ça le problème Zyki que j’ai envie de hurler. C’est ton : j’sais plus quoi. Tu te souviens jamais. Jamais. Jamais. Ca sert à quoi tout ça hein ? Sois mon assistante Nergüi, ça sera bien tu verras menteur, menteur, tu t’en souviens déjà plus. Mais de toute façon c’est pas pour lui tout ça, c’est pour personne d’autre que moi. « On voit rien, regarde pas. » ça claque dans l’air, sec, je voudrais disparaitre, rendre l’eau opaque, qu’il ne puisse pas regarder mes jambes, ma peau, mes muscles. Ces foutus muscles. Et les ribambelles de trainées blanches gravées sur la peau, souvenir de toutes les fois où j’ai voulu jouer à Icare et que je me suis retrouvée face contre terre. Et le rouge qui monte, encore, encore, la honte, la gêne. Arrête s’il te plait. Pas pour rien que je porte des robes trop longues, des vêtements trop amples, mais sans doute que le mot pudeur n’a jamais fait parti du vocabulaire de Zyki. Toujours à se trimballer à moitié nu dans le cirque, sans aucune gêne, le sourire de débile sur le visage quand quelqu’un ose le complimenter. Plutôt crever. Eh respire, on dirait qu'tu vas exploser là. Bien sur que je vais exploser, comme toute personne censée qui passe plus de trois minute en présence de Zyki. « Je respire, laisse moi tranquille à la fin » ouais. A la fin. Peut être que si je suis extrêmement désagréable – pour changer – il me laissera tranquille, il trouvera tout ça barbant et sortira de l’eau à la recherche d’une proie plus conviviale.
Mais ça marche pas. Ca ne marche jamais. Il est pire qu’un chien qui reste attaché à l’os qu’on vient de lui lancer. Foutu clebs. (b] Ah ouais ? Et tu lui diras qu'c'est moi qui t'ai enfilé le justaucorps de force aussi ?[/b] « Pourquoi pas, j’ai l’imagination fertile, me suffira de dire que tu m’as menacé, que j’ai perdu un pari stupide, que tu m’as embarqué dans un truc débile » et le pire c’est que ça passera surement, qu’au final c’est Zyki qu’on blâmera si je verse mes larmes de crocodile, si je joue la comédie comme à chaque fois. Pia allez arrête de mentir, j'sais très bien qu't'es pas sage. Bien sur que non je ne suis pas sage. Faut être stupide pour le croire. Pourtant c’est l’image qui me colle à la peau, jolie Pia, poupée silence, bonniche silencieuse qui courbe le dos. Je comprends pas comment Zyki arrive à comprendre que y a plus que ça. De tout le cirque c’est lui le plus stupide pourtant. Mais ça prend pas. Et je ne sais pas pourquoi, mais au fond y a une part de moi qui aime ça. Léger sourire qui flotte sur mon visage, le temps d’un instant, les restes d’euphorie sans doute qui m’empêchent de le réprimer. « Toi peut être mais pas Monsieur Loyal, c’est là-dessus que repose mon succès » haussement d’épaule, c’est moi qui gagne cette partie, et je la gagnerais toujours. Je n’ai peut être pas l’agilité et la grâce nécessaire pour briller sur les planches, mais moi j’ai un cerveau qui pense, qui tourne constamment, et une facilité pour le théâtre qui m’étonne constamment.

J'sais pas. J'me baladais et j'ai entendu du bruit donc j'suis venu voir c'que c'était. Je nage un peu vers lui, le regarde faire le con dans l’eau, soupire quand j’entends son explication. Pas si discrète que je le pensais, peut être que la prochaine fois je m’organiserais mieux, je ferais en sorte que ça foire pas. Parce que pas question de continuer à m’entrainer tant qu’il est là dans l’eau, il se moquerait, sans doute, et ça finirait par me décourager. Je me connais, je le connais. C’est comme ça. Alors à la place je l’observe, fixe ses yeux et lui qui essaye de faire de même. Essaye. Ca tourne pas rond dans sa caboche, je le vois bien, c’est les pilules qu’il bouffe un peu n’importe comment. Même pas capable de prendre sa santé sérieusement, c’est à vous désespérer. Hein ? Fais pas le con Zyki, tu m’as parfaitement entendue. Quoi comme truc ? De quoi tu parles ? « T’es usant Zyki, te rend pas plus stupide que tu ne l’es, c’est mon rôle ça » déjà la lassitude dans ma voix, je finis par combler la distance entre nous, les mains qui s’agrippent au bord pour ne pas chuter, parce que mes jambes commencent déjà à fatiguer.
Je vois qu’il finit par comprendre, son regard qui devient soudain trop sérieux, l’ennui ou la colère dans son visage, comme un gosse pris en faute par ses parents. Tu vas pas t'y mettre toi aussi, p'tain. ah. Quelqu’un d’autre lui a fait la remarque ? Au hasard je devine Jax. Il a beau dire ce qu’il veut, je sais très bien ce qu’il pense de Zyki, et ce que Zyki pense de lui. C’est peut être des cendres leur relation, mais elles sont encore chaudes, et prête à rallumer un feu au moindre signal. Je soupire doucement en secouant la tête. « J’ai rien dit. Je demande juste si t’as pris un truc ou t’es juste plus con que d’habitude » parce que c’est pas mes affaires, c’est pas à moi de gérer ça, et sans doute que même si je devais lui en parler il ne m’écouterais pas. Chui pas grand-chose pour lui, rien que la gamine à emmerder quand il s’ennui, les souvenirs de nous trois gosses quand Jax et lui étaient encore amis.
Explique-moi c'que tu fous dans la flotte en pleine nuit au lieu d'vouloir me sermonner. J’aime pas son ton. J’aime pas son regard. J’aime pas le fait qu’il pense que je lui dois des explications. Putain. Ça dérape déjà, ce fut rapide pas vrai ? Plus vite que je ne l’aurais pensé. « Je te sermonne pas, t’es parano » je relache le bord, plonge vers le fond, un instant, combien, une minute ou deux, encore, encore, jusqu’à ce que mes poumons prennent feu. J’ai les yeux ouverts, cherche le calme un instant dans le silence abyssal. Je voudrais pouvoir passer une éternité ici, mais l’absence de branchies me force à remonter, fendre la surface, respirer. Je me remet à nager, tourne autour de Zyki un instant, le silence toujours. Sans doute que ça va l’agacer. Tant mieux. J’espère que ça l’agace de ne pas savoir. Il ne mérite que ça, pour toutes les fois où il m’a fait disjoncter.
Finalement je m’arrête, me laisse porter à la surface, étoile à la dérive j’écarte les bras et les jambes, les yeux rivés sur le plafond du chapiteau. « J’ai rien à t’expliquer Zyki, quand est-ce que tu vas comprendre ça, je ne dois rien » comme je ne dois rien à personne dans ce foutu cirque, sauf à Adela et la vie qu’elle m’a donnée, sauf à Jax et l’amour dans lequel il m’a entouré. « J’ai pas le droit d’avoir envie de nager ? » de nouveau je me retrouve à la verticale, le regard qui vient se poser dans le sien, qu’il ose me dire le contraire. Je passe une main dans mes cheveux, les rejette en arrière avant de soupirer. « Tu vas le raconter à tout le monde Zyki ? Ou ça peut être notre secret. Tu dis rien, je dis rien… » quelques centimètres comblés à la brasse, mon doigt qui se pose sur son torse « tu sais à propos de tes cachets » et le sourire qui s’étire sur mon visage, satisfaite, parce que je sais que ça je peux le contrôler. Rien qu’un peu, ne pas chuter.
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MessageSujet: Re: En apesanteur (nerki)   En apesanteur (nerki) EmptyVen 29 Sep - 17:01

« On voit rien, regarde pas. » Il sait pas pourquoi elle est si sèche Nergüi, c'est toujours pareil dès qu'il pose un peu trop ses yeux sur elle. Chaque fois on dirait qu'elle voudrait disparaître et s'faire engloutir sous la terre, sans qu'il ait jamais vraiment pigé pourquoi. Faut croire qu'ils sont pas faits pour s'comprendre, pour lui Nergüi c'est un mystère et souvent il s'dit qu'il la percera jamais à jour. P't'être que ça le dérange pas. P't'être que ça lui va très bien comme ça.

Et elle râle Nergüi, elle fait ce qu'elle fait de mieux à bougonner et tirer la tronche et lui dire de la laisser. Mais il obéit pas il obéit jamais, surtout quand il arrive plus à remettre ses pensées à l'endroit. Tant pis si elle devient rouge, de colère ou de honte ou de gêne ou d'il ne sait quoi, il arrive pas à identifier et trois secondes après il a déjà tout oublié. Tout sauf la menace qui pèse dans sa voix quand elle promet de l'dénoncer à sa place – pourtant même ça, ça suffit pas à lui faire perdre son foutu sourire. « Pourquoi pas, j’ai l’imagination fertile, me suffira de dire que tu m’as menacée, que j’ai perdu un pari stupide, que tu m’as embarquée dans un truc débile. » Ça pourrait presque être crédible parce que c'est ce qu'il fait à longueur de temps, entraîner les gens. Il les emmène avec lui dans les tourbillons qu'il maîtrise pas et il sait jamais comment ça s'finit ; le plus souvent il les perd en chemin sans même le voir. Pourtant avec Nergüi il trouve ça absurde, l'impression qu'elle est trop loin pour ça, enfermée quelque part dans sa tour d'épines il peut pas l'atteindre, pas vraiment. Alors s'il devait embarquer quelqu'un dans ses méandres ça serait pas elle, il est persuadé qu'il n'y arriverait pas même s'il le voulait. « Ben fais-le alors. Dis que tout est de ma faute, j'm'en fous un peu. Quand je serai puni j'viendrai te faire culpabiliser. » Son visage se fend d'un large sourire à nouveau pourtant il est sérieux, la promesse est planquée quelque part entre les lignes – si elle le condamne il la lâchera pas, jusqu'à ce qu'elle en devienne folle jusqu'à ce qu'elle l'engueule à s'en péter la voix.

Nergüi c'est un mystère pourtant faut croire que derrière les apparences il voit clair. Il sait combien faut pas s'fier à ses traits angéliques, il sait qu'elle n'a d'innocent que les airs pas le cœur – là-dedans y a des fauves y a des éclairs, c'est pas une poupée, juste une sauvage. « Toi peut-être mais pas Monsieur Loyal, c’est là-dessus que repose mon succès. » Elle hausse les épaules et il l'imite, parce que ça aussi il s'en fiche. Elle peut jouer la gosse frêle et sage autant qu'elle veut, il va pas l'en empêcher. Mais il sait. Et elle sait qu'il sait. «  Cool. Continue de mentir alors, j'me ferai engueuler à ta place c'est pas grave. » C'est qu'une formalité pour lui, une foutue habitude. Depuis qu'il est môme on entend son prénom résonner d'un bout à l'autre du cirque, les Alojzy beuglés feulés crachés qui ont fatigué tout l'monde jusqu'à ce qu'on doive utiliser un raccourci, jusqu'à ce qu'il devienne Zyki. Un peu plus un peu moins ça fera pas de différence, il a beau être plus vieux il est pas moins turbulent, sûrement que ça n'fait même qu'empirer avec le temps. Alors si Nergüi veut donner plus de raisons qu'on lui tape sur les doigts elle peut, ça lui fait pas peur. Mais faut pas croire qu'elle s'en sortira en toute impunité. Lui aussi, il sait jouer.

« T’es usant Zyki, te rends pas plus stupide que tu ne l’es, c’est mon rôle ça. » Ça l'fait rire et pour seule réponse, il fait claquer sa main dans l'eau de manière à l'éclabousser. Mais pour une fois l'insouciance disparaît – elle s'évapore à la seconde où il comprend de quoi elle veut parler. Ça l'fatigue ces histoires, il veut plus qu'on l'emmerde avec ses médocs alors qu'il gère il sait ce qu'il fait. Et même si c'est faux il ne le voit pas, à ses yeux tout va bien et tant pis s'il doit ignorer les signaux de détresse, son corps qui l'alerte ses cellules qui protestent, il s'en fout.

Il va bien. Parfaitement bien. À force de le répéter, ça deviendra peut-être vrai.

« J’ai rien dit. Je demande juste si t’as pris un truc ou si t’es juste plus con que d’habitude. » Cette fois il a pas envie de rire, ni même de sourire. Ses traits sont durs ses mâchoires se serrent, il a aucune envie de répondre. Alors il se borne à lever les yeux au ciel comme un sale gosse exaspéré, petit con qui n'veut rien écouter. « Je te sermonne pas, t’es parano. » P't'être bien qu'il l'est un peu, malgré lui. P't'être bien que ses pilules emmêlées lui soufflent des résidus de folie. De toute façon il a pas le temps de répondre, Nergüi a disparu et il l'a même pas vue partir. Il sait juste qu'il la cherche du regard et elle est pas là, ni dehors ni face à lui et ses yeux n'font toujours pas le point correctement. Pupilles dilatées cervelle explosée, il fronce les sourcils en s'demandant s'il a rêvé sa présence ou si elle se révèle juste être meilleure magicienne que lui.

Et puis soudain elle est là et il se sent con, pourquoi il a pas pensé à regarder sous l'eau ?
Il a l'impression qu'elle y est restée une éternité, p't'être même que c'est vrai.

Elle fait la planche ou l'étoile de mer il sait pas trop, il la regarde flotter avec l'impression que s'il tente la même chose il va s'noyer. « J’ai rien à t’expliquer Zyki, quand est-ce que tu vas comprendre ça, je ne te dois rien. » C'est vrai il le sait, il a jamais pensé le contraire, c'est juste qu'il est curieux. C'est juste qu'il veut savoir parce qu'il est presque sûr d'être tombé sur un secret de Nergüi et ça, ça s'refuse pas. « J’ai pas le droit d’avoir envie de nager ? » Il hausse les épaules avant d'reculer, appuyant son dos contre la paroi, levant les bras pour les caler sur le rebord en s'étirant avec la paresse d'un chat. « Si, mais d'habitude ça s'fait pas en pleine nuit dans le bassin d'entraînement. Pourquoi tu t'caches ? » Il trouve pas ça logique, Nergüi elle transgresse pas les règles juste pour le plaisir de le faire, elle fait pas comme lui comme la plupart des gosses du cirque. Si elle est là y a une vraie raison il en est persuadé, mais il est pas foutu de réfléchir, à peine capable de tenir un semblant de discussion.

Son cerveau qui se déconnecte puis se reconnecte encore et encore, le système proche de la surchauffe alors qu'il fixe un point invisible comme si Nergüi n'était même plus là. « Tu vas le raconter à tout le monde Zyki ? Ou ça peut être notre secret. Tu dis rien, je dis rien... » Il la regarde s'approcher et il voit son index appuyer contre son torse mais il le sent même pas. Il sait pas si c'est parce qu'elle a pas de force ou parce qu'il a chaud ou bien trop froid, ou peut-être que ses nerfs s'mettent juste à dérailler comme sa tête. « Tu sais à propos de tes cachets. » Bingo – elle a enfin réussi à l'agacer parce que c'est l'sujet à ne pas aborder, celui qui le force à réfléchir et expliquer et se justifier, ça l'énerve et il aime pas ça. Il a pas envie d'en parler, pas envie qu'on continue à le titiller. « Tu m'saoules. » Le ton est las mais l'intention est sincère, ça ressemble à un cri du cœur. « Y a plein d'gens qui savent pour les médocs, pourquoi vous pigez pas que j'm'en fiche et que c'est pas vos histoires ? T'as qu'à coller une affiche sur chaque caravane c'est pareil. » C'est pas vraiment un secret, c'est juste qu'il veut pas aborder le sujet. C'est sa vie, sa responsabilité, on dirait qu'il veut s'prouver qu'il est capable de se gérer alors que tout l'monde lui répète le contraire. « Moi j'viens pas te faire chier pour ta canne et tes jambes, alors me fais pas chier non plus. » Il sait que c'est sensible pour elle aussi – dès qu'il en parle elle se renfrogne elle sort les crocs, même s'il la complimente. Alors elle devrait comprendre, peut-être même mieux que les autres.

« J'suis pas une balance, t'es débile. » Il a aucun intérêt à la dénoncer, au contraire il a plutôt envie d'garder ça entre eux. Elle fait ce qu'elle veut ça lui pose pas de problème, il voulait juste savoir pourquoi elle attend la nuit pour venir jouer la sirène. Ça lui fait oublier les piques et la canne et tout le venin qu'elle crache à longueur de journée. Il s'en fout Zyki, il veut juste profiter.

« Eh, tu sais faire les saltos ? »
Il oublie tout, même le nombre de fois où Nergüi s'est brisé les os.
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MessageSujet: Re: En apesanteur (nerki)   En apesanteur (nerki) EmptyDim 8 Oct - 0:41

Ben fais-le alors. Dis que tout est de ma faute, j'm'en fous un peu. Quand je serai puni j'viendrai te faire culpabiliser. Si j’étais Superman, surement que Zyki serait ma kryptonite. Oui. Ma putain de kryptonite. Y a que lui qui arrive à me mettre dans états pareils et sur qui je n’ai aucune emprise. Même Halina j’arrive à faire quelque chose avec elle. Mais lui ? Bon sang. C’est comme parler à un mur, ou alors à un sourd, tu dis un truc il comprend l’inverse, toujours une réponse à tout, il se laisse pas faire. Même pas sur qu’il en soit conscient, le genre de génie qui s’ignore, putain ça en foutrait plus d’un sur le cul. « T’auras du travail, tu sais bien que j’ai pas de cœur, donc bonne chance pour me faire culpabiliser » parce que je suis pas aussi docile, pas aussi fragile, que je suis une poupée de porcelaine avec un squelette en acier trempé. On ne me désosse pas si facilement. Même lui. Quoi que.
Le pire dans tout ça c’est qu’il continue, sale gosse qui se fout de tout, j’ai beau lui cracher mon venin il revient à la charge, hausse les épaules. Jm’en fous qu’il hurle sans ouvrir la bouche. C’est ça le pire. Parce que moi je ne m’en fous pas. Parce que moi j’ai mal de me faire surprendre comme ça, de frapper dans le vide sans rien toucher en retour. Ce n’est même plus que ça m’exaspère. Ca me rend triste. Ca me rappelle que je suis seule. Cool. Continue de mentir alors, j'me ferai engueuler à ta place c'est pas grave. Voilà, bim dans le cœur, la solitude encore. Je mens et il s’en fout. Chui invisible, même aux yeux de ceux qui prétendent me voir. Parfois je me demande ce qu’il faudrait que je fasse pour qu’ils m’entendent, parce que pleurer ou hurler ne semble pas suffisant.
Et ça me rend mauvaise de me sentir comme ça, j’appuis sur des points trop sensibles, même pour lui, je pousse trop loin, écrase les limites. Un jour je le regretterais. Mais là tout de suite je continue d’attaquer et lui qui renvoi la balle, fait claquer sa main contre la surface de l’eau en envoyant des éclaboussures un peu partout. Si seulement c’était aussi simple. Mais ça ne l’est pas. Alors je plonge dans l’eau, sous l’eau, me coupe un instant de lui et du reste du monde pour me réfugier dans ma bulle. Oui, ma bulle. Beaucoup pensent à tort et à travers que ma bulle c’est ma caravane, quand je me réfugie dans les tissus pour broder et assembler. Ils se trompent. Ma bulle c’est l’eau, ça l’a toujours été, le besoin d’aller voir la mère, l’océan, les lacs ou les rivières de plus prêt à chaque nouvelle ville visitée. Je m’y sens chez moi. Mais au bout d’un moment faut remonter, sous peine de rester à jamais au fond de l’eau.
Si, mais d'habitude ça s'fait pas en pleine nuit dans le bassin d'entraînement. Pourquoi tu t'caches ? Il comprendra jamais. Discussion stérile qui résonne douloureusement avec celle qu’on a eu au bar. Si je lui explique que je ne peux pas, il me dira que c’est moi qui m’imagine des trucs. Alors qu’encore une fois je n’imagine rien. Malheureusement. Je regarde le plafond, me tais un instant, cherchant mes mots. « Parce que le jour je n’ai pas le temps » menteuse menteuse, mais surement que ça suffira, il ira jamais chercher plus loin Zyki. « Trop occupée à recoudre tes costumes parce que t’arrête pas de les trouer » à faire je ne sais quoi, à se rouler par terre ou à tacher ses chemises avec de l’huile de moteur. Un vrai cauchemar ambulant.
Je finis par noyer le poisson, usée, fatiguée, je l’attaque sur ce que je sais, joue le même air de violon : foutue maitre chanteuse qui ne sait même pas argumenter. Tu m'saoules. Toi aussi connard, c’est réciproque. Mais pour une fois c’est lui qui le dit et pas moi, ça me surprend. Y a plein d'gens qui savent pour les médocs, pourquoi vous pigez pas que j'm'en fiche et que c'est pas vos histoires ? T'as qu'à coller une affiche sur chaque caravane c'est pareil. Je le dévisage, surprise, le laisse parler parce que je n’ai pas l’habitude de le voir se fâcher. Ou du moins montrer un quelconque énervement. J’ai l’impression d’avoir touché un truc, une faille, une faiblesse. Moi j'viens pas te faire chier pour ta canne et tes jambes, alors me fais pas chier non plus. Sauf que déjà il me renvoi le truc à la gueule, me rappelle qui je suis, la douleur dans mon corps. C’est vache. C’est lâche. On se ressemble ce soir. « Je te saoule ? T’as un petit aperçut de ce que tu me fais subir au quotidien » que je marmonne avant de reprendre « putain mais tu sais très bien que je vais rien dire, j’ai pas que ça à foutre, c’est juste que clairement tu fais de la merde avec et ça va te jouer des tours » je hausse les épaules « mais bon hein, qu’est-ce que je s’en sais. J’te ferais plus chier avec ça. Peut être que toi tu feras la même » et qu’il me laissera tranquille, dans ma bulle de solitude, sans essayer de me tirer hors de l’eau pour danser ou chanter. Alors pourquoi est-ce que j’ai envie de retirer mes mots ? De revenir en arrière ? De lui dire de rester ? Putain. Il fait chier. Foutue kryptonite.
J'suis pas une balance, t'es débile. « Si t’es débile » que je réponds du tac au tac, pas par méchanceté ni rien, juste parce que je le pense, c’est pas un jugement, c’est une affirmation. « Mais c’est pas grave » non, parce qu’il y a des gens intelligents pire que lui, parce qu’au milieu du reste il se trouve un peu au dessus. Ou carrément en dessous. J’ai pas encore décidé. Eh, tu sais faire les saltos « Bien sur » mensonge encore une fois, et le sourire qui s’étale sans que je comprenne sur mon visage. C’est l’ambiance je crois, lui et moi, le secret, l’eau. Ca me rend plus heureuse, moins raleuse. Ca me donne envie de lui montrer que je peux briller moi aussi. « Techniquement » que je me reprend néanmoins. Parce que des salto j’ai essayé, j’ai jamais vraiment réussi sauf la dernière fois, que les autres essais ont failli être catastrophique et que tout en moi me hurle que c’est une mauvaise idée. « Si je saute, je gagne un truc ? » clin d’œil, j’arrive même pas à cacher tout ça, c’est déjà loin les engueulades d’il y a à peine une minute, faut croire qu’il me contamine ce con. Et sans attendre sa réponse je nage jusqu’au rebord avant de me hisser sur l’échelle. Ca fait mal. Un peu. Beaucoup. Mais je ne montre rien. Je veux pas montrer que je suis faible. Je veux juste l’impression.
Pourquoi est-ce que je veux l’impressionner putain.
Je me tiens à la rampe pour monter sur les marches du plongeoir. Sens ma jambe qui tire, qui se traine, comme une carcasse attachée au reste de mon corps. Si seulement je pouvais m’en séparer. Je la pleurerais pas, cette foutue jambe.
Je sens l’eau sui ruisselle le long de ma peau, soudain j’ai froid, le vent qui passe à travers les pans de la tante, ça me fait frissonner. Ou alors c’est la réalisation que ce que je suis en train de faire est totalement stupide. J’arrive en haut, c’est pas si haut, j’ai l’habitude. Je connais les marques, les distances, les profondeurs. Mais cette fois ci y a Zyki en bas, et je sens ses yeux sur moi, sur mes jambes, sur mon corps, sur la connerie que je m’apprête à faire. Et rien pour me cacher. Putain. Reste plus qu’à sauter. J’inspire, expire, me met en position en me tenant aussi droite que je peux. « J’espère que t’as une couronne pour moi Kida » que je cris.
Et puis je saute.
C’est fugace, la douleur dans ma cuisse pendant que je m’élance pour faire un salto. Même pas en rêve au final, j’arrive juste à m’emmêler les pattes, comme toujours, ridicule, comme ces oiseaux même pas capables de voler, je vais m’écraser.
Au moins y a de l’eau.
C’est pas le sol cette fois.
Et déjà y a plus rien. Juste du noir. J’espère quand même que je vais pas crever.
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