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| Why have you forsaken me (Asher) | |
| Auteur | Message |
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Why have you forsaken me (Asher) Dim 16 Juil - 2:13 | |
| 17h53
« J’aimerais parler à Darja Kucera, je. Je suis son fils. Oui, j’attends. » Silence au bout de la ligne. Il a encore des pièces froides dans sa main tremblante, au cas où ça couperait. Il entend le bruit d’un combiné qu’on décroche, un soupir. Il se demande si c’est l’opératrice de la prison qui commence à se lasser de ses appels. « Allô ? Allô, Maminka ? » « Ne m’appelle pas comme ça, Lenny. » Il voit flou, soudain, les yeux humides, les yeux rouges, il a la voix qui défaille et ses jointures qui deviennent blanches, agrippées de toute leur force au combiné. « Pardon. Tu. Comment vas-tu ? Tu n’as jamais répondu à mes lettres et. Quand je téléphone, ils me disent que tu ne peux pas me parler. J’avais peur que– » « Lenny, ne m’appelle plus. Ne m’écris plus non plus. J’ai seulement accepté de répondre parce que les gardiens ont insisté. » « Mais– » « Ne m’interromps pas. C’est fini. Je ne veux plus que tu m’appelles. » « Mais… Pourquoi ? Tu. Tu sors quand ? » Nouveau soupir. « Lenny… On ne se reverra pas quand je sortirai. Tu es bientôt majeur et je ne serai plus obligée de m’occuper de toi. » « Mais je. Je vais à l’université, Darja, j’ai eu les meilleures notes de la faculté, les professeurs disent que, que je pourrai devenir un grand avocat ou même un juge, tu– » « Lenny, ne m’appelle plus, d’accord ? » « Non, Mam-Darja, s’il te plaît, ne raccr– » Choc de plastique contre plastique. Il lâche le combiné, qui pendouille dans le vide comme un condamné au bout de sa corde. Il s’écroule, Lenny, il s’effondre, dans le mètre carré de la cabine téléphonique.
20h07
Tu me déçois. Tu me déçois. Tu me déçois. C’est la ritournelle qui se joue dans sa tête, c’est la voix d’Asher qui se mêle à celle de Darja. Je ne serai plus obligée de m’occuper de toi. Les mots résonnent, vrillent ses tympans, y’a les larmes qui s’arrêtent pas de couler et ses doigts qui tremblent quand il allonge les billets pour se payer de la vodka dans un nightshop, avec la fausse carte d’identité que Peter lui avait filée dès son arrivée. Le vendeur est pas trop regardant, et il repart avec la bouteille. Il laisse tomber le bouchon par terre et boit au goulot comme tous les bons alcooliques. Ça brûle, ça lui crame la gorge, mais ça soigne rien du tout, il se sent pas mieux, alors il continue. On lui a dit que ça faisait oublier, on lui a dit que ça rendait heureux. Peut-être qu’il devrait se rabattre sur la poussière de fées de Peter, peut-être que ça lui fera voir les étoiles, peut-être qu’il aura plus besoin de vivre.
21h22
« Je pensais que tu étais intelligent, Lenny. Je pensais que tu étais tellement intelligent. » Il singe, à haute voix, là, en pleine rue, à hurler à la lune. Il se souvient même plus de quand ça a eu lieu, de la dernière fois qu’il a vu Asher. Des jours, des semaines ? Il sait plus, mais les mots sont restés, gravés au couteau. Il se souvient de tout, il se souvient du regard d’Asher avant qu’il ne tourne les talons, de son dos, de la manière dont la foule l’avait englouti. Les effets de l’alcool ont pas tardé à bousiller son sens commun, la colère a trouvé sa voie jusqu’à ses lèvres et il la hurle aux fenêtres d’un quartier qu’il reconnaît à peine. « Je m’en veux d’avoir pensé qu’il y avait quelque chose à sauver chez toi, Lenny – TU SAIS POURQUOI, C’EST PARCE QUE JE SUIS UN RATÉ, MA PROPRE MÈRE ME HAIT, DONC C’EST DE NAISSANCE FAUT CROIRE. » Une fenêtre qui s’ouvre, un objet en verre qui s’écrase pas loin de lui sur le trottoir. « TA GUEULE. » « TOI TA GUEULE. » Et le doigt qui va avec.
21h41
« Hey, tu fous quoi dans les rues tout seul, gamin ? » Il a la dégaine d’un gangster, ce type, et il le regarde comme s’il n’avait pas peur. Il n’a pas peur, y’a plus rien, dans son cerveau. En temps normal, il aurait évité ce quartier comme la peste, en temps normal, il n’a pas plus de vodka que de sang dans le corps. « Va te faire. » Il se rapproche, empoigne son col. « Woh, tu te calmes, tu sais à qui tu parles, p’tit con ? » Il le repousse de toutes ses forces, parvient à lui faire perdre l’équilibre, à ce qu’il se recule de quelques pas. Lenny se baisse, une seconde, peut-être plus, il arrive pas à savoir, il est dans le brouillard, et le large morceau de verre qu’il vient d’attraper lui meurtrit la paume alors qu’il le brandit devant lui comme un sabre. « M’APPROCHE PAS PUTAIN. » Y’a le sang qui coule, une estafilade sur le bras nu du mec qui s’écarte, les mains qui tentent de l’apaiser. « HEY PETIT, TU POSES ÇA TOUT DE SUITE. » D’autres voix. Il a pas vu la voiture de police s’arrêter contre le trottoir d’en face, ni les deux flics en uniforme qui le visent. Il est déjà à terre qu’il n’a pas encore compris pourquoi.
22h56
Il est assis sur une chaise austère en face d’une table austère dans une pièce austère devant un faux miroir austère, un policier au visage austère qui le dévisage avec un regard pseudo-compatissant, mais surtout austère. Il dit plus un mot, Lenny, ça fait une demi-heure qu’il est assis là et qu’il a rien dit, qu’il a pas bougé, alors qu’on a étalé le contenu de son portefeuille, qu’on lui a demandé si son nom était bien Oliver Monroe, comme sur sa fausse carte d’identité. Et il sait bien qu’ils ne sont pas dupes, qu’ils savent que ce sont des faux papiers, alors il dit rien, le regard baissé et les mains le long du corps, adossé sur la chaise comme n’importe quel adolescent, nonchalant, comme s’il n’était pas conscient de la situation. Il se demande combien de temps ils vont prendre avant de trouver son nom dans le fichier des mômes disparus, il se demande combien de temps pour qu’ils appellent l’assistante sociale et pour qu’il retourne en foyer, il se demande comment c’est d’avoir un casier, mais il ne dit rien de plus. Après tout, il ne mérite rien, aucune compassion, aucune charité, puisqu’il ne veut pas se sauver lui-même, il finira boucher dans un patelin pourri, si on ne l’envoie pas en centre pour délinquants.
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| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Ven 21 Juil - 18:26 | |
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Lenny & Asher Expectation is the root of all heartache © creditimage|tumblr Pas ce soir, et le portable est immédiatement reposé sur la table, l’écran noir verrouillé sur les pensées trop sombres. Pas ce soir, il a répondu à Merle qui lui propose d’aller boire un verre, Merle qui ne fait jamais ça en temps normal. Il commence à trop le connaitre, peut-être, et il voit que ça déconne dans sa tête. Il voit que les lumières s’éteignent progressivement, que les gestes deviennent automatiques, que sa voix s’aseptise étrangement. C’est peut-être le seul à capter, d’ailleurs, parce que c’est le seul avec lequel il ne cherche pas à faire semblant. Y a cette langueur dégueulasse qui anime chaque minuscule acte de la vie d’Asher, cette désinvolture, ce détachement que lui-même déteste mais dont il ne se départ plus. Y a les mots qu’il a lâchés, froids et sournois, les phrases qu’il a vomies sans pouvoir les retenir. Il ne sait pas ce qu’il faut blâmer pour ça. La fatigue, l’exaspération, un peu des deux, qui sait. Et puis, là, le voilà qui se rend au boulot parce qu’il ne sait pas quoi foutre de sa peau, parce qu’il est presque vingt-trois heures mais qu’il a décidé que bosser l’éviterait de penser à tout ce qui déconne chez lui. Elena, Cain, Jael, Lenny. Les prénoms qui tournent en boucle dans sa tête, ne le lâchent jamais, même lorsqu’il déambule dans la rue, en direction du poste. Elena. La première nuit, toutes celles d’après, la rupture, à cause de Swann. L’appel et la voix sanglotante au bout du fil, la nuit d’angoisse, le lendemain aux yeux rougis par l’ivresse et le désarroi. Caïn. Le dérapage, l’envie, le désir, la douceur, la vengeance quelque part, discrète, presque invisible. L’amour, le vrai, celui qui picote le bide, qui laisse un peu débile, à se demander ce qu’on a le droit de faire, de dire, d’exiger. La destruction dans la plus douce de ses formes. Jael. La pitié, le déchirement, la culpabilité. Le frisson de terreur en découvrant les bleus sur la peau, la lèvre fendue. La haine exacerbée pour les gens qui l’ont foutue par terre, qui l’ont rendue comme ça. Lenny. Le seul qui n’évoque rien, parce qu’il n’y a rien à évoquer. Lenny, l’ami, la déception, Lenny le néant. Lenny qui ne se rend même pas compte que sa vie part en cacahuète, qui continue de penser que trainer dans les rues l’aidera pour une obscure raison. Quand il passe les portes du bâtiment, Asher, il ne s’attend pas à ce que le gamin soit quelque part là-dedans. Il ne s’attend pas à devoir lui faire face alors qu’ils se sont tout dit. Il ne s’attend surtout pas à se retrouver noyé alors qu’il a déjà la tête à moitié sous l’eau. Et pourtant, il suffit d’un regard à un groupe de collègues qui jacasse pour comprendre. Dans les mains de l’un d’eux, une pièce d’identité. La photo dessus, un petit mec blond aux yeux foncés qui sourit un peu, d’un sourire discret qu’on ne remarque pas au premier coup d’œil mais qui est là quand même. La photo dessus, c’est le souvenir douloureux de la journée qu’il a passée à tourner et retourner les mots pour essayer d’étouffer sa culpabilité. La photo, c’est le gosse qu’ils viennent de choper et qui est en train d’être interrogé. La photo, c’est Lenny.
Il ne veut pas y aller, pas vraiment. Il préfèrerait ignorer qu’il est là, s’enfermer dans son bureau et bosser sur des dossiers. Mais il ne peut pas, ça cogne dans son cerveau, ça résonne, ça fait écho, il ne peut pas, et il ne réalise même pas qu’il arrive devant la salle d’interrogatoire avant d’avoir la main sur la poignée. Lorsqu’il ouvre, y a Gibbins qui est assis en face de Lenny et qui le dévisage, comme s’il pouvait trouver une réponse sans poser de questions. Parfois, Asher se dit que c’est un gros tas de gras inutile. D’autres fois, il pense que si plus de flics étaient comme lui, ils seraient sûrement moins perçus comme des êtres abjects. On peut au moins lui reconnaitre ça : c’est pas quelqu’un de violent. « Je prends le relai », murmure Asher, chacun de ces mots sortant péniblement d’entre ses lèvres. Il attend que son collègue se lève, sorte de la pièce, et s’assied sans bruit face à son ami. Qui n’est plus son ami. Qui n’est plus rien. « Tu empestes l’alcool. » C’est pas une question, c’est un constat. Il pue l’alcool, comme Asher pue le mec qui n’a pas dormi depuis une semaine. Ça se voit sur leurs gueules, y a pas besoin de chercher plus loin. Et les mots ne sont pas dit avec tout l’enrobage qu’Asher emploie en temps normal, les tournures bien chiadées et le sentimentalisme dégoulinant dont il fait trop souvent preuve. Il attrape le dossier qui traine sur le coin de la table, l’ouvre d’un geste sec, parcourt rapidement la première page. « Donc… Oliver », et il insiste sur le prénom qui écorche la langue, qui râpe les lèvres, qui ne ressemble absolument pas à Lenny. Ses ongles tapotent contre le carton de la chemise qui contient les éléments dossier, et il attend un moment avant de poursuivre, comme s’il pensait que Lenny allait dire quelque chose. Sauf que Lenny dira rien, jamais. Lenny est trop fier, trop distant. Trop bourré, en ce moment. « C’était quoi, cette fois ? On a tagué un mur de la ville, on a tué un chat errant, on a violé quelqu'un ? » Le sarcasme est puissant, trop puissant, et il sait qu’il va se prendre le retour de bâton. C’est peut-être ce qu’il attend. Que tout soit terminé avec Lenny, qu’on n’en parle plus. Qu’il sorte de sa vie et ne revienne jamais vraiment, qu’il demeure une ombre dans le fond, la mouche sur le papier-peint. « Qui es-tu, Oliver ? » Et la question est posée presque sincèrement. Pour la première fois depuis quelques minutes, Asher rive ses yeux sur Lenny, ne le lâche pas une seule seconde. T’es qui Lenny, putain. T’es qui à part un fantôme, à part une fumée insaisissable, à part un chiot paumé recueilli par un junkie alcoolique qui va te faire piquer dès qu’il en aura l’occasion. T’es qui à part quelqu’un que je pensais connaitre mais dont je ne sais rien. T’es qui à part quelqu’un qui fout les autres en l’air, et qui se fout en l'air lui-même.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Sam 22 Juil - 14:47 | |
| Y’a l’alcool qui le noie, l’esprit embrumé, à ne plus savoir ce qui s’est passé. Des vagues souvenirs, du sang qui coule, l’impression d’être dans son corps sans l’être, de ne pas devoir subir les conséquences de ses actes parce qu’il était hors de son propre contrôle, incapable de s’arrêter. Il ne sait pas ce qu’il ressent. Ce n’est plus de la détresse, ce n’était pas un geste qui voulait dire regardez-moi, je suis là. C’était autre chose, c’est autre chose. C’est son cœur en vrac, et ses mains qui tremblent, mais pas de peur, c’est l’adrénaline qui a dévoré ses veines, c’est la vodka qui agit et qui parle, ou qui désinhibe et lui fait faire ce qu’il a toujours voulu faire. Peut-être que c’était tapi là, au fond de lui, depuis tout ce temps, peut-être qu’il n’est qu’un bon à rien, un parasite, un sale gosse. Peut-être que tout le monde le savait, peut-être que c’est pour ça qu’ils passaient leur temps à l’oublier, à le laisser derrière. L’abandonner. Peut-être que c’est ça, peut-être qu’il est ça. Il n’y a plus de tristesse, de détresse, de peur, de culpabilité, juste le fatalisme, le sentiment que ce qui devait arriver arrive à grands pas, que tout ça est normal, que ça n’aurait jamais pu se passer autrement. Victime de ses choix, victime du système, victime de son destin. Peut-être que c’était ça, la raison pour laquelle il ne pouvait pas aller à Harvard. Les enfants du système ne font pas d’études, les orphelins sans personne pour croire en eux finissent à la rue, à vendre corps et âme pour une dose d’héroïne. Personne n’a jamais cru en lui, au fond, Darja n’a jamais rien vu d’autre qu’un échec, Asher a toujours pensé qu’il tournerait mal, ses familles d’accueil se sont toujours dit qu’il n’irait pas bien loin. Personne n’a jamais cru qu’il ferait quelque chose de sa vie, malgré toute son intelligence, personne n’a jamais cru qu’il serait à la hauteur ou du moins on lui fixait des buts impossibles histoire qu’il ne puisse jamais les atteindre. A part Peter. Comme quoi, le réconfort n’est jamais là où on l’attend.
Il se demande s’ils vont encore se regarder longtemps en chiens de faïence, avec le flic. Et dire qu’il avait du respect pour eux, pour la loi. Tout ce qu’ils font c’est lancer des menaces en l’air, le mater comme une bête curieuse au lieu de faire le boulot. Elle est belle, la police, qui est censée protéger et aider le citoyen. Il se demande ce qu’ils ont écrit dans le dossier sur la table. Ivresse sur la voie publique, détention de faux papiers, coups et blessures, tentative de meurtre, peut-être, et la fugue qui viendra s’y ajouter, sans doute. Ça lui fera un joli casier, si le mec porte plainte. Même s’il n’avait pas l’air de faire confiance aux flics, à la vitesse où il a détalé. Puis la porte s’ouvre, Lenny tourne la tête lentement pour toiser le nouvel arrivant. S’il attendait la délivrance, c’est raté, et il recommence à contempler ses ongles avec l’attention blasée d’une manucure. Asher s’assied en face de lui, et il a un sourire cynique, quand il lui fait la remarque sur l’alcool, se retient de le féliciter pour sa perspicacité. Oliver, qu’il l’appelle, Oliver, et c’est ridicule, et il se souvient de comment il avait pleuré, la dernière fois qu’Asher lui avait fait ce commentaire injuste sur l’escalade de la violence. Il se souvient, et il trouve ça drôle, à présent. Peut-être que oui, il va finir par créer sa mafia, il a de l’avenir là-dedans. « Attends. Je crois bien que j’ai buté dix personnes, là, je suis un serial killer. Ou non, pire, un terroriste, ouais, c’est ça, je vole, je tue en masse, je viole, c’est tout à fait ce que je fais. Ah mais mec, pourquoi tu ne m’as pas arrêté avant que je fasse tout ça, c’est pas bien, tu sais. Tu aurais pu tout empêcher. » Y’a la colère qui gronde, c’est ça, ce qu’il ressent. De la colère, de la rage, toutes les questions sans réponse qui le resteront pour toujours. Pourquoi tu m’as abandonné, Darja ? Pourquoi t’as préféré me tourner le dos plutôt que de chercher à comprendre, Asher ? Mais il n’a plus envie de les poser, ces questions, il veut seulement faire mal, il veut seulement rester caché derrière son nuage d’alcool qui lui donne trop d’assurance. « Qui es-tu. Très belle question philosophique. Je crois que personne n’a encore réussi à y répondre de façon convaincante. » Son regard se porte sur le miroir sans teint derrière Asher, et il lance à l’intention des policiers derrière : « C’est Lenny Kucera. K-U-C-E-R-A. Je suis dans le fichier des gosses disparus, allez voir. » Il préfère que l’entrevue tourne court plutôt que de rester en face d’Asher, même s’il reporte son attention sur lui, les prunelles plantées dans les siennes. « Tu dois être content, tu as raison, je suis un raté, un criminel, c’est ce que tu voulais, non ? Tu n’as jamais cru en moi, tu as toujours considéré que j’allais déraper tôt ou tard. Ben c’est fait, maintenant, tu peux fêter ça, Lenny n’est pas parfait, Lenny est un petit con comme tous les autres, bravo de l’avoir vu dès le début. Même moi, je ne l’ai pas vu venir. C’est drôle, hein ? Depuis toujours, là, je m’acharne à être le gosse que tout le monde est censé rêver d’avoir, tu sais, premier de classe, obéissant, qui mange des légumes, se lève tôt, fait le ménage. Même à la rue, j’ai trouvé le moyen de ne pas finir pickpocket, dealeur, junkie ou gangster, je fais même des études, sérieux. Mais ça n’a jamais suffi. Elle m’aime toujours pas, et toi tu m’as sans doute jamais aimé, ou peut-être comme on aime un chiot égaré avant qu’il saccage toute la baraque, jusqu’à ce qu’il devienne embarrassant. » Il marque une pause, penche la tête sur le côté. « Je ne sais même pas pourquoi tu es là, Asher, j’ai bien compris que toi et moi, on n’a plus rien à se dire. Pas besoin de venir me le répéter. » |
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| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Sam 22 Juil - 18:32 | |
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Lenny & Asher Expectation is the root of all heartache © creditimage|tumblr Il y a une part d’Asher qui se rend compte qu’il est injuste, que Lenny prend pour tous les autres, qu’il est le fusible qui grille pour éviter que la baraque ne prenne feu. Il devrait en vouloir à tout le monde, à Elena, à Jael, même à Caïn, mais pas à lui. Pas à lui qui fond en larmes quand on l’engueule, pas à lui qui baisse la tête quand on l’attrape en train de faire une connerie. Pas à lui qui se retrouve au poste un soir de semaine à minuit et qui a sûrement envie de se casser de là au plus vite. Le fusible qui grille, c’est ce qu’il est, la petite goutte d’eau qui fait déborder le vase de sa patience. Lenny, c’est l’une des personnes qu’il aime le plus, mais aussi son plus gros loupé. C’est tous les soirs passés avec lui à lire du Kant et tous les cafés partagés autour de discussions philosophiques, c’est tous les compliments donnés avec une sincérité qu’il n’aurait pas pu feindre, tous les moments où il a eu l’espoir de le voir faire quelque chose de bien. Mais c’est aussi ça, maintenant. L’alcool qui court dans les veines du gamin, les mots assassins. Y a une distance de milliers de kilomètres entre eux, symbolisée par une simple table vermoulue. Asher l’écoute, ne lui coupe pas la parole. Ça ne sert à rien, même s’il remue le couteau dans la plaie, même s’il n’aime pas le sarcasme dont il fait preuve quand il liste des crimes dont il le sait incapable. Evidemment, il joue sur son terrain. Il s’y attendait, il s’y attendait vraiment, mais ça le blesse quand même, et il s’efforce autant que possible de ne pas le montrer. S’il l’a appelé Oliver, c’est parce qu’un tout petit bout de lui cherche encore à le couvrir, à le préserver, à le protéger. C’est trop tard, il s’est torpillé lui-même à l’instant où il a descendu une bouteille de [snif] vodka. C’est bizarre, la vodka ça pue pas tant que ça normalement. Il doit la transpirer par tous les pores, vu ce qu’il a l’air d’avoir picolé. Il l’a jamais vu comme ça, Asher, jamais vu jouer avec le feu aussi sadiquement, comme un gamin qu’aurait trouvé un animal crevé et qui le tripoterait avec un bâton. Il se présente sous son vrai nom et Asher serre les dents, déglutit, croise ses doigts devant lui. Ses yeux ne détaillent plus Lenny, n’osent plus le faire, parce qu’il fait n’importe quoi et qu’il craint de ne pas pouvoir se retenir de l’incendier ou de lui en coller une. C’est peut-être pour ça qu’il ne dit rien, pour ça qu’il s’écrase. Pour ça qu’il écoute juste les mots que Lenny lui crache à la gueule, comme si ça le soulageait d’une certaine façon. Vas-y Lenny, si ça peut te faire plaisir. Dis que je suis qu’un connard, dis que j’ai jamais cherché à t’aider. Dis que tu me détestes, que t’aimerais ne jamais m’avoir connu. C’est le cas de tous les gens qu’il croise, non ? Tous ceux qui se sont foutus au milieu de sa route depuis ces trois dernières années, tous ceux qui se sont imposés à lui et qu’il a essayé d’aider, à chaque putain de fois, pour se retrouver devant le même constat : il ne sert à rien, sauf à détruire. Plutôt ironique quand on sait que son prénom signifie béni en hébreu. Il est pas béni. C’est une putain de malédiction qui pèse sur lui. Et même s’il regarde son vrai prénom, ça veut dire audacieux. Il est pourtant lâche, tellement lâche. Ça prouve bien que ses parents sont des connards, ils ont même pas réussi à comprendre que leur propre fils serait une catastrophe, une trentaine d’années plus tard.
« T’as raison, Lenny. » Il relève la tête, l’observe. Ses organes le lâchent un à un sous la douleur, il sent plus ses jambes, mais il n’en montre rien, n’a même pas les yeux humides. « T’es un clébard. Un petit chiot abandonné par sa mère et terrorisé, qui suit les pitbulls parce qu’il a pas d’autre famille, et qui mord la seule personne qui tend la main vers lui. » Ses dents mordent un peu sa lèvre inférieure alors qu’il le scrute, attend une réaction, quelque chose qui n’arrivera pas parce que Lenny n’est pas ce genre de garçon, parce que même l’alcool n’arrive pas à enlever son polissage dégueulasse qu’il arbore en permanence. Il aimait bien ça, y a quelques mois. Il aimait bien le côté trop poli, trop sage, trop gentil. Peut-être qu’il n’a plus la patience, peut-être qu’il en a marre de le voir prétendre être un gentil garçon. Peut-être qu’il a envie de provoquer quelque chose chez lui, quelque chose de plus, quelque chose d’animal, de méchant, de cruel. « Tu fais de la merde, Lenny. Tu fais de la merde et je te le dis parce que je t’aime, et t’es pas habitué à avoir quelqu’un qui tienne suffisamment à toi pour te dire quand tu déconnes. » Il se penche un peu par-dessus la table, Asher, attrape le menton du gosse et le relève. Ses gestes sont presque durs, mais c’est pas voulu, c’est les nerfs qui lâchent et les muscles qui tremblent, les yeux qui cherchent les siens, qui essaient de le trouver quelque part derrière les vapeurs d’alcool. « T’es fier de ça, Lenny ? T’es fier de ce que tu fais là, maintenant ? T’es fier d’être vautré sur un siège bancal dans un commissariat, complètement saoul et avec ces idées à la con que tu me gerbes dessus ? » Les doigts se resserrent un peu sur sa mâchoire, les yeux vissés dans les siens. Il a un regard perçant, Lenny, un regard qui semble lui dire d’aller se faire foutre, qui semble vouloir se barrer à des kilomètres de là. « Je t’inspire quoi là ? T’as envie de me frapper, de me buter ? Tu veux qu’on aille à l’extérieur du poste pour que tu te défoules ? Parce qu’honnêtement, je préfèrerais que tu me frappes plutôt que t’entendre dire des conneries pareilles. »
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Sam 22 Juil - 23:03 | |
| C’est pathétique, c’est pas lui, c’est ses yeux qui dardent Asher alors qu’il devrait les baisser, avoir honte, pleurer. Mais Lenny n’a plus envie de pleurer, il a envie de hurler, il a envie d’être froid, il a l’esprit embrouillé et sans doute l’alcool mauvais, il n’en sait rien. Il comprend, maintenant, pourquoi tout le monde se crache des insultes au visage, pourquoi ils tabassent, pourquoi ils cassent, pourquoi ils ne respectent pas les lois qu’on leur dicte. Il comprend. C’est facile. C’est tellement stupidement facile. Il a suffi d’une fausse carte d’identité pour qu’il fasse tout et n’importe quoi, un bête morceau de papier, et il est sûr qu’on peut faire des conneries avec moins que ça, qu’on peut faire du mal avec de simples mots et se sentir tout-puissant, comme un crétin, en blessant les autres. De toute façon, tout le monde prend cette voie, et lui, en tant que gosse de tueuse, en tant que semi-orphelin balloté de famille en famille, il y a droit. Il a le droit de dire des horreurs, il a le droit de frapper, il a le droit de voler. C’est ce qu’on attend de lui, même s’ils disent qu’il va aller en prison, pour lui faire peur, dans les faits y’a tellement de sales types qui s’en sortent. Avec son QI, il n’aurait aucun mal à faire une bonne petite affaire criminelle. Puis d’ailleurs, ce sont les sales types qui tendent la main aux gamins comme lui, et pas Asher, malgré tout ce qu’il a l’air de croire. C’est pas Asher qui l’a sorti de la rue, c’est pas Asher qui lui a donné à bouffer, c’est pas Asher qui l’a inscrit à l’université. Non, Asher n’était pas là. Lenny sait qu’Asher a raison, que la métaphore du chiot abandonné lui va merveilleusement bien, sauf qu’Asher n’est pas la seule personne qui lui a tendu la main. La seule personne qui trempe pas dans les trucs illégaux, peut-être, mais Lenny s’est habitué à ne plus voir tout ça comme tout blanc et tout noir. Il y a des tas de gens bien en apparence qui sont des monstres à l’intérieur, là où aucun Lost Boy ne ment sur ce qu’ils sont. Ils n’ont jamais essayé de lui faire croire que ce qu’ils faisaient était bien, ça a toujours été sincère, brut mais sincère, et malgré toutes les brimades, toutes les moqueries – comment leur en vouloir puisque tout le monde a toujours fait ça avec lui –, ça ressemble plus ou moins à une famille. Une famille dysfonctionnelle, certes, mais il sait qu’il y en a quelques-uns qui tiennent à lui et qu’ils ne lui en voudront pas s’il fait un pas de travers.
Les yeux fixes, dans ceux d’Asher, l’expression mauvaise, distante, qui dit qu’il ne va pas s’excuser quand Asher lui chope le menton. Et puis il se met à rire, un rire sec, sans profondeur, un rire glacial, parce qu’Asher lui propose de le frapper, parce que ça lui paraît complètement absurde. Il sait ce qu’il a fait, brandit un bout de verre contre un mec qui passait par-là et voulait étaler sa force. Ça veut pas dire qu’il va soudain devenir un boxeur ou un truc du style, il a le corps pour danser et courir, pas pour se battre. « T’as raison. Je suis un chiot qui a fait les mauvais choix. Mais je suis là, maintenant. J’ai fait ton job, je me suis ramené tout seul comme un grand. Je vais retourner d’où je viens, si pas en centre de redressement. Faut voir si le gars porte plainte, mais je crois pas. Avec un peu de chance, je deviendrai caissier chez McDonald, ce sera super. » Le cynisme qui claque au bout de la langue, l’envie de provoquer, de cracher tout l’acide qui lui ronge l’estomac. L’alcool qui donne des ailes, l’alcool qui rend méchant, l’alcool qui fait tout dire avec une facilité déconcertante, qui l’empêche de vaciller quand il vrille ses prunelles dans celles d’Asher avec insolence. « Je ne sais pas si tu tiens à moi. Tu es un peu comme elle. Elle me le disait tout le temps, quand je déconnais, tu sais. Manger un bonbon, rater un entrechat, déchirer un vêtement. C’était grave, pour elle. Mais j’ai jamais déconné sciemment. » Rire spontané, qui lui échappe comme si quelqu’un d’autre s’exprimait à travers lui. « A part aujourd’hui. Je l’ai un peu cherché. » Il s’éloigne brusquement, se recalant au fond de la chaise, pour rompre le contact avec Asher, pour qu’il arrête de le toucher, d’agir en père réprobateur. Il n’a pas eu de père, Lenny, et pourtant il a toujours été ce foutu gamin parfait. Et les gens n’aiment pas ça, il a capté, maintenant, personne n’aime les gens trop parfaits, trop gentils, trop doux. Ils considèrent que ça rime avec victime, ou alors ça leur rappelle qu’eux-mêmes sont des salauds, il sait pas. Mais c’est certainement plus simple de mal agir quand on est à la rue, histoire de se faire respecter, ça colle mieux au personnage, ça détonne moins. Pourtant, il n’a pas envie d’être ça. Non, viscéralement, il n’a jamais eu envie de faire du mal gratuitement, il n’a jamais vraiment saisi ce qui poussait les autres à se haïr, à le haïr. Et il n’a certainement pas envie de foutre son poing dans la figure d’Asher. « J’ai pas envie de te frapper, Asher. Je sais pas où tu vas chercher tout ça. Je sais ce que j’ai fait. Mais j’ai pas décidé de devenir une petite frappe à temps plein, merci. Je crois toujours à la non-violence, même si je n’ai pas le self-control de Gandhi. » Il voit ça comme un manque de respect, clairement, mais il ne veut plus demander à Asher d’essayer de comprendre. « Tu fais comme si tu savais, mais tu comprends rien à rien. Tu fais comme si tu voulais aider, mais tu veux seulement aider dans tes termes, et si on ne veut pas, alors on est bon à rien. Toi, t’as fermé les yeux des milliers de fois, alors je pensais que tu comprendrais que moi aussi, je ferme les yeux, que je sais qu’on fait pas des trucs bien autour de moi, mais c’est pas ça qui importe. Ce qui importe, c’est que je les aime, et que je ferai tout pour les aider, même si c’est pas de la manière que je veux. Toi, tu crois qu’on ne peut pas être sauvé, parce qu’on ne veut pas être sauvé dans tes conditions, selon ce que tu crois être bien pour nous. Peut-être que ta vie à toi elle a été facile, que t’as toujours eu la possibilité de faire ce qui est juste et bien, que t’as jamais fait d’erreurs, mais ça m’étonnerait. Alors me fais pas la leçon, parce que toi aussi t’as des idées à la con. » |
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| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Dim 23 Juil - 14:42 | |
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Lenny & Asher Expectation is the root of all heartache © creditimage|tumblr Il a raison, il a fait le job, le boulot qu’Asher n’a jamais eu les couilles d’accomplir jusqu’au bout, l’arrestation concrète, brutale, les barreaux avant le renvoi en famille d’accueil. Il a fait le boulot, alors pourquoi est-ce qu’il n’est pas satisfait ? C’était pas ce qu’il cherchait, depuis le début ? Qu’il se fasse choper pour comprendre qu’il faisait des conneries, qu’il y avait un autre moyen de s’accomplir qu’en suivant d’autres gosses qui déraillent ? Non, non, non. C’était clairement pas le but. Il ne voulait pas ça, Asher. Il ne voulait pas que Lenny se retrouve là, qu’il lui avoue tous ces trucs beaucoup trop vrais juste pour le faire souffrir, qu’il révèle à tout le monde sa véritable identité et foute en l’air tous les efforts déployés par le new-yorkais pour qu’il ne se fasse jamais choper. Evidemment qu’il ne le voulait pas. Si c’était ce qu’il souhaitait, il l’aurait conduit au poste lui-même, quelques jours avant, quand ils s’étaient engueulés au coin d’une ruelle. Il n’aurait pas tourné le dos, il ne se serait pas enfui. Alors, ouais, y a une part de lui qui a fait ça par peur, par lâcheté, par pitié, par sollicitude. Un petit mélange de tout ça, un cocktail pas tout à fait sain, carrément destructeur, surtout pour Lenny. S’il avait su, il n’aurait jamais rien dit. Il ne lui aurait pas proposé de venir habiter chez lui, n’aurait pas insisté, ne se serait pas braqué quand Lenny lui avait avoué ne pas vouloir quitter l’appartement qu’il squatte aujourd’hui. C’est trop tard. C’est trop tard pour reculer, trop tard pour retirer les mots qu’il a déjà prononcés. Trop tard pour dire à Lenny qu’il ne pensait rien de tout ça, parce que ce serait lui mentir et qu’il le verrait. C’est trop tard mais pourtant, les mots tournent en boucle dans sa tête, et il n’écoute plus vraiment ce que Lenny lui dit, ce que Lenny lui reproche avec une véhémence qu’il ne lui connait pas. Caissier chez McDo. Ouais. C’est peut-être mieux qu’être un squatteur, un voleur, d’être quelqu’un qui n’a que de maigres ambitions pour un incroyable potentiel. Caissier chez McDo, ça veut pas dire qu’on ne sera jamais plus. Ça veut juste dire qu’on essaie de s’en sortir en bossant. Et aux dernières nouvelles, y a rien d’honteux. Mais il voit parfaitement où Lenny veut en venir, il entend la comparaison avec Darja. C’est l’alcool qui parle, quelque part, même s’il cherche à le pousser dans ses retranchements. Il n’a rien à voir avec Darja, Asher. Il aurait été un bon père, sûrement. Il se souvient du moment où il avait cru voir sa vie basculer, quand Scarlett lui avait annoncé être enceinte à seize piges. Elle avait préféré se débarrasser du bébé avant de ne plus pouvoir le faire, et il ne l’avait jamais blâmée pour ça. C’était pas l’heure, pas le moment. Seize ans. S’ils avaient eu ce gosse, il aurait le même âge que Lenny, à quelques mois près. Ouais, il aurait fait un bon père, il pense. Pas à seize ans, mais à trente-deux ans, oui. Normal que ça lui fasse mal, du coup, d’être comparé à une tueuse qui a laissé son gamin livré à lui-même. « Tu me prouves juste que t’aurais bien eu besoin de ton père pour te faire comprendre quelles choses ont de l’importance et quelles choses n’en ont pas. » C’est dit vulgairement, froidement. Une manière de lui faire comprendre qu’il mord pas à l’hameçon. Que s’il cherche à l’assassiner avec des mots, il aura la réplique.
Et puis vient l’insolence. Quelque chose de nouveau, encore. Lenny n’est jamais irrespectueux, d’habitude. Lenny cherche toujours à dire les choses de manière enrobée, diplomate. Il aimerait se dire que c’est juste l’effet de l’alcool, mais il sait que non. Il sait que c’est juste une foutue crise d’adolescence, et que c’est lui qui en fait les frais. Donc, il croit toujours en la non-violence, mais pas en la politesse. La violence avec laquelle il recule percute Asher en pleine poitrine, comme un violent uppercut. Le maigre contact qu’il avait réussi à établir est désormais rompu, et ça ne veut rien dire de bon. Ça signifie juste que c’est le début des hostilités, que c’est le début de la souffrance, que c’est le début des reproches, justifiés ou non. C’est bon à savoir, on remet la carapace, l’enveloppe dure et impénétrable, le manteau en kevlar. On se blinde de nouveau, parce qu’il recommence à parler, et qu’Asher est désormais persuadé que ce n’est pas pour lui dire quelque chose de courtois ou d’agréable. Ils ont passé ce stade-là. Maintenant, ils se blessent. Et ça marche. Ça marche, ça le fendille. Ça le brise. Lenny aligne les mots mais il ne comprend pas, il ne peut pas comprendre. C’est un dialogue de sourds qui se joue entre eux maintenant, une conversation entre deux personnes qui ne savent pas suffisamment de choses sur le passé de l’autre. Ouais, il a eu la vie facile. Non, pas toujours. Y a eu des choix, à certains moments. Y a eu celui de quitter New-York et de se démerder seul, d’essayer de grappiller de l’argent à droite à gauche, ou celui d’accepter de laisser son orgueil de côté et de profiter de l’offre de son père pour obtenir un job qui lui permette de se payer un appart pourri et de quoi bouffer. Il finit tous ses mois avec même pas trente dollars sur son compte, mais il fait ce qui est juste, il pense. Y a toujours le choix. Entre ce qui est bien, et ce qui est simple. « Jael s’est faite agresser, l’autre jour. Tu la connais, hein, Jael ? La petite blonde qui a ton âge et qui avale des cachetons pour garder la tête hors de l’eau. T’es au courant ? Elle s’est pointée à ma porte avec des boursouflures plein le visage, des bleus sur tout le corps. Elle a pas su me dire qui lui avait fait ça, elle le dira sûrement à personne. » Ses dents sont serrées, de nouveau, tellement serrées qu’elle lui font mal. Et son regard ne cille pas, darde celui de Lenny, semble lui dire qu’il le déteste, et c’est peut-être vrai. Surtout quand il lui dit des trucs comme ça. Des trucs faux, des trucs cons. « J’ai rencontré River alors qu’il faisait le trottoir. Il était sur le point de se faire tabasser par un connard qui voulait l’embarquer dans sa voiture pour se faire sucer. Quand on l’a arrêté, on s’est aperçu que le mec avait un couteau sur lui. » Le ton est froid et monotone, les faits énoncés les uns après les autres comme s’il lisait le bottin. « Merle pique des bagnoles. La dernière fois, il s’est fait choper, et à moitié tripoter par certains de mes collègues pour voir ce qu’il avait au fond du slip. » Il sait qu'il y a certains d'entre eux derrière le miroir sans tain. Il s'en branle, c'est le cadet de ses soucis. Au moins, ils savent que c'est pas un secret, qu'il l'a appris, qu'il le sait. Il recule dans sa chaise, les narines soulevées par sa respiration de plus en plus saccadée. Il garde son calme, pourtant, Asher. Ça sert à rien de s’énerver pour des trucs qui se sont déjà produits. Ils changeront rien, pas vrai ? Ils en ont pas le pouvoir, et certainement pas Asher. Il l’a appris de la manière la plus cruelle qui soit : par la bouche de tous ceux qu’il a tenté d’aider. « Et toi, t’es là, à côté d’eux, tu les regardes faire tous ces trucs à la con qu’ils font pour essayer de survivre, pour se sentir exister, tu les regardes subir les coups, les brimades, tu les regardes mourir à petit feu, et tu viens me parler d’amour ? » Il déglutit, baisse les yeux pour la première fois depuis plusieurs minutes. Peut-être parce qu’il n’a plus envie de regarder Lenny, peut-être parce qu’il lui donne envie de vomir. « Tu sais ce que je crois, Lenny ? Je crois que t’es pas obligé de vivre tout ça, mais que tu le fais par simple culpabilité, parce que ça te fait chier de voir les autres se détruire et d’être indemne au milieu du champ de bataille. Tu ne les aides pas. Tu les regardes se foutre en l’air. Et peut-être que j’ai des idées à la con, mais j’essaie de faire quelque chose, au moins. Toi, tu ne fais rien. Tu ne feras jamais rien. »
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| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Dim 23 Juil - 17:16 | |
| Il aurait aimé que ce soit Darja en face de lui, pas Asher. Il aurait aimé pouvoir cracher des horreurs sur chaque instant de son existence, pouvoir lui dire qu’elle a fait de sa vie un enfer, pouvoir lui balance à quel point elle se trompait sur tellement de choses dans l’univers. Il aurait voulu lui demander si c’était son père qu’elle avait buté, si elle regrettait d’avoir fait ça, si elle regrettait de l’avoir abandonné, si elle avait pensé une seule seconde à lui en appuyant sur la détente, ou pendant son séjour en prison. Il aurait voulu qu’elle lui dise tout de suite qu’ils se reverraient jamais, qu’elle lui expose ses intentions dès le début. Peut-être était-elle sûre qu’il comprendrait. Peut-être qu’il avait compris, que c’était implicite, dans le silence au bout du fil, dans les lettres sans réponse. Peut-être qu’il s’était acharné pour rien, dans l’espoir de retrouver une mère qu’il n’a au fond jamais eue. Il aurait voulu savoir si elle l’avait aimé, un jour, le temps d’un battement de cil, quand il ramenait un bulletin irréprochable ou qu’il réussissait un enchaînement de sauts parfait. Il aurait voulu demander pourquoi elle l’avait gardé, à seize ans, elle qui ne croyait pas en Dieu et qui avait assez économisé pour s’envoler pour New York. Elle qui ne l’avait sans doute vu que comme un monstre venu bousiller son corps de danseuse et dévorer sa maigreur. Il aurait voulu lui dire tellement de choses et lui poser tellement de questions, toutes les questions qui fâchent qu’il n’avait jamais osé poser dans son enfance et qu’elle balayait d’une claque si jamais elles franchissaient ses lèvres. Il lui en aurait peut-être mis une, en retour, pour toutes ces années, à Darja, peut-être que la violence aurait été plus sourde, peut-être que ses principes se seraient fait la malle. Il ne relève pas la remarque sur son père, Lenny, ce père absent, ce père inconnu, ce père qui engrosse des mineurs en voyage d’affaires et se barre la queue entre les jambes en niant toutes responsabilités. C’est sûr, il aurait tellement eu besoin d’un père comme ça. C’est toujours l’argument de ceux qui ont deux parents qui n’ont jamais divorcé, l’argument typique de ceux qui n’ont pas eu la vie trop difficile. De l’absurdité en plein, la connerie pathétique de ceux qui pensent qu’il ne doit exister qu’une sorte de famille, papa, maman, trois enfants, et que tous les autres sont désaxés. Il sait qu’Asher essaye seulement de répondre pour ne pas entrer dans son jeu, pour maintenir l’illusion de l’armure infaillible, il sait qu’il met le doigt où ça fait mal et qu’Asher ne veut pas lui faire le plaisir de le lui montrer. Il sait que s’il n’avait pas bu, il se serait liquéfié depuis longtemps.
Et puis, Asher répond, et y’a le cœur qui se craquèle parce qu’il n’a plus vu Jael depuis des jours, parce qu’elle est blessée et qu’elle n’a rien dit, mais son cœur est trop loin, en même temps, loin derrière la brume, et y’a les bras qui viennent se croiser devant lui comme pour se protéger. Asher lui énumère la vie des Lost Boys comme s’il ne la connaissait pas, comme s’il n’avait aucune conscience de ce qui se passait, comme s’il n’imaginait à quel point tout ça était sordide pour des gosses de leur âge. Et ça le vexe, évidemment, et ça le blesse, et il a les mâchoires qui se tendent, prêt à aboyer. Et puis ça disparaît, quand il se rend compte qu’Asher n’a aucune idée de ce qu’ils vivent, juste des brefs aperçus, comme s’il observait leur vie depuis un trou de serrure. « Tu crois vraiment que je regarde sans rien faire ? Je leur file des cours pour qu’ils décrochent pas de l'école, je partage ma bouffe en deux quand ils ont rien, je les soigne quand ils sont blessés, je les aide à capter des papiers médicaux que personne veut leur expliquer, je fais de mon mieux pour être un bon ami, pour les écouter, pour pas les assaillir de questions quand ils pleurent et je les regarde pas comme si de toute façon ils avaient raté leur vie et qu’ils étaient des déchets de la société. Parce qu’ils le sont pas. » Le monde est injuste, Peadar est injuste, Asher est injuste. Il peut peut-être s’en prendre à Asher, parce qu’Asher lui a fait du mal directement, parce qu’Asher l’a abandonné, quelque part, et que Lenny attend toujours ce moment-là, dans toutes ses relations, qu’il appréhende, mais qu’il sait que ça arrivera toujours. Le jour où on décide qu’on a plus besoin de lui, le jour où il devient seulement encombrant. Être utile à Peadar est la seule manière de faire qui le rassure un peu, où il peut se dire qu’il ne va pas le lâcher, même si peut-être que Peadar n’en demandait pas tant. Peadar est probablement moins exigeant avec lui qu’Asher, il lui sert tout sur un plateau d’argent, en attendant que des bonnes notes et un diplôme au bout du chemin. Lenny ne sait pas vraiment pourquoi il suscite ça chez quelqu’un comme Peadar, pourquoi il l’a poussé à faire des études, pourquoi il n’a pas rigolé quand il a expliqué les raisons de sa fugue, pourquoi Harvard a l’air aussi important pour lui que pour Lenny. Mais Lenny sait que ce n’est pas tout rose non plus, il sait que Peadar n’a rien d’un bon samaritain qui tend la main gratuitement, qu’il ferme parfois trop les yeux et qu’il laisse sombrer certains gamins. C’est peut-être ça qui fait le plus mal, le fait qu’on lui donne tout sans donner aux autres. « J’ai dix-sept ans, Asher, j’ai pas de parents pour me soutenir et me prêter de l’argent quand ça va mal, je fais avec ce que j’ai, là où je suis, avec ce qu’on a la gentillesse de me donner alors que j’ai rien fait pour le mériter. Toi t’as trente ans, un job dont c’est le principe même d’aider les autres, et pourtant tu nous laisses quand même à la rue, je sais pas si c’est parce que tu crois qu’on peut pas être sauvés ou parce que tu sais que ton système, que ce qui est censé être bien pour nous, c’est pas si bien que ça. Alors ouais, je fais pas cure de désintox, ni centre de réinsertion, mais quand j’aurai fait mes études, quand j’aurai mon indépendance et du fric, je ferai tout pour les aider et je continuerai à refuser de croire qu’ils sont foutus. » Il s’en fout, qu’Asher le regarde plus dans les yeux, il s’en fout de pas pouvoir être sûr qu’on le laissera poursuivre ses études, il s’en fout de tout ce que le monde pense. C’est pas parce qu’il est adolescent qu’il n’a pas le droit de penser ce qu’il veut. « Alors non, Asher, j’avais pas envie de venir chez toi, j’avais pas envie que tu m’aides, parce que y’a des milliers de personnes qui ont plus besoin d’aide que moi, et qu’il est hors de question que je fasse partie de ces gens qui abandonnent les autres sans en avoir rien à foutre. Je deviendrai jamais comme ça. » |
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| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Dim 23 Juil - 20:41 | |
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Lenny & Asher Expectation is the root of all heartache © creditimage|tumblr C’est allé trop loin et Asher le sait. C’est allé trop loin et ils ne pourront plus faire marche arrière, jamais. Ils ne pourront plus se parler comme si de rien n’était, comme s’ils n’avaient jamais eu cette conversation. Asher sait qu’il a dit des mots plus hauts que les autres, qu’il n’en pense pas la plupart. Il sait que Lenny fait de son mieux avec son âge et les possibilités qu’il a, avec les maigres pouvoirs à sa disposition, avec l’ingéniosité qui est la sienne. Il sait qu’il ne peut pas lui en demander plus parce qu’à dix-sept piges, on n’est pas responsable, parce que lui à seize, il n’était pas prêt à être père, il était juste bon à boire du champagne dans des nombrils de nanas à moitié à poil et vomir dans les chiottes des bars les plus prestigieux de New-York, ceux dans lesquels il avait l’habitude de dépenser des milliers de dollars par soirée. Il sait que c’est injuste parce qu’il n’a pas bu, parce qu’il est complètement sobre, parce que même s’il est crevé, il reste droit sur ses rails. Et il les mérite, les coups que Lenny lui assène. Il mérite cent fois, mille fois, il mérite qu’il lui dise qu’il aide ses amis davantage parce que c’est le cas. Pour la première fois depuis qu’il est entré dans la pièce, Asher a envie d’en ressortir immédiatement, de rentrer chez lui, de sortir une bouteille d’alcool fort des cartons qu’il n’a pas encore défaits depuis qu’il a quitté son ancien appart. Il a envie d’appeler Caïn, aussi, de lui demander de venir réparer le mal qu’il a fait, parce qu’il sait faire ce genre de choses, le cajun, il sait mettre de la pommade sur les bleus et attendre qu’ils se réparent. « Je me suis mal exprimé, Lenny, je », il n’a pas le temps de poursuivre parce que Lenny enchaîne les uppercuts, parce qu’il reprend sa litanie, parce qu’y a une boule qui se forme dans la gorge d’Asher et qu’il a beau déglutir, il n’arrive pas à la faire partir. Ouais, il s’est mal exprimé, mais pas autant que Lenny, parce que ce qu’il lui dit maintenant est pire que tout, et le laisse un instant le souffle coupé, les paumes plaquées contre le bureau. Tu nous laisses à la rue, il lui balance, tu nous laisses à la rue et ça résonne en boucle, comme une mélodie cruelle, le jingle d’un film de série B beaucoup trop glauque, tu nous laisses à la rue et un rire s’échappe des lèvres d’Asher malgré lui. Un rire ou un sanglot, en fait. Il sait pas, il sait plus, il a cessé de réfléchir, cessé de compter les points. Il a gagné Lenny, non. Il a gagné à l’instant-même où il a prononcé ces mots, où il l’a mis devant le fait accompli, dos au mur. Ouais, il a laissé ces gosses à la rue. Ouais, il ne les a pas emmenés de force chez lui. Il aurait peut-être dû faire ça. Il n’aurait pas simplement dû leur proposer l’asile, il aurait carrément dû les forcer, les bâillonner et les enfermer dans son appartement. Il aurait dû dénoncer Merle, River, Lenny, il aurait dû les balancer aux flics depuis un bon petit moment pour qu’ils les placent quelque part, qu’ils les éloignent des éléments toxiques de leur entourage. Il aurait dû essayer, au moins, essayer et c’est clair que les mots de Lenny l’accusent de ça, l’accusent de tout, l’accusent sûrement à juste titre. Il fait partie de ceux qui abandonnent sans en avoir rien à foutre. Et quand il dit qu’il ne deviendra jamais comme ça, Asher sait pertinemment ce qu’il pense. Je deviendrai jamais comme toi.
Il reste un moment silencieux, n’a pas relevé les yeux, se mordille nerveusement la lèvre et triture une peau morte qui entoure l’ongle de son pouce. « Je », il commence, ne sait pas quoi dire, tapote nerveusement le bout de sa chaussure contre le sol. « T’es pas le premier à qui je l’ai proposé, Lenny. De venir chez moi. D’héberger sans avoir vraiment l’argent pour, juste parce que. Je sais pas. » Ouais, faut dire que c’est pas la joie depuis que papa et maman ont coupé les vivres. C’est pas la joie tout court. Y a plus grand-chose pour le maintenir à flot, y a même plus Swann. C’était bizarre de vivre avec la meuf du pote avec qui il a couché. Y a même plus Minnie non plus. C’était bizarre d’avoir l’impression d’être celui par lequel tous les malheurs avaient commencé. Swann, Minnie, Elena. Y a plus Elena, ouais. Y a plus Caïn non plus, plus vraiment, il passe le voir de temps en temps parce que ça lui fait du bien, parce qu’il le rend heureux, parce qu’il passerait de heures à le regarder, à l’écouter parler. Ses visites se sont espacées, depuis quelque temps. Peut-être parce qu’il lui a caché trop de trucs, parce qu’il a peur que lui aussi se carapate. Ils le font tous. « Tu crois vraiment que je serais là si je pensais que vous êtes tous foutus ? » C’est une vraie question, pas dite méchamment, c’est une question soufflée comme un murmure, une certitude. Non, s’il pensait vraiment qu’il n’y avait rien à récupérer chez eux, il ne perdrait pas son temps avec eux, à sauver leurs culs dès qu’ils se mettent dans la merde. « J’ai conscience que je suis un privilégié, Lenny, t’as même pas idée comme j’en ai conscience, même si j’ai perdu mon job et que j’ai plus de famille, et que mes amis se comptent sur le doigt d’une main. Je sais que je suis né avec une chance que vous n’avez jamais eue, et ça me. » Hein, dis, Asher, ça te quoi ? Le mot ne sort pas, reste coincé. Peut-être parce qu’il est trop concret, trop douloureux. Peut-être parce qu’il vibre un peu trop en lui, ce mot, peut-être parce qu’il est comme un funambule qui penche un peu trop du côté du vide. Peut-être parce qu’il n’y a plus grand-chose pour le retenir. « Tu essaies de t’occuper d’eux et je suis sûr qu’ils sont chanceux de t’avoir, j’aimerais juste faire plus. » Traiter la cause, faire en sorte qu’il n’y ait plus de bleus, qu’il n’y ait plus de doutes, qu’il n’y ait plus manque de bouffe, de manque d’amour. « J’vous ai jamais regardés comme des déchets de la société. Je sais pas comment » et il s’arrête en milieu de phrase parce que sa gorge se bloque. Comment tu peux penser ça, Lenny, c’est ce qu’il voulait dire, c’est ce qu’il n’arrive pas à dire. « Tu veux que je fasse quoi, là ? Que je t’aide à sortir, que je les laisse te choper ? Dis-moi, Lenny, parce que j’comprends plus ce que t’attends. » Ce que t’attends de moi.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Lun 24 Juil - 22:35 | |
| Y’a les mots qui atteignent leur cible, il le voit bien, même à travers la vodka. Les mots qui heurtent, qui déciment, et il a envie de sortir un de ces vieux adages stupides, y’a qu’la vérité qui blesse, même s’il y a jamais cru. Il ne regrette pas. Pas encore. Il se forcera sûrement à ne pas y penser, plus tard, quand il se sera tiré de là, quand il aura dessaoulé, quand Lenny le gentil aura refait surface. Pourtant, il sait qu’il s’en sortira pas indemne, que tout ça va laisser des séquelles, que lui aussi, il s’est bousillé le cœur, lui tout seul, comme un grand, en cédant à la colère et à la facilité des reproches. Et Asher prend pour tous ceux qui les regardent de haut, pour tous ceux qui jugent sans connaître, qui ne voient en eux que des merdeux pourris gâtés qui ont fugué pour le plaisir de faire chier le monde. Alors que Lenny a sans doute la raison la plus égoïste de tous. Ils ont pas demandé à perdre leur famille, ils ont pas demandé à avoir des parents qui les aiment pas ou qui les prennent pour des erreurs de la nature, ils ont pas demandé à se faire taper dessus, ils ont pas demandé à se retrouver dans des familles d’accueil qui pensent qu’à l’argent que ça leur rapporte, ils ont pas demandé à avoir des proches qui se droguent, qui se barrent, qui se retrouvent en taule. Y’en a aucun qu’a souhaité ça. Alors ouais, peut-être qu’ils auraient pu choisir un autre chemin, peut-être que devenir un criminel n’est pas une solution, mais le choix était pas vraiment là, et puis, à force, on les a juste regardés comme des criminels, et à force ils se sont dit que c’est ce qu’ils sont, au fond. Lenny se souvient trop bien comment il les regardait, lui, au début. Quand il les avait tous rencontrés. Quand il avait compris que River et Otto se prostituaient, que Merle volait des voitures, que Jael se droguait, qu’Ariel dealait et que d’autres faisaient les poches des passants et d’autres tabassaient les mauvais payeurs. Et il se souvient qu’il a appris à les connaître, que certains se sont montrés doux avec lui, que d’autres l’ont protégé, et que d’autres encore ont seulement été horribles avec lui, jusqu’à ce qu’il comprenne qu’ils étaient pas si horribles que ça. Il se souvient qu’il avait beau savoir ce qu’ils faisaient de leurs nuits, mais qu’ils n’arrivaient plus à les définir que par ça, qu’ils n’arrivaient plus à les voir comme de mauvaises personnes, seulement des humains massacrés par la vie mais qui parvenaient encore à tenir debout, par un petit miracle qui devait se trouver dans une blague de gamins à son encontre ou un bête sourire en se croisant le soir. Pourtant, c’est trop tard. Trop tard pour expliquer vraiment, trop tard pour retirer ce qu’il a dit, ou plutôt ce qu’il n’a pas dit, les accusations implicites dans ses paroles trop dures envers Asher. C’est peut-être l’accumulation, c’est peut-être la fatigue de voir les regards désapprobateurs se poser sur eux, c’est peut-être une riposte légitime, c’est peut-être de la méchanceté gratuite. C’est trop tard pour dire je sais que t’es pas comme ça, Asher, trop tard pour excuse-moi, je suis saoul, m’écoute pas. Il n’a pas envie de revenir en arrière, peut-être parce que l’alcool le rend têtu, peut-être parce qu’il a l’impression qu’Asher l’a blessé le premier, et qu’il veut montrer qu’il peut être injuste, lui aussi. « J’en sais rien, mais t’agis comme tel. Si toi tu crois que je fais que les regarder sombrer, alors quand je regarde ce que tu fais, je me dis que c’est pareil. Tu aides, parfois, mais surtout parce que tu fermes les yeux. Tu sauves pas vraiment. » Ce qu’il dit pas, c’est qu’il sait très bien que personne ne sauve personne, qu’il n’y a pas de solution à tout, qu’il n’y a pas de superhéros tout-puissant qui va débarquer pour tous les sauver en même temps, que même si on peut sortir une personne de la rue, les dix autres suivront sans doute pas, parce que c’est comme ça, ils sont humains, et c’est plus compliqué que de simplement tendre la main. « Si t’es pas comme ça, si tu penses pas ça, montre-le. Tout ce que je vois, c’est un type qui m’a abandonné quand j’avais besoin qu’il me dise qu’il comprenait, même s’il comprenait pas, et ouais, c’est injuste, mais ose me dire que t’as pas été injuste. » L’injustice appelle l’injustice, le ressentiment appelle le ressentiment. Y’a cette plaie béante au fond de lui, sur laquelle il avait collé des tas de sparadraps provisoires, Darja m’aimera, Darja m’aimera, cette plaie qui s’est ouverte en grand, à vif, et il n’est pas sûr de pouvoir la refermer un jour. Pas avec Asher, en tout cas. « J’attends rien de toi, je sais même pas pourquoi t’es là. Je veux juste qu’ils appellent l’assistante sociale et qu’ils me laissent appeler mon parrain. T’as pas besoin de t’en charger. » Non, il ne veut plus avoir besoin d’Asher. Il ne veut plus de tout ça, il veut juste être un gosse normal, un peu, pour voir comment ça fait. |
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donne coeur, pas cher, déjà utilisé ▹ posts envoyés : 1889 ▹ points : 16 ▹ pseudo : Unserious/Agnès ▹ crédits : WHI, tumblr, bazzart / avatar : balaclava / AES : moi / gif : camille ▹ avatar : Ben Barnes ▹ signe particulier : un accent de liverpool, un tatouage "bad" au creux du coude, et une chevalière à l'index gauche. oh, et totalement casher. en théorie.
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| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Lun 24 Juil - 23:37 | |
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Lenny & Asher Expectation is the root of all heartache © creditimage|tumblr Il se sent à poil, Asher, nu et vulnérable comme il ne l’a jamais été, six pieds sous terre et Lenny continue de creuser, il continue de planter la pelle dans le sol en espérant sûrement le recouvrir suffisamment pour ne plus le voir. Y a ses doigts qui s’agitent mécaniquement autour des peaux mortes qui jouxtent ses cuticules, sa jambe qui tape inlassablement sur le sol, dans un mouvement qu’il n’arrive pas à contrôler. D’habitude il ne perd jamais la maîtrise de ses gestes, d’habitude il essaie de rester serein, quelles que soient les circonstances. Il ne s’y attendait pas, c’est sûr. Il s’attendait pas à ce que Lenny le déchiquette comme s’il était un misérable bout de bidoche. Ouais, c’est pas juste un chiot, c’est un putain de pitbull quand il a faim, quand il a les crocs. Et ça ne devrait pas l’atteindre, Asher. Il sait que c’est l’alcool qui parle, il se le répète. Mais ça lui bouffe les entrailles, littéralement, ça lui pince l’abdomen, ça fait se presser les sanglots contre ses lèvres et les larmes dans ses yeux. C’est pour ça qu’il ne relève pas les iris, parce qu’il n’a pas envie de montrer qu’il est à deux doigts de chialer, qu’il n’en peut plus, que les mots que Lenny lui assène sont comme des coups de couteau. Il aurait préféré qu’il s’en prenne physiquement à lui, même sans riposter, même sans rendre aucun coup. Il aurait préféré la douleur physique à la douleur morale, au térébrant chemin que ses mots creusent au fond de son esprit. Tu sers à rien, ça tonne, tu sers à rien, comme ce qu’avait semblé lui dire la Jael toute bleue qui s’était pointée à sa porte un matin et qu’il n’avait même pas réussi à consoler. Tu sers à rien, comme aurait pu lui reprocher le River qu’il avait repêché trop souvent de ses nuits de travail avec le corps à moitié fracassé. Y a que Merle et Caïn qui ne lui ont jamais donné cette impression, il pense. Il en est même plus sûr, c’est dire. Il ruine la plupart des gens qu’il approche, c’est un fait. Scarlett, putain. Scarlett, son amie d’enfance, ses grands yeux sombres et ses cheveux roux, son rire communicatif et ses cils longs comme la Bible, ses lèvres trop roses et ses blagues vaseuses. Scarlett, sa meilleure amie, Scarlett, Scarlett, Scarlett, tu sers à rien. Si, Asher, tu sers à foutre les gens en l’air, c’est tout. Tu sers à leur montrer qu’il est préférable pour eux de vivre dans la rue plutôt que chez toi, qu’il vaut mieux s’inviter à ta table plutôt que dans ton cœur. Y a qu’à voir Lenny, le gentil Lenny, t’en as fait quoi ? Tu l’as transformé en quoi ? En une espèce de truc aigri qui te balance des horreurs mais qui n’a même pas l’air désolé. « J’ai compris, Lenny », il dit malgré lui, parce que les mots deviennent trop durs à encaisser, parce qu’il a toujours craint les mots davantage que les actes. C’est pour ça, peut-être, qu’il préfère ne plus parler quand on l’agresse, quand on l’accule. Parce qu’il ne sait plus quoi dire pour rattraper les choses, pour revenir en arrière. Comme maintenant. J’ai compris, parce qu’il n’a pas besoin d’en entendre plus.
Mais il ne s’arrête plus, Lenny, il n’est même pas sûr qu’il l’écoute encore. Il aimerait lui répondre avec le même mordant, lui dire qu’il n’est bon qu’à se lamenter alors qu’il n’est pas le plus à plaindre. Il voudrait lui cracher les mots à la figure, lui dire qu’il ne l’a pas abandonné, qu’il lui a juste dit qu’il le décevait. Que s’il avait vraiment eu du courage, que s’il avait vraiment voulu s’en sortir, il lui aurait prouvé autrement qu’en descendant une bouteille de vodka et en venant jouer les gros bras ici. Il aimerais lui dire ça, il aimerait vraiment, mais il n’y arrive pas, parce qu’il y a déjà une larme qui coule sur sa joue et qu’il l’essuie rageusement sans lui jeter un seul regard. Sa mâchoire est serrée, ses yeux déjà perdus dans le brouillard. Y a plus rien, que du noir autour. On lui avait bien dit qu’il allait se faire bouffer par tout ça, un jour. Par son putain de complexe du héros, à vouloir sauver trop de gens, à ne jamais y arriver. Fallait que ça arrive aujourd’hui, fallait que ça arrive avec Lenny, les mains tremblantes et le pouls trop fort, la bouche trop sèche et les yeux trop humides. Je sais même pas pourquoi t’es là. Il se marre un peu, sans lever la tête. La belle ironie. « Moi non plus, je sais pas c’que je fais là. » Qu’est-ce qu’il peut répondre de plus, hein ? Qu’il est là pour lui, alors qu’il vient de passer dix minutes à élaborer sa grande théorie selon laquelle il n’essaie même pas de les sauver ? C’était une erreur. Une putain d’erreur. Une erreur qu’il ne referait pas si on lui en laissait la possibilité, si on lui permettait de remonter le temps pour venir dans cette pièce ou aller directement dans son bureau. Le bureau, mille fois, même si ça va encore plus mal quand il est seul entre quatre murs. Quand il est sûr que ses jambes peuvent le porter, il se lève, fait racler la chaise contre le sol dans un grincement lugubre. C’est le moment qu’un de ses collègues choisit pour entrer, l’observer un peu trop longtemps. Il sait parfaitement qu’il les a observés derrière le miroir sans tain, il sait qu’il a compris qu’il se connaissaient. C’est pas grave. Ils peuvent bien le virer pour avoir couvert un môme disparu, ça changera rien au fait que ledit môme le déteste. Je m’occupe de lui, l’autre flic lui dit, et il ne jette pas un seul regard sur Lenny, ne répond pas. Ça vaut pas la peine, pas vraiment. Il pourrait lui dire quoi ? Qu’il est désolé, une nouvelle fois ? Les deux premières n’ont pas suffi, la troisième ne servirait à rien. Il quitte la pièce, ignore le blondinet, va jusqu’au bout du couloir et referme derrière lui la porte du cagibi qui lui sert de bureau. Là, derrière la porte, il essaie de pleurer, parce qu'on lui a toujours dit que ça faisait du bien, que ça permettait d'extérioriser. Il n’y arrive pas. C’est pas inhabituel qu’il n’arrive pas à faire couler ses larmes, mais c’est la première fois qu’au lieu de la tristesse dont il est coutumier, il ressent une espèce d’indifférence, une absence de sentiments, un vide, un trou béant en plein milieu de sa poitrine. Plus rien.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) Mar 25 Juil - 22:01 | |
| Il a gagné, Lenny. Asher est parti. Asher a capitulé, Asher a rendu les armes. Il a gagné, Lenny, pourtant il se sent pas aussi triomphant que ce qu’il aurait espéré, il se sent pas aussi fier que prévu d’avoir dit ses quatre vérités à Asher, de l’avoir accusé de l’avoir abandonné, d’avoir été injuste en réponse à son injustice. Il a gagné, et il a pas tant l’impression que ça d’avoir gagné, comme si le jeu était trop facile, comme si ça avait été triché d’avoir bu une bouteille de vodka avant de parler, comme les cyclistes qui se dopent avant la course. Il a pas l’impression d’avoir gagné, parce qu’il savait exactement comment gagner, parce qu’il savait où appuyer, parce qu’Asher lui avait donné tout ce qu’il devait savoir sur un plateau d’argent pour le blesser. Asher qui voulait tellement les aider et qui pensait toujours qu’il ne servait à rien. Et ce soir, peut-être qu’Asher n’a servi à rien, c’est vrai, parce qu’il n’a pas pu faire dessaouler Lenny d’un claquement de doigts, parce qu’il n’aurait certainement pas dû rentrer dans cette pièce, après la dernière fois, qu’il aurait dû le laisser couler sans rien dire, parce que c’est sûrement pour le mieux. C’est sûrement pour le mieux qu’il quitte Peadar et l’appartement qui grouille de Lost Boys, et il pourra les aider plus tard, les aider ensuite, ne pas les oublier, comme tout le monde l’oubliait lui. C’est sûrement pour le mieux qu’il dise la vérité à Caïn, même s’il craint d’être rejeté, au pire il n’a plus très longtemps à attendre avant ses dix-huit ans, il perdra seulement une année d’études en famille d’accueil, ce n’est pas si grave avec son année d’avance.
Mais non, il n’arrive pas à se réjouir, en voyant Asher sortir, et un de ses collègues venir le remplacer, l’avis de disparition de Lenny entre les doigts. Il n’arrive pas à être heureux des larmes qu’il a fait couler sur les joues d’Asher, qu’il a remarquées malgré tout, même s’il a continué à parler, à asséner les coups. Il n’arrive pas à assumer les tu sers à rien qui transpiraient de ses paroles, la crainte d’Asher, toujours. Y’a la douleur qui pointe, quelque part, au fond de son cerveau, au fond de son cœur. Pas encore tout à fait présente, mais il sait qu’il va s’en vouloir, une fois l’esprit moins embrumé. La seule solution serait de continuer à boire pour toute l’éternité, pour ne pas regretter, pour ne plus jamais se sentir coupable des mots et des ratés, d’être un ami en carton, d’être une foutue déception. Il aime toujours Asher, en dépit de tout ce qu’il a dit. Lenny n’a jamais été le genre à haïr toutes les personnes qui l’ont oublié, qui lui ont tourné le dos, qui l’ont abandonné. Il déteste ça. Il déteste se dire que demain, il aimera encore Darja. Et Darja a commis plus de fautes qu’Asher, et Darja a été plus injuste que lui. Avec Asher, Lenny sait que c’est de sa faute aussi, qu’il a fait n’importe quoi. Mais c’est trop tard pour dire désolé, et quand l’alcool se sera évaporé, ce sera beaucoup trop tard. Alors il se contente de regarder l’autre policier et de demander en soupirant s’il peut enfin téléphoner. |
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| Sujet: Re: Why have you forsaken me (Asher) | |
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| | | | Why have you forsaken me (Asher) | |
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