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 bubbles trip (ashann)

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MessageSujet: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyDim 16 Avr - 0:55



You know I'm not one to break promises, I don't want to hurt you but I need to breathe. At the end of it all, you're still my best friend, but there's something inside that I need to release. Which way is right, which way is wrong. How do I say that I need to move on? You know we're heading separate ways. And it feels like I am just too close to love you, there's nothing I can really say. I can't lie no more, I can't hide no more, got to be true to myself. And it feels like I am just too close to love you. So I'll be on my way. Putain de chanson. Tu l’as trouvais vachement bien à l’époque. Nettement moins maintenant.
ashann
bubbles trip


T’arrêtes de fredonner cette connerie, et glisses sous l’eau. Comme ça t’es sûre d’arrêter de chanter. D’arrêter de respirer aussi. Mais ça, c’est souvent que t’arrêtes de respirer. Dans l’eau ou dans l’air. Enfin t’es pas un dauphin, alors tu ressors de là, visage trempé pour finalement cacher les sillons humides sur tes joues. Pour tes yeux rouges, tu accuseras le savon, même si la mousse a déjà bien  disparue de la surface de l’eau. Ou alors, tu accuseras la fumée. T’as enfumé la salle de bain. Il va peut-être râler Asher. S’il rentre avant que la ventilation ait tout aspiré. Mais c’est le seul endroit où tu fumes dans l’appart. T’aimes bien t’intoxiquer en macérant dans l’eau chaude. Y en a qui s’entaillent les poignets, tu t’aspires du goudron, c’est vachement moins rapide, mais tant pis. Tu ne mérites pas de mourir rapidement de toute façon. Plus t’y réfléchis, plus tu te dis qu’il faudrait que t’ailles filer un gun et une batte de baseball à Caïn, et le laisser décider. Mais ça ne serait pas le pire. Le pire ça serait qu’il n’en ait juste rien à foutre de ta tronche. T’es contente d’avoir mis la tête sous l’eau tiens, comme ça, même toi t’identifies pas la composition des gouttes qui te glissent sur les joues.

Tu te redresses, sors les bras de l’eau, t’as des doigts de grand-mère, ça te fait marrer. Ton rire te fait presque sursauter. En plus tu l’aimes pas ce nouveau rire grinçant et morbide. Tu dégénères complétement, petit bout par petit bout.  Tu perds ta douceur, tu perds ta légèreté, tu perds la clarté de ta voix et de tes rires. Ça craint. Alors tu t’essuies les mains, t’allumes une novelle cigarette pour crever et te prends une nouvelle cannette de bière pour t’anesthésier. C’est dégueu la bière en canette métallique, mais c’est pratique à ouvrir. Tu te renfonces dans l’eau, sourire las aux lèvres. Tu sais pas depuis combien de temps t’es là, mais l’eau est plus très chaude, et vu l’état de tes mains… Tu sirotes ta bière, et te demandes si tu ne vas pas pioncer ici, tiens. Nan tu vas te cailler. Bah… Tu rouvres le robinet d’eau chaude. Problème réglé. Tu payeras la prochaine facture d’eau, osef. T’es pas en déch’ d’argent. C’est à peu près le seul truc où t’es pas (trop) en déch’.

Tu commences à somnoler quand la porte de la salle de bain s’ouvre. « Heee… » protestation du siècle. T’as pas la foi. Tu rouvres les yeux, pour observer Asher. Il a pas l’air tout frais dis donc. Tu te redresses un peu, seins à peine cacher par la mousse. Mais tu t’en fous, t’es pas pudique, ton corps a toujours été un outil de travail pour toi. Il t’a jamais complétement appartenu non plus. Tu coupes l’arrivée d’eau chaude, ton bain ayant largement réchauffé. « Ça va ? Tu tiens debout ? »
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Asher Bloomberg

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyDim 16 Avr - 14:42



Swann & Asher
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Il n’aurait pas dû boire autant.
C’était une pensée qui avait tourné dans sa caboche depuis plusieurs heures déjà, alors qu’il se trouvait encore au comptoir du Smoking à enchaîner les shots de vodka. Il n’aurait pas dû boire autant parce que c’était dangereux, parce qu’il était une cible de choix pour pas mal de délinquants, parce qu’aussi, il disait et faisait des choses stupides lorsqu’il avait trop picolé. Il avait raconté des trucs à d’autres poivrots, les piliers de bar présents en permanence, ceux qui faisaient rarement l’ouverture mais restaient toujours jusqu’à ce que le patron retourne les tabourets sur les tables. Il avait raconté sa vie, sa maigre vie de jeune trentenaire, Scarlett et Samuel, papa et maman qui le détestaient depuis, quoi, trois ans maintenant, Max qu’il n’avait pas vue depuis tout ce temps. Elle avait eu vingt ans deux semaines plus tôt, la p’tiote, il avait envoyé une compilation des titres de rock incontournables, pour sa culture. Il n’était plus un grand frère, Asher, n’était plus un fils non plus. Il n’était plus un avocat, ne le serait sûrement plus jamais, parce qu’y avait cette boule dans son ventre à l’idée de croiser sa mère dans un tribunal. Il était flic, maintenant, et c’était grosso modo tout ce qui le définissait, flic, un saint parmi les pourris, un exemple de droiture au milieu des déviants. Il avait bu, Asher, parce qu’il y avait eu une accumulation de choses qui l’avaient fatigué, qui lui avaient bouffé la moelle et qui l’avaient laissé exsangue. Il était nase de faire semblant, nase de prétendre, nase de bosser, nase nase nase et les deux derniers verres avaient été fatals, les deux derniers verres lui avaient hurlé rentre chez toi maintenant. Il avait obéi, un peu malgré lui, persuadé qu’il ne trouverait plus le chemin de l’appartement s’il tardait trop et, malgré lui, trop fatigué pour opposer toute résistance.

Il ne savait pas si Swann était déjà revenue lorsqu’il avait poussé la porte de l’appartement. A vrai dire, il ne connaissait pas l’emploi du temps de sa colocataire et se contentait souvent d’un bonjour le matin et d’un bonsoir lorsqu’il revenait. Malgré tout, Swann était sûrement la personne qui le connaissait le mieux. C’était étrange de dire ça, étrange de le ressentir, parce qu’ils étaient partis sur de mauvaises bases et qu’il aurait pu garder l’a priori qu’il avait à son sujet, celui qui consistait à la qualifier de garce à qui voulait bien l’entendre. Il aurait pu continuer de penser tout cela, mais ce n’était plus New-York, ce n’était plus l’upper east side, ce n’étaient plus les soirées organisées par les Bloomberg dans leur immense loft avec des centaines d’invités tous plus célèbres les uns que les autres. C’était Savannah, et ici, il était pauvre, il était seul, et il était lui. La pauvreté l’avait changé, Asher, parce qu’il ne pouvait pas se cacher derrière, parce qu’il ne pouvait pas l’utiliser comme un bouclier ou comme une épée, l’arme omnipotente ultime, le passe-droit évident dont beaucoup de ses congénères abusaient. Et désormais, il aimait Swann, maladroitement et comme un funambule, à osciller entre la haine et la passion, capable de lui hurler les pires insultes et de la recouvrir de baisers l’instant d’après. C’était un sentiment qu’il n’avait pas connu avant elle, cette impression d’être totalement à sa place sous le même toit, d’être un peu moins intrus, un peu plus normal, d’être quelqu’un d’appréciable et d’apprécié pour l’essence-même de ce qu’il était. Ç’avait été difficile mais il avait réussi, finalement, à troquer une part de sa solitude contre une cohabitation avec la danseuse. Ça ne l’empêchait pas de continuer de vivre trop souvent de son côté, sans se soucier de savoir si Swann était en sécurité ou non. C’était une grande fille, après tout.
Il n’avait donc pas tendu l’oreille lorsqu’il avait tourné la clé dans la serrure, n’avait pas cherché à faire bonne figure lorsqu’il s’était rattrapé de justesse au meuble de l’entrée. Il avait négligemment jeté ses chaussures dans un coin, s’était machinalement dirigé vers la salle de bain. Il avait trop bu, beaucoup trop, tellement qu’il se rappelait vaguement avoir pissé au coin d’une rue. Il avait trop bu, et lorsque Swann lui avait demandé, depuis son bain, s’il allait bien, il avait eu un haut le cœur suffisamment éloquent pour ne pas avoir besoin de lui répondre. Il s’était précipité vers la cuvette de toilettes et avait vomi tout ce qu’il pouvait, les genoux heurtant violemment le carrelage et les mains crispées sur le rebord, un râle émergeant d’entre ses lèvres alors qu’il se redressait enfin, quelques secondes plus tard. Il avait tiré la chasse, avait fait couler un peu d’eau du lavabo dans le verre à dents pour se rincer la bouche, avant de tourner la tête vers Swann. « Ça va », il avait lancé, la voix rocailleuse. Il était blanc comme un linge, Asher, ce qui donnait à ses cernes une teinte encore plus sombre. Ça n’allait pas, en réalité, mais Swann était intelligente ; il n’avait pas besoin de lui dire explicitement, d’en faire des tonnes, de lui expliquer toutes les raisons qu’il avait d’aller aussi mal. Ce dont il avait besoin, c’était d’un bain.
Il avait observé un instant Swann, pas certain qu’il était sage de rester alors qu’elle était nue à un mètre de lui, parce qu’il y avait Caïn et que c’était suffisamment compliqué comme ça, mais il n’avait jamais été très pudique, Asher, et en plus de ça, l’alcool lui faisait perdre tout sens commun. Il avait enlevé sa chemise, son jean, son caleçon et s’était glissé dans l’eau tiède sans se soucier un seul instant de leur nudité commune. Il s’était assis aux pieds de Swann, face à elle, les fesses contre ses orteils et le dos calé contre la faïence. « Tu veux en parler ? », il avait murmuré, parfaitement conscient que quelque chose clochait aussi chez elle, parce que ça se lisait sur ses traits tirés, parce que ça se sentait à sa manière de baisse les yeux, comme si elle ne voulait pas qu’ils se regardent vraiment. Il avait soupiré, posé sa tempe contre le mur carrelé. La journée avait été longue, trop longue, et il avait fermé les paupières juste un instant, histoire de reposer un peu ses yeux. Il sentait déjà ses muscles se délasser avec la chaleur de l’eau. « Pas trop fort, par contre. S’teuplaît ».

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyDim 16 Avr - 17:16



Vive l’état. T’as encore une petite voix on fond de ta tête qui se demande s’il est bel et bien flic. Et puis après tu te souviens de tes talons aiguilles, perruques blanches et strings à paillettes, et du mot « ballerine » inscrit sur ton CV. La blague. Vous êtes de belles blagues à vous deux. C’est sans doute pour ça que ça roule si bien. Enfin si bien… entre vous quoi. Parce que t’es en train d’étouffer dans ta fumer, et lui, il épargne héroïquement le carrelage de la salle de bain de ses sucs gastriques et de ses divers repas de la journée. Excellent réflexe en tout cas. T’es presque surprise qu’il ait réussit à visé la cuvette des toilettes. C’était l’expérience ça. T’aurais presque applaudit. Mais tu te contentes de sourire pauvrement, Swann, semi-amusée, semi-attristée, mais carrément septique sur votre situation. Vous auriez eu vingt ans, pourquoi pas. Mais la trentaine passée, ça commençait à devenir sérieusement pathétique.  
ashann
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Tu te demandes un instant si tu ne vas pas sortir de l’eau, lui filer un coup de main. Ça serait bête qu’il s’effondre sur place et passe la nuit-là. Ou s’éclate carrément le crâne par terre. Donc oué, va peut-être falloir que tu l’aides à se mettre au lit. Mais malgré son état peu reluisant, il n’a pas l’air d’avoir envie d’une bonne couette. Tu le regardes comme il te regarde, t’attends de voir ce qui va se passer. Finalement, tes lèvres s’étirent un peu plus quand ton colocataire entreprend de se mettre à poil. Ça ne te perturbe pas des masses, Asher c’est Asher. Tu ne sais pas trop comment expliquer votre relation, ni comment ce petit con est devenu ton pote. Mais c’est bizarre. C’est un peu comme le cousin éloigné que t’as pas revu depuis un bout. Des fois tu l’aimes bien, des fois il te saoule, mais c’est la famille quand même. Et surtout, surtout, y a pas d’ambiguïté. Alors quand tu comprends son objectif, aussi désintéressé de ta personne physique que toi de la sienne, tu ne bronches pas. Tu te recules, replis tes jambes pour lui laisser de la place. Et puis tu lèves brièvement les yeux au plafond le temps qu’il s’installe. Tu n’es pas pudique, et c’est clair que t’en as déjà vu, mais ce n’est pas pour autant que t’as envie de regarder. La sensation de ses fesses sur tes doigts de pied, ça te suffit come promiscuité. Pas que ça te dérange, ça t’amuse presque. Ça t’amuserait si t’étais pas aussi minée, pauvre gamine.

T’essayes de sourire encore, mais t’es trop fatiguée. Tu jettes un regard à celui d’Ash, mais la mousse à la surface de l’eau semble bien plus intéressante. Tu aimes bien ses yeux. D’ordinaire. Sombres, mais étonnamment… confortables. C’est l’adjectif qui te vient à l’esprit, même s’il est quelque peu insolite. Mais là t’as pas envie. T’as pas envie qu’on te soutienne. Tu n’as même pas envie d’aller mieux. Tu n’estimes pas spécialement en avoir le droit, pauvre fille. Alors quand Asher ouvre le bec, tu préfères faire mine de pas comprendre. « Parler de quoi, jeune homme ? De ton état ? Je t’en veux pas…» C’est ça, fuis ma petite, comme d’hab’. C’est plus simple. T’as pas parlé fort, soit parce que t’as souscris au souhait de ton colocataire, soit parce que tu sais que t’en en train d’esquiver lâchement, tu ne sais pas. Mais clairement non, ta voix ne porte pas beaucoup. Pas comme d’habitude, bruyante et volubile Swann. Tu t’éteins encore. Tu fuis encore, soudain captivée par le mégot qui apparaît entre deux paquets de mousse. La clope que tu avais commencé avant de manquer de t’endormir semble s’être noyée. Tu l’extirpes de l’eau du bout des doigts et la rejette avec les autres cadavres, dans le cendrier par terre à côté de la baignoire. Tu soupires, relèves les yeux vers Asher. Tu détailles silencieusement les traits de son visage, te disant qu’il va falloir que t’avoues tout. C’est un flic, il sait comment te tirer les vers du nez. Sauf s’il n’a pas le courage. Tiens, si tu lui proposes une bière il va peut-être retourner vomir et aller se coucher. C’est une bonne diversion, nan ? Nan Enfin peut-être que si, mais là, c’est toi qui en a pas le courage. Si tu perds même de ta cruauté, c’est que tout va mal.

Réflexion faite, t’as peut-être envie de vider ton sac. D’avoir un autre avis sur ta personne que le tiens. Que ce soit le même ou pas, osef. Dans les deux cas ça te fera autant de mal que de bien. Tu relèves les yeux vers ceux d’Asher, et tu te dis que ne t’as pas envie de les voir. Ni d’y trouver un quelconque soutien, ni d’y voir un quelconque jugement. Alors la mousse devient ta meilleure amie, et tu bidouilles avec, essayant vainement de créer de monticules de bulles de savons qui s’effondrent aussitôt. Ta voix s’élève faiblement, tu marmonnes dans la barbe.   « J’y suis retrouvée, dans leur quartier, cet aprèm. Mais je suis pas allée le voir. J’ai eu tellement peur de le croiser, ou elle. J’en ai dégueulé derrière une poubelle dans une ruelle. Mais je jure que j’étais sobre monsieur l’agent. C’aurait peut-être été moins violent si je l’avais pas été d’ailleurs. » Tu soupires, et tu te demandes, tout à fait trivialement, si c’est pas aussi punissable par la loi d’une façon ou d’une autre de dégueuler su la voie publique. En vrai tu t’en fous, t’essayes juste de te concentrer sur autre chose.

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Asher Bloomberg

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyJeu 20 Avr - 19:49



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Il avait encore envie de vomir, Asher. C’était peut-être l’odeur sucrée du bain, peut-être le récit de Swann. Il avait déjà entendu l’histoire, trop et trop peu à la fois, parce qu’il connaissait les prénoms, les lieux, les souvenirs mais bien moins les raisons, parce que Swann les cachait comme elle faisait avec beaucoup de choses. Il savait qu’elle était partie, savait qu’elle était encore amoureuse, quelque part, y avait pas à creuser très loin d’ailleurs. Swann était amoureuse de Caïn, et pour autant, elle partageait sa baignoire avec un autre mec. Y avait même pas de véritable excuse à son comportement, c’était comme pour Asher, une surenchère de pathétisme agrémenté d’auto-flagellation. Ils auraient aimé se dire qu’ils n’étaient pas responsables de leurs vies de merde, mais la vérité, c’était que les catastrophes qu’ils avaient connues avaient éclos de leurs propres incertitudes. Swann aurait pas dû se barrer, Swann aurait dû garder la tête bien haute et dire ce qui n’allait pas, quitte à ce que ça gueule, quitte à ce que ça chauffe. Asher aurait dû dire à Samuel qu’il était amoureux de lui bien avant d’arriver à l’autel, il aurait dû l’embrasser à l’une de leurs fêtes d’étudiants, coincés entre une porte et un mur, devant tout le monde. Il aurait dû faire en sorte que ça se sache, quitte à ce que ça le détruise. Le résultat était le même après tout, non ? Ils étaient misérables, seuls, à cuver dans leur bain de mousse en se racontant leurs journées. Ils se parlaient de leurs vies minables en essayant de se consoler, de se dire qu’ils se soutenaient et que c’était le plus important. Conneries. Ils ne se soutenaient pas, Asher et Swann. Ils se moquaient l’un de l’autre, souvent, se taquinaient en permanence. Ils se cherchaient et finissaient inéluctablement par se trouver, et quand ils étaient trop crevés pour se faire la guerre, ils plongeaient dans le même bain. C’était stupide et insensé et pas vraiment mature. Ça ne ressemblait pas à l’image qu’ils aimaient bien donner, chacun de leur côté, le flic et la danseuse, les grandes âmes qui sauvent les petites gens de la misère.

Il avait froncé les sourcils, Asher, s’était un peu tassé dans le bain avec un grognement familier. « J’serais pas le mieux placé pour te faire la morale sur l’alcool, Swann », il avait lancé dans un murmure vaseux. Il avait beau être bourré, il était conscient que c’était pas vraiment le sujet, en l’occurrence. Elle essayait de relativiser, Swann, comme elle le faisait pour tout. Seulement, pouvait-elle reléguer Caïn à une simple anecdote de nana qui gerbe derrière une poubelle ? Si Asher avait retenu quelque chose, c’était que ce mec avait fait partie de la vie de sa coloc pendant plusieurs années, une dizaine s’il se souvenait bien. « T’aurais pas dû partir ». C’était un souffle alcoolisé qui s’était échappé d’entre ses lèvres, comme une complainte. T’aurais pas dû partir, il avait dit, et il avait rouvert les yeux, s’était un peu mordu les joues pour ne pas éclater en sanglots. Il était pathétique, Asher, quand il avait bu. Il avait ri, un peu, pour s’empêcher de pleurer, pour pas être misérable. Il avait ri et avait de nouveau fermé les paupières, la tête appuyée contre le mur, sa main cherchant celle de Swann sous l’eau. Il aurait voulu être d’un plus grand réconfort, être plus utile, prodiguer de meilleurs conseils, mais c’était le maximum qu’il pouvait donner de lui, à cet instant. « J’dis pas ça pour que tu sois mal », justification miteuse et sans grand intérêt. Il avait tout intérêt à ce qu’elle aille mal, simplement pour ne pas être le seul à débloquer. « J’dis ça parce que j’aurais pas dû partir non plus. Les mauvais choix, je connais ». Il avait soupiré, lascivement, avait sorti le bout de ses orteils de l’eau parce qu’il commençait à avoir trop chaud. Les mauvais choix, il connaissait. Aimer Samuel, aider Merle, craquer pour Elena. Les mauvais choix, c’était son petit-déj, le truc qu’il bouffait tous les jours sans même s’en rendre compte. Devenir flic, par-dessus tout, avait été le pire de ses mauvais choix, celui qui remportait la médaille à coup sûr. Il était bon dans ce qu’il faisait, n’en déplaise à quelques uns qui auraient aimé le voir partir parce qu’il était trop intègre, trop pur, trop intelligent peut-être. Parce qu’il n’était pas comme la majorité des policiers aux énormes biceps qui terrorisaient les gosses en perdition, parce qu’il était le « bon flic » qu’on voit dans les mauvaises séries, celui qui fait de jolies promesses pour que tout le monde y trouve son compte. C’était ça, Asher. Une flopée de jolies promesses. « Pourquoi t’irais pas leur parler, un jour ? » Question naïve, murmurée du bout des lèvres parce qu’il avait trop bu, sûrement, pour oser demander ça. Il avait rouvert les yeux, la tête toujours appuyée contre le carrelage comme si elle tenait plus toute seule. Pourquoi, hein ?

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyJeu 20 Avr - 21:29



Swann, hein. Ça te fait toujours bizarre de l’entendre appeler comme ça. De t’entendre appeler comme ça? Mais c’est sous le nom là qu’il t’a connu. Alors forcément, il l’utilise. Et puis tu vas pas l’empêcher de le faire. Alors que t’essayes de redevenir cette nana que t’étais. Forte et flamboyante. Et avec eux. Surtout. Mais oui, ça te fais bizarre. Ça te donne envie de te jeter dans ses bras. Pour un câlin. Pour un vrai soutien. Mais vous êtes pas comme ça. Vous vous collés des pichenettes sur le nez, des coups de poings sur l’épaule ou des tapes dans le dos. Au mieux. C’est pas le but, au fond, de vous entre-aider. Vous vous évitez de coller. Mais vous vous aidez pas à vous envoler. Peut-être pour pas rester seul. Peut-être parce que vous êtes pas fichue de dire toute la vérité (rien que la vérité). Et que sans ça vous pouvez vous entre-aider. Peut-être que vous le savez pertinemment. Et que vous avez juste pas envie d’être aider. Et de vous envoler à nouveau. Et d’avoir à nouveau peur de vous écraser. Rester au sol pour ne plus tomber. C’est lâche, mais pour l’instant, c’est comme ça. 
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« T’aurais pas dû partir » Tes joues rougissent, comme s’il t’avais giflé.Tu relèves la tête, regard noir et poings serrés, prête à l’éclater contre ce con de carrelage qu’il prend pour oreiller. Ton corps s’est toujours exprimés mieux que tes mots. Et si tu caches ton mal comme tu peux, tes poings tendent à le libérer à la moindre occasion. Mais non. C’est pas contre toi. Enfin si c’est contre toi, mais pas que. Contre lui aussi. Tu le vois à ses traits qui s'affaissent. Qui reflètent les tiens, pas longtemps guerriers. Tu te perds dans son regard noir un instant, avant qu’il referme les paupières, avant que ta vue se brouille. Son pauvre rire, tu le connais, tu as le même. Il te fendille l’âme. Alors t’attrape les doigts d’Asher qui t’effleurent la main. Un peu fort peut-être, comme si ça t’empêcherai de tomber, ou le retenait lui. Tu sais pas trop. Tu laisses les larmes rouler sur tes joues un instant, il ne te voit plus. Tu l’écoutes, hoches la tête, même si ça non plus, il ne peut pas le voir. Tu regardes les gouttes salées tomber dans l’eau troublée du bain, et dessiner de petits ronds, à peine perceptibles. Mais tu as appris à les repérer à force. Tu pleures que quand on ne te voit pas. Et généralement, tu es seule, dans ta baignoire.

Et il te pose la question. La question à laquelle tu connais parfaitement la réponse. Même si tu ne t’en donne toujours qu’une partie. La partie logique. Celle que tout le monde connaît, déduit. La plus dure et la plus facile à la fois. Celle que tu répètes encore, comme si c’était pas évident. Comme si la question d’Asher appelait réellement une réponse. Et comme pour te la rappeler à toi, pour recouvrir l’autre. Alors tu répètes, litanie. « Parce que je sais pas s’ils ont envie de me voir. Parce que j’ai pas envie de foutre encore le bordel dans leur vie. J’ai pas le droit de leur faire plus de mal pour aller mieux. Même si je sais pas c’que ça va leur faire. Ca s’trouve ils en auraient rien à battre. » Ta voix s'éteint. Il te hante ce scénario. Parce que si c’est le meilleur pour eux, c’est le pire pour toi. Parce qu’il est hautement improbable aussi.

Pendant que tu parles, tes doigts jouent nerveusement avec ceux d’Asher. Tu t’y agrippes, à eux et leur chaleur humaine. La fin de la réponse, celle que t’a pas dit,que t’as jamais dite, et que personne ne sait te cognes l’arrière du crâne. Tu fixes un instant les paupières closes de ton coloc’. Tu as l'impression qu’il t’écoute pas, même si tu sais qu’il le fait. Autant qu’il le peut dans son état. Peut-être que c’est ça, peut-être que c’est vos mains qui se tiennent, peut-être que tu n’en peux juste plus. Mais tu te retournes, cales ton dos contre le buste de ton coloc’ et attrapes ses deux mains. C’est pas conventionnel du tout comme situation, encore moins que la minute d’avant, mais tu peux pas continuer de parler sans de l’aide. Sans soutien. Sans un peu plus de chaleur humaine, vivante. « Et parce que va falloir que je lui raconte ce qu’il sait pas. Les hommes et les femmes qu’il y a eu avant que je parte. Déjà ça c’est pas… glorieux. Et...» T’as du mal à parler. Ta gorge te serre. Tu retiens tes sanglots et essayes de contrôler les sursauts de ta poitrine. « Et le bébé... » C’est la première fois que tu dis ce mot à voix haute. Tes paupières se pressent, déversant un flot de larme sur tes joues alors que tu te mords la lèvre inférieure, trop fort. Tu t’en fous, t’as mal autre part. Sans lâcher les mains d’Asher, tu portes l’une des tiennes contre ton ventre secoué de sanglots, tiraillé par une douleur fantôme. Tu te recroquevilles sur toi-même, n’arrivant plus à contrôler tes larmes. Asher, il doit rien comprendre. Mais tu peux pas lui expliquer. Tu peux plus parler, et tu peux plus bouger. Ça te fait trop mal d’en parler, et d’y repenser, pour de vrai.
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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyMar 25 Avr - 19:24



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En temps normal, il n’aurait pas réagi. Pas parce qu’il n’avait pas de sentiments ou parce qu’il était immunisé à la tristesse des autres. C’était plutôt tout le contraire, Asher, une éponge, un papier buvard, à aspirer tout le temps les émotions des autres, à pas voir quand ça risque d’être trop, quand ça risque de lui faire mal. C’était drôle comme il se foutait de l’effet que pouvait avoir cet altruisme sur lui, Asher, drôle comme il ne s’en préoccupait pas lorsque quelqu’un tendait la main vers lui pour obtenir de l’aide. Ça ne lui arrivait pas souvent, remarquez. La plupart du temps, les gens n’osaient pas s’adresser à lui. Soit disant qu’il faisait peur, avec ses yeux trop noirs et cernés, avec sa stature, toujours très droit et très digne, toujours glacial et distant. Elle avait dû l’apprendre à l’apprivoiser, Swann, en l’invitant à regarder des films avec elle sur un coin de canapé, en lui amenant des verres de lait tard le soir, quand il s’avachissait sur son bureau pour finir un dernier rapport. Elle avait dû l’apprivoiser comme on le fait avec une bête sauvage, doucement et à force de patience, à force d’efforts pour gagner sa confiance et pour ne pas le brusquer. Elle avait dû l’apprivoiser, mais il n’avait jamais fait d’efforts, lui. S’il n’avait pas été saoul, jamais il n’aurait plongé dans ce bain avec elle. Il était assez pudique, suffisamment pour ne pas se montrer à poil devant quelqu’un qui ne partageait pas son lit. Mais Swann partageait sa vie. Swann était là depuis des semaines, des mois, Swann le réconfortait par sa seule présence (parce qu’il n’avouait jamais quand ça n’allait pas, préférant la laisser deviner par elle-même). Swann était douce et attentionnée et lorsque Swann avait fondu en larmes dans ses bras, il avait rouvert péniblement les yeux et l’avait serrée contre lui, comme on serre un truc trop fragile dont on aurait peur qu’il se casse. Leur proximité soudaine était étrange, malvenue, parce qu’elle était entre ses jambes et qu’ils étaient franchement nus, parce que lorsqu’il avait voulu bouger les bras pour se repositionner, il avait effleuré ses seins, et c’était bien trop bizarre et incongru pour ne pas le souligner. Il était trop bourré pour avoir la gaule, Asher, mais ça ne l’empêchait pas de penser, dans un coin de sa tête, qu’ils ne devraient pas jouer à ça, à cette proximité soudaine alors qu’ils étaient dans leur plus simple appareil. Ç’aurait été indélicat de le faire remarquer à Swann qui, visiblement, n’en avait rien à foutre. Il avait juste murmuré « ça va aller », ses doigts caressant le bras de la danseuse, formule faussement rassurante et carrément pathétique.
Elle parlait de femmes et d’hommes et il n’y comprenait pas grand-chose. Enfin si, plutôt, il comprenait trop bien. Il avait eu un haut-le-cœur, soudain, le prénom de Samuel trop proche de sa lippe, impossible à prononcer à voix haute, parce que ça devait faire trois ans qu’il ne l’avait pas évoqué en présence de quelqu’un d’extérieur. Il s’était apprêté à bégayer, à dire que ce n’était pas grave, que c’était juste quelques tromperies sans importance, et puis Swann avait prononcé un mot qui l’avait figé sur place. Bébé. C’pas qu’il aimait ce terme parce qu’en réalité, un bébé c’était chiant, casse-couilles, ça pleurait en permanence pour un oui ou un non, ça savait rien faire à part manger, dormir, chier, pleurer, mais ça l’avait heurté et il avait resserré Swann contre lui. Il n’en avait plus rien à faire, de la main contre ses seins et de l’étrangeté de leur position, cet entrelacs de corps dont ils n’avaient pas l’habitude. Ce qui le questionnait, c’était ce bébé, ce qu’il était, d’où il venait, pourquoi elle en parlait maintenant alors qu’elle ne l’avait jamais évoqué. « Je », il avait commencé, bègue jusqu’au bout, le grand Asher incapable de retrouver ses mots lorsqu’il était pris au dépourvu. « Je ne savais pas », un chuchotement dans l’atmosphère trop lourde de la salle de bain, alors que Swann pleurait toujours dans ses bras. Il avait déposé ses lèvres sur le front moite de Swann, avait laissé sa tête s’attarder contre le coussin de ses cheveux, décidément trop ivre pour vraiment réagir. C’était le coup de massue, ce à quoi on ne s’attend pas dans une discussion normale, ce que l’on espère avoir mal entendu. C’était imprévu, c’était douloureux, c’était délicat de la voir comme ça, fragile et désastreuse. Elle était différente, Swann. Rien ne l’atteignait, rien ne pouvait l’atteindre. C’était ce qu’il pensait, en réalité.

Sa main s’était tendue, avait attrapé une bouteille de gel douche qui se trouvait là où était Swann quelques instants plus tôt. Il en avait déposé un peu sur les épaules de la danseuse, avait reposé le flacon avant d’apposer ses mains sur sa peau matte. Lentement, ses doigts avaient massé l’épiderme, comme si ce simple geste pouvait arranger les choses. Il était con des fois, Asher, à vouloir résoudre les problèmes en en créant de nouveaux. Nul doute que si quiconque entrait dans la pièce à ce moment-là, il serait persuadé que les deux filaient le parfait amour. « Tu veux en parler ? », il avait lâché au bout de trop longues secondes, entouré par l’odeur de la mandarine dégagée par le savon. C’était une question, c’en était pas une. Lui n’avait pas envie de parler de Samuel, ni d’Elena, alors il préférait laisser à Swann le choix.

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyLun 1 Mai - 19:38



T’as froid, malgré l’eau, malgré Asher. Tu trembles comme un chiot apeuré, abandonné sous la pluie. Tu trembles de froid, mais de douleur aussi. Ça t’arrache encore les tripes. Encore et encore à chaque fois que ton esprit s’aventure sur cet horizon obscure. Alors d’habitude, tu fuis. Tu détournes le regard, refoule ces sombres réminiscences et te concentres sur d’autres. Tu as assez de mauvais souvenirs en stock pour en trouver un autre pour te torturer.  Mais cette fois, tu as décidé de t’y promener, et tu t’écorches sur chaque bride de souvenir, sur chaque mot. Surtout celui-là.
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Ce mot-ci, il frappe Asher. Tu le sens à la tension de ses muscles. Et c’est la seule chose dont tu as encore conscience. Si tu es physiquement là, dans cette eau trouble, dans cette pièce étouffante, ta conscience s’est projetée presque deux ans plus tôt. De l’autre côté du pays. Avec cette vieille sorcière que tu détestes autant que tu lui restes reconnaissante. Cette vieille sorcière noire comme l’ébène, dont tu souviens parfaitement des cheveux grisâtres. Seule luminosité dans  l’obscurité du moment. Dernière image avant que tu t’évanouisses sous la douleur. Ton esprit s’attarde sur les détails de ses mèches grisonnantes, tu t’y accroches comme tu t’accroche aux mains d’Asher. Pour ne pas sombrer. Pour ne pas définitivement imploser, baisser les bras et te laisser couler dans cette eau sale et mousseuse. Pour pas te laisser happer par des souvenirs trop douloureux, trop frais, malgré les années. Mais tu as l’odeur du sang qui t’emplies les narines, qui s’insinue entre tes lèvres. Et tes muscles qui se contractent, fuyant une souffrance fantôme. « Je ne savais pas. » La voix d’Asher, terriblement ancrée de le présent sordide de cette salle de bain embuée t’aide à te maintenir de le réel. Tu te forces à ouvrir les yeux. Laissant échapper un nouveau flot de larmes. T’essayes de t’essuyer les joues, avec tes mains trempées qui inondent d’avantage ton visage, et tu renifles, pitoyable.

Tu fixes ton regard sur ta bouteille de shampooing pour cheveux bouclés. Détail totalement trivial de votre réalité. Mais elle te rassure, ridiculement. T’arrêtes de respirer, pour arrêter de pleurer, pour arrêter de trembler comme une feuille. Tu arrives à arrêter les secousses, mais tu n’arrêtes pas les larmes. Toutes tes émotions enfouies depuis tout ce temps qui s’extraient de toi par dizaines de gouttes d’eau salée. Tes muscles se relâchent doucement. Les mains d’Asher sur tes épaules te rassurent un peu. Elles te ramènent un peu plus à la réalité. A votre drôle de situation. Un sourire fugace passe sur tes lèvres. Et ça ? Faudra que t’en parle à Caïn ? Non. Parce que ça a pas d’importance. La seule importance que cette situation à, c’est le soutien qu’Asher t’apportes. Et tu te rends doucement compte que sans lui à tes côtés, peut-être que tu te serais déjà effondré. Que t’aurais déjà fui. Et que quoiqu’il arrive si tu vas... quand tu iras voir Caïn, ça arrivera sans doute grâce à lui. Alors peu importe votre proximité et votre nudité. Et de toute façon, ce genre de détail, t’en as jamais eu rien à foutre. T’inclines la tête, appuie brièvement ta joue mouillée sur les mains savonneuses d’Ash’. « Merci… » Tu murmures du bout des lèvres.

Non. Bien sûr que non, tu n’as pas envie d’en parler. Pas maintenant. Pas plus tard. Jamais. Mais tu n’as pas réellement le choix. Parce que va falloir que t’en parle à Caïn. Et encore une fois à Bambi. Et peut-être encore une fois à un médecin, pour voir l’étendue des dégâts. Parce que t’es une pauvre folle et que t’as préférer tourner la page de tout ça dès que possible. Quitte à risquer ta peau. T’es  d’une inconscience sans bornes parfois. Tu soupires, et reprends doucement ton souffle. « Il y avait un type à L.A. C’était… un… un espèce d’ersatz de Caïn.  Mon Dieu c’est horrible mais… mais c’était ça. Que ça. J’me souviens même pas de son visage. C’était juste… un… un substitut. » Tes mots semblent cruels, mais ils sont juste vrais. C’est toi qui es cruelle, et terriblement égoïste. Tout le temps, tous les jours. Même en te confiant à Asher, en lui imposant ton corps nu et tremblant contre le sien. Tu baisses la tête, honteuse de ce que tu racontes. Tu es tellement pitoyable, tu le sais parfaitement. « Enfin… j’ai fais un… déni. C’est… quand t’es enceinte mais t’as absolument aucun symptôme. Rien. » Tu te mords la lèvre inférieure. T’as pas envie de continuer. Mais il est trop tard pour faire marche arrière. Tu dois continuer. Même si la suite continue à se dessiner d’elle-même.   « J’me suis rendue compte trop tard. Et… et… » Tu étouffes. Il fait trop chaud et ta gorge se contracte à nouveau. L’odeur du sang revient couvrir celui de la mandarine. Un haut le cœur te secoue violement, te plie en deux. Mais t’as rien dans le bide. Plus rien du tout. Tu peux que cracher un peu de bile dans l’eau du bain. Tu glisses ta main sur tes lèvres,  faut que tu finisses ton histoire bordel. Mais si t’arrache encore un bout de tripes. Tu t’appuies à nouveau contre Asher, et cherche une de ses mains de la tienne, par-dessus ton épaule. T’en as besoin. Une fois ta main réfugiée dans la sienne, tu reprends à nouveau ton souffle pour finir. Pour arracher en entier le premier des nombreux cataplasmes que tu t’es entêtée à empiler sur cette plaie béante. « Alors c’était trop tard pour… les centres tu sais. Alors j’ai demandé à une vieille de faire ça. A… à l'ancienne méthode quoi. » Tu renifles pauvrement, et tu pleures à nouveau, doucement. D’une vieille et profonde tristesse jusque-là tapie sous la douleur.
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Asher Bloomberg

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyMar 2 Mai - 15:11



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Samuel. Samuel et New-York. Samuel dans la grande suite louée pour son enterrement de vie de garçon, assis sur le canapé, le tu te fous de ma gueule qui retentit dans toute la pièce. Silence. Ouais, il se foutait sûrement de sa gueule, ouais, il n’avait qu’à ignorer ce qui se tramait dans son ventre, au creux de ses tripes, les abeilles qui volent et qui le piquent par la même occasion, bien loin des habituels papillons. Sam, écoute, il avait essayé, tenté, on sait jamais ce qui peut marcher après tout, foutu pour foutu. J’ai rien à écouter, tu me racontes quoi, j’comprends rien, il avait baragouiné, s’il n’y avait eu que ça, si ça s’était arrêté là. Le cerveau d’Asher rejouait le moment en boucle, comme une mélodie périmée, une ritournelle qu’on aurait trop entendue. Y avait eu le désarroi de Samuel et puis le regard plus appuyé que celui d’avant, le putain soufflé alors qu’il se penchait sur lui pour que leurs lèvres se percutent encore, y avait eu la nuit qui avait sûrement été la plus belle des nuits et le lendemain entre rêve et réalité, pas tout à fait là, ailleurs, loin. Vous n’avez pas trop fait les fous j’espère, Scarlett avait dit en souriant lorsqu’ils étaient rentrés. Ils s’étaient regardés. Non, ils n’avaient pas fait les fous, sauf si tout ça était une folie, sauf si c’était bizarre. Ça l’était en fait, parce qu’il y avait eu l’après, le sexe avec elle qui ne voulait plus rien dire, les discussions à l’heure du café qu’avaient plus la même gueule depuis que le couple s’était transformé en triangle, fallait lui dire mais fallait pas, le mariage était toujours en préparation dans un coin de sa tête et le coin opposé avait seulement envie de Sam, Sam, Sam, tambourinait comme un gamin qui jouerait avec une caisse claire. Ça s’était rapidement transformé en cauchemar, un cauchemar dont Samuel était l’antagoniste, toujours, celui qu’avait tout fait déconner, alors qu’il n’y était pour rien, alors qu’il n’y avait jamais pensé, alors qu’il avait simplement répondu à un baiser et que ça avait dérapé, que ça s’était enchaîné. C’était plus simple de se dire que Sam était le méchant. Ça permettait de lui coller une étiquette sur le front et d’avancer, de se dire que si le mariage était annulé, c’était de sa faute, que si Scarlett avait le cœur brisé, c’était parce qu’il l’avait détourné d’elle, c’était hypocrite, froid, calculateur mais c’était plus simple, tellement plus simple.
Il n’allait pas blâmer Swann pour ses mauvaises décisions, Asher. Pour les hommes, les femmes, le bébé, l’avortement. Ça serait con, ça serait le comble, paille, poutre, tout ça. Ça serait stupide de lui dire qu’elle est fautive, qu’elle aurait dû faire autrement. Elle souffrait déjà suffisamment, à gerber sa bile dans la baignoire, recroquevillée contre lui. Il avait serré un peu plus fort, attrapé sa main. « Je suis là », il avait murmuré à son oreille, maigre réconfort. Il n’était pas grand-chose, Asher. Il n’avait jamais été particulièrement réconfortant, particulièrement chaleureux. Sans oublier qu’avec ce qu’il avait fait à Samuel, on pouvait directement le placer en haut de la pyramide des pires amis qui existent. « T’aurais jamais dû avoir à vivre ça ». Il avait glissé une main réconfortante dans ses cheveux, les lèvres appuyées à la lisière, déposant des dizaines de baisers sur sa tempe humide. Il ne savait pas s’y prendre autrement qu’en embrassant, Asher, il n’avait pas l’habitude des sentiments extériorisés, il essayait le plus souvent de contenir ceux des autres, d’éviter toute proximité pour ne pas qu’ils s’épanchent. Ç’avait loupé, avec Swann, ç’avait été un fiasco total, elle chialait dans ses bras et il n’avait aucune putain d’idée de la manière dont il pouvait la réconforter. Etrangement, ça semblait plus facile avec Elena, avec la haine déversé et la tristesse contenue, avec des réponses binaires que son pauvre cerveau arrivait vaguement à comprendre, oui, non, je t’emmerde, des phrases simples qu’il n’avait pas besoin de décoder. Swann parlait un autre langage, pleurait une autre peine, souffrait une autre douleur.

Il avait glissé une main sur la joue de Swann, avait engagé un subtil mouvement de balancier avec son corps pour la bercer, toute blottie contre lui, comme une gamine paumée alors qu’ils étaient des putain de trentenaires. Ils avaient plus l’âge pour ces conneries, techniquement. Pleurer sur des gens, des situations. Y avait un âge pour être triste, hein ? Ce qu’il voulait dire, c’est que ça s’arrêtait à un moment, non ? ça continuait pas jusqu’à la mort ? Il avait pas envie, pas vraiment, il se passerait bien de cette douleur lancinante dans les côtes et de son estomac crampé comme pas possible. « Faudra peut-être que tu lui en parles ». Y avait le peut-être, censé atténuer le côté moralisateur de sa remarque. Il n’était personne, Asher, pour prétendre savoir ce qu’il fallait faire ou non. Swann s’était déjà embringuée dans quelque chose de suffisamment compliqué pour pas qu’il en rajoute une couche. « Si tu le fais, et que tu le fais comme avec moi, il ne pourra pas t’en vouloir ». Il avait dit ça doucement, calmement, comme s’il s’agissait d’une évidence. C’était une évidence, ça sautait aux yeux qu’elle regrettait viscéralement tout ça, c’était clair comme de l’eau de roche, c’était transparent. Il avait embrassé sa joue, doucement, avait posé la sienne tout contre. Il connaissait Caïn, pas beaucoup mais suffisamment pour savoir que c’était quelqu’un de bien, et qu’il était en mesure de comprendre la détresse de la danseuse. « Lui dis pas que t’en as parlé avec moi et qu’on était à poil dans une baignoire, par contre », il ajoute dans un souffle, voix légèrement amusée, histoire de détendre l’atmosphère, si seulement c’est possible. Lui dis pas, et ça résonne comme une promesse de secret dans la salle de bain trop petite.

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyMar 2 Mai - 21:27



Tu chiales, encore et encore. Trop d’émotions refoulées qui s’échappent avec violence de toi. Ça sort, et ça balaye tout. Asher, il reste là. Peut-être parce qu’il est trop ivre pour fuir, peut-être parce qu’il a envie de rester là à tenir le cap alors que toi, tu pars à la dérives. Tu lui en seras redevable. Tu l’étais déjà un peu, tu l’es encore plus maintenant. Et tu t’accroches à lui comme à une bouée de sauvetage, tu pleures, tu craches, ta bile et tes plaies les plus profondes.
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Mais oui, il est resté là Asher. Il est là. Tu prends lentement conscience de ses baisers sur ton front. C’est con, mais ça fait du bien. T’as jamais eu personne pour s’occuper de toi comme ça. Même pas ta mère. Elle ne t’a jamais cajolé, comme ton colocataire le fait pour tenter de t’apaiser. Elle n’était pas affective ta mère. Peut-être qu’elle n’avait pas le temps. Peut-être qu’elle sentait que tu lui en voulais, pour ton père, et les types après. Ton père, lui, oui, mais il s’est cassé trop vite. Et puis après, c’était toujours toi pour les autres. C’est ta faute aussi, parce que t’as jamais voulu laisser ton âme dans les âmes de quelqu’un d’autre. Parce que si t’adores prendre, tu sais pas recevoir. Mais là, tu as pas le choix, et puis t’en as besoin. Il peut penser ce qu’il veut Asher. Même s’il fait pas d’efforts, même s’il est casse burnes, même s’il te donne pas grand-chose. Le peu qu’il te donne, t’apprends à le recevoir. Ces gestes pour toi maintenant, et ses paroles aussi. Ça te réconfortes, ça te calmes un peu. Ça te réchauffes aussi, tu te dis que c’est peut-être pas complètement ta faute. Et t’arrives presque à y croire qu’il te pardonnera. Mais faut-il que tu en arrives jusque-là. Qu’il te lasse en arriver là, et qu’il ne te mette pas à la porte de sa vie.

« Lui dis pas que t’en as parlé avec moi et qu’on était à poil dans une baignoire, par contre » Tu grognes, secoué d’un bref spasme. En fait, tu grognes pas. Tu pouffes, mais ta gorge irritée déchire les sons qui en sortent. Et puis une autre fois. Et encore une autre. Tu portes une main à tes lèvres, tentant vainement de tuer dans l’œuf un fou rire naissance. C’est pas drôle. Ça vraiment pas grand-chose de drôle tout ça. Mais tu ris quand même. C’est nerveux. Tes nerfs qui lâchent. Et ton rire étouffé qui te secoue comme tes sanglots juste avant. Tu pleures encore, de tristesse et de rire. En réalité, on pourrait croire que tu sanglotes encore. Et puis tu tournes le visage vers celui d’Asher. Seul ton sourire crispé peut témoigner de cette hilarité nerveuse. Et tes yeux qui semblent avoir retrouvé une pointe de lueur. Pointe se reflète brièvement dans son regard noir, pointe qui vacille et s’éteint. C’était pas drôle. Tu te calmes, un peu brusquement, renifles, alors que ton regard glisse dans le vide. Mais tes lippes ne s’affaissent pas encore. Tu les rapproches de la joue râpeuse d’Asher pour y déposer un baiser. Tu soupires, t’essayes de sourire encore, mais t’y arrives plus trop. Alors tu parles. T’essayes d’alléger le truc, toi aussi. « Monsieur Bloomberg, si on est toujours dans la même merde dans dix ans, je t’épouse. » Au-delà d’une blague maladroite, c’est surtout ta gratitude à son égard, et une promesse que tu seras là. Pour lui. Que tu ailles mal, ou que tu ailles bien. Même si cette perspective te semble miroiter comme un mirage. Un dernier effort de tes lèvres, des plus sincères tout de même, et ton visage s’affaisse doucement. T’es fatiguée. T’as encore quelques larmes qui roulent sur tes joues. Tu en as trop retenu, trop longtemps, trop souvent. Alors il faut que ça sorte.

Tu te réinstalles, impudiquement contre Ash. T’es bien là. T’essuies à nouveau tes joues avec tes mains trempées. T’es un peu con. Tant pis hein. Tu respires plus calmement. T’as eu aussi mal que tu t’y attendais. Mais pas aussi longtemps. En fait, tu ne t’imaginais pas réussir à te calmer après avoir rouvert la plaie. Mais… ça… va… Presque. « Merci… » Tu murmures. Mot sorti un peu de nulle part. Mais il fallait bien que tu le dises. Parce qu’il faut bien qu’il le sache. Tu glisses tes doigts entre les siens pour appuyer tes dires. Pour t’excuser un peu de la tempête que tu viens de déclencher. Et puis tu te dis que si toi, tu t’en balances de sentir son entre jambe contre tes reins, c’est peut-être pas ton cas. « Eh… Tu me dis s’il faut que je dégage de là hein… » T’as un nouveau petit sourire en coin. Parce que oué, quand même, ce n’est pas commun comme situation.

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MessageSujet: Re: bubbles trip (ashann)   bubbles trip (ashann) EmptyMer 3 Mai - 20:04



Swann & Asher
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Il avait eu un sursaut, Asher, lorsque Swann avait parlé de mariage, comme s’il s’agissait d’une malédiction qui ne touchait que lui. Est-ce qu’il pouvait vraiment lui en vouloir ? Il ne lui avait pas parlé de New-York, pas vraiment. Il n’en avait parlé qu’à très peu de personnes, en fait. C’était pas censé être su, à Savannah, c’était mieux si ça ne l’était pas. Il n’avait pas envie qu’on le voie, qu’on lui parle autrement, il n’avait pas envie de rester éternellement ce mec qu’avait plaqué sa fiancé à quelques pas du mariage. Ça restait un secret de polichinelle, bien fermé dans un tiroir à double tour, quelque chose dont on ne parlait jamais vraiment, même dans sa famille. « J’te le souhaite pas, je ferais un très mauvais mari », il avait répondu, sur le ton de l’humour, avant de détourner le regard, sourire fantôme sur la lippe. Il avait perdu l’éclat de joie dans ses yeux, Asher, perdu la bonne humeur qu’il voulait lui communiquer. Il avait perdu tout ça en même temps qu’il s’était perdu dans les limbes de ses souvenirs, Scarlett, Sam, le mariage, Scarlett, Sam, le mariage, et il avait juste resserré un peu les bras autour du corps de la danseuse. Y avait un frisson de culpabilité qui le traversait, à cet instant, parce qu’il continuait de se dire qu’ils ne devraient pas rester dans cette position, parce qu’elle devenait presque attirante, parce qu’ils étaient nus et que la gueule de bois retombait doucement, comme un soufflé sorti du four. Il avait observé Swann un long moment, pas certain de savoir quoi faire de plus. Elle voulait parler de son histoire avec Caïn ? Qu’elle le fasse, ça serait un bon changement de sujet, là, maintenant. Y avait plus de lait dans le frigo, aussi. Et y avait son esprit qui divaguait sur tous les sujets possibles et imaginables, simplement pour oublier qu’il avait une nana entre ses cuisses et que ses parties génitales étaient contre ses fesses. C’était chaud, dérangeant, bizarre. Elle avait dit merci, il avait failli répondre de rien. De rien parce que c’était son job à Asher, non, le mec rassurant qui réconforte, à qui on ne demande pas trop si ça va, le gars stable et doux et tendre qui est toujours là quand il faut. Il n’en voulait pas à Swann parce que c’était Swann, parce qu’il n’espérait rien avec elle tout comme elle n’espérait rien avec lui, parce qu’il ne l’avait jamais aimée de cette manière même s’il l’avait parfois désirée. Il n’en voulait pas à Swann, il s’en voulait à lui. Il était toujours trop complaisant, toujours dans la mesure, toujours prêt à s’effacer face aux problèmes des autres. Swann et Merle et River et Jael et Lenny, toute cette bande d’autres pour qui il se démenait jour et nuit. Ça le vannait, Asher, ça le crevait jusque dans ses tripes, d’où l’envie d’un bain, même s’il devait le partager avec Swann.

Sauf que ça devenait dérangeant. Sauf que ça devenait étrange. Ils n’étaient pas dérangeants, en temps normal, pas étranges non plus, mais il avait planté son regard dans celui de la danseuse un peu trop longtemps, et y avait eu des bouts de trucs qu’avaient éclos dans son cœur. Connement. C’était toujours con. Y avait des mots qui tournaient en boucle dans sa tête, bros before hoes et ce genre de conneries, il se répétait que Caïn était un pote et que c’était malsain, qu’on pouvait lui excuser d’avoir plongé dans le bain en étant à moitié conscient mais que maintenant qu’il dessaoulait, l’excuse ne tenait définitivement plus. Elle était terrible, Swann, dans sa beauté et sa complexité, terrible parce qu’elle s’appropriait des parcelles de tendresse qui n’appartenaient normalement qu’à lui et dont peu de personnes profitaient habituellement. Quand elle avait proposé de dégager, il avait sauté sur l’occasion, s’était engouffré dans la porte de sortie qu’elle lui offrait soudain. « T’écrases ma bite et je commence à te trouver bonne, c’est moi qui dégage » il avait répondu, sourire au coin de ses lèvres alors qu’il se levait, dégoulinant de partout, et enjambait la baignoire pour en sortir. Il s’était arrêté là, avait fait couler un peu l’eau au lavabo et s’était soigneusement lavé le visage, comme s’il se trouvait sale et qu’il voulait purifier le moindre de ses pores. Y avait un rapport malsain à Dieu dans sa manière de faire plein de trucs de la vie quotidienne, ses croyances stupides et ses proverbes en hébreu balancés aléatoirement, y avait une complexité de relation qu’aurait pu s’expliquer par un Œdipe pas tout à fait terminé, y avait le vice affleurant son épiderme mais cette capacité, toujours, à agir comme un archange. Y avait un rapport malsain à la vie, en général, une obsession crétine d’être un héros, le complexe du sauveur qu’ils appelaient ça, apparemment. Y avait tellement de vie dans Asher et tellement de mort aussi, comme s’il était les deux à la fois, pas totalement vivant mais pas totalement défunt, un subtil mélange qui devenait destructeur, à force. Il s’était assis sur le rebord de la baignoire, avait observé son amie. « J’ai failli me marier, Swann ». Il avait trempé le bout de ses doigts dans l’eau, avait fait des petits cercles, tapoté à la surface. Le bruit était réconfortant, en fait. Il n’aimait pas le silence, Asher. « A New-York. On s’est rencontré à cette soirée sur la péniche. Celle où j’ai touché ton cul en faisant semblant de prendre un verre. Ouais, c’était volontaire. Et j’ai continué de toucher des culs pendant des mois. J’crois pas avoir un jour arrêté, d’ailleurs ». C’était drôle, la vie. Pute de vie. « J’ferais un très mauvais mari parce que j’étais déjà un fiancé minable. Mais bon, je suppose que j’suis pas un mauvais ami, hein ». Il avait souri entre le rideau de larmes qui lui barrait la vue. Il savait pas pourquoi il en parlait, pourquoi il ressassait. Il aurait voulu foutre de nouveau sa tenue de super-héros, avoir ce complexe du sauveur à la con. A la place, il avait revêtu la tenue d’homme ordinaire qu’il ne supportait définitivement plus.

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