✧ 01 T'es un mec bien, du moins t'aimes à le penser. Pas un joli cœur, ça non, ni même un Prince Charmant, mais ta famille n'a jamais manqué de rien. Et tu bosses pour eux chaque jour qui passe. Loyal et aussi hargneux à les défendre qu'un pit-bull enragé. Pour toi, la vie est carré, droite, logique : t'empruntes quelques raccourcis mais uniquement envers la loi judiciaire, celle qui n'a aucun sens à tes yeux. La seule loi à laquelle tu obéis, c'est celle de l'honneur que ton père t'a appris et celle de la rue, dure mais régulière, impitoyable mais juste. T'es le mec droit dans tes bottes, qui sait où il va et qui ne changera pas de chemin.
✧ 02 L'illégalité, t'avais sans doute ça dans le sang : le père n'était pas non plus un exemple en matière d'honnêteté morale, t'as suivi le chemin. Il traficotait, toi t'as carrément plongé dans les combats illégaux, les gangs roumains et cette atmosphère glauque et un peu surannée que cette nouvelle 'famille' t'apportait, surtout via les Popescu. T'aimes ça, tu ne conçois pas la vie autrement. Bosser légalement, être dans les clous, ce n'est pas dans ton caractère.  
✧ 03 T'as souvent suivi. Ton père en premier, les Popescu ensuite. T'étais l'un de leurs plus fidèles molosses, un gamin des rues élevé en véritable machine de guerre. Tu frappais et Dieu que tu aimais ça, parce qu'ainsi tu te défoulais et relâchais tous ces non-dits que t'as jamais réussir à sortir. Tes poings parlaient pour toi et tu t'en contentais. Du moment que cela plaisait aux Popescu d'ailleurs, tu l'acceptais. Fidèle à en crever. Mais depuis que tu as le club, tu te découvres leader, tu te relèves de cette fange dans laquelle tu te baignais. Les Popescu semblent moins divins, déjà plus accessibles. Et toi, tu te sens moins couillon...
✧ 04 Le club, c'était l'évidence. Une adolescence à frapper, à participer aux combats illégaux de rue, ça t'a laissé le temps de comprendre. Tout un monde gravitait autour de ces combats : les paris, le public, les bookmaker, la sécurité... Au début ça n'a été qu'un ou deux paris lancés comme ça, pour voir. Puis t'as embrayé, tu t'es acoquiné avec un bookmaker. Et de fil en aiguille, t'as pigé qu'il y avait du fric à se faire en voyant plus grand. L'endroit était vide, tu l'as acheté pour une bouchée de pain, et t'as misé gros. En gagnant. C'est pas non plus le casino des pauvres, mais ça se défend, c'est pas mal du tout et ça commence à grandir doucement. L'argent rentre, de moins en moins timide, et toi tu t'es découvert des talents de gestionnaire.
✧ 05 Comme dans toute famille, il y a des hauts et des bas, des tensions et des soucis. Il y avait les Popescu, le fils aîné, Traian, Iulia la Belle et toi. Ca fonctionnait vraiment bien et tu les as adopté, avec ta manière un peu bourrue d'accepter la vie. Sauf que Traian a déconné, Iulia s'est tu et toi, t'as pas su te situer entre ces deux amis et ce couple fracassé. T'as pas eu le courage de briser ton amitié avec Traian pour secourir Iulia : personne ne l'a eu, mais toi, tu l'acceptes encore moins. Peut-être parce qu'il s'agissait de Iulia et que dans ta tête, rien n'a jamais été vraiment clair. Dans tout ce brouillard, t'as pas été à la hauteur et tu le regrettes amèrement.
✧ 06 Les anciens combats s'affichent encore sur ton visage, on en voit les marques, mais t'as appris à relever la tête et ne pas laisser les autres juger uniquement sur ton apparence. Ta voix est rocailleuse, de celle qu'on utilise peu, mais frappe toujours juste et sans condescendance. T'es un peu brute, un peu truand, un peu salopard aussi, mais tu l'assumes et tu l'exhibes avec une fierté typiquement masculine.  
✧ 07 Avec les nanas, c'est compliqué. Tu parles pas assez, tu ne sais jamais quoi dire, elles attendent quelque chose que tu n'es pas capable de donner, la tête préoccupée par d'autres soucis. Alors la plupart du temps, elles te fuient, elles préfèrent tourner la page que de recevoir une énième baffe dans la gueule de la part du Destin. T'es pas violent, t'es pas un mauvais bougre, mais t'es pas le compagnon parfait.
✧ 08 Ton frangin, celui qui peut revendiquer avoir le même sang que toi, est probablement l'un des êtres que tu détestes et aimes le plus sur cette foutue Terre. Il a été l'odieux rejeton, le raté que ton père regardait à peine et qui s'est jeté sur les drogues et l'alcool comme un nourrisson se jetterait sur le sein maternel. T'as jamais réussi à lui pardonner ses refus de s'en sortir et l'ignorance de tes mains tendues, à chaque fois. Il se détruisait, tu l'engueulais, il te fuyait et le cycle perdurait inlassablement. Il a disparu de la circulation il y a 4 ans de cela : disparu, envolé sans mot d'adieu. Personne ne sait où il est ni même s'il est en vie, et tu donnerais tout pour le revoir. Le revoir et l'engueuler, encore une fois. Parce qu'il reste ton frangin.
✧ 09 Du coup, voir ton frangin s'auto-détruire t'a soigné : pas d'alcool ou très peu, et surtout aucune drogue. Tu refuses de vivre ce que ce petit con a vécu et doit vivre encore. Tu restes sain et tu y tiens.
✧ 10 Malgré tes errements et tes nombreuses relations d'un soir, t'as jamais eu de gosse. Et c'est sans doute mieux ainsi, t'avais pas l'âge ni la maturité pour être père. Mais avec le temps, cela a changé et peut-être qu'un jour, oui peut-être, tu te décideras.