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 Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy

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MessageSujet: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyVen 4 Nov - 23:04

Tu sais plus les mots. Tu sais plus les phrases. Tu sais plus ce qui s’est passé pendant la semaine, les défilés de gens, de visages et de sons. Y a que du vide. Un bourdonnement intense dans tes oreilles. Et la même litanie. Adieu, adieu,adieu. Ca tourne en boucle dans ton cerveau. Sa voix, ses yeux. son absence. Tu sais plus Ivy si on est mercredi ou tout simplement dimanche, s’il fait nuit ou jour, si t’as mangé où même bu. Adieu, adieu, adieu.
C’est un empire qui s’effondre. Le tient. Le votre. Et son pull sur ton corps, pour te donner un semblant de présence. Il est là. Encore sur toi. Encore présent. Jamais absent. Il partira pas ; Il te la promis. C’est fini, c’est fini, c’est fini. Tient, le disque change, de nouveaux mots prennent place. Plus assassins. Ca te fait relever la tête.
Tu te souviens plus Ivy, de comment t’es arrivé là, chez lui, posé sur le rebord de sa fenêtre, les pieds dans le vide. Deuxième fois que tu fais ça . Mais tu t’en souviens plus. T’as la mémoire qui flanche Ivy, des black outs de plusieurs heures, de plusieurs jours. Pilules roses ou pilules bleues, whisky pour tout faire descendre dans le gosier. Et cette douce torpeur qui t’envahit, qui t’empêche de réaliser.
T’as des flash inopportuns, qui te viennent comme une agression. Tu le revois claudiquant, trainant sa valise, sa guitare, ton cœur. L’oiseau a ouvert sa cage. Il s’est envolé. Et toi t’es restée là, comme une conne, coincée avec tes chaines parce qu’il a emporté la clé. Egoïste oiseau. Salopard d’oiseau.
Ton plâtre te tire vers le bas et tu regardes. Dangereusement tu te penches et ça te fait rire. Et ça te fait pleurer. Et ça te fait criser. En bas y a des gens qui commencent à te remarquer, qui se disent qu’il faudrait ptêtre faire quelque chose et toi t’as envie de leur hurler vous inquiétez pas je vais pas sauter à quoi ça sert de toute façon, quand on est déjà dans l’autre-monde ? Et puis ça serait trop simple tout ça. Bien trop banal. C’est tellement dépassé de se jeter du haut d’un immeuble. Non, toi tu partiras en fanfare Ivy. Dans les cris et la douleur. Dans l’admiration et les pleurs. Petite gamine au cœur fossile, palpitant détraqué, à l’âme sœur amputé. Tu voudrais crever.
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptySam 5 Nov - 12:41

La nuit est épaisse et sombre, étouffée et sans espoir. Jedediah se sent las, las comme au confins de ses pires souvenirs, las comme les bribes de mémoires qui le hantent, images fantômes. En traversant les rues désertées par le froid, il laisse son passé l’envahir d’une tendre angoisse qui appuie sur son cœur et en étouffe les battements. Il laisse flotter devant ses yeux l’image de Lydie et celle si intacte de Jael et se demande pour la sixième fois de la journée où elle peut être, ce qu’elle peut faire, si elle pense à lui parfois sans trop de haine. Il aimerait pouvoir la serrer dans ses bras et lui demander pardon.

C’est ensuite la silhouette tremblante d’Elliot qui l’étreint et qui s’agite doucement sur les ombres mouillées du trottoir. Parmi les peintures de lumières dessinés par les réverbères, phares fixes ans l’immensité de sa nuit intérieur. Il évite les flaques que trace le corps fuyant d’Elliot et qui se fige devant lui toutes les fois où il tente de lui échapper. L’esprit ailleurs, machinal, il parvient devant la porte de son immeuble, une peur diffuse dans la poitrine, annonce probable d’une de ces crises qu’il subit régulièrement depuis qu’il est à Savannah. Comme si le fait d’avoir été face à la violence avait endigué ses traumatismes, tirés à la surface par le calme désespérant de sa vie actuelle.

La porte est ouverte. Jedediah fronce les sourcils en respirant lentement. Il voudrait aller à la salle de bain pour avaler une ribambelle de pilules et s’abandonner à leurs effets dans les profondeurs du canapé. Il voit le manteau d’Ivy jeté négligemment sur la chaise, mais sent que quelque chose n’est pas comme d’habitude. L’air charrie une fragrance de drame. L’angoisse en profite pour s’insinuer plus profondément dans son cœur et Jedediah se force à respirer lentement. Il s’avance, dans la nuit du salon dont toutes les lumières sont éteintes. Les ombres, crées par les lumières de la ville, oscillent dans la pénombre et créent des reflets argentés comme le fond de la mer. La porte coulissante qui donne sur le balcon est ouverte. Et sur son bord, une silhouette aux corps saillants se balance comme un roseau courbé par la brise. C’est Ivy, qui regarde le vide sous ses pieds.

Jedediah est obligé de s’appuyer une seconde à la table car ses jambes menacent de se dérober sous lui. Quelques intenses secondes, il lutte contre la bouffée d’angoisse qui tente de se frayer un chemin dans sa poitrine. Il résiste, reprend son souffle, et lorsqu’il s’en sent capable, s’approche du balcon en s’appuyant au mur. « Ivy ? » Murmure t-il doucement. « Qu’est ce que tu fais, Ivy ? » Il répète son nom en détachant chaque syllabe, pour attirer son attention. Pour qu’elle cesse de fixer le vide sous ses pieds ciselés.
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyDim 6 Nov - 0:33

Y a des mots, une voix, qui perce le voile. Qui ? Lentement tu tournes la tête pour observer Jedediah qui se tient au milieu du salon. Il a quelque chose dans le regard qui t’hypnotise, une douleur cachée qui soudain te saute aux yeux. Ha. Tu te demandes ce qu’il fait là, pourquoi il se tient là, comment il a pu rentrer chez toi. Qu’est ce que tu fais, Ivy ? Non. T’es pas chez toi. T’es pas sur ton balcon. T’as pas de balcon de toute façon. Ton regard se pose de nouveau sur le sol et tes yeux papillonnent. Un instant tu pars loin, très loin, à Berlin où t’étais bien. Qu’est-ce que tu donnerais pour y retourner, pour de nouveau t’enfouir dans ton lit là bas, comme si rien ne s’était passé. T’es même prêtre à offrir de nouveau ta nuque à ta mère. A ses cris, ses hurlements, ses jugements. Mais tu peux pas. Alors qu’est-ce que tu fais là Ivy ? Hein ? Qu’est-ce que tu fais là ? « Je me suis perdue » l’air de rien tu expliques. C’est vrai au fond, à un instant t’étais dans ta salle de bain, le moment d’après t’étais là, les jambes pendant dans le vide, loin. Très loin. La tête dans les étoiles.
Lentement tu te retournes, passe une de tes jambes de l’autre côté du rebord pour t’asseoir à califourchon. Les yeux rivés sur le visage de Jedediah tu le dévisage. Il a l’air faible, âgé, usé, dans la lumière blanche du salon. Tu ne dois pas être très fraiche non plus, sans tes perruques et ton maquillage, visage de la gamine perdue que tu camoufle à coup de pinceau et de paillettes. Tu resserre un peu le pull autour de tes maigres épaules, frissonnante dans le froid de la nuit. « Le ciel est plus joli ici qu’à Berlin tu sais. » [/color] [/b] Une des seules choses que t’avais apprécié en arrivant ici : pouvoir les regarder à la fenêtre, dans les bras de Meo, son souffle chaud sur ta nuque et le battement de son cœur dans ses oreilles. [i/]je t’ai jamais aimé, t’es folle. Qui pourrait avoir envie de toi ? [/i] « Tais toi » et tu secoues la tête, porte tes mains à tes oreilles, comme pour faire taire les voix. Une voix. Mesquine, violente, qui détruit avec acharnement les fondations de tout ce que tu croyais. Tais toi mon cœur. Tais toi. et quand le calme revient tu laisses tomber tes bras le long de ton corps, pantin désarticulé, poupée chiffon, les yeux rivés vers la lune presque pleine, contrairement à toi qui n’est plus que vide.
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyDim 6 Nov - 17:24

C’est la première fois qu’Ivy apparaît telle qu’elle est, petit, égarée, triste et seule. Elle n’a pas de masques pour dissimuler ses cernes noirs, pas de parures pour cacher ses regards troublés qui dévisagent le ciel comme si elle en attendait quelque chose, mais ça ne vient jamais. Elle regarde Jedediah, Jedediah la regarde, et il comprend qu’elle est très loin de lui, très loin au dessus de Savannah, de la mer, loin là-bas en Europe peut être ou même ailleurs, dans l’espace profond, sur une autre planète qu’il ne peut atteindre. « Je me suis perdue »  « Mais non. » Murmure t-il. Elle ne l’est pas totalement, puisqu’elle est ici. Puisqu’elle n’est pas dehors à errer au hasard des rues, à se laisser appeler par des inconnus, à oublier d’où elle vient. Elle est ici et c’est tant mieux, car même si Jedediah ne se sent pas tout à fait capable de faire face à cette situation, il puise en lui toute la volonté qu’il lui reste pour se battre et l’appeler à lui. Il voudrait la voir descendre de ce rebord.

Elle passe lentement une jambe par dessus, d’un geste leste et machinal qui trahit une partie de son passé. Elle le regarde réellement pour la première fois, et Jedediah a du mal à soutenir son regard car il le transperce et semble déceler chacune des faiblesses qui l’agite à l’intérieur. Il voit sa douleur en échos à la sienne et tente de s’approcher encore un peu, lentement, silencieux. Doucement, il l’appelle. « Ivy… » « Le ciel est plus joli ici qu’à Berlin tu sais. » Il ne sait pas, il n’est jamais allé à Berlin, et personne ne lui a jamais raconté cette ville aux grandes avenues glacées, au haut bâtiments de verre et de métal, à l’histoire culturelle si vivace. Il n’a connu que le ciel de New York, où on ne voit aucune étoile, et celui de Savannah, qui lui semble amer et gris, toujours. « Pourquoi ? Pourquoi est-il plus beau ici ? » Demande t-il dans un murmure pour tenter de focaliser son attention. « Tais toi. » Il fronce les sourcils, elle se prend la tête, il comprend que ce sont ces voix intérieures, celles qui vous soufflent des méchancetés, sans cesse. Il a les mêmes. Elles sont confuses, multiples, et ne s’éteignent jamais. Ses mains retombent, molles, elle est aspirée par le reflet argenté dans le ciel. Jedediah s’est glissé contre le balcon. Il sent l’air frais contre son visage. Doucement, il s’approche, tout prêt d’elle. Tout prêt. « Ivy, viens, s’il te plaît. Ca ne sert à rien de les écouter. » Son cœur bat trop fort dans sa poitrine. Il a le souffle court. Il aimerait s’asseoir, mais il ne peut pas la laisser là. Il lui tend doucement la main sans oser la toucher. Il espère qu’elle la verra et l’acceptera.
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyLun 7 Nov - 20:49

Ivy Ton nom résonne dans la nuit, doucement, légèrement, il tape à tes tympans, demande à rentrer, à être assimilé. Y a quelqu’un qui t’appelle, quelqu’un qui est tout près, jute à quelques pas de toi. Jed. T’as des tonnes de sentiments qui meurent sur tes lèvres, des aveux ou des suppliques, mais rien ne vient, tout s’évapore dès que t’ouvre la bouche, dès que tu claque la langue. Ivy, jolie Ivy, pour tu pleures Ivy ? Pourquoi tu laisses les larmes creuser ta peau ? Pourquoi tu souris pas Ivy, comme sur les photos ?   « Pourquoi ? Pourquoi est-il plus beau ici ?  Qu’il lui demande, et t’as presque envie de rigoler. Pourtant t’aurais cru, qu’il serait dans la confidence, qu’il connaitrait le secret, tout comme toi tu le sais. C’est le destin des âmes brisées de regarder le ciel avec autant de nostalgie, et à y trouver un certain intérêt. Les autres ils ont pas le temps, trop pressés pour lever les yeux vers le haut, à courir après leur vie. Lentement tu lèves bras, vers ces étoiles que tu peux apercevoir, ces étoiles qui brillent comme des diamants usants, à l’éclat ternit par le passé.  « Parce qu’ici on peut rêver »  Que tu lui avoue, lui offrant enfin ce secret que tu pensais garder. Mais tu penses qu’il a besoin de savoir lui aussi, qu’il a besoin de comprendre, d’ouvrir les yeux un instant et de profiter. Parce que dans le miasme du désespoir c’est juste assez pour continuer d’avancer, pour continuer de ramper, lumière solitaire dans un ciel de charbon.

Puis ça recommence, ces discours incessants dans ta tête, ces voix qui s’insinuent dans tes oreilles, dans ton cerveaux, qui grattent, qui raclent ton esprit de leurs griffes malicieuses. Tu revois Meo, le beau Meo, claudiquant, tirant sa valise derrière lui tant bien que mal et sur ta joue, tes poignets, les bleus qui fleurissent. Jusqu’au dernier instant t’as cru – vous y avez cru - mais ça n’a pas marché. Ca pouvait pas marcher. Pas avec deux gamins cassés comme vous. Ivy, viens, s’il te plaît. Ca ne sert à rien de les écouter.  Tu tournes la tête vers le bruit, comme un papillon attiré par la lumière. Curieuse, tu veux savoir, pourquoi il te demande de pas les écouter. Il sait ? Oui. T’es stupide Ivy, il a toujours su. Il a toujours vu claire dans ton jeu de poupée aux lèvres peintes en rouge, dans tes gestes d’amours désespérés, il connait ta soif insatiable de sentiments.  « Si tu m’apporte mes béquilles. »  Parce que là tout de suite, tu sais plus où elles sont. Est-ce que t’es même venu avec ? Oui, sinon comment t’aurais fait pour marcher hein ? Elles doivent trainer quelque part dans la maison, sur le sol avec ton cœur.  «Et je sais que tu les écoutes Jed. Je sais. Parce que t’es comme moi. » Que tu murmures dans la nuit, les yeux rivés aux siens, comme une accusation, parce devant tout le monde il porte un masque, mais il faut un monstre pour en reconnaitre un autre. C’est ce que vous êtes tous les deux, des monstres de solitudes, des monstres de dépression, des monstres que la vie a façonné dans la glaise et l’argile, à coup de violence et de détresse.
[/b]
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyMar 8 Nov - 20:12

Jedediah regarde le ciel. Il le connaît par cœur. Ses aspérités, les étoiles effacées par l’écho des lumières brillantes de Savannah. Ses impuretés, son gris et ses bleus presque blancs. Sa saleté. Il ne l’aime pas, ce ciel, mais il ne l’aime pas d’une haine percluse d’amour. Comme on déteste un père qui vous a puni justement. Parce que toutes les fois où Jedediah lève les yeux, il revoit le ciel de New York, et celui de la Sicile profonde, et aucun de ces souvenirs ne le satisfont, aucun n’est capable de retirer de son cœur l’amertume et la colère qui y sont profondément chevillés. Aucun des ciels que Jedediah a connu ne lui a semblé suffisamment beau, et pourtant il les connaît tous comme des amis intimes. « Parce qu’ici on peut rêver » Jedediah pince les lèvres. Rêver à quoi, aimerait-il demande à Ivy qui semble accéder à une vérité qui lui échappe. Le secret qu’elle lui a révélé l’atteint comme un coup dur au niveau du cœur. Il se demande à quoi il rêve, lui, depuis qu’il a quitté New York. Il rêve à sa fille, il rêve à Elliot, il rêve à un ailleurs où il pourrait oublier tout ce passé qui le sclérose et qui le tue, qui le hante et qui l’étouffe. A quoi aimerait-il rêver, qu’est ce que le ciel de Savannah peut bien lui offrir ? Il sait très bien qu’il a cessé de rêver depuis longtemps. Parce qu’il est ici pour purger sa peine, pas pour s’élancer sur un nouveau chemin qui pourrait lui offrir des choses différentes, florissantes peut être. Il se demande si Elliot pourrait faire partie des belles choses qui lui sont accordées. Et la douleur qui l’étreint à cette pensée lui fait regretter d’avoir été si présomptueux. « Vraiment… » Murmure t-il, à la fois pour lui même, et un peu pour Ivy. Elle, elle était venue rêver, et pourtant il n’a jamais vu autre chose qu’une gamine fissurée qui tentait tant bien que mal de garder la tête hors de l’eau. Il lui semble que tout le monde est comme ça, ici. Triste et brisé.

« Si tu m’apporte mes béquilles. », dit elle. Jedediah se fige. Il ne veut pas risque de lui tourner le dos, et il ignore s’il se sent capable de quitter maintenant l’appuie du balcon. C’est sécurisant, l’air et frais, ça fait du bien. Il a l’impression qu’ils évoluent tous les deux dans un univers trouble et différent. Où chaque mot est compris par l’abysse de leurs âmes respectives. Jedediah se sent étrangement mis à nue. Il ne répond pas. Mentalement, il tient la main d’Ivy. Il ne veut pas la lâcher. «Et je sais que tu les écoutes Jed. Je sais. Parce que t’es comme moi. » Il se fige. Il y a quelque chose dans sa poitrine qui a émit un rugissement sourd, très loin, tout au fond. C’est étonnant, car contrairement à d’habitude, il ne se sent pas acculé. Peut être parce qu’Ivy est dans un état second. Pour une fois, il ne cherche pas vraiment à comprendre, et lentement, il accepte de s’abandonner à la douce torpeur qui les envahit, transmise par la douleur terrible dont Ivy est chargée et qu’elle dispense autours d’elle. « C’est vrai. » Il se tait un instant. Il savoure le goût des mots sur sa langue, avant de les dire. « J’aime quelqu’un. Depuis longtemps. Je l’aime tellement que je n’arrive plus à penser à autre chose qu’à elle. Je commets des actes stupides. Qui ne me ressemblent pas. » Il cherche les étoiles dans ce ciel noir qui lui permettrait de rêver. « C’est douloureux et épuisant. J’aimerais parfois que ça s’arrête. » De tous ses souvenirs, de toutes ses douleurs, il a choisit celle là, parce que c’est ce qui lui est venu spontanément. Comme si l’amour brisé d’Ivy, qu’il ignore, s’était glissé jusqu’à lui et lui avait chuchoté au creux de l’oreille que l’occasion d’alléger leurs peines similaires et communes se présentait à eux, exceptionnellement, et qu’on leur accordait le droit de s’en libérer une fraction de seconde, sous le ciel noir de Savannah.
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyMar 8 Nov - 21:17

Il ne bouge pas. Il ne part pas t’apporter des béquilles comme demandé. En fait tu t’en rends même pas compte Ivy. Tu te contentes de le regarder, de le dévisager, et malgré ce voile qui persiste à te brouiller la vue depuis quelques temps maintenant tu le vois clairement. Vraiment. Comme il est réellement. L’homme blessé qui se cache derrière un masque fissuré. Tu pourrais presque rigoler si la situation n’étais pas si dérisoire, de foutre de la gueule des deux boulets que vous étiez, à vous accrocher à l’un à l’autre, aux gens pour prouver votre force, votre valeur, votre putain d’existence.
Les mots t’échappent, comme beaucoup de chose ces derniers temps, et tu parles plus que tu n’aimerais le faire. Tu le pointe du doigts, cet homme qui t’as pourtant aidé dès la première rencontre. Mais c’est comme ça Ivy, si tu tombes, tu refuses de le faire toute seule, t’as ce besoin maladif d’entrainer quelqu’un d’autre dans chute. Egoïste Ivy, c’est une des raisons pour lesquelles il t’a quitté tu sais ?
C’est vrai. Surprise tu le fixe avec encore plus d’intensité, avec tout ce que t’as dans les tripes, comme pour pas le laisser filer alors qu’il commence tout juste avec ses aveux. J’aime quelqu’un. Depuis longtemps. Je l’aime tellement que je n’arrive plus à penser à autre chose qu’à elle. Je commets des actes stupides. Qui ne me ressemblent pas. Il aime quelqu’un. Il aime quelqu’un depuis longtemps. Il aime quelqu’un. Et t’es comme attirée par ses mots, par l’intensité de sa confession, par la douleur qui suinte de chaque parole. S’en t’en rendre compte tu passes ton autre jambe par-dessus le rebord pour maintenant lui faire face totalement. Et dans ton cerveau ça tourne en boucle. Comme un vieux disque rayé. C’est douloureux et épuisant. J’aimerais parfois que ça s’arrête. Toi aussi t’aimerais que ça s’arrête. Ses mots te transpercent de part en part, sans aucune pitié. Ca te retourne complètement Ivy, ces aveux que t’aurais préféré éviter. Tu te rend pas compte mais sans préavis tu te mets à chialer, d’abord silencieusement, puis de façon hachée, entre hoquets et sanglots. Tu t’étouffes Ivy, dans tes larmes dégueulassement salées, dans la douleur de la réalité et soudain tu te laisses glisser vers le sol, tu t’y laisse choir comme un cadavre abandonné là. Parce que c’est ce que t’es Ivy, plus qu’une poupée sans vie, Meo il est partie avec ton étincelle, avec ta raison d’exister.
Tu trembles Ivy, et y a comme un feulement d’animal blessé qui s’échappe de tes lèvres, comme un cri de douleur que tu retiens depuis trop longtemps. Tu hurles Ivy, dans ta tristesse, dans ta détresse, dans l’incompréhension de la situation. Parce que malgré toutes les drogues au monde, y aura rien pour faire taire la brutalité de ce que tu ressens actuellement. Tu chiale Ivy, comme si le monde prenait fin. Et au fond, c’est ce que pour toi c’est ce qu’il se passe. « Ca s’arrêtera jamais » que t’arrives à articuler entre deux hoquets, avant de te mettre à tambouriner le sol avec ton poing. La douleur qui d’habitude te soulage ne change rien, alors tu tapes encore plus fort, encore et encore, inconsolable enfant, à qui on a tout volé. « RENDEZ LE MOI » Meo, Romeo, tu donnerais tout pour qu’on te le rende, qu’il t’insulte une dernière fois, qu’il te brise encore une fois, qu’il t’embrasse comme l’autre fois. Tu suffoque Ivy, sans ton oxygène, tes poumons se contractent et tu cherches désespérément de l’air, mais y a rien. Que du vide qui te répond, asphyxie sentimentale, comme dans les tragédies.
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyVen 11 Nov - 18:49

Jedediah a côtoyé la lie. Il a vu l’ultralibéralisme, il a expérimenté chaque parcelle du recel, de la violence. On l’a respecté, là bas. Il était quelqu’un d’important. Maintenant, il n’est plus personne, et sa colère, en même temps que sa culpabilité, en même temps que la peur constante qui est accroché à ses tripes, ne s’éteint plus. Elliot s’est posé par dessus son passé comme un catalyseur absurde et Jedediah se demande comment il a pu passer de sa vie d’avant et celle-ci sans en mourir. Il se demande pourquoi on ne lui a encore fait payer sa trahison. Et il trouve ça étonnant, que parmi toutes ces choses extrêmes qu’il a vécu, parmi toutes les atrocités qu’il a pu voire et commettre, un sentiment comme celui qu’il a pour Elliot puisse encore trouver une place. Avant elle, il n’y avait que la mafia qui comptait encore. S’en protéger à tout prix. Se planquer, éviter de se faire connaître, disparaître. Elle a surgit et un nouveau point central s’est glissé en lui. Sa culpabilité l’a plongé dans une lassitude profonde, la peur aussi, lui font penser, souvent, que rien n’a d’importance. Tout lui semble dénué de sens désormais, la vie est un mirage flottant qui l’entraîne à la dérive sans qu’il ne fasse plus aucun effort pour l'en empêcher. Il a la tête sous l’eau, son témoignage d’ancien partisan du système au bord des lèvres, mais il se tait. Il se tait et il regarde Ivy déchirée, qui se laisse glisser au sol, en laissant échapper toutes ses larmes amères cachées au fond de ses yeux. Elle glisse au sol, dévastée parce que Meo l’a quitté, il l’a compris. Et il trouve ça étrange de pouvoir se sentir encore emphatique d’une telle douleur après avoir passé des années à revendre de la drogues sans humanité, après avoir infligés des supplices pires que la morts, après toutes ces choses indescriptibles auxquelles il a participé et qu’il a tenté de fuir lâchement, par peur, uniquement parce que le couperet de son propre assassinat flottait au dessus de sa tête.

Ivy frappe le sol de toutes ses forces. Lentement, Jedediah s’accroupit près d’elle. Qu’est ce qu’elle a pu vivre, elle, concrètement, se demande t-il, pour être brisée de la sorte ? Pour être devenue si fragile ? Il repense à toutes ces femmes du Système, d’une brutalité égale à celle des hommes, fortes, intrusives, prêtes à tout pour se sortir de la misère, parce que là-bas personne n’avait vraiment le choix. Faire parti de la mafia ou devenir un raté. Jedediah prend Ivy dans ses bras, doucement. Il ne l’empêche pas de se faire mal, il sait comme ça soulage. Il la sert simplement contre lui, comme il serrerait Jael s’il pouvait encore le faire, avec cette tendresse qu’il n’a jamais eu avant d’accepter sa déchéance. C’est comme si sa propre fragilité s’agitait sous les couches de brutalité et d’immoralité libérales qui l’ont dressées toutes ces années, et que le flot continue de l’insupportable routine de sa vie, et tentait d’en crever la surface. Jedediah est épuisé par ses combats internes, épuisé devant les paradoxes inexorables qui s’amoncellent au dessus de lui, épuisé d’avoir mal, épuisé d’avoir peur, épuisé de regretter, épuisé de culpabiliser. Et il sent Ivy secouée de sanglots aussi épuisé que lui, alors il pose doucement ses lèvres sur son front de gamine, qui lui rappelle ces gosses qu’il a connu et celui qu’il a été, ceux qui dealaient à quatorze ans, parce que la paye était meilleure que celle de leur père ouvrier. Et il la sert contre lui en lui transmettant sa chaleur, une main dans ses cheveux d’enfant, il a berce doucement en prononçant des paroles qu’il n’entend pas. Tout va bien, petite Ivy. Tu n’es pas seule. Tu n’es pas seule dans l’éternité de ton mal. L’amour disparaîtra, ce qu’il te restera ne sera que le regret, et ce goût amer dans la bouche, qui s’insinuera dans ton cœur aux moments où tu t’y attendras le moins, pour le mordre profondément. Pour toujours.

Et Jedediah sait, que quelques années auparavant, il aurait retrouvé Meo. Il l’aurait retrouvé et lui aurait fait payer sa présomption, d’avoir pensé qu’on peu jeter ainsi quelqu’un qui a son affection à lui, un affilier. Et personne n’aurait pu contredire la punition, parce que le Système sait, et ce qu’il désire, le Système le prend.
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MessageSujet: Re: Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy   Dans ta chute tu cries dans le noir | Jedvy EmptyDim 20 Nov - 22:05


Y a plus rien Ivy, ou peut-être de la douleur. Immense, éternelle. Ce genre de douleur que tu ne peux même pas décrire, que tu ne peux même pas apaiser. Et même si ton poing vient heurter le sol avec violence, l’impact ne fait qu’amplifier tes cris de détresses. Tu te rends compte à quel point t’es seule Ivy. Terriblement seule. Dans ton cœur. Pourtant tu sais que y a des gens qui t’ont fait une place dans leurs émotions, y a Junior avec son sourire trop pur ou bien Aden et son innocence rare. Y a Lola et Solveig les deux piliers de ta vie, de tes soirées. Samih aussi, qui comprend un peu tout, la folie qui te ronge lentement mais surement. Et puis Jedediah. Père-amant que t’allumes autant que tu cajole, réclamant des tonnes et des tonnes d’attentions, comme une famine perdue dans un désert qui lève les bras vers le ciel.Regarde moi, aime moi, sauve moi. Des mots que tu ne prononceras jamais mais qui brulent tes lèvres à chaque rencontre. Pourtant ça ne sera jamais suffisant, tous ces noms pour remplir ta jauge à carburant. Même avec tous ce monde t’iras pas bien loin, tu consommes trop Ivy, t’es trop gourmande. T’engloutis l’affection comme t’engloutirais des bonbons si tu pouvais : par paquet de dix, jusqu’à t’en faire exploser l’estomac.
Tu sens pas Jedediah qui s’enroule autour de toi. Tu sens pas sa chaleur ni son humanité. Toi tu sens que la nuit, le vide qui t’aspire de façon inexplorable, et la réalité qui te frappe de plein fouet : Meo s’est cassé sans un regard en arrière, faut croire qu’il ne t’aimait pas autant que toi, et c’est douloureux, très très douloureux. Tu voudrais crever Ivy, tu voudrais que tout s’arrête, mais y a trop de choses qui te retiennent pour le moment, des parenthèses à fermer, des points finaux à poser. Tu peux pas partir, pas encore, pas maintenant. Et quand les lèvres de Jedediah touchent ton front, t’ouvres lentement tes yeux pour le dévisager, le visage ravagé par les larmes. « Non Jedediah, tu ne voudrais pas que ça s’arrête » qu’elle murmure la voix plus que rauque, en écho aux paroles de l’homme il y a quelques instants. « C’est seulement quand ça s’arrête que tu te rends compte à quel point toute cette douleur était préférable à celle que l’on ressent maintenant » Tu passes doucement ta main saine sur son visage usé, les cernes qui se dessinent sous ses yeux comme des valises pleines de souvenirs trop lourdes à porter. T’aimerais lui proposer de l’aide, mais pour le moment tu en es incapable. Tu ne le sera surement jamais. Mais c’est l’intention qui compte non ? Toujours secouée par des sanglots plus silencieux maintenant, tu te relèves en tremblant, attrapant les doigts de Jedediah, tu le tire vers toi. Claudicante avec ton plâtre tu prends appuis sur lui pour retourner à l’intérieur, fermer la fenêtre qui te donnes trop d’idées nauséabondes. Sans un mot, juste le bruit de tes hoquets qui s’élèvent dans le silence de l’appartement tu te diriges avec lui vers sa chambre, avant de te glisser tant bien que mal dans le lit te roulant en boule sur le côté droit pour laisser de la place à Jedediah. Aucun mot ne sort de tes lèvres, juste une supplique muette. T’as pas besoin qu’il t’embrasse, t’as pas besoin qu’il te touche. T’as juste besoin qu’il soit là, ptêtre comme un père qui laisse son enfant grimper dans le lit après un cauchemars au milieu de la nuit. Tu peux pas être seule ce soir. Tu veux pas être seule. Et quand les bruissements de draps se font entendre, tu te blottis contre lui, la tête contre sa poitrine, essayant de contrôler tes gémissements de désespoirs qui forcent la barrière de tes dents. Tu t’agrippes au tissu de son haut, tellement fort que tes phalanges blanchissent. Et tu pleurs Ivy, tu pleurs comme t’as jamais pleuré. Tu laisses tous ces sentiments trop compliqués dévaler tes joues sous forme liquide avant de finir éventuellement par t’endormir d’épuisement, les glandes lacrymales totalement desséchées.
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