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 wrap our hearts in cellophane (jemanca)

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Anca Popescu

Anca Popescu
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MessageSujet: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyVen 9 Mar - 21:44

On fait comment déjà, pour respirer ? Quand ouvrir la bouche ne suffit plus, quand l’air refuse de rentrer ? On fait comment déjà, quand tout explose, part en fumé, quand y a plus que les cendres entre les doigts, copeaux d’un passé déjà évaporé ? On fait comment pour continuer d’avancer, quand nos jambes sont coupées ? On fait comment pour exister, tout simplement.
Elle sait plus trop Anca, l’impression de marcher dans le brouillard, le monde en pause, volume baissé au minimum. Non, voilà. Elle sait plus trop Anca, bloquée dans sa spirale, se repasse en boucle les cris, les images, les larmes. C’est des heures assises à contempler le vide, attendre peut être que sa mère réapparaisse, mais y a personne, maison définitivement vide, quand Lucian préfère disparaitre plutôt que d’assumer le manque causé par l’absence de sa femme. De sa fille aussi. Car elle est là sans être là Anca, bien droite dans sa jolie robe, rouge sur les lèvres, rose sur les joues, les manches de son cardigan bien tirées, les cheveux bien attachés. Petite poupée. Comme avant. Y a plus de cernes sur son visage, maquillage délicat pour camoufler le reste, camoufler la vérité, ce qui gangrène sur sa peau, et en dessous aussi.
Personne qui voit rien.
Parce qu’au fond y a plus personne. Elle a repoussé tout le monde Anca, trop facilement, mécanisme familier maintenant. Non. Y a plus personne pour l’écouter, comme une certitude quand elle regarde les noms défiler sur son répertoire téléphonique.  Et l’impression qu’elle va étouffer.
Personne qui voit rien.
Parce qu’aussi elle sait jouer Anca. Comédienne hors pair, un rôle qu’elle maitrise depuis trop d’années maintenant, étouffer les cris qui la rongent, faire ressortir le brillant de la pomme pour camoufler la pourriture. Personne car il n’y a personne, car elle n’a besoin de personne. Mais ils ont besoin d’elle. Comme un dernier fil pour la retenir, pour la forcer à se lever le matin, laver le visage des larmes de la nuit, plaquer un sourire factice sur les lèvres. Parce qu’ils ont besoin d’elle, encore, toujours les mêmes. Popescu. Car Lavinia a disparue, car Lavinia n’est plus là, et qu’au fond tout le reste c’est secondaire pas vrai ? Menteuse. Mais elle y croit Anca, aveuglément. Terriblement.

C’est le coton sur la peau, absorber le sang délicatement, sourcils froncés quand elle observe la plaie. Bourdonnement. Elle pensait qu’il n’y avait plus de place. Pourtant y en a toujours. Elle s’en rend compte maintenant. Chaque parcelle de peau qui ne demande qu’à s’ouvrir, libérer le venin, la laisser respirer de façon synthétique. Picotement. Même plus de douleur, l’habitude qui revient surement, ou peut être parce qu’il y a pire ailleurs. Dans son cœur. Nouveau trait, le carmin sur le blanc de son avant-bras, trancher la tige du coquelicot tatoué. Respirer.
C’est le téléphone qui vibre qui la tire hors de ses pensées. Compresse plaquée contre la plaie elle lit le message, fronce les sourcils, répond avec le peu d’instinct qui lui reste. Jeremiah. Y a comme un goût d’inachevé dans la bouche quand elle lit ses messages paniqués, souvenir de lui et d’elle au Smoking Dog, avant, quand elle avait juré. Il ne me fera jamais de mal. Tu parles. Rire désabusé qui la traverse, y a une larme aussi, puis deux ou trois. Pas beaucoup. Elle les efface rapidement.Jemmy ne me fera jamais de mal. Et pourtant la voilà qui agonise sur le rebord de la baignoire, comme un rappel morbide de ses années de lycée, ptêtre qu’en plissant bien les yeux, elle pourrait trouver des restes de sang séché entre les jointures du carrelage.  « Arrête Anca ». Sa voix qui s‘envole tout bas alors qu’elle repose son téléphone, nouvelle lubie en tête, comme si aider Jem pouvait l’aider à oublier le reste, altruiste jusqu’au néfaste, se noyer dans les emmerdes des autres pour oublier les siennes : une technique vieille comme le monde.

Le trajet est long. Ptêtre un peu trop, le souffle qui lui manque quand elle pose le vélo. Tybee c’est trop loin de chez elle, et l’absence d’énergie dans son corps pour la pousser. Mais elle y arrive quand même, tirant sur ses muscles, presque avec une certaine satisfaction. Et c’est les jambes qui tremblent, la tête qui tourne, le ventre qui gronde et la nausée qui grimpe. Elle s’arrête un instant Anca, instable, main sur la porte, avant d’inspirer un grand coup, chasser la sueur de son front, tout ce qui peut rester de parasite dans ses yeux. Oui. Elle inspire avant de sonner.
Une fois, deux fois. Pas de réponse. La porte qui s’ouvre doucement quand elle la pousse du bout des doigts, combien de temps déjà qu’elle n’est pas venue ici ? Ca lui fait drôle, putain de nostalgie qui la prend à la gorge. Mais c’est pas comme avant. C’est plus sale. Plus cassé. Explosé. Tornade passée entre les murs, elle a rien laissé de droit dans la maison. Et au milieu des décombres : Jem, tant bien que mal à ramasser les débris, vision un peu ridicule, comme s’il essayait de recoller une fissure sismique au scotch.  « Désolé c’était plus long que prévu » elle tremble sur le début, affirme sa voix sur la fin, pose son sac avant de s’avancer vers lui, se mettre à sa hauteur et prendre son visage entre ses mains. Le forcer à la regarder.   « Ca va ? » t’es sur que ça va Jem ? Où c’est à elle-même qu’elle pose la question. Elle sait pas vraiment.  « T’as déclenché un ouragan ? » sourire un peu fade sur le visage, elle le lâche doucement avant de le dévisager, comme si encore une fois elle s’attendait à le retrouver balafrer. Ptêtre qu’au fond elle l’espère presque, éponger sa douleur, tout aspirer, noyer un peu plus son cœur, pour arrêter d’exister.
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Jem Bogart

Jem Bogart
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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyVen 16 Mar - 12:12

Le trajet est long. Fou comme le temps peut passer lentement quand on attend quelqu’un que l’on aime, quand on raccommode sa vie avec les moyens du bord, à ramasser les bouts de porcelaine brisée, à nettoyer le désastre que Toni a semé dans sa colère destructrice, les miettes de vie disséminées partout dans la maison, sur le mur, le sol, sur le visage, les bleus qui ne guérissent pas depuis le Smoking Dog, depuis Anca et ses gestes trop doux, trop délicats, une miséricorde qu’il ne mérite assurément pas, pas même aujourd’hui alors qu’il lui demande de venir et qu’elle accourt, évidemment. Il y a son cœur qui bat plus vite, trop vite alors qu’il a pris la serpillère, a rempli un vieux seau d’eau presque bouillante, ses mains qui s’agitent un peu trop, tremblent encore, sensation fantôme de la peau de Toni sous ses phalanges, conscient que ces mêmes mains ont tracé des marques violacées sur la peau diaphane de son cou quelques minutes plus tôt, et il se dit quelque part que c’est imprudent de demander à Anca de venir alors que toute cette violence bout encore en lui, imprudent parce qu’il a peur de lui faire mal, parce qu’il ne pourrait jamais se le pardonner si cela devait arriver un jour. Il n’a jamais été trop attaché aux choses ni aux gens, Jem, cœur solitaire depuis trop, beaucoup trop d’années, à se perdre plus souvent dans la liqueur que dans d’autres yeux, à rire plus souvent devant des programmes télévisés qu’aux blagues d’hypothétiques amis, toujours seul parce qu’il repousse les gens, parce que c’est devenu un réflexe pour lui, quelque chose de symptomatique, faire bouger les barrières quand les autres se rapprochent trop, qu’ils empiètent sur son territoire, qu’ils effacent un peu les limites qu’il avait lui-même placées, sagement, précautionneusement, pour éviter de devoir trop se livrer, trop s’ouvrir, pour faire en sorte de ne rester qu’une silhouette mal dessinée à l’horizon. Il n’a jamais été trop attaché aux choses ni aux gens parce que ça ne fait pas partie de sa culture, de son éducation, de son mode de fonctionnement, parce qu’on lui a foutu dans le crâne qu’il était un indésirable, un indésiré, parce qu’il a toujours été de trop sur la photo de classe, sur la photo de famille, de toutes les familles, toutes celles dans lesquelles il a fait un séjour, toujours trop court, jamais assez, l’envie de se barrer au bout des guiboles, quand il en avait encore deux. Il n’a jamais été trop attaché à quoi que ce soit, qui que ce soit, parce qu’on lui a toujours appris qu’on ne pouvait compter que sur soi-même et qu’il l’a appris, au final, délaissé depuis trop de temps, mis de côté, tout juste bon à vivre dans une maison trop grande pour lui et nourrir une bande de chats crasseux.

Il n’a jamais été trop attaché.

Jusqu’à Anca.

Il l’entend arriver, il perçoit sa voix trop douce, les accents d’inquiétude qui s’y perchent, la voit enfin lorsqu’elle l’y oblige, jamais violemment, jamais brusquement. Il se demande pourquoi elle est comme ça avec lui, pourquoi elle prend des gants alors qu’elle devrait mettre un coup de pied dans la fourmilière, le remuer, le violenter, l’obliger à quitter sa zone de confort. La réponse est pourtant simple, c’est qu’elle n’est pas comme ça, Anca. Et même s’il prétend le contraire, il n’aimerait pas qu’elle change. Jamais. Pas quand elle le regarde avec ses yeux trop grands, trop sombres, trop débordants d’une putain d’affection qu’il ne mérite pas, même s’il y a croit à peine, même si elle pourrait tout à fait la feindre. Elle ne serait pas la première ni la dernière à lui faire croire à des chimères. Il ne comprend pas ce qu’il se passe mais il laisse tomber la serpillère dans un claquement fracassant, s’assied sur le siège le plus proche, mal au bide, mal au cœur, mal aux poumons, la respiration coupée alors qu’il contemple le désastre, se laisse une minute pour respirer un peu mieux, pour assassiner l’asphyxie. Il ne pleure pas, pas encore, trop habitué à contenir les larmes, à feindre le recul, suffisamment insensible pour que ça fonctionne, anesthésié par le temps, les années qui l’ont fracassé, rendu plus solide, moins malléable. « Elle est venue, elle a tout pété, elle voulait que je la paye pour qu’elle ramasse le ragoût qu’elle venait d’foutre par terre, j’aurais », ben alors, continue, t’es plus à une confession près. Sanglot refoulé, il baisse les yeux au sol, pas certain de vouloir regarder Anca, pas sûr non plus de vouloir lui dire ce qu’il aurait pu faire à Toni. Incapable de se résoudre à l’idée qu’elle puisse le voir pour ce qu’il est vraiment. « Elle est partie, elle a dit qu’elle reviendrait, j’sais pas à quoi j’dois m’attendre. »
Il ne remarque pas qu’Anca va mal, ne voit pas ses avant-bras mutilés, ne comprend pas pourquoi elle est plus pâle que d’habitude, plus transparente, plus aérienne. Il ne voit pas, parce qu’il est trop aveuglé par sa propre colère, sa propre tristesse, sa propre haine. Et aussi, un peu, parce qu’elle n’est jamais transparente à ses yeux, parce qu’elle irradie, parce qu’elle anéantirait la lumière du soleil pour briller plus fort encore. « J’suis désolé Anca. » Et ça sort en sanglot, ça se bouscule à ses lèvres, il est désolé pour ça, parce qu’il l’accapare, parce qu’il impose, parce qu’elle subit, elle, toujours, parce qu’il en est responsable cette fois. Il est désolé parce qu’Anca doit avoir mille autres choses à faire, mille autres personnes à voir, parce qu’elle ne devrait pas passer sa matinée à s’occuper d’un mec qui n’arrive même pas à se gérer lui-même. « Je t’aime » ça s’échappe, il ne l’a pas retenu et c’est inattendu, et c’est douloureux parce qu’il ne dit jamais ça, à personne, parce qu’elle est la seule pour qui il ressente quelque chose d’aussi puissant, d’aussi instinctif, primitif, de l’amour brut et sauvage et moche, pas lissé, pas travaillé, un bout d’argile encore à sculpter mais. Il l’aime, et ça lui fait mal, vraiment mal, ça tord et ça plie, à l’intérieur de lui, brise ses organes un à un, fracasse ses os jusqu’à les réduire en poudre. Il lève les yeux et l’observe, pas certain de ce qu’il devrait faire, les mains encore tremblantes et le teint trop pâle, livide, envie de vomir au seuil de la bouche. « J’vais me débrouiller avec tout ça, t’inquiète. » Et il se relève, tangue un peu, se rassoit immédiatement. Panique. Ne le montre pas.
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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyVen 30 Mar - 18:10

C’est plus que physique, ça se voit, ça se sent. C’est plus qu’un appartement ravagé, plus qu’un peu de ragout renversé. La voix qui tremble, les mots qui ne viennent pas complètement. Elle attend, patiente. Toujours patiente. Elle est venue, elle a tout pété, elle voulait que je la paye pour qu’elle ramasse le ragoût qu’elle venait d’foutre par terre, j’aurais… Ca se serre dans sa gorge, un peu, faire un parallèle un peu trop gros pourtant ça la fait vriller de l’intérieur. Elle est partie, elle a dit qu’elle reviendrait, j’sais pas à quoi j’dois m’attendre. Comme un rire qui la traverse, désabusé, elle secoue la tête. Y a plus vraiment de gentillesse dans son regard, surement que tout a trop été asséché, fatigue qui prend le dessus, la vie qui finit par gagner. « Faut la dénoncer. Y a pas d’autre solution. Faut porter plainte. Sinon elle reviendra, encore, encore, elle prendra tout ce que t’as jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien » la voix qui tremble un peu, elle secoue la tête, voudrait effacer les pensées nocives qui s’installent lentement. C’est pas moi le sujet, c’est lui. Arrête idiote. Claque mentale pour se concentrer elle soupire.
J’suis désolé Anca. « T’excuse pas, c’est rien » . Si quelqu’un devait s’excuser ce serait surement les autres. Mais pas eux. Pas lui. Pas elle. Ils n’ont rien fait. Rien du tout. C’est juste des jouets, dans des mains de gosses mal éduqués qui s’amusent à tout fracasser au moindre caprice. Alors elle le regarde Jeremiah – Jem – avec ses larmes et sa fatigue, Jem et sa douleur, Jem qu’elle voudrait absorber, pour ne plus penser à rien. Ca fait taire un instant les hurlements dans son crâne, la tempête, foutue tempête, et le cœur qui va mal.
Puis il vient tout casser.
Egoïste.
Je t’aime. L’air aspiré avec violence qui siffle entre ses dents, les ongles qui se plantent dans la paume, viennent raviver les cicatrices en demi-lunes trop récentes, de ces nuits à serrer trop fort pour ne pas hurler. Je t’aime. Une absence de vie derrière les yeux quand elle le regarde, peut être qu’elle ne calcule pas. Je t’aime. Et des souvenirs à la pelle qui s’imposent, chaque caresse sur son corps, la façon dont Jemmy a embrassé ses cicatrices, la façon dont Brandon l’a plaquée contre le mur, la façon dont ils se sont imposés, cavaliers intrépides à transpercer son cœur de leurs lances. Je t’aime. Mensonge, tous des menteurs. Tous, tous, tous. Y a plus rien de vrai. Plus rien. Juste des mots amers. Ca brûle dans sa gorge, dans sa poitrine, elle inspire comme elle peut, essaye de noyer l’orage. Je t’aime. Et les larmes qui menacent d’exploser. Je t’aime je t’aime je t’aime je t’aime je t’aime. A en gerber. A en crever. Lui manque plus que la lame, trancher encore les veines, essayer d’oublier, se noyer dans le noir, l’agonie. Je t’aime.
Et elle en crève.
J’vais me débrouiller avec tout ça, t’inquiète. Il fait comme si de rien n’était. Il fait comme s’il ne venait pas de fracasser la fine limite qui s’était installé entre eux deux. Il fait comme si, menteur de première classe, quand il se lève, titube, abandonne. Pas si bon finalement le menteur. « J’ai pas fait tout ce chemin pour rien. T’avais l’air d’avoir besoin de moi » c’est murmuré tout bas, la voix qui tremble encore un peu. Sans attendre elle sort de la pièce, comme une bourrasque, file dans la salle de bain pour attraper les flacons orange, remplis de prescription, rempli un verre d’eau, ramène le tout dans le salon. « Déjà avale ça, ça va te calmer » elle ose un sourire, trop vide, absent, se concentre sur l’apocalypse pour essayer d’effacer les tremblements. « Tu as faim ? Tu veux quelque chose d’autre ? Dis moi. Mais tu bouge pas. Tu reste là tant que t’es pas calmé » et elle ? Quand est-ce qu’elle se calmera ? Sans doute jamais. Alors elle fait ce qu’elle a toujours le mieux su faire, s’agenouiller au sol et attraper la serpillère, commencer à nettoyer les dégâts des autres à défaut de nettoyer sa propre vie.
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Jem Bogart

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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyDim 8 Avr - 14:24

Je t’aime, souvent pensé, jamais prononcé, pensée trop rare, éphémère dans son paysage, le champ lexical appauvri par des années loin des bancs scolaires, je t’aime, jamais dit, même à Billie, elle n’en valait sûrement pas le coup, sûrement pas suffisamment, je t’aime, ça sonne trop vrai dans sa bouche, trop étrange, incongru, il ne le dirait sûrement pas s’il ne le pensait pas non ? C’est ce que tout le monde devrait penser en l’entendant, ce qu’il pense lui-même alors que les mots fendent ses lèvres, alors que la supplique se manifeste. Ses yeux s’attardent sur le visage contrit, essaient de déchiffrer le moindre signe, la moindre alerte, le moindre mouvement qui sortirait de l’ordinaire. Il y a des choses qu’il perçoit, Jem, habitué à travailler les soldats étrangers jusqu’à la mort, à s’user la voix sur les ennemis, leur faire admettre l’impossible. Il y a des choses qu’il comprend, ça se sent dans l’air, dans la sueur, l’odeur de fer, ça se perçoit dans la manière qu’ont tous ces gens de vouloir cacher des choses, protéger le moindre petit secret au péril de leur vie, quitte à laisser des plumes. Il y a des choses qui ne font aucun mystère pour lui, aussi simples que des maths à un étudiant du MIT, des choses qui coulent de source, ne méritent même pas d’explication complémentaire, confirment des signes qu’il a déjà relevés dans sa grande attention, dans sa complète compréhension du monde et cela même malgré sa petite tête, malgré ses idées de merde, son cerveau étriqué. Il y a des choses qu’il saisit instinctivement, immédiatement, sans besoin de relecture, sans doute, certitudes plein le cœur. Et il y a un univers qui lui échappent, tout ce qui passe au-dessus de sa cervelle de moineau, les émotions, tout ce qui relève du domaine de l’empathie, de la sympathie, à force d’avoir laissé ça derrière, à la guerre, à force de l’avoir enterré sous une morosité contagieuse, déprimante. La réaction d’Anca en fait partie. Son regard qui fuit, ses gestes saccadés, sa respiration qui semble s’éclipser un instant pour revenir plus forte encore et le pieu qu’elle lui enfonce dans le cœur en ne lui répondant pas.
Ça ne fait rien, en fait. Ça ne fait rien parce qu’il est anesthésié, Jem, parce qu’il n’attend rien de personne et certainement pas d’Anca qui lui a trop donné sans aucune recherche de contrepartie, sans attentes, sans requête particulière, Anca qui est déjà au sol en train d’éponger la merde laissée par Toni après avoir laissé les médicaments sur le bout de la table. Il ne se fait pas prier, attrape le petit flacon pour déposer deux cachets dans le creux de sa main, les jette sur sa langue et renverse sa tête à l’arrière, le verre d’eau à ses lèvres pour faire tomber la médecine dans son estomac. Respirer, se calmer, oublier. Oublier les mots malheureux qu’il a pu lui dire, le je t’aime qui, il le sait, a semé le chaos. Laisser les questions qui n’ont aucun sens glisser sur ses plumes alors qu’il se lève, va s’échouer sur le canapé, les membres encore tremblants de colère, de peur. Elle devrait partir, Anca. Partir tant qu’il est tant, partir tant qu’il n’a pas encore serré ses phalanges contre son cou. Tant qu’elle respire, tant qu’elle est en vie. Tant que Jem ne laisse que ses yeux couler sur elle, poser un regard indécent sur les courbes de son corps, la façon dont l’arête de son nez se détache du reste du visage, la finesse de ses doigts qui frottent la serpillère sur le sol gras, des gouttes de sueur qu’il peut presque voir perler sur son front. Peut-être qu’il le voit, à cet instant. Peut-être qu’il remarque qu’elle est plus pâle que d’habitude, plus fermée, qu’elle se replie sur elle-même comme si elle souhaitait disparaître. Peut-être ou pas. Jem n’a jamais été suffisamment altruiste pour capter ce genre de détails, pour que ça attire vraiment son attention, pour qu’il remarque ce qu’il se passe au-delà du bout de son nez. Comme toujours, donc, alors qu’il voudrait lui parler, lui demander si elle va bien, s’enquérir de sa santé, il en revient au sempiternel sujet. Lui. « J’devrais être dans une putain d’tombe à l’heure qu’il est. » Il devrait, il voudrait. Il n’a rien, rien qui ne vaille la peine de survivre, de rouvrir les yeux une journée de plus, de continuer à avancer dans la vie comme un marin solitaire en haute-mer. « Chuis bon pour personne. Même toi j’arrive pas à t’dire les choses correctement, et chuis pas foutu de t’épargner ce genre de connerie. » Ça, ramasser des merdes sur le carrelage parce qu’il n’a pas été foutu de ménager la chèvre et le chou, d’empêcher le massacre de se produire. Il secoue la tête, continue de regarder Anca, la colère qui revient sans qu’il ne comprenne pourquoi. Peut-être parce qu’elle ne lui a pas dit qu’elle l’aimait aussi, ou qu’elle ne l’aimait pas du tout. Peut-être parce que comme à son habitude, il revient au point de départ. « Pourquoi tu viens à chaque fois ? Pourquoi tu m’laisses pas dans ma merde ? Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu fais en sorte que j’m’attache à toi alors qu’j’ai rien pour t’retenir et qu’chuis qu’un connard sans cervelle ? » A lui de poser les questions, sèchement, violemment, incapable de la moindre reconnaissance malgré tout l’amour qu’il ressent pour elle. Peut-être parce qu’il ne comprend pas. Le calvaire d’être un idiot.
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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyDim 22 Avr - 0:33

Ignorer, oublier, faire semblant. Aveugle ; Aveugle. Etouffer le reste. Il ment. Elle omet. Valse des imposteurs ça lui donne envie de vomir, de se tirer de là, de partir. Et si ? Pourquoi ? Comment ? Ne pas penser à ça, à Jem et ses mots qu’elles supperpose au visage de Jemmy, à ces déclarations sans lendemain qui ne valent que du vent. Ca aurait été quoi y a quelques temps ? Avant ? S’il avait dit je t’aime quand elle s’occupait encore de lui ? Je t’aime avant, je t’aime maintenant, non, non plus jamais. Elle barde son cœur de fer Anca, du moins ce qu’il en reste, ce qui n’est pas crevé. Protéger les dernières miettes de palpitant et ce n’est pas Jem qui fera voler les derniers morceaux. Surtout pas lui. Pas question.
Parce que c’était bien ce qu’ils avaient.
Mais il est entrain de tout gâcher.
Alors elle balaye le tout du revers de ses mots Anca, change le sujet, plaque un sourire factice sur visage, une habitude depuis de trop nombreux mois, poches de bonheurs crevées, c’est la tristesse qui dégouline par les pores de sa peau. Tristesse qu’elle voudrait laver à grand eau comme elle le fait avec le sol, serpillère sous les doigts, les genoux qui s’abiment sous son jean. Frotter, encore, encore. Comme une récurrence, foutue princesse de conte de fée bloquée au début de l’histoire. Y a pas de prince charmant. Y en a jamais eu. Pas Brandon. Pas Jemmy. Juste des cons. Tous des cons. A profiter de ce qui leurs tombent sous la main. Les ongles qui se plantent dans ses paumes, venant chercher des cicatrices lunaires à peines formées, creuser dans la chaire pour pas hurler.
J’devrais être dans une putain d’tombe à l’heure qu’il est. Hein ? C’est la voix de Jem qui la sort de sa spirale néfaste, c’est la voix de Jem qui la force à se rendre compte qu’elle frotte la même tâche depuis déjà trop longtemps. C’est la voix de Jem qui vient la tirer d’en bas, elle a envie de vomir, les yeux qui se posent sur lui, putain ce qu’ils sont pathétiques. Chuis bon pour personne. Même toi j’arrive pas à t’dire les choses correctement, et chuis pas foutu de t’épargner ce genre de connerie. « Arrête » coincé dans sa gorge, les mots qui ne veulent pas sortir, alors qu’elle se redresse lentement, serre la serpillière entre ses doigts fatigués, le regard électrique figé sur sur Jem. Pourquoi tu viens à chaque fois ? Pourquoi tu m’laisses pas dans ma merde ? Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu fais en sorte que j’m’attache à toi alors qu’j’ai rien pour t’retenir et qu’chuis qu’un connard sans cervelle ? C’est ça alors ? Les derniers morceaux qui s’effondrent ? Sa dernière œuvre balayée, explosée par une bombe sentimentale ? Comme une colère qui grimpe en elle, qui la parcourt, qui la fait trembler. « Jeremiah » silence. Elle serre fort. Fort. Trop fort. Tremble. Tangue. Explose.
Serpillère qu’elle lui jette à la figure, quand les derniers nerfs lâchent.
« Redis encore une fois ça. Encore une seule fois et c’est moi qui me charge de te mettre dans ta foutue tombe » colère, colère, elle tremble, vrille, c’est contre tout qu’elle voudrait hurler, lui, elle, eux, les autres. Tout. Tout. En quelques enjambées elle est face à lui de nouveau, l’attrape de ses doigts usés par le col pour qu’il soit forcé de la regarder. « Tu devrais être dans une putain de tombe ? Arrête les conneries ! » Parce que ça la tue, parce qu’elle n’en peut plus. Elle y croyait pourtant, à chaque fois qu’elle le ramassait, qu’il allait se relever lui aussi, qu’il allait avancer. Et toujours il revient au même point de départ. Toujours la même histoire. Et quand elle le regarde elle se voit aussi, reflet morbide de son échec cuisant. « Pourquoi je viens à chaque fois ? Tu te demandes encore ça ? Parce que tu comptes pour moi et que j’ai envie de te voir avancer, j’ai envie que tu t’en sortes et appelle moi idiote de vouloir t’aider » les mots qui flanchent, elle aussi, le flash d’adrénaline qui redescend et elle qui chute un peu plus, se laisse tomber au sol, recroquevillée, elle cache son visage entre ses mains.
Parce que c’est trop. Beaucoup trop.
Et les sanglots qui reprennent le dessus. Encore. Incontrôlable, elle perd son souffle, oxygène qui refuse de travers ses poumons, elle agonise un peu plus. Surement que lui aussi. C’est juste terrible. « T’es qu’un con. » qu’elle arrive à hoqueter, avant de se remettre à pleurer. Au fond pas sur que ça soit pour lui tout ça. Mais elle n’y arrive pas.
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Jem Bogart

Jem Bogart
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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyDim 29 Avr - 19:59

Stop, remonte le temps, avant que ça ne merde. Avant de balancer trop de mots au bûcher et les regarder flamber, avant qu’Anca ne s’effondre, avant que toute cette horrible scène ne se produise. Il est stupide, n’a aucune cervelle, juste le cran de la regarder sombrer, de ressasser ses mots, de se rappeler la serpillère qu’il vient d’éviter, balancée en plein visage. Rien ne fait sens, mais il ne lui en tient pas rigueur, se contente d’étaler les faits sur la table imaginaire posée face à lui. Rien ne fait sens parce qu’il est un idiot et qu’il le sait, parce que son cerveau ne percute jamais très rapidement, parce qu’il est obligé de faire des tours et des détours pour saisir la véritable portée d’un cœur brisé. Du cœur d’Anca. Les faits s’additionnent, troublants de dureté dans tout ce qu’ils ont de tragique, tout ce qu’ils ont de vrai, la serpillère et les mots stupides balancés par l’infirmière dans toute la folie qui est la sienne, contaminée par l’environnement néfaste de cette maison trop grande pour un seul homme, les genoux qui se cassent au sol et les larmes qui inondent les mains. Les images se juxtaposent, s’emmêlent, deviennent indistinctes comme deux bouchées de gros sel, à piquer la bouche, à faire fondre les muqueuses, à se prendre pour des mitrailleuses. Fais-le il voudrait hurler, fous-moi dans cette putain de tombe, il irait volontiers pour elle, se laisserait buter par ses mains pour peu qu’elles soient un peu trop douces, un peu trop précautionneuses, qu’elles le caressent au lieu de vraiment le frapper. Fais-le ça tambourine, se presse à ses lèvres, mais l’instant est passé et il réalise que ce serait stupide de répondre maintenant, alors que tout ce qu’il reste d’Anca c’est un bout de femme recroquevillé sur le parquet. « Tu comprends RIEN putain », ça tombe dans l’air, et il sait qu’il ne devrait pas, qu’il devrait baisser la voix, lui donner des airs plus doux, jouer une mélodie qui bercerait le corps tremblant d’Anca, mais ça se bouscule à ses lèvres et il ne peut plus rien retenir. Ses mains frémissent comme tout son corps, à mi-chemin entre le désespoir et la colère. À cheminer doucement entre les émotions, jongler sur deux-trois sentiments sans vraiment savoir lequel prendra le dessus au final. « J’ai que dalle Anca, QUE DALLE, j’ai qu’cette maison d’merde et cette vie d’merde ! » La voix fait des trémolos, inhabituel, indécis. Il aimerait partir mais elle pleure, elle pleure et ça le tétanise, le corps complètement figé dans une seconde suspendue, à ne pas savoir s’il faudrait qu’il agisse ou qu’il n’envenime pas les choses. Conscient qu’il est en train de foutre des pesticides sur une terre déjà trop fertile. Incapable d’aimer correctement, incapable de se faire aimer. Putain d’incapable. Des balbutiements étranglés dans la gorge, il laisse s’échapper un « pardon », un deuxième, attrape son stupide crâne entre ses mains et serre les mâchoires, comme pour ne pas se laisser submerger une nouvelle fois, reproduire avec elle ce qu’il a malencontreusement laissé voir avec Toni. Le vrai lui. Celui qu’elle aimera encore moins que l’actuel, plus bas que terre, une miette, une pourriture de miette, un truc à peine beau à regarder. Il s’éclate le genou par terre à son tour, décroche sans s’en apercevoir sa jambe de métal, offrant un bien triste tableau à quiconque oserait jeter un œil à la scène. C’est pas vraiment grave, dans le fond. Tout ce qu’il veut, c’est se rattraper, ne pas la laisser comme ça, ne pas la laisser tout court. « Me déteste pas, Anca », il murmure, pose ses mains sur les siennes pour essayer – vainement – de les détacher de son visage. C’est une demande pieuse, une prière, quelque chose qu’il souhaite plus que tout l’or du monde, incapable de se laisser grignoter une seule parcelle de la maigre affection qu’elle éprouve à son égard. « J’suis qu’un connard, j’m’en veux, j’sais qu’t’es là pour moi, qu’tu fais toujours tout pour moi. » Il ne veut pas qu’elle puisse penser à une quelconque ingratitude de sa part. Il est bien conscient des sacrifices qu’elle a faits pour lui, du mal qu’elle s’est donné pour qu’il vive un peu mieux, un peu plus décemment. « Parle-moi Anca », il répète alors qu’il accroche enfin ses mains, resserre ses doigts sur les paumes trop chaudes. Remarque la lacération qui saigne encore sur son avant-bras. La pulpe de son pouce glisse sur la plaie encore ouverte alors qu’il lève les yeux, déglutit. Elle aurait mieux fait de le coller dans sa tombe avant qu’il ne le remarque. « C’est quoi ça », murmure, soupir, elle n’est pas obligée de lui répondre mais ses mains se resserrent sur ses doigts trop fins, l’empêchent de se dégager. Te fous pas en l’air sans lui.
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Anca Popescu

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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyLun 28 Mai - 21:50

Cœur cassé, voix brisée, c’est plus elle, c’est autre chose, comme une poupée désarticulée à qui on a coupé les fils, incapable de se redresser pour continuer d’avancer. Jem et ses mots trop violents, amour & colère, mélange néfaste, nauséabond qui fait tout exploser. Qui la fait exploser alors qu’elle hurle un peu plus sa frustration avant de chuter, avant de tout fermer. Elle voudrait que tout s’arrête maintenant, ne plus jamais respirer, crever. Tout simplement. Que ce soit elle dans la tombe et pas lui.
Tu comprends RIEN putain Larmes qui redoublent de plus belles sur ses joues quand les barrières se font fracasser par les cris de Jem. Pourquoi ? Pourquoi ? Elle comprend pas non. Elle a jamais rien compris. C’est que maintenant qu’il le voit ? les yeux qui se ferment quand il hausse la voix, continue d’étaler son malheur alors qu’elle tente de ravaler le sien. J’ai que dalle Anca, QUE DALLE, j’ai qu’cette maison d’merde et cette vie d’merde ! Vie de merde enfermé dans une maison trop vide que ce soit lui ou elle, l’absence des autres qui creuse le cœur, qui tiraille un peu plus les nerfs. Il a que dalle, elle a que dalle, c’est ridicule, c’est terrible. Si elle n’était pas aussi dévastée peut être qu’elle protesterait, qu’elle lui ferait ravaler ses mots pour lui expliquer en un exposé de 50 pages pourquoi sa vie n’est pas merdique et faire la liste de tout ce qu’il possède.
Mais pas aujourd’hui. Non. Pas aujourd’hui.
Anca est à la cave, Anca est cassée, Anca n’a plus de piles pour fonctionner. Pas de mots doux pour Jem, pas de main pour caresser sa joue. Rien du tout. Juste du silence et elle qui s’étouffe dans ses sanglots, l’impression qu’elle finira par se dessécher à force de pleurer. pardon. Ca ne fait qu’effleurer ses tympans, elle n’entend pas vraiment, trop enfermée dans sa boucle destructrice. pardon. Encore, encore. Ca l’atteint pas. Me déteste pas, Anca. C’est mal la connaitre pourtant, pas la moindre parcelle de haine dans son corps, incapable de détester car la rancœur n’est pas écrite dans ses gènes. Même après toutes ces années elle n’en veut à personne si ce n’est à elle. Quelques écarts parfois, mais jamais très nombreux, jamais très fréquents. Il devrait savoir depuis le temp Jem. Combien de fois elle aurait pu lui claquer la porte au nez mais qu’elle ne l’a pas fait, combien de fois elle est revenue le lendemain même après les cris, les hurlements, les pleurs ? J’te déteste pas qu’elle voudrait murmurer alors qu’il pose ses mains sur les siennes. Non. Clairement pas. C’est pas contre toi Jem, promis juré, t’as juste un peu merdé, mais comme toujours, c’est pas si grave, ça passera. Promis.
J’suis qu’un connard, j’m’en veux, j’sais qu’t’es là pour moi, qu’tu fais toujours tout pour moi. Un rire la transperce sans qu’elle n’arrive vraiment à la retenir, ironie du sort, le seul gars capable de voir ce qu’elle fait pour lui c’est Jem. Pas Seven. Pas JJ. Jem. Ca raisonne drôlement, ça la fait chialer ptêtre un peu plus aussi. Pourquoi lui ? Putain. Pourquoi lui. Pourquoi tout ça. Elle étouffe. Un peu plus. Encore. Elle étouffe.
Parle-moi Anca. Et pour dire quoi ? Hein ? Pour dire quoi ? Y a rien qui sort, rien du tout, cerveau plan, plat sur l’encéphalogramme, juste un fin filet d’air qui filtre entre ses lèvres, prouver qu’elle est encore vivante, qu’elle s’est pas étouffée. Puis y a Jem qui s’agrippe à elle, Jem qui sert ses mains, ses poignets pour essayer de la libérer. Jem qui ravive la douleur, le gémissement qui lui échappe quand il appuie sur les plaies encore fraiches.  « Arrête ! » qu’elle demande, panique dans la voix, panique dans le corps, tout qui tremble. Pas lui. Pas ça. Elle revoit JJ qui embrasse chaque cicatrice. JJ qui lui dit à quel point elle est belle même aussi fissurée. JJ et ses doigts le long des trainées blanches à la verticale sur ses poignets.
Y a le pouce de Jem contre la plaie. Y a les yeux de Jem qui s’écarquillent un peu trop. Y a la voix de Jem qui s’envole dans la pièce, qui la cloue un peu plus au sol. C’est quoi ça. Ca se voit pas ? Qu’elle a envie de lui répondre, alors que le temps s’arrête. Non ? Vraiment pas ? Elle et toutes les autres, sœurs, cousines, manifestation d’un mal-être trop présent à l’intérieur depuis tant d’années. J’ai mal et je sais pas pourquoi semble hurler chaque trainée sur sa peau trop pâle. « Rien » ton de défi, elle rassemble tout son courage, essaye de se dégager mais il resserre sa prise. Encore une fois. « Lâche moi Jem » elle tire un peu plus, animal en cage qui suffoque d’être enfermé.  « Ca te regarde pas ok ? » hypocrite hypocrite hypocrite, ça tourne en boucle dans sa tête. T’es hypocrite Anca. Elle déborde, elle explose, bombe à retardement qui s’enclanche. « Putain mais à d’autres c’est quoi ça ? T’es aveugle aussi maintenant ? »  les mots acides, les mots amers, cette personne qu’elle déteste tellement qui prend le dessus, la Popescu qui est rangée bien au fond la majorité du temps et qui finit toujours par s’échapper, tout foutre en l’air, tout bousiller. « J’te déteste pas Jem. » elle se rapproche, trop près, défiante, brûlante. « Pas encore ». dans un souffle qu’elle lui lance, ça lui brûle la trachée, ça lui donne envie de gerber. Menteuse. Parce qu’elle ne peut pas avouer que ça n’arrivera jamais.
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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyLun 28 Mai - 23:49

Anca. Les voyelles et les consonnes qui jouent deux par deux, c’est à qui remportera le gros lot, à qui fera craquer des rides sur le visage du soldat. Anca, ça donne des frissons sous sa peau qui ne frémit pourtant jamais, même pas quand il fait froid. Plus rien ne filtre quand il la regarde, c’est comme s’il se réveillait, comme s’il s’endormait, tout à la fois. Un mélange de vie et de mort, Anca, ils vont finir par se brûler sans même le remarquer, par se consumer des pieds à la tête. Y aura plus que des cendres sur le parquet griffé devenu gris au fil des années, rien d’autre que de la poussière et plus assez de gens pour les pleurer. C’est ce qu’elle est venue lui dire, sans doute, ce qu’il lit en braille sur ses avant-bras, son pouce qui passe et repasse sur la plaie sans se douter du mal qu’il peut lui faire. Du mal qu’il se fait à lui-même alors que l’hémoglobine marque les sillons de ses doigts. S’il y avait une scène de crime, on le collerait directement sur la liste des suspects, et ça ne l’effraie même pas une seule seconde alors qu’il y a Anca qui bat des cils un peu trop près, essaie de se dégager de son étreinte malvenue. Comment pourrait-il comprendre, comment pourrait-il savoir. C’est pas comme s’il s’était approché assez souvent du noir pour savoir ce que ça fait de tanguer sur un bout de ficelle. Et les ordres n’y font rien, elle pourrait très bien lui lire l’annuaire qu’il n’en aurait pas plus quelque chose à foutre. Les tressaillements de sa voix vibrent un peu trop en lui, actionnent tous ses boutons, flanchent ses convictions. Arrête, il peut pas, ce serait comme lui demander d’arrêter de l’aimer, de se gaver de son reflet. Il n’est pas aveugle, non, il choisit délibérément de ne pas voir, de ne pas comprendre, c’est la première fois de sa vie qu’il aimerait être plus bête qu’il ne l’est déjà pour ne pas voir les failles au fond de ses yeux, les moments où elle lui ment de façon éhontée. Il devrait pourtant être habitué à ce qu’on se foute de sa gueule, ça commencer par la jambe et puis c’est tout le reste, il n’est pas assez intelligent, pas assez beau, pas assez fort, pas assez tendre. Il n’est rien, suffisamment rien pour le dire à voir haute, lui demander de pousser le constat jusqu’au bout, de réaliser que c’est une ombre qui lui fait face et pas un vrai homme.
Pourtant, c’est pas ça qui s’passe.
C’est Anca qui lui dit qu’elle ne le déteste pas.
Et les mots ont une consonance étrange, comme si elle parlait une langue qu’il ne comprend pas vraiment, la peur clouée au bide de mal interpréter ce qu’elle veut vraiment lui dire. De prendre son je ne te déteste pas pour un je t’aime. Elle ne le déteste pas encore, faudrait un peu pour que ça change. Un rien. « Fais pas ça », il souffle, elle est si proche qu’il doit alterner son bleu céruléen entre ses deux yeux. Un coup d’œil vers le bas pour expliquer sans prononcer. Pars pas sans lui, sans lui avoir dit au revoir, fais pas tout ce que tu lui montres sans lui montrer, ne zèbre pas ta peau de coupures qui ne partiront jamais, c’est rien d’autre qu’autant de barres cochées pour tous tes jours en prison. Même si c’est juste une prison de chair, note. Ils n’étaient pas censés se faire ça. Se blesser sans le faire, s’égratigner du bout des doigts. Il sait qu’il n’est sûrement pas le seul fautif, mais à la simple idée d’avoir une part de responsabilité dans son malheur, c’est son château de certitudes qui s’écroule comme s’il n’était fait que de cartes. « Te fais pas ça. » Le reste du monde s’en fout peut-être, faut croire. Le reste du monde ne s’en trouverait pas changé. Lui si, pour toujours, éternellement, ça tournerait comme le canon d’un revolver avec lequel il jouerait à la roulette russe. Y aurait plus rien pour l’empêcher de toucher le fond, de laisser la part d’ombre en lui gagner du terrain. Tout rafler. Il l’aime. Il l’aime parce qu’Anca est la seule à croire en lui, à ne pas penser qu’il est irrécupérable, à essayer de l’attraper par les épaules pour le hisser sur le rebord. Il l’aime et elle est trop proche, tellement proche qu’il ne comprend même pas comment sa bouche atterrit sur la sienne, douce et docile, peut-être le seul truc qu’il sache faire sans que ça finisse en catastrophe. Lèvres contre lèvres il respire, une larme qui coule sur sa joue et sa main qui s’accroche religieusement à sa mâchoire trop pâle. Il aime et il a peur de lui répéter, qu’elle se braque encore, qu’elle l’ignore, il a peur de donner un peu trop d’impulsion à ce qu’elle a déjà commencé à initier avec les lames plantées entre ses veines. Il aimerait lui enlever tous les rasoirs et tous les flingues du monde, savoir comment arrêter ce qu’elle entreprend déjà minutieusement de faire. Bête, mais pas à ce point. Il comprend qu’elle s’efface un peu plus à chaque seconde, pour laisser la place à cette Anca transparente, opalescente, cette Anca qui le terrifie autant qu’elle l’attire. Y a aucun moyen de gagner contre ça, contre un monstre invisible. C’est comme se battre avec de la fumée. Alors autant faire ce qu’il fait de mieux, gagner du temps, rogner des heures sur leurs secondes, le trajet de sa main qui s’arrête dans sa nuque pour l’attirer à lui et la bouche étrangement sage, lèvres contre lèvres pour garder l’espoir qu’elle respire toujours dans quelques minutes, dans quelques jours, dans quelques siècles.
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MessageSujet: Re: wrap our hearts in cellophane (jemanca)   wrap our hearts in cellophane (jemanca) EmptyJeu 21 Juin - 22:19

Il l’enserre, oiseau entre barreaux d’aciers, l’emprise qui l’empêche de s’envoler, elle a le pied coincé dans le piège, cascade de métaphores qui se bousculent dans son crâne, images ridicules qui la feraient sourire si la situation n’était pas si mauvaise. Lâche moi alors qu’elle se débat, encore une fois, sans succès parce que c’est toujours pareil. Trop faible, trop fine, trop fragile, les doigts qui s’impriment dans sa chaire, qui laisseront des traces pour les jours à venir, habitude de sa peau, de bleuir au moindre inconvénient.
Fais pas ça. Fais pas quoi ? C’est électrique, les mots de Jem qui restent coincés dans sa gorge alors qu’elle serre les lèvres. Ses dents qui s’acharnent sur l’intérieur de sa joue, mordent trop fort, goût d’hémoglobine sur la langue. Te fais pas ça. S’ouvrir les veines une nouvelle fois, trancher la chaire, trancher la peau, répandre son sang sur le carrelage et que Ioan ne puisse pas la sauver cette fois. Te fais pas ça. Mais c’est trop tard, et pas même Jem ne pourra empêcher ça à moins d’avoir une machine à remonter dans le temps. Te fais pas ça. Même pas la peine d’essayer de le lui ordonner, elle continuera, elle n’a jamais vraiment pas arrêté. 9 ans après et elle est toujours là, au même endroit, juste un creux bien plus béant dans la poitrine : d’adolescente elle est devenue adulte, et les douleurs se sont multipliées par milles.
Les yeux qui se ferment, paupières trop lourdes, parce qu’elle n’arrive plus à affronter ce qu’elle à en face d’elle. Jem. Jeremiah. Ce pantin cassé, dernier rempart avant de tout lâcher. Elle avait espéré, pourtant ça n’a pas marché, faut croire que ça ne marche jamais. Jem ou elle qui fait tout foirer, la faute leur appartient à tous les deux pendants encore quelques secondes, avant qu’il n’envoi tout bouler.
Y a ses lèvres sur les siennes. Comme une brûlure.
Y a Jem trop prêt d’elle. Comme une putain d’injure.
Y a lui qui bafoue tout, menteur, traitre. Y a lui qui franchit tout seul la limite sans qu’elle n’ai besoin de le tirer.
Il l’embrasse. Doucement. Trop doux. Comme une hésitation. Ce genre de baisers qu’elle n’a jamais connu et qu’elle ne souhaite pas connaitre. Ceux qui font intrusions, qui renversent tout, bulldozer sans cœur. Elle a mal. Tellement mal. « Non ! » alors qu’elle s’écarte comme brulée vive, main sur ses lèvres pour effacer les traces du crime. Non. Parce qu’elle ne supporte plus Anca, qu’on utilise son corps sans demander son avis, parce que ce baiser fait ressurgir tous les autres, ceux de JJ, dans la ruelle ou dans sa chambre, contre un mur ou dans la salle de bain. Parce que ça fait trop mal, parce qu’il ment surement, parce qu’il n’attend que ça, qu’elle laisse tomber ses vêtements au sol, comme tous les autres. Tous les mêmes. A vomir. Elle voit plus claire Anca. N’essaye même pas de comprendre les intentions de Jem, de prendre du recul. Y a un truc de cassé depuis trop longtemps, et il ne fait qu’écraser les restes entre ses doigts.
« Lâche moi tout de suite Jeremiah. Je te jure que si tu me lâche pas c’est plus la peine pour toi de m’appeler. » menaces qu’elle profère dans un souffle brulant, le regard rivé dans les pupilles brisés de celui qu’elle avait pensé réparer. Au final elle échoue un peu plus, tremblante, elle enfonce ses ongles dans la peau de Jem, finit par se libérer prend juste le temps de ramasser ses affaires et déjà elle est dehors, porte qui claque dans son dos alors qu’elle se met à courir dans la rue, larmes qui coulent, elle n’en peut plus.
Et dans sa tête ça prend forme. Des images, une idée, un solution. Dans sa tête ça se dessine, une aiguille plutôt qu’une lame, poison fort plutôt que l’agonie.
Ce n’était qu’une question de temps
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