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 Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden

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MessageSujet: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyMer 28 Juin - 16:51

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Une après-midi d’orientation. C’était ainsi qu’ils l’appelaient, sur le courrier que Landon avait reçu une semaine plus tôt, courrier qui avait été adressé à tous les anciens élèves et leurs parents, dans l’espoir d’avoir un maximum d’intervenants. On avait besoin d’eux, d’un maximum d’adultes entrés dans la vie active, pour venir témoigner auprès des élèves qui entreraient en dernière année de lycée à la rentrée prochaine. Ces élèves un peu perdus, qui devraient, d’ici quelques mois à peine, prendre des décisions primordiales pour leur vie future, et qui avaient donc besoin d’être éclairés sur la multitude de carrières à leur disposition. Il avait accepté, Landon. Non pas parce qu’il conservait un souvenir impérissable des interventions de professionnels auxquelles il avait assisté lorsqu’il était lui-même élève – il savait déjà ce qu’il voulait faire, aussi ces heures passées à écouter déblatérer un vieux bonhomme n’avaient été pour lui qu’une perte de temps – mais parce qu’il aimait les deux carrières qu’il avait exercées durant sa courte vie, et que cela lui ferait plaisir de peut-être éveiller des vocations parmi les jeunes esprits. Et puis, il avait passé tant de bons moments entre ces murs ; il leur devait bien ça.

Il avait donc accepté, s’était inscrit pour intervenir dans le champ de l’armée et du sport de haut niveau. L’un rejoignant un peu l’autre, dans son cas. Il avait dû se dépêcher de rentrer après l’entraînement de son équipe pour manger un morceau avant de repartir pour le lycée, et pour se changer. Ah, parce que oui, c’était tenue correcte exigée. Pour bien différencier les jeunes intervenants des élèves, pour qu’ils aient d’office l’air professionnel et soient plus aisément respectés par leurs pupilles, ou une autre connerie du genre. Lui, il trouvait juste ça grotesque. Un sportif, ancien militaire, qui devait se ramener en pingouin ? Voilà qui n’était pas crédible, pour le coup. Mais il n’avait pas franchement le choix, aussi il s’était vu fouiller dans son placard, à la recherche de ce costume qu’il ne portait que tous les trente-six du mois, pour un mariage ou une autre mièvrerie du même acabit. Il avait enfilé une chemise en coton blanc, ce fameux pantalon gris qui appartenait à l’ensemble du costume, et des chaussures habillées de base – la seule paire qu’il avait. Il avait laissé la veste au placard, il faisait trop chaud pour cela, et n’avait même pas touché une cravate, parce que bon, fallait pas déconner non plus. Il jette un coup d’œil au reflet que lui renvoie le miroir de sa penderie. Sa chemise laisse tout deviner des biceps qui tendent l’étoffe au moindre mouvement, et son pantalon tombe bien, un peu trop bien même, sur son corps musclé. Il a encore pris depuis la dernière fois qu’il a enfilé un costume, résultat logique de ses entraînements quotidiens, et probablement faudrait-il qu’il en rachète un, un peu plus grand, qui épouserait un peu moins les formes de son corps bien sculpté. Mais il est trop tard pour ça aujourd’hui, aussi il fera avec. Il passe une main dans ses mèches brunes, claque la porte du placard. Ça fera bien l’affaire. Il doit juste parler à des adolescents qui n’en ont rien à foutre de lui, qui ont choisi son atelier au hasard, alors ils n’allaient pas faire de chichis.

Rapide passage par la salle de bain pour se brosser les dents, puis le jeune homme quitte son loft, bien décidé à rejoindre l’établissement à pied, puisqu’il n’utilise quasiment jamais la voiture, de toute manière. Heureusement pour lui, Mère Nature a décidé de se calmer un peu, de leur accorder un peu de répit dans cet été caniculaire, et depuis quelques jours, Savannah a retrouvé un semblant de fraîcheur. Ç’aurait été relativement embarrassant pour lui d’arriver devant les élèves avec deux énormes auréoles sous les bras. Il marche, trace de ce pas si rapide qui est devenu le sien avec les années, tâchant de la tenir éloignée de son esprit. Hors de portée de ses pensées. Mais il échoue lamentablement, comme toujours, et plus il tente de ne pas laisser ses mèches blondes s’infiltrer dans son esprit, plus elles reviennent en force l’obséder. Elle sera probablement là, aujourd’hui. Si leur ancien lycée l’a contacté lui, ils en ont sans doute fait de même avec elle. Alors ils vont se retrouver pris entre les murs de l’établissement scolaire, une fois de plus, sept ans après. Ces murs à l’abri desquels ils se sont rencontrés, ils ont appris à se connaître, ils se sont aimés. Il ne sait pas encore comment il va réussir à gérer cela. Il n’en a pas la moindre idée. Au moins se dit-il que la probabilité qu’ils se trouvent dans le même groupe d’intervention est minime. Et qu’avec un peu de chance, elle ne sera même pas là. Bien qu’il sache pertinemment qu’il serait fort déçu de ne pas la voir.

Il file sous le ciel nuageux de Savannah, il se dépêche pour ne pas arriver en retard, tant et si bien que, comme trop souvent, il finit par pousser la porte de l’école avec de l’avance. Dix bonnes minutes trop tôt, même. Mais bon, mieux vaut être en avance qu’en retard, n’est-ce pas ? Il entre dans le hall du lycée, s’engage dans le couloir principal du rez-de-chaussée, qui accueille nombre de casiers et de salle de classe. Les talonnettes de ses souliers claquent sur le revêtement du sol, son nouveau qui résonne dans le corridor désert, là où il était habitué à se déplacer en silence dans ses éternelles tennis. Ses yeux s’attardent sur les murs à la peinture craquelée, glissent le long des casiers. Jusqu’à se poser sur ce casier, le numéro trois cents vingt-cinq, celui qui a été le sien quatre ans durant. C’était devant ce casier qu’il se trouvait la première fois qu’il l’avait vue. Il la revoit comme si c’était hier, petite silhouette enfantine perdue dans cette marée d’élèves, chevelure éclatante qui attirerait immanquablement son œil par la suite. Il se revoit comme si c’était hier, se tenant devant son casier ouvert, arborant cette mèche qu’il trouvait tellement cool à l’époque, coupé dans son activité par l’apparition de la demoiselle. C’est contre ce casier qu’il l’a plus d’une fois trouvé en train de l’attendre, c’est contre ce casier qu’ils se saluaient le matin, de manière un peu trop expressive parfois au goût des autres élèves, mais ils s’en foutaient, ils étaient jeunes, ils avaient cessé depuis longtemps de se soucier du qu’en-dira-t-on.

Ils font mal ces souvenirs, ils lui tordent l’estomac, le prennent au cœur. Il savait que ce serait dur de remettre les pieds ici, mais il ne s’attendait pas à ce que ça le soit à ce point. Il s’éclipse par l’une des portes du couloir, direction les toilettes, qui n’ont bien évidemment pas bougé depuis son dernier jour de cours ici. Il se réfugie dans les sanitaires, parce qu’il n’a pas grand-chose de mieux à faire pour tuer le temps, qu’il aime mieux s’occuper de ça maintenant que d’avoir une envie pressante en plein milieu de son intervention, puis il refuse de se laisser submerger par les souvenirs. Il se rince les mains, regagne le couloir. Et c’est là qu’il la voit. Il ne l’aurait presque pas reconnue, si bien apprêtée, elle qui a toujours les cheveux en bataille et des tenues peu soignées. Mais c’est bien sa silhouette, c’est bien cette chevelure inimitable qu’il reconnaîtrait entre mille. C’est étonnant pour lui de la voir si bien mise en valeur ; il est déjà inhabituel pour lui de la croiser, mais alors vêtue de la sorte ? Cela défie les limites du plausible. Ses yeux glissent sur son décolleté, mince mais plongeant, dérivent vers ses cuisses largement dévoilées. Merde, elle n’a plus rien de la gamine qu’il a laissé derrière lui il y a des années de cela. Il sort de sa torpeur, s’avance vers elle. Le couloir est désert, à l’exception de leurs deux âmes. Il serait grotesque de prétendre qu’ils ne se sont pas vus. Il ne sait pas où elle cherchait à se rendre à la base, probablement cherchait-elle un enseignant pour être mise au courant de l’organisation de l’après-midi, comme il était lui-même supposé le faire. Toujours est-il qu’il marche vers elle, et elle aussi, elle marche vers lui. Et comme par hasard, c’est devant la vitrine des trophées, trônant en plein milieu de l’un des murs du couloir, qu’ils se retrouvent. Comme par hasard.

Il s’arrête à un mètre d’elle, distance de sécurité, parce qu’il a compris depuis la dernière fois qu’il valait mieux qu’il ne se tienne pas trop près d’elle, sans quoi il ne répond plus tout à fait de ses actes. Être affaibli, mis à terre par la force des souvenirs. Il se permet de la détailler un peu plus attentivement maintenant qu’un couloir entier ne les sépare plus, maintenant qu’il a un prétexte pour le faire, aussi. Prunelles d’azur qui contemplent ce visage joliment maquillé, plus qu’à la normale, qui glissent vers sa gorge, ses bras, ses jambes galbées, tant de chair mise à nu qu’il aimerait couvrir, préserver du regard des autres hommes pour être le seul à pouvoir jouir d’une pareille vision. Mais ce n’est plus son droit. Il l’oublie un peu trop souvent, ça, Landon. Regard qu’il relève vers le sien, qu’il ancre dans ses opalescences bleutées, léger sourire qui se peint sur ses lèvres.

- T’es en beauté… T’espères séduire les lycéens, cet aprem, c’est ça ?

Petite pique pas bien vilaine qu’il lui envoie, taquinerie qui n’a rien de méchant, dans le fond. Seulement il est comme ça le jeune homme, incapable de faire un compliment sans l’accompagner d’une bêtise. Probablement qu’il n’est pas bien doué avec les mots, avec le tact. Il se décale un peu, se tourne vers la vitrine à leur droite, observe les trophées qui s’y accumulent, certains qu’il a aidé à gagner. Il y a des photos, aussi, des photos des équipes qui se succèdent au fil des années. Il y a la sienne. Photo de l’équipe de football américaine du lycée, lui, le quarterback, qui se tient aux premières loges, à la place de choix, le ballon coincé sous la main. Elles lui paraissent bien jeunes, tout à coup, toutes ces têtes blondes. Lui qui pensait être musclé à l’époque, il a l’impression qu’il nageait alors dans son énorme équipement, comparé à maintenant. Il se souvient très bien de cette photo, de la chaleur écrasante qu’il faisait ce jour-là sous le soleil de plomb, de combien ils avaient chaud dans leurs tenues. Et pourtant, ils ont tous cet immense sourire aux lèvres, leurs casques posés devant eux. Tout était si différent, à l’époque.

Il a les yeux rivés sur cette photo Landon, il ne regarde pas Eden, mais il devine qu’elle se tient toujours à ses côtés, qu’elle n’a pas déjà filé. Il détaille les plus infimes parties de cette photo, perdu dans ses pensées, dans ses souvenirs, essayant de comprendre où il a merdé. Où sa vie est devenue ce qu’elle est, où il a perdu de vue ce qui était réellement important.

- C’est drôle, parce que j’pensais vraiment qu’on allait quelque part, tous les deux, à l’époque. Qu’on resterait toujours ensemble. Tu sais, parfois je passais devant cette vitrine et j’me disais que sans doute, un jour j’emmènerais notre gosse ici pour la lui montrer, pour lui montrer ces coupes, ces photos. Qu’on lui montrerait ce bahut où on s’est rencontrés. J’devais être un peu trop naïf, j’pense, à ce moment-là.

Il tourne enfin la tête vers elle, le regard plutôt inexpressif, résigné face à cet avenir qui n’aura vécu que dans l’imaginaire d’un adolescent amoureux. Il ne la regarde qu’une fraction de seconde, parce qu’au même moment, avant que la jeune femme ait le temps de prononcer un mot, une voix retentit dans son dos.

- Eden ?

Il se retourne, tombe nez à nez avec Mr. Wells, professeur d’Histoire qui les avait eus tous deux en tant qu’élèves. Il a pris un coup de vieux le bonhomme, le temps ne fait pas de cadeau. Cheveux devenus poivre et sel, rondeurs de l’âge gagnées, visage un peu moins frais, aussi, marqué par le temps et par des années d’enseignement, tâche plus éreintante qu’il n’y paraît. Il est surpris de le voir là ; c’est étonnant de voir que certains restent là, ne bougent pas d’un poil, lorsque vous êtes partis faire votre vie et avez avancé.

- Et Landon !, s’exclame-t-il en croisant son regard. Je ne t’aurais presque pas reconnu mon grand, sans cette espèce de mèche que t’avais !

Le prof éclate de rire, faisant un geste en direction de son front pour appuyer ses propos, et le brun se laisse aller à sourire, amusé par cet adulte qui lui était toujours apparu comme particulièrement sympathique, pour un prof.

- Monsieur Wells, ça me fait plaisir de vous voir !

- Moi aussi, moi aussi les jeunes. Alors, Landon, ça y est, tu lui as passé la bague au doigt ?

Il cligne des yeux, mets quelques instants à percuter qu’il parle d’Eden. Bien sûr, leur ancien enseignant n’a pas la moindre idée de leur situation actuelle. Et ça le fait rire Landon, y a moyen de faire un truc avec ça, il le sent. Sans réfléchir, il glisse un bras autour de la taille d’Eden et l’attire un peu contre lui, avec un grand sourire :

- Oui, elle a enfin dit oui ! J’vous raconte même pas la galère que ça a été pour la convaincre…

Il lève les yeux au ciel, éclate de rire avec leur aîné. Ma foi… Il n’a plus qu’à espérer qu’Eden ne l’envoie pas valser contre la vitrine, cela pourrait s’avérer très embarrassant. Puis on peut bien s’amuser un peu, non ? Non ?

- Bon, il faut vous dépêcher par contre tous les deux, reprend Mr. Wells. C’est l’heure, les élèves vous attendent ! Normalement, les intervenants sont regroupés par trois, mais comme tu viens parler de deux carrières différentes, Landon, tu comptes pour deux. Oh, et on vous a mis dans le même groupe du coup, on s’est dit que ce serait plus sympa pour vous, d’autant plus que l’on tente de faire des groupes aux carrières diversifiées afin d’attirer un maximum d’élèves. Vous êtes attendus dans la salle 102, du coup.

Une tape sur l’épaule de Landon, un « j’étais content de vous voir, tous les deux » rapidement expédié, et l’enseignant disparaît, sans plus de cérémonie. Les laissant seuls, les laissant accuser le coup, assimiler la nouvelle qu’ils vont passer l’heure, peut-être même les heures suivantes à parler ensemble à des adolescents. Excellent.
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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyMer 28 Juin - 21:39

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Voiture garée sur l’immense parking du lycée le plus fréquenté de Savannah après une demi-heure d’embouteillage entre Tybee Island et River Street. Elle avait cru devenir folle Eden, elle avait vue l’heure sur le cadran électronique avancer et ça l’avait rendue dingue. Elle avait oublié qu’ici, à Savannah il valait mieux tout faire à pieds plutôt que de prendre un engin motorisé. Cette ville est une réelle catastrophe en termes de circulation automobile. Qu’importe l’heure, qu’importe l’endroit il y a toujours des bouchons. Au point d’entendre klaxonner à tout bout de champ, entendre hurler et gueuler elle-même contre les autres conducteurs qu’elle avait considéré trop lent sur le chemin.  Tout le long du trajet, elle avait été certaine qu’elle arriverait en retard et ça l’avait foutu en rogne car pour une foi elle était réellement partie en avance. Ne voulant pas se faire remarquer face à l’ensemble des professeurs, parents d’élèves qui l’avaient gentiment invité pour qu’elle puisse parler de son souhait de carrière après le lycée, et ce qu’elle avait fait de concret pour arriver à ses fins mais finalement, après avoir fait résonner le klaxon et appuyer plus que raisonnablement sur la pédale d’accélération elle était en avance. De quinze minutes à peine mais elle a réussi, elle est à l’heure.

Elle coupe le contacte et le vacarme du moteur cesse. Le silence qui s’instaure dans la voiture de son père lui fait un bien fou, pendant un simple instant elle s’autorise à laisser sa tête s’avachir contre l’appuie tête derrière elle. Elle soupire, elle regarde les alentours et voit quelques voitures déjà garée pourtant la rue et la route jusqu’au grande porte du lycée est déserte. Elle se demande qui est déjà-là, si elle verra des têtes qu’elle a connue pendant ses années lycée ou bien si ce seront que des gens plus vieux, ou peut-être plus jeune qu’elle qui vont parler de la vie professionnelle qu’ils ont voulu/réussi à mener. Elle se demande si lui, il sera là. Si son ex petit-ami, celui qu’elle n’a pas revue depuis un peu plus de deux semaines est aussi de la partie. Ça serait normal qu’il soit là, pourtant… Elle a du mal à l’imaginer venir à ce genre d’évènement. En a-t-il simplement le temps ? Elle ne sait pas si elle préfère qu’il soit là ou non Eden. Elle a l’appréhension, elle sent ses mains devenir moite rien que de penser qu’elle va devoir retourner dans ce lycée après tant d’années. Soudainement, elle se demande même pourquoi elle a accepté de venir ici ? Avait-elle oublié que c’est ici que tout a commencé ? Peut-être que la douleur s’était un peu trop estompée depuis le temps et qu’elle avait besoin d’une piqure de rappel ? Surement, très certainement que c’est ça. Ses mains viennent s’accrocher au volant, et ses dents gouter à la chair de sa lèvre inférieure. Elle goutte au gout chimique de son rouge à lèvre rosée sans le vouloir, sans s’en rendre réellement compte. Elle ne fait pas attention à ce genre de détail car la seule chose qu’elle se demande est de savoir si il est encore temps de faire demi-tour.

Ça va vite dans la tête d’Eden, elle se dit qu’elle a encore cinq minutes pour changer d’avis. Puis elle est encore dans sa voiture elle a juste à démarrer, tourner la clef dans le contacte et elle peut partir, tout annuler. Elle appellera le numéro sur la convocation de la personne qui s’occupe de l’évènement et simulera une maladie, une grippe ou qu’importe. Elle pose sa main sur la clef, prête à se casser. Puis le coup de folie retombe comme un soufflé laissé trop longtemps dans un four. Ça retombe, mollement. Elle se rend compte qu’elle est bien ridicule d’agir de cette manière à son grand âge. Il est temps de grandir, d’affronter ses peurs. Nul retour en arrière est possible, pas si près du but. Alors, elle redresse son buste en inspirant un grand coup pour se donner du courage. Elle se regarde un instant dans le rétroviseur, elle passe une main dans ses cheveux pour leur donner un peu de volume et regarde si son maquillage est intact. Tout est parfait, même un peu trop. Elle se trouve bizarre sans les petites veines de fatigue qu’elle a habituellement sous les yeux, elle trouve que ses cils paraissent trop long et trop épais avec cette couche de mascara. Elle n’aime pas plus son blond platine qui la caractérise si bien d’habitude. Pour le coup, elle a l’air d’une Barbie, c’est étrange et elle ne trouve pas ça très jolie une Barbie. Elle trouve ça réducteur de ressembler à un stéréotype.

Elle n’est pas sûr d’elle Eden, surtout pas lorsqu’elle enfile une paire de talon et une robe pour se donner un peu de charisme. Elle n’est pas dans la classe et le charisme légendaire comme elle. Eden elle est naturelle, un peu trop même. Elle est adepte des Vans et des Converses, des jeans et des hauts un peu trop larges qui cache sa mince corpulence. Eden elle a toujours l’air d’avoir à peine dépassé la vingtaine alors qu’elle s’approche très sérieusement de la trentaine. Eden elle peut se vanter d’être draguée par des jeunes mais se plaindre d’être trop souvent contrôlée pour l’achat d’alcool et pour sa conduite au volant. Mais là, pour une foi. Elle fait à peu près son âge dans sa robe couleur bleu nuit. Surement plus jeune quand même mais elle s’en approche, elle a l’air vraiment d’une femme qui a des responsabilités, qui mène sa vie comme elle le souhaite et l’a toujours souhaité. Elle espère que comme ça, elle sera prise au sérieux, qu’on l’écoutera et que personne ne la prendra pour une gamine qui ne sait pas de quoi elle parle.

Elle regarde de nouveau le cadrant et elle se rend compte qu’elle doit se bouger, dans dix minutes elle sera face à des jeunes gens et elle leur parlera d’un sujet qui ne les intéressent surement pas, mais c’est comme ça la vie. Au moins, elle aura essayé d’y contribuer. Peut-être ce qu’elle dira parlera à une seule personne sur toute une classe mais elle aura tenté le coup et ça lui va. Elle est motivée, bien que comme toujours d’une minute à l’autre elle aura changé six fois d’état d’âme Eden. Surement que dans cinq minutes elle sera à la limite de se faire pipi dessus car elle sera stressée. Mais là, elle est prête à rentrer dans ce lycée et défendre son métier. Prouver qu’il n’y a pas que les longues études qui peuvent payer. Il faut juste s’en donner les moyens.

Pochette en main, elle entre alors dans le hall du lycée. Corridor vide, seul le bruit de ses talons résonne dans le hall et c’est étrange comme sensation. Ce hall, elle l’a toujours connu remplie, bien trop plein. Le brouhaha était incessant que ce soit entre deux cours ou à la pause du midi tout le monde chahutait le plus possible. Ayant toujours un truc à dire, comme si les heures en classe n’avait pas été suffisante pour raconter son week-end chargé, raconter la dernière soirée à laquelle ils avaient participer et tous autres potin et conneries bien plus intéressante qu’écouter ce que les professeurs pouvaient bien dires. Elle s’avance alors d’un pas incertain, elle regarde à gauche puis à droite cherchant une âme errante comme la sienne dans les parages mais non. Elle est seule, elle se met même à penser qu’on lui a fait un canular, qu’on l’a fait venir ici mais que personne est conviée. Elle pense à tout et n’importe quoi Eden tout à coup, elle essaie de se changer les idées car elle veut oublier la sensation qui lui lacère le cœur, ce fil barbelée autour de son palpitant dès qu’elle voit un élément qui lui rappelle des souvenirs précieux, des souvenirs douloureux du passé.

Elle passe d’abord sans s’arrêter devant les casiers de certains de ses anciens amis, casier qui ne lui font aucun effet elle ne prend même pas la tête de tourner la tête pour ceux-là. Puis ça commence à devenir compliqué d’ignorer ceux de ses frères. Elle jette un coup d’œil et rien n’a bougé, même la porte de celui de Brad est toujours enfoncé. Coup de poing qu’il avait flanqué dedans après une bagarre… Garçon un peu trop sauvage. Pour avoir fait ça, il avait pris 3 jours d’exclusion. Mais elle ne reste pas longtemps devant, elle trace sa route Eden, redoutant l’avancée dans le couloir.

L’inévitable arrive. Elle passe alors devant le sien. Le deux cent quarante-cinq et elle s’arrête car le cocktail de souvenir dans sa tête est bien trop fort, elle ne peut tout bonnement pas faire semblant qu’elle s’en fout, c’est faux. Juste un instant elle regarde le rouge vif de la porte de ce casier et elle voit que la porte du casier a été repeinte, elle voit les petites différences, elle voit que ce n’est même plus le même type de cadenas, qu’il n’y a plus gravé dans le fer E+L …Depuis le temps, elle le savait que ça serait ainsi. Mais ça lui pince tout de même le cœur, comme quoi, il n’était pas fait pour durer ce couple. Le poing de Brad dans la porte du casier 200 ils l’ont gardé mais les deux petits initiaux dans le sien ont été enlevé. Un signe du destin, un signe qu’elle aurait préféré ne pas voir sous son nez. Un signe qui enterre encore leur relation pour de bon.

Elle vient caresser la porte de son casier, juste une seconde puis elle reprend la route, elle n’ose même pas lever les yeux devant celui de Landon. Oh non, elle ne s’autorisera pas à penser à toutes les fois où elle l’a attendu collé à celui-ci, toutes les fois où elle a callé des petits mots dans son casier par surprise. Elle n’ose même pas parler du nombre de foi ou il a claqué cette porte car elle était soûlante Eden, elle faisait souvent des embrouilles pour rien. Alors non, là pour son bien elle baisse les yeux et avance rapidement. Elle applique la technique de l’autruche jusqu’au couloir suivant.

Elle s’approche des bureaux administratifs la poupée, là où elle suppose qu’on pourra la renseigner. Elle marche vite car elle est pressée et que l’heure avance et au loin elle voit quelqu’un sortir des toilettes pour homme. Elle se stoppe pour mieux toiser l’homme face à elle, Landon. Intérieurement elle ricane. Elle ricane car le destin est un bel enfoiré, si le destin était quelqu’un il serait une femme à l’humeur vengeresse. Une femme qui fait tout pour casser les pieds. Peut-être que le destin s’appellerait Eden tant il lui ressemble à faire tout pour l’énerver. Comme si de rien était, Eden reprend sa marche. Elle laisse ses longilignes jambe s’avancer jusqu’à lui. Premier détail qui la marque pendant qu’elle s’avance : Sa chemise blanche, elle n’est pas habituée à ce genre de tenue formel avec le brun. Avant, les seules chemises qu’il portait était des chemises bucherons et il n’avait pas ce corps. Il n’avait pas les muscles gonflés au point d’en frotter à chaque mouvement le tissu de sa chemisette. Puis il y a ce pantalon de costume gris, pantalon qui ne devrait pas exister sur terre tant c’est un enfer de ne pas y laisser trainer ses yeux pour y déceler des formes malsaines. Elle préfère remonter les yeux Eden, elle croit que ça sera mieux de se focaliser sur sa tête, sur ses cheveux bien coiffé en arrière, sur ses yeux d’un bleu qu’elle voit de mieux en mieux au fil des pas qu’ils font l’un vers l’autre.

Comme si tout était calculé, ils se retrouvent en face à face au côté de la vitrine des trophées. « Hey… » Dit-elle d’une petite voix alors qu’Ils se toisent l’un et l’autre sans complexe. Eden, elle oublie qu’une minute avant elle était pressée, elle a complètement oublié qu’elle cherchait un professeur pour lui indiquer où allait faire son intervention. Là, elle n’a plus rien tête, elle est juste dans le présent avec Landon qui est bien charmant et elle sourit lorsqu’il lui dit qu’elle s’est faite jolie, que c’est surement pour draguer les élèves. Elle se mord la lèvre et tourne la tête vers les trophées pour se concentrer. « Non ça va… j’ai assez donné avec les élèves d’ici tu vois … » Lâche la blonde d’un air taquin. Elle avait donné une foi son cœur à un élève de Savannah, ce garçon il était à ses côtés présentement et il n’avait pas réussi à le garder ce cœur qui était tout à lui. « Je me rappelais pas non plus que les intervenants était aussi charmant non plus … » Compliment discrètement retournée. Elle fait dans la finesse Eden pour une foi et dans l’honnêteté surtout car effectivement, à leur époque, les intervenants ne ressemblaient vraiment pas à Landon. Sans quoi, peut-être qu’elle s’en serait souvenue de cette journée.

Ils prennent du temps à regarder les photos des équipes de football Eden et Landon, ils se taisent à l’unissons. Si lui laisse glisser son regard sur chacune de ces photos, la blonde elle ne perd pas de temps et va sur l’année 2010/2011. Equipe alors composé de Brad et surtout de Landon, capitaine de son équipe. Meilleur espoir de la saison dans l’état. Garçon au joue alors creuse, une coupe qui lui va à merveille, il a des airs angélique le garçon. Il a ce sourire aux lèvres pour lequel on accorderait le paradis à ses pieds, il est beau comme personne ne l’a jamais été. Il était l’éclat alors que tout le reste était fade. Et elle sourit Eden, elle se rappelle alors pourquoi elle en était tombée amoureuse, elle se revoit se laisser complètement tomber un peu chaque jour sous son charme car il fait tout pour qu’elle soit à ses pieds. Il était autant adorable que sexy ce jeune qu’elle regarde sur la photo. Et son cœur en rate un battement, elle se sent toute chose juste en fixant la photo. Première photo de Landon plus jeune qu’elle revoit en six ans. Un Landon James qui se tient à ses côtés, beaucoup plus homme, beaucoup plus sexy mais un homme qui lui a surtout brisé le cœur et un homme qui enfonce le couteau avec son monologue assassin.

Elle serre les dents, fort, au point où elle se demande si elle ne va pas s’en péter une tant elles grincent. Il n’a pas le droit de lui dire ça, pas après avoir tué prématurément leur relation. Elle serre le poing et ses ongles vont se planter dans la paume de sa main. C’est lui qu’à décider de choisir l’armée, c’est lui qui ne l’a pas retenue, c’est lui qui sur le toit lui a dit qu’il ne voyait même pas un semblant d’avenir entre eux deux et c’est lui qui ose parler, dire ça devant cette vitrine ? Elle est en colère Eden. Elle aimerait lui cracher toute sa haine au visage et elle ouvre la bouche pour le faire mais à peine chose faite qu’elle entend son prénom résonner derrière elle. Elle se retourne hâtivement pour voir qui la coupe dans son excès de colère et elle tombe sur son ancien professeur. Elle se retrouve pantoise, la colère qui retombe plus bas que terre. Elle se tait. Elle sourit timidement à l’homme qui lui fait face et laisse Landon lui faire la conversation, elle se contente d’être polie. Elle se contente d’être présente car le feu ardent continue de brûler dans ses entrailles, elle pense juste qu’il a de la chance Landon, on le sauve d’une crise de nerf certaine.

Ils rigolent les deux hommes, ils parlent des anciens cheveux de Landon et elle fait semblant de rire. Il semble heureux Monsieur Wells de voir deux de ses anciens élèves. Autant que ça a l’air de faire plaisir à Landon de voir son ancien professeur. Elle se permet de regarder Landon et elle ne sourit pas, elle le regarde mais n’a vraiment pas envie de rire. Elle a envie de lui mettre une claque surtout. Pourquoi il se permet de dire des choses et arrive à sourire la minute d’après et elle, elle reste mal. Elle a l’estomac et la tête en vrac. A tel point qu’elle n’entend pas que ça parle de mariage, de SON présumé mariage. Elle n’entend pas le début de la Landon mais elle sent son bras autour de sa taille, son sourire goguenard en disant qu’elle a mis du temps avant de dire oui. Elle arque un sourcil ne comprenant plus rien face au rire hilare du professeur. Eden passe alors son bras dans le dos large de Landon, elle caresse le bas de son dos avant de le pincer de planter ses ongles dans sa chair tout en souriant à pleine dent devant l’homme qui a pris de l’âge et du poids depuis le temps. « Haha, d’un coté qui voudrait se marier avec un gamin ? Il en a fallu du temps avant que tu deviennes un homme mon chéri ! » Vérité qu’elle cache, critique qu’elle lui lance en pleine gueule sous de fausse bêtise qu’elle invente face au professeur. Elle sourit à pleine dent faussement, et appuie sa tête contre l’épaule du garçon. Elle prend un air niais et écoute le professeur leur dire que par contre, ils vont devoir se presser car on les attend dans une salle à l’autre bout du bahut et qu’en plus, ils sont dans le même groupe. « Gé-ni-al, ne vous en faites pas, contrairement à avant on va vite aller en classe, on trainera pas dans les couloirs ! » à peine le vieillard a-t-il le dos tourné qu’Eden se détache de Landon et le regarde en fronçant des sourcils. « Donc j’suis Madame James ? T’es sûr de ça ? Jusqu’à preuve du contraire on s’est quitté en 2010 je crois ! » Elle le pousse à l’aide de sa petite main vers la direction qu’ils doivent prendre pour rejoindre la classe 102. Leurs pas se font entendre dans les couloirs bien assez large pour leurs deux corps, ils se pressent et Eden marche les bras croisés sur sa poitrine, fixant droit devant elle comme un robot programmé.

Elle avance, vite. Elle n’a même pas envie de l’attendre à Landon. Elle n’a même pas envie d’être avec lui tout court. Elle est trop est vexée Eden, elle est mal à l’aise avec cette blague qu’il vient de faire. Ça ne l’a fait même pas rire elle d’entendre ce genre de chose, car ça aurait pu être vrai, si il avait fait d’autre choix ils pourraient être marié, peut-être qu’aujourd’hui ils auraient réellement un enfant et serait éventuellement présent ici pour montrer à leur petit bébé comment papa et maman se sont rencontrés ici. Mais rien que d’y penser elle grimace. Cette vie est tellement éloignée d’elle et de ce qu’elle est. De ce que lui aussi est. Ils sont trop gamins pour ce genre de connerie. Heureusement qu’ils ne sont plus ensemble finalement.  « Au fait, tu commences à parler toi. C’est même pas négociable. » Seule et unique phrase qu’elle lui adresse avant de continuer sa route jusqu’à cette fiche salle qu’elle ait en plus de ça. Salle de Mathématiques, sa hantise dans la vie.

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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyJeu 29 Juin - 1:49

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Il ne sait pas très bien ce qu’il fait Landon, où il va, s’il s’enfonce ou s’il s’élève. Il ne sait pas pourquoi il fait ça, pourquoi il entre dans un jeu qu’il est le seul à avoir lancé. Pourquoi n’a-t-il pas simplement expliqué au professeur que non, ils étaient loin d’être mariés, que cela faisait même sept ans qu’ils n’avaient plus eu le moindre geste tendre l’un pour l’autre ? Pourquoi s’est-il senti obligé de lui raconter des craques, de prétendre que tout allait bien dans le meilleur des mondes, qu’il lui avait passé la bague au doigt et que, soyons fou, elle avait même un gosse dans le bide ? Il était des fois où il ne se comprenait pas lui-même, c’est pourquoi il n’en voulait pas aux autres lorsqu’ils ne le comprenaient pas. Mais probablement était-ce plus simple de feindre un amour intact, plus simple que de mettre des mots sur une rupture déchirante, sur des années de souffrance, sur l’échec d’un amour jamais égalé. Même si cela impliquait de mentir, même si cela impliquait que leur ancien enseignant apprendrait assurément la vérité un jour ou l’autre, il était plus simple, pour l’heure, de jouer une pièce de théâtre savamment écrite.

Il redoute sa réaction le garçon, il craint qu’elle arrache sa main de sa taille, qu’elle pousse les hauts cris, qu’elle fasse une scène devant cet homme qui les a connus si jeunes et innocents. Il aurait l’air bien con si elle faisait tout cela, si elle expliquait à Mr. Wells que Landon James n’était rien de plus qu’un menteur, un mythomane incapable de faire face à la réalité. Mais ça, il fallait y penser avant. Là, c’est simplement trop tard. Pourtant, à son grand soulagement, sans qu’il sache réellement pourquoi elle lui fait cette fleur, il sent le bras mince de la jeune femme se glisser dans son dos, sa main se poser sur l’étoffe blanche, ses doigts caresser sa peau à travers le coton de la chemise. Et puis il comprend. Il saisit qu’elle n’est pas si bien apprivoisée qu’elle veut bien le laisser croire la tigresse, ça l’inquiétait d’ailleurs, cela ne lui ressemblerait pas de laisser son ex petit ami l’enlacer comme un parfait petit couple. Elle doit être en colère la demoiselle, colère dont il ne comprend pas la cause, pour le coup, mais elle lui fait bien percevoir son agacement en sentant ses doigts fins pincer la peau de son dos, ses ongles s’enfoncer dans ce derme qui n’autorise pas un pet de graisse. Son large sourire, parfaitement feint, se crispe à ce contact désagréable, et il retient une grimace de douleur en rétractant spontanément son dos, réflexe d’éloignement d’une source de souffrance. Allons bon, qu’est-ce qui lui arrive encore ? Elle ne peut quand même pas se venger ainsi pour une simple petite boutade, si ? Elle aurait pu avoir l’égard de l’informer qu’elle avait perdu son sens de l’humour depuis le lycée, c’eût été la moindre des choses.

Sourire qui se fige un peu plus encore à l’entente de ses paroles, palabres cruelles qu’elle lui envoie en plein cœur, comme tout autant de lames acérées. Elle a du toupet Eden, ça lui va bien de le traiter de gamin, alors qu’elle ne vaut guère mieux que lui. Et ce n’est pas la pauvre année de différence qui subsiste entre eux deux qui va excuser cela. Elle est chiante la petite blonde, la voilà de retour avec ses piques incessantes, ses mots juste là pour blesser. Elle ne peut vraiment pas s’en empêcher, hein… Soudain, il n’a plus la moindre envie de la tenir contre lui, pas plus qu’il désire sentir son bras dans son dos. Il aimerait juste pouvoir la repousser, s’en aller loin d’elle avant de laisser le temps à la colère de monter, monter encore pour finalement exploser dans une pluie d’étincelles douloureuses. Mais il ne peut pas. Ils ne sont pas tous seuls, ils sont face à un adulte persuadé qu’ils filent le parfait amour, et il a la flemme de se perdre en explications pour lui expliquer qu’en fait ce sont des bêtises, qu’ils se haïssent plus qu’ils s’aiment et qu’ils se sont vu trois fois à tout casser au cours des sept dernières années. Mais il est trop tard pour ça. Il a laissé passer sa chance de dire la vérité, et il est désormais coincé avec cette diablesse collée à lui, payant le prix fort pour une farce irréfléchie. Appellation « mon chéri » qui le glace tant elle pue la fausseté, tête posée contre son épaule qui fige son corps tout entier. Il doit déployer bien trop d’efforts pour ne pas ruiner leur performance, pour ne rien laisser transparaître. C’est toujours pareil avec lui, il joue au con et ça se retourne contre lui. Mais il n’apprend pas Landon, il ne semble pas comprendre la leçon, que ce soit le dixième ou la centième fois que cela se produit, et il continue d’agir de manière irréfléchie.

Ultime sourire qu’il adresse au vieillard avant qu’il ne tourne les talons, soupir de soulagement qu’il retient lorsque Eden se détache de lui. Il n’aurait jamais cru que sa présence à ses côtés puisse être si oppressante, si désagréable. Et pourtant… Les choses changent, le temps change les gens. Il lève les yeux au ciel en entendant ses reproches, se met nonchalamment en marche et lui répond, sans même lui accorder un regard :

- Faut te détendre Eden, regarde ce pauvre vieux, j’pouvais pas ruiner ses espoirs comme ça, ça fait huit ans qu’il l’attend son prochain épisode d’Amour, gloire et beauté.

Il se déplace rapidement, retrouvant sans difficulté le chemin de la salle cent deux, couloirs dans lesquels il s’est trop souvent repéré, quatre années durant. Si elle marchait devant lui, il ne tarde pas à la dépasser, jouissant de l’avantage d’avoir des grandes jambes, mais surtout de ne pas être juché sur de hauts talons. Talons qu’il entend résonner derrière lui chaque fois qu’ils martèlent le revêtement carrelé, talons qui lui assurent qu’elle se trouve toujours derrière lui, bien qu’il n’en ai rien à faire, elle pourrait tout aussi bien se paumer que ce serait le cadet de ses soucis, c’est du moins ce dont il tente de se persuader, tandis qu’il se garde bien de répondre à ses exigences puériles, qui lui rappellent ces élèves qui négocient au dernier moment pour ne pas être le premier à présenter leur exposé.

Ils atteignent enfin la salle supposée les accueillir, salle qu’il reconnaît comme étant une classe de mathématiques. Fantastique. Lui qui a toujours adoré calculer combien faisaient deux lettres additionnées… Il soupire en s’arrêtant devant la porte, s’accorde quelques secondes pour se poser, la main sur la poignée. Elle ne parviendra pas à l’énerver. Pas cette fois-ci. Il se doit d’être professionnel devant ces jeunes, de transmettre une bonne image des carrières qu’il représente. Ne pas leur donner le sentiment que les militaires, au même titre que les sportifs, sont des types nerveux sans cesse agacés. Il actionne enfin la poignée, ouvre la porte, regarde Eden. Ton peu chaleureux qu’il adopte, ton courtois, au demeurant.

- Après toi.

Il attend qu’elle soit entrée dans la salle de classe pour y mettre les pieds à son tour, dans son sillage, laissant la porte ouverte, sans quoi ils seront morts de chaud d’ici dix minutes – et puis il ne va pas le nier, il n’a pas envie de baigner dans les émanations malodorantes de quelques dizaines d’élèves pubères. Il s’avance dans la pièce, va s’appuyer contre le tableau, croise les bras sur son torse, observe la marée d’adolescents déployée devant eux. Ils doivent bien être trente, peut-être même quarante. Cela risque d’être délicat à gérer. Il ouvre la bouche, voyant qu’Eden ne semble pas décidée à parler, et s’apprête à lancer un « salut les jeunes ». Mais non. Non non non. Il refuse d’être ce genre d’adultes qui appellent les jeunes « les jeunes ». Ça craint trop, ce n’est pas possible.

- Bonjour ! Je m’appelle Landon James, j’ai étudié entre ces murs il y a quelques années, et je suis ici pour vous parler du service dans l’armée, ainsi que de la profession de sportif de haut niveau, dans le domaine du football. J’aborderais également le lien qu’il peut y avoir entre ces deux domaines, car l’armée ne se limite pas à aller défendre son pays dans des contrées étrangères, ça va bien au-delà de ça, ça englobe des tas de professions dont vous n’avez pas idée. Je me doute que vous n’avez aucune envie d’être ici, pour la plupart, aussi je tâcherais de faire vite. Oh, je vais vous laisser mes coordonnées au tableau, au cas où des questions vous viendraient à l’avenir, ou si vous avez simplement besoin de me contacter.

Il surprend quelques murmures dans les rangs lorsqu’il prononce son nom. Il oublie toujours qu’il a une petite notoriété dans cette ville. Pour lui, il joue au foot, et c’est tout. La célébrité qui va avec lui passe au-dessus de la tête, et il oublie toujours qu’il ne peut plus faire n’importe quoi, que des gens peuvent le reconnaître dans la rue. Il adresse un signe de tête à Eden, pour lui indiquer que c’est à son tour de se présenter, et récupère une craie à côté du tableau. Pendant qu’elle parle, il inscrit sur l’ardoise son nom et son adresse mail, s’appliquant tant qu’il peut car il n’a jamais eu une belle écriture. Il se retourne au moment où elle a terminé sa présentation et, faisant de nouveau face à la classe, il va s’appuyer contre le bureau réservé aux enseignants. Il prend enfin le temps de détailler l’assemblée d’élèves, constate qu’il y a globalement autant de filles que de garçons, peut-être un peu plus de filles, ce qui le surprend. Par expérience, il peut dire avoir croisé plus d’individus de sexe masculin que féminin au cours de ses neuf ans de carrière, mais ce serait un joli progrès que cette tendance change. Il s’empare d’un stylo à bille posé sur le bureau, n’aimant pas avoir les mains libres, et commence enfin à parler.

- Dans un premier temps, je vais vous présenter la carrière militaire, car c’est dans celle-ci que j’ai débuté, et que j’aime mieux poser les bases avant de vous présenter les liens que le monde du sport peut avoir avec. Ensuite, E… Mademoiselle Howard vous parlera de la profession de photographe, puis j’en viendrais au football. Oh, et si vous avez des questions, notez-les dans un coin, vous pourrez nous demander tout ce que vous souhaitez à la fin. Alors, commençons par le commencement… Je me suis engagé dans l’armée américaine directement après le lycée, mais ce n’est pas une obligation, vous pouvez le faire à tout âge, quel que soit votre niveau d’étude…

Il se lance alors dans un long monologue au cours duquel il détaille son propre parcours, les prérequis pour s’engager dans l’armée, ses différents champs d’intervention… Tout un étalage d’informations théoriques, auxquelles il tente de mêler des anecdotes personnelles et un peu d’humour, afin de rendre le tout un peu moins soporifique pour ces pauvres élèves en pleine digestion. Il leur raconte à quel point tout ceci peut être enrichissant, à quel point cela fait grandir humainement parlant, il leur parle des belles rencontres que l’on peut faire et de l’ouverture que cela apporte sur le monde, de la prise de conscience sur une réalité parfois bien moins rose que ce que l’on peut croire. Il s’interrompt un instant pour boire quelques gorgées à la bouteille que les organisateurs ont mis à leur disposition et reprend, esquissant un sourire satisfait en voyant qu’aucun élève n’a encore piqué du nez :

- En revanche, faut pas vous méprendre. Faut pas s’engager en se disant que ça va être trop cool, que c’est comme Call of duty, mais en vrai. Parce que c’est pas ça, c’est pas ça du tout. Vous allez tuer des gens, oui. Mais ça n’a rien de cool. Ça n’a rien de cool d’avoir du sang sur les mains, de vivre avec le poids de toutes les vies qu’on a ôtées. Mais on n’a pas le choix, l’ennemi il hésitera pas une seconde à vous tuer, c’est vraiment la loi de la jungle là-bas, tuer ou être tué. Et faut une certaine force mentale, pour ça. Non seulement faut bien avoir les idées en face des trous, ne pas être grisé par l’euphorie de tuer des gens – parce que oui, j’ai croisé des gens qui trouvaient ça euphorique, malheureusement – mais faut également être en mesure de supporter l’idée d’être un assassin, ne pas s’effondrer suite à ça. D’où l’importance de l’examen psychologique lors du recrutement.

Son regard s’est durci ; lui qui s’efforçait, depuis son entrée dans la salle de classe, de donner une image sympathique, avenante, le voilà qui s’enferme de nouveau dans son rôle de militaire froid. Parce que ses souvenirs le rattrapent. Qu’il revoit parfaitement le visage euphorique de ces psychopathes qui se sont engagés uniquement pour pouvoir dégommer un maximum de militaires ennemis. Il revoit ces personnes répugnantes, qui lui filaient la gerbe lorsqu’il se remettait à peine d’avoir abattu une âme, une de plus au compteur de ses crimes. Il revoit toutes les horreurs auxquelles il a assisté durant cinq ans, et il se demande ce qu’il est en train de faire, là. S’il ne devrait pas en tenir éloigné toutes ces jeunes personnes innocentes, plutôt que de tenter de les convaincre que ce métier est chouette, qu’ils devraient y songer sérieusement. L’armée l’avait-elle endoctriné au point qu’il se surprenne lui-même à envoyer ces adolescents encore mineurs comme chair à canon ? Il hésite, décide d’écourter un peu son intervention. Mieux vaut laisser Eden parler de ses photos, c’est plus safe pour ces chérubins. Il tourne la tête vers elle, la regarde, regarde son visage impénétrable, ses yeux inexpressifs. Et il se perd. Il détourne la tête, mais ses pensées sont restées rivées sur elle tandis qu’il se remet à parler, expert qui maîtrise si bien son sujet qu’il passe en mode pilote automatique. Il se remémore sa silhouette, ses jolies jambes, ce corps si bien mis en valeur dans cette robe trop peu habillée pour intervenir dans un lycée. Et puis il se remémore la froideur de ses traits pendant qu’il parle, et il se demande comment les choses se seraient passées s’ils n’avaient pas rompu. Se seraient-ils rendus à cette après-midi d’orientation ? Ensemble ? Vivraient-ils seulement encore à Savannah ? C’est effrayant, mais il ne parvient pas à imaginer ce qu’ils seraient devenus s’ils étaient encore ensemble aujourd’hui. Ils ont tant changé, depuis le lycée… Ça lui fout le vertige, il ne parvient pas à savoir s’ils seraient les mêmes qu’aujourd’hui s’ils ne s’étaient pas séparé. Probablement pas. Ou peut-être bien que si. Il ne le saura jamais.

- Enfin, un dernier truc important, à l’armée, on est responsable les uns des autres. C’est vraiment la première leçon qu’on nous apprend là-bas : ne rien faire d’irresponsable ou d’irréfléchi, car ça risquerait de mettre toute la patrouille en danger. C’est notre taff de veiller les uns sur les autres. Si vous vous engagez, parfois, vous verrez un de vos potes en train de se vider de son sang à deux mètres de vous, mais vous pouvez rien faire pour l’aider, car si vous faites le moindre geste vers lui, vous prenez le risque de vous prendre une balle. Et alors le soignant qui vous accompagne devra s’occuper de deux personnes à la fois plutôt que de rester concentré sur votre pote, vous voyez ce que je veux dire ? C’est pas un métier impossible, j’en suis ressorti vivant, comme vous pouvez le voir, mais c’est pas facile, vraiment. C’est pas aussi beau que ce qu’on voit dans les films.

Il baisse les yeux vers le stylo, grattant du bout de l’ongle le code barre gravé dans le plastique. Il est ailleurs Landon, toujours aussi profondément perdu dans ses pensées, dans ce futur aussi hypothétique qu’incertain qu’il ne parvient à se figurer, aux côtés d’Eden. Les souvenirs affluent, et avec eux leur lot de regret. Que ce serait-il passé s’il avait eu la force de la préférer à l’armée ?

- S’engager implique de nombreux sacrifices, dont on n’a pas idée, à première vue. Ils ne vous apparaissent que sur le long terme. Au début, c’est bien, vous êtes content, vous vous dites que vous allez servir votre patrie et peut-être aider à libérer des villes prises en otage par les forces ennemies. Et au début, c’est comme ça que ça se passe, et tout va très bien. Vous rentrez dès que vous le pouvez, vous revoyez votre famille, vos potes, les gens que vous aimez. Puis à la longue, tout s’étiole. La vie continue sans vous, pour les gens que vous avez laissé derrière vous. Vos potes vivent plein de trucs donc vous avez pas idée, et c’est pas une après-midi passée avec eux tous les deux mois qui vous permet de tout rattraper. Vos proches sont fatigués de jamais vous voir, si vous avez un copain ou une copine, il en a marre de ne jamais vous voir, de sortir avec un fantôme, avec quelqu’un qu’il voit en Skype de temps en temps et dont il reçoit parfois une lettre, alors que toutes ses amies peuvent voir leur mec quand elles veulent. Et c’est normal. Vous ne pouvez pas demander à votre copine de tout accepter sans broncher. Vous pouvez pas vous énerver lorsqu’elle fond en larmes parce qu’elle a trop peur de se réveiller un matin et de recevoir un coup de fil lui annonçant que vous êtes mort. Vous pouvez pas dénier ses sentiments, cracher sur sa souffrance, vous pouvez pas lui demander de tolérer l’impossible.

Il s’interrompt, relève la tête vers les visages de tous ces élèves qui semblent nager dans l’incompréhension. Ses dernières paroles résonnent dans sa tête, encore et encore, jusqu’à ce qu’il prenne conscience de ce qu’il a dit. Jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il a laissé ses pensées prendre le dessus, qu’il en a trop dit. Il est mortifié Landon, mortifié d’avoir tant dit devant tous ces pauvres adolescents qui n’ont rien demandé, mais surtout d’avoir dit tout ça devant Eden. Il n’ose même pas la regarder, il n’a pas envie de se confronter une fois de plus à son regard dégoulinant de haine et de dégout. Avec un peu de chance, elle n’en a rien à faire de qu’il raconte et ne l’aura pas écouté. Enfin, il n’y croit que très moyennement. Il se racle la gorge, reprend :

- En bref, s’engager dans l’armée, c’est accepter de perdre peu à peu le contact avec toutes ses connaissances, excepté sa famille. À vous de voir si vous êtes prêts à faire ce sacrifice. Parfois, ça vaut juste pas le coup de perdre tout ça rien que pour partir combattre à l’autre bout du monde.

Il se tourne enfin vers Eden, la regarde à peine, laissant ses prunelles glisser de son visage vers le mur derrière elle. Elle est de mauvais poil aujourd’hui, elle va probablement lui lancer une remarque acerbe s’il se risque à croiser son regard, alors il l’évite tant qu’il peut. C’est à son tour de parler. Il en a trop dit, le rideau se referme, fin de l’acte un.

- À toi, je t’en prie. J’en ai fini avec l’armée.
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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyJeu 29 Juin - 14:55

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Elle est perturbée Eden, elle se sent tendue soudainement. Qui ne le serait pas face à tant de jeune gens qui chahutent ? Au travers de la porte ils peuvent déjà les entendre et ça l’impressionne. Elle se demande combien de jeune gens peuvent entrer dans la pièce au maximum … Une trentaine ? Elle suppose que ça doit être dans ces eaux-là. Elle se rassure comme elle peut la blonde en se disant que ça ne devrait pas être si dramatique. Beaucoup l’ont fait avant elle et elle ne sera pas seule aujourd’hui. Landon aussi va devoir parler, il le fera en premier elle pourra prendre la température, analyser comment ça va se passer. Elle inspire un coup lorsque son ex ouvre la porte et lui dit de sa voix froide de passer la première. Il la jette dans la fosse au lion, froidement mais elle n’y fait guère attention car actuellement Landon est le dernier de ses soucis. Elle est trop stressée par le raffut qu’elle entend de façon décuplée maintenant que la porte est ouverte. Aller, c’est parti.

Une seconde d’hésitation avant d’entrer dans la pièce de sa démarche timide. Ses talons claquent mais ils ne font même pas attention à son arrivé les gosses ingrats. Ils continuent de parler entre eux. Seul les plus polies font l’effort d’arrêter de parler et se concentre sur sa fine silhouette. Il la regarde, peut-être la juge et se demande qui est-elle. Directement, elle va se cacher, se protéger derrière le bureau des professeurs. Première foi de sa vie qu’elle est du côté des adultes et non de celui des adolescents. Elle qui plus jeune se moquait des professeurs qui à la rentrée était tout stressé, elle comprend mieux leur sentiment, leur réaction. C’est compliqué d’arriver dans une classe de prépubère et d’imposer sa présence, de savoir qu’ils vont devoir t’écouter alors que la seule chose qui les intéressent et de discuter entre eux.

Comme dans les films, à peine Landon entre dans la pièce que tout devient silencieux. L’homme n’a eu qu’à passer une jambe dans la salle que tout le monde arrête de bavarder, que l’attention est directement posée sur lui. Il a une prestance Landon. Il a ce truc qui a toujours fait qu’à peine il arrivait quelque part on le voyait, on l’écoutait. Les garçons le regardent avec des yeux brillants impressionné et les filles le dévisagent comme si il était Hercule, un demi-dieu. Là, instantanément tout le monde la remarque elle aussi. Certains sont étonnés, enfin ils voient la petite représentatrice du métier de la photographie. Mais ils ne la regardent pas bien longtemps, Landon prend la parole avec aisance. Il se présente, et sa voix portante concentre tout le monde sur ce qu’il dit. Il n’a pas l’air stressé, il parle avec calme et a l’air d’avoir discuté devant des jeunes toute sa vie. Elle l’envie Eden, elle le regarde faire, les bras croisés sous sa poitrine et prend note de chaque petite chose qu’elle trouve sympa. Petite recopieuse, elle se nourrit de l’allure de son ex pour essayer d’en faire de même lorsque ça sera son tour.

Bon, trêve de plaisanterie. Elle tourne la tête vers son ex une fois calmée et celui-ci lui donne le signal. Il est temps de se présenter et à en voir les regards braqués sur elle ils attendent tous que ça soit fait aussi bien que Landon. Alors elle prend une petite inspiration et avec son petit sourire timide elle commence. « Et bien bonjour pour commencer ! Je suis Eden Howard, j’ai également étudié ici il y’a une dizaine d’année. Si je suis là aujourd’hui c’est pour vous parler de la possibilité de devenir auto-entrepreneur, de vivre de sa passion et peut-être vous aidez à ouvrir les yeux sur les possibilités qui sont multiples, qu’on ne nous inculque pas à l’école. Car soyons franc … Il n’y a pas qu’en intégrant Harvard ; l’université la plus réputée Géorgie ou autre que vous pouvez réussir votre vie. » Un instant, elle arrête de parler. Elle se laisse distraire par le bruit de craie qui vient glisser sur l’immense ardoise accroché au mur. Elle entend chaque petit cognement du bout du bâtonnet dans ses oreilles, des fois Landon fait glisser un peu trop fort la craie sur le tableau et ça lui fait grincer les dents. Son sorti tout droit des enfers. Elle aimerait lui dire de pencher un peu plus la craie pour éviter de leur arracher un tympan mais elle le préserve de cette critique. Elle a tout de même un peu de bon sens Eden, elle ne se risquera pas à créer une scène devant ces jeunes gens qui n’ont rien demandé. Elle se concentre alors sur les élèves en face d’elle, elle voit les garçons parler entre eux et elle voit les filles rire comme des bécasses en pointant le tableau du doigt ou pour les plus discrètes des yeux. Blonde un peu trop curieuse, elle se tourne pour voir ce qui peut autant susciter le rire des filles pendant qu’elle parle. Et ça ne rate pas, du moins…. Jolie Eden qui se retrouve obliger de se mordre l’intérieur de la joue, de tourner la tête vers les fenêtres à sa droite pour s’empêcher de pouffer de rire. Bordel, que les jeunes filles sont connes quand elles s’y mettent. Bien évidemment que les filles allaient réagir de la sorte face à un bel homme. Bien évidemment qu’à peine aurait-il le dos tourné qu’elles se jetteraient sur la vue imprenable qu’il leur offre. Sauf les aveugles qui ne prendrait pas le temps de regarder un si beau fessier dans un pantalon de costume ? A croire qu’il avait fait exprès de porter un tel pantalon pour susciter de force l’attention sur lui. « Comme Monsieur James, je vais laisser mes coordonnées sur le tableau pour que vous puissiez les prendre si besoin. N’hésitez pas à poser des questions, on est là pour ça et nous aussi à votre âge on ne savait pas grand-chose. Ni sur ce qu’on voulait faire, ni sur toutes les choses qui sont possible de faire lorsqu’on ne souhaite pas spécialement intégrer une faculté. C’est normal donc n’ayez pas honte ! » Elle essaie de les rassurer les nouveaux gosses, la nouvelle génération de Savannah. Elle sait ce que c’est elle d’être dans le flou, de pas savoir ce qu’on veut réellement faire, d’avoir peur que notre passion ne paie pas les factures, lorsque toute votre vie on vous apprends qu’il n’y a qu’en faisant des grandes études que nous devenons de grandes personnes. Elle sait ce que c’est d’avoir des rêves que tout le monde s’amuse à dénigrer, casser à coup de ‘Tu n’y arriveras pas, c’est trop compliqué c’est une chance sur mille de percer dans ce monde’. « En attendant, Landon va vous expliquez tout ce qui concerne l’armée et je parlerai ensuite de ce que je fais moi pour le laisser un peu reprendre son souffle avant d’entamer ce que je suppose vous intéresse le plus … La célébrité, le sport, la star locale hein… » Elle lève les yeux au ciel en riant, les élèves aussi ricanent. Car c’est vrai, c’est tellement plus intéressant de parler d’un métier qui vend du rêve.

Ainsi, pendant que Landon commence à se marteler aux explications théoriques de la formation de militaire. Eden, elle note discrètement sur le tableau de sa belle écriture son prénom, son nom et comme l’a fait le brun son adresse mail. Elle sait bien que si un seul élève ne vient après cette intervention discuter par mail avec elle. Ça relève du miracle, elle sait bien que son intervention à elle est moindre face à celle de Landon. Elle sera celle qui passera aux oubliettes pendant qu’il sera celui auquel ils penseront en se rappelant cette journée qu’ils qualifieront d’inutile comme eux l’avait fait des années avant. La vie est faite ainsi, elle s’en fiche Eden de pas avoir le rôle qui brille. Ça lui convient même d’être oubliée. Tant qu’elle ne fait pas de boulette, qu’elle ne se fait pas remarquer c’est parfait. Les informations notées au tableau, elle se recule d’un pas et regarde leurs écritures juxtaposées. Calligraphie bien différente l’une de l’autre. Howard et James … Elle repense à la boutade faite dans les couloirs, la blague sur le mariage. Dire qu’à un rien, à un choix différent ils auraient peut-être pu être réellement marié actuellement… Elle aurait pu noter sur ce tableau fièrement qu’elle était aussi par alliance une James. Mais non, tout était bien différent. Comme au temps du lycée, ils étaient et resterait bien deux entités différentes. N’ayant même pas le nom et encore moins la relation pour qu’on puisse les rattacher ensemble. Non rien, ils n’étaient strictement plus rien.

Sagement la blonde vient s’asseoir au bord du bureau, elle passe une main sur les pans de sa robe pour qu’il n’y ait pas de faux plis. Elle s’applique pour que celle-ci ne remonte pas trop haut sur ses cuisses et n’en dévoile pas trop sur son corps. Une foi chose faite, elle tourne la tête vers Landon et l’écoute parler attentivement car il est captivant. Il donne envie d’être écouté, il maitrise si bien ce qu’il dit que c’est agréable. Il parle des tests d’adhésion, du comment il s’est pété deux doigts en faisant le parcours obligatoire pendant les recrutements et qu’il n’a pas bronché, il a fermé sa gueule et fait semblant qu’il n’avait rien. Ce n’est qu’en rentrant le soir qu’il avait dû passer par la case urgence pour se faire remettre les doigts en place. Elle s’en rappel, elle rit à l’anecdote car elle y était. Elle l’avait vue se faire gazer de produit pour qu’il ne ressente pas la douleur, il était drogué, complètement dans les nuages et elle avait entendu le bruit des os craqués, des os qu’on remet en place. Il n’était même pas encore engagé qu’elle le voyait déjà souffrir, elle le voyait déjà aller aux urgences et ce n’était que le début, elle avait su ce jour-là que cette histoire d’armée aller la faire souffrir.

Les sujets s’enchainent et si elle connaissait bien les débuts de l’histoire le reste devient vague et au fil des minutes, des réminiscences qu’il conte tout lui est totalement inconnu à elle. Comme les adolescents, elle écoute l’homme parler de ce qu’il a enduré, ce qu’il a vue. Ils ont droit à la version soft alors qu’elle sait certains détails depuis la dispute sur le toit. Elle reste impartiale, elle ne s’autorise aucune grimace. Elle est livide et l’écoute quand même parler avec honneur des valeurs qu’il a représenté pour sa patrie. La salle est silencieuse, tous les yeux sont braqués sur l’homme qui raconte son parcours, son histoire. Elle boit ses paroles Eden, elle l’écoute et en oublie qu’elle était énervée contre lui en arrivant dans la salle. Elle oublie leurs querelles qui reviennent sans cesse sur le tapis et elle enregistre ce qu’il dit, elle en apprend beaucoup sur ce qu’elle a manqué pendant les années qui ont suivies leur rupture.

Une seule et unique foi le brun tourne ses opalescences vers elle. Regards qui s’ancrent l’un dans l’autre, alors qu’elle est complètement suspendue à ses lèvres ; lui a le regard dénué d’émotion. Il est une machine. Il parle, il raconte mais sa pensée est bel et bien ailleurs. Elle se mordille la lèvre, peinée de le voir plongée si loin dans ses pensées. Pense-t-il aux horreurs qu’il a dû endurée pendant des années ? Elle aimerait le lui demander, elle aimerait percer sa pensée et les lui enlever pour qu’il arrête d’avoir ce regard si dur, qu’il arrête de se torturer. Lorsqu’il tourne la tête, elle en fait de même. Elle va perdre ses yeux dans la foule de gosse. Ils ont l’air dépités, angoissé par ce qu’ils entendent et elle ne peut que les comprendre. Tout le monde sait qu’être militaire c’est dur, que ça implique des choses mais jamais on ne va plus loin que ça. Jamais on ne va s’imaginer qu’on peut voir ses amis mourir, qu’on doit tuer des gens innocents parfois. C’est une réalité que Landon met au pied du mur de chacun dans cette pièce. Il y jette une ambiance lourde, une ambiance qui laissera un gout amer aux jeunes gosses se disant prêt à faire la guerre avant l’intervention. Elle le remercie dans sa tête d’être sincère, de ne pas leur vendre du rêve sur ce que lui pensait peut-être plus léger lorsqu’il était lui-même un adolescent. Il n’en fait pas la propagande et c’est rassurant.

Cœur qui devient pesant, prunelles qui vont se poser sur ses propres talons aiguilles. C’est gênant de l’entendre parler des sacrifices qu’il faut faire, des sacrifices qu’on impose aux autres pour suivre ce genre de carrière. Elle en a été la première à en pâtir. Elle et la mère de Landon plus précisément. Elles ne voulaient pas de cette vie pour lui. Elles ne le voyaient pas se débrouiller là-bas. Landon été trop pure, trop jeune pour ce genre de vie qu’il s’était choisi. Elle avait peur Eden, chaque jour elle se réveillait et vivait avec cette boule au creux de son ventre. Elle craignait chaque coup de fil, attendait chaque Skype et conversation avec son petit ami. Elle avait vécu un an comme ça la gamine, un an au rythme fou que lui imposait sa relation avec lui. Sa vie s’était arrêté pendant un an, elle ne vivait que par procuration, que par les petits moments qu’il pouvait lui donner : lorsqu’il rentrait à la maison ; lorsqu’il pouvait lui écrire une lettre ou qu’on lui autorisait un appel téléphonique. Une vie pas adaptée à une jeune fille de tout juste dix-neuf ans. Il le savait, il s’en était rendu compte et il en parlait. Il avouait ouvertement que ce genre de décision pouvait peser dans la balance. Mais les sentiments, la vie de son ex n’avait certainement pas pesé assez dans la sienne pour qu’il décide de vivre autre chose. Il assume que parfois, ça ne vaut pas le coup. Qu’il faut bien y réfléchir mais lui il l’a accepté il assume donc que ça valait la peine de se séparer. Outch, cœur qui se brise, palpitant qui va finir sa chute au creux de l’estomac de la blonde et c’est juste maintenant que vient le moment de parler pour elle.

Elle évite son regard, elle n’a pas envie de le regarder. Elle est peinée Eden, elle a un sourire sur les lèvres mais il est forcé. Il est spécialement figé sur son visage pour être sympathique avec les élèves qui ont un infime espoir pour que l’intervention soit moins lourde ; qu’ils puissent de nouveau se détendre et peut-être retourné à leur activité favorite : discuté. « Alors alors … Par où commencer … Et bien, en fait, moi à votre âge on me rabâchait tout le temps que seul les longues études comptaient. Que si je n’allais pas à la fac jamais j’aurais un bon métier, sauf qu’on vous dit pas qu’en dehors de la fac, il y a une multitude de passerelle, des formations, des stages qui vous font entrer dans le monde du travail autre que le cursus lambda des études supérieurs en amphithéâtre. » Elle sourit, elle replace une longue mèche de ses cheveux derrière son oreille et se redresse sur le bureau, elle s’humecte les lèvres et réfléchit un instant. « Lorsque j’ai eu mon diplôme, j’étais totalement perdu car je venais de finir le lycée et je n’avais pas envie de retourner sur les bancs d’école. Pourtant j’étais pas une élève nulle hein, j’aimais juste simplement pas ça et on est plusieurs dans ce cas-là. » Elle hausse les épaules et regarde les élèves qui l’écoutent avec attention, elle sait que beaucoup se sentent concernés que beaucoup se sentent obligé de viser les plus grandes facs de l’état juste pour faire plaisir à papa et maman. Alors elle leur explique qu’elle a passé toute l’année de ses 19 ans à réfléchir à son avenir puis se renseigner.

Elle ne le dit pas mais elle avait aussi passée son année à pleurer à cause de Landon. Elle avait dû faire face à l’élément le plus difficile dans sa vie. La rupture étant le seul point noir, la seule plaie de son existence. Elle avait été tellement désespérée qu’elle n’avait même pas tentée, essayée de travailler pendant toute l’année ce n’est qu’à ses vingt-ans qu’elle s’était enfin réveillé et qu’elle avait décidé de tout changer. Elle ne pouvait pas se morfondre dans son lit encore des années durant. Elle préfère parler des bonnes choses, du fait qu’elle a suivi en premier une formation ici, à Savannah avec un photographe qui a donné quelques clefs du métier, qui a lui filé quelques missions durant six mois pour l’entrainer à toucher à toutes les sortes de photo qu’elle pourrait faire au court de sa vie et aussi lui montrer ce que c’était d’être réellement photographe. « Il faut se dire que faire par pure loisir quelque chose qu’on aime et en vivre c’est totalement différent. Vous n’aurez pas toujours votre mot à dire. Vous n’aurez pas toujours le choix de photographier ou faire ce qu’il vous plait. Qu’importe la passion. Mais il faut toujours en tirer les meilleurs attraits. Il faut toujours qu’à la fin de la journée vous vous soyez améliorer, que vous ayez rendu peut-être des gens heureux. Il y a toujours un nouveau but à atteindre et c’est ça qui vous stimulera. Si pendant vos formations, vos stages vous vous éclatez pas alors ne forcez pas. Ne vous dégoutez pas de votre passe-temps, il y aura bien un autre truc qui vous bottera plus, il suffit juste de tenter. Trouver sa voie et sa passion c’est pas évident. »

Contrairement à Landon qui n’avait fait que parler face aux élèves, Eden elle se permet de se mouvoir. Elle va au tableau, écrit les noms des formations qu’elle a suivi, les lieux où elle s’était renseignée en leur disant qu’il n’y a pas qu’en photographie que ces gens pourront les aider mais qu’importe la situation ils sont là pour le faire. Elle revient face à eux, puis se rassoit sur le bureau. Elle ne sait pas rester en place la gamine. Elle doit peut-être donner le tournis mais il n’y a que comme ça qu’elle met de l’ordre à ses idées et ce qu’elle doit dire.

Alors, elle entame le sujet le plus intéressant. Elle leur parle de ces multiples voyages en commençant par Chicago son premier lieu de prédilection. « Quand j’ai enfin choisi de vivre de ma passion ce fut difficile les premiers temps surtout dans une ville que je ne connaissais pas. Mais il ne faut pas avoir peur de bouger, de s’éloigner de sa famille. Car peut être qu’ici il n’y a rien qui pourra vous comblez professionnellement mais ailleurs tout est faisable. Peut-être votre place, votre idée vous attends dans un autre état. Et j’ai eu cette chance, je suis arrivé pile au bon moment à Chicago. J’ai eu la chance d’être prise tout d’abord comme agent d’accueil dans une petite galerie d’art et j’ai pu en deux ans prouver ce que je valais jusqu’à en devenir la gérante et c’est là que vous voyez que tous vos efforts servent à quelque chose. » Dans la lancée Eden leur explique ô combien il faut s’acharner, combien tout est à prouver. Contrairement à la fac ou seule réviser des heures durant te donnera la possibilité d’avoir les notes suffisantes là il faut bosser sa méthode ; toujours garder un bon contact avec les gens haut placé et brosser dans le sens du poil certaines personne pour vous donner un peu de travail en plus, vous faire voir dans le milieu. « Une foi qu’on commence à vous connaitre dans le milieu, et que vous avez récolté assez d’argent c’est le moment de se lancer. De montrer vos toiles, vos photographies ou qu’importe dans quoi vous vous lancez c’est le moment pile pour appuyer à fond sur l’accélérateur et pourquoi pas ouvrir votre propre business plutôt que bosser pour quelqu’un d’autre. C’est ce que j’ai fait en quittant Chicago pour Los Angeles, là-bas j’ai ouvert ma propre galerie qui affichait mes photos et celles des autres, je choisissais moi-même qui bossait pour moi et qui je voulais afficher. » Elle s’imagine ennuyante Eden, elle suppose qu’ils en ont rien à foutre de ce qu’elle raconte alors elle ne s’éternise pas trop sur ça car c’est pas le plus important dans tout ça. Elle veut juste leur faire comprendre qu’ils doivent croire en leur rêve, ne pas se fier aux ‘’c’est impossible, peu probable de réussir’’. « Le message important que je voulais vous faire passer c’est qu’importe ce que vous aimez, si vous vous imaginez en vivre, ne vous laissez pas atteindre par les gens qui pensent que seul la fac offre une vie convenable. On gagne très bien sa vie qu’importe ce qu’on fait tant qu’on s’en donne les moyens et c’est beaucoup plus sympa de vivre de quelque chose qu’on aime faire que de finir aigri chaque jour en faisant un truc qu’on déteste ! » Elle se redresse, elle frotte ses mains l’une contre l’autre et dit énergétiquement « Bon, on a beaucoup parlé, si vous voulez prendre une pause vous pouvez ! Dans cinq minutes Landon reprendra avec sa carrière dans le football américain ! » Pause qu’ils méritent amplement tous les deux. Elle attrape alors la bouteille toute neuve et propre sur le bureau et en boit une gorgée regardant certains élèves filer en dehors de la classe, d’autre y rester et juste discuter. Eden elle, elle préfère aller vers la fenêtre, elle préfère regarder l’extérieur, faire le vide dans sa tête.

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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyVen 30 Juin - 0:01

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Dernières paroles prononcées, témoin soigneusement relayé à Eden pour qu’elle prenne la relève. Il est en roue libre Landon, il le sent, il faut qu’il cesse de parler avant de déblatérer plus de conneries encore. Main qu’il passe sur son visage dans un geste las tandis qu’il se décale un peu, en retrait, et va s’appuyer contre l’un des murs de la salle pour laisser Eden être le centre de l’attention. C’est à son tour de parler, après tout. Bras qui reviennent se croiser sur son torse, prunelles qu’il laisse glisser au sol, qui se focalisent sur les petits moutons de poussière parsemant le revêtement. Il ne sait plus où se mettre. Ce ne sont pas les adolescents qui l’embêtent ; il n’en a pas grand-chose à faire, en toute honnêteté. Bien sûr, s’il peut les aider, leur ouvrir de nouvelles portes, leur vendre des carrières auxquelles ils n’auraient pas songé sans lui, c’est tant mieux. Bien évidemment qu’il serait heureux d’apprendre qu’il a écarté de l’armée des jeunes trop fragiles, ou qu’au contraire il a éveillé des vocations. Mais ils ne lui font pas peur, tous autant qu’ils sont. Ce ne sont jamais que quelques dizaines de gamins devant lesquels il doit parler, auxquels il doit présenter ses professions. Guère plus. Et il a vu pire, tellement pire, il s’est trouvé dans des situations où il avait toutes les raisons de se chier dessus ; cette après-midi n’est rien de plus qu’une formalité à ses yeux. Pas de quoi casser trois pattes à un canard. Eden, en revanche, n’est pas sereine. Il le voit bien ; il la connaît trop bien pour ne pas remarquer à quel point les sourires qu’elle adresse à leur petite assemblée sont figés, ou encore la manière dont elle se tord légèrement les doigts, semblant confondre ses propres mains avec une boule antistress. Il aimerait pouvoir la rassurer. La prendre dans ses bras, lui expliquer que ce n’est qu’un mauvais moment à passer, qu’au pire les élèves discuteront entre eux pendant qu’elle parle, qu’au mieux ils l’écouteront avec attention. Mais ce n’est pas son rôle. Il aimerait pouvoir écrire cette information sur un panneau et se le planter dans le crâne à coups de maillet, afin de cesser d’oublier qu’il n’a plus le droit de se comporter ainsi avec elle. Pas lorsqu’il n’a rien fait pour la retenir à ses côtés sept ans plus tôt, pas lorsqu’il lui balance des vacheries la moitié du temps qu’ils se voient, pas lorsque leur humeur à tous les deux est si instable. Il n’a pas à la rassurer, à agir de la sorte avec elle. Pas devant tous ces adolescents. Pas lorsqu’il mettrait sa main à couper qu’elle n’hésiterait pas une seconde à le repousser et à l’envoyer se faire voir s’il s’y risquait.

Eden. C’est bien elle qui le chiffonne, elle plus que la trentaine d’autres jeunes présents dans cette pièce. Elle n’aurait pas dû entendre cela. Autant cela ne le dérange pas de parler de l’armée devant elle, de toute la souffrance engendrée par ces cinq années de service, car finalement, il tait beaucoup de choses pour préserver l’innocence de ces adolescents, pour ne pas les traumatiser alors qu’ils sont simplement venus pour s’informer ; autant il aurait souhaité qu’elle ne l’entende pas se perdre ainsi dans ses pensées, dans ses souvenirs, dans ses regrets. Il aurait souhaité qu’ils ne tombent pas dans le même groupe. Il relève la tête, tourne son visage vers la marée d’étudiants, s’aperçoit que quelques filles le regardent lui, alors que c’est Eden et non pas lui qui parle depuis quelques minutes. Regard appuyé qu’il porte sur la jolie blonde, comme pour inviter les demoiselles à se concentrer sur ce qu’elle a à dire, regard qui reste finalement rivé sur elle. Il l’observe, fixe toute son attention sur ce petit corps maigre à moitié installé sur le bureau, sur cette silhouette qu’il ne voit que d’un quart, pas tout à fait de dos. Yeux qui se perdent dans cette chevelure platine, qui suivent les mèches ondulées retombants approximativement sur son épaule couverte de tissu marine. Prunelles qui détaillent ses épaules, son dos, la manière dont son ossature tend sensiblement certaines parcelles d’étoffe ; regard qui glisse sur ses hanches, sur ses cuisses sur lesquelles le tissu remonte un peu, sur ses jambes qu’il ne distingue que partiellement. Il se laisse distraire trop facilement le jeune homme, il suffit de dévoiler un peu de chair, et on le perd. Mais avec elle, c’est pire que tout. C’est pire que tout car il se souvient avoir posé ses doigts, ses lèvres, sur cette peau. Il se souvient avoir baisé le derme délicat qui est le sien, ce derme particulièrement pâle, nuance exquise qu’il n’a su retrouver chez nulle autre femme.

Il cligne des yeux, se force à reporter son attention sur le visage de la demoiselle totalement étrangère à ce qu’il se passe présentement dans son cerveau. Visage qu’il aperçoit par intermittence, lorsqu’elle tourne un peu la tête d’un côté ou de l’autre de la salle de classe pour mieux s’adresser aux élèves. Il écoute enfin ce qu’elle raconte. Il l’écoute parler de l’année de ses dix-neuf ans, l’année de la brisure, l’année du tout devenu rien, cette année qu’ils ont débuté ensemble et achevé seuls. Année qu’il a passée à se concentrer sur l’armée, à redouter ses permissions, n’ayant pas la moindre envie de rentrer chez lui pour risquer de croiser celle qui était, depuis peu, devenue son ex. Il sait parfaitement comment s’est déroulée cette année pour lui, puisqu’il était le premier concerné ; mais il est curieux d’apprendre ce qu’elle a fait de ces mois, ces mois ayant suivi la rupture. Il l’imagine toute jeunette, il se figure la Eden du passé occupée à réfléchir à son avenir, à aller se renseigner à droite à gauche pour rendre les choses un peu plus concrètes. C’est peu, comme information, et il se doute bien qu’elle doit taire des éléments. C’est un exercice finalement assez personnel que de présenter sa carrière à des jeunes ; on doit parler de soi, de son histoire, du pourquoi du comment on en est arrivé là. Et de la même manière qu’il a laissé sous silence de nombreux éléments de ses années de service, il se doute qu’elle doit taire nombre de détails de cette année passée sans lui. Et c’est parfaitement normal. Elle n’a pas à se livrer à ces pauvres élèves qui n’ont rien demandé comme elle le ferait à son psychologue. À la rigueur, si elle avait des comptes à rendre ou à demander, ce serait à Landon et à personne d’autre. Et certainement pas devant tous ces jeunes gens, inconnus au bataillon, étrangers à leur idylle passée.

Le regard rivé sur elle, il la suit des yeux, suspendu au moindre de ses gestes. C’est agréable de l’écouter parler de son métier, de sa passion avant tout. Elle est douée la gamine, elle transmet à la perfection tout l’amour qu’elle porte à sa profession, au mode de vie qu’elle implique, et elle semble bien plus détendue qu’au début de leur intervention. Constat qui lui arrache un léger rictus, il est plaisant de la voir ainsi épanouie, de voir son manque de confiance en elle s’estomper peu à peu, au gré des mots. Il l’écoute parler de Chicago, détailler plus précisément la manière dont elle a occupé son temps là-bas, dont elle s’est bâti une nouvelle vie. Loin de Savannah, loin de lui, sans lui. Elle a l’air heureuse, épanouie lorsqu’elle parle de sa vie dans l’Illinois, à en juger par le sourire qui étire ses lèvres. Probablement était-elle mieux sans lui, durant ces sept années passées loin l’un de l’autre. Son retour à Savannah, et avec lui le retour de Landon dans sa vie, ne devaient faire que noircir son quotidien, pourrir son existence. Il est un peu perdu, le jeune homme. Partagé entre l’éventualité de laisser Eden tranquille afin de préserver son bonheur apparent, et celle d’écouter ses propres besoins, son besoin de la voir, d’entendre le son de sa voix, de son rire, de la sentir à ses côtés, même si ce n’est que pour quelques secondes tous les jours. Mais il n’est pas bien altruiste Landon ; enfin si, il l’est, mais seulement lorsque ses intérêts personnels ne sont pas menacés. Dès lors que c’est le cas, il se fait bien égoïste, trop égoïste ; et c’est donc sans surprise que la balance penche du côté James. La jeune femme lui est bien trop nécessaire pour qu’il se permette de tirer un trait sur elle sans avoir au moins tenté de se refaire une place dans son monde.

Elle parle encore la jolie blonde, beaucoup, sans doute autant qu’il vient de parler, et il l’écoute sagement, avec une attention qui lui est rare. Mais il est intéressé, réellement, sincèrement, par ce qu’elle a à dire. À raconter. À leur apprendre, aux élèves mais à lui aussi, d’une certaine manière. Il est touché par ses paroles, par l’ardeur qu’elle déploie pour convaincre ces jeunes, les rassurer quant à un avenir trop souvent incertain à cet âge où tout demeure possible. Il espère qu’ils l’écoutent avec autant d’attention qu’il le fait. Car elle le mérite. Elle se donne du mal, cela se voit, et son message est important, ses mots intéressants. Elle mérite que tous les yeux soient braqués sur elle, que toutes les oreilles soient tendues dans sa direction. Et pourtant, à son grand damne, l’image qu’il voit en tournant la tête vers l’assemblée n’est pas celle qu’il aurait souhaitée. Certaines filles discutent entre elles, se tripotant les cheveux d’un air inspiré ; les garçons, eux, sont nombreux à avoir les yeux rivés sur elle, mais pas sur son visage, pas sur son regard azuré, par sur ses lèvres rosées. Non, ce sont plutôt ses jambes galbées qu’ils contemplent, la mince parcelle de peau que dévoile son décolleté ; il voit bien comment ils la regardent, comme ces boules d’hormones qu’ils sont. Et comment pourrait-il les en blâmer, lorsqu’il se trouve lui-même mis à terre par un simple regard lancé dans sa direction ? Pourtant, il a envie de leur balancer un truc à la gueule, une craie, une boulette de papier, peut-être le stylo qu’il manipulait tout à l’heure, n’importe quoi pourvu que ça leur remette un peu les idées en place. Heureusement, nombreux sont également les élèves qui l’écoutent avec attention, qui boivent ses paroles avec le même intérêt qu’il montre lui-même. Heureusement qu’eux sont là pour sauver la mise.

Et puis elle annonce le début d’une brève pause, la fin de son discours. Ce sera tout pour aujourd’hui, il n’apprendra probablement plus grand-chose à son sujet, et dans cinq ridicules minutes, ce sera de nouveau à son tour de parler. Du football. Il ne sait même pas ce qu’il va dire, à vrai dire, mais tant pis. Il va improviser, comme toujours, et avec un peu de chance, cela passera. Les élèves se lèvent dans un brouhaha de chaises raclant le sol, tandis que d’autres, plus rares, décident de rester sagement assis à leurs tables. Type d’élèves qu’il n’avait jamais compris, les mêmes que ceux qui passaient leurs récréations dans les couloirs du lycée plutôt que d’en profiter pour aller prendre l’air. Il s’empare de sa propre bouteille d’eau – voir Eden boire lui a donné soif – et se désaltère en quelques gorgées, avant de jeter un coup d’œil à son smartphone. Il a reçu quelques messages, l’un d’un de ses collègues, l’autre de son petit frère. Cela pourra attendre. Il range le cellulaire dans la poche de son pantalon, promène un regard alentour ; la majeure partie des élèves ont déserté les rangs, et dans un coin se tient Eden, tournée vers la fenêtre. Il prend une petite inspiration et va la rejoindre, se tenant à ses côtés sans la regarder, les mains glissées dans ses poches, lui aussi tourné vers le paysage morose que peut leur offrir la fenêtre d’un lycée. Nouveau pas qu’il fait vers elle, un de plus au compteur, jeune homme bien déterminé à la tirer de la mauvaise humeur qui semble être la sienne aujourd’hui.

- C’était bien, ce que tu leur as dit. Tous ces trucs sur le fait de suivre ses rêves, de pas avoir peur de se lancer dans une voie pas très académique… C’est important d’entendre ce genre de choses, à leur âge. Puis ils ont l’air de bien t’aimer, p’t-être bien que tu ferais une bonne prof… Mademoiselle Howard.

Sourire qui se dessine sur ses lèvres à mesure que s’en écoulent les mots, lueur malicieuse qui illumine son regard lorsqu’il se risque à la nommer comme pourraient l’appeler d’éventuels étudiants. Il se doute bien que la jeune femme n’enseignera probablement jamais, mais il l’embête un peu, même lorsque leurs relations ne sont pas au beau fixe il ne peut pas s’en empêcher. Mais mine de rien, il est sincère. Il ne pourrait être plus honnête lorsqu’il la complimente sur sa performance face à ces élèves, il était fier d’elle en l’entendant s’exprimer ainsi devant eux, sans bien savoir pourquoi.

- En tout cas tu leur as accordé une pause, et rien que pour ça t’as marqué des points, tu le sais aussi bien que moi !

Rictus qui s’étire un peu sur ses lippes lorsqu’il repense à ces interminables après-midi de classe où il n’attendait qu’une chose : entendre retentir la sonnerie libératrice. Il a perdu le compte du nombre de cours durant lesquels il a passé les cinq dernières minutes le regard rivé sur l’horloge, suivant le moindre tressautement de la trotteuse, témoin tangible du temps qui passait, de la fin du calvaire approchant… tout ça pour qu’au final, l’enseignant les retienne cinq minutes de plus, car il avait une liste interminable d’exercices à leur donner pour la prochaine fois, ou qu’il lui restait encore quelques-unes de ses stupides définitions à inscrire au tableau. Il conserve également un souvenir ému de ces heures de cours qui s’enchaînaient sans la moindre minute de pause au milieu ; il savait donc bien quelle avait dû être la joie de ces jolies têtes blondes lorsqu’Eden leur avait annoncé qu’ils avaient droit à quelques minutes pour souffler. Il bouge un peu, s’appuie contre le mur de la fenêtre, désormais tourné vers la jolie blonde. Léger sourire qu’il lui adresse, rictus qui ne quitte pas ses lèvres mais qui n’est pas des plus francs pour autant.

- Tu semblais un peu stressée au début, j’me trompe ? Mais tu t’es bien débrouillée au final, t’avais même l’air à l’aise au bout d’un moment…

Paroles formulées sans la moindre once de moquerie, de supériorité, ou quoi que ce soit du genre. Simple observation, encouragements, peut-être même ? Mais il la connaît, il la connaît trop bien. Il sait que toute parole est susceptible d’être interprétée de travers, avec elle. À partir de là, il prend un risque dès lors qu’il ouvre la bouche. Sentant une présence derrière lui, il se retourne, et se retrouve nez à nez avec un élève, garçon de dix-sept ans à tout casser qui présente bien et, jouissant d’un physique avantageux, semble déborder d’assurance. Adolescent qui lui accorde à peine un regard, qui passe à côté de lui pour se planter devant Eden.

- Eden ? J’peux vous appeler Eden, ça vous pose pas de problème, hein ? Très joli nom, d’ailleurs, en parfait accord avec votre visage d’ange et votre corps descendu tout droit du paradis. Vous nous avez donné votre mail, mais j’aurais besoin de vous contacter plus tard, alors j’voudrais votre numéro.

Petite tirade accompagnée d’un clin d’œil se voulant probablement charmeur, attitude qui amuse Landon. À tel point qu’il doit se mordre l’intérieur de la lèvre inférieure pour ne pas exploser de rire, à tel point qu’un roulement d’yeux lui échappe. Ce gamin doit avoir dix ans de moins qu’elle… Et puis, ce n’est pas comme si Eden faisait aussi jeune que d’habitude, aujourd’hui… Il ne se souvenait pas avoir été aussi entreprenant à son âge, avoir osé sortir des bobards pareils juste pour obtenir le numéro d’une fille. Ça le fait plus rire qu’autre chose toute cette situation ; il a toujours embêté la blonde avec le fait qu’elle faisait plus jeune que son âge, et voilà qu’un lycéen venait la draguer… Il devrait probablement être jaloux de voir son ex petite amie se faire draguer ainsi sous ses yeux, mais il se doute qu’elle va envoyer balader le gamin. Il l’espère en tout cas, sans quoi ce serait carrément bizarre. Une fois le lycéen hors de portée de voix, ayant fini par tourner les talons pour les laisser tranquille, il se tourne de nouveau vers Eden. Sourire aux lèvres qui trahit ô combien il est sur le point d’exploser de rire, haussement de sourcils faussement impressionné, surpris par l’audace du garçon.

- Eh bien, Eden… Faut croire que j’avais vu juste, t’as bien réussi à charmer du petit lycéen…
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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyVen 30 Juin - 13:51

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Les chaises se mettent à grincer en chœur, les voix des jeunes se font entendre derrière elle jusqu’à ne devenir qu’un petit écho lorsque ceux-ci décident de sortir pour se dégourdir les jambes. Ils sont contents les gosses, enfin quelqu’un leur propose de faire une pause. C’est inhabituel. D’habitude, les intervenants les laissent dessécher, s’en foutent complet des états d’âme des élèves. Ils en parlent entre eux de l’aimable bonté de mademoiselle Howard. Certains commencent aussi déjà à commenter les deux parties qu’ils ont pu écouter pendant l’heure qui vient de passer. Ils discutent des deux métiers bien différents et beaucoup sont d’accord pour dire que Monsieur James a bien de la chance d’être en vie avec ce qu’il a raconté et que Mademoiselle Howard est un peu perchée, elle est comme tous les artistes quoi. Elle a l’air d’une hippie qui est un peu trop utopiste. Mais elle a réussi, c’est cool elle donne un peu d’espoir. C’est ce qu’ils disent, sans qu’elle ne le sache. En bref, c’est un brouhaha léger qu’on entend de l’intérieur de la classe. Juste quelques mots qui sortent du lot si on y prête attention. Un bourdonnement si léger qu’on ne peut l’entendre que si nous voulons bien nous concentrer dessus un peu plus de quelques secondes.

Puis il y a les autres, ceux qui ont décidé de rester dans la classe. Elle sait que d’autres élèves sont encore là, elle entend leurs chuchotements pourtant elle ne se retourne pas et ne va pas à leur rencontre. Elle se martèle à fixer cette vue minable que lui offre la fenêtre de la classe. Elle reprend son souffle Eden, elle boit doucement quelques gorgées pour se désaltérer. Elle n’a pas l’habitude de parler autant la poupée. Elle n’est pas habituée à s’exprimer à un public la demoiselle. Elle, son métier c’est de capturer les choses en photo. C’est justement le besoin de n’avoir rien à dire, que le cliché s’exprime de lui-même sans y ajouter une seule description. Elle n’est pas forte pour s’exprimer la petite Howard. Elle ne l’a jamais été, elle a toujours été faible dès qu’il s’agissait de parler, simplement discuter et dire le fond de sa pensée.

Elle en avait besoin de cette pause la belle. Besoin incontestable de reprendre ses esprits. De mettre de l’ordre dans ses pensées car toutes les palabres se chevauchent actuellement dans son cortex. Elle a le cerveau en bouillie Eden. Elle a tout le discours de Landon ainsi que le sien en tête. Sans compter les fragments du passé qui viennent s’y ajouter, ça ne serait pas drôle si le passé arrêter de s’en mêler. Voilà un joli mixe, un beau bordel qui en ferait péter les plombs plus d’un qui se trame là-dedans. Vraiment. Elle a du mal à penser à autre chose qu’aux dernières phrases qu’a prononcé le brun avant de lui laisser la place pour entamer la discussion sur la photographie. Dans le feu de l’action, elle n’avait guère eu le temps d’y penser, elle était bien trop plongée sur le choix de chaque mot qui franchirait ses lèvres devant les élèves. Elle avait une tenue, une rigueur à tenir, un schéma qu’elle s’était fait mentalement pour ne rien oublier dans son monologue. Un langage à utiliser pour paraitre la plus professionnel quelle pouvait l’être. Mais une foi qu’elle avait pris l’habitude, qu’elle s’était mise à l’aise et que le débit de parole était devenu fluide l’effet boomerang avait fait son effet. Elle n’avait eu que lui en tête, que le dernier regard froid qu’il lui avait adressé. Que voulait-il dire, insinuer en disant que parfois ça ne valait pas le coup de quitter les gens qu’on aime pour l’armée … ? Qu’il regrettait peut-être son choix avec le recul, avec les années ? Ou bien que oui, pour certaines personnes il valait mieux y réfléchir deux fois qu’une mais que pour lui, rien n’était regrettable ? Elle s’en mord la lèvre Eden, elle ne sait quoi penser de ces mots dit à la volée. Comme toujours Landon a le chic pour la chambouler.

Elle a les yeux rivés vers les arbres à l’extérieur la gamine, elle serait presque triste de ne pas avoir son appareil photo pour capturer tout ça. Non pas pour la beauté du moment, mais pour en garder un souvenir. Une trace physique qu’elle était venue ici. Qu’elle avait réussi à dépasser ses limites, ses craintes et qu’elle en ressortirait vivante. Elle se sent vidée la poupée. Elle a tellement parlé, tellement vidée son sac qu’elle a l’impression qu’on lui a extrait tout l’air dans ses poumons. Elle ne sent plus cette boule dans son estomac, cette sensation désagréable d’angoisse perpétuelle. Elle est tellement concentrée sur elle-même qu’elle n’entend même pas les pas derrière elle ; Elle ne voit même pas l’ombre, l’individu qui vient se poser à ses côtés. Ce n’est que lorsque cette personne se met à parler qu’elle réussit à capter son attention. Il la sort de ses songes tournés vers lui, quelle ironie. Elle reste les yeux fixés sur l’allée de l’école mais écoute attentivement cette voix agréable. Cette voix un peu ébréchée ; ton masculin qu’elle connait trop bien. Ce timbre qui a muri depuis les années mais auquel elle s’habitue un peu plus à chaque fois qu’elle le voit.

Comme pour la rassurer, il lui dit qu’il a trouvé ça bien ce qu’elle a racontée pendant la dernière demi-heure. Que le message d’espoir, de croire en soi et de se donner les moyens était bien passé. Elle l’espère, vraiment. Elle adorerait pouvoir se dire que le message s’est bien ancrée dans leurs têtes à tous ces gosses. Elle voudrait qu’ils comprennent que les bonnes choses on ne peut y goutter que lorsque on s’est donné à fond ; lorsqu’on a mis tous nos efforts dans une cause. Plus c’est difficile, plus la victoire est alléchante il parait. Elle le sait, elle l’a vécue. O combien de fois a-t-elle pu baisser les bras, se dire qu’il était temps de rentrer à Savannah car ça ne servait à rien. Jamais personne ne la remarquerait, ne lui donnerait sa chance. Bien plus d’une fois elle avait commencé à préparer sa valise pour revenir à la maison et comme un signe du destin, pour la pousser à continuer les bonnes nouvelles, les opportunités s’étaient mêlés pour qu’elle ne finisse par jamais rentrer. « Ça serait cool si eux ils ont saisis le message… J’sais qu’à leur âge moi ça me serait passé par une oreille et ressorti par l’autre… » Gamine qui n’écoutait rien à l’époque, gamine toujours trop perdue dans ses pensées profonde, dans les conneries qu’elle pouvait faire en classe plutôt que de s’intéresser profondément à l’avenir. Eden était tout sauf le genre d’élève que l’on pouvait apprécier pendant une intervention. Elle passait son temps la tête tournée pour discuter avec ses camarades, envoyer discrètement un message à Landon pour lui dire combien elle s’ennuyait actuellement. Elle avait toujours la tête ailleurs, car elle s’en était toujours foutu de l’école. Pour elle c’était une obligation.

Éclat de rire qui s’échappe lorsqu’elle l’entend l’appeler Mademoiselle Howard. Il est doux, presque imperceptible cet éclat de rire mais pourtant elle a ri. Elle fait un effort devant lui. Elle a décidé de mettre de côté tous ses questionnements sur sa personne, sur ce qu’il peut penser du passé et juste se focaliser sur le présent car finalement elle aura beau tordre la question dans tous les sens la réponse ne sera jamais la bonne. Qu’il pense ou non qu’il ait fait une erreur ne changerait rien finalement. « Non merci, ne m’appelle surtout pas Mademoiselle Howard … Je suis certaine que si je devenais prof à mon tour je paierai le prix de ce que moi j’ai pu faire vivre à tous mes anciens professeurs … Je finirai morte jeune. » Elle s’arrête et grimace en s’imaginant dans le monde de l’éducation. Que pourrait-elle apprendre à des jeunes elle ? Elle n’a rien à inculquer cette mauvaise graine. Elle-même en apprend encore chaque jour de la vie. Elle serait médiocre, elle le sait. Elle n’a pas l’âme d’une femme qui peut parler pendant des heures et capter autant de temps l’attention. « Je finirai avec des ulcères au ventre … Professeur victimisé … Toi par contre … T’impose un peu le respect, ça t’irait bien. »  Elle tourne la tête vers lui en haussant des épaules. Elle est sincère Eden, elle le pense. Monsieur James… Ça sonne bien comme nom de professeur. Lui au moins, une foi que l’attention est tourné vers lui il n’a pas à se battre pour continuer à capter leurs regards. Il a bien trop d’aisance pour parler avec les gens, il charme toujours tout le monde et c’est encore plus flagrant maintenant qu’il est un homme, qu’il n’a plus rien d’un gamin de dix-sept ans. Que ce soit sa voix, sa façon de se tenir et même sa façon d’expliquer les choses il est captivant. Il donne l’impression de toujours pouvoir donner les bonnes leçons.

« Toi aussi ce que tu leur as dit c’était bien. Ça fait vraiment réfléchir et j’espère que les plus motivés à partir à la guerre prendront les bonnes décisions. En tout cas, t’as mis tous les bons et mauvais cotés à leur disposition. T’as pas enjolivé la réalité. » Femme qui a du mal à dire des compliments, ça lui piquerait presque la bouche de faire un pas de plus vers cet homme. Surtout un compliment tourné vers cette profession qu’elle maudît de toute son âme. Des années après, elle a toujours cette rancœur, cette rage lorsqu’elle entend les gens parler de la guerre. Il l’a traumatisé Landon avec ça. Au point que même sortir avec un homme, un ancien militaire à Chicago l’avait dégouté. Elle s’était sentie complètement ridicule de sortir plus d’un soir avec cet homme alors qu’elle avait quitté la seule personne qu’elle avait réellement aimé à cause de cette unique et même profession. L’histoire n’avait pas duré plus de un mois. Après ça, elle s’était gentiment volatilisé. Numéro changé, direction l’état ensoleillé et plus jamais elle ne l’avait recontacté. Elle avait filé à l’anglaise sans même lui donner d’explication. Le genre d’histoire qu’elle préférée taire à tout jamais.

Elle tourne nonchalamment son corps en direction de Landon et sourit en coin lorsqu’il lui parle de la pause qu’elle venait d’accordée à la horde de jeune. Elle sourit malicieusement, elle sait qu’elle a marquée des points comme ça. Au moins, elle prenait l’avantage d’être la nana cool, celle qui les laisse respirer. Elle savait très bien ce qu’elle faisait en les laissant filer pour cinq minutes. « Tu insinues que j’ai manigancée mon coup à l’avance … ? » Elle prend un air outré, pose une main à plat contre sa poitrine et ouvre sa bouche en un grand O alors que ses yeux papillonnent d’un air innocent. « T’as totalement raison, c’est exactement ce que j’ai fait. » Elle est trop maligne Eden, bien trop pour laisser une tel occasion lui filer sous le nez. Elle l’avait saisie sans hésiter. « Puis… Même nous on en avait besoin. C’est dur de parler de l’époque du lycée, les aider sans mêler les évènements de la vie privée. Je sais pas pour toi mais parler du passé … C’est pas la chose la plus simple qui m’ait été donner de faire. » Elle l’avoue, elle avoue à demi-mot que s’est compliqué pour elle de parler de tout ça, de parler des années qu’elle considère pour le moment comme les plus difficiles de sa vie. Elle se rappelle encore la tristesse, les pleures qu’elle avait lâchée le jour de sa remise des diplômes. Journée qui se devait d’être joyeuse, remplie de fierté pourtant lui, il n’avait pas pu la voir dans sa tenue de jeune diplômé. Il était coincé quelque part, à l’autre bout de la terre. Elle avait trop souffert Eden, la fin d’adolescence n’avait pas été des plus tendres.

Elle le voit se mouvoir, elle le voit venir se poser en face d’elle. Les bras croisés sur le torse et l’épaule contre le mur où est la fenêtre. Il la coupe dans sa contemplation de la rue mais elle s’en fiche actuellement de l’extérieur. Elle est bien trop concentrée dans leur conversation et le soupçonne déjà de sortir une bêtise. Elle le connait le garçon, elle le connait comme sa poche. Ce petit sourire en coin le trahi avant même qu’il n’ait ouvert la bouche. Et ça ne trompe pas, à peine se met-il à parler qu’elle lève les yeux au ciel la diablesse. Que c’est surprenant …. Rien n’échappe donc à l’œil de Landon James. Il fait comme si il ne savait pas qu’elle était de nature réservé lorsqu’il s’agit de parler à des inconnus. Comme si il ne savait pas que derrière cette légère arrogance, air sarcastique ce cache une fille qui n’a pas confiance en elle. Qui a toujours l’impression d’être en trop. Elle ouvre la bouche pour lui répondre, elle va rétorquer mais elle le voit se retourner, elle voit la petite carrure derrière lui d’un adolescent qui vient pour leur parler. Carrure bien frêle à côté de celle de son ex, épaule pas bien large mais il ne reste tout de même pas mal pour un garçon de son âge. « On peut t’aider ? » Dit-elle en souriant poliment, ne s’attendant certainement pas à la suite des événements.

C’est gênant, elle est gênée Eden d’être draguer par un adolescent. Elle le regarde débiter son lot de disquette à la seconde. Ça ne l’étonne même pas qu’il puisse sortir ce genre de connerie, de comparaison entre son prénom et son physique… Ce n’est pas la première fois qu’on lui fait le coup. C’est la drague facile. Discrètement, elle lance un regard à son ex-petit ami qui se régale de la situation. Elle le voit qu’il est à deux doigts d’exploser de rire, de se foutre de sa gueule. Elle a du mal à se concentrer sur ce que le jeune raconte tant ça lui pique l’estomac de voir Landon à la limite de rire. Lassée de le voir se retenir, de voir sa joue triturée de l’intérieur par ses dents elle tourne les yeux vers l’élève et arque les sourcils en l’entendant lui demander si tranquillement son numéro. Quelle audace. « Merci pour cette pluie de compliment mais ça ne va pas être possible. Je donne mon mail professionnel. Pas mes coordonnées personnel … Tu pourras donc me faire parts de tes questions au sujet de l’intervention sur l’adresse donner au tableau. » Elle pointe gentiment du doigt le tableau à sa droite et regarde le garçon froncé des sourcils. L’air choqué qu’il n’ait pas obtenu ce qu’il souhaitait d’elle. Elle se mord la lèvre gênée et le voit marmonner dans sa barbe de prépubère en allant s’asseoir à une place libre.

Une foi le garçon bien assez loin d’eux, lentement Eden se tourne vers son ex, elle le fixe d’un air blasé, très sérieux. Elle attend, elle attend très sagement, calmement qu’il lâche sa petite remarque. Son petit avis qu’elle ne veut même pas entendre. Et lui bien évidemment, il ne rate pas l’encoche pour se foutre d’elle. Envie de bouder qui monte en elle, elle a juste envie de tirer la gueule dans son coin car il l’avait prédit plus tôt dans les couloirs. « Ha. Ha. Mais c’était évident voyons. Je plais toujours au lycéen mais une fois devenue des hommes ils s’en vont jouer les actions man me laissant sur le côté ! » Pique qu'elle lui lance directement en ironisant la chose. Elle aimerait ajouter un joli petit doigt d’honneur en sa direction mais elle n’oublie pas où elle est actuellement. Elle n’oublie pas qu’elle est dans une classe qui est en train de se remplir de nouveau pour entendre la suite des aventures de monsieur James. « En parlant de réussir à charmer… on pari quoi que comme par ‘’enchantement’’, tout le premier rang va être remplie de filles pour la deuxième partie ? » Elle en est certaine Eden, elle mettrait ses deux mains à couper que toutes les filles vont se jeter sur le premier rang pour entendre Landon parler. Elles vont boire ses paroles, elles vont exploser leurs rétines sur ce corps trop bien taillé. Elle le sait car elle la première l’aurait fait. Elle est tellement sûr d’elle qu’elle est prête à le laisser parier ce qu’il veut et il saute sur l’occasion Landon. Il lui tend la main pour accepter le pari lancé et elle l’attrape pour conclure le deal attendant sagement que les bancs se remplissent.

« Bon je pense qu’il est temps de reprendre hein … » Elle est surtout impatiente de gagner son pari la gamine. De sa jolie démarche, elle s’avance jusqu’à la porte de la salle et les intimes à revenir. Sans se faire prier, les élèves reviennent en chahutant comme à leur habitude. Elle les voit défilés les élèves Eden, elles les regardent avec attention choisir leur siège en se mordillant la lèvre inférieure. Fière de ses pronostiques elle relève la tête vers son ex et hausse les sourcils en rythme. Deux minutes top chrono, c’est le temps qu’il avait fallu pour que les filles se bousculent presque entre elles pour atteindre les meilleures places devant le bureau en bois massif. « Monsieur James, c’est à vous ! » Tout sourire, elle vient s’asseoir de nouveau sur le bureau au côté de son ex. Croisant ses jolies jambes, mettant toute sa crinière platine sur son épaule gauche. Elle est fière, un peu trop même elle tourne la tête vers lui et avec attention elle l’écoute parler du morceau de vie auquel elle n’a guère assistée.

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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptySam 1 Juil - 19:49

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Elle rit. Doucement, sensiblement, presque silencieusement. Mais pourtant il est là cet éclat, elle existe bel et bien cette preuve tangible qu’il est parvenu, d’une manière ou d’une autre, à mettre un peu de baume à ce cœur qui lui semble bien sombre aujourd’hui. Son cristallin qui détend un peu l’atmosphère, redonne un soupçon de légèreté à leur échange, soulage quelque peu la tension présente entre eux. Tension qui vient d’on ne sait où, tension qui s’est fait leur climat d’échange depuis qu’ils se sont retrouvés, tension qui ne les quitte jamais réellement, pas même lorsqu’ils rient, qu’ils jouent ensemble, qu’ils se perdent dans leurs souvenirs, tension qui les enveloppe tel un spectre menaçant. C’est son propre rire qui vient se mêler au sien lorsqu’elle s’imagine professeur victimisée, perspective qui amuse d’autant plus le jeune homme qu’elle n’est pas si farfelue que cela. Si Eden est indéniablement une grande gueule, il est vrai qu’elle semblait bien démunie face aux élèves, à leur entrée dans la salle de classe. Imagination qui s’emballe, voilà que le jeune homme se la figure derrière un bureau, cible des boulettes de papiers et autres moqueries de ses étudiants. Ouais, c’est bel et bien plausible, et c’est là ce qui le fait rire aux éclats. Haussement d’épaules lorsqu’elle lui apprend qu’il impose un tant soit peu de respect ; charisme qu’il a toujours eu, autorité naturelle qui est venue s’y greffer lorsque l’armée l’a endurci. Il a conscience que les gens se retournent sur son passage, qu’il lui a suffi d’ouvrir la bouche pour que la trentaine d’élèves présents en classe se taise. Mais pour lui, c’est normal. Cela fait une bonne dizaine d’années que sa présence a pareil effet sur ses pairs, aussi cela lui serait apparu comme surprenant que personne ne réagisse à son arrivée. Il n’a jamais eu l’habitude d’être transparent ; déjà enfant, il charmait quiconque se trouvait face à lui avec son regard pétillant et ses larges sourires, auxquels il manquait toujours une dent ou deux.

Bras qui se décroisent, mains qui viennent se nicher dans les poches de son pantalon tandis qu’il écoute Eden pointer du doigt les bons éléments de son discours. Les compliments ont toujours eu le don de le mettre mal à l’aise ; il baisse les yeux avec une modestie non feinte, fuit presque son regard. Il ne fait pas les choses pour récolter des louanges – la plupart du temps, en tout cas. Il agit et parle comme il le sent, tout simplement, suivant un instinct qui ne l’a que bien rarement trompé, mais sur des sujets trop importants pour être réduits au rang de bagatelles, malheureusement. De la même manière, il s’est contenté de parler avec le cœur, cet après-midi. N’ayant pas peur d’exprimer son estime pour cette profession qui était la sienne il y a trois ans encore ; n’hésitant pas à la dépeindre avec la macabre réalité lui étant propre pour ne pas entraîner ces jeunes influençables sur une voie regrettable. Il s’humecte les lèvres, relève les yeux vers elle, ne sachant jamais trop comment réagir face aux compliments.

- Bah… J’veux simplement éviter qu’ils fassent la même erreur que moi. J’me suis pas engagé pour les bonnes raisons, et j’étais mal informé. Mon père nous a jamais trop raconté ce qu’il faisait sur le terrain, et j’l’ai moi-même jamais questionné à ce sujet, donc bon… Je suis entré dans l’armée bercé par les images que nous en offre Hollywood, et ce n’est qu’une fois qu’on m’a mis un casque sur la tête et une arme entre les mains que j’ai compris qu’être soldat ne se limitait pas à tuer un vilain méchant une fois de temps en temps et à être accueilli en héros où qu’on aille. C’est… juste tellement plus dur que ça. J’veux pas que ces gamins se laissent embrigader comme je l’ai été, j’veux pas qu’ils y aillent dans l’idée qu’il vont reproduire leur jeu vidéo préféré, et qu’ils se fassent tuer ou qu’ils pètent un câble dès leurs premiers pas sur le terrain.

Léger soupire qu’il lâche, comme pour libérer un peu de pression, un peu de cette atmosphère pesante qu’il parvient à installer dès qu’il ouvre la bouche pour parler de l’armée. Atmosphère pesante qui retrouve bien vite ses nuances de légèreté grâce aux paroles de la jeune femme, grâce à son jeu d’actrice digne d’un spectacle de fin d’année d’une classe de maternelles qui lui arrache un sourire amusé. Atmosphère légère qui retrouve bien vite ses nuances pesantes suite aux nouvelles paroles d’Eden, jolie blonde qui ose mettre des mots sur la difficulté d’un exercice à première vue des plus simples. Car en soi, il n’y a rien de compliqué dans le fait de présenter la profession que l’on a toujours exercée à un groupe d’adolescents, si ce n’est éventuellement le fait de s’adresser à une assemblée, mais ce n’est jamais une chose qui lui avait posé souci, à Landon, donc cela ne comptait pas. Mais au-delà de ça, la tâche s’est avérée bien plus ardue qu’il l’aurait cru. Bien évidemment qu’il se doutait que revenir au lycée, entre ses murs où il avait tant vécu avec elle, serait difficile. Mais parler de son expérience en tant que soldat ? Cela n’aurait dû être qu’un exercice sans importance. Et pourtant, il avait laissé ses souvenirs prendre le dessus. Il avait bien manqué se laisser aller devant ces jeunes. Les choses auraient probablement été plus faciles s’il n’avait pas croisé Eden, juste avant. S’il ne s’était pas retrouvé dans le même groupe d’intervention qu’elle. S’il n’avait pas senti son regard peser sur lui durant tout son monologue. Mais cela le soulage, en quelque sorte, d’apprendre qu’il n’a pas été le seul à être bouleversé par cet exercice. D’apprendre qu’elle aussi, elle se voit complètement chamboulée par le fait de trifouiller un peu trop dans le passé. Main qu’il passe dans ses cheveux, hésitation qui se fait sentir de sa part. Il vacille sur un fil Landon le funambule, incapable de se décider entre être sincère ou pas. Mais après tout, elle a bien fait l’effort de lui confesser une vérité délicate ; il est de bonne guerre qu’il en fasse de même à son égard.

- C’est vrai… Puis c’est pas comme si on se trouvait dans un lieu neutre. J’veux dire, on se retrouve à parler du passé, dans le lycée on a grandi… tous les deux. C’est pas anodin, c’est pas étonnant que ça remue des trucs.

Léger éclat de rire qui franchit ses lèvres, son plus ironique qu’amusé, son qu’il laisse échapper comme pour se redonner une certaine contenance. Comme si cela allait l’aider à mieux assumer ses paroles. Car si les mots qu’il emploie demeurent vagues, peu explicites, ils ne font que dissimuler une dure vérité. Un message sous-jacent à côté duquel la jeune femme ne peut tout simplement pas passer. Elle ne peut pas ne pas comprendre qu’il avoue, entre deux phrases anodines, que c’est délicat pour lui de parler du passé lorsqu’elle-même appartient à ce passé, lorsque ce bâtiment scolaire a été le théâtre de leur passé commun, lorsqu’elle se trouve à ses côtés tandis qu’il doit remuer la vase d’un passé marqué par le sceau d’un amour perdu. Elle ne peut pas ne pas saisir tout ceci, et il regrette à moitié ses paroles sitôt prononcées. Pourquoi fallait-il donc qu’il soit toujours aussi honnête en sa présence ? Il maîtrisait à la perfection l’art de baratiner les filles ; pourquoi cela ne fonctionnait-il pas sur elle ?

Échange interrompu par l’intervention inopportune d’un élève un poil trop téméraire ; conversation entre Eden et lui que Landon suit avec intérêt, dont il ne perd pas une miette. Il se régale, même, doit se retenir tant que possible de ne pas éclater de rire en voyant le visage de la jeune femme se décomposer à mesure que le gamin débite ses phrases d’approche vues et revues. Allons, mon grand, t’as pas mieux que ça en stock ? Il lui ferait presque pitié le garçon, parce qu’il se doute bien que la blonde va l’envoyer balader, réduire en cendres ses beaux rêves un peu trop ambitieux pour un adolescent de sa trempe. Presque pitié, mais finalement non, car il ne faut pas oublier que ce qu’il fait avant tout, c’est draguer son ex petite amie, et il n’a pas de pitié à accorder à ce genre d’individu. Sourire en coin qui se dessine sur ses lèvres ; tel un fauve guettant sa proie, il attend avec délice le moment où Eden va remettre l’élève à sa place, le renvoyer tout droit d’où il vient. Et ça ne rate pas. Refus qu’elle lui oppose mais qui ne satisfait pas Landon. La douceur avec lequel elle congédie la requête du garçon le chiffonne, lui qui s’attendait à quelque chose de plus tonitruant de la part de la grande Eden Howard… Il est déçu le jeune homme, et en même temps pas tant que ça, en même temps il est soulagé de voir qu’elle n’a pas tant changé que ça, qu’elle n’a pas perdu le bon fond qui l’a fait craquer, onze ans plus tôt. Bon fond qu’elle a pourtant bien du mal à faire ressortir face à lui, puisqu’elle n’hésite pas à balayer ses taquineries de paroles faussement ironiques, lâchées sur un faux ton de plaisanterie, lorsqu’ils savent tous deux combien elles sont tristement vraies. Il n’est pas bête Landon, il ne lui faut pas se concentrer particulièrement pour percevoir toute la rancœur, toute l’amertume qu’elle camoufle mal derrière ces mots. Il pourrait lui faire une remarque à ce sujet. L’attaquer, lui indiquer sur un ton supérieur que le ressentiment ne mène à rien, mais cette remarque elle-même ne mènerait à rien. Il est fatigué de souffler sur les braises de sa colère, fatigué de se battre avec elle. C’est toujours plus malin de choisir la voie de l’humour, même si cette voie est également moins aisée.

- Ah, donc maintenant je suis devenu un homme ? Y a du progrès, dans le couloir tout à l’heure tu m’accusais d’être resté un gamin !

Il aime bien la taquiner Landon, la mettre face à ses contradictions. Peut-être bien qu’elle va s’en offusquer, sait-on jamais. Mais cela fera toujours moins de dégâts que de lui reprocher une amertume dont il est la cause. Pari que lui propose Eden, paroles qui font se lever ses yeux vers le ciel. Il a du charme, Landon, il le sait. Il suffit de voir avec quelle facilité il parvient à séduire la plus jolie fille du bar pour le savoir. Mais de là à séduire toute une classe de lycéennes, de gamines même pas majeures ? C’est ridicule. C’est Eden qui fait office de beauté fatale, en cette après-midi d’orientation. C’est elle qui vient de se faire draguer ouvertement par un adolescent, sous les yeux d’un type faisant deux fois sa carrure. Il n’y croit même pas à son affirmation, aussi c’est sans hésitation qu’il lui tend la main, rivant ses yeux d’azur dans les siens, pareillement bleus.

- Pari tenu. Le perdant devra payer un verre au vainqueur, un verre de son choix.

Ça lui paraît équitable, puis elle sait quoi dire pour attirer son attention, elle sait pertinemment que mentionner un gain, instaurer une notion de gagnant et de perdant suffirait à l’attirer comme une guêpe par la bière. Il lâche sa main après la lui avoir serré très officiellement, quitte son mur adoré pour se diriger vers le bureau. Là, il profite qu’Eden s’adresse aux élèves pour reprendre quelques gorgées d’eau à sa bouteille, se doutant qu’il ne tardera pas à avoir la bouche desséchée s’il se relance dans un discours aussi long que le précédent. Du coin de l’œil, il observe les élèves qui se pressent sans grand enthousiasme par la porte de la salle, surveille le premier rang. Il tient à gagner Landon, alors il contrôle ce qu’il se passe, comme on garde l’œil rivé sur l’étalon sur lequel on a misé bien trop de billets verts. Il referme lentement la bouteille, la repose en silence sur le bureau, le regard rivé sur le premier rang. Une jeune fille tire une chaise en plein milieu de la rangée, place VIP pour l’observer sous le nez, une autre se rue sur la chaise voisine. Il grimace discrètement le jeune homme, et ses sourcils se froncent, sa mâchoire se crispe. Il sait déjà qu’il a perdu, et ça le fait chier. Les gamines continuent à se bousculer pour obtenir elles aussi leur place en première loge, il se tourne vers Eden, croise son regard victorieux et son sourire goguenard. Elle l’agace la demoiselle, il a bien envie de lui faire ravaler son attitude fanfaronne, mais il n’en fait rien. Ce n’est ni le moment, ni le lieu pour cela. Il s’en fout bien de devoir lui payer un verre, mais c’est le fait d’avoir perdu qui le met hors de lui. Il n’a jamais supporté cela. Pourtant, il tâche de n’en rien laisser paraître et détourne plutôt les yeux de la diablesse pour se concentrer sur la classe, venant s’appuyer un peu plus confortablement contre le meuble de bois, à quelques centimètres à peine de la jolie blonde.

- Bon. J’espère que vous avez bien profité de cette petite pause, car il est désormais temps pour nous tous de se replonger dans les choses sérieuses. Je vais poursuivre cette intervention en vous parlant du football qui est, comme certains parmi vous le savent peut-être, mon domaine professionnel depuis trois ans. Je vais vous expliquer comment j’ai fait pour entrer dans l’équipe officielle de la ville, et comment, étant encore militaire, j’en suis venu à me tourner vers cette voie.

Murmures qu’il entend se lever dans les rangs lorsqu’il annonce appartenir à l’équipe de football américain de Savannah. Apparemment, tous les élèves ici présents ne connaissaient pas sa maigre notoriété, et cela le rassure. Il ne raffole pas tant que ça de l’idée de devenir une célébrité.

- On va commencer par le commencement. Le football et moi, ça a toujours été une grande histoire d’amour, puisque j’ai commencé à y jouer à dix ans, sans interruption durant les huit années suivantes.

Il raconte alors comment il a débuté le sport dans l’un des clubs pour enfants de la ville, comment il s’est amélioré avec le temps, rapidement à force d’entraînement acharné, pour entrer sans difficultés aucunes dans l’équipe du lycée, lorsque le temps fut venu. Il enjolive un peu son passé Landon, lorsqu’il décrit sa relation à cette discipline comme une merveilleuse histoire d’amour. Ce sont des années de pression paternelle qu’il passe alors sous silence, peu désireux de raconter à ses auditeurs comment son géniteur a passé des années entières à le rabaisser sans raison, lui donnant envie de lui encastrer la tête dans un mur, faisant monter dans ses yeux encore purs des larmes de souffrance, puis de colère. Cela n’apporterait rien à son intervention de leur conter tout ceci. Il n’est pas là pour leur relater ses états d’âme, et il s’est déjà livré plus que de raison face à eux. Alors c’est plus simple de prétendre que tout a toujours été facile, qu’il est tombé amoureux de ce sport et qu’il l’a exercé de son plein gré, histoire officielle qu’il a pris l’habitude de servir aux journaux locaux qui l’interviewent parfois.

- Arrivé au lycée, mon objectif premier, avant même d’obtenir mon diplôme de fin d’études, était d’intégrer l’équipe de foot du lycée. J’attendais le jour des sélections avec une impatience dingue ; et lorsqu’il est enfin arrivé, j’ai tout donné face au coach. Il m’a pris immédiatement, sans doute grâce au niveau que j’avais acquis avec les années de pratique. Alors oui, être dans l’équipe du lycée c’est chouette, ça permet une ascension directe au sommet de l’échelle sociale et de côtoyer les pom-pom-girls, mais au-delà de ça, c’est drôlement enrichissant. Ça permet de maintenir une bonne condition physique, afin d’éviter de claquer d’un infarctus à cinquante ans, mais ça permet aussi d’acquérir des valeurs très importantes, comme l’esprit d’équipe, la tolérance, le respect de l’autre, pour n’en citer que quelques-unes. Et puis cela peut vous ouvrir des portes dans les meilleures universités du pays si c’est dans cette voie que vous voulez bâtir votre avenir, on peut même vous proposer des bourses d’études. Dites-moi, y en a parmi vous qui sont dans l’une des équipes sportives du lycée ?

Pause qu’il marque pour laisser le temps aux quelques élèves concernés de lever fièrement le bras, léger sourire qui effleure ses lèvres.

- Bien, je suis content de voir que les équipes tournent toujours aussi bien… J’espère que le coach Stevenson vous mène la vie un peu moins dure qu’à mon époque. Enfin. J’ai donc joué dans l’équipe durant les quatre années que j’ai passées ici, et à la fin de ma scolarité, j’avais reçu pas mal de propositions de recruteurs. Mais comme vous le savez, je les ai toutes déclinées pour m’engager dans l’armée. J’avais besoin de prendre une pause loin de tout ceci, du foot… de cette ville. Seulement, tout ceci n’a pas tardé à me manquer sitôt envoyé à l’autre bout du monde. Vous savez ce que c’est, il suffit de partir pour qu’on se mette à regretter les trucs dont on se plaignait le plus chez nous… Mais je n’ai jamais cessé de jouer, pas même pendant les cinq années que j’ai passées dans l’armée. Lorsqu’on était au camp, tous ensemble, et qu’on n’avait pas besoin de nous sur le terrain, on tuait le temps comme on pouvait. En disputant des matchs de foot, en partie. Et puis j’ai quitté l’armée. Enfin, non, officiellement, j’appartiens toujours à l’armée américaine, mais j’ai décidé d’arrêter de servir sur le terrain, en tant que soldat. Je suis rentré à Savannah et j’ai contacté mes supérieurs pour savoir ce que je pouvais faire d’autre au sein de l’armée. Je suis sûr que vous croyez que s’engager au service de sa patrie se limite au métier de soldat. Et pourtant, vous seriez surpris par le nombre et la diversité de carrières qu’englobe l’armée. L’une d’entre elles est la profession de sportif de haut niveau. Toute armée à ses propres équipes sportives, dans le domaine de la natation, par exemple, mais aussi du football. Ça tombait à pic, pour moi qui ne souhaitais plus combattre, mais qui ne voulais pas non plus quitter pour de bon cette armée qui est devenue pour moi comme une seconde maison – aussi curieux que cela puisse sembler. Là où l’armée est super, c’est qu’elle est prête à mettre le prix fort pour avoir de bons soldats dans ses équipes sportives, alors c’est elle qui vous offre la formation sportive. C’était parfait pour moi, parce que j’avais refusé toutes les offres qu’on m’avait faites au lycée, et que c’était un peu délicat de postuler dans une fac de sport à vingt-trois ans, sans avoir fait d’études les années précédentes. J’ai eu la chance de ne pas avoir trop perdu pendant mes années à l’armée, et puis vous savez comment c’est, le sport, c’est comme le vélo : à moins de se blesser grièvement, on n’oublie jamais vraiment comment jouer, on remonte en selle et tout nous revient. Du coup j’avais toujours un bon niveau, je pense que ça a bien aidé. J’ai donc passé deux ans à m’entraîner plus dur que jamais, pour obtenir le Saint Graal, la qualification de sportif de haut niveau.

Doux sourire qui effleure ses lèvres lorsqu’il mentionne le « Saint Graal », lorsqu’il repense aux dernières années. À son retour de la guerre, il lui a fallu un peu de temps pour se remettre de ses blessures. Mois qu’il a dû passer alité à l’hôpital, puis à se tourner les pouces chez ses parents. Il a bien cru devenir fou Landon, ça le rendait dingue de rester inactif comme ça lorsqu’il venait de passer cinq ans à courir à droite à gauche, cinq années sur le qui-vive sans une minute de répit. Information qu’il passe sous silence, jugeant peu utile d’effrayer son auditoire en leur apprenant qu’il avait été sérieusement blessé à la guerre. Sourire qui s’étire, qui refuse de quitter ses lèvres à mesure qu’il évoque ses deux uniques années d’études.

- Ces dernières années ont été incroyables. Passer mes journées à m’entraîner aux côtés d’autres personnes passionnées, rencontrer toutes ces personnes formidables… C’était franchement plaisant de voir les progrès se dessiner chaque jour, de réussir à perfectionner mes tirs, à courir toujours plus vite sur le terrain… Puis je dois avouer que ça fait quand même pas de mal de se poser un peu après plusieurs années passées au front. De retrouver un semblant d’équilibre. Un semblant de vie.

Rapide coup d’œil qu’il s’autorise en direction d’Eden, celle qui, pendant tout un temps, a appartenu à son quotidien. À son équilibre. Celle qui a fait partie de sa vie. Celle qu’il aurait aimé trouver à Savannah à son retour de la guerre, celle qui avait pourtant foutu le camp depuis trop longtemps déjà. Petite inspiration, attention qui se focalise de nouveau sur son auditoire.

- Enfin, comme je vous l’ai dit, j’ai été qualifié et ai pu entrer dans l’équipe de foot de l’armée. J’ai eu de la chance, leur quarterback venait de se blesser, et comme c’est un poste que j’avais occupé au lycée et que j’avais un bon niveau, on m’a refilé le poste d’office. C’est la fonction que j’ai occupée jusqu’au jour où j’ai été recruté par l’équipe de la ville. Je savais pas trop si mon statut de joueur dans l’équipe de l’armée m’autorisait à aller voir ailleurs, du côté des équipes officielles du pays par exemple. Mais en fait, c’est totalement possible ! Même dans l’équipe nationale, y a bien un ou deux joueurs qui appartiennent à la base aux équipes de l’armée ! Et qui refuserait une place dans une des équipes officielles du pays ? Aujourd’hui, ça fait environ un an que je joue pour Savannah, et ça se passe très bien. Cela demande beaucoup de travail, je ne vais pas vous mentir. On s’entraîne tous les jours, des entraînements intensifs de plusieurs heures, et puis il faut être prêt à quitter son foyer pour aller disputer des matchs à l’autre bout du pays, ce qui implique de s’absenter quelques jours… Être footballeur professionnel ne se limite pas à courir avec un ballon sous le bras. Mais c’est une super carrière, et c’est un régal de pouvoir vivre de sa passion. Je serais bien mal placé pour oser m’en plaindre.

Il s’arrête un instant pour reprendre quelques goulées à sa bouteille bientôt vide. Il commence à avoir chaud, Landon, après avoir passé plus d’une heure dans cette salle remplie de gamins en ébullition, et ce malgré la porte grande ouverte. Il ouvre le second bouton de sa chemise jusqu’alors fermé, déboutonne ses manches pour les remonter sur ses avant-bras et reprend, très concentré sur sa tâche :

- Je rencontre beaucoup de personnes qui sont surprises d’apprendre que j’ai été dans l’armée avant de porter fièrement un maillot aux couleurs de notre ville. Qui ne comprennent pas le lien qui existe entre sport et armée. Et pourtant, ces deux milieux ont bien plus à voir qu’on pourrait le croire à première vue. Ils demandent les mêmes qualités : une bonne condition physique, de la concentration, de la rigueur, un bon esprit d’équipe.

Il relève la tête vers les élèves, les regarde pour s’assurer de ne pas perdre leur attention.

- À l’armée, on doit faire attention les uns aux autres, s’assurer que ses camarades ne se mettent pas en danger, et qu’on ne les met pas en danger soi-même. Et sur le terrain de foot, c’est pareil. Il faut considérer les intérêts de l’équipe avant ses intérêts personnels. Si vous êtes mal positionné pour tenter de tirer un but et que l’un de vos coéquipiers est mieux placé, faites-lui la passe. Il vaut mieux que l’équipe gagne et que ce soit lui qui récupère les lauriers pour avoir marqué le but décisif, plutôt que de tenter à tout prix de recevoir les honneurs et au final rater le but et faire perdre l’équipe. Et c’est comme ça pour tout. Il y a des tas de correspondances entre ce qu’on attend de vous sur le terrain, que ce soit sur le champ de bataille ou dans un stade. Je vous parlais tout à l’heure des valeurs que l’on gagne à pratiquer un sport. Eh bien, de la même manière, ce sont ces mêmes valeurs que nous offre l’armée.

Il continue à parler pendant un petit moment encore, revient sur le football, donne des conseils aux élèves intéressés par cette discipline, leur prodiguant ses meilleures astuces, ses techniques d’entraînement, leur expliquant comment maximiser les chances de se faire repérer par un recruteur. Petit monologue très technique qui conclut son intervention ; il veut juste aider ces jeunes, leur donner les meilleures chances de réussir. Leur prodiguer les conseils qu’il aurait aimé recevoir, lorsque son père ne faisait au contraire que pointer le moindre petit détail qui n’allait pas. Il prend une inspiration, pose ses mains sur le bureau derrière lui, s’autorise un léger sourire à l’adresse des élèves.

- Eh bien, ce sera tout pour moi ! Nous allons maintenant passer aux questions, si la moindre interrogation vous est venu au cours de l’une de ces interventions, c’est le moment pour vous de l’exprimer ! Et ne vous empêchez pas de lever la main dans l’espoir de sortir un peu plus tôt, hein… Il y a quelques années j’étais assis à votre place, je suis passé par-là moi aussi, je sais ce que c’est, mais un peu de courage, c’est bientôt terminé. Ne piétinez pas cette chance de recevoir les réponses à vos questions.

Sourire qui s’étire vaguement sur ses lèvres, il se détend peu à peu Landon, laisse tomber le masque du militaire glacial et sévère pour se laisser gagner par l’insouciance propre à la jeunesse qui s’étale sous ses yeux. Il tourne la tête vers Eden, lui adresse un petit rictus accompagné d’un haussement de sourcils, l’invitant à interroger le premier élève. Il est temps pour lui de souffler un peu.
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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyLun 3 Juil - 13:46

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Elle est gênée Eden d’avoir mis des mots sur ce qu’elle ressent. C’est embêtant pour elle de dénuder ne serait-ce qu’une infime petite partie d’elle-même face à son ex. Ressent-il comme elle cette gêne d’évoquer le passé ? Est-ce que chaque mot relatant les dix années précédentes lui fait comme elle l’effet d’un poignard en plein cœur ; d’un coup de poing en pleine gueule ? Elle tuerait pour savoir, pour infiltrer ce crâne qui lui face surtout lorsque celui-ci ne parle pas. Elle passe doucement une main sur son propre bras, elle fait mine de s’enlever une poussière qui traine, un truc pour ne pas avoir à relever la tête vers lui qui se fait un peu trop silencieux à son gout. Une fois chose faite, elle se met à regarder ses pieds, ses chaussures noir vernis. La jolie paire d’escarpin qu’elle a choisie de mettre ce soir. Une paire qu’elle met rarement et c’est en les regardant avec insistance qu’elle se rappelle pourquoi elle ne les met pas autant que ça. Ils font mal, un mal de chien. Elle sent son petit doigt de pied à droite qui est engourdie, qui fourmille mais elle ne peut guère se plaindre. C’est une dame, elle devrait avoir l’habitude de ce genre de chose puis elle a d’autre chose à penser la jolie lorsqu’enfin, son ex ose lui dire que lui aussi n’est pas à l’aise avec le fait de parler du passé. Surtout en ces lieux sacrées. Ces murs qui les ont vues rire comme s’engueuler ; s’aimer puis se détester et finalement être collé pour mieux se déchirer avec les années. Le mot remuer qu’il emploi n’est pas assez puissant, bien trop dérisoire pour dire ce qu’il se passe dans l’estomac de la blonde. Elle rit, aussi ironiquement que lui le fait présentement. « T’as raison ouais … C’est carrément le passé qui vient nous mettre une claque j’ai l’impression. Les années ont filé et pourtant tout est resté figé. Que ce soit les photos dans la vitrine, le casier de Brad… » Elle soupire un coup, passe sa langue sur ses lèvres qui commence à sécher et reprend tout doucement.  « Je me rappel de chaque truc de ce lycée, y’a vraiment rien que j’ai pu oublier. Heureusement ou… Malheureusement j’sais pas. » Elle hausse les épaules en souriant tristement. Car c’est triste pour la blonde. C’est malheureux d’être martyrisait par le passé. Que les moments passés ici aient été bien trop beau, trop bon pour qu’elle puisse les oublier. « Le seul truc qui a changé c’est mon casier, à croire que toutes les petites gravures dessus ne plaisait pas à mes successeurs. » Elle le met au courant, elle veut l’informer que les gamineries qu’ils avaient pu graver dans le fer à coup lacéré de clef avait été changé. Plus aucune trace de Landon & Eden sur celui-ci, contrairement à celui de son frère ou même celui e son ex. Infime détail qui pourtant lui laisse comprendre qu’au-delà de la rupture physique et réelle, il y avait les biens matériels qui avait sauté par la même occasion. Même ici, même sur les lieux de leur rencontre leur histoire d’amour avait été rayée et effacée.

Elle préfère s’éloigner que lui donner raison la poupée. Elle préfère s’en fuir loin de lui avec comme dernier élément de conversation un pari pourri plutôt qu’entrer dans la conversation qui précédait celle-ci. Il avait raison le garçon dans ce qu’il essayait d’insinuer.  Mais elle ne préfère pas se pencher plus longtemps sur la question. Elle s’échappe, elle roule des yeux une foi le dos tourné. De sa démarche féminine elle va vers cette porte d’entrée ; elle préfère aller siffler les jeunes dans le couloir que de lui faire face une seconde de plus. Elle n’aurait pas su quoi lui répondre de toute façon. Une heure avant elle le traitait d’enfant ; une heure après elle ose insinuer qu’il l’avait quitté en tant qu’homme sept ans plus tôt. Elle doit paraître folle à dire un truc et juste après son contraire. Mais il la connait. Peut-être même trop. C’est ça le souci, c’est qu’il sait tout d’elle. Du moins, de l’ancienne Eden et il sait que lorsqu’elle est énervée les mots dépassent trop vite sa pensée. Il sait aussi très bien comment éviter les ennuis Landon. Il sait qu’en la taquinant sur le sujet il n’aurait pas à répondre à cette petite pique qu’elle lui lance car il n’était guère le moment de discuter de tout cela.

Les mains caressant la surface lisse et lustrée du bureau, les pieds ne touchant guère le sol – La blonde regarde son voisin assis lui aussi sur le même meuble qui habille la pièce. Cette unique pièce de bois qui sépare, marque une hiérarchie entre les élèves et le corps professionnel. Elle le toise et il ne daigne tourner la tête vers elle le bellâtre. Sait-il qu’elle le fixe car elle est euphorique d’avoir gagné son pari ? Se doute-t-il qu’elle voudrait croiser juste une seconde son regard pour lui montrer ô combien la victoire lui plait alors que le gain n’est pas si attrayant maintenant qu’elle y pense ? Un simple et unique verre. Voilà ce qu’elle a gagnée. Elle s’en fout Eden de se faire payer un verre, elle peut se le payer elle-même si elle le souhaite. Elle est même plutôt angoissée à l’idée que Landon puisse le proposer d’aller en boire un en sa compagnie. C’est bizarre, ça serait trop étrange que d’aller boire un verre avec lui. Le croiser par hasard c’est une chose qu’elle conçoit mais aller se poser d’un commun accord autour d’un verre … ? Elle a peur. Ça l’effraie. Que pourraient-ils se dire ? Auraient-ils de quoi parler et tenir une conversation une heure en étant civilisé ? Bien sûr qu’ils auraient de quoi parler. Ils ont passé sept ans sans se voir. Il y a de quoi parler pour un bout de temps avec ça. De tout et de rien. Mais veulent-ils autant l’un que l’autre savoir la vie de l’autre ? Veut-elle avoir si oui ou non, Landon a avancé de façon heureuse sans elle. Ça elle en est moins certaine. Elle s’en mord l’intérieur de la joue, par inadvertance car elle est bien trop plongée dans ses pensées pour se rendre compte que son regard se fait un peu trop long sur le profil de son ancien amant.

Voix portante qui la sort de ses rêveries, d’une invitation à boire un verre qui n’a même pas été encore décidée. Elle est ridicule Eden, elle se fait des films alors que peut-être il n’y aura jamais d’invitation. Elle est candide la petite elle croit tout ce qu’elle entend. Ce n’était qu’un pari ma petite. Il n’y a pas de contrat, de prescription à suivre. Juste un pari qu’elle a gagné ; une poignée de main et des mots sorti à la volée. Comme si de rien était, elle tourne la tête vers les élèves qui leurs font faces et le premier rang constitué de fille n’a yeux que pour Landon. S’en est agaçant. Elle les regarde chacune tour à tour, de la petite blonde sur la droite à la belle brune pulpeuse au milieu qui bat des cils à chaque mot prononcé par le brun. Elle a réellement dix-sept ans celle-là ? Elle fait déjà plus vieille qu’elle-même. Ça pique de voir que tout le monde peut faire rapidement plus vieux qu’elle, ça devient vexant, fatigant à la longue d’avoir à vie un corps d’adolescente. Elle soupire silencieusement histoire de ne pas déconcentré son ex ainsi que les autres personnes présente dans la pièce. Plutôt que se faire du mal pour une cause perdue, Eden dérive ses prunelles sur le rang d’après. Ah, enfin la normalité. Rang mixte, des filles et des garçons. Certains sont attentifs d’autres moins. Mais rien d’étonnant. Il y a ceux qui n’y connaissent rien en sport et ne veulent pas en apprendre sur la filière et ceux qui apprennent en écoutant Landon, qui s’intéresse et non pas que pour son physique charmeur. Puis il y a le jeune garçon de tout à l’heure, il la fixe elle. C’est gênant. Surtout lorsque celui-ci l’afflige d’un clin d’œil. Alors là. Elle aurait presque envie de se lever pour lui mettre une tape derrière la tête. Elle aimerait tellement lui dire violemment d’aller se faire voir et avec une fille de son âge si possible. Mais ici, elle n’a pas le droit de faire des scandales. Elle fronce les sourcils. Elle est bien trop frustrée par la situation Eden. Ça ne lui ressemble pas de ne rien dire, de laisser les choses faire. Ça la ronge de voir ce petit con continuer son cirque sous ses yeux. Mais il ne mérite pas un cinéma, il ne mérite pas qu’elle s’énerve. Car il est jeune, et con. Très con surtout alors elle se résigne à tourner la tête vers Landon. Il est préférable qu’elle regarde ailleurs, vraiment. Sans quoi elle pourrait réellement devenir méchante.

Avec attention, avec presque un certain fanatisme elle l’écoute parler de son enfance. Lorsque son père l’obliger à pratiquer le football américain alors que l’enfant venait à peine d’acquérir la compétence « marcher/se mettre debout » et assez de bon sens pour comprendre les règles de ce sport qu’il admirait tant. Elle hoche la tête en écoutant ses dires, elle approuve ce qu’il raconte sans même s’en rendre compte. Elle voit des morceaux de l’histoire s’envoler. Les morceaux les plus douloureux, les plus dramatiques de la légende qu’il conte. Bien évidemment qu’il ne parlerait pas de son vieux con de père. Qu’il ne dirait pas à ses jeunes gosses que son géniteur le forçait à faire tout ce sport. Que ce même homme, il l’avait robotisé. Il voulait qu’il soit une machine à but, à point. Il voulait en faire une bête de sport de son p’tit Landon et pas que lui d’ailleurs. Même le petit frère en avait eu pour son grade. Au fond, si Landon était parti à l’armée, c’était à cause de ce vieux con. Landon avait beau le nier, le père James de même mais pour elle, c’était l’unique raison de tout ce remue-ménage.

Vient l’ère du lycée, histoire qu’elle connait peut-être même mieux que sa propre histoire. C’était à cette époque-là qu’elle l’avait rencontré. A peine un an qu’il avait intégré l’équipe qu’il était déjà l’élément prometteur de celle-ci. A peine débarqué dans la cours des grands qu’elle s’était faite remarquer par le futur capitaine de cette même équipe. Elle s’en rappel comme si c’était hier la première fois qu’il l’avait invité à un de ses matchs, premier abord pour établir le contact. Elle avait accepté gentiment sans même lui dire qu’elle devait déjà y aller car de toute manière son grand frère était aussi dans cette même équipe et quelle assisterait à l’une des rares fois où Brad sortirait du banc de touche. Contrairement à Landon, Brad lui était nul à chier dans la discipline. Il faisait ça par plaisir, pour sortir avec les pom-pom girls et avoir un peu de reconnaissance dans le bahut. Rien à voir avec Landon qui brillait, qui excellait dans l’art de tenir un ballon ovale entre ses mains et de courir le plus rapidement possible d’un bout à l’autre du terrain. C’était inné chez lui, elle n’avait eu yeux que pour lui en allant voir innocemment à ce match de football américain.

Petite douleur qui lui vient au creux du ventre, boule qui vient se former avec nostalgie au creux de cet estomac qui n’en fini jamais de se retourner, de se nouer. Elle cramponne ses doigts contre les bords du bureau. Son cœur rate un battement lorsqu’elle se le revoit entrain de lui adresser un clin d’œil après avoir marqué. Premier but de la soirée, à peine après une dizaine de minute jouer. Elle le revoit, elle pensait l’avoir imaginé cet acte charmeur, elle pensait qu’il ne lui était tout simplement pas adressé. Bien qu’elle fût au premier ou deuxième rang du stade elle n’avait pas une seule seconde imaginait avoir tapé dans l’œil de ce garçon. Il était trop … Trop au-dessus de tout. Il était l’élite alors qu’elle était qu’une gamine à peine arrivé. C’était insensé. Avec son sourire parfait, son regard d’un bleu semblable aux mers des caraïbes …. Il aurait pu l’adresser à n’importe quelle fille présente son clin d’œil, son sourire en coin hyper fier de lui. Mais c’était pour elle, après des jours, des semaines et des mois à trainer ensemble il l’avait avoué.

Courant électrique, frisson incontrôlable qui survient sur son derme. Elle relève doucement la tête en souriant, elle est nostalgique la petite. Elle est encore plongée des années auparavant. Elle le coupe dans son explication, juste une seconde. « Il était déjà vraiment bon Landon à cette époque-là, il donnait une rigueur de bon niveau à maintenir à l’équipe. Un tantinet trop sûr de lui mais bon … A cette époque-là, dans l’équipe il n’y avait pas grand monde, il avait de quoi récolter les lauriers on va dire … » Elle ricane elle-même, elle fait rire la salle aussi. Les chuchotements commencent à filer bon train. Bien évidemment, sans s’en rendre compte elle vient de filer matière à faire la blonde. Elle donne du pain au pigeon, elle donne quoi parler et s’interroger à leur sujet. Bah oui, tout d’un coup on se demande si Mademoiselle Howard trainait avec Monsieur James, car en plus personne n’aurait douté mais ça veut dire qu’ils étaient dans la même promotion ? Puis pourquoi elle le regarde comme ça ? Pourquoi il sourit comme ça ? Tant de questions qui se murmurent, tant de réponses qu’ils souhaitent déjà avoir pour calmer leur curiosité mal placée de gosse … Heureusement, Landon reprend. Il les coupe de sa voix un peu stricte pour reprendre le fil de la conversation et leur expliquer ce qu’on apprend d’intéressant pendant quatre ans dans une équipe, lorsqu’on s’y met à fond et pour les faire interagir à ses gosses soudainement agités ; ils leurs demandent qui fait partie de l’équipe actuel. Quelques mains se lèvent. Dont celle du dragueur en chef, le petit con de service qui arbore toujours cet air goguenard, un peu trop fier de lui alors qu’il n’a rien accompli dans la vie. Il est pathétique. Il met la haine, il rend Eden folle alors qu’il n’a que dix-sept ans, qu’il fait juste le con pour faire l’intéressant. Elle ne le regarde pas plus de cinq secondes avant de regarder les autres en souriant.

Conversations qui continuent. Thèmes abordés dont Eden n’avait aucune idée jusqu’à présent, elle ne sait strictement rien la blonde sur les sports de haut niveau et encore moins sur ceux proposé par l’armée. C’est vrai que maintenant qu’il en parle Landon elle se rend compte qu’elle n’a vraiment aucune idée du comment il s’est retrouvé à jouer en équipe nationale. Elle, elle l’avait quitté en tant que soldat et lorsqu’elle revient le voilà de retour dans le sport sur lequel il avait tant craché durant sa dernière année d’étude ? Elle n’a pas tellement le temps de se poser ce genre de question qu’à peine le fait elle qu’il y répond à la seconde dans son récit. Elle en apprend beaucoup Eden comme ça, bien plus qu’elle ne l’aurait cru. Bien plus encore que sur le domaine de la guerre. Domaine auquel elle ne voulait de toute façon pas tout comprendre, enfin… Jusqu’à présent. Car elle a un tout autre point de vue sur l’armée maintenant. Elle serait presque redevable de voir qu’il a pu choisir un autre train de vie avec le temps, qu’ils aient pu lui offrir une carrière certainement plus intéressante pour un garçon comme lui. Un homme bourré de talent. Une aubaine d’être encore vivant et de pouvoir ressaisir une tel opportunité dans une vie. Une carrière à laquelle il avait refusé plus jeune, c’était sa seconde chance il avait bien eu raison de la saisir.

Poste de quarterback qui était tombé comme un cheveu sur la soupe, elle l’imagine bien Landon se donnait à fond pour appâter deux fois plus encore les entraîneurs, les coachs sportifs et même ses camarades d’équipe. Toute façon, il n’y a même pas à imaginer car c’est une évidence. Pour en arriver là où il en est c’est qu’il a donné tout ce qu’il avait. Il n’y qu’à voir ses muscles qui se bande à peine bouge-t-il un peu dans sa chemise et dans son pantalon bien trop cintrée. A ses dires, il en avait fallu deux, deux années consacrées au sport et entraînements pour en arriver à ce qu’il appeler le saint graal. C’est beau, c’est gratifiant. Il a de quoi se vanter, il le mérite d’un côté, il ne faut pas se mentir. Il n’a pas chômé et ça se voit, ça s’entends qu’il donne tout ce qu’il a dans le ventre le gars. C’est pas tombé du ciel cette récompense, ce sacrement qu’est de porter le maillot de son équipe de cœur à la télévision.

Silence qui retombe. Les jeunes sont ébahis par ce parcours vers la gloire. Ils en parlent un peu entre eux, surtout les garçons. Ils ont de l’admiration pour lui et ça se voit. Pendant ce temps-là, le garçon prodigieux de Savannah boit un peu d’eau pour se réhydrater et Eden en profite pour se lever. Laissant glisser ses jambes jusqu’au sol dur et ferme. Elle a les jambes engourdies la poupée à être resté les membres croisés aussi longtemps. Elle époussette sa robe d’un bleu de colbat et fait discrètement une moitié de tour dans la salle histoire de se dégourdir. Elle passe d’un rang à l’autre, elle regarde discrètement si les jeunes ont noté des questions. Y’en a pas mal, elle ne s’attendait pas à un investissement de leur part. Elle sourit, elle s’autorise même à regarder son ex en face d’elle. Fatale erreur, prunelles qui tombent sur le garçon en train de détacher un bouton de sa chemise, bouton qu’il faut sauter dévoilant un infime pan de peau dorée, puis il s’attaque aux boutons de ses manches dévoilant ses avant-bras musclés, des veines apparentes et elle entend les couinements du premier rang, l’excitation et l’œstrogène bondir d’un cran au level supérieur. Elle a du mal à se concentrer tout à coup Eden, elle entend plus tellement le discours de l’homme. Finalement, elle n’est guère plus forte que les filles du premier rang, elle est diminuée au même grade. Du coté des élèves, elle comprend l’admiration que les jeunes filles peuvent avoir pour lui. Il est sexy, y’a rien à redire. De force, par obligation elle arrête de le contempler, elle se force à quitter son corps des yeux et tourne la tête vers des gamins à sa gauche lorsqu’un stylo fini sa course à ses pieds. Des regards suppliants qu’ils lui lancent, un espoir qu’elle le récupère elle plutôt que d’obliger un des deux à se lever. Elle sourit et gentiment se baisse, s’accroupit pour ramasser le feutre. Elle leur tend l’objet et ils la remercient à mi-voix pour reprendre comme si de rien était leurs conversations. Elles les écoutent lâcher des remarques pas très sympathique sur la carrure de son ex, dire qu’il prend surement des produits dopant. Qu’il n’est pas si bien tanqué que ça hein... Elle lève les yeux au ciel et se penche entre les deux garçons en train de casser en deux l’apparence de son ex et leur chuchote. « Vous pouvez toujours lui demander quel entrainement il suit, si il prend des produits pour s’aider hein … Mais ça m’étonnerait. » Elle n’y croit pas elle. Il a toujours été de nature à prendre du muscle rapidement et aisément. Il prenait des protéines comme tout sportif qui se respecte mais rien qui fasse gonfler les muscles par enchantement … Du moins … Avant. Elle espère qu’il soit toujours aussi peu attiré par ce genre de méthode risqué à présent. Et à son grand étonnement les garçons lui posent des questions sur son entrainement, les produits qu’il prend d’une voix douce et dénué de méchanceté. Bande d’hypocrite …

Cliquetis des hauts talons de la blonde qui résonne dans la pièce lorsque Eden vient de nouveau se poser au coté de Landon. Fine et frêle épaule qui vient presque frôler, toucher celle de l’homme à sa gauche. Carrure si différente l’une de l’autre, créant encore plus le contraste de différence entre leurs deux corps. Elle tourne alors la tête vers lui et le regarde mettre fin à sa deuxième intervention. Maintenant, il laisse suggérer qu’il est temps de passer aux questions et il n’a pas tort. Un simple coup d’œil sur la montre accroché au mur derrière eux et elle se rend compte qu’une heure et demi à filé en un rien de temps.

Comme toujours, la première question est posée par l’unique élève qui fut intéressé du début jusqu’à la fin. Le cas typique de l’élève parfait. Il a des bonnes notes, s’exprime d’un langage presque soutenu et demande toujours des trucs qui font soupirer le reste de la classe. Première question qui lui est adressé à elle, attentive elle l’écoute lui demander « Est-ce que photographe ça paie bien ? C’est constant comme revenue ? C’est pas casse-gueule comme métier de nos temps ? » Elle réfléchit Eden, elle veut être le maximum la plus transparente possible. Ce n’est pas du rêve qu’elle veut vendre, ni même dire que son métier est le meilleur et qu’il paie des masses car ça serait faux que de leur mettre ça en tête. « Ça dépend vraiment de ce que tu vises et cherche à faire dans la photographie. Si tu comptes juste être exposé dans une galerie déjà c’est long pour en arriver là et en plus, ça ne paie pas des masses… Enfin, tu peux certes gagner des grosses sommes mais c’est aléatoire. Pas tout le monde va mettre 1000 dollars sur ta composition de photos. Des fois tu peux ne rien vendre pendant des mois et des années puis un jour une personne t’achètera le tout pour une énorme somme. C’est au petit bonheur la chance ça. Par contre, être photographe pour un magazine, couvrir des événements c’est un revenu constant. On te paie pour ce que tu fais comme dans n’importe quel boulot en gros. Puis il y a aussi la possibilité de travailler à son compte. Là ça dépend que de toi, de ta motivation. Si tu travail en heures conséquentes, tu seras payée en conséquence aussi. Ça ne dépend que de toi à ce niveau-là. » Réponse complète, jeune garçon qui note tout ce que la blonde lui dit, on entend le bruit du crayon grincer sur la feuille alors qu’une deuxième main se lève timidement. Une gentille fille au dernier rang. « À notre âge vous vous doutiez que vous en seriez là ? Que vous auriez ces carrières ? Vous êtes contents de vous ? » Elle tourne la tête vers Landon et celui-ci a l’air dans ses songes, réfléchissant déjà à la réponse. Elle se mord la lèvre Eden, ça pique comme question. Ça laisse un gout amer dans sa tête. Elle aimerait pouvoir sauter cette question, elle aimerait dire que oui, elle est très fière, qu’elle s’attendait à ça comme vie mais c’est faux. Elle ne savait pas qu’elle ferait de la photographie à temps pleins, elle ne savait pas qu’elle serait célibataire endurcie car son ex de l’époque lui a fait tellement de mal qu’elle ne peut s’autoriser à subir de nouveau un tel supplice. Elle n’est pas contente, pas fier elle a l’impression qu’elle n’a pas évolué depuis le temps mais elle sourit à la jeune fille et lui répond en haussant les épaules. « Je me doutais que je travaillerai dans la photographie mais si longtemps ? Touchant à beaucoup de domaine différent en passant de la galerie d’art par bosser pour le petit journal de Savannah ? Non. Mais c’est cool, je suis contente. Mais ne prévoyez pas trop loin dans l’avenir. A votre âge on croit et pense beaucoup de chose. Vivez au jour le jour, ça fait moins mal que de voir trop grand. Car les décisions, les chemins qu’on prend ils tiennent à un rien. » Elle avait trop prévu une belle vie avec Landon à leur âge, elle s’imaginait quitter Savannah à ses côtés et vivre d’amour et d’eau fraîche. Désillusion qui avait fait mal, qui l’avait dévasté la gamine et elle ne leur souhaitait pas ça à ses gosses, cette nouvelle génération qui promettait en rebondissement. Elle se tourne alors vers Landon, elle l’écoute donner sa propre réponse à la question. Elle l’écoute déverser sa vision des choses.

Réponse donnée à la demoiselle. Celle-ci hoche de la tête satisfaite des réponses et d’autres mains se lèvent. Comme toujours, à peine les autres se sont lancés que tout le monde s’y met. Question venant du premier rang, Eden interroge la demoiselle. « Vous étiez dans la même classe ? » Yeux qui clignent plusieurs fois d’affilés, sourcils qui se haussent en chœur. Question à laquelle elle ne s’attendait pas elle tourne la tête vers Landon et elle se met à rire. « Non, il a un an de plus que moi on n’était pas dans la même classe du coup. » Heureusement, bien heureusement pour tout le monde qu’il ne l’était pas. Ils auraient été agaçant les deux anciens gosses de Savannah ensemble en classe. Ils auraient énervé les professeurs et les élèves. Ils auraient été collés, inséparable et n’aurez jamais rien écouté. Oh non, ils n’auraient même pas eu leur diplôme si ça avait été le cas. « Mais vous étiez quand même ami ? Vous avez l’air de bien vous connaitre ! » Question qui fuse de nulle part. Qui laisse Eden pantoise, elle ouvre la bouche mais rien ne sort. Pourquoi faut que ça tourne comme ça ? Pourquoi les questions ne restent pas dans le cadre professionnel … ? Elle panique, elle tourne la tête vers Landon pour qu’il réponde à sa place.


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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyMar 4 Juil - 14:37

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Il parle, il parle Landon, encore et encore, comme une machine inarrêtable. Une machine bien rodée, bien huilée, alors même qu’il n’a en rien préparé son intervention. Pas plus qu’il n’a préparé celle sur l’armée. Il n’a pas passé plusieurs heures, la veille, à réfléchir à quoi dire, à comment le dire, à s’entraîner seul face au miroir de sa salle de bain, pour la simple et bonne raison qu’il pensait que la moitié des élèves ne l’écouteraient pas, aimeraient mieux bâiller aux corneilles que de se concentrer sur ce qu’un adulte avait à leur apprendre, comme il le faisait lui-même au lycée. Il ne pensait pas recevoir autant d’attention de leur part. Mais il fait bonne figure, il connaît si bien les deux carrières qu’il a exercées au cours de sa vie, il s’est si bien investi dedans qu’il serait capable d’en parler des heures durant. Il parle beaucoup, trop, peut-être, mais n’en demeure pas moins attentif à ce qui se passe sous ses yeux. Tel un fauve tapi dans les hautes herbes de la savane, il observe son auditoire, les réactions de chacun, de chacune. Et c’est plus fort que lui, il ne peut s’empêcher de se focaliser un peu plus sur un élève que sur tous les autres. Ce petit brun du premier rang, celui qui est venu les interrompre, Eden et lui, pendant la pause. L’archétype du petit con, vraiment stupide en plus, car il ne semble pas avoir saisi que la jeune femme l’a envoyé balader quelques minutes plus tôt. Elle a beau lui avoir fait comprendre qu’elle n’était pas intéressée, qu’il ne pourrait pas se vanter auprès de ses potes de s’être tapé la jolie intervenante, il s’accroche l’imbécile, avec force clins d’œil et sourires se voulant probablement charmeurs, mais qui ne font que lui donner un air plus idiot encore selon Landon. Il ne rate pas une miette de sa petite performance, et doit prendre sur lui pour garder un ton égal, posé, ne rien laisser paraître de la colère qui monte en lui, lentement mais sûrement. Un rapide coup d’œil dans la direction d’Eden lui apprend qu’il n’est pas le seul à être insupporté par l’adolescent. Il sent bien l’agacement qui grandit en elle, il voit bien comme elle se contient pour ne pas aller botter le cul de ce gamin, pour ne pas faire un scandale sous les yeux éberlués de ces jeunes avides de la moindre esquisse d’action. Il aimerait pouvoir se glisser entre les rangs, rejoindre le garçon en quelques enjambées, l’attraper par la peau du cou pour le remettre à sa place, lui passer l’envie de jouer un mauvais remake de Roméo. Il les a gardés ces saletés de réflexes, malgré le passage des années ; malgré le passage des années, il continue à perdre son sang-froid dès lors qu’un autre homme se risque à poser les yeux sur Eden un peu trop longtemps, il continue à avoir envie d’aller le démolir. Et pourtant, ils ne sont plus ensemble aujourd’hui. C’est même lui le premier, son ex, qui ne devrait pas s’autoriser à reluquer la demoiselle un peu trop souvent. Il mériterait des gifles quand il pense ainsi, et il serait le premier à se les asséner.

Voix douce qui l’interrompt, visage qu’il tourne dans la direction d’Eden qui s’est mise à parler, le coupant dans son monologue. Compliment qui le surprend, compliment suivi de petites piques, petites critiques inévitables qui le rassurent. Voilà qui ressemble davantage à la jeune femme qu’il connaît. Il lève les yeux au ciel, rétorque sur le même ton :

- Je sais que t’as toujours été jalouse de mes capacités sportives Eden, mais faut pas, ça va te donner des rides de rager comme ça…

Mots sortis tout seuls de sa bouche, jeune homme qui s’est laissé gagner par les railleries de la demoiselle, qui a oublié le temps d’un instant qu’ils n’étaient pas seuls. Il ne prend pas immédiatement conscience de l’impact de ses mots. De ce qu’ils impliquent. Ce n’est qu’en entendant les rires et autres murmures qui s’élèvent dans les rangs, ce n’est que lorsque parviennent à ses oreilles quelques mots isolés, prononcés par les élèves les plus proches, qu’il se rend compte qu’ils n’ont probablement pas été assez discrets, tous les deux. Retour de sa voix forte, il met un terme aux discussions en reprenant son intervention là où il l’a laissé, espérant que cela suffira à faire oublier le petit incident à son auditoire. Il en profite pour leur demander qui d’entre eux appartient à l’équipe de foot actuelle du lycée, et n’est même pas surpris de voir le petit con de tout à l’heure lever la main. En quatre années passées dans l’équipe, il en avait croisé des adolescents de son genre. Des gosses qui n’avaient guère plus de trois poils au menton mais qui ne se sentaient plus pisser juste car ils avaient le bénéfice de pouvoir porter le maillot de l’équipe. Des types qui l’avaient intégré non pas par amour du sport mais simplement pour être « populaires » et pouvoir approcher les plus belles filles du lycée, jouer avec elle sans les respecter. Des garçons malheureusement trop nombreux au sein de l’équipe, déjà en son temps mais manifestement aujourd’hui encore.

Il dévisage un instant l’adolescent, avec la puissante envie de lui faire ravaler son sourire goguenard et de le foutre à la porte de cette salle, là où il ne pourra plus voir sa sale tronche, mais il n’en fait rien. À la place, il se remet à parler, parler encore et encore, jusqu’à être si bien assoiffé qu’il n’a d’autres choix que de s’arrêter un instant pour se désaltérer. Du coin de l’œil, il voit Eden se lever, aller faire le tour de la classe ; il reporte son attention sur sa chemise qu’il entreprend de rendre un peu plus légère, ne voulant pas risquer de se faire surprendre à la regarder. Nouveau coup d’œil qu’il s’autorise pourtant dix secondes plus tard, juste à temps pour la voir se baisser pour faire quelque chose, mais quoi ? Il n’en a pas la moindre idée. Tout ce qu’il voit c’est qu’elle s’accroupit, que le tissu de sa robe se tend, remonte un peu plus haut que de coutume sur ses cuisses, qu’il a une vue imprenable sur ses fesses. Putain. Il déglutit difficilement, cligne des yeux, se force à détourner le regard pour fixer les manches de sa chemise. Pour se concentrer sur une tâche précise, oublier un instant la demoiselle bien trop attrayante qui déambule à quelques mètres de lui.

Petite interruption dans son intervention dont profitent quelques garçons pour lui poser des questions sur son entraînement, jeune homme tenté de les envoyer balader, de leur rappeler que les questions, c’est à la fin, comme il l’a annoncé plus tôt. Mais il n’a pas particulièrement envie de passer pour le vilain du duo, l’adulte chiant encore pire qu’un prof, et puis ce n’est pas la mer à boire que de faire une petite pause dans son monologue, après tout… Il leur explique donc dans les grandes lignes en quoi consiste l’entraînement que suit son équipe, qu’il ne se limite pas à s’envoyer le ballon et courir sur le terrain, qu’ils passent également beaucoup de temps en salle pour travailler leur résistance et leur cardio. Il leur parle de l’importance des échauffements et autres étirements pour ne pas se faire mal de manière stupide, leur apprend qu’il prend des protéines mais guère plus, qu’il faut être inconscient pour aller fourrer son nez du côté des produits bien plus chimiques et efficaces, avec le lot de risques allants avec. Que n’importe qui est capable de se muscler par la simple force de sa volonté et de sa persévérance, qu’on peut très bien vivre sans ces produits qu’on vend au prix fort comme le miracle de l’année. Réponse apportée, garçons qui se regardent avec une surprise non feinte, manifestement pas pleinement convaincus par ses paroles. Peu importe, il sait qu’il leur a livré la vérité, et c’est le principal. Au moins peut-il désormais reprendre son petit discours là où il l’a laissé.

Il a à peine recommencé à parler qu’Eden revient vers lui, reprend sa place à ses côtés. Proximité troublante, il aurait juré qu’il a presque senti son épaule effleurer la sienne lorsqu’elle s’est assise sur le bureau, alors même qu’il est encore occupé à chasser de son esprit la vision qu’elle lui a offerte en se penchant ainsi, cinq minutes plus tôt. Mais il ne doit pas se laisser déconcentrer par sa présence. Il ne le peut pas. Alors il poursuit son intervention tant bien que mal, le regard soigneusement dirigé vers son auditoire. Machine inarrêtable, il s’interrompt finalement, ayant terminé de dire ce qu’il avait à dire plus rapidement qu’il l’aurait soupçonné. Il enchaîne sans difficulté sur les questions, temps d’échange promis aux élèves depuis leur entrée en classe, forme de récompense pour leur patience au cours de l’heure et demie qui vient de s’écouler. Première question adressée à Eden, question purement pratique, portant sur les revenus de photographe. On ne va pas se mentir, Landon il comptait un peu sur cette dernière partie pour en apprendre un peu plus encore au sujet de la jeune femme. Obtenir des informations supplémentaires sur ce qu’elle est devenue, son état d’esprit actuel, la vie qu’elle mène aujourd’hui. Au fond de lui, il espère qu’au cours de la demi-heure restante, les interrogations adolescentes sauront lever au moins certaines zones d’ombre qui demeurent quant à l’existence de la jolie blonde. Espoirs qui se voient déçus par cette première question, jeune homme qui se rassure en se disant qu’il leur reste du temps, qu’il a encore une chance d’obtenir des réponses plus intéressantes que celle-ci. Parce qu’il s’en fout royalement de savoir combien touche la demoiselle. Enfin, il espère bien évidemment qu’elle gagne de quoi vivre confortablement, mais au-delà de ça, l’argent n’a jamais eu une valeur fondamentale à ses yeux. Bien sûr, il aime mieux en avoir trop que pas assez ; mais au-delà de ça, ce n’est à ses yeux guère plus qu’un moteur pour améliorer son train de vie. Mais pas une fin en soi. Alors, savoir si son ex petite amie est riche ou pauvre ? Y a des sujets qui l’intéressent davantage, franchement. Comme de savoir comment elle se sent. Si elle est heureuse, aujourd’hui. Si elle est parvenue à tourner la page sur leur histoire, à oublier leurs jeunes ébats. Si elle a réussi là où il a échoué.

Jeune homme tiré de ses pensées par une nouvelle voix, jeune homme qui cligne des yeux, redresse la tête pour voir d’où elle provient. Il s’est perdu une fois de plus, a laissé ses réflexions le noyer hors de la réalité, si bien qu’il n’a écouté que les premiers mots de la réponse d’Eden. Enfin il localise la fille qui vient de poser la question, il se concentre un peu pour se remémorer ses mots qu’il a entendu sans les écouter. Ah oui, s’ils s’attendaient à mener la vie qu’ils mènent aujourd’hui, et si elle leur convenait. Vaste question qui le fait encore partir trop loin dans ses songes le bonhomme. À la différence près que cette fois-ci, la réponse d’Eden l’intéresse bien plus. Est-elle satisfaite de la vie qui est la sienne ? Alors il fait un effort, il prend sur lui pour ne pas se laisser entraîner trop loin dans les méandres de son esprit lorsqu’il entend le timbre de sa voisine résonner dans la salle de classe. Elle est contente. Phrase qui le rassure sur son état, mots suivants qui font pourtant se froncer légèrement ses sourcils. Paroles qui pourraient ne concerner que la voie professionnelle ; paroles qui seront probablement interprétées de la sorte par leur auditoire, lorsqu’il sait, lui, Landon, qu’elles englobent bien plus. Il ne s’agit pas que de carrière. Que de taff, que d’argent. Ces palabres font référence à sa vie, à leur vie, à leur futur à eux. Il se souvient parfaitement de l’état d’esprit dans lequel il se trouvait, à l’époque. Lorsqu’il avait l’âge de ces gamins. Il ignorait ce qu’il allait faire de sa vie, dans quelle voie professionnelle il s’engagerait. Il était sûr de ne plus vouloir d’une vie bercée par le sport, mais il n’avait pas encore considéré la possibilité d’entrer dans l’armée. Mais une chose, une unique chose était une certitude à ses yeux : où qu’il aille, il le ferait avec Eden. Il finirait sa vie avec elle, il le savait, c’était une évidence ! Probablement qu’ils finiraient par quitter cette ville paumée, puis ils se marieraient et auraient un enfant, peut-être même plusieurs. Il s’en foutait pas mal à vrai dire de rester croupir ici ou de partir à la découverte du monde. Il s’en foutait tant qu’il avait la demoiselle à ses côtés. Et puis elle avait rompu avec lui. Et il n’avait même pas esquissé un geste pour la retenir. Envolés les rêves adolescents, pulvérisé l’avenir doré qu’il imaginait. Ils n’avaient jamais réellement parlé de tout ceci, tous les deux. Ce n’était pas leur genre de s’allonger à la belle étoile pour faire des plans sur la comète. Mais il se doutait, plus que jamais aujourd’hui, en entendant ses paroles, qu’elle partageait ses scénarios de futurs utopiques. C’était de leur âge, après tout.

C’est une pique de plus que lui envoie la jolie blonde à travers ces paroles à première vue anodines. Il se remémore le jour où il lui a annoncé qu’à la fin de l’été, il partirait s’engager dans l’armée. Ça l’avait prise de court la gamine, elle ne l’avait pas vu venir celle-là, elle qui était pourtant si maligne. Et pour cause. Landon lui-même ne se doutait pas qu’il ferait pareil choix d’orientation, deux semaines plus tôt. Il avait pris cette décision très rapidement, dans cette urgence propre à la fin de dernière année de lycée. Sur le moment, cela lui avait semblé être la seule alternative possible, pour lui qui n’excellait que dans un domaine qu’il avait fini par tenir en horreur. Il revoit l’expression qui s’était peinte sur les traits de sa petite amie lorsqu’il lui avait appris la nouvelle, il la revoit comme si c’était hier. Choc, douleur, colère. Incompréhension. Sombre cocktail qui avait alors animé son visage, sombre cocktail bel et bien dominé par l’incompréhension. Même lorsqu’il avait tenté de lui expliquer les raisons de son choix, elle avait toujours l’air aussi perdue. Il aurait été incapable de dire si aujourd’hui, elle avait fini par saisir ses motivations, ou toujours pas. Comment lui en vouloir ? Lorsque la décision d’un autre nous touche aussi personnellement, il est parfois difficile de se mettre à sa place. Il n’a pas pris le chemin qu’elle pensait qu’il prendrait. Et probablement l’a-t-il par la même occasion écartée du chemin auquel elle était destinée. Reproche étouffé, reproche qui le touche pourtant en plein cœur, qui rappelle à son bon souvenir des réminiscences dont il ne voulait plus. Elle se tourne vers lui, dans l’attente de sa réponse. Prunelles azurées qui se rencontrent, il n’a pas conscience de la transparence de son propre regard, de l’exactitude avec laquelle les regrets et la peine sont lisibles dans ses iris brisés. Il détourne le regard, passe une main dans ses cheveux, fixe les élèves face à lui. Merde. Avec tout ça, il n’a pas réfléchi à une réponse à leur donner. Il va falloir improviser… pour changer. Sourire qu’il se force à esquisser, mensonge qui déguise ses traits pour masquer l’état dans lequel il se trouve.

- Pas du tout, en fait ! Pour te remettre en contexte, à ton âge, j’avais encore une année de lycée devant moi. Je commençais déjà à faire une overdose de sport, et un processus commençait à se mettre en place dans mon cerveau, un processus qui m’a fait me dire que je voulais me tourner vers n’importe quelle carrière, tout sauf du sport. Aussi, si on m’avait dit que dix ans plus tard, je serais footballeur dans le club de la ville, je n’y aurais pas cru. Mais je ne me doutais pas non plus que je m’engagerais dans l’armée. Cette décision-là, je l’ai vraiment prise au dernier moment, quelques semaines avant la fin de ma dernière année de lycée. Je devais faire un choix pour l’année prochaine, le foot me sortait par les yeux, alors je n’ai rien trouvé de mieux à faire que de me tourner vers la carrière qu’avait épousé mon père ! Ma vie n’a donc été qu’une… succession de surprises, pour ainsi dire. À ton âge, je m’imaginais une vie différente en tout point de celle qui est la mienne aujourd’hui. En tout point, vraiment, pas un seul n’a été épargné. Mais… les choses me conviennent telles qu’elles sont. J’ai toujours fait passer ma carrière en premier, donc j’ai la vie que je mérite. Je peux vivre de ce que j’aime le plus au monde, et on me paye bien pour ça. Ce serait osé de ma part de m’en plaindre.

Habile pirouette par laquelle il conclue sa réponse, sans se laisser le temps de dériver trop loin de la question de base. Sans se laisser le temps de détailler les points de sa vie qui ne se sont pas déroulés comme prévu. À vingt-sept ans, il a fait sa vie dans le milieu sportif, il est toujours coincé à Savannah et, pire que tout, il a perdu Eden. Il n’aurait pu être plus éloigné de son avenir fantasmagorique.

Les questions fusent dans les rangs, et sans qu’il le voie arriver, c’est une dizaine de mains qui se lèvent devant lui. Mais avant qu’il n’ait le temps de porter son choix sur un élève, Eden se charge d’interroger une élève. Froncement de sourcils à l’entente de la question qu’elle pose, lèvres qui se crispent sensiblement. Merde alors, c’est quoi cette question ? C’est bien trop personnel, ça ne regarde pas ces sales gosses. Ils n’ont pas signé pour ça. Mauvaise pioche, Eden, je prends les commandes pour les questions suivantes. Regard appuyé qu’il lance à Eden tandis que cette dernière répond en riant innocemment, regard qui en dit long. C’est lui qui choisit les élèves à interroger désormais, avec un peu plus de soin qu’elle, si possible. Mais avant qu’il n’ait le temps de donner la parole à un autre élève, dans l’espoir de calmer l’assemblée de sauvageons, l’un d’entre eux se permet de poser une nouvelle question sans même attendre d’en avoir l’autorisation. Il se crispe Landon à l’entente de la question, il a bien envie de l’ignorer, de faire comme s’il ne l’avait pas entendu, car ils n’ont pas à répondre à des questions portant sur leur vie privée. Mais personne n’est dupe. La question a été posée d’une voix tellement forte, avec un tel entrain, une telle curiosité mal placée, que nul n’a pu passer à côté. Et il n’est rien de plus suspect que d’éluder une question ; mieux vaut apporter une réponse claire que de laisser l’imagination des jeunes s’emballer face à un silence qui en dit long. Et il voit bien, au regard qu’Eden pose sur lui, qu’elle n’est pas en mesure de l’aider à réparer les dégâts qu’elle a causés.

- Oui… Oui, Eden et moi avons passé notre scolarité ici ensemble, aussi on peut dire qu’on se connaît bien. Je suis heureux de la retrouver aujourd’hui et de pouvoir intervenir à ses côtés, c’est une jeune femme qui a beaucoup compté pour moi, que je tiens aujourd’hui encore en haute estime. On n’oublie jamais ses relations les plus importantes du lycée, croyez-moi ! Vous vous en rendrez compte bien assez tôt, de toute manière. Maintenant, tâchons de nous concentrer sur des questions constructives, s’il vous plaît. Nous ne sommes pas là pour parler de notre vie privée, mais professionnelle.

Sourire chaleureux qu’il adresse aux élèves, comme pour faire passer plus aisément la nouvelle que non, ils n’auront pas droit à un second épisode de « La vie secrète d’Eden et Landon ». Pas aujourd’hui. Jamais, même. Il tourne la tête vers Eden, la regarde brièvement, retire de son épaule la main qu’il y avait posée pour la tapoter affectueusement pendant qu’il parlait. Paroles vibrantes de vérité qu’il a prononcées, pesant chaque mot, pensant chaque mot. Prenant garde à rester ambigu, à ne jamais mentionner un lien amoureux entre eux, sans le démentir pour autant. Il scrute l’assemblée du regard, quelques mains se sont baissées depuis qu’il a dit qu’ils ne répondraient pas à davantage de questions personnelles. Sales gosses. Son regard s’arrête sur une des nombreuses demoiselles du premier rang, qui lève le bras comme si sa vie en dépendait. Craignant qu’elle ne se pète le bras à force de l’agiter en tous sens, il décide de l’interroger.

- Lieutenant James, pourquoi avez-vous décidé d’arrêter l’armée ? Vous aviez l’air de tant aimer cette profession…

Le coude posé sur sa table, le visage appuyé dans sa main, la gamine joue avec une de ses mèches de cheveux, s’adressant à lui d’un air profondément affecté. Il doit se retenir de rire en entendant son appellation, de l’envoyer balader car elle n’a manifestement rien écouté de son intervention si elle en a retenu qu’il avait adoré servir son pays. Mais il prend sur lui, tente de garder un air aimable.

- Je n’ai pas totalement décidé de quitter l’armée, en fait. C’est plutôt un choix qui s’est imposé à moi. Ça faisait un peu plus de cinq ans que j’étais soldat, et j’étais en mission avec ma patrouille habituelle. Sauf que voilà, les choses se sont mal passées, on était sur une mission particulièrement dangereuse, une histoire de terroriste à identifier et à désarmer parmi des civils. Un des soldats qui était avec nous s’est montré imprudent, il a oublié la règle primordiale à l’armée, celle de ne rien faire qui puisse mettre en danger ses camarades. Ça a déclenché une émeute, les tirs ont fusé et je me suis pris une balle en plein torse, juste là. Un centimètre plus à gauche et un organe vital était touché, c’en était fini de moi.

À travers le tissu de sa chemise, il pointe une petite zone située sous sa poitrine. Il n’a pas besoin de se dénuder pour repérer la cicatrice circulaire, il connaît son emplacement par cœur. Des murmures horrifiés s’élèvent dans les rangs, et il s’autorise un léger éclat de rire. Car c’est l’une des règles primordiales qu’il a apprise au cours des dernières années : mieux vaut rire de ses malheurs, les mettre à distance, que de s’apitoyer sur son sort.

- Mais ne vous en faites pas pour moi, eh ! Ça fait trois ans, et regardez, je suis en pleine forme aujourd’hui, j’ai même pu reprendre le sport. J’ai eu beaucoup de chance. Plusieurs de mes camarades sont morts ce jour-là, et moi, j’suis passé tellement pas loin d’y rester… J’suis assez superstitieux, du coup, quand ce genre de chose arrive, j’ai tendance à considérer ceci comme un avertissement. Du genre… « Quitte l’armée tant qu’il est encore temps, avant qu’il t’arrive une bricole dont tu ne réchapperas cette fois-ci. » C’est stupide hein, mais bon, toute cette petite histoire m’a fait prendre conscience que je pouvais vraiment mourir sur le terrain, et vingt-trois ans, ça me semblait un peu jeune pour dire adieu à ce monde. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de mettre un terme à mes fonctions de soldat. Je garde très peu de souvenirs de ce jour-là. Je sais juste que l’infirmière qui nous accompagnait est immédiatement venue s’occuper de moi, qu’elle a tout fait pour me maintenir éveillé, mais la douleur était telle que j’ai rapidement perdu mes esprits. Après c’est le noir total, je me souviens que de mon réveil, quelques jours plus tard, à l’hôpital. J’étais complètement shooté aux antidouleurs, ça m’a retourné le cerveau un peu, je m’attendais à voir à mon chevet une personne sortie de ma vie depuis plusieurs années, persuadé que j’étais encore aussi proche d’elle que je l’étais par le passé…

Il a les yeux baissés vers ses pieds, Landon, il fronce un peu les sourcils sous le poids des souvenirs. Il ne garde qu’une seule image nette de son réveil : l’espoir de voir le visage d’Eden penché à son chevet, de trouver sa petite amie à ses côtés, prête à prendre soin de lui lorsqu’il avait mal dans le torse à la moindre respiration. Espoir qui n’avait duré que quelques secondes, le temps que le brouillard des calmants commence à se dissiper pour rappeler à son bon souvenir que jamais elle ne serait là, car elle avait rompu avec lui. Trois ans plus tôt. Ça lui avait foutu une claque à Landon, claque dont la violence s’était vue décuplée lorsqu’il s’était souvenu de la dernière chose à laquelle il avait pensé avant de tomber dans les vapes, dans la poussière de la Lybie. « Ce serait quand même bien con que j'crève sans avoir pu dire au revoir à Eden. » Il cligne des yeux, brusque retour à la réalité. Trente paires d’yeux le fixent sans ciller.

- Enfin bref, je m’égare, là. Mais voilà la raison pour laquelle j’ai mis un terme à ma carrière de soldat. Question suivante ?

Les doigts levés se font plus timides après ça, après que Landon ait réussi à jeter un froid, comme toujours lorsqu’il parle de l’armée. Ils se font plus timides, mais trois élèves un peu plus téméraires que les autres osent lever la main. Il en interroge un, l’un de ceux qui l’ont questionné, quelque temps plus tôt, sur ses entraînements et sa consommation de protéines. Soulagement qui l’envahit en comprenant que la question est adressée à Eden, qu’il aura le temps de se remettre un peu de cette vague de réminiscences. Soulagement de courte durée, qui cède la place à la surprise à l’entente de la fameuse question.

- Mademoiselle Howard, vous prenez en photo des portraits si on vous passe commande, n’est-ce pas ? J’aurais voulu savoir si vous preniez des nus ? C’est pour un ami.

Gamin qui la fixe sans ciller, jeune homme brun qui se tourne vers sa voisine, sourcils haussés. Alors ça… C’est quoi cette classe, sérieux ? Ensemble d’adolescents prêts à sortir n’importe quel mensonge éhonté pour répondre à dieu seul sait quels fantasmes tordus de garçons à peine pubères. Il est choqué Landon, se demande s’il s’agit là de la dernière question absurde à laquelle ils auront droit, ou si ce n’est que le début des festivités.
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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyMer 5 Juil - 4:53

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Elle regrette Eden, vraiment. Quand ses prunelles incandescentes tombent sur celle de Landon, son regard désolé, empli de remord une fois sa réponse donnée. Elle regrette ce qu’elle vient de dire car finalement, elle lui fait comprendre qu’elle n’a jamais accepté la situation qu’il lui avait imposé ; elle n’a jamais réussi à accepter sa décision et ainsi, par la même occasion. Elle lui fait comprendre qu’elle s’en foutait de ses motivations personnelles à lui. Elle est conne Howard, trop conne même. Elle préfère se voiler la face et aller fixer un point non existent dans le fond de la pièce, jeter la pierre sur son ex plutôt qu’avouer qu’elle avait déconnée en le regardant dans les yeux. Qu’elle aussi n’avait rien fait pour que cette relation ne dure, elle l’avait jouée purement individualiste à la course au bonheur. Son propre bonheur avant celui de l’ancien Soldat. Ne pas accepter de le voir s’éloigner plutôt que s’adapter. Elle aurait surement pu s’y faire à cette vie de copine de militaire. Elle aurait peut-être mieux fait de le soutenir coute que coute, croire tout bonnement en lui plutôt que d’être sûr qu’il allait crever sur le terrain. Elle l’avait quittée par peur, celle de finir seule. Peur que si tout se passe mal, elle est pour seul regret de l’avoir soutenu dans cette idée d’aller à l’armée.

La preuve qui démontre qu’elle s’est surement trompée est assise à ses côtés. Preuve qu’elle a tout foirée pour rien Eden en pensant comme ça. Il est là, vivant. Il parle de la guerre et de sa nouvelle carrière de rêve devant les gosses. Il dit très clairement qu’il ne s’attendait certainement pas à cette vie mais que cette succession de surprise, d’événements jamais prévue a tout de même porté ses fruits. Maintenant il est là, à Savannah et mène un quotidien sympathique, un train-train auquel il ne pensait certainement pas lorsqu’il était jeune mais qui lui convient quand bien-même à présent. Elle se maintient de lâcher un truc acerbe la belle. Elle se retient de prévenir tout le monde qu’il faut des fois écouter les femmes. Les écouter lorsqu’elles donnent un conseil, joue les avant-gardistes car trois ans plus tard qui c’est qui avait raison au final ? Elle. Il se retrouvait tout de même au point de départ. Dans la carrière qu’il disait « haïr » fut un temps. Tout ça pourquoi ? Car il avait préféré se confronter à son père. Donc non pour une histoire de fierté, il n’avait pas écouté Eden, il n’avait pas pu se résigner à jouer avec son putain de ballon lorsqu’il était temps de prendre les bonnes décision, il avait fallu qu’il passe par la case tuer des gens, vivre un enfer dans le désert pour se rendre compte qu’il était effectivement mieux de jouer avec une équipe dans la ville qui l’avait vue grandir.

Pour elle, il n’y a que ça à retenir : Elle avait eu raison depuis le début.

Elle a ce gout amer entre les lèvres Eden, elle sent les mots butés contre ses dents pour ne pas sortir. Elle garde sa rancœur au plus profond d’elle. Elle la ravale sagement Pour la simple est bonne raison qu’il n’avouera jamais qu’elle avait raison. Il s’en foutait complètement en fait de savoir si elle avait le bon raisonnement ou non. Il le dit lui-même, il a toujours fait passé sa carrière avant tout. Avant elle surtout. Donc son avis, elle avait pu se le mettre dans un sandwich et le manger hein. Et ça, c’est le pire à ses yeux. Elle n’arrive pas à s’en remettre qu’il ait pu tout bonnement choisir le fusil plutôt que tout ce qu’il avait construit avec elle et même la carrière prometteuse qu’il aurait pu avoir aisément. Elle tourne alors la tête vers lui, la bile lui remontant dans l’œsophage, ses yeux bleus transperçant son profil qui souffle aux jeunes que ça vie est convenable, qu’il n’a très certainement pas à se plaindre. Elle en retient qu’au moins, il est heureux. Que ça lui convient et qu’il n’a zéro remord. Elle lui fait mal, il rend le coup. C’est ce qu’on appelle plus communément la balle de match, lorsqu’il y a égalité de partout. Que le dernier coup sera décisif pour nommer le vainqueur. C’est une balle qu’elle se reçoit en pleine face, une balle qui l’assomme toujours, encore et encore. Qu’importe sa force de frappe, elle a l’impression qu’il en a toujours une d’avance. Elle se hait, elle le hait mais elle aurait dû le savoir Eden, qui sème le vent récolte la tempête. « C’est vrai que ça serait osé, après tout ce que t’as sacrifié… » dit-elle doucement, assez doucement pour que seul son voisin puisse l’entendre. Incontrôlable marmonnement qu’elle n’avait pu contrôler, elle ne pouvait s’en empêcher. Encore une pour la route, parole de trop au compteur certainement.

Regard appuyée qu’il lui lance d’un air fatigué, lassé des questions qu’il entend. Sentiment d’agacement qu’elle lui fait ressentir à son tour en le fixant avec de grand yeux. Croit-il qu’elle choisisse les élèves en sachant d’avance leurs questions à la con ? D’ailleurs. Ils sont chiants ces jeunes. Elle a envie de les envoyer aller se faire voir. Ils ont quoi avec les questions qui n’ont aucun rapport avec la photographie, l’armée ou le sport à haut niveau ? Ça leur fait quoi qu’ils aient pu se connaitre, passer du temps ensemble ou même coucher ensemble et s’aimer dans le passé ?! Elle n’a pas la force d’y répondre, elle ne sait pas quoi répliquer de toute façon. Il a qu’à le faire lui tien. Monsieur charismatique, Monsieur qui impose le respect puisqu’elle elle est clairement en train de se faire marcher sur les pieds, les jeunes s’autorisent à parler sans autorisation, à poser des questions qui n’ont aucun rapport avec leurs orientations.

Elle a le cœur qui se resserre. Elle le sent l’étaux de fer hermétique, la carapace qu’elle s’est forgé depuis des années est en train de lui faire un mal chien quand il l’afflige du premier coup de massue. La prison dans laquelle son organe le plus précieux est protégé est en train de doucement, subtilement de se briser autour de celui-ci. Il est entrain mettre son précieux à nue en tapant les murs fondateur de ces blocs de glace qu’elle a construit au fil des années. Son cœur grossit, se gonfle en s’abreuvant de ses dires. Comme si ça faisait trop longtemps qu’il n’avait entendu les mots qu’il attendait ce pauvre palpitant. Elle sent son pouls, son cœur cogner dans son corps entier avec ardeur. Nul besoin d’un stéthoscope pour l’entendre sauter, battre le moteur de son existence. Comment peut-il dire devant tout le monde qu’il est heureux de la voir alors que deux fois sur trois il aurait voulu presque la frapper pour qu’elle se taise ? C’est si aisé que ça pour lui de mentir ? De rendre la réalité plus belle qu’elle ne l’est en vrai ? Et si il le pensait ? Et si tout ce qui disait était vrai ? Elle a les sourcils qui se froncent légèrement, subtilement lorsque vient la main de son ex se poser sur elle la coupant dans ses réflexions profonde. Quand l’épiderme de ses doigts vient frotter le tissus léger de sa robe sur son épaule. Il veut se montrer amicale et elle plonge dans le mensonge. Elle hoche la tête pour appuyer ses dires face à tous ces gosses mais elle met instinctivement son cerveau en veille. Elle ne veut pas entendre des mensonges aussi vite ficelé. Elle ne veut pas l’entendre dire du bien, suggérer aux adolescents qu’ils n’oublieront jamais certaines rencontre du lycée lorsque lui-même a tiré un trait sur elle pour le bien de sa carrière. Mais il parait qu’elle reste importante la demoiselle à ses yeux. Pourquoi ? Car elle est son premier réel amour ? Car elle est celle qui l’avait plaquée avant qu’il ne parte en guerre ? Comment la représente-t-il lui ? La voit-il comme un élément positif ou négatif ? Elle a du mal à tout saisir, elle a du mal à déceler le faux du vrai. Elle se dit qu’elle n’écoute pas, elle essaie de s’en convaincre mais les mots viennent, ils s’immiscent jusqu’à ses oreilles puis dans son cortex. Ils résonnent avec force. Jusqu’à la dernière de ses palabres. Elle l’écoute dire qu’elle tient encore une certaine place dans son cœur … Berçant doucement l’idée qui puisse y avoir encore quelque chose de bon entre eux. Elle y croit, elle n’y croit plus … Une minute ça lui va, la minute d’après ça ne lui va plus.

Elle sourit aux élèves. Faussement, ou plutôt troublée serait le mot le plus qualifié pour parler de ce sourire forcée qu’elle glisse sur son faciès. Mais elle le fait. Pour le bien de l’intervention, pour garder un peu de contenance. Elle préfère qu’ils aient en tête un binôme d’intervenant sympathique et souriant plutôt qu’un binôme qui n’était bon qu’à se déchirer même lorsqu’ils n’étaient pas en privé. Ils l’auront de toute façon leur conversation en tête à tête. Un jour viendra où les deux prendront la grosse décision de parler franchement. D’arrêter de jouer aux plus cons et de lancer des piques ou des messages subliminaux en espérant que l’autre se sentent viser. Elle le sait. Bien qu’elle l’évite un peu car elle a l’appréhension en pensant à ce genre conversation elle sait bien qu’ils ne pourront pas toujours tourner autour du pot. Faire un pas en avant pour en reculer de trois juste après. Mais pas tout de suite, pas maintenant. Elle n’a rien à lui dire pour le moment et n’a rien à expliquer à cette classe de prépubère un peu trop friand de ragot.

Fort heureusement, les points sur les i ainsi que les barres sur les T ont bien été posée par le brun. Une partie des gosses de la classe ont subitement baissé la main dès que l’ancien militaire a fait comprendre que les questions personnels n’étaient plus autorisées. Enfin, les questions censées pouvaient reprendre et c’est lui qui prenait les commandes puisque Eden n’avait à son gout pas assez bien fait les choses jusqu’à présent. C’est donc lui qui va interroger cette fille au premier rang. Cette demoiselle qui était prête à se déboiter l’épaule pour qu’il la remarque. C’est elle qui prend cet air peinée, ce regard de biche effarouché pour lui demander pourquoi avait-il arrêté l’armée s’il avait tant l’air d’aimer ça … Elle se mord la lèvre à la fin de sa phrase la gamine, elle commence à tortiller une de ses mèches autour de son doigt et s’en est trop pour la vue d’Eden. La blonde lève les yeux vers ciel, elle n’a qu’un seul mot qui vient en tête : agaçante. Elle est vraiment agaçante cette gosse sans limite qui leur fait face. Heureusement pour elle, la question qu’elle vient de poser intéresse fortement la blonde et ça pardonne à moitié son attitude inquiétante de petite chaudière. Alors Landon, qu’est ce qui t’as fait arrêter cette carrière que t’avais tellement voulu ? Elle tourne la tête vers l’homme, elle regarde son ex avec les sourcils arquée prête à entendre le morceau manquant de l’histoire. Le pont qui relie le passé dans l’armée à son nouveau succès de footballer pro.

Eden, elle a déjà sa petite idée en tête sur les raisons qui font que Landon James soit revenue sur Savannah et ça, avant même qu’il ne parle. Pour elle, si elle devait lancer un pari elle lâcherait des billets sur une histoire de blessure, un truc qui tourne mal sur le terrain. Soit, la simple fin de son contrat de soldat ? Une retraite bien mérité à pourvoir échange d’un travail plus allégé ? Elle n’en sait rien, elle ne sait toujours pas grand-chose de cette carrière-là. Elle ne sait pas à quel âge un militaireà le droit de demander à arrêter d’être sur le terrain mais c’est sur ces possibilités là qu’elle miserait si elle pouvait la gamine. Mais là, il n’est pas question de paris lancés et les doutes et questionnement commencent à s’envoler au fur et à mesure que le brun parle. Qu’il explique le comment du pourquoi.

Donc elle avait bien raison la poupée, elle ne s’était pas trompée. C’était bel et bien à cause d’une mission qui avait mal tourné qu’il s’était retrouvé forcé de rentrer. Bizarrement ; elle est déçue la belle blonde d’apprendre que c’est réellement pour ça qu’il a dû arrêter. Alors il avait vécu une mission si dangereuse ? Il s’était pété un truc pour rentrer à la maison ? Ça ne tient qu’à ça pour revenir sur la terre natale du soldat ? Elle aurait finalement préféré qu’il se soit arrêté de sa propre volonté. Mais non, c’est une fichue blessure qui l’a foutu en dehors des tranchées. Alors elle laisse glisser ses prunelles sur le corps de son ex et à première vue, rien ne semble avoir changé chez Landon. Il a toujours sa démarche assurée, il ne boite pas, chose qu’elle aurait directement remarqué. Il n’a pas l’air d’avoir de marque affolante sur les bras et il n’a pas perdu des doigt sur le champ de bataille… Les dix sont là, présent et intact. Ça la soulage Eden de voir qu’à première vue rien n’a bougé.

Opalescences qui refont le chemin inverse remontant sensiblement jusqu’à son cou, sa mâchoire carré et ainsi de suite. Elle s’attarde sur chaque petit détail en quête d’un changement majeur mais rien ne la frappe pour le moment. Même son visage est resté parfait. Aucune cicatrice ne barre son doux visage. Seul un de ces deux sourcils a changé, seulement celui de gauche semble avoir connu un infime changement en sept ans. Fin trait de poil qui a disparu, trait net qui coupe la fin de son sourcil en deux. Esthétisme voulu ou marque de guerre ? Eden n’en sait que trop rien mais plus l’histoire avance, moins elle s’accroche à son physique et plus elle l’écoute attentivement. Le cœur ratant un battement au fil de l’histoire qui avance, de l’horreur qu’elle se prépare à entendre.

Visage qui devient livide, sang qui s’arrête de tourner dans son corps. Elle le fixe, les yeux rond comme des billes en l’écoutant tout doucement alimenter son atroce récit qui est tiré de sa propre vie. Elle vient réellement d’entendre les mots « balle » ; « torse » ; « organe vital » et « fini » dans la même phrase ? Elle se sent mal la poupée. Elle croit être en plein cauchemar. Vraiment. Elle a la tête qui tourne, elle a les oreilles qui se bouchent un instant et la cervelle complètement chamboulée. Au point de le voir dans ses songes. Elle cauchemarde debout, elle voit la scène se jouer devant ses yeux. Elle l’imagine en plein conflit, en pleine mission et tout d’un coup l’émeute qui surgit, les tirs qui fusent d’un camp à l’autre. Le bordel qu’un seul putain de camarade avait pu foutre puis elle le voit lui. Le visage poisseux, le casque sur la tête, des traces noirâtres sur le visage puis la balle qui vient se loger en plein torse sans qu’il ne s’y attende. Sans qu’il ne puisse bouger, scène qui passe encore et encore dans sa tête. Rapidement puis au ralenti et plus rien. Trou noir et la voilà de nouveau dans la classe. Elle a les yeux rivées sur son torse, non pas dans son imagination mais bel et bien dans la réalité. Elle fixe les doigts de son ex caresser sa propre cicatrice au travers du tissus de sa chemise et elle remonte ses yeux vers son visage d’un air horrifié. Un centimètre, sa vie n’avait tenue qu’à un centimètre d’écart et elle ne le savait même pas.

Elle a les mains tremblante Eden, elle a beau tenté de se rassurer, se dire qu’il est là en vie et qu’il va bien. Rien ne la calme. Les jambes flageolante elle se lève, tel un zombie ou un robot elle se lève et va jusqu’au fond de la classe sans que personne ne la voit faire. Tout le monde est trop plongé dans l’histoire de Landon, tout le monde veut savoir la suite encore et encore. Classe divisé en deux groupes. Ceux qui se taisent, et ceux qui hurlent à l’indignation ; ceux qui aimerait limite plonger dans le feu de l’action pour tuer celui qui a osé toucher à Monsieur James. Elle, elle fait partie de ceux qui ne veulent plus rien entendre, un mot de plus, une image de trop en tête et elle explose. S’en est trop pour elle.  Elle s’assoit à l’un de ces bureaux pour gosse. Place vide qu’elle s’approprie. Elle passe ses mains dans ses cheveux complètement dépité. Incapable de le regarder. Partagé entre l’envie de quitter cette pièce pour de bon sans parler et celle de crier, de lui hurler dessus comme toujours qu’il a été con ; qu’il n’a pas fait attention. Que ce genre de chose arrive qu’à ceux qui sont tête en l’air, que même elle aurait pu faire mieux. Mais rien ne sort, elle en a tout bonnement pas la force.

Comme pour rassurer tout le monde, le brun s’empresse d’ajouter qu’il n’y a pas de quoi s’en faire ; pas de quoi s’indigner. Tout va bien, il va bien. Pour preuve ? Il peut même faire du sport mais ça, Eden elle s’en fout maintenant du présent. Elle ce qu’elle veut c’est retourné dans le passé. Elle veut faire un bond dans les années et apprendre cette nouvelle, elle veut le voir de ses propres yeux le survivant. Elle veut l’enlacer si fort qu’il en oublierait la douleur dans sa poitrine. Il en oublierait que c’est une balle qu’il s’est pris car c’est Eden qui lui ferait mal pour le coup. Mais ça n’arrivera jamais, c’est de la poudre de perlimpinpin ce qu’elle est en train d’imaginer. Elle n’a juste pas été là Eden. Elle n’a pas été là pour lui lorsqu’il s’est pris une balle. Elle n’a pas été là lorsqu’il est quasiment revenu d’entre les morts. Elle a envie de vomir Eden, elle a envie de vomir ses tripes car elle se déteste. Elle voudrait mourir plutôt que se rappeler le nombre de fois où elle l’avait maudit le soldat pendant qu’elle n’était pas en Géorgie. Elle a honte, trop honte de l’avoir fait. A-t-elle jouée inconsciemment aussi loin soit elle de lui avait-elle pu être si mauvaise que même le destin aurait voulu le supprimer de la terre pour faire cette fleur à la belle ? Non, non. Ce n’est pas possible. Elle ne le détestait pas à ce point, pas même après la rupture, après les années de blessure qu’il lui avait infligées. Elle l’avait maudit car elle était triste, dépitée de ne jamais réussir à l’oublier mais jamais ô grand jamais elle n’avait souhaité sa mort. Pas une seule fois.

Image bien plus difficile qui s’impose dans son cortex. Pièce blanche accompagné de drap blanc, corps meurtri allongé dans cette chambre attaché de bout en fil avec des machines pour garder un œil sur son rythme cardiaque et tout le bordel qu’une chambre en hospice peut offrir. Elle l’imagine seule, ou surement avec sa mère, pauvre mère qui devait pleurer les larmes de son corps alors que lui était encore plongée dans les brumes psychique qu’on lui avait filé pour qu’il ne ressente aucune douleur durant des jours et des jours encore. Ça fait mal de l’imaginer comme ça Landon, elle a du mal à savoir à quoi ressembler le Landon de vingt-trois ans. Elle essaie alors de manger les images du garçon qu’elle avait quitté, le jeune vétéran à celui qu’elle voit en face d’elle. Le Landon fort, musclé. Elle l’imagine les cheveux court, elle l’imagine musclée mais peut-être pas autant qu’actuellement et ça lui casse le cerveau de penser à ça. Il été trop jeune pour s’approcher si près de la mort. Rien que d’y penser elle a encore plus envie de pleurer, elle hait tous ceux qui ont tenu le secret, ceux qui ne l’ont pas appelé et tenue éloigné de ce tragique moment qu’elle avait raté.

Alors, pour s’empêcher de craquer, de pleurnicher comme un bébé à la vue de tous. Elle accroche ses doigts à ce petit bureau. Elle ne s’en rend pas compte mais si elle continue, ses doigts vont rapidement se briser, se tordre contre les bords arrondis du bois car elle y met trop de force. Elle ne fait pas attention à ce qu’elle fait actuellement Eden car la suite ne lui laisse pas de répit, Landon s’acharne, parle et enfonce un couteau de plus dans la plaie béante qu’il vient d’ouvrir à main nue. Il ne lui laisse pas le temps de se calmer, de laisser son cœur meurtri par les remords se ressaisir qu’il insinue des choses le garçon, il parle avec cette déception dans la voix qui font qu’elle se sent viser par ses paroles. Pourtant, il ne la mentionne pas une seule fois directement. Mais elle pense instantanément qu’il s’adresse à elle en parlant de cette personne qu’il avait voulu à son chevet, de cette personne avec qui il était proche dans le passé. Elle ne voit qu’elle l’imbécile. Pourtant, déjà cinq années étaient passé entre la rupture et ce moment dur dans sa vie. Il pouvait parler de n’importe qui, peut-être d’une fille qu’il avait rencontré entre temps ? Elle relève alors les yeux, elle essaie de rencontrer les siens pour avoir une confirmation, quelque chose qui lui ferait comprendre qu’il parle bien d’elle. Mais non, rien. Il se met à fixer le sol et elle soupire… Non Eden, t’es pas la seule personne qui a compté dans sa vie, faut grandir ma pauvre fille.

Silence qui règne en main de maitre dans la pièce. Trente-deux personnes présentes, mais aucune qui ne parle ou qui n’ose se prononcer.  On pourrait entendre le son d’une mouche tant le récit de l’ancien soldat a été dur et lourd en émotion. Les jeunes sont dépités, un peu attristé d’apprendre ce genre de chose mais ils ne le seront jamais autant que celle qui est assise le visage blême sur sa chaise au même titres que les adolescents. Ils ne seront jamais autant atteints tout simplement car ils ne le connaissent pas réellement Landon, ils n’ont pas vécu trois ans avec. Ils ne l’ont pas aimé comme elle a pu le faire. Elle, elle est réellement mal. Elle a une nausée qui ne la quitte pas. Elle a les yeux perdues dans le vague et elle doit se forcer d’agir comme si tout allait bien pour ne pas paraitre bizarre alors qu’il est grand temps de se remettre au travail.

Aller lève-toi Eden, c’est le moment. Bouge-toi.  Bruit de chaise qui grince au sol avec force, avec lourdeur. Corps frêle qui pourtant doit peser des tonnes tant elle est accablée la mignonne. Comme une automate, elle se force à faire ce que son cerveau lui dicte. Rapidement, elle regagne les devants de la scène en regardant d’un air dépité son ex vers lequel elle s’approche. Mais cette fois, c’est lui qui évite à tout prix son regard. Elle a beau s’avancer en le fixant il ne daigne relever la tête et affronter ses yeux dévastés. Sait-il combien il vient de la tuer à Eden ? Peut-être. Mais il s’en fiche, il continue à ne pas la regarder et elle désespère, elle soupire et arrête de le fixer une bonne fois pour toute. Elle s’avoue vaincue. Elle n’aura donc jamais une réponse à sa question. Elle ne saura jamais si il parlait d’elle ou non. Alors, elle ne vient pas se poser à ses côtés. Elle continue le chemin. Les bras croisées, la déception se lisant sur son visage et elle part s’appuyer contre le grand tableau fixé au mur. Elle est derrière lui, elle fixe son dos musclé, sa nuque bien dégagé et attend les questions suivantes en silence le laissant gérer.

Elle se pince l’arête du nez Eden en entendant la question du garçon à la troisième rangée. Question farfelues le retour bonjour. Elle soupire alors que les rires s’enchainent. Elle commence à vraiment les trouver cons ces jeunes. Elle commence à se demander si ils ont vraiment une once de respect en eux ? Celui d’être poli avec les plus vieux qu’eux ? Elle ne pense pas non et Landon aussi a l’air tout aussi fatigué qu’elle par la situation lorsque ses yeux viennent enfin se poser sur elle. Ah là il la regarde ? Là il ose froncer les sourcils et la calculer ? Elle est irritée la demoiselle. Et c’est sans remord qu’elle regarde le jeune homme et son voisin le petit enfoiré qui lui faisait des clins d’yeux plus tôt avec un sourire crispée pour leur répondre. Car elle sait qu’il est le réel auteur de cette question, elle le voit sourire d’un air victorieux. Fière d’avoir un pigeon pour poser ses questions. « Tu pourras dire à ton « ami » que non je ne m’occupe pas de faire du nu, et qu’en plus si j’avais à le faire … C’est avec un adulte, un homme ou une femme qu’à le corps pour, pas un bébé. Je ne voudrais pas avoir de problème avec la justice pour pédophilie. Il peut toujours demander l’autorisation parentale si il souhaite vraiment le faire. Je connais de très bon photographe spécialisé en photo de nouveau-né. » Têtes qui se tournent vers le jeune garçons, la classe entière le dévisage et se met à rire de lui, crier qu’il s’est pris un vent comme un looser. Elle le voit s’enfoncer dans sa chaise, elle le voit perdre son air trop fière et elle roule des yeux. Pauvre petit canard, ouin-ouin on va pleurer pour lui tiens. « Nouvelle question ? »  Lâche-t-elle assez fort pour que la classe regagne son calme, qu’ils se reconcentrent sur eux plutôt que sur la risée de la classe actuel.

Puisque Landon ne fait guère plus de miracle qu’elle lorsqu’il interroge les jeunes gens elle se permet de reprendre en main l’intervention. Elle s’approche, elle revient au côté de son ex. Elle s’appuie nonchalamment contre le bureau et pointe du doigt une fille du deuxième rang. Jeune fille qui semble calme, posée dans sa tête contrairement à celle du premier rang. « Maintenant que vous semblez avoir atteints vos objectifs professionnel c’est quoi la suite … ? »  

Eden fronce les sourcils, ne comprenant pas trop ce qu’elle doit répondre mais elle hausse les épaules lâchant sans grand intérêt. « Je suppose que la suite logique c’est de vivre pleinement l’instant présent sans se focaliser que sur ma carrière car elle est déjà pas mal entamée ? Hmm… peut-être qu’il faut penser à s’acheter une maison … Aller voyager … je ne sais pas trop en fait, c’est compliqué. A 26 ans il est peut-être temps de se poser aussi ? Mais ça, c’est différent pour chacun d’entre nous. Certains le sont déjà depuis longtemps, puis d’autres n’ont toujours pas trouver la personne. Mais vous avez le temps vous, ne pensez pas à ça. C’est du gâchis. Pensez déjà à vos études, la carrière qui va vous suivre tout au long de votre vie avant de parler grosse voiture, grosse maison et compagnie. » Elle tourne la tête vers Landon, curieuse de savoir ce qu’il en pense lui de l’avenir. Maintenant qu’il est en âge, qu’il a vieillit c’est quoi la suite des objectifs ? Toujours rester buter sur sa carrière jusqu’à que mort s’en suive ?

Réponse cohérente, fidèle à ce qu’il véhicule depuis le début. Elle hoche la tête et le regarde un instant. Deux secondes perdues dans le bleu de ses yeux. Deux secondes qu’ils prennent pour eux. Juste deux petites secondes sans penser à tous ces jeunes qui les regardent d’un air niais, bêtes. Qui commencent vraiment à se demander si il n’y a pas un truc entre les deux intervenants. Ils sont étranges ; ils sont bizarres. Ils ont l’air toujours sous pression dès qu’ils se regardent…. Tant de questions dans la tête de ces gosses, tant de réponses qu’ils ignorent et dont ils n’auront jamais d’explications. Deux secondes qui sont enfin écoulés, temps impartie qu’ils s’étaient donnés qu’on leur coupe direct l’herbe sous le pieds. « Monsieur James c’est vrai vous allez faire le calendrier des dieux du stade ? Ils disent ça sur Google Actu ? » Voix nasillarde, voix d'une petite blonde platine au premier rang qui tend son téléphone portable pour appuyer ses dires. Eden arque les sourcils, Eden plisse la tête sur le côté et croise les bras sous sa poitrine en regardant l'article sous son nez puis son ex petit-ami tour à tour, d'un air intriguée. Elle est choquée, elle a même envie de rire en entendant un tel truc. « C’est vrai ? Y’a vraiment de tel rumeur sur google ? »


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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyJeu 6 Juil - 16:33

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Cruelles palabres qui échappent à sa voisine, venin qui s’écoule d’entre ses lippes. Elle n’aura pas tenu longtemps dans cette étrange attitude pacifique, dans cette sérénité suspecte, avant de recommencer à libérer des répliques assassines. Ça picote, elle abuse la demoiselle. Comme s’il n’était pas déjà suffisamment dans le mal de se trouver entre ces murs où ils ont tout vécu. De sentir sa présence à moins d’un mètre de lui. D’entendre les paroles pleines de sous-entendus qu’elle prononce depuis tout à l’heure, trop implicites pour qu’il sache si elle parle de lui ou pas, si ce qu’elle dit à son potentiel égard est positif ou négatif. Il est perdu Landon, sans cesse occupé à démêler le vrai du faux, à tenter de ne pas se faire de fausses idées, et il faut en plus qu’il encaisse ses piques ? No way. Il la déteste de lâcher ce genre de choses alors même qu’ils sont en public, face à une assemblée d’élèves de plus en plus insupportables à chaque instant. Il la déteste car elle fait preuve de lâcheté et que s’il est bien une chose qu’il ne supporte pas c’est le manque de courage, elle sait pertinemment qu’il ne pourra se permettre de lui rétorquer le moindre mot devant leur petit auditoire. Et ça le rend dingue, ça. Ça le rend dingue de devoir rester silencieux, de ne pas pouvoir lui rétorquer que non, il n’a pas sacrifié tant que ça tout compte fait, qu’il ne regrette pas ses choix. Mais peut-être que c’est mieux ainsi, au final. Peut-être vaut-il mieux qu’il ne puisse prononcer des paroles qu’il ne pense pas, des paroles uniquement là pour la blesser un peu plus encore, lui rendre la monnaie de sa pièce pour avoir osé lui dire des choses pareilles. Parce que la vérité, c’est qu’il n’en pense pas un mot, de tout ceci. Si sur le papier il mène une vie de rêve, constellée de réussite, il sait, lui, mieux que quiconque, qu’un monumental échec vient assombrir le tableau, l’empêchant de savourer pleinement son succès. Une erreur de parcours commise sept ans plus tôt, une erreur si importante qu’elle surpasse toutes ses réussites combinées les unes aux autres. Cela ne tenait à rien, en plus. C’est bien ça le pire. Il lui aurait suffi de la retenir, d’avoir un sens des priorités cohérent, pour une fois, de faire l’effort d’arrêter l’armée comme elle avait fait l’effort, deux ans durant, de supporter son absence. Il lui aurait suffi de ne pas lui tourner le dos lorsqu’elle s’était livrée à lui, que des larmes avaient noyé ces prunelles azurées qu’il s’était promis de ne jamais faire pleurer. Mais il ne l’a pas fait, et c’est là le grand drame de son existence. Il aura beau se répéter jusqu’à sa mort qu’il a pris la bonne décision, que s’il l’avait écoutée, ils seraient restés ensemble mais qu’il aurait été profondément malheureux, il a beau se répéter que s’ils n’avaient pas rompu, ils seraient aujourd’hui un couple désabusé, que les regrets de ne pas avoir suivi la voie qu’il souhaitait auraient fait de lui un homme aigri, il sait au fond, très profondément enfoui, qu’il a merdé ce jour-là. Qu’il n’a pas fait ce qu’il fallait. Ce que l’on attendait de lui. Chaque journée qui s’écoule se fait une joie de le rappeler à son bon souvenir, lorsqu’il aperçoit une silhouette aux cheveux platine ou qu’il entend des inconnus mentionner une parfaite étrangère au même nom qu’elle.

Les minutes s’écoulent, l’échange se poursuit, les questions s’enchaînent. Et bien vite, le voilà amené à parler de son accident sur le terrain. De ce jour tragique qui a coûté la vie à plusieurs de ses camarades. C’est difficile pour lui de relater ces minutes d’horreurs, les jours d’insupportable affaiblissement qui s’en sont suivis. Il n’aime pas plonger trop profondément dans ses souvenirs, Landon. Ça le fait dérailler à chaque fois, il se voit emporté loin de la réalité, bien incapable de prêter la moindre attention à ce qui se déroule devant lui, aux paroles qu’il prononce. Esprit qui se voit envahi par le goût de la poussière dans sa bouche, par l’odeur du sang, le bruit des balles fendant l’air par rafales, les cris des civils. La chute. Son derrière qui vient heurter le sol aride, bientôt rejoint par son dos puis par son crâne. La douleur. Souffrance qui se répand d’abord dans son corps entier, pour peu à peu se concentrer vers son torse. La sensation du sang chaud venant souiller son uniforme. Le soleil brûlant qui tape sur son visage, le couvrant d’un mince filet de sueur qui vient se mêler à la terre et à la crasse. Le visage inquiet de l’infirmière penchée sur lui, l’incapacité tout aussi déconcertante qu’intolérable de bouger le moindre de ses membres. C’est à peine s’il pouvait mouvoir ses lèvres, libérer le moindre son de sa gorge.

Il est transporté en Lybie le garçon, transporté trois ans plus tôt, lorsqu’il était plus jeune, que ses cheveux étaient plus courts et qu’il était toujours rasé de près, que son visage était un peu plus rond, son corps un peu moins musclé, qu’un tatouage seulement ornait son corps et qu’une nouvelle cicatrice venait à l’instant de marquer à jamais sa peau. Force des souvenirs telle qu’il oublie le temps d’un instant qu’il se trouve dans une salle de classe, devant une assemblée de jeunes. À côté d’Eden. Eden dont il ne sent même pas le regard peser sur lui. Eden dont il ne perçoit même pas le malaise, horreur dans le cœur de la demoiselle qui glisse sur lui comme l’eau sur les plumes d’un canard.

Murmures, cris étouffés des élèves qui parviennent à le ramener à l’instant présent. Il en rit, tente de les rassurer tant bien que mal, se sentant coupable de les voir se mettre dans tous leurs états. Il pointe sa cicatrice, pince les lèvres en l’effleurant, ressentant ce picotement désagréable propre aux plaies encore un peu trop récentes, un peu trop profondes, couplées au traumatisme qu’implique de telles blessures. Enfin il tourne la tête vers Eden. Se souvenant tout juste de sa présence. Lui qui s’était toujours demandé si son ex-petite amie avait été mise au courant de ses mésaventures, un simple coup d’œil dans sa direction lui apporte la réponse tant attendue. Non. Clairement pas. Elle est en état de choc, c’est flagrant. À la manière dont elle le regarde. À son teint plus blafard que jamais, ayant perdu l’habituelle teinte rosée de ses pommettes. À ses doigts qu’il voit trembler sensiblement. Il la voit. Il la voit sans la regarder, encore à moitié plongé dans le passé, dans ces souvenirs trop lourds pour un seul homme. Il ne parvient pas à prendre pleinement conscience de l’état de souffrance actuelle de sa voisine, et puis il a déjà repris son récit là où il l’avait arrêté, et les murmures de son auditoire le pressent de poursuivre, de ne pas s’arrêter en si bon chemin. Alors il continue son récit, détourne les yeux loin d’Eden. Il parle, les yeux rivés vers le sol, entend les talons de la demoiselle résonner sur le sol, n’ose pas relever le regard vers elle. C’est plus simple de les éviter, elle et ses prunelles brisées. C’est plus simple de fuir loin du bordel qu’il a créé, d’ignorer l’effondrement qu’il a suscité.

Il parle, il parle encore et toujours, véritable moulin à paroles dès lors qu’il s’agit de parler de lui. Il parle et enfin ses yeux se permettent un écart, se permettent de quitter leur sol bien-aimé pour se relever vers Eden. Il la cherche du regard la demoiselle, et ne met pas longtemps à repérer la fameuse chevelure claire qui hante ses pensées depuis des années. Il la trouve réfugiée au fin fond de la salle, comme si elle avait tenté de mettre autant de distance que possible entre elle et lui. Il la voit, la regarde enfin. Elle, voutée sur son bureau, le visage toujours aussi blême, les yeux rougis, les mains fermement agrippées à la petite table. Elle a l’air au bord du malaise la pauvre gamine, encore plus mal que lui.

Il ne voulait pas qu’elle l’apprenne, putain. Pas comme ça. Pas en public, là où elle ne pourrait se prononcer. Extérioriser. Merde, mais à quoi pensait-il ? À lui, tout simplement. À lui avant tout le monde, comme il l’a toujours fait, pensant avant tout à répondre à la question qu’on lui adressait, avant même de considérer les conséquences que sa réponse pourrait avoir sur la femme qu’il avait aimée, fut un temps. Et maintenant il s’en veut, bien évidemment. Il s’en veut après coup, une fois que le mal est fait. Il voudrait bien pouvoir remonter quelques minutes en arrière, inventer une réponse montée de toutes pièces, prononcer des paroles qui n’achèveraient pas Eden comme celles qu’il vient de libérer. Mais c’est impossible. De la même manière qu’il ne peut se transporter à ce jour où il a reçu cette balle en plein torse, il ne peut effacer ses mots. On ne peut revenir sur le passé, c’est un fait tristement indéniable. Il se sent mal Landon, cent fois plus mal encore en voyant l’état dans lequel il a mis la gamine. Il se sent mal car impuissant. Il aimerait pouvoir faire quelque chose, un geste dans sa direction, n’importe quoi pour la rassurer, tenter d’absorber un peu de sa douleur en la serrant assez fort dans ses bras ; mais pour tout un tas de raisons évidentes, il ne peut se le permettre. Seule lui reste la possibilité de la regarder, impuissant. Inutile.

C’est toujours elle qu’il regarde lorsqu’il commence à parler de ses espoirs déçus, enterré au fin fond de son lit d’hôpital, sous les draps rêches. Durant les premiers mots seulement, car bien vite, il baisse les yeux, reporte son attention sur le sol vaguement crasseux. Il refuse de croiser ses prunelles rougies, brisées ; il ne se sent pas de soutenir pareil regard. Mais il a beau ne plus l’avoir sous les yeux, son image, son expression demeurent parfaitement encrées dans son cortex. Et ce sont elles qui le poussent à s’interrompre, à arrêter là son récit. Ça suffit. T’as fait assez de mal comme ça, Landon.

Iris qui restent soigneusement fixés au sol comme s’il s’agissait là d’une œuvre d’art passionnante. Iris butés vers le bas tandis qu’il entend de nouveau les hauts talons de la demoiselle résonner dans la salle, se rapprochant à chaque instant. Ne la regarde pas, Landon. Il s’attend à les entendre se rapprocher encore et encore, jusqu’à ce que le son soit assez fort pour qu’il puisse en déduire qu’elle a repris sa place à ses côtés ; mais à sa grande surprise, il ne s’approche que pour mieux s’éloigner, et bien vite le bruit recommence à faiblir, lui indiquant qu’elle s’est logée derrière lui. Tiens donc. Mais comment pourrait-il l’en blâmer ? Vu l’état qu’elle affichait deux minutes plus tôt, il est même étonné qu’elle soit parvenue à marcher sur ses échasses sans s’étaler de tout son long.

Question suivante qui insuffle un peu de légèreté à l’échange, si l’on veut. Il serait presque soulagé d’entendre ces paroles franchir les lèvres de l’adolescent. Au moins cela permet-il de tourner la page de la guerre, de revenir sur un terrain un peu plus tranquille. Ouais, il est soulagé, ne se doute pas un instant que cela peut agacer la jeune femme déjà assez mal comme ça. Il s’autorise enfin à se tourner vers elle, s’assurant par la même qu’il avait vu juste et qu’elle était bel et bien allée se réfugier contre le tableau noir, et la regarde en arquant les sourcils. Expression irritée qu’elle lui renvoie, il ne saisit pas d’où lui vient cette soudaine hargne à son égard, lui qui tentait simplement de se montrer amical. Un peu perdu, il tourne le visage dans la direction opposée, reporte son attention sur ces élèves manifestement stupides mais au moins un peu plus avenants. Dans l’attente de la réponse d’Eden. Non pas que ça l’intéresse particulièrement de savoir si elle photographie des corps nus ou des corbeilles de fruits, mais bon… Il doit tout de même avouer être soulagé d’apprendre qu’elle ne passe pas des heures à capturer les silhouettes d’hommes dénudés sous toutes les coutures. Putain, mais c’est quoi son problème à la fin ? Ça fait sept ans, sept foutues années qu’ils ne sont plus ensemble. Il serait temps qu’il se mette ça dans la tête, qu’il se fasse à l’idée.

Sourcils qui se haussent une nouvelle fois à l’entente de la réponse assassine de sa collègue du jour, main qui se porte instinctivement à sa bouche pour tenter de dissimuler le sourire amusé qui se peint sur ses lèvres. C’est bien la Eden qu’il connaît, ça… La Eden avec laquelle il a toujours détesté s’engueuler, car elle a au moins autant de répartie que lui, et que ça le fait chier de se voir confronté à ce qu’il inflige lui-même aux autres. Salve de paroles dignes des plus grands Rap Contenders, réplique qu’il aurait volontiers salué d’un applaudissement admiratif si la situation avait été différente, si sa condition d’adultes face à une troupe de lycéens ne lui imposait pas de devoir montrer un certain exemple, faire preuve d’un minimum de calme. Contrairement à eux, qui semblent tout droit évadés du zoo.

Il se mord la joue pour ne pas rire, tâche rendue d’autant plus difficile par les moqueries et éclats de rire qui fusent dans toute la classe, par la vision de son ennemi de la journée ramassé sur son siège. Il se tourne une nouvelle fois vers Eden, sans grand espoir de la trouver un peu plus aimable que tout à l’heure, lui adresse un discret pouce en l’air approbateur. Parce que peu importe combien elle peut être en rogne contre lui – sans qu’il sache pourquoi, mais passons – c’était typiquement le genre d’intervention qui ne pouvait être ignoré. C’aurait limite été blasphématoire que de se permettre de ne pas relever.

Au même moment, elle quitte enfin son cher tableau, revient à ses côtés. Nouvelle question dont la réponse lui vient presque instantanément pour une fois, il laisse pourtant Eden répondre en premier. Honneur aux dames. C’est avec un détachement surprenant qu’elle évoque les années à venir, la nécessité de se poser peut-être, paroles qui l’étonnent venant de l’oisillon avide de liberté qu’elle lui a toujours semblé être. Et en même temps, c’est cohérent. Ils sont tous deux arrivés à un âge où la plupart de leurs amis commencent à se construire une vie véritable, à se marier, devenir propriétaires, procréer. Ils ont vieilli, tous les deux. Sept années se sont écoulées depuis la dernière fois qu’il a eu une place à part entière dans sa vie, et il oublie toujours que, tout comme lui, elle a changé. Évolué. L’oisillon est devenu oiseau ; probablement veut-il aujourd’hui construire son propre nid. Réponse bien vite expédiée, il sent de nouveau le regard d’Eden peser sur lui ; c’est à son tour d’apporter sa vision des choses.

- Eh bien, pour être honnête avec toi, je n’ai pas pleinement atteint mes objectifs. Alors oui, j’ai intégré l’équipe de la ville, et c’est déjà énorme d’appartenir à une équipe officielle du pays ! Mais je suis une personne très ambitieuse, depuis toujours, et je ne serais pleinement satisfait que lorsque j’aurais atteint le plus haut niveau dans mon domaine. Le plus haut niveau du plus haut niveau si tu veux, car jouer dans une équipe de ce rang peut déjà être considéré comme le niveau maximal. Du coup, j’aimerais vraiment être promu au poste de quarterback dans mon équipe actuelle, ce serait déjà une belle réussite. Et puis, dans la mesure du possible, intégrer l’équipe nationale ? C’est mettre la barre très haut que de désirer ça, je le sais, mais c’est le genre de défi qui ne me fait pas peur. Au contraire, je pars du principe que plus on voit grand, plus on est amené à se dépasser ! Et au-delà de la carrière… Je rejoins un peu Eden sur le fait de se poser. Vous êtes encore jeunes, vous avez encore toute votre vie devant vous, mais vous verrez que lorsque l’on commence à approcher de la trentaine, on ressent de plus en plus le besoin de se bâtir une vie équilibrée. Sur laquelle on pourra compter lorsque l’on n’aura plus sa carrière. Vous savez, la belle maison, les gamins, l’amour…

Il lève les yeux au ciel en prononçant ces derniers mots, preuve du peu d’intérêt qu’il porte à ces notions qu’il vient pourtant de présenter comme appartenant à ses projets. Mais en réalité, il n’est même pas sûr de vouloir de cette vie. Rencontrer une fille qui lui semblera immanquablement plus fade que ce qu’il a connu, sortir avec elle, lui passer la bague au doigt, lui faire un premier enfant, investir dans une belle maison, et refaire deux ou trois gosses. C’est ce que la pression sociale pourrait lui imposer. Mais lui, il s’en fout un peu de tout ça. Sa carrière a toujours été l’ultime priorité de sa vie, encore aujourd’hui. Alors, à moins de parvenir à réparer les pots cassés, il s’en fout pas mal de finir seul. Qu’il ne lui reste plus rien que son chien et ses économies, une fois à la retraite.

Il tourne la tête vers Eden juste après avoir prononcé ce dernier mot, spontanément, comme une évidence. Sans réaliser la charge symbolique de ces paroles et de ce geste combiné, sans même avoir conscience que cela ne fera probablement que relancer de plus belle les rumeurs qui circulent dans les rangs depuis leur entrée dans la salle. Prunelles d’azur qui viennent à la rencontre des siennes, court instant que s’accordent les anciens amants. Regard dans lequel il se perd, dans lequel il s’est trop souvent perdu par le passé, regard qui n’a pas bougé d’un millimètre. C’est toujours la même teinte à n'en point douter, le même bleu légèrement grisé, cerclé d’un mince pourtour plus foncé. Seul élément de sa personne qui n’a pu changer, même infimement, avec le temps. C’est rassurant pour lui de constater cela, et le temps de cet instant, il oublie la classe, il oublie les élèves, il oublie cette foutue intervention qui commence franchement à s’éterniser. Seule demeure Eden. Eden et ces putains de beaux yeux, cette putain d’intensité dans le regard qu’il n’a su retrouver chez nulle autre.

Nouvelle question, mots qui fusent et qui viennent rompre la magie avec fracas. Fin de l’instant de félicité. Il cligne des yeux, tourne vivement la tête vers les élèves, fouille la foule du regard à la recherche de la malotrue qui a eu le toupet de les interrompre, avec la ferme intention de l’envoyer balader. Et puis il entend la question, et il se calme instantanément. Paroles qui le prennent de court, qui le surprendraient presque. Ce n’est pas la nouvelle qui lui fait cet effet, loin de là, mais le fait qu’une des gamines supposées leur poser des questions pertinentes lui ai demandé cela. Soupir qu’il laisse échapper, n’accordant pas même un regard à l’écran du téléphone, fâché d’apprendre que même les médias se mettent à s’intéresser à autre chose qu’à ses performances sur le terrain.

- Oui, c’est la vérité. C’est dans le contrat, tout joueur appartenant aux clubs officiels est susceptible d’être appelé à figurer sur ce calendrier. Pour l’édition de l’an dernier, on ne me l’a pas demandé car je venais à peine d’intégrer l’équipe à ce moment-là, mais cette année c’est le cas, je l’ai appris tout récemment d’ailleurs. En tout cas mademoiselle, je suis ravi d’apprendre que nos interventions t’intéressent au point que tu ne trouves rien de mieux à faire que de nous googler. Tu peux partir tu sais, j’voudrais surtout pas te retenir ici alors que t’as de toute évidence mieux à faire.

Signe de tête qu’il adresse vers la porte de la salle, haussement de sourcils en direction de la pauvre gamine qui vire à l’écarlate, fourrant maladroitement son portable dans son sac. Il pousse son coup de gueule pour pas grand-chose Landon, il le sait, peut-être même pour rien, mais cette question, c’était la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Elle prend pour tout le monde, la petite blonde. Elle prend pour le petit con qui lui donne des envies de meurtre depuis son entrée en classe. Elle prend pour toutes les questions stupides qu’ils ont reçues à la pelle. Elle prend pour le fait que de toute évidence, ces sales gosses sont plus intéressés par leur vie privée que par les carrières dont ils sont venus parler. Mais tant pis. Elle n’avait qu’à se taire, si c’était pour l’interroger sur un sujet pareil.

Il tourne la tête vers Eden, voit bien que toute cette situation l’amuse la diablesse, qu’elle a peut-être bien envie de rire, tant qu’à faire. Expression faciale qui l’agace un peu plus encore, il reporte son attention sur la classe.

- Bon, cela fait un moment qu’on vous retient ici, donc on va prendre trois dernières questions et vous laisser filer. Oh, et s’il vous plaît, des questions pertinentes. N’oubliez pas la raison première de notre présence ici.

Quelques mains se lèvent timidement, les élèves semblant comprendre qu’il serait peut-être temps d’arrêter les bêtises, et il en choisit un au hasard, n’ayant même plus la patience de chercher à repérer l’élève le moins problématique. Coup de chance, la gamine du troisième rang sur laquelle s’est porté son choix semble relativement sensée.

- Si vous deviez donner la principale qualité et le principal défaut de votre métier, quels seraient-ils ?

Tête que Landon tourne spontanément vers Eden, regard qui rencontre le sien. De toute évidence, elle est tout aussi désarçonnée que lui par la question. Exercice complexe que de devoir donner une réponse aussi tranchée, exercice qui perd un peu le jeune homme. Il a peur de trop se précipiter, de donner une réponse qu’il regrettera sitôt la bouche ouverte, se disant qu’après réflexion, il aurait été plus pertinent de citer ce point-ci plutôt que celui qu’il avait choisi. Mais, voyant que sa voisine semble aussi peu disposée que lui à prendre la parole, il se jette à l’eau, passant une main dans ses cheveux dans un geste un peu embarrassé.

- Eh bien… C’est une question compliquée que tu nous poses là ! Je vais commencer par l’armée. Le souci principal de cette carrière, c’est bien évidemment le risque. Le fait que l’on peut y laisser sa vie, y mourir très jeune. Trop jeune. Et le plus gros avantage… Je dirais que ce sont les valeurs qu’on nous y inculque. On en ressort grandi, transformé. Meilleur, je dirais même. On oublie le petit confort qu’on a toujours connu, ça remet vraiment bien les choses à leur place. Maintenant, pour le football… J’suis sûr que vous vous attendez à ce que je vous dise que le meilleur truc, c’est le salaire qu’on perçoit, mais même pas. Ça reste très personnel, mais comme je suis passionné, eh bien je dirais que c’est le simple fait de pouvoir jouer au foot, pouvoir se dépenser sur le terrain, se défouler un coup. C’est vraiment libérateur, le temps d’un match, on peut oublier tout ce qui va de travers et simplement se concentrer sur le jeu, l’enjeu, la victoire, la sensation des muscles qui s’étirent pendant les quelques heures de match. Et l’inconvénient… La fatigue engendrée, je pense. Déjà, le pays est grand, donc il suffit d’aller jouer un match sur la côte ouest pour être jet-laggé. On fait beaucoup de déplacements, on ne joue pas tous les matchs à domicile, donc forcément… Faut que le corps tienne le coup. Et au-delà de ça, on fait énormément de sport, on s’entraîne tous les jours, le matin principalement, donc il n’est pas rare d’être claqué dès le début d’après-midi. C’est un rythme à tenir, auquel il faut se faire !

Il se tourne vers Eden, curieux de connaître sa réponse. Ça l’a un peu calmé de répondre à une question intelligente pour une fois, il se sent un peu mieux. Mots qu’il écoute s’échapper de la bouche de la jeune femme avec attention, prochaine question bien vite arrivée. La jeune femme interroge un garçon bouclé qui lui adresse sa question, commençant même à raconter sa vie sans que Landon comprenne trop pourquoi.

- Alors voilà, moi j’suis passionné de photo depuis des années, mais pour l’instant j’me débrouille juste avec un vieil appareil que j’avais reçu à Noël quand j’étais plus petit. C’est un p’tit numérique pas terrible, si vous voulez. Et moi j’ai beau essayer, essayer encore, j’suis pas satisfait des clichés que j’obtiens. Donc j’sais pas si j’suis juste nul dans ce domaine ou si ça vient du matériel qui est pas adapté, mais j’aurais voulu savoir si vous aviez des bons modèles d’appareils à recommander, parce que vous avez l’air de bien vous y connaître, puis je veux pas acheter n’importe quoi. Oh, et est-ce que vous faites des stages ? Genre, vous prendriez un élève pour lui apprendre les rudiments de la photo ? Parce que moi j’adore ça mais j’ai jamais été formé, j’sais pas si je m’y prends correctement.

Le gamin hausse les épaules, la réponse d’Eden ne se fait pas attendre. Réponse qui intéresse moins Landon que les précédentes, on retombe sur des termes très techniques, le genre de choses qui ont toujours été aussi claires que du chinois à ses yeux. Une fois qu’elle a apporté sa réponse au garçon, Landon s’adresse de nouveau à la classe, leur rappelle qu’il s’agit de la dernière question, qu’il attend d’eux de leur demander quelque chose de constructif. Bien que les jeunes filles du premier rang n’aient pas fait leurs preuves jusqu’à présent, il décide de leur accorder une dernière chance en les voyant lever la main avec détermination. Il en interroge une, l’une des rares qui n’a pas encore parlé.

- Monsieur James, comme vous avez confirmé que vous poseriez pour le calendrier des dieux du stade, j’aurais voulu savoir si vous connaissiez déjà les dates du shooting ? Et s’il était possible de venir y assister ? En tant que spectatrice, supportrice même, comme pendant vos matchs !

C’en est trop. Il écarquille sensiblement les yeux, fatigué de ces gamines et, sans lui accorder un regard de plus, répond en l’ignorant superbement.

- Bien, ce sera tout pour nous. Merci à vous pour votre patience, pour votre écoute, et merci à celles et ceux qui ont osé lever la main pour nous poser des questions qui ont fait avancer les choses. Je vous souhaite bon courage pour la suite, pour vos choix d’orientation, c’est rarement une tâche facile mais on en ressort tous vivants, alors ne vous inquiétez pas trop ! Et puis, vous avez encore une petite année devant vous pour y réfléchir. Oh, et n’oubliez pas, si vous avez la moindre interrogation, n’hésitez pas à me constater.

Il pointe du doigt le tableau dans son dos, où il a inscrit ses coordonnées deux heures plus tôt, espérant secrètement qu’aucune de ces gamines en chaleur ne viendra le harceler. Laissant Eden faire ses adieux à leurs élèves de quelques heures, il passe une main sur son visage, savourant la sensation satisfaisante d’en avoir terminé avec ce joyeux bordel. Ils allaient enfin être débarrassés de ces gosses de toute évidence sous substance. L’échange prenait fin, et avec lui cet horrible après-midi d’orientation. Il allait enfin pouvoir rentrer chez lui, reprendre sa vie là où il l’a laissé le temps de se replonger dans ses souvenirs deux heures durant. Et tenter de tout oublier.
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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyVen 7 Juil - 4:17

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Curiosité maladive, curiosité qui la pousse à s’avancer très rapidement jusqu’à la jeune fille qui tend son téléphone comme preuve. Elle veut voir d’elle-même ce qui est dit dans l’article. Elle est bien trop intéressée Eden, elle se montre un peu trop commère même. Mais elle veut le voir de ses propres yeux. Elle lit, elle lit rapidement le gros titre. « Landon James l’élément le plus sexy de son équipe ? » Elle relève les yeux vers son camarade. Elle le regarde en souriant, se moquant gentiment de lui alors qu’il a l’air piqué à vif soudainement. Pas de quoi être énervé pourtant. C’est flatteur quand même d’être choisi pour un des douze mois de l’année de ce prestigieux calendrier quand on sait le nombre d’équipe qu’il y a aux Etats-Unis. Elle sourit Eden, elle regarde son ex petit-ami avec l’air blasé qui ne le quitte plus en se disant que dans l’un des plus grands malheur de sa vie, elle pourra se consoler en se disant qu’elle était sortie avec un des garçons les plus sexy de l’année. Ou de tous les temps, enfin. Ça, c’est ce qu’elle pense secrètement. Pensée qui pince le cœur et qu’elle gardera toujours au plus profond d’elle-même et rien que pour elle maintenant qu’ils ne seront plus jamais ensemble. Une fois avoir menée sa petite enquête, vue d’elle-même que c’était réelle. Elle rend l’appareil à sa propriétaire en lui souriant, la remerciant doucement alors que Landon est en train de répondre de façon sarcastique à celle-ci.

Aïe. Ça pique. Il ne rigole pas Landon lorsqu’il s’agit de montrer ô combien il est fatigué, ô combien ça l’énerve ce genre de question. Il ne se leurre pas sur les mots le garçon. Elle le regarde, elle le voit lâcher de son air dédaigneux qu’il est ravi de comprendre que la demoiselle face à lui préfère se laisser tenter par ses navigations farfelues sur le web plutôt qu’écouter ce que lui, ou elle-même ont à dire et apporter à l’ensemble de la classe. Elle se mord la lèvre inférieur Eden. Elle a une envie irrépressible de rire la blonde, elle cache son grand sourire en mettant une main devant sa bouche histoire de ne pas trop montrer que la situation est quand bien même hilarante. Elle regarde la jeune fille s’en prendre plein la tronche. Elle la voit baisser la tête et devenir rouge comme une tomate. La pauvre …  Il lui fait alors comprendre qu’elle peut quitter la salle et Eden hausse les sourcils, tourne machinalement sa tête vers lui d’un air bien trop étonné.  Elle en perd même son sourire la belle. Elle n’est pas d’accord avec cette décision, pas d’accord pour qu’il aille aussi fort avec celle-ci alors à l’aide de son pied, elle donne un léger coup dans la jambe de son ex pour lui remettre les idées en place tout en fronçant des sourcils sous son regard froid, au loin. Mais pas le temps de dire un mot que la demoiselle met son téléphone dans son sac et sort avec précipitation mille et une excuse à l’ancien soldat et Eden détend son faciès en colère, elle croise les bras sous sa poitrine se met à rire pour détendre l’atmosphère.

Landon vient en quelques secondes de perdre son statut d’intervenant cool. Dommage, nice try buddy. Eden devient la gentille, l’intervenante la plus cool en tête des sondages fictifs qu’elle s’imagine.

Une nouvelle fois, Landon demande aux élèves de bien vouloir poser des questions censées. Des questions qui ont un but avec l’intervention et non pas sur leurs vies privées. Son ton est sec, ses muscles bandées. Il a l’air presque menaçant le gentil garçon. Il montre qu’il n’a pas envie de se répéter une ultime et dernière fois et son air autoritaire calme directement la classe. Mais même avec ça, elle n’y croit presque plus Eden, même en voyant les infimes mains levées devant elle des élèves les plus courageux, elle s’attend au pire. Elle s’imagine déjà soupirer, elle s’imagine déjà entendre la question ultime. La question gênante. Celle qui rendra sa bouche sèche, qui arrêtera son cœur deux secondes pour finalement répondre que non, ils ne sont pas un couple. Mais elle est mauvaise langue Eden, elle est pessimiste et c’est bien triste de l’être à vingt-six ans. La question arrive et elle n’a rien à voir avec eux, ni avec leurs vies privées et c’est tout aussi dérangeant finalement car elle la trouve bien compliquée cette question. Elle ne sait pas quoi y répondre.

Une qualité et un défaut … ça parait facile et pourtant l’exercice est bel et bien difficile pour Eden. Y’a tellement à dire, qu’elle ne sait quoi choisir. Une profession ne se limite pas qu’à deux mots merde. Faut bien les choisir du coup. Histoire d’être sincère avec les élèves mais aussi ne pas les effrayer sur le sujet. C’est compliqué d’avoir du tact avec ces gosses. Du tact elle en manque cruellement Eden. Que ce soit dans la vie de tous les jours, dans ses relations intime ou même son travail. Elle a du mal avec cette notion car elle est trop entière la blonde. Elle fait pas dans la demi-mesure, soit elle dit tout, soit elle ne dit rien. Et c’est compliqué pour elle de se montrer sincère sans pour autant paraitre accablante où paraitre fausse. Alors elle écoute attentivement Landon, elle le regarde donner une explication parfaitement concevable des bons et mauvais points de ses deux profession et elle essaie d’imaginer dans sa tête un discours approximativement pareil avec son métier à elle. Elle est pompeuse Eden, elle a des remords d’avance d’agir comme une petite recopieuse de bas-étages mais sans quoi, elle ne saura répondre. Elle va balbutier, bégayer devant tout le monde et paraitre ridicule et ça il en est hors de question pour elle. Pas à cinq minutes de la fin de l’intervention.

Subtilement, elle passe ses mains devenue moite sur le bas de sa robe, elle cherche encore ses mots alors que le moment pour elle de se remettre à parler arrive à grand pas. Elle entend son partenaire d’intervention en venir au bout de sa réponse qui fut quand même bien longue et voilà que les yeux sont de nouveau braqués sur elle. Surtout le regard de la demoiselle qui a posé la question. Elle la fixe en clignant des yeux, un sourire niais sur le visage. Angoissante. « Et bien … Moi, comme qualité le point qui me vient directement en tête c’est la diversité du métier. Vous aurez beau prendre en photo un, deux, trois ou même cinq cents mariage et bien, aucun ne se ressemblera. Vous n’aurez jamais le même cliché, les mêmes personnes, les mêmes émotions. Ce n’est jamais la même chose. A chaque fois je ressens un truc différent et ça me fait ça même avec les photos que je prends en pleine nature ; les clichés que je fais dans la rue … Je n’ai jamais deux fois le même rendue. Du coup, je n’ai pas l’impression d’avoir un métier ennuyant personnellement. Et je trouve ça super intéressant de réussir à m’épanouir dans quelque chose que je pratique depuis des années sans m’arrêter. Sinon, en principal défaut … Ce n’est pas compliqué en soi. J’en ai même parlé plus tôt c’est lorsque vous souhaitez vivre des ventes de vos photos dans des galeries d’arts. C’est trop incertain comme moyen de gagner sa vie. Car vous ne savez pas si ça va plaire, si quelqu’un voudra bien l’exposer, l’acheter… Ça fait un peu psychoter. On devient alors incertain de notre propre potentiel quand on essuie les refus, on se dit que ce qu’on fait ce n’est pas très bon puis c’est comme ça jusqu’à que quelqu’un accepte de vous exposez et qu’une autre paie pour votre série de cliché. Et lorsque l’argent tombe, que vous touchez à des grosses sommes vous voulez toujours y regoûter et c’est ainsi de suite. Toujours la même rengaine d’incertitude, de joie … C’est un choix de vie et vous pouvez cumuler ça avec d’autres activités. En gros, y’a quand même toujours moyen de se faire de l’argent. » Phrase qui finit tout doucement dans l’incertitude d’avoir véhiculé le bon message … Laissant la classe dans un état de déprime frôlant la dépression. Certains ont leur tête contre leur table, d’autres baillent … Elle a foutu un sacré blanc Eden et elle s’en mordille l’intérieur de la joue. Elle sent qu’elle a fait pencher la balance du contre bien plus fort que celle du pour.

Incertaine de devoir continuer l’intervention, elle tourne la tête vers Landon ; l’interrogant du regard pour savoir si elle répond encore à une question ou bien si elle doit arrêter le massacre maintenant.  Pour l’encourager il lui pointe de la tête ce gosse au cheveux bouclé, ce garçon qui a l’air d’avoir envie de poser sa question plus que tout au monde alors elle exhausse son vœux au grand damne des autres élèves. « Oui … ? » à peine a-t-elle ouvert la bouche que les jeunes s’agitent. Ils soufflent sans une once de respect devant leur nez. Ils montrent leurs mécontentements, ils n’en peuvent plus d’entendre parler d’art, de guerre, de sport. Ça se voit qu’ils n’attendent qu’une chose et c’est celle de partir loin d’ici. Elle aussi n’a que cette hâte. Elle aussi a envie de rentrer chez elle et souffler un coup dans sa paisible maison au bord de la plage. Les gosses pensent réellement que les professeurs et les intervenants se font une joie d’être ici, de discuter des heures ? Ils pensent qu’ils n’ont que ça à faire ? La réponse est un grand oui. Elle le sait car elle-même l’a pensée un millier de fois lorsqu’elle était à leurs places et qu’elle n’avait qu’une hâte celle de rejoindre son petit-ami pour finir l’après-midi.

Qu’elle idée que de donner la parole à ce jeune homme. Elle s’en mord les doigts Eden. Il ne s’arrête pas, il parle et il parle … Sans relâche. Même elle, elle perd le fil de la question en se perdant dans ses songes. Se demandant ce qu’elle pourrait bien manger ce soir, ce qu’elle regardera comme film à la télévision… Tout est motif pour s’évader loin de cette conversation, de ce jeune homme qui se vidange de tout le vocabulaire qu’il n’a certainement pas pu sortir dans la journée. Après de multiple question cornélienne, lorsqu’elle débarque de nouveau sur la terre ferme la question a enfin prit fin. Elle se permet alors de prendre la parole, d’enchainer sur chacun des points qu’il a énumérés pour ne pas le faire répéter et ne pas rendre fou un peu plus encore les autres jeunes. « Si ton appareil photo actuel a vraiment une résolution pas terrible ça peut effectivement venir de là ton soucis. Si t’es pas satisfait c’est que tu sais au moins reconnaitre que la qualité n’est pas bonne ou qu’il change la vision de ce que toi tu veux obtenir. Je te conseil donc de changer ton matériel, y’a vraiment des trucs pas très cher et qui font bien leur taffe pour débuter. Tu peux même acheter de l’occasion, ça reviendra à un prix moindre et puis c’est que pour t’entrainer, ça sert à rien de mettre des mille et des cents pour l’instant… Plus précisément, je te conseil de noter la référence en matière de Nikon il y a D5300 nu – APS-C , je pense tu peux l’avoir pour un bon prix en occasion et il fait un super job. Sinon, pour le moment j’ai jamais pris de stagiaire car je ne me sens pas l’âme d’une professeur et qu’on m’a jamais demandé à le faire mais c’est pas impossible que je change d’avis. A voir, envoie-moi un mail à l’adresse indiqué sur le tableau et j’y réfléchirais. En attendant, sur internet je pense qu’il y a quand même de quoi apprendre sur le tas, des astuces, des bons conseils commence déjà avec ça ! J’espère avoir répondu le plus complètement possible à ta question en tout cas… » Elle sourit amicalement au garçon, elle s’étonne elle-même d’avoir pu être aussi droite dans son discours et aussi précise et concise dans ce qu’elle racontait. Elle est prête à passer à une autre question lorsque le garçon lui coupe de nouveau la parole sous les cris d’indignation de ses camarades qui soufflent de colère en lui lançant des mauvais regards. Il n’a pas même commencé sa phrase que même une boulette en papier vient se cogner contre sa tête. « Les autres questions tu me les enverras par mail si tu veux ! » Lui dit-elle pour le rassurer et pour faire avancer l’intervention qui commence à réellement saouler tout le monde.

Ultime et dernière question avant la délivrance et c’est Landon qui pointe la jeune fille en face de lui pour qu’elle puisse s’exprimer. Oh tiens, la jolie brune à la grosse poitrine. Celle qui mordillait son crayon en battant des cils au début de l’intervention. Elle l’avait presque oubliée celle-là Eden. Elle ne sait pas pourquoi, mais elle sent la question indiscrète. Elle le voit à cette petite moue de diablesse qu’à la demoiselle. Elle sent qu’elle est prête à mettre son grapin sur son ex et elle attend attentivement la question pour juger si cette fille est une réelle connasse ou non. Bien évidemment ça ne manque pas, la classe est hilare et Eden grince des dents. Elle soupire fortement et roule des yeux. « Que c’est surprenant comme question… » Elle est irritée Eden, fatiguée par l’attitude un peu trop houleuse et audacieuse de cette bande de jeune décérébrée. Elle aimerait lui balancer en pleine gueule à cette jeune qu’elle est tout bonnement ridicule. Qu’elle devrait avoir honte de draguer aussi ouvertement un homme lorsqu’elle n’est même pas encore majeure elle-même. Les lycéennes un peu trop sûres d’elles restaient toujours les mêmes finalement, comme au bon vieux temps ou elle-même fréquenter les bancs de cette classe. Toujours les mêmes schémas qui se reproduisait aeternum vita. Des stéréotypes réducteur : Les sportifs macho ; les filles aguicheuse à souhait. Rien dans la cervelle, tout entre les cuisses. Elles étaient toutes belles celle du premier rang, ça oui. Mais bordel ça ne s’arrêtait qu’à ça, une enveloppe charnelle.

Fort heureusement, Landon ne rentre pas dans le jeu de la gamine et signale que l’intervention est maintenant terminé sans même la regarder, sans même lui laisser le temps d’ajouter un seul mot à sa putain de question inutile. De toute façon, si il ne l’avait pas fait, elle l’aurait fait elle-même Eden. De nature peu patiente elle n’était pas prête à entendre une minute de plus une tel conversation. Alors que Landon fait ses aurevoirs à la classe, Eden se relève. Elle se met droite et époussette sa robe pour en enlever le moindre faux plis qu’elle avait créée à force d’être assise et être un minimum descente pour l’heure des aurevoirs. Le discours du brun maintenant fini, elle sourit poliment, un peu trop heureuse de pouvoir elle aussi partir. « Monsieur James a tout dit, je vous souhaite beaucoup de chance dans vos futurs choix, prenez le temps d’y réfléchir vous avez encore toute une année et n’hésitez pas pour les questions, notez nos mails même sur un bout de papier ça peut toujours servir à l’avenir. Bonne fin d’après-midi à vous ! » Et voilà, l’enfer était terminé, les chaises raclent le sol, les bruits de pas s’affolent jusqu’à la porte et le chahut collectif reprends de plus belle jusqu’à devenir un minime bruits, presque imperceptible à entendre lorsque les gamins de Savannah ont poussé les grandes portes du couloir.

Calme qui fait du bien, soupire satisfait qui s’échappe d’entre ses lippes rosées. La poupée attrape la bouteille d’eau et en vide la quasi-moitié. Elle a beaucoup trop parlé en une après-midi. Tellement qu’elle en a la bouche sèche, les cordes vocales presque enflammée. C’est inhabituel pour elle de tant parlé. Elle s’est habitué au silence que lui procure son métier, au silence qu’elle vit chaque jour en s’étant résignée à vivre une vie de femme solitaire. Elle voit son ex en faire de même, vider sa bouteille avant de la jeter en un parfait tir jusqu’à la poubelle. Elle le regarde faire, sans un mot. Elle le dévisage. Elle le voit s’approcher sensiblement de la porte et elle l’interpelle dans un coup de folie qu’elle regrettera surement plus tard. « Landon ! »  Elle sort alors de la classe, marche rapidement jusqu’à ses côtés avant de poser doucement sa main sur son bras pour l’empêcher de trop avancer. « On pourrait parler juste deux secondes … ? » Elle ne lui laisse pas le choix en fait. Elle le regarde d’un air suppliant, la lèvre inférieur entre les dents. Elle en a besoin elle de cette discussion. Vraiment. Tout de suite, elle a ce besoin ignoble de lui parler maintenant que l’école est finie. Maintenant que plus personne ne les voit et ne suspecte chacun de leurs regards et chacune de leurs palabres.

Elle ne sait pas par où commencer Eden, elle ne sait pas car elle est tout simplement perdue. Toujours autant secouée par bien plus qu’une seule phrase. Elle en a pleins qui lui reviennent en tête même. Elle pense à son discours d’amour, grande maison et tout le blabla qu’il avait servi à la presque fin de l’intervention ; elle pense à la personne qu’il aurait aimé voir en se réveillant à l’hôpital puis elle pense à la balle. Cette balle qu’il s’est quasi prit en plein cœur. Réminiscence de l’heure d’avant qui lui fait du mal, elle lâche alors son bras et s’éloigne d’un pas. « Je… j’suis choquée par tout ce que je viens d’apprendre sur toi tu sais ? J’ai l’impression qu’on m’a carrément caché des trucs et que tout le monde s’est mis d’accord pour que je ne sache rien. C’est impossible qu’avec toutes les connaissances qu’on a en commun personne ne m’ait jamais rien dit à propos de ton retour forcé ici… T’as demandé aux gens de rien me dire … ? » Elle y croit vraiment elle au complot formé derrière elle. Elle l’imagine bien cette théorie, car elle voit bien comme toute sa famille s’est bien permis de ne rien lui dire lorsqu’elle a décidé d’emménager ici sur le fait que Landon vivait aussi ici. Puis elle en veut aussi à Ethan qui l’a vue quelques fois et ne lui a jamais rien dit ; elle en veut à beaucoup de monde et surtout à son ancienne belle famille. Qui se sont bien préservé de l’appeler alors que la mère de Landon disait la considérer comme une fille …

Elle passe une main nerveuse dans sa chevelure soyeuse la poupée, elle est désemparée par la situation ; par cette boule de nerf qui se forme au creux de son estomac en pensant à tout ce qu’elle a ratée, les possibles mensonges et les vérités inavouées. Elle relève les yeux vers lui nerveuse et se met à sourire pour fausser un air décontracté se rendant bien compte qu’elle est ridicule de lui demander ça après tant d’années. Il avait juste dû passer à autre chose le pauvre garçon, n’avait certainement pas envie de voir son ex à ce moment-là. La voilà la vrai raison. « Désolé avec mes questions à la con, j’suis un peu remuée, l’après-midi n’a pas été facile … » Ni pour elle et certainement pas pour lui, lui qui avait dû supporter les élèves, les commères et les humeurs changeantes de son ex.

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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptySam 8 Juil - 12:58

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Ultimes paroles prononcées par Eden, mots qui marquent la fin de l’intervention. Élèves qui s’empressent de quitter la salle dans un brouhaha monstrueux, calme qui se fait peu à peu, à mesure que les garnements s’éloignent dans les couloirs. Du moment où il leur a fait leurs au revoirs, il ne leur accorde plus un regard, se fichant bien de leur renvoyer une bonne image ou non. Il devrait pourtant tenter de se faire bien voir de cette troupe de jeunes ; petite célébrité, il doit faire en sorte d’être populaire auprès des locaux. Mais il l’oublie toujours, ça, car c’est bien le cadet de ses soucis. S’il est footballeur c’est parce qu’il aime la discipline, pas pour les paillettes qu’amène pareille carrière.

Il est agacé, Landon. Agacé, chamboulé, épuisé. Deux pauvres heures qui auront suffi à faire de lui une véritable boule de nerfs, à coup de gamins insupportables et de lieu trop lourdement chargé en souvenirs. Il s’énerve vite, le jeune homme, et il est le premier surpris de la patience dont il a su faire preuve au cours de cette intervention. Il attend donc, en silence. Il attend quoi ? Il n’en sait trop rien, à vrai dire. Probablement que les lycéens se dispersent dans les locaux, que les corridors retrouvent un semblant de tranquillité, qu’il puisse y circuler sans être assailli par les élèves, se faire bousculer en tous sens. Il attend, abandonne ce bureau dont il a fini par s’habituer au contact dans le bas de son dos, pour se diriger vers la fenêtre. Là, il se poste devant la vitre, les bras croisés sur son torse, observe la marée d’adolescents qui se déverse aux abords du lycée. L’heure des vacances approche, et ils le leur ont bien fait comprendre avec leur comportement dénué de toute once de respect. Il reste silencieux Landon, se garde bien de tourner la tête vers Eden qu’il entend s’agiter un peu dans son dos. Il ne se risquera plus à lui adresser un mot, pas aujourd’hui. Il est actuellement dans un état tel qu’il sait que, si elle l’envoie balader, situation plus que probable, il va littéralement exploser. Et il ne veut pas se déchirer une nouvelle fois avec elle. Ne pas lui parler constituera le dernier effort qu’il fera pour arranger les choses entre eux.

Il ferme les yeux un instant, savoure le calme enfin revenu. Seul persiste l’écho étouffé des conversations de quelques élèves, en provenance du couloir. Calme souverain, calme qui fait du bien ; déjà Landon se sent un peu plus apaisé, maintenant qu’il ne baigne plus dans un environnement sonore partagé entre raclements de chaises au sol et conversations incessantes d’élèves surexcités. Il passe une main sur son visage, sur ses traits fatigués, se retourne. Yeux qui tombent sur sa bouteille abandonnée sur le bureau ; il a soif, trop soif. Bouteille dont il s’empare, qu’il vide d’une traite avant de l’envoyer d’un tir dans la corbeille à papier. Le tout en ignorant superbement Eden, qui boit pourtant elle aussi, à un petit mètre de là. Il ne sait que dire. Que faire. Il est mal à l’aise en sa présence, désormais. Mal à l’aise de se trouver en ces lieux à ses côtés alors que tant de choses ont changé, que les choses n’ont même plus rien à voir. Seuls subsistent les murs de ce lycée, et eux deux. Mais le reste, tout le reste a été réduit en cendres. Leur amour, la tendresse qu’ils pouvaient avoir l’un envers l’autre, leurs espoirs naïfs. Il ne veut pas souiller ce bâtiment aussi de leur violence mutuelle, laisser la haine prendre le pas sur leurs souvenirs baignés d’innocences. Il ne veut pas ne plus être capable de passer devant l’établissement scolaire sans revivre la dispute qu’ils y auront connue, comme c’est désormais le cas lorsqu’il longe River Street ou qu’il s’aventure du côté du bar, voisin du dessous du toit qui fut leur quartier général. Il n’ose même plus la regarder. Il ne s’y risquera plus, pas lorsqu’un simple coup d’œil vers son visage de poupée suffit à faire affluer les réminiscences douces-amères, le désir de sentir une nouvelle fois ses lèvres contre les siennes, son corps entre ses bras.

Alors il trace. Profondément déterminé à ne pas lui accorder un regard, à ne pas lui adresser la parole, pas même pour lui dire au revoir. Et tant pis s’il passe pour un goujat. Il aime mieux apparaître comme étant un homme impoli que de prendre le risque de déclencher un nouveau conflit, d’une manière ou d’une autre. Car il ne se fait pas confiance. Bien qu’il se sente un peu moins sur les nerfs que cinq minutes plus tôt, il sait mieux que quiconque combien son état est instable. Comme il peut rapidement perdre le contrôle. Et s’il pouvait éviter de le perdre et que cela retombe sur Eden, ce ne serait pas une mauvaise chose. Bouteille qui atterrit au fond de la corbeille avec un bruit creux, silhouette brune qui disparaît dans l’encadrement de la porte. Voix claire qui résonne dans la salle désormais vide, deux syllabes, un seul nom. Cela suffit à l’arrêter dans son mouvement, alors même qu’il se trouve à peine dans le couloir, trop surpris pour continuer à marcher. Surpris qu’elle l’ait retenu, elle, la gamine sauvage qui fait tout pour le maintenir à distance depuis qu’il l’a retrouvée. Main qu’il sent se poser sur son bras, contact brûlant malgré la barrière de coton de sa manche, poils qu’il sent se hérisser sous l’étoffe. Opalescences qui viennent rencontrer ses traits, qui se posent sur son regard suppliant, sur sa lèvre prisonnière de ses dents, faisant des allers-retours précipités entre les différentes régions de son visage. Des allers-retours paniques. Parce qu’il ne s’attendait pas à ça, Landon. Il ne l’avait pas vu venir, ce soudain engouement à son égard. Lui, il pensait qu’il pourrait simplement tourner les talons et rentrer chez lui, trouver un moyen, n’importe lequel, de tout oublier de cet après-midi désastreux. Et puis il avait fallu qu’elle vienne tout chambouler, comme à son habitude. Comme si elle ne pouvait pas s’empêcher de toujours bousculer ses plans. Il a envie de l’envoyer chier, vraiment. Parce qu’il a trop peur des conséquences d’un échange avec elle, parce que mieux vaut prévenir que guérir, dit-on. Mais il ne peut pas. Il s’en voit incapable, jeune homme démuni face à une expression pareille, un regard pareil, un ton pareil. Il pousse un soupir, détourne les yeux. Elle n’a rien oublié la diablesse, elle maîtrise encore à la perfection les regards de chien battu qui ne l’ont jamais laissé de marbre.

- Oui… Si tu veux.

Il sait pertinemment de quoi elle va lui parler, et c’est sans doute là ce qui l’effraie le plus. Leurs deux voix combinées, ils ont parlé plus de deux heures. Beaucoup de choses ont été dites cet après-midi, certaines anodines, d’autres beaucoup moins. Il ne veut pas entendre ce qu’elle aura à lui dire sur sa blessure presque mortelle. Sur ce qu’il a dit quant à ses choix de carrière, son départ. Il ne veut même pas subir ses railleries quant à sa popularité grotesque auprès de ces gamines à peine formées. Il ne veut rien entendre à ce sujet ; trop de choses se sont produites, trop de paroles ont été prononcées, des paroles qu’il n’aurait pas souhaité qu’elle entende. Et pourtant, il sait qu’il n’y échappera pas. Parce qu’elle est comme ça, Eden. Elle a toujours eu besoin de parler lorsqu’il se produisait quelque chose d’un peu trop éprouvant, lorsqu’il avait plutôt une inclination naturelle à fuir le dialogue.

Il sent sa main quitter son bras, la voit reculer, mettre un petit mètre de distance entre eux deux. Poings qui viennent se nicher dans les poches de son pantalon, sourcil qui s’arque dans l’attente anxieuse de sa prise de parole. Elle fait traîner les choses, la demoiselle, semble perdue dans ses pensées, instaurant entre eux un silence qui ne le rassure guère. Et puis elle prend enfin la parole. Lui apprend qu’elle est choquée, mais il le sait ça, il le sait très bien, et comme pour appuyer là où ça fait mal, des images d’elle reviennent se plaquer contre ses rétines. Des images d’elle livide, tremblante, semblant au bord des larmes, cramponnée à sa table comme à une bouée de secours. Il déglutit nerveusement, chasse tant bien que mal ces flashs de son esprit. Pourquoi n’avait-il pas pu simplement se la fermer ? Main qui a tôt fait de quitter sa poche pour se nicher dans ses mèches brunes, il fuit son regard, incapable de la regarder en face sans être de nouveau envahi par les visions d’une Eden troublée, effondrée par son unique faute.

- Non, je… T’as raison. Quand je me suis réveillé à l’hôpital, ma mère m’a dit qu’elle avait failli t’appeler en apprenant la nouvelle, mais qu’Ethan lui avait dit d’attendre que je reprenne mes esprits avant de faire quoi que ce soit. Il devait se douter que j’voulais pas que tu le saches. Alors ouais, j’ai demandé à ma famille de ne pas vous en parler, ni à toi ni à ta famille. Parce que je voulais pas que tu l’apprennes. Ça faisait trois ans qu’on avait complètement coupé les ponts, je…

Nouveau soupir qui franchit ses lèvres, il relève les yeux vers son visage, croise son regard, hésite. Il pourrait éluder la question. Se faufiler par une porte de sortie, se réfugier dans le mensonge. Mais non. Il lui doit bien la vérité. C’est le moins qu’il puisse faire après lui avoir appris pareille nouvelle dans une telle situation.

- J’voulais pas revenir dans ta vie comme ça. Pas de cette manière. J’me doutais que ça te ferait pas plaisir d’apprendre ça, j’voulais pas te faire tant de mal alors qu’on n’était plus ensemble, que t’avais plus de raison de te soucier de moi. Tu me devais rien, et j’étais pas en droit de revenir vers toi uniquement pour te dire que je venais de frôler la mort. Ça n’aurait été que t’infliger une souffrance inutile.

Il est très mal à l’aise, le jeune homme. Mal à l’aise d’être aussi sincère avec elle, de se livrer aussi ouvertement à une fille qu’il déteste par moments. Mais elle est en droit d’exiger la vérité. Cela fait trois ans maintenant que ce secret sommeille dans l’ombre. Et pourtant, pourtant il ne lui dit pas toute la vérité. Il en dissimule une partie, celle qui sera probablement la plus douloureuse pour la demoiselle, et il le sait. D’où la raison de son silence. Il lui cache le fait que son frère, Brad, sait tout, lui. Car lui confesser cela reviendrait à lui avouer qu’il est resté en contact avec lui, qu’une amitié née au lycée s’est poursuivie au-delà de leur rupture à tous les deux. Il sait qu’elle ne serait pas ravie, la demoiselle, d’apprendre que son aîné a continué à fréquenter son ex, depuis des années désormais. Il connaît la relation qui les unit, tous les deux ; il sait combien elle peut être possessive envers quiconque partage son sang, il sait combien elle serait blessée d’apprendre la vérité. Aussi il aime mieux se taire. Il lui a fait suffisamment de mal comme ça pour aujourd’hui.

Sourire faux qu’elle lui offre, sourire pourtant moins désagréable que la plupart des rictus qu’elle feint habituellement. Celui-ci ne respire pas l’hypocrisie, seulement… la douleur, sans doute. Douleur partagée au milieu de ce couloir désert, douleur des souvenirs écrasants, du poids des années passées, des dégâts du temps, de tout ce que l’un a raté de l’autre. Et de ce qu’ils continueront probablement à rater, au cours des années à venir. Ça fait mal, ça fout un coup au cœur, comme un poignard lancé en plein dans le palpitant que de se dire que celle qu’il connaissait le mieux sur cette Terre est devenue une étrangère, et que la réciproque doit être tout aussi vraie. Il secoue la tête, esquisse un maigre sourire guère plus convaincant que celui de la jeune femme. Aveu de faiblesse des anciens amants, ils sont à terre, rendent les armes, font pour une fois le choix de la sincérité plutôt que celui de la cruauté aux relents d’amertume.

- Non, c’est bon. Je sais, je… pensais pas que cet après-midi serait aussi dur, en fait. Ça fait bizarre d’être de retour entre ces murs, hein ? Ici, tout semble être resté figé, alors que plus rien n’est comme avant.

Il plisse un peu le front, une ridule se creuse entre ses sourcils. Il ne sait pas trop ce qu’il raconte le bonhomme, il tente juste de combler le vide, le silence, choisit de jouer la carte de l’honnêteté pour ce faire. Une honnêteté pudique cependant, une honnêteté qui se refuse à se dévoiler totalement, qui garde les détails un peu trop personnels, touchant d’un peu trop près à son amour-propre, bien à l’abri loin de ses lèvres.

- Au fait, par rapport à l’histoire de la balle… J’voulais pas que tu le saches, mais si tu devais l’apprendre un jour… J’voulais pas que ça se fasse dans ces conditions. Mais… Tu sais, les élèves étaient insupportables… Ça devenait difficile de se concentrer, de réfléchir. C’est sorti tout seul, sans que je puisse l’anticiper.

Il la regarde dans les yeux, pince un peu les lèvres, gêné. Il s’excuserait presque le garçon. Presque. Parce qu’il ne faut pas déconner non plus, on parle tout de même ici de Landon James, le jeune homme qui ouvre bien trop souvent sa jolie bouche sans réfléchir, qui blesse sans y prendre garde, et qui n’est même pas foutu de s’excuser pour ses torts une fois le mal fait. Mais il tente, il fait comme il peut pour lui faire comprendre qu’il regrette. Que si c’était à refaire, il aurait fait en sorte que les choses se passent différemment.

Peu à peu, le brun se détend, sans trop savoir à quoi cela peut être dû. Peut-être est-ce le fait de parler un peu de cet après-midi bien trop lourd à porter pour une seule personne. Le fait que pour une fois, Eden ne semble pas prête à lui arracher les yeux. Ou encore, le simple soulagement d’être enfin débarrassé de la marmaille bruyante. Tiens, il les avait presque oubliés ces insupportables gosses. Petit sourire qui se risque sur ses lèvres lorsqu’il repense aux moments les plus croustillants de l’intervention.

- Tu t’en es bien tiré, avec les élèves. Pourtant ils étaient pas faciles hein, j’ai pas le souvenir qu’on était comme ça à leur âge… Pas à ce point-là, en tout cas. Mais tu l’as vachement bien remis à sa place, l’autre là… celui des nus. J’avais presque envie de t’applaudir !

Sourire qui s’étire en coin, lueur presque fière qui brille dans son regard – mieux vaut ça que les têtes d’enterrement qu’ils tiraient tous les deux quelques minutes plus tôt. Grand fracas qui retentit soudain derrière Eden, qui résonne dans le corridor silencieux. Jeune homme qui sursaute, regarde au loin pour s’apercevoir qu’il ne s’agit finalement que d’un malheureux élève qui a fait tomber le contenu de son casier au sol. Il se reconcentre sur la petite blonde toujours à moitié tournée en direction de la source du bruit ; yeux qui glissent le long de sa chevelure platine, sur ses épaules, dans son dos, pour s’apercevoir que le tissu marine de sa robe est maculé de traces de craie.

- Eden, t’as dû aller te frotter au tableau à un moment donné…

Et tout naturellement, esclave de ses vieilles habitudes, le garçon s’empresse de passer sa main dans le dos de la demoiselle pour épousseter l’étoffe devenue plus blanche que bleue. Doigts qui caressent vigoureusement le tissu à plusieurs reprises, jusqu’à ce qu’il prenne pleinement conscience de ce qu’il fait ; doigts qui se figent alors un instant dans son dos face à l’incongru de la situation, geste presque déplacé au vu du lien qui les unit. Il se dépêche de terminer, tentant comme il peut de faire comme si de rien n’était. Il se recule alors un peu, glisse les mains dans ses poches, un peu gêné de s’être une nouvelle fois laissé aller à des gestes qu’il n’est plus vraiment en droit de faire. Il serait temps qu’il se fasse une raison, le pauvre Landon. Cela fait quand même sept ans.

- Bien, c’est quand même mieux comme ça…
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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptySam 8 Juil - 23:45

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Souffle qui se mettrait presque à lui manquer tant son débit de parole fut rapide au cours de la minute précédente. Vérité qui fait un mal de chien à avouer, exposition brutale de son intérêt à la cause qu’elle vient d’expliquer. Pourquoi lui demande-t-elle si il avait souhaité ou non l’épargner de son retour à Savannah ? Pourquoi s’en enquit-elle bien des années après ? Elle devrait s’en foutre non ? C’est elle qui l’a plaqué après tout. Mais non, elle met cette infime partie trop fière de côté. Elle lui montre juste un instant un pan de ses angoisses. Celle d’avoir été mise sur le côté. Elle veut savoir si oui ou non il l’a voulu de son plein gré qu’elle ne sache rien de tout ça, étouffer l’histoire. Elle le fixe, elle se montre insistante et les opalescences azurées de son ex ne restent guère longtemps accroché aux siennes. Il l’évite, il évite tout contact oculaire avec elle maintenant qu’elle a dit ce qu’elle avait dans le ventre. Maintenant qu’elle a osé dire franchement ce qui la tracasse depuis une heure. Elle se demande même si il va lui répondre ou simplement ignorer son monologue n’ayant pas le courage d’en dire plus sur le sujet. Elle attend Eden et plus elle attend, moins elle y croit. Chaque seconde l’éloigne sensiblement de l’espoir de savoir si oui ou non on lui a caché la vérité.

Comme un miracle qu’elle n’attendait plus, Landon se met à parler. D’une voix d’abord hésitante pour prononcer les premiers mots puis il s’y met avec un peu plus de volonté. Un peu plus de cœur à l’ouvrage pour exprimer ce qui c’était réellement passé. Et comme elle s’en doutait, la vérité lui avait été délibérément dissimulé. Pincement au cœur, il ne voulait donc pas d’elle au bord de son lit… Bon. Ok. Faute avoué, faute à moitié pardonné il parait ? Elle préfère entendre ça, entendre qu’ils avaient pensé à l’appeler les James plutôt que de s’imaginer avoir été totalement effacé du tableau en quelques années. Tout au long de son monologue, aucun regard ne lui est adressé. Il préfère regarder un point invisible derrière elle, regardé sur le côté, puis ses pieds et ainsi de suite jusqu’à qu’il n’est plus rien à raconter. Elle, elle hoche la tête, ancrant chaque mot dans sa tête pour ne rien en oublier.

Ethan. Prénom qui lui reste en travers de la gorge à la blonde. Pourquoi Ethan s’était-il mêlé, il n’avait pas mieux à faire ce jour-là cet adolescent plutôt que s’occuper des histoires des grands ? Pourquoi n’avait-il tout simplement pas laissé sa mère l’appeler ? Petit con. Pense-t-elle juste un court instant. Puis, elle se calme de nouveau Eden. Elle essaie de relativiser, se dire qu’il avait certainement fait le meilleur choix le jeune homme. Il avait voulu suivre la volonté de son frère… Une volonté qui la dépassait actuellement. Elle est mal Eden, elle se dit qu’à un appel, un simple coup de fil et l’histoire aurait pu être différente. Ou peut-être pas, mais il y aurait eu une prise de contact au moins. Ils se seraient vus. Auraient peut-être pu échanger, s’avouer chacun leurs torts. Mais non, Landon il n’avait pas voulu saisir cette chance. Peut-être avait-il une autre copine à ce moment-là de sa vie, une fille qui était venue à SA place attraper sa main d’un air inquiet au pied de son chevet. Bruh, salive qui devient difficilement avalable, gorge qui se noue en pensant qu’un seul être féminin avait pu agir tel une petite infirmière avec son ex.

Voilà, il a tout dit et pourtant elle est un peu blasée dans son for intérieur Eden. Elle le trouve con si il a vraiment réfléchi de la sorte. Si il n’y avait aucune autre raison qui avait joué en sa défaveur alors elle le trouvait simplement bête le garçon. Car existait-il une meilleure manière de revenir dans la vie de la blonde, une façon plus intelligente qu’une autre ? une perche plus alléchante que de saisir ce moment de faiblesse, prendre ce prétexte de balle logée dans la cage thoracique pour lui demander de revenir ? Non, certainement pas. C’était même certains. La preuve, sept ans après il n’avait toujours pas trouvé quelque chose de plus fort pour renouer les liens du passé. Elle rit Eden, nerveusement mais elle le fait. Elle passe sa main rapidement à la racine de ses cheveux, tirant doucement dessus pour qu’ils aillent vers l’arrière et le regarde en bougeant nonchalamment la tête de gauche à droite. « Je sais que j’te devais rien et qu’on était déjà plus ensemble. Mais je souffrais déjà depuis un moment. Ce n’est pas une raison de plus ou de moins qui aurait changé la donne. Après je comprends que t’ai pas eu envie de voir ton ex au réveil … ça fait pas rêver j’avoue … Mais j’serais venu tu sais. J’aurais pris le premier avion de Chicago jusqu’à ici pour te frapper, t’en coller une car même si tu dis que c’est la faute à un autre, toi t’as surement pas couru assez vite loin du danger … » Elle rit nerveusement la jolie, elle lui montre ses quenottes trop blanches, se sourire un peu trop parfait auquel il n’est surement plus habitué. Elle parle comme une gamine qui n’aurait rien compris subitement. Une petite fille qui ne saisit pas ô combien il était impossible dans ce genre de situation d’éviter la totalité des attaques adverses. Comme si Landon se devait d’être un surhumain.

Elle est toute embrouillée Eden, elle a la langue un peu trop pendue soudainement. Mais c’est légitime comme état d’esprit. Elle ne devrait pas s’en mordre l’intérieur de joues une fois que les morts se sont échappés d’entre ses lippes voluptueuse. Mais Landon se montre rassurant, il la rassure de ses mots les plus réconfortant. Elle n’est pas la seule à subir les dégats du passé. Il la comprend actuellement. Il est même la seule et unique personne qui puisse la saisir. Comprendre que si elle est autant tourmentée c’est la faute à ce fichue lycée rempli de réminiscences aussi tendre qu’une caresse au matin. C’est aussi la faute à cette foutue intervention devant ces saletés de gosse indécent. Puis il y a aussi les discours. Les mots qui s’entrechoquent, y’a les vérités qui éclatent les sentiments refoulés qui font surfaces. « Moi non plus je pensais pas que ça serait si compliqué… » Il a raison le brun. Tout reste figé mais plus rien n’est comme avant pour autant. Ou si, peut être un truc, cette petite étincelle cachée sous le brasier qui a arrêté de fumer depuis le temps. Un simple braise cœur qui brule encore à la simple évocation de son prénom, la simple vue de son corps. Mais elle se tait, elle chasse ce genre de vérité éhonté au plus loin dans son cortex.

Silence d’une lourdeur sans équivaux qui reprend place, à son tour elle se met à fixer le mur d’en face avec attention. Elle regarde la peinture blanche, peinture qui venait surement d’être refaite tant le mur a l’air propre par rapport à celui d’à côté. Elle fixe des détails sans grande valeur car elle n’ose regarder le plus grand échec de sa vie, elle n’ose relever les yeux vers lui car à chaque fois son esprit lui gueule qu’elle avait foirée à un moment précis. Et c’est fatigant d’avoir cette petite voix constamment en tête lorsqu’on revoit son ex, c’est fatigant de se répéter sans cesse qu’on a tout foutu en l’air qu’on a pas su taire lorsqu’il était encore temps. Puis y’a lui qui se permet de rompre le silence, lui qui ose poser ses prunelles sur elle. Lui qui se remet à parler de cette fichue balle, se justifiant d’avoir révélé cet accident non pas pour qu’elle l’apprenne mais simplement pour faire taire un peu les gosses. Une histoire sortie d’entre ses lippes sans qu’il ne le veuille vraiment, sans qu’il n’y réfléchisse réellement. « Comme ça ou d’une autre façon, t’aurais rien pu anticiper Landon. C’est comme ça … Le choc aurait été le même. Peut-être c’est même mieux pour toi que je l’ai appris comme ça, autour de ces gosses. Tu sais, moi mon caractère, mes pétages de plombs… » Elle hausse faiblement les épaules Eden, elle sait ô combien son caractère est dérangeant. Elle sait aussi bien que lui qu’en tête à tête elle aurait réussi à se montrer sarcastique, ironique et lui foutre le coup de la balle dans le torse. Elle l’aurait certainement traité d’imbécile et de bon à rien. Laissant le flot de palabres impure s’immiscer dans la conversation juste pour laisser exploser ses émotions sans remords.

Sur tout ce qu’elle vient de dire, l’entièreté de la phrase Landon choisi de reprendre la discussion en parlant de cette saleté de marmailles à laquelle ils avaient eu à faire. Rien que d’y penser, elle en soupire la belle. Elle vient même jusqu’à se pincer l’arête du nez en se rappelant des conneries qu’ils avaient pu sortir tout le long de l’après-midi. Elle relève les yeux vers lui en faisant la moue. Bouche en cul de poule qu’elle lui adresse mimant très bien le fait qu’elle ne s’en serait pas sorti aussi bien si il n’avait pas été là pour calmer les choses à certains moments. « Ouais enfin… TU les as calmés, sans quoi comme je te le disais à la pause j’aurais été leur victime hein… » Landon Autorité James. Vétéran qui s’était montré très dur et ferme avec certains des élèves lorsque le bordel commençait à prendre un peu trop place, lorsque les questions devenaient soudainement trop personnelles. Atteignant leur intimité sans regret, sans se sentir le moins du monde un peu trop pousser des ailes. « Non on n’était réellement pas comme ça, jamais j’aurais osé sous-entendre à mes intervenants qu’ils avaient l’air en couple. Ni même demandé à mon intervenant masculin les dates pour le voir nu avec un ballon entre les cuisses. » Elle lève les yeux vers le plafond en évoquant ce dernier souvenir, cette ultime question qui avait clos une bonne fois pour toutes l’intervention des deux adultes. O diable cette adolescente avec le bas des reins en feu, au même titre que le jeune homme aux multiples clins d’œil et son ami qui voulait l’initier aux photos nues. « J’avais vraiment pas envie de rire moi quand j’ai répondu ça, c’est pitoyable et hyper gênant d’être aussi con mais j’avoue qu’en y repensant j’ai bien répondu … merci mer- » Parole qu’on lui coupe d’un bruit sonore qui résonne dans l’immense couloir. Elle sursaute Eden, elle se retourne à la volée fouettant presque Landon de sa chevelure dorée. Prunelles qui tombent sur un jeune homme embarrassé, un jeune homme qui se baisse rapidement au sol pour récupérer l’entièreté de son casier qu’il a dû faire tomber. Elle pince les lèvres Eden, son âme charitable aimerait aller l’aider. Avant elle l’aurait fait, c’était certain. Faisant rouler des yeux son petit-ami de l’époque face à tant de bonté venant de sa sauvageonne de petite amie. Mais ça, c’était avant. Là, la conversation, le fait d’être avec son ex l’en empêche à Eden. Elle a mieux à faire que jouer les gentilles demoiselles.

Doux est le son qui parvient à ses oreilles lorsque Landon prononce son prénom. Prénom qu’elle trouve sans grand intérêt sauf lorsqu’on le réfère à bible. Bible à laquelle elle ne croit guère, bible qui arrache les peuples, les soutirent de la paix pour mieux les enfoncer dans la guerre. Elle n’y croit pas elle à l’existence du jardin d’Eden. Elle ne peut pas croire qu’un monde si parfait ait pu exister et qu’une imbécile de femme ait préféré croquer dans un fruit défendu plutôt qu’aller s’amuser avec son bel Adam. Eden, ça veut aussi dire Délice en hébreux pourtant la seule fois où celui-ci sonne savoureux, parfait c’est lorsque c’est lui qui l’énonce. Tous ce qu’il touche devient beau, de toute façon. Bénis sont les mains de ce garçon. Tout naturellement, la blonde intriguée par les paroles de Landon essaie de regarder derrière son épaule pour voir les traces de craies. « Ah, je m’en suis foutue de partout ? » Question rhétorique, bien évidemment qu’elle en a si il lui fait la remarque.

Geste qu’elle croit rêver, main qui vient se glisser dans le milieu de son dos et vient brosser à base de petit à-coups sa robe tachée par la craie. Elle se redresse la poupée. Elle a les poils qui se soulèvent Eden. Elle est plus habituée à un tel contact physique Eden. Elle ne laisse personne l’approcher la belle. Elle ne laisse personne poser ses mains au creux de ses reins sauf lorsque les verres s’enchainent, lorsque le flou dans ses pensées l’empêche de rester rationnel, de rester elle-même. Là, elle s’autorise alors à succomber aux péchés. Elle se laisse bercer et ramené dans des draps qu’elle ne connait guère. Elle se laisse embrasser, toucher puis une fois que le taux d’alcool est retombé, une foi que les deux partis ont eu ce qu’ils souhaitaient alors elle s’échappe. Elle s’envole comme si elle n’avait jamais existé. Comme si la nuit passé avait été un simple rêve. Puis au de-là des nuits qu’elle noie dans les bars il y a présentement la main de Landon qui glisse jusqu’à ses reins. Cette main pourtant innocente. Cet épiderme qui n’accomplit qu’un geste en tant que bon samaritain. Geste qui finit bien rapidement, geste qui venait de lui couper le souffle un instant. Doucement, troublée elle se tourne alors vers son mercenaire. Seul et unique personne qui peut lui arracher un frisson sans même tenter de la draguer. Comme il le dit si bien, voilà qui est mieux et elle hoche la tête sensiblement. « Merci… »

Moment de gêne ultime. L’un comme l’autre ne sachant où se placer ou quoi dire maintenant que la proximité entre leurs corps a été réduite à néant le temps d’un instant. Elle le voit glisser sa main le long de sa nuque. Elle sent que comme elle, il est troublé soudainement et que c’est la faute à cette fichue robe qui s’était imprégné de la craie. « Au fait …. » dit-elle en souriant narquoisement, d’un air vicieux à son interlocuteur qui arque déjà un sourcil. Elle le sait qu’il s’attend au pire, elle le sait qu’il se met même déjà sur ses gardes ne sachant jamais sur quel pied danser avec elle. « J’ai gagné notre petit pari de tout à l’heure hein… » Elle se balance d’une jambe à l’autre, bougeant doucement en rythme ses épaules comme si elle était encore toute heureuse de sa victoire. Elle rit même en voyant la tête blasée de son ex petit-ami. Histoire de le faire patienter un peu plus encore, la blonde se met à fouiller son sac à main de fond en comble pour y trouver un objet spécifique. Un objet sur lequel elle met la main et qu’elle tend au Vétéran. « Du coup pour que tu me paies ce verre j’ai besoin de ton numéro de téléphone … » Deux secondes, un regard appuyé sur elle et il l’attrape ce téléphone et elle sourit d’un air satisfait pendant que celui-ci note son numéro dans son répertoire.

Le téléphone de nouveau dans ses mains, elle vérifie comme si elle pouvait y déceler un faux numéro les chiffres inscrit sur l’écran digitale. Un simple Landon pour se nommer dedans. Elle sourit et range le téléphone dans son sac. « Bien, je dois y aller. J’ai une vieille dame à aller voir moi… » Référence avec laquelle il n'aura pas de mal, il sait très bien de qui elle parle lorsqu'elle dit ça la demoiselle. Bien évidemment qu'elle parle de sa tendre grand-mère. Elle part à reculons la jolie blonde, sous les yeux du garçon elle s’éloigne un peu plus à chaque pas loin de lui, loin de cet homme qui la met dans tous ses états d’âmes en moins de temps qu’il le faut pour prononcer ces mots. « Je te souhaite une agréable soirée Landon… » elle lui sourit presque amicalement en lui faisant un signe de la main avant de définitivement tourner les talons.


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MessageSujet: Re: Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden   Il fut un temps où la beauté du ciel venait pas sans nous | Leden EmptyDim 9 Juil - 5:01

Ton corps dans ma rétine c'est sensoriel

Eden & Landon

Coup au cœur que d’entendre qu’Eden souffrait encore trois ans après, douleur à la poitrine semblable à l’impact d’une balle. Ça lui tord l’estomac d’apprendre pareille nouvelle, de savoir qu’elle était peut-être aussi mal que lui à la suite de leur rupture. Il avait été dans le mal, Landon. Vraiment. Il s’était vu sombrer dans des états d’une noirceur telle qu’il n’aurait pu imaginer qu’ils existaient. Il avait versé des larmes, trop de larmes, lui, l’homme qui ne pleure jamais. Larmes de tristesses, larmes de désespoir, larmes de colère dirigées contre Eden et contre lui-même. Il paraît que les larmes sont faites pour soulager la douleur ; les siennes se sont manifestées avec la violence nécessaire pour panser la douleur d’un amour anéanti, d’une existence à jamais gâtée. Il en a passé des nuits à hurler dans son oreiller, à maudire la jolie blonde, se maudire lui-même, blâmer le monde entier pour une rupture dont il était en grande partie responsable. Il en a même perdu le sommeil, fut un temps ; ce n’était pourtant pas faute d’être épuisé, physiquement par son quotidien de soldat, mentalement par cette séparation bien trop dure à accepter. Mais malgré la fatigue, ses nuits s’étaient faites sombres ; supposées être réparatrices, elles s’étaient faites destructrices tandis que pendant des heures durant il ressassait le passé, rejouait inlassablement leurs trois années de relation, regrettait tout. Insupportable blabla nocturne avec sa conscience.

Cela faisait aujourd’hui sept ans qu’il vivait un enfer quotidien ; et si, optimiste, il avait dans un premier temps espéré que la peine s’estompe, que la douleur se noie avec le temps, il n’avait pas tardé à comprendre que ce ne serait pas le cas. Il était condamné à vivre avec ce poids bien trop lourd pour ses épaules, une seule erreur primordiale, si bien importante que la vie se faisait une joie de lui rappeler au quotidien à quel point il avait merdé. Il ne souhaitait cela à personne, pas même à son pire ennemi, et surtout pas à Eden. Alors savoir qu’elle avait souffert pendant au moins trois ans, bien que cela ne fût probablement pas avec une intensité similaire à sa propre souffrance, bien que cela n’ait probablement pas perduré jusqu’à aujourd’hui, comme c’est le cas pour lui, suffit à lui donner l’impression de mourir un peu plus encore. Comme s’il n’avait pas déjà suffisamment le sentiment d’être mort de l’intérieur, peu à peu bouffé par la félicité perdue d’un amour envolé à jamais.

Il aimerait lui dire qu’elle a tort. Lui hurler qu’elle se trompe sur toute la ligne, que s’il n’avait en effet pas la moindre envie de trouver l’une des filles dont il avait partagé la couche à son chevet à l’hôpital, elle faisait exception à la règle. Qu’il avait plus d’une fois, au cours de ces semaines passées à fixer les néons plafonniers de sa chambre aseptisée, fermé les yeux fort, très fort, assez fort pour espérer qu’en les rouvrant il se réveille une nouvelle fois, pour s’apercevoir que tout ceci n’était qu’un vilain cauchemar et trouver son visage penché sur lui, ses mèches blondes caressant son visage couvert d’égratignures. Qu’il avait bien trop souvent failli revenir sur sa décision, demander à sa famille de contacter Eden. Mais non. Pour une fois qu’il parvenait à se mettre au second plan, à faire passer le bien-être de l’autre avant le sien, il n’allait pas réduire en miettes tous ses efforts.

Il aimerait lui dire tout ceci. La prendre dans ses bras, la rassurer quant aux raisons de ce secret bien trop gros pour être toujours caché… Mais la rassurer pour quoi, même ? Elle n’en a probablement rien à faire de savoir tout cela, aujourd’hui. Sans doute lui a-t-elle simplement posé la question pour rassurer la Eden de l’époque, pour obtenir des réponses aux interrogations qu’elle se serait posée trois ans plus tôt, mais guère plus. Probablement a-t-elle tourné la page de leur histoire depuis un moment déjà ; contrairement aux apparences, elle avait toujours été bien plus forte que lui. Il n’y avait que lui pour ne pas se remettre d’un amour perdu, sept ans plus tard. Et de toute manière, il ne peut pas lui confesser tout ceci. Car il aimerait mieux crever que d’avouer à son ex qu’il avait encore besoin d’elle malgré le passage du temps, et que c’est d’ailleurs toujours le cas aujourd’hui.

Dernière phrase qui le pique au vif, qui l’énerve plus qu’elle ne le vexe. Tout ce qu’il vient de dire, d’expliquer au sujet de l’armée au cours des dernières heures n’a-t-il donc servit à rien ? Manifestement pas, puisqu’elle ne semble pas avoir saisi le fait que parfois, on a beau tout faire pour ne pas se prendre une balle, elle vient tout de même se nicher dans son corps, qu’on le veuille ou non. Pourtant, il prend sur lui. Il fait de son mieux pour ne pas laisser transparaître son agacement nouveau, pour ne pas lui laisser percevoir à quel point son état de calme peut être fragile. Et puis, elle doit toujours être aussi bouleversée que lui ; il ne manquerait plus qu’il se mette à lui aboyer dessus comme il sait si bien le faire, à lui faire la leçon comme à une gamine écervelée. À la place, il choisit d’esquisser un petit sourire en coin, un peu forcé oui, mais valant toujours mieux que sa hargne.

- Ça j’y compte bien, le contraire aurait été étonnant… À tel point que l’une des premières pensées venues à mon esprit à mon réveil, ça été de me dire que merde, t’allais me faire une scène pas possible pour avoir failli mourir. Me dire que t’avais eu raison de m’avertir depuis le début que je risquais de crever, là-bas. Que t’avais raison ouais, t’as toujours aimé avoir raison.

Sourire faussement amusé qui se fait amer ; même s’il le tait, il sait, lui, qu’il aurait mieux aimé voir la petite blonde débouler comme une furie pour lui crier dessus, abattre ses faibles poings sur son épaule car il venait de passer si près de la mort. Il aurait cent fois préféré voir cela que de se réveiller sans sa présence à ses côtés, la demoiselle poursuivant innocemment sa vie à des centaines de kilomètres de là.

- Oh, et pour info, j’ai même pas tenté de courir pour l’éviter, cette foutue balle. J’en ai pas eu le temps, j’étais si bien occupé à essayer de repérer comment mettre un terme à cette folie sans toucher les civils que je ne l’ai même pas vue arriver.

Petite portion de lèvre inférieure qui vient se nicher entre ses lèvres, il s’interrompt avant de s’engager de nouveau sur ce terrain miné qu’est le récit de cette dure journée. Il ne veut pas se retrouver dans des états pas possibles à force de trop tirer sur la corde, de trop repenser à des heures douloureuses. Pas devant elle.

Silence qui s’ensuit, uniquement brisé par des bribes de phrases, de temps à autre, qui retombent plutôt à plat. Et puis il revient sur cette histoire de balle, même s’il vient de se dire qu’il lui valait mieux éviter le sujet ; c’est plus fort que lui, il doit s’expliquer, tenter de se justifier à défaut de s’excuser. Lui faire saisir qu’il n’est pas le monstre dénué d’empathie qu’elle pourrait croire, que c’est plus compliqué que ça, qu’il n’avait nullement l’intention de faire souffrir celle qui durant trois ans a partagé sa vie, celle qui continue à le faire aujourd’hui encore, dans ses pensées seulement.

Elle lui répond qu’il valait probablement mieux pour lui qu’elle apprenne ainsi la sombre nouvelle. Qu’elle n’ait pas le loisir de lui gueuler dessus à sa guise, de s’acharner sur sa pauvre carcasse. Mais la vérité, c’est qu’il n’en a rien à foutre de tout ça, Landon. Il s’en fout de ce qu’il y a de mieux pour lui. Lui, ce qu’il aurait voulu, c’était pouvoir la préserver elle. Pas lui. Qu’est-ce qu’il en a à foutre de sa propre personne ? Il a déjà tant souffert, un peu plus ou un peu moins de douleur ajoutée au compteur ne fera plus grande différence. Cela n’aurait probablement pas fait grand-chose, finalement, d’entendre ses reproches, ses réprimandes pour ne pas être foutu de veiller sur lui tout seul. La douleur de ses paroles n’aurait en rien égalé celle de la voir pareillement anéantie, forcée de devoir tout contenir en elle, garder la moindre petite émotion en son for intérieur. Et pourtant, il sait mieux que quiconque combien la gamine peut se montrer cruelle, lorsqu’elle s’y met. Il soupire, secoue la tête, prononce à mi-voix, mal à l’aise avec ce genre de paroles :

- Non… Vraiment, j’aurais souhaité que tu l’apprennes autrement. Là t’as été obligée de tout contenir, la preuve, t’arrives même pas à t’énerver sur moi là, alors que ça doit faire qu’une demi-heure à tout casser que j’en ai parlé. Et c’est jamais bon d’étouffer ce qu’on ressent.

Il s’arrête là pour sa psychologie à deux balles, Dr. Landon Freud. Il n’est pas là pour lui livrer ses conseils dignes de Psychologie Magazine. À la place, il aime mieux enchaîner sur un sujet plus léger – si l’on veut –, à savoir l’assemblée de bêtes sauvages qui a constitué leur auditoire. Sourire qui reprend place sur ses lèvres, rictus amusé. Véritable théâtre d’expressions qu’a toujours été son visage, toile plus changeante qu’un ciel du mois de mars. Cela lui avait manqué de voir les mimiques diverses et variées se succéder à pareille vitesse sur ses traits fins. Il passe une main dans ses cheveux, baisse les yeux, modestes. Sourire qui se mue en expression embarrassée par le compliment.

- Je n’ai pas été trop dur, quand même ? J’oubliais parfois que je m’adressais à des lycéens, mais en même temps ils n’aidaient pas, en se comportant comme ça… Mais dans le temps, peu avant ma blessure, mon supérieur à l’armée me disait souvent que je pourrais probablement être promu sans tarder à un poste d’autorité, donc ça doit jouer. Peut-être.

Il hausse les épaules, la demoiselle confirme que ça va, il a été dur mais que les gamins l’avaient bien cherché, ne manquant pas de lui lancer une pique ou deux au passage. Elle reparle alors des questions les plus fâcheuses qu’avaient osé poser les élèves, il se voit soudainement plongé dans le même état de gêne et d’agacement mêlés qu’était le sien lorsqu’il a entendu ces paroles franchir les lèvres des adolescents. Soupir qui se glisse loin de ses lippes, il affiche une mine consternée en repensant à ces deux heures plus sportives que prévu.

- Ouais… J’ai toujours pas saisi ce qu’ils n’ont pas compris dans « question pertinente ». À croire que les nouvelles technologie ramollissent vraiment leur cerveau, j’vais peut-être commencer à croire un peu plus à ces études…

Il vient se gratter pensivement la tête, index qui reste figé au sommet de son crâne lorsque retentit le grand fracas, à quelques mètres de là. Il lui apprend qu’elle a de la craie sur sa robe, et bien vite, sans même qu’il sache trop comment, le voilà en train d’épousseter le tissu souillé, de caresser rapidement son dos maigre. Il sent ses os si proches sous l’étoffe, si proches sous sa peau. Etait-elle aussi mince du temps où ils étaient ensemble ? Elle n’avait jamais été grosse, loin de là même, et cela lui avait toujours posé soucis, au garçon. Il l’emmenait souvent manger des pizzas ou des hamburgers dans l’espoir que cela la remplume peu à peu, sans succès. Mais alors aujourd’hui… Elle lui semble plus maigre que jamais, sans qu’il parvienne à déterminer s’il voit juste ou s’il se fait simplement des idées, si le passage du temps lui a fait oublier le contact si proche de son ossature sous ses doigts.

Il sent très nettement la chaleur qu’exhale sa peau sous ses doigts, le relief de sa colonne vertébrale, et cela le ramène immanquablement à ces temps passés où il pouvait caresser la peau de son dos sans s’embarrasser d’une barrière de tissu. Images qui affluent dans son cortex, qui ne font que l’embarrasser un peu plus quant à l’intimité du geste, lui faire se dépêcher un peu plus encore de la débarrasser de toute trace blanchâtre. Sitôt sa tâche terminée, il se recule rapidement ; elle le remercie, il lui adresse un petit signe de tête, comme pour lui signifier un « je t’en prie, c’est normal ». Il passe une main dans sa nuque, cherchant que dire pour rompre ce silence qui ne fait qu’ajouter à la gêne déjà plus que palpable entre eux, mais rien ne lui vient.

C’est finalement Eden qui se dévoue pour relancer la conversation. Sourcil qui vient spontanément s’arquer lorsqu’il voit le sourire qui se dessine sur les lèvres de la demoiselle, sourire qu’il connaît trop bien, sourire dont il avait presque oublié la couleur, sourire qui n’annonce rien de bon. Et pour cause. Il aurait mieux valu qu’elle se taise, si c’était pour lui rappeler qu’il avait perdu ce pari stupide… Il se rembrunit le jeune homme, toujours aussi mauvais perdant que de coutume. Elle en rajoute la diablesse, avec ses gestes satisfaits et son petit rire. Elle l’agace, et il sait combien c’est ridicule de se laisser atteindre à ce point lorsqu’il ne s’agit de guère plus qu’un pari insignifiant. Il sait qu’il ne devrait pas laisser l’énervement le gagner pour si peu. Mais il n’y peut rien, c’est dans sa nature, il en a toujours été ainsi. Il ne connaît que ça, finalement, comme réaction possible face à la défaite. Il la regarde farfouiller dans son sac, suivant des yeux le moindre de ses gestes, se demandant ce que diable elle va pouvoir encore trouver pour achever ses pauvres nerfs. Mais à sa grande surprise, c’est un téléphone portable qu’elle en extirpe. Et avec lui, la demande de son numéro. Il se radoucit soudainement Landon, se sentant comme un lycéen gauche à qui une jolie fille vient de demander les coordonnées. C’est grotesque de se sentir ainsi à son grand âge. Il hésite un peu, fixe le petit appareil quelques instants durant, avant d’enfin se décider à s’en saisir. Suite de chiffres qu’il y inscrit machinalement, sans même y réfléchir. On pourrait croire qu’il laisse son numéro à de nombreuses filles, mais même pas ; il n’aime pas laisser de trace, commencer à s’enchaîner à une demoiselle en lui laissant un moyen de le recontacter. Rares sont les filles auxquelles il accorde ce mince privilège.

Coordonnées bien vite laissées sur le cellulaire, portable qu’il rend à Eden qu’il voit vérifier le numéro, comme si elle avait le don de savoir s’il s’agissait d’un vrai ou d’un faux simplement en fixant la suite de chiffres. Mais il s’agit bien de ses coordonnées exactes, les vraies. Il n’oserait pas lui mentir ainsi ; encore aujourd’hui, il la respecte trop pour se permettre une telle chose. Et quand bien même, il a envie de la revoir. Il a besoin de la revoir. Elle lui apprend que le devoir l’appelle, qu’elle doit rendre visite à celle qu’il devine sans peine être sa grand-mère. Tête qu’il hoche doucement, petit pincement au cœur que cela lui fait toujours de se souvenir de l’état de santé plus que vacillant de la jeune femme. Il redoute le jour où elle rendra son dernier soupir. Il le redoute car il se doute que les répercussions seront terribles pour Eden.

- Bon courage, Eden.

Doux sourire qu’il lui adresse, sourire pur pour une fois, teinté une nouvelle fois de l’ombre de ses souvenirs. Car il sait ce que c’est que de voir dépérir un être proche, un être auquel on a accordé une trop grande place dans son cœur. Il ne l’a que trop vécu, avec ses aïeux d’abord, puis avec quelques-uns de ses compagnons d’arme. Les mains nichées dans les poches de son pantalon, il observe la jeune femme s’éloigner à reculons, petit sourire aux lèvres, attendant qu’elle se casse la figure à force de tenter le diable en marchant en talons sans regarder où elle va.

- Bonne soirée à toi aussi.

Sourire qui se fait plus franc, il sort sa main droite de sa poche pour la porter à son front. Doigts qui se tendent, qui singent un salut militaire. Vieille habitude qu’il a gardé du temps où il était soldat, il est désormais presque incapable de dire au revoir en agitant simplement la main. Et puis elle tourne les talons, pour de bon. Il la regarde s’éloigner, perdu dans ses pensées, jusqu’à ce qu’elle disparaisse au détour d’un couloir ; il prend alors une petite inspiration, se met en marche à son tour, prêt à quitter ces murs une bonne fois pour toutes. Contre toute attente, la demoiselle aura su tenir sur ses jambes sans s’étaler de tout son long.
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