Le maire, s’il continuait ses conneries à vous supprimer tout ce qu’il y avait de bien à Savannah, il allait finir par se prendre un méchant retour de flamme. Sérieusement quoi ? La fête d’Halloween, vous l’attendiez tous avec impatience mais non, trop dangereux. A croire que le papi avait peur des fantômes sous son lit ! Tu ne décolérais pas alors que tu filais à travers la ville, portable aux mains pour trouver le lieu exact de la contre-soirée.
Ce n’était pas bien difficile, il suffisait de chercher le lieu le plus inattendu qui soit, celui auquel personne ne penserait hormis vous autres, rats de la ville. Honnêtement, s’il n’y avait pas eue cette soirée-là, t’aurais passé ta frustration contre la mairie, ou contre les patrouilles de police. T’étais pas encore tout fait décidé.
Bref, heureusement qu’il y avait des malins pour sauver la mise et habitué à suivre le GPS, tu ne tardais pas à trouver les souterrains, avançant d’un pas rapide, tout excité à l’idée de découvrir ce qui se cachait au bout du tunnel. La peur ? Tu ne connaissais pas. D’ailleurs pour cette fois, tu avais fait quelques efforts, plus que pour la fête du lycée car ce soir, tu serais Alex DeLarge. Facile à faire et toujours son petit effet.
Passant devant QUELQU’UN qui semblait perdu, tu t’arrêtais. « T’sais à ce niveau c’est pas compliqué, faut aller tout droit hein » C’est vrai quoi, la personne semblait perdue avec son GPS mais là tout de suite, tu ne voyais pas ce qu’il y avait de difficile à comprendre.

Quelle n’avait pas été ta déception quand tu avais appris que la fête de Tybee Island avait été annulée ! Dire que tu t’étais même pris la peine d’acheter une robe sur Wish avec l’aide de Cal vu ton désintérêt le plus total pour les applications les plus basiques. Tout ça pour rien ?
Non, heureusement qu’il y avait eu ce SMS qui était tombé de nulle part et toi, quand on te souffle contre-soirée, tu ne peux qu’approuver. Alors comme ça on laissait tomber la soirée chic pour une soirée Underground ? Okay. Tu n’eus pas trop de scrupules à massacrer ta robe qui entre nous, ne valait pas un clou, ton visage était quand à lui encore suffisamment mal en point pour être réaliste et en guise de maquillage, tu ne cherchais pas bien loin : une main plongée dans la peinture fluorescente blanche que tu passais à travers le visage comme une griffure de lion et voilà. Paye ton déguisement.
Te rendre aux tous-terrains n’avait pas été bien compliqué et d’une main sur le mur, tu suivais le chemin jusqu’à rejoindre le haut lieu de rendez-vous où t’attendais un beau n’importe quoi.
Heureusement qu’il y avait de l’alcool pour aider à s’ambiancer quoi, t’attrapais l’une de bouteilles et advienne que pourra.

Les corps s’entrechoquent dans les souterrains, la nuit est noire mais les étoiles ne sont pas mortes. Elles s’illuminent sous son regard comme une myriade d’étincelles, brûlent les consciences et le fond de ses entrailles. De la peinture dorée sur sa peau mate, de la peinture qui scintille dans les ombres – et celle qu’on ne voit pas, qui se reflète dans ses pupilles, de ces tourbillons dans les veines comme des enchantements pour éteindre la dépendance. Elle danse comme si le temps n’existait pas, les ornements dans ses cheveux fauves réfléchissent les faibles lumières sur les parois détrempées - et ses lèvres s’égarent, se perdent ailleurs, trouvent le chemin d’un autre. (@Tristan Lochlann) Secondes multiples écorchées dans les souffles emmêlés, le moment est fugace mais le temps s’étend, permet aux âmes inconnues de s’éprendre un instant. Sa main libre effleure la chaleur d’une joue, prolonge les miettes d’une minute égrenée en trouvant sa nuque. Ses pensées disloquées s’embrasent au creux de son myocarde aliéné, elle s’imprègne de ce baiser volé comme elle s’accapare toujours de l’énergie des autres. Un peu de rien pour faire de ses déboires, un tout qui ne manque de rien. Sa peau s’éloigne à contrecœur de l’inconnu, et des fragments de chaleur s’abandonnent sur l’asphalte humide à mesure que la distance s’immisce. Un éclat se percute entre ses lèvres, trouve un écho au fond de ses prunelles. Elle semble ailleurs, Noa, les sens qui se chamaillent et le cœur en bataille. Loin de l’effervescence encombrée, et pourtant si présente dans la pénombre. Son regard s’accroche, seulement la promesse d’une merveille éphémère sur l’esquisse de ses lippes – et elle disparait entre les corps, s’écorche dans l’incandescence, dans les secondes qui retombent.

il se faufile entre les ombres alcoolisées, se perd au croisement des allées souterraines. tristan, il traine des pieds, peine (comme beaucoup) à trouver le point de rendez-vous. son corps en bouscule un autre et il n’sait plus bien ce qu’il fiche là, déguisé comme les autres, les traits dissimulés sous une couche d’artifices. les épaules se percutent et tristan il s’perd un peu plus dans le dédale qui se réveille sous savannah. ses baskets prennent l’eau, éclaboussent ses fringues quand les uns courent entre les intersections. une bière à la main, il tourne à droite, énième virage, l’oreille tendue sur la sono bancale. y’a son corps qui s’arrête quand l’entrée de la salle improvisée se dresse devant ses yeux, pleine des corps qui se laissent porter par les bouffées d’alcool. alors c’est un sourire qui s’esquisse sur son visage quand il reprend sa marche, cherche du regard les pupilles connues – pourtant ses sens sont happés par autre chose, souffle nouveau qui se mêle au sien, temps suspendu qui endolori son esprit. sa main libre glisse sur la taille inconnue (@noa soares), porté par le phénomène anormal qui électrise dans son cœur. de ce baiser qu’on lui vole, de l’acceptation tacite quand il lui rend. il ne cherche pas à comprendre tristan, se laisse porter par l’embrassement de ses pensées qui se dispersent en poussières. jusqu’à la rupture, le contact qui n’est plus qu’un souvenir quand tout retombe tandis que son regard croise le sien dans un long silence. sa main libre retrouve sa place dans sa poche et il n’y a plus que les mots muets qui naissent dans ses iris pour lui rappeler l’éphémère. tristan il ne bronche pas quand l’inconnue disparait entre les corps, ne laisse apparaitre qu’un sourire discret à la commissure de ses lèvres quand à son tour il se détourne pour rejoindre la foule.

Tu n’as pas peur des souterrains, ni de l’ambiance underground. Rien de ce qu’ils pouvaient faire n’égalerait l’ambiance des raves auxquelles tu participais régulièrement. Ce que tu aimais moins en revanche, c’était d’y être seule alors c’est avec un certain soulagement que tu entendis volume du son augmenter jusqu’à rejoindre ce qui semblait être l’espace principal de la soirée. Ce n’était pas fou. Loin de là. Croisant au passage Barbra, tu sifflais un « Waw, original ! » sans même te retourner, roulant des yeux en découvrant son déguisement. Harley Quinn, sérieusement ? Tu savais la blonde débile mais quand même pas au point de s’imaginer être la seule à y avoir pensé, à ce déguisement-là. Tant pis pour elle, c’est elle qui se payerait la honte.
Tu n’eus pourtant pas l’occasion de te moquer davantage de la Yobbo qu’on te percutait l’épaule. Le mouvement n’était pas si brutal mais le choc fut suffisant pour que ta fracture à la côte te lance une décharge à travers tout le corps, t’arrachant un soupire de douleur, dents serrées sur ta lèvre. Te retournant, prête à incendier le coupable, tu ne t’attendais pourtant pas à voir Trixia et tu restais un instant stupéfaite. Cela ne dura qu’une seconde, le temps de te recomposer et la regarder de haut, la mine dédaigneuse. « Tu sais quoi Trixia ? Je préfère mille fois ma bande de dégénérés comme tu dis à la brochette de putes de la tienne. T’as bien fait de partir finalement, vous allez bien ensemble. » crachais-tu en te retournant, prête à t’en aller avant de te retourner une dernière fois. « T’as pas idée de tout ce que Seven a raconté sur toi la dernière fois qu’il était def. Je te croyais quand même plus classe que ça. Ceci dit, je commence à être habituée d’être déçue de toi. » ajoutais-tu avec un regard moqueur empli d’un savant mélange de pitié et de cruauté. Tu inventais tout, Seven et toi n’aviez jamais parlé de Trixia, vous ne parliez pas du tout en fait même quand vous étiez en train de vous entre-tuer. Tu n’avais pourtant aucun mal à faire passer le mensonge pour vérité. S’il y avait bien une chose dans laquelle tu excellais, c’était bien ça. Mentir.

@Barbra Marshall @Trixia Cunningham