t'avais dans la voix la mélodie des temps nouveaux.

gamine de savannah, elle a eu le foyer aimant, ophelia. elle a eu un frère aîné, une soeur cadette, elle s'est retrouvée entre les deux sans jamais manquer de rien. papa était ouvrier, maman était cuistot - elle avait le don pour faire des petits plats à s'en éclater la panse.

elle a eu le foyer aimant, elle a eu l'enfance dans des couleurs douces et chaudes. parce que les voisins d'à côté c'était les vance, parce que y'avait leur fils, fran chez qui elle venait toquer. inséparables depuis leur première discussion, l'adolescence s'est vue ponctuée de couleurs plus vives - de noeuds dans l'estomac, d'yeux qui louchent sur des hanches, des bouches aussi.

elle était déterminée ophelia, à réussir ses études, à faire quelque chose de grand dans sa vie - elle aurait souhaité changer totalement le monde avec une théorie. ophelia son truc c'était les mathématiques, les matières scientifiques - pas forcément sans poésie, elle a toujours bien aimé les romans qu'en finissent pas, mais dans le domaine de la science-fiction. nerd à qui on voulait arracher toute l'attention, elle en donnait des rattrapages à fran - il le savait déjà à cette époque qu'il allait s'engager dans l'armée. à 18 ans fran se barre pour le service, il y revient à 21 ans, pas forcément homme nouveau, mais un truc a changé dans ses yeux.

ils s'embrassent à une heure totalement lambda.
ils s'embrassent quelques minutes.

c'était un accord passé à deux - de se dire enfin ce qui tombait sur le coeur comme un coup de massue. puis tout s'est enchaîné, parce qu'ophelia elle la voulait son idylle, de l'emménagement jusqu'à la demande au mariage à 23 ans, l'arrivée de leur gamine à 27 ans, petite jane, jolie jane qui lui en aura fait baver pendant neuf mois jusqu'à ce qu'elle la dégage de ses entrailles.

elle devait attendre, ophelia. mais c'était sans broncher. elle devait attendre, ophelia. mais c'était toujours en sachant qu'il reviendrait - entier, sain et sauf, les bras ouverts pour accueillir sa famille.

un jour fran il est rentré changé, un jour fran il est rentré pour plus jamais repartir. stress-post traumatique, ça s'est accumulé sur les épaules d'ophelia. elle a tout fait, tout fait, elle a attendu, elle a essayé de rassurer. mais c'était trop dur, trop dur de le voir se réveiller en pleine nuit en hurlant, de le voir incapable de mettre un pied dehors, de l'entendre dégainer son arme au moindre bruit, de le sentir basculer entre l'avant et la réalité. il a eu beau s'excuser, il a eu beau dire je t'aime sans compter, elle a préféré mettre en sécurité sa gosse, ophelia, sans prendre le risque qu'un jour il les plombe sous une crise.

séparation brutale, c'était sans compter sur le divorce qu'a bouffé en temps, un an durant lequel la bataille a pas été bien rude - fran voulait pas signer. puis il l'a fait, il l'a fait, le visage fermé. dans tout ça y'avait marqué que selon les améliorations il pourrait voir de plus en plus jane.

au départ c'était rien,
puis une après-midi surveillée dans le mois,
puis une après-midi sans surveillance,
y'a l'espoir qu'un jour il puisse l'avoir toute une journée.

ophelia et fran ça s'est cassé la gueule comme une catastrophe naturelle - c'était pas prévu, c'était pas souhaité. ophelia dans tout ça, elle a été dépassée, dans tout ça, elle a jamais autant flippé - chacun s'en veut à sa manière, chacun aurait aimé faire mieux.
ils ont fait comme ils ont pu,
à s'en briser le coeur.