ends of the earth → sal

i can't get no satisfaction → C'est franchement à en planer.
Sa mère est pas là, pour une raison qui lui échappe totalement. Elle rentrera peut-être, prendra une taffe, puis disparaîtra, pour se mettre au lit. Ou peut-être ne reviendra-t-elle jamais.
Qu'est-ce qu'il en sait, c'est pas son problème.
Mais en ce soir d'Août, il a passé sa journée à travailler à l'épicerie. Son cher gang est passé le voir, en soutien, ils ont tous acheté un petit quelque chose, des private jokes surtout. Et en dernier, c'est Sal qui est passé, avec sa tignasse noire, et ses ongles corbeau. Isaac s'est marré, et il a rapidement proposé un rendez-vous dans la soirée (après tout, ils se font tous chier s'ils ne taffent pas), ce qu'a accepté Sal. Les autres avaient d'autres plans, qu'à cela ne tienne, ils se retrouvent donc, tous les deux, dans le jardin priceless des Price.
Il y a une balancelle sur le perron, Isaac y est allongé, comme un poids plume. A côté, trône Sal, dans l'immense fauteuil en osier à la Emmanuelle. Il a l'air d'un roi comme ça. Et, comme la beu commence salement à lui monter au crâne, Isaac balance, doucement : "Tu ressembles... à... une sorte de ... de souverain indien... " Il marque un temps, tire une longue taffe, puis lui tend le joint. " Franchement, t'as des... des airs... des majesté, l'osier te ... va au teint." Il lui sourit, amusé.

fin du monde

isaac et sal

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à l'origine, il sait plus pourquoi il est venu. il sait plus pourquoi il a toqué à la porte, pourquoi il s'est installé dans ce fauteuil de jardin immense - trop pour lui -, il sait plus pourquoi il se retrouve là, à recracher de la fumée par la bouche comme par les narines. le fait est que la pensée s'évapore, brûlée par un soleil couché - elle se tait pour son plus grand plaisir à sal, en même temps que les battements de son coeur qui tombent peu à peu, ne ressemblent plus à des tambours, mais à de simples ailes qui s'effritent entre elles. il inspire profondément, les jambes ramenées sous sa carcasse. il regarde isaac, le jauge, sent déjà qu'il s'est tiré vers d'autres galaxies - ou ne serait-ce qu'une dont il voit des couleurs portant des noms qui lui échappent. il se marre, se marre un peu plus fort à chaque fois. il écoute, hoche la tête, se penche pour reprendre le joint qu'il se cale au bec, il tire - ça monte à mesure, progressivement, c'est une pluie lente qui d'un coup va le noyer, lui et la population toute entière.
- un souv'rain indien. he bah mon gars, t'es inspiré. il glousse à gorge dévoilée, pourrait tomber en arrière si y'avait pas ce dossier qui fait la taille d'une tête en ballon de baudruche. il pince sa lèvre inférieure, tapote sur le bâton pour laisser tomber la cendre toxique - il sent même plus l'odeur à force de l'avoir sous le pif. majesté c'plutôt cool comme titre. majesté du royaume sous-terrain, avec la tripotée d'rats qui va avec façon joueur de flûte de hamelin. il peut pas s'en empêcher, ses cordes vocales réagissent à nouveau sous le rire. paupières closes, arrière de la tête qui le soutient, il se détache de chacun ses membres - disloqué en plusieurs petits bouts, sans souffrir pour autant.
- tu supportes encore moins qu'moi, c'est fou ça. l'a sans doute pas assez tiré, l'a sans doute trop crapoté - y'a toujours des raisons à expliquer, parce que sal il est un peu tricheur, un peu menteur, un poil fourbe et moqueur.

i can't get no satisfaction → Il lui faut généralement une dizaine de minutes, et ça y est, il plane totalement. De par sa faible constitution, il sait qu'il peut s'élever au dessus du sol beaucoup trop vite, et beaucoup trop fort. Doucement, il se laisse aller, il regarder le plafond. Il n'attend pas son bad trip, ni la fin de la nuit. Il n'attend rien de spécial, juste, fumer, encore fumer. Se balancer, sur la balancelle du jardin, regarder le porche, et écouter Sal.
Il est proche de Sal... Il l'a toujours été. Malgré les liens inébranlables de leur petite bande, malgré l'affection qu'il leur porte à tous, Sal a toujours été le plus spécial. Il est aussi lunaire que lui même est solaire, et ses idées, ses envies, ses lubies étranges le font toujours relativiser. Peut-être que lui même est dans le faux, peut-être que ouai, il vaut mieux être gothique, voir le mal et la nuit partout.
Mais il pense à tout ça parce qu'il plane, sans nul doute, et il répond, doucement : "Pourquoi ... toujours les sous-terrains..." Il tend la main par la balancelle, lui intimant sans un mot de lui donner le joint. " Pourquoi des roi, des rats... T'es très bien sans rat..." Il garde les yeux fermés.

fin du monde

isaac et sal

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y'a dans le regard d'isaac comme un combat constant qui se joue, comme une guerre entre deux clans - une bataille qui peut pas se finir bien. y'a dans le regard d'isaac comme un moment de flottement, un soupçon de néant qui bouffe tout sur son passage - et recrache étrangement de la lumière. ça l'amuse, sal, d'y discerner quelques faiblesses que personne arrive à toucher du bout des ongles. il laisse retomber ses jambes, se penche pour lui filer le pétard alors que ses coudes se calent sur ses genoux, et entre ses paumes il vient accueillir son menton. sourire sur la face qui vient grandir sa mine palote, il hausse les épaules sous les questions pertinentes. elles valent ce qu'elles valent, elles foutent la tête chevelue face à des logiques qui lui échappent lui-même - à force d'écouter les mauvaises vannes et les racontars, il aura fini par y croire, qu'il fait partie d'une secte qui chaque vendredi fout le feu à un animal à la gloire d'un dieu vengeur.
- y'a trop d'gens à la lumière. en général c'est les plus cons qui restent, parce qu'ils ont peur du noir. c'est pas comme s'il en avait peur, lui, il saurait même pas dire exactement - juste qu'il est assez peu peureux pour pas s'infliger la petite veilleuse. il baisse la tête, se marre, passe quelques doigts dans ses cheveux qu'il monte finalement en une queue-de-cheval ratée. puis t'sais, ça doit pas être si mal en bas, t'fous deux-trois posters d'chatons mignons et tu t'sens comme à la maison.
il rit, rit à nouveau, il en perdrait presque la notion de son corps maigrelet. il s'étire, fait craquer quelques os dans l'air - il le zieute encore. isaac il a rien des belles gueules du lycée, il a les joues creusées à la pioche et des cernes qui font la même profondeur que des tranchées - il est trop grand, trop maigre, trop tout. il a juste deux grands yeux verts qui rattrapent, d'un vert tellement vert qu'il aurait pas besoin d'en porter plus pour la saint patrick - il pince sa lèvre inférieure, ricane à nouveau.
- ouaais, l'soleil c'est surfait. c'est qu'une boule de gaz jaune. inspiration profonde, il ressent les crevasses dans ses poumons - on a pas idée de souiller ses organes pour une clope trafiquée. c'est comme tout. tout est trop surfait. on t'vend la chose avec un super packaging puis tu t'retrouve avec un produit pérave. l'soleil c'est surfait, ouais. l'soleil, les études, les amours, les rêves et les cauchemars. il s'approuve un peu en hochant la tête, il a les yeux qui brillent d'un éclat de folie légère.
- même moi j'suis surfait.
il se raccroche à son regard comme à un dernier rempart.

i can't get no satisfaction → Sal a le don incroyable de parler beaucoup et de donner du sens à ses mots. Il comprend pas vraiment comment il fait d'ailleurs. Isaac a rencontré beaucoup trop de personnes qui parlent, parlent parlent, sans ne rien dire, et qui ne font que combler le vide intersidéral de leurs vies.
Oui le vide intersidéral de leurs vies.
Sal a certainement une vie loin d'être vide, ce qui explique qu'il parle en expliquant autant de choses, en se concentrant à ce point sur ce qu'il dit, parler de lumière, d'ombre, de joueur de flûte, de villes abandonnées par les rats...
Le soleil, les études, les amours, les rêves, les cauchemars...
En fait, il est complètement en train de partir en vrille, la beu aidant certainement. Isaac le regarde partir à la dérive, comme un astronaute sans son fil, comme un martien qui manque d'oxygène. Ca le fait rire de l'écouter, il comprend qu'à moitié, parce que tout tourne, parce que son sens des priorités est cassé en mille morceaux. Et puis il se lève, il s'appuie contre la rambarde de sa terrasse, dernier rempart avant son jardin. Il respire un grand bol d'air frais avant de lui reprendre le joint. Il glisse : "T'es pas surfait." Il tire, tire tire de toutes ses forces, et il a la tête qui tourne, comme un con. Il reste à regarder son jardin. Il glisse : "Les gens surfaits c'est ceux qui se rendent pas compte... de... de la valeur des gens autour d'eux." Il fronce les sourcils et le regarde, en souriant. "Tu vois c'que j'veux dire ou ça veut rien dire ? "

fin du monde

isaac et sal

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tout qu'est surfait, tout qui se repasse avec un beau packaging pour vendre de la merde qui colle au cul, colle aux dents, colle dans les entrailles jusqu'à les faire pourrir. tout qu'est surfait, lui eux, tous qui se complaisent dans des idéaux bidons qui arrivent à créer des guerres ici ou là. il délire complet sal, il plane un peu, assez pour que ça parte en un effet domino - il regarde isaac faire sans trop se miner, puis le rejoint en l'écoutant, presque rieur. il a toujours eu le chic de l'ouvrir pour rassurer, pour passer un peu de pommade sur la brûlure, mettre un bandage autour de la plaie pour empêcher que l'autre se vide totalement. il se dit qu'il ferait un bon médecin, un super infirmier ou peu importe, tant qu'il s'agit de s'occuper des autres. du reste, il doute de sa capacité à bien se garder debout - à bien le regarder, isaac, y'a quelque chose qui déconne, même ses jambes peinent à se toucher, y'a tout son corps qu'est déstructuré, qui fait pas masse humaine mais squelette suspendu un jour d'halloween. il croise ses bras sur la rambarde, essaie de trouver plus de charme qu'il le faudrait au jardin.
- j'crois. la valeur des choses, la valeur des gens, la valeur d'un instant, la valeur d'une pauvre seconde qui d'ordinaire ressemble à une perte de temps - pourtant il le percute sal, que demain sera pas pareil qu'hier, et que finalement rien se ressemble, donnant un mauvais collage de vie. il sourit vaguement, s'attarde sur la mine déconfite de l'autre qui menace de pioncer à chaque clignement de cils, qu'a la mâchoire aussi fine qu'un couteau - à y toucher, il se doute qu'il pourrait se couper un doigt. n'empêche qu'il lui reprend le joint, qu'il sait pas quoi en faire sur la seconde, qu'il prend une taffe avant de lui souffler un peu à la tronche - partager le délire niveau un, qui vaut rien face aux grands camés qui dorment trois jours entiers à cause de la coke qui coule dans leurs veines. puis il remarque qu'il est proche, qu'il est pas loin - que sa bouche est loin d'être dégueulasse, un peu fine, un peu maigrelette, mais ça s'accorde avec tout le reste. il sait pas ce qu'il pige sal, si c'est dans les iris que ça se joue, comme un éclair de lucidité - comme un besoin évident, comme un doute à effacer de la paume des mains. si ça fait pareil que chez les gonzesses. alors il le chope, alors il tente, alors il claque un baiser, il sait pas s'il a une réponse ou non, il percute à peine ce qu'il est en train de faire - il se recule, après une, deux, trois, peut-être plus, juste un claquement de doigts en réalité. ça a le goût du joint, du tabac, de rien qui saurait le choquer - ça brûle pas, ça mord pas, ça fait rien de plus. c'est juste une bouche comme une autre, comme il en trouve chez les nanas de sa classe, comme il en trouve chez la voisine, chez les correspondantes ou celles au bout du monde. il sait pas pourquoi, il a envie d'en remettre une couche - sans doute par désespoir de cause. mais il se retient sal, il se marre comme un pauvre débile devant une tragédie.
- désolé j'voulais vérifier un truc - fin, ouais. ou c'est l'pétard. ou la pleine lune. ou tout ça en même temps. y'a même pas de pleine lune. n'empêche que y'a pas de quoi s'alarmer, ni de quoi paniquer, un baiser c'est un baiser, que ce soit chez l'une ou l'un, que ça ait un peu de barbe ou du rouge sur les dents. honnêtement isaac, tarde pas à t'coucher, on dirait qu'tu vas tomber en poussières.

i can't get no satisfaction → Et le ciel, soudainement, prend plus une couleur pourpre que noire. Noir désir, comme disait son père, dit sa mère. Ce sont des rumeurs, mais le ciel ne lui a jamais paru inspirer le désir. Mais ce soir, étrangement, le ciel lui semble étrange. Un peu plus clair, un peu plus rouge, sans doute gorgé de désir ouai, comme aurait tendance à le dire sa mère, qui est dieu seul sait où.
Alors il tend le joint, regarde son partenaire de défonce. Il regarde attentivement ses cheveux, qui semblent prendre vie sous ses yeux. Sal, qui avait la gueule d'un épouvantail, qui doucement, entre dans son glow up. Cette phase merveilleuse de l'adolescence où on passe de laid à désirable, et où soudainement, tout le lycée veut vous sauter dessus. Isaac lui, il a pas encore eu son glow up, sans doute que personne veut lui sauter dessus.

Pourtant, à mesure qu'il regarde Sal, ouai, il le voit pas venir.
Ce baiser étrange, qui sort de nulle part, qui se mêle de fumée, de sourire, d'excitation brute.
Ce baiser en trois temps qui le surprise, ce premier mouvement de lèvre, le second, le troisième, pour prendre le temps.
Quelques secondes, pas plus.
Rien de plus que quelques secondes, volées à l'univers, ou dans certains endroits du globe, ils seraient condamnés à mort.
Isaac il ferme les yeux, il fronce les sourcils. Il plane, il ose pas rouvrir les paupières, étrangement, profite de l'air froid sur ses lèvres, humides.
Et vient la raison. Il voulait vérifier quelque chose, oui bien sûr. Il rouvre les yeux, s'appuie des deux coudes sur la rambarde de son jardin, et glisse, en se marrant : "Tu voulais vérifier quoi ?" Et il ajoute : " Non j'vais pas m'coucher, ça d'vient de plus en plus intéressant eh !"

fin du monde

isaac et sal

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vérifier que tout fonctionne. vérifier pour le bonheur de vérifier, parce que le doute est pas permis et que ça bouffe autant qu'un groupe de termites voraces. ça lui fait un petit quelque chose, quelque part dans le creux de son coeur ridicule, même dans le fond de son ventre qui se tord en un noeud qu'on fout sur un cadeau. il regarde l'horizon, il est pas sûr qu'isaac ait même percuté l'utilité du geste, ni même s'il va s'en souvenir demain - il s'en cogne un peu, sal, il a fait ce qu'il voulait faire, sans concessions. il se sent un peu bête, un peu con à mesure que ça avance - il s'attend à finir gêné, ou de quoi le foutre à terre pendant au moins quelques heures. pourtant y'a rien de foncièrement méchant qui sort de la bouche de son aîné, il est même pas loin du rire à mi-satisfait et empathique. il se bouffe un peu la joue, inspire profondément, tire à nouveau sur le bédot qu'arrive à sa fin.
- des choses. des tas d'trucs. enfin juste un truc. juste si c'est pareil. voir c'que ça change, d'une bouche à l'autre. au final c'est le même manège. toujours aussi agréable, toujours aussi partagé. il laisse la dernière taffe à isaac, cale son coude sur la rambarde et glisse dans sa paume sa joue. il passe le bout de sa langue sur ses lèvres. p'tête que j'suis gay. p'tête que j'suis rien du tout. pousse un soupir, quelques doigts se mêlent à ses propres boucles qui tombent sur ses tempes, elles sont longues, sans doute trop. il revoit sa mère lui dire d'aller chez le coiffeur - et lui ne plus l'écouter. il ferme les yeux quelques secondes.
- t'as été mon crash-test, c'est pas cool. j'suis désolé. grimace, il le pense pourtant. sal a jamais été bon pour les grandes jérémiades, les excuses qui s'écrivent de l'épaule jusqu'aux doigts. n'empêche qu'il continue de pas regarder en face - qu'il a la tête qui tourne, qu'il marche au ralenti. y'a tout qui se confond.

i can't get no satisfaction → Il peut pas s'empêcher, glisser sa langue sur ses lèvres, glisser ses lèvres sur celles de Sal.
C'est pas son premier baiser, son premier baiser c'était avec Sally Graczvska en primaire. Elle était vraiment mignonne, ils s'étaient cachés il sait plus où, et s'étaient échangés un baiser romantique.
Sal.
Sally.
Han.
Son premier baiser avec un mec est avec Sal, c'est marrant comme l'univers est drôle. Et lui ça le fait sourire, avec son joint qu'il finit, entre ses lèvres. C'est comme s'ils étaient embrassés plusieurs fois, par joint interposé. Il le regarde, il l'écoute, avec ses cheveux en travers de la gueule, qui témoignent d'une crise d'adolescence déjà bien entamé. Il en est plus là lui, il a passé ce cap, il est dans le déni de bien des choses, mais pas de ses cheveux.
Il l'écoute ouai, expliquer ce qu'il se passe dans sa tête, s'il voulait vérifier si fille et mec, c'était bien pareil. Isaac le regarde, fronce un peu les sourcils. Et il anticipe sa question. Est-ce qu'il est gay ? Peut-être bien du coup. Quel groupe de bras cassés. Et il s'excuse finalement, alors que Isaac répond : "Bah non t'excuses pas." Il regarde devant lui. Et puis il demande : "Du coup, t'es gay ou t'es rien ?" Aussi intéressé qu'on peut l'être. Et puis il ajoute, sourire en coin : " Ou t'es tout ? "

fin du monde

isaac et sal

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c'est pas grave qu'il dit, c'est pas un drame qu'il dit. alors il veut bien le croire, se dire qu'il a raison, que y'a pire dans le monde que deux types ou deux nanas qui s'en roulent une, que ce soit pour rire ou à un moment bien trop sérieux. il se redresse finalement, prend appui sur la rambarde et se penche en avant, tenté de rejoindre le sol par une quelconque pulsion. mais il se retient, il sourit un peu, plus grand à chaque seconde qui passe - il est pertinent le isaac, il sait poser les bonnes questions. il fera un bon père de famille - même s'il a du mal à se dire qu'un jour il aura de la barbe sur la gueule, un boulot posé et un labrador dans son jardin. inspiration profonde, haussement d'épaules mollasson.
- j'suis tout et rien. pincement de lèvres inférieures, ça fait battre son coeur, la galère de trouver l'étiquette qu'elle soit rose, bleue ou encore verte. la galère de se poser, d'affirmer haut et forme qu'il est né homme, qu'il est ainsi ou autrement. il veut juste se dire que ça a pas d'importance, que c'est juste pour les convenances, qu'on ira le tirer par la peau du cul pour qu'il hurle haut et fort ce qu'il est, pour le malsain d'autrui, pour que tout le monde sache qu'il est d'une tendance ou d'une autre. j'suuuuuiiis - j'suis un néant. ouais ça m'plaît bien. pas besoin de bavasser trop longtemps, d'en dire des bonnes, de voir des choses aux gens et de m'faire des névroses. j'suis ça ou ça, j'sais pas trop. j'suis ici et j'pense que c'est déjà pas si mal. non ? j'sais pas trop. j'ai la tête embrouillée, j'ai l'impression d'avoir d'la barba papa à la place du cerveau ou de la fumée, ou du slime, ou -
il s'emballe, il débite. il pousse un soupir, continue de se pencher, s'attarde sur les brins d'herbe.
- je suis, mon bon monsieur, un dommage collatéral de l'humanité.
un rire, un silence.
- aaaah merde isaaaac, j'suis pété. tu fatigues.

i can't get no satisfaction → De nouveau, Sal qui explique, Sal qui tortille.
Sal, Sal qui est lui même, qui dramatise, qui enjolive, qui rend tout plus brillant, plus épique. Il n'y a rien d'épique à être gay, à embrasser des types quand on est un mec, à embrasser des nanas qu'on a rien entre les jambes. Il n'y a rien d'incroyable dans leurs vies, dans leur premier baiser, dans leur joint, dans leurs regards.
Mais Sal...
Ouai, c'est le conteur. Celui qui, au coin du feu, raconte les histoires de chasseurs, de vampires, de meurtriers aventuriers, d'éternels insatisfaits, qui trépassent sous les coups de l'amour.
Sal c'est le conteur, son conteur, qui se plait à penser néant (mais il est quelque chose, aucun vite entre ses atomes), barbe à papa, fumée, slime, tout et rien, un véritable anthropomorphe, une véritable persona, qui est sans exister.
Exister, être par l'extérieur, être par la beauté.
Puis, vient cette phrase.
"Je suis, mon bon seigneur, un dommage collatéral de l'humanité." Sal sourit, gentiment. Il secoue la tête de droite à gauche. Il n'est pas d'accord, il ne comprend pas, il n'écoute plus. Il le regarde, simplement, du haut de sa fumée interdite. " C'est très prétentieux et pas clair du tout." Un rire, un silence.
Il se rapproche. Il passe une main dans ses cheveux.
Puis il passe la main autour de son épaule.
"Viens, on va s'coucher, tu dis trop d'conneries."

Dans un roman, à ce moment, ils iraient dormir. Dans le lit, doucement, ils se caresseraient, s'embrasseraient, découvriraient les émois adolescents, en manquant de respirer, en se pelotant doucement.
Dans un porno, ils s'embrasseraient follement, ils finiraient dans le pieu d'Isaac, où ils devraient éviter les représailles d'un père (qui ne serait, soudainement, plus absent). Ils testeraient mille et une positions, pour une première fois, évidemment.
Dans un film, il y aurait une main sur la sienne, puis des baisers dans la chambre, et un long travelling lattéral, peut-être des bruits, pour suggérer.

Dans la réalité, ils vont se coucher, et ils dorment.

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» Jaelyn ≈ wake me up when september ends.

ends of the earth → sal

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