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 no man's land (sevih)

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Seven Popescu

Seven Popescu
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MessageSujet: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptyDim 11 Mar - 15:25

Les heures sont devenues des jours et maintenant il sait qu'elle va bien, que son état est stable, qu'elle est réveillée. Il sait parce qu'elle refuse de le voir, parce que chaque fois qu'il demande le numéro de sa chambre on lui dit non, chaque fois qu'il essaie de s'aventurer dans les étages on le force à faire demi-tour. Il explose en continu, insulte le personnel hospitalier et tous ceux qui ont le malheur de s'mettre en travers de sa route, il se fait sortir par la sécurité et chaque fois il revient à la charge, chaque fois il fait de nouvelles tentatives.

Elle a pas l'droit putain.

Au fond il sait quand même pourquoi elle le fait – pour les mêmes raisons qui l'ont poussée à faire ça chez lui, dans sa chambre, avec sa drogue. Pour qu'il sache qu'elle lui en veut, qu'elle le déteste sûrement, qu'il a réussi à tout foirer même avec elle. Même avec celle qui est restée là contre vents et marées, qui a affronté ses tempêtes de rage et de violence, qui a toujours cru qu'il restait du bon en lui. P't'être qu'il a fini par la convaincre que non, p't'être qu'il a enfin gâché tout ce qu'il avait. Si même Anca ne veut plus le voir, il lui reste quoi ?

Le cul vissé au banc devant l'hôpital, il fume clope sur clope, prunelles rivées sur ses pieds alors qu'il rumine. Il n'fait que ça depuis qu'il l'a trouvée, depuis qu'il a transformé la tristesse en rage, les larmes qu'il a ravalées jusqu'à en faire de la lave en fusion, jusqu'à se sentir comme un volcan prêt à entrer en éruption. Il cherche des responsables pour oublier sa propre culpabilité, pour oublier qu'il n'arrive plus à respirer. Il blâme le monde entier, les Popescu qui n'ont pas suffi à la retenir, les proches qui n'ont pas été là, les bourreaux qui l'ont brisée. Les Yobbos et les Kids et cette guerre à la con qui a foutu toute sa vie en l'air, JJ qui l'a achevée, Malo qui lui a pas filé le flingue qu'il aurait pu utiliser pour terminer la partie une bonne fois pour toutes. Il les blâme tous autant qu'ils sont et il cultive sa haine il alimente sa fureur, il utilise tout ça en carburant pour ne pas s'écrouler.

Il mange pas, il dort pas, il passe son temps entre l'hôpital et les rues, à crécher chez Noa et à vouloir fracasser tout l'univers. Il voudrait s'en prendre à JJ mais il a pas réussi à l'trouver et il fulmine, il ressasse tout ce qui s'est passé, tout ce qu'il aurait voulu éviter. Il regarde les gens passer et prie pour ne pas croiser un membre de sa famille, pour ne pas avoir à les affronter. La seule chose qui le rassure c'est qu'Anca veut pas voir les autres non plus, elle les refuse tous et il s'dit que si elle les met tous dans le même panier c'est qu'il est peut-être pas foutu, c'est qu'elle finira par changer d'avis parce qu'elle arrivera pas à se tenir loin d'eux pour toujours – elle est pas comme lui, elle les aime trop pour les renier.

Le monde continue de tourner et les silhouettes se succèdent les unes après les autres devant lui, entrent et sortent, il voit des gens chialer et d'autres sourire comme si c'était le plus beau jour de leur vie. Il a envie de tous les insulter, d'leur dire que leur tristesse sera jamais pire que sa rage, que leur bonheur est à gerber. Il les fusille du regard et il fume et il a les poings qui tremblent, les traits creusés par le manque de sommeil et d'alimentation, les yeux injectés, le regard détraqué. Il les déteste tous autant qu'ils sont et il s'applique à le leur faire comprendre comme s'il avait quelque chose de personnel contre chacun d'entre eux, même s'il ne les connaît pas. Jusqu'à ce qu'une silhouette se détache des autres quand elle passe les portes, quand elle avance de cette allure trop familière. Il reconnaît les épaules voûtées et les yeux trop globuleux – c'est Sam. En temps normal il se serait planqué sous sa capuche ou il se serait tiré, il aurait fait en sorte de ne surtout pas le croiser étant donné le contexte de leur dernière rencontre, toutes ces choses qu'il ne veut pas assumer. Pourtant il y pense à peine, ça lui paraît pas important. Pas quand Anca est là-dedans parce qu'elle a voulu crever, parce qu'il a l'impression de l'avoir tuée, parce qu'il est convaincu que JJ l'a assassinée.

Quand il se lève c'est instinctif, son mégot qu'il balance sans regarder où il atterrit avant de se ruer vers Sam comme un boulet de canon. Ses mains qui attrapent son col violemment, ses prunelles qui se plantent dans les siennes et peut-être que pour la première fois c'est lui qui a le regard le plus fou. « IL EST OÙ ? » Il se met à le secouer dans des mouvements brutaux, sa rage qui suinte par tous ses pores et qui charge l'atmosphère d'une tension électrique. « Il a touché à ma sœur putain j'vais l'buter. » Et il n'a même pas besoin de préciser qui, Sam saura. C'est toujours le même c'est une évidence, celui qui fait le plus de dégâts, celui qui fracasse tout sur son passage et qui se marre en voyant le chaos qu'il répand dans son sillage. Il a jamais eu autant envie de lui faire la peau. « Tu l'savais ? Tu savais c'qu'il faisait ? » S'il savait il le tuera aussi il se le jure, il les tuera tous jusqu'au dernier s'il le faut et tant pis s'il doit crever avec, à ce stade il en a plus grand-chose à foutre. Tout ce qu'il veut c'est que quelqu'un paie, rien d'autre n'a d'importance. La seule chose qui le fait tenir c'est l'idée de se venger.
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Samih Scully

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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptyMar 20 Mar - 11:14

Il passait son temps à aller la voir, sans même qu’elle ne le sache. Il venait, chaque matin, chaque soir. Il parcourait en bus, en voiture, ou même à pied le chemin jusqu’à l’hôpital et se plantait au bout du couloir, un café crème dans la main, sans oser parcourir la distance qui le séparait de sa chambre. Il détestait le café crème Sam, mais c’était la boisson préférée de Trixia. Il ne savait même pas si elle était autorisée à en boire, il évitait ses médecins comme la peste. Mais il lui en apportait, tous les jours. Et trop lâche pour se confronter à nouveau à elle, il finissait par le boire seul, dans la salle d’attente. Il restait quelques heures planté là, surtout pour retarder le moment où il rentrerait à la colocation. Les premiers jours ça avait été pour éviter JJ, maintenant que ce n’était plus un problème, c’était simplement pour éviter de parler à qui que ce soit. Qui que ce soit qui pourrait poser la question de trop et qui ferait déborder de ses lèvres cette vérité apocalyptique logée dans son cerveau comme une putain de balle de sniper. Cette vérité avait fracassé son crâne et tracé un sillon dans son lobe frontal. Il tenait encore debout par on ne sait quel miracle, mais dès qu’il voudrait bouger, dès qu’il voudrait déloger cette vérité bien cachée, l’hémorragie le tuerait, il s’effondrerait. Alors il évitait tout simplement les gens. De toute façon, s’il avait besoin de parlé, l’autre était là. Enfin, plus ou moins. Il était plutôt silencieux ces derniers jours. Comme si, même lui, ne trouvait plus les mots.

Le café crème dans une main, l’autre enfoncée profondément dans sa veste à capuche qu’il ne quittait quasiment jamais, il passait comme tous les jours à travers le parking de l’hôpital, pour croiser les mêmes visages déconfits, les mêmes yeux désespérés qu’ont ces gens. Mais Samih les ignorait toujours, c’était comme s’il portait des oeillères, comme si son champ de vision s’était réduit, ne lui ouvrant qu’une toute petite fenêtre sur le monde, assez pour voir où il mettait ses pieds, pas plus. En fait, c’était réellement le cas, Sam avait pris 2 anxiolytiques et un cachet d’oxy avant de venir. Fallait ajuster le traitement. Parce que clairement, y a plus rien qui suffisait. Il avait l’impression d’être un évier sans bouchon, et plus il prenait de calmants, plus il en avait besoin. Rien n’était assez fort pour éclater son crâne et s’empêcher de penser. S’empêcher de péter littéralement un câble. Parce que JJ avait violé sa soeur. JJ avait brisé Assia. Son propre frère, celui en qui il avait la confiance la plus aveugle. Il l’avait trahit une fois, deux fois, trois fois. Ca faisait combien de temps qu’il mentait, combien de temps putain ? Voilà, il n’avait décidément pas pris assez de calmants.

Du coup, il ne vit pas arriver Seven. Il déboula de nulle part et l’agrippa fermement au col de sa veste, pour le secouer comme un putain de pommier. Sam fit tomber le café crème. Tant mieux, on déteste ça. Les yeux de Sam se braquèrent sur le bitume, sur le café qui s’écoulait sur ses baskets. Il n’opposait aucune résistance à Seven, aucune. Il se laissait faire, trop amorphe pour ne serait-ce que réagir. L’inertie c’était sa nouvelle grande technique de survie : ne rien faire. Rien du tout. Attendre. IL EST OÙ ? JJ, il parlait de lui. Pas besoin d’être Einstein pour le comprendre. Sam gardait le silence, doucement ses grands yeux globuleux, brillants d’émotion, trop à fleur de peau pour gérer correctement ses émotions se posèrent sur Seven. Il se rendit soudain compte qu’il ne le détestait pas. Qu’il ne l’avait peut-être jamais détesté, en fait. Il y avait eu toute cette vendetta contre lui, toute cette haine qu’il s’était persuadé de devoir éprouver contre lui. Parce que c’était facile de se dire que Seven était la cause de tous ses problèmes. Il faisait partie de l’équipe adverse, il était impulsif, un vrai malade, un drogué de la pire espèce. C’était facile de lui faire porter le chapeau et c’était incroyablement cohérent. Et puis, là, d’un coup, on levait le voile, on retirait le filtre et Sam se rendit soudain compte de qui était Seven. Qu’il n’était qu’un gamin, un vrai gamin. Il avait à peine vingt ans, il était aussi drogué que Sam l’était, il était aussi mal dans sa peau qu’un adolescent en pleine réflexion sur sa sexualité. Il était… un gosse. Rien qu’un gosse comme Max, ou Ailish, ou Eanna. Ils étaient tous des putains de gosses. Et il n’y avait rien de différent entre Max et Seven. Rien de différent entre Barbra et Ailish. Ou entre Sam et Jimmy. Soudain, c’était clair. Ce n’était plus les Kids contre les Yobbos. C’était JJ contre le reste du monde.

Il est pas là. Qu’il répondit simplement. Ca ne suffisait pas, clairement. Et Sam ne savait même pas pourquoi Seven était dans un tel état, ni ce qu’il foutait à l’hôpital. Peut-être bien qu’il s’était choppé une saloperie, un genre d'herpès, en se faisant des choses avec JJ, ça ne serait pas tellement étonnant. Sam avait mis dans un coin cette partie de l’histoire, parce que clairement, il avait assez à reprocher à JJ avant de se mettre à réfléchir sur ses activités homosexuelles sous la contrainte. Vraiment. Et pourtant, Seven ne tarda pas à reprendre, avec la rage du type désespéré, cette même rage que l’égyptien ne connaissait que trop bien maintenant. Il a touché à ma sœur putain j'vais l'buter. Combien de soeur avait-il touché ? Combien de vies avait-il foutu en l’air ? Quand on y réfléchit deux secondes, c’est presque drôle. Drôle d’une sale manière. JJ était le plus idiot, le plus irresponsable, le gosse. Et c’était lui qui avait tout foutu en l’air. Leur belle dynamique, cette routine d’excitante d’autrefois. Sam se rappelait du temps où il était juste question de mettre de la crème dépilatoire dans le shampoing des filles ou de jouer gentiment des poings pour une bière renversée. Ce temps-là, où ce n’était pas si grave, ce même temps qui avait posé les jalons d’une toute nouvelle dynamique. Celle d’un type qui a complètement basculé dans quelque chose de plus sombre, entraînant avec lui tout ceux qui osait s’en approchait. Sam restait toujours aussi mou, complètement amorphe, les bras le long du corps à laisser Seven le secouer dans tous les sens, le visage tordu par la terreur. Quelle soeur ? Comment ça touché ? Sam aurait aimé lui poser toutes ces questions, mais il n’y arrivait pas. Parce que ça serait le mot de trop qu’il tentait de retenir depuis qu’il avait su. Et il n’avait pas encore la force d’en parler. Une fois que ça serait fait, le bruit se répandait partout. JJ serait un homme mort, il n’y aurait plus de retour en arrière. Y a déjà, plus de retour en arrière possible. C’était une affaire qu’il devait régler lui-même, avec JJ. Et devant le mutisme de Sam, Seven continuait de crier : Tu l'savais ? Tu savais c'qu'il faisait ? Les yeux de Sam se gorgeaient de larmes, même s’il ne pleurait pas encore. Il restait dans cet entre deux, entre le choc et la dépression. Entre le déni et la colère. Il avala sa salive, et d’une voix si basse qu’elle en était presque inaudible il murmura : J’savais pas… j’te jure… Il ne parlait pas tellement de ce que JJ avait pu faire à l’une des soeurs de Seven - il ne savait même pas laquelle. Il parlait de tout ça, de JJ, et de cette culpabilité qui le rongeait. Parce que c’était lui qui avait pris JJ sous son aile, lui qui l’avait quasiment élevé, lui qui était responsable. Dans un sens, tout ça était de sa faute. Il n’avait pas vu le moment où il avait commencé à débloquer. A partir de quand JJ avait arrêté d’être inoffensif et avait commencé à foutre des vies en l’air ? Combien de temps Sam était resté dans le déni ? Il s’excusait pratiquement, à marmonnant des trucs incohérents à Seven. Il s’excusait pour tout. J’suis désolé... Qui filtrait entre ses lèvres tremblantes d’émotion. Désolé de t’avoir tenir responsable pour Assia, d’avoir failli te tuer, plusieurs fois. Parce que ce n’était pas toi, c’était lui. Voilà ce qu’il voudrait dire, mais tout ça restait coincé dans sa gorge. Mais Seven ne décolérait pas. Sam attrapa ses poignets pour tenter de faire en sorte qu’il le lâche, mais il n’y mettait même pas du sien. Il se contenta de rester là, à tenir Seven, et il avoua enfin, pour tenter de calmer la rage qui aveuglait complètement Popescu. Seven, JJ est en prison. Il ne semblait même pas l’entendre à travers la pulsation de son coeur enragé. Sam reprit enfin un peu de consistance et le poussa en arrière, sans trop y mettre de force, juste assez pour profiter de sa faiblesse, de son trouble, et qu’il recule de quelques pas. Ecoute-moi ! Il est en prison j’te dis. La voix de l’égyptien était étranglée. Il va nous laisser tranquille quelque temps. Ca ne sera pas assez pour lui, pas pour Seven. Et putain, Sam comprenait tout. Il comprenait, parce qu’il vivait exactement la même chose, mais ça il ne pouvait pas encore le dire, c’était au-dessus de ses forces. Alors quoi ? on va le laisser s’en tirer en prison, attendre que ça passe, pardonner ? Sérieusement Sam. Il ignorait tant bien que mal cette voix qui hurlait vengeance. Et il recula lui-même de quelques pas, mettant de la distance entre eux, pas sûr de vouloir savoir ce qui s’était vraiment passé avec l’une des filles Popescu. Il prit une grande inspiration et se passa la main sur le visage. Qu’est-ce qu’il a fait ? Il regrettait d’avance. Et la paix qu’il tentait d'instaurer, Seven ne pouvait l’accepter, car lui ne savait pas à quel point ils étaient sur la même longueur d’onde à l’heure actuelle.
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Seven Popescu

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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptyVen 23 Mar - 17:33

« Il est pas là. » C'est morne, monotone, ça ne fait que l'enrager un peu plus. Sam énonce des évidences – bien sûr qu'il est pas là, il sait, il l'a cherché alors il a remarqué son absence. Ce qu'il veut savoir c'est où il peut le trouver, foncer tête baissée pour lui faire la peau, cette fois il reculera pas il se l'est promis, il est convaincu qu'il en est capable. Mais pour l'instant tout ce qu'il a c'est trop de haine à ruminer sans rien pour l'extérioriser, rien d'autre qu'un pantin amorphe entre ses mains. Sam ne bouge pas, ne cherche même pas à se défaire de son emprise. Il reste planté là, à le fixer de ses grands yeux brumeux, comme s'il n'était pas en mesure de faire autre chose que ça. Alors Seven le secoue Seven divague, il mentionne Anca et sa voix vibre de toute sa fureur, plus puissante que jamais. En face il n'obtient toujours rien, il le regarde et il a l'impression que c'est le néant intersidéral, une putain de coquille vide, abandonnée par un capitaine qui préfère se prostrer dans un coin en attendant le naufrage plutôt qu'affronter les obstacles qui se dressent devant lui. Il le regarde il ne fait que ça, il voit les larmes qui s'accumulent à la bordure de ses cils sans être libérées pour autant, il voit ce trop-plein qui menace de déborder et il comprend pas. « J’savais pas... j’te jure... » Et on dirait qu'il parle d'autre chose, qu'il répond pas à sa question – pas vraiment. Il est perdu, ses sourcils qui se froncent alors qu'il continue à le dévisager, ses phalanges qui se cramponnent un peu plus fort à son col, qui serrent et tirent à en faire craquer le tissu.

Ça n'a pas d'sens. Sam devrait se défendre, l'envoyer chier, lui sauter à la gorge comme il le fait chaque fois, essayer de le buter pour un crime qu'il n'a pas commis. Sam devrait faire un tas de choses mais il reste amorphe et c'est pas normal, il sent qu'un truc tourne pas rond pourtant il veut pas s'y attarder, ça l'intéresse pas. « J’suis désolé... » Ça l'énerve. Parce qu'il sent l'émotion dans la voix de Sam, sur ses traits – ça émane de lui avec une telle force que ça le heurte de plein fouet, il emmagasine tout comme une éponge sans trop s'en rendre compte, putain d'empathie qu'il n'a jamais réussi à gérer. Ça se mélange à son propre chaos intérieur et c'est trop pour une seule personne, il perd pied, ses yeux écarquillés comme s'il devenait fou, son rire qui éclate comme une grenade. On dirait un maniaque, doigts tremblants autour du col de Sam, le rire qu'il n'arrive plus à contrôler et qui le fait suffoquer. « Désolé ? » C'est craché entre deux éclats et il finit par réussir à se calmer après de longues secondes, prunelles vrillées dans les siennes, assassines. « C'est quoi ton putain d'problème ? On dirait qu'tu vas t'mettre à chialer, tapette. J'en ai rien à foutre que tu sois désolé. T'entends ? RIEN. À. FOUTRE ! » Son visage s'est approché du sien, ses yeux injectés qui sondent les siens, qui promettent l'explosion imminente. Y a comme un bourdonnement à ses oreilles, les ondes saturées par toute la rage qui s'accumule sans pouvoir s'exprimer librement. Ça grésille, il n'est plus sur la même fréquence et il voit les lèvres de Sam bouger mais il n'entend pas, il voit ses mains se poser sur ses poignets mais il ne les sent même pas. Y a le mot prison qui filtre à travers la cacophonie qui a élu domicile dans sa tête, et il est comme figé. Il n'arrive pas à enregistrer l'information, à l'accepter. Il refuse putain c'est pas possible.

Sam se rebelle enfin, profite de son trouble pour le repousser. Il titube de quelques pas en arrière, regard braqué sur lui pourtant il ne le voit pas, on dirait qu'il fixe quelque chose à travers. « Écoute-moi ! Il est en prison j’te dis. » En prison. En prison en prison en prison. Ça résonne encore et encore. « Non. »

En prison. Hors de sa portée.

« Il va nous laisser tranquilles quelques temps. » « Non. » Il répète, comme si cette simple négation pouvait renverser la situation, comme s'il lui suffisait de dire non pour que JJ se matérialise près d'eux, pour qu'il puisse lui sauter dessus et le déchiqueter. « Non, putain. » Ses mains s'agrippent à ses cheveux et les tirent en arrière alors qu'il continue de murmurer des non presque inaudibles, en boucle. Il peut pas être en prison, pas avant qu'il lui mette la main dessus. C'est pas assez, il en a rien à foutre du système judiciaire et de la cellule dans laquelle on l'a collé pour qu'il y croupisse quelques temps. C'est pas assez – ça sera jamais assez. C'est pas la prison qu'il mérite, c'est le cimetière. « FAIT CHIER ! » Il donne un coup de pied au gobelet de café que Sam a laissé tomber et l'envoie valser à plusieurs mètres d'eux. Ça non plus c'est pas assez, il voudrait tout fracasser. « COMBIEN ? » Tellement enragé qu'il n'est pas capable d'articuler autre chose, de formuler une phrase complète. Combien de temps avant qu'il soit libéré, avant qu'il puisse lui mettre la main dessus et lui faire payer ? Combien de temps de sursis avant qu'il puisse le jeter dans la tombe que JJ s'est creusé lui-même ? Peu importe la durée en vérité, il a l'impression qu'il pourra jamais tenir. Il a besoin d'évacuer toute cette haine qui le ronge, besoin de trouver un exutoire pour sortir ce mal qui lui bouffe les entrailles. S'il le fait pas c'est lui qui crèvera le premier.

« Qu’est-ce qu’il a fait ? » Ses yeux qui viennent trouver ceux de Samih à nouveau, il est à mi-chemin entre l'incrédulité et l'hystérie. Ça colle pas. Sam devrait pas se comporter comme ça, il devrait pas être en train de lui faire la conversation, lui poser des questions. Y a plus rien qui va, c'est le monde qui s'met à tourner à l'envers et il a les tripes en vrac, le cœur au bord des lèvres. Pourtant la seule chose qu'il arrive à dégueuler, c'est sa colère. « Qu'est-ce t'en as à foutre ? » Il se marre encore, de ce rire brisé, la sensation d'avoir avalé du verre pilé jusqu'à réduire ses cordes vocales en lambeaux. Il écarte les bras sur les côtés, son regard fou qui ne quitte toujours pas Sam. Et s'il a l'air d'un déséquilibré c'est peut-être parce qu'il l'est – difficile de tenir debout quand il est aux premières loges pour voir son monde s'écrouler morceau par morceau. « Tu joues à quoi là ? Elle est où ta haine ? » Il avance vers lui et le pousse vers l'arrière, provocateur, lueur de défi au fond des yeux. « Il a réussi le plus beau coup d'sa carrière de grosse pute alors essaie pas d'me faire croire qu'il est pas venu s'en vanter. Vous l'avez bien félicité ? Hein ? VOUS L'AVEZ APPLAUDI BANDE DE CONNARDS ? » Comme pour imager ses mots il se met à applaudir lui-même, dans des gestes si amples et puissants que ses paumes en deviennent douloureuses. Il est à bout de nerfs, à bout de souffle, au bord du gouffre. « Allez Sam, qu'est-c'que t'attends ? T'as plus qu'à finir c'qu'il a commencé. » T'as plus qu'à m'achever. Peut-être que c'est ce qu'il veut, au fond. Peut-être qu'il l'a mérité.
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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptyMer 11 Avr - 20:35

Désolé ? C'est quoi ton putain d'problème ? On dirait qu'tu vas t'mettre à chialer, tapette. J'en ai rien à foutre que tu sois désolé. T'entends ? RIEN. À. FOUTRE ! Sam retint son souffle pendant quelques secondes. Clairement, tu vas te mettre à chialer. Et le visage de Seven était si près du sien qu’il ne voyait que ça, il ne voyait que ses traits tirés, ses veines qui pulsaient sous sa peau terne, ses cernes violacées, ses yeux injectés de sang, sa mâchoire d’animal, prête à lui sauter à la gorge à tout moment. Et tout ce que Seven était en train de vivre, Sam le comprenait que trop bien. Il ressentait chacune de ses blessures, il entendait toutes ses pensées, tout ce qui défilait, trop vite pour ce gosse, dans sa tête. Il était passé par les mêmes étapes, par la même rage qui prend tellement de place qu’elle vous étire le corps, tord vos entrailles. Il l’écoutait donc et comme prévu, il versa une large, la mâchoire tremblante d’émotion. Seven était misérable, tellement misérable à l’heure actuelle. Il avait trop mal et Sam avait tout simplement l’impression de se regarder dans un miroir. Il ne répondit rien. Il laissa faire, tout simplement.

Quand enfin Seven le libéra de son emprise, Sam tangua sur trois pas et pris une grande inspiration pour stopper ses larmes. Enfin, il devait dire la vérité, il devait péter le scandale : JJ est en prison. Et ça eu exactement le même effet sur Seven que ça avait eu sur lui. Non. Qu’il répétait en tremblant de tout son être, en s’arrachant les cheveux. Sam observa cette même soif de vengeance qui dormait au fond de lui. Cette même rage que l’autre lui criait à longueur de temps dans ses oreilles, encore aujourd’hui, encore maintenant. Il sentait sa colère qui passait dans ses veines, se répendait comme un putain de virus. La prison n’était pas une bonne nouvelle, pour personne, car elle avait cet inconvénient de leur arracher des mains une vengeance digne de ce nom. Leur enlever la satisfaction de le détruire, une bonne fois pour toute, de laisser la rage tout enflammer, se soulager enfin de cette pulsion meurtrière. Done that, been there. Sam se contentait donc de l’observer et profita qu’il s’énerve tout seul (ou sur le gobelet de café crème) pour reculer d’un pas ou deux, juste au cas où et tirer machinalement sur le bas de sa veste à capuche pour la remettre en place. Il était nauséeux, et les cris de Seven n’arrangeaient rien. Comme si tout vibrait trop fort à l’intérieur de lui. Parce que Seven ne faisait que répéter ce que l’autre criait déjà. Il ne s’en sortait déjà pas avec une voix intérieure, maintenant qu’il y en avait deux, il avait tout simplement envie de se taper la tête contre un mur - littéralement. COMBIEN ? Sam leva les yeux vers lui, pas très sûr d’avoir entendu parmi tout ce raffut qui parlait, et si on s’adressait vraiment à lui. Il secoua la tête pour se remettre les idées en place, faire taire l’autre un moment. Cinq mois. Qu’il répondit simplement, d’une petite voix monotone. Seven reprit les lamentations, Sam, sa conversation intérieure. Tu vas pas le laisser pendant cinq putain de mois. Le temps qu’il retourne le cerveau d’Eanna, Daire, et les autres. Le temps qu’il se fasse pardonner d’avance, qu’il prépare son grand retour, comme un petit chien malheureux. Il savait tout ça. Tu le connais, non ? T’as vu comment il était quand tu l’as vu ? À pleurnicher comme si c’était lui la putain de victime dans tout ça. Oui, je sais. Va falloir que tu trouves une solution. Je sais ! Cette fois, il l’avait dit à voix haute, d’un ton sec qui tranchait l’air. Sam avala sa salive, jeta un coup d’œil à Seven, il n’était même pas sûr qu’il ait entendu tant il était occupé à s’énerver tout seul. Changeons de sujet.

Il a fait quoi, ce coup-ci ?

Seven partit dans un grand éclat de rire nerveux, qui le secouait complètement, comme un genre de poupée désarticulé. Il était vraiment au bord du collapse. Les bras écarquillés, désespéré par cette situation, il ne croyait pas un mot des inquiétudes de Sam. Comment le pourrait-il ? Tu refuses toujours de le dire aux autres. Il ne savait même pas pourquoi il gardait le silence, pourquoi il ne balançait tout simplement pas l’info, pour Assia, pour Trixia, pour toutes les autres victimes. Peut-être qu’au fond de lui il ne l’acceptait pas encore. Il ne pouvait pas encore rendre publique cette affaire. Peut-être parce qu’il savait parfaitement que tout était de sa faute. Non, celle de JJ. Mais y avait un truc dans le fond du regard de Seven que Sam reconnaissait complètement, cette culpabilité d’avoir laissé JJ se glisser dans leur vie, pour qu’il fasse tout péter ensuite. Qu'est-ce t'en as à foutre ? Sam fronça les sourcils. Je… le dealer le coupa en pleine phrase : Tu joues à quoi là ? Elle est où ta haine ? Il inspira profondément. Il ne savait jamais quoi dire Sam, jamais, et encore moins quand il s’agissait des choses importantes. Il était bloqué, paralysé par cette idée qui lui niquait tous les neurones. Par ce souvenir dégueulasse de sa soeur étalée au milieu de son appartement. Du visage déformé de Trixia, à peine reconnaissable. Plus contre toi. Qu’il finit par articuler de sa voix si basse et monocorde. Tout est pardonné Seven, puisque tu n’as jamais rien fait au final. On est dans le même bâteau, dans la même galère, on a le même ennemi. Qu’il aurait pu ajouté, mais à quoi bon ? Les mains vengeresses de Seven entrèrent en collision contre son torse maigre, Sam recula de trois pas, il n’avait pas vu venir l’impact. Il accusa le coup, sans même chercher à s’en défendre. Il laissait faire, le laissait dégueuler tout ce qu’il avait sur le coeur, lui ne pouvait même plus imaginer lui faire du mal, ça serait comme se frapper lui-même. Il a réussi le plus beau coup d'sa carrière de grosse pute alors essaie pas d'me faire croire qu'il est pas venu s'en vanter. Vous l'avez bien félicité ? Hein ? VOUS L'AVEZ APPLAUDI BANDE DE CONNARDS ? Et chaque fois que Seven claquait des mains, il avait l’impression qu’il se recevait un coup sur le crâne. Et tout revenait par flash chaque fois que les mains claquaient dans l’air comme un putain de coup d’feu. Alors y a son coeur qui s’accélérait, qui tambourinait comme un malade et comme un bourdonnement impossible qui l’empêche d’entendre. Allez Sam, qu'est-c'que t'attends ? T'as plus qu'à finir c'qu'il a commencé. Ce qu’il attendait ? Rien, nada. Il attendait que la pression retombe, que Seven ait expulsé tout ce qu’il avait sur le coeur, qu’il s’arrache la voix et qu’il n’ait plus rien à dire. Ils étaient dans cette situation batarde, entre deux eaux, entre les rancunes passées et l’objectif commun. Mais Seven était parti trop loin, incapable de se réguler, Sam en avait bien conscience, alors, sans réfléchir il l’attrapa et l’attira vers lui, plaça ses deux mains sur ses épaules pour essayer de le calmer, paternel. Il esquiva quelques contre-attaques, durcit ses gestes, le retint de toutes ses forces, comme s’il voulait s’empêcher de tomber lui-même. Calme-toi, j’en savais rien, j’te jure seven. JJ nous a rien dit. Il cherchait son regard, il essayait de capter son attention, il essayait d’être sincère, mais plus rien ne devait avoir de sens aux yeux de Seven, il le savait. Tu sais pourquoi j’suis ici ? Parce que JJ a envoyé Trixia à l’hôpital. Trixia. La femme de sa vie, le grand amour de Samih, sa belle et grande histoire destructrice. JJ avait failli la tuer, et rien que d’y repenser, Sam avait envie de vomir. Et ça, c’est même pas un dixième de ce qu’il m’a fait, tu vois. Sa voix tremblait, et il était toujours incapable de le dire, incapable d’en dire plus. Incapable de verbaliser cette trahison, celle de trop, celle d’Assia. Je vais m’occuper d’lui, j’te le promet Seven. On est dans le même camp toi et moi. Et ça lui crevait le coeur de l’admettre. Mais il n’y avait plus de Kids, il n’y avait plus de Bos. Y avait qu’eux deux, qui s’étaient perdus en cours de route et surtout, qui avaient trop perdu dans cette histoire. Parce que c’était ce qui s’était passé : Sam avait tout perdu. Ou presque. Voilà les larmes qui reviennent, Sam tentait difficilement de les ravaler. Et j’attendrais pas cinq mois pour m’occuper de son cas. Il ne savait pas d’où ça sortait ouais. Ouais, ça sort d’où ?
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Seven Popescu

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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptySam 14 Avr - 15:15

« Cinq mois. » C'est pas assez et pourtant c'est déjà trop – il mériterait de passer des années derrière les barreaux mais Seven le veut pas en cellule, il le veut dehors. Il le veut à portée de main à portée de poing, il le veut en sang gisant à ses pieds, le regarder agoniser et puis rire en l'achevant.

Il ne l'aura pas. Pas avant cinq mois.

Il recommence à criser, balançant un tas de jurons sans même s'en rendre compte, ses pieds qui valsent jusqu'à s'en faire mal dans la poubelle fixée au sol derrière lui. Il passe ses mains sur son visage en lâchant un cri sourd, grave, à demi étouffé par ses paumes. « Je sais ! » Il sait pas à quoi Sam fait référence et il s'en fout, il ne l'écoute même pas, trop centré sur sa bulle de haine, à se noyer dans l'écume de sa rage.

Alors quand Sam demande ce que JJ a fait, il se demande s'il a mal entendu. On dirait que ça l'intéresse vraiment et il comprend pas il veut pas comprendre, il le fixe de cet air incrédule et il sait plus s'il doit l'abandonner là ou le fracasser à défaut de pouvoir s'en prendre à sa vraie cible. Son rire a quelque chose de tranchant, à mi-chemin entre le cinglé et le désespéré, ça lui écorche la gorge et lui donne envie de hurler. Sam devrait pas s'inquiéter de tout ça, ça n'a pas de sens, rien n'en a et il se sent sombrer. « Je... » Il demande, pourtant il veut pas entendre la réponse. Il veut pas entendre la voix de Sam, il veut pas voir sa gueule, il veut pas partager son espace avec lui mais il n'a pas le choix. Y a rien d'autre que Sam et il sait pas encore s'il doit s'en contenter et s'y accrocher, ou le faire couler avec lui. Mais Sam a déjà l'air en plein naufrage, les bras ballants et l'air trop désolé pour que ça soit normal, elle est où sa haine ? « Plus contre toi. » Pendant une seconde, il se fige. Il le regarde sans comprendre, ses prunelles qui sondent les siennes, qui attendent la chute, que Sam se contredise ou profite du trouble instauré pour lui sauter à la gorge. Il attend mais rien ne vient, Sam a l'air sincère. Trop longtemps qu'il subit ses assauts alors qu'il n'a rien fait, et ça s'arrête juste comme ça, sans raison ? Il refuse d'y croire.

Et puisque Samih n'veut pas attaquer il le fait lui-même, revenant à la charge en le poussant, l'observant tituber avec cet air de défi. Il attend la riposte mais toujours rien et il enrage, seul. Ses mains qui claquent et sa fureur qui fait vibrer sa voix trop fort, son regard qui flambe sur lui. Il aimerait que Sam rentre dans son jeu, qu'ils se cognent comme ils le font toujours, qu'il puisse transformer son trop-plein d'émotions en violence pour libérer sa poitrine du poids qui l'empêche de respirer. Mais Sam n'a pas l'air énervé, pas même un p'tit peu, et il est perdu.

Quand il le sent l'attraper il pense que c'est le moment, qu'il est enfin sorti de sa torpeur. Il est prêt à riposter mais Sam n'essaie pas de le frapper. Il se contente de l'attirer vers lui, ses mains sur ses épaules, fermes mais pas agressives. Il s'agite et tente de lui échapper mais Sam serre plus fort et il s'impatiente. « Calme-toi, j’en savais rien, j’te jure Seven. JJ nous a rien dit. » Sa voix est trop posée et quand leurs regards se croisent il voudrait s'accrocher au sien, parce que même si ça n'a aucun sens c'est la seule chose qui lui paraît solide au milieu de la tempête. Pourtant il préfère encore se noyer que s'agripper à lui. « Tu sais pourquoi j’suis ici ? Parce que JJ a envoyé Trixia à l’hôpital. Trixia. » Ses sourcils se froncent et il voudrait lui cracher qu'il n'en a rien à foutre, que de toute façon c'est tout ce qu'elle mérite et que JJ tardera pas à la rejoindre. Il voudrait lui faire mal et remuer le couteau dans la plaie, mais les mots n'viennent pas. Il reste muet, figé entre ses doigts. Seules ses prunelles trahissent le brasier qui ravage tout à l'intérieur de lui. « Et ça, c’est même pas un dixième de ce qu’il m’a fait, tu vois. » La voix de Sam tremble et Seven ricane, l'air de dire bienvenue au club. Il a pas de compassion pour lui. Il l'associe trop à JJ et tout ce revirement de situation est trop soudain pour qu'il puisse y croire réellement. Il manque trop d'éléments au puzzle, il arrive pas à assimiler ce qui est en train d'se passer. Sam, lui, la seule façon dont ça peut fonctionner c'est quand le sang est en train de couler. Sans ça, c'est tout l'équilibre de leur monde qui est renversé.

« Je vais m’occuper d’lui, j’te le promets Seven. On est dans le même camp toi et moi. » Il affiche un rictus mauvais, ses poings qui se serrent alors que son regard s'assombrit. « On sera jamais du même côté, connard. Lâche-moi. » Ça sonne comme un avertissement mais il ne se débat pas. Il ne bouge pas d'un millimètre, se contente juste de le fixer sans ciller. Il voit les larmes envahir ses yeux et il sait plus quoi penser. « Et j’attendrai pas cinq mois pour m’occuper de son cas. » À nouveau il ricane et cette fois il se dégage de son emprise sèchement, brutalement. Il recule de trois pas pour remettre de la distance entre eux, rétablir les barrières que Sam tente désespérément d'abaisser sans qu'il comprenne pourquoi. « T'essaies d'faire quoi là ? Depuis quand tu veux faire ami-ami avec moi, hein ? La dernière fois qu'on s'est vus, tu voulais encore m'buter parce que j'ai soi-disant violé ta sœur. » Et c'est la seule chose qu'il veut retenir de cette entrevue, tous les détails concernant JJ sont bien enfouis. « C'pas parce que tu t'es engueulé avec JJ ou j'sais pas quoi qu'on peut être potes, t'as pété les plombs putain. » Il sait pas ce qui se passe chez les Kids, ni même chez les Yobbos à vrai dire. Des semaines à les éviter jusqu'au moment fatidique de sa dispute avec Jimmy, jusqu'à ce qu'il décide d'abandonner leurs rangs pour de bon. « J'sais pas à quoi tu joues. » Sa confusion est palpable, elle se devine sur ses traits et dans ses yeux. Il a beau le dévisager, il trouve pas de réponse à ses questions. « Tu crois quoi ? Qu'on va s'faire une p'tite liste de tout ce qu'il nous a fait et comparer ? Qu'on va s'tenir la main en allant lui faire la peau ? » Il recommence à rire, passant une main sur son visage comme s'il était à bout de forces, à bout de nerfs, incapable de gérer la situation dans sa totalité.

Y a quelque chose de terriblement accusateur dans ses yeux, quand il les replonge dans ceux de Sam. « C'est ton pote. Ta bande. Toute cette merde, tout c'qu'il m'a fait, c'est d'ta faute. C'est toi qu'a pas été capable de l'tenir en laisse. » Puisqu'il ne peut pas s'occuper du principal coupable, c'est plus facile d'accuser quelqu'un d'autre que de se contenter du néant. Plus facile de blâmer Sam que d'essayer de comprendre ce changement de comportement. « C'est p't'être toi que j'devrais buter, en fait. »
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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptyMer 18 Avr - 14:56

Seven craquait nerveusement, quoi de plus normal ? Entre ses éclats de colère et ses éclats de rire, Samih restait parfaitement stoïque, à essayer de lui faire comprendre que tout ce qu’il croyait savoir est faux, que JJ avait fait bien pire que de trahir Seven, se venger sur sa petite soeur, bien pire. Parce qu’il avait foiré avec la ville entière et Sam n’avait rien vu venir, rien. Enfermé dans son idée que c’était forcément de la faute des Bo, forcément eux qui foutaient toujours tout en l’air, il avait vécu avec des oeillères de mois, des années entières. Et maintenant, c’était clair, limpide. Tellement qu’il ne voyait même plus d’intérêt à en vouloir à Seven ou n’importe lequel des Backstreet Boys. Il n’avait physiquement pas la capacité de ressentir de la haine pour chacun d’entre eux. JJ avait éclipsé tous les autres. Et malgré tout, malgré ces années à se chamailler, Sam ne pouvait décidément pas s’énerver contre Seven, trop amorphe pour ça de toute façon. Il tentait de lui faire entendre raison, tentait de le calmer, d’apaiser cette envie de vengeance qui pulsait dans ses veines si fort que Sam pouvait l’entendre. Là, le tenant entre ses mains sûres et fortes, soudain paternel avec Seven comme il l’était avec chacun de ses Kids, il parlait avec tout le calme et le décernement qui lui restait - c’est-à-dire pas beaucoup. Mais il ne voulait rien entendre, le drogué, rien parce qu’il ne pouvait penser qu’à une chose : assouvir son besoin de donner des poings et trancher des gorges, exorciser cette douleur qui lui broyait les entrailles, parce que si c’était JJ qui avait détruit sa soeur, peu importe de laquelle il s’agissait, c’était Seven qui en était responsable. Sam retrouvait cette culpabilité dans ses yeux fous du drogué, de la même manière qu’il le voyait dans son propre reflet, et celui de l’autre. On sera jamais du même côté, connard. Lâche-moi. Sam inspira profondément et desserra son étreinte des épaules frêles de Seven qui n’étaient décidément pas assez forte pour porter le fardeau que JJ avait laissé derrière lui. Il voulait le rassurer, lui promettre qu’il paierait pour tout ça, pour eux, pour leurs familles et pour tous les autres. Mais le rire tonitruant de Seven coupa court à un quelconque espoir de réconciliation. Le visage de Sam, déformé par cette douleur qui ne quittait plus son corps, se ferma un peu plus, il fronça légèrement les sourcils, tout en laissant ses bras retomber dans le vide. T'essaies d'faire quoi là ? Depuis quand tu veux faire ami-ami avec moi, hein ? La dernière fois qu'on s'est vus, tu voulais encore m'buter parce que j'ai soi-disant violé ta sœur. Le noeud dans sa gorge se resserra d’un coup et son regard de poisson se voila une seconde. Comme ça, presque sur le ton de la conversation avec des accents détruits dans la voix, il plaça cette petite phrase, trop lourde de sens pour que Seven n’en capte ne serait-ce que la moitié : Je sais que t’as pas touché à Assia. C’était pourtant si clair, mais Sam ne voulait pas en dire plus, il ne pouvait pas. Tout ce temps passé à accuser Seven, par facilité plus qu’autre chose, parce qu’il n’avait jamais pu penser autrement, tout collait parfaitement, et il avait besoin d’un bouc-émissaire. Ces fois où Sam l’avait presque tué, enragé, pour venger sa soeur, la faire rentrer au bercail. Et tout ça pour quoi ? Parce qu’il n’avait pas été foutu d’analayser tous les indices que JJ avait laissé derrière lui. Comme cette fois où il l’avait empêché de finir Seven, commettre un crime sans aucune raison, sachant parfaitement que le vrai coupable n’était autre que lui même. Sam prit une grande inspiration, pendant que Seven continuait à hurler dans tous les sens, balançant simplement tout ce qui lui passait par la tête, entre le rire nerveux et le collapse. C'pas parce que tu t'es engueulé avec JJ ou j'sais pas quoi qu'on peut être potes, t'as pété les plombs putain. Sam le considérait vaguement, le laissant expulser toute cette colère en lui, prenant sur lui, encore et encore. Il semblait que même s’il avait voulu s’énerver, il ne le pouvait pas. J'sais pas à quoi tu joues. Il ne jouait pas et c’était bien ça son plus grand drame. Il aurait voulu que tout soit plus simple que ça soit encore une tactique pour faire du mal à la bande adverse. Il aurait aimé que JJ ne déconne qu’avec eux, par vengeance, parce qu’il n’était qu’un gamin incapable de savoir où était les limites. Mais ce n’était pas le cas. Car des limites, il n’en avait tout simplement pas. Il n’en avait plus. Tu crois quoi ? Qu'on va s'faire une p'tite liste de tout ce qu'il nous a fait et comparer ? Qu'on va s'tenir la main en allant lui faire la peau ? Encore une fois le silence assourdissant entre eux rebondit contre leurs coeurs abimés. Sam plongea sa main dans sa poche pour sortir son paquet de cigarette, il ne répondait rien, mais ne détournait pas le regard, même si le soleil tapait en plein contre sa rétine, il le regardait, levant le menton. Il ne croyait rien du tout Sam. Il savait ce qu’il avait à faire maintenant, il en était même sûr, et les moqueries désespérées de Seven ne changeait pas grand chose à tout ça. Il coinça la cigarette dans sa bouche et l’alluma doucement, en plusieurs fois avant de ranger le briquet et de tirer une longue taffe. Quand leurs yeux se percutèrent à nouveau, quelque chose s’était débloqué dans le regard du gosse. C'est ton pote. Ta bande. Toute cette merde, tout c'qu'il m'a fait, c'est d'ta faute. C'est toi qu'a pas été capable de l'tenir en laisse. Tout ça sonne trop juste jusqu’au plus profond de Samih. Parce qu’il a l’impression de s’entendre penser, d’entendre l’autre en tout cas. L’éclat brisé au coin de ses yeux se réfletait au soleil, au bord des larmes encore une fois, décidément trop à cran pour gérer quoi que ce soit. Je sais. Qu’il laissa échapper entre ses maigres lèvres, si faiblement qu’il n’était même pas sûr que Seven l’avait entendu. Quoi qu’il en soit, Seven avait la solution : faire payer Sam, lui qui avait laissé tout ça arriver. Pourquoi pas. Il ne s’en occupait même pas en fait. Seven avait besoin de donner de se défouler, il avait besoin de trouver un responsable, un autre, puisque le vrai était enfermé loin de lui. Il ne comprenait pas, il ne pouvait pas comprendre sans doute. Comment assimiler que Sam avait vécu ce qu’il vivait en ce moment même ? Comment assimiler qu’il n’était plus l’ennemi, qu’il n’y avait plus de place pour ces conneries maintenant que la haine contre JJ avait pris toute la place ? Comment ? Sam tira tranquille une autre latte avant de lancer sa clope à moitié consumée sur le côté. Une seconde, deux. Il plongea contre Seven et le plaqua contre la façade de l'hôpital, le bras sur le torse pour l’empêcher de bouger. Non, on va pas faire une liste et comparer, et tu sais pourquoi ? Il sifflait entre ses dents, d’une voix entre la colère et la tristesse la plus infinie qu’il n’avait jamais connu. Parce que t’as raison, JJ est de ma bande, de ma famille. Alors ce qu’il m’a fait sera toujours dix fois pire. La trahison était trop énorme, et c’était ce qui faisait le plus mal au final. Sacrément égoïste de penser comme ça, si vous le voulez. Mais le pire dans l’histoire ce n’était même pas que sa soeur s’était faite violée, c’était que ça soit JJ qui l’ai fait. Ca et tout le reste. J’veux que tu te calmes et que tu m’écoutes, Seven. Cette façon qu’il avait de le voir, maintenant qu’il avait retiré le filtre de la vengeance de sa vision, était tellement… compatissante. Il voyait tout, de sa fausse colère qu’il servait à tout va parce qu’il était incapable de gérer son hypersensibilité, à sa culpabilité dévorante qui faisait trembler tous ses membres, son cerveau détraqué par la came qu’il s’enfilait à longueur de temps. Sam comprenait tout plus clairement. J’ai pas envie de faire ami-ami avec toi, j’ai pas envie qu’on se prenne par la main et qu’on aille casser la gueule à JJ ensemble. Parce que c’est moi qui vais le faire payer et j’ai pas besoin de toi pour ça. Personne ne lui arracherait sa vengeance, personne ne l’empêcherait de regarder JJ dans le fond des yeux et de lui cracher qu’il savait tout. Qu’il était au courant de tous ses mensonges, toutes ses démences. Personne ne l’empêcherait de réparer ses conneries, parce que oui, Seven avait raison, c’était de la faute de Sam tout ça. Lui qui n’avait pas su voir qu’un truc débloquait chez JJ. Faire payer JJ c’était sa seule chance de rédemption, sa seule chance de retrouver Assia et de lui dire “c’est bon, j’ai fais ce qu’il fallait”. Après une seconde à regarder dans le fond des yeux Seven il le lâcha et fit un pas en arrière pour le laisser se remettre droit. Crois-le ou non, mais on est bel et bien du même côté tous les deux.
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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptySam 21 Avr - 19:03

« Je sais que t’as pas touché à Assia. » Pause. Il se fige et le fixe sans ciller, sourcils froncés. Comme s'il n'y croyait qu'à moitié, comme s'il hésitait entre se mettre à rire et lui sauter à la gorge. Sam balance ça comme si c'était l'évidence même – et bien sûr que ça l'est, depuis le début Seven scande son innocence mais ça l'a pas empêché de récolter des coups des menaces et un pas trop près de la faucheuse. Ça n'a pas de sens, que Sam change d'avis aussi brusquement, sans la moindre explication. Y a trop d'éléments qui lui échappent et ça le perd, son équilibre déjà précaire qui se casse la gueule. Il comprend pas. Il comprend rien. C'est peut-être pour ça qu'il se réfugie dans sa rage, à pointer Sam du doigt, à tout lui balancer dans les dents comme si ça pouvait suffire à le soulager.

Ça n'marche pas.

Sa colère ne récolte que le silence et ça l'apaise autant que ça l'enrage – ça l'empêche d'exploser pour de bon mais ça le fait bouillir un peu plus à chaque seconde. C'est comme avancer sur une putain d'lame de rasoir, la chair en sang, il peut pas s'arrêter s'il veut pas s'enfoncer. Alors il crache encore et encore, le venin comme une coulée d'acide pour le désintégrer, mais Sam qui ne bronche pas. Il le regarde se sortir une clope le plus simplement du monde, comme s'il était parfaitement serein, comme si la situation était normale. Elle l'est pas. Plus rien ne l'est depuis trop longtemps, tellement qu'il n'arrive plus à dire à quel moment le train a déraillé pour de bon. Ils se sont tous crashés et pour la première fois, il entrevoit les dégâts qui ont été faits dans l'autre camp. Il sent que quelque chose cloche, il voit qu'un truc en Sam s'est brisé, mais il veut pas comprendre. Il veut pas se pencher là-dessus, il veut pas laisser ses émotions l'atteindre, il veut pas céder du terrain. Il veut pas lui donner quoi que ce soit ; et surtout pas un peu de compassion. C'est plus facile de le blâmer. C'est la lâcheté, le besoin d'avoir quelqu'un à accuser, un exutoire sur lequel pouvoir se défouler. Il n'a plus rien et Sam est là alors c'est Sam qui doit prendre, c'est Sam qui doit subir puisque c'est la seule chose sur laquelle il peut se rabattre. Le lot de consolation du vaincu. « Je sais. » Ses grands yeux qui semblent s'embuer de larmes encore une fois – il serre les poings. Il voudrait le secouer, le frapper, le forcer à arrêter tout ça. Ses émotions qui débordent et le submergent, il les sent le traverser sans pouvoir les comprendre ni les gérer, sans être foutu de tout assimiler.

Il le regarde et l'espace d'une seconde il a l'impression de se voir, tout ce qu'il enfouit, tout ce qu'il retient, les larmes qu'il a ravalées jusqu'à ne plus pouvoir respirer. Il supporte pas. Il a jamais supporté de voir son reflet.

Moment de flottement. Ils s'observent en chiens de faïence, et quand Sam finit par fondre sur lui, il n'a pas le temps de réagir. Il se retrouve plaqué contre le mur, un bras qui barre son torse et l'empêche de se libérer, ça comprime sa poitrine ça lui rappelle à quel point l'oxygène a du mal à passer. À quel point il passe son temps à suffoquer, depuis que tout lui file entre les doigts. « Non, on va pas faire une liste et comparer, et tu sais pourquoi ? » Il veut pas savoir. Il veut pas l'écouter, il veut pas le regarder, il veut pas comprendre. Il veut pas, parce qu'il sait que ça remettrait trop de choses en doute et s'il peut plus se raccrocher à sa haine, il lui reste quoi ? « Lâche-moi. » Il grogne comme un avertissement, mais Sam n'a même pas l'air de l'entendre. « Parce que t’as raison, JJ est de ma bande, de ma famille. Alors ce qu’il m’a fait sera toujours dix fois pire. » Et il voudrait ricaner, lui cracher à la gueule et lui dire que c'est bien fait, que c'est tout ce qu'ils méritent l'un comme l'autre et qu'il espère les voir s'entretuer. Pourtant rien ne vient. Il reste planté là, à le jauger de ce regard noir, profond, qui laisse filtrer toute la douleur qu'il n'arrive plus à encaisser. « J’veux que tu te calmes et que tu m’écoutes, Seven. » Il veut pas pourtant il le fait, parce qu'il est trop troublé pour réagir, parce que l'incompréhension est plus forte que la rage. Y a pas de haine dans les yeux de Sam, pas d'appel au sang, pas de folie destructrice comme celle qui lui a coupé le souffle quand il a manqué de crever sous ses coups. Y a rien de tout ce qu'il connaît, rien de tout ce dont il a l'habitude – la haine, la fureur, c'est si familier que ça a quelque chose de rassurant. Mais il le regarde et tout ce qu'il voit c'est la même douleur que la sienne, une colère qui n'lui est pas adressée, une tristesse qui lui rappelle celle qu'il étouffe pour ne pas la laisser le noyer. Il voit d'la compassion et il sait plus s'il veut gerber, hurler, ou juste se mettre à chialer. « J’ai pas envie de faire ami-ami avec toi, j’ai pas envie qu’on se prenne par la main et qu’on aille casser la gueule à JJ ensemble. Parce que c’est moi qui vais le faire payer et j’ai pas besoin de toi pour ça. » Et depuis quand Sam veut s'en prendre à JJ, et qu'est-ce qu'il peut bien avoir à lui faire payer ? Il a beau tout retourner il pige pas – ça peut pas être juste à cause de Trixia. Sa haine est viscérale, il la sent, il la reconnaît, ça s'accorde sur le diapason de la sienne.

Quand Sam finit enfin par le relâcher, il n'a toujours pas bougé. Immobile contre le mur, les bras tendus le long de son corps, poings serrés si fort que ses jointures en deviennent blanches et ses veines gonflent sous sa peau. « Crois-le ou non, mais on est bel et bien du même côté tous les deux. » Peut-être que c'est vrai. Mais il n'arrive pas à l'accepter.

C'est son tour de se jeter sur lui à nouveau, ses mains qui attrapent son col brutalement pour l'amener à lui, son visage proche du sien. Cette fois, c'est pas la rage qui brille au fond d'ses yeux. C'est la détresse. « J'en ai rien à foutre de c'qu'il t'a fait. » Peut-être que leurs douleurs se répondent en écho, peut-être qu'ils tanguent dangereusement sur le même fil, pourtant Seven n'est pas prêt à enterrer la hache de guerre. Pas si facilement. Pas quand il manque trop de pièces au puzzle. « Combien d'fois j't'ai dit que j'avais pas touché à ta putain d'sœur ? Hein ? COMBIEN D'FOIS ? » Il veut pas écouter – pas alors que Sam ne l'a jamais fait. « Tu m'as traité d'violeur, t'as essayé d'me buter, et tu crois qu'tu peux tout effacer comme ça ? » Il n'oubliera pas. Il n'oubliera jamais.

« Tu veux quoi ? » Ses doigts fébriles tirent sur son col encore et encore, mais il n'essaie pas de le secouer. C'est juste qu'il est obligé de s'accrocher à lui pour pas tomber. « Que j'pardonne ? Que j'compatisse ? » Il voudrait ricaner mais il n'en est plus capable – il n'arrive même pas à esquisser un rictus. Tout ce qu'il peut faire c'est le fixer et continuer à serrer le col de sa veste, les tremblements de ses mains qui finissent par s'étendre au reste de sa carcasse sans qu'il puisse les contrôler, sans qu'il s'en rende vraiment compte. « J'veux pas être dans ton camp putain, j'suis même plus dans celui des Yobbos. » Sa voix se brise, ses phalanges restent accrochées à lui férocement. Il n'a plus personne pour l'aider à faire face à cette querelle devenue guerre ; de gamins turbulents ils sont passés au statut de terroristes, putains de kamikazes bons qu'à multiplier les attentats les uns contre les autres. Il a l'impression que ça ne s'arrêtera jamais. « Tu crois qu'tu peux jouer le bon samaritain juste parce qu'il t'a baisé aussi ? » Il laisse échapper un rire cassé, ses épaules qui s'affaissent. « P't'être qu'on veut la même chose, j'sais pas. Mais qu'est-c'qui te fait croire que tu vaux mieux qu'lui ? » Y a plus vraiment de mieux ni de pire dans tout ça et sûrement qu'ils sont tous bons à jeter. Ni bons ni mauvais, ils se sont tous enfoncés. Certains plus que d'autres. Entre victimes et bourreaux la ligne est floue, parce que les limites ont toutes été franchies. Dans l'fond, c'est qu'une histoire de mômes rongés par leur propre barbarie.
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Samih Scully

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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptyVen 4 Mai - 14:32

Dans le regard de Seven, tout s’effritaient, s’écroulaient, doucement. Ses rires tonitruant s’étaient tu maintenant, ses grands gestes, tout ça balayé, pendant que dans sa tête quelque chose faisait son chemin. La vérité peut-être. Redpilled. D’un coup il voyait tout différemment et il ne restait plus qu’un putain de dégoût dans le fond de ses yeux. Pour JJ. Pour Sam. Pour lui-même sans doute. Quand ils se fixaient tous les deux, c’étaient comme s’ils se regardaient dans l’eau trouble d’un lac, regarder un portrait un peu flou l’un de l’autre. JJ les avait enculé tous les deux, trahi, piégé, détruit. Voilà où ils en étaient, à traîner autour d’un hôpital sans pouvoir faire trois pas à l’intérieur. Traîner ici parce qu’ils n’avaient plus d’autres endroits où aller. Orphelins de leurs propres bandes, celles qu’ils avaient trouvé ou bâti de gré ou de force. Les Yobbos n’avaient jamais eu cet esprit de famille qui liaient les Kids, mais au final le résultat étaient le même. Que des miséreux, des vauriens qui s’étaient agglutinés les uns aux autres pour survivre. Et maintenant quoi ? JJ avait renversé l’échiquier, terminé la partie. Game over, on arrête tout. C’est parti trop loin, ça fait trop mal maintenant.

Il ne fallut pas longtemps, après que Sam ait libéré Seven de son étreinte, pour que ce dernier inverse les rôles et se jette sur lui, s’accrochant au col de sa veste à capuche miteuse. J'en ai rien à foutre de c'qu'il t'a fait. Rien qu’un gamin en crise d’adolescence, voilà ce qu’était Seven. Dans le joli parallèle était leur vie maintenant, la seule chose qui les différenciait était une sorte de maturité que Sam avait, et pas Seven. La maturité de ses quasi 28 ans et cette force silencieuse qui vivait dans un coin de son crâne. Sam n’explosait pas, il implosait. Combien d'fois j't'ai dit que j'avais pas touché à ta putain d'sœur ? Hein ? COMBIEN D'FOIS ? Des tas d’fois. Sans doute. Des centaines de fois à hurler à la mort, avec une conviction si pure que Sam aurait dû comprendre. Il aurait dû. T’aurais dû m’écouter. Disait l’autre. J’aurais dû t’écouter. Reconnut Sam, sans trop qu’on sache à qui il s’adressait. Il disait ça d’une petite voix, peu impressionnée par cette tronche défigurée de chagrin à trois centimètres de son visage, mais plutôt attristé par tout ça. Attristé par lui-même. Et Seven continuait, perdait son temps et son énergie dans une rancoeur qui ne valait même plus la peine. C’est ce que Sam se tuait à lui expliquer. Il s’en fichait de se racheter auprès de Seven, il n’en avait pas la moindre envie, ni le moindre intérêt. Il se fichait de se faire pardonner, et encore plus de sa compassion à deux balles. Tout ceci n’avait plus la moindre importance. Tu comprends Seven, pas la moindre ! Mais non, il continuait, hurlait, criait, réclamait vengeance parce que c’était la seule chose qu’il était capable de faire. Tombant nez à nez avec le mutisme de Sam, ses sourcils froncés, son air grave, mais rien pour alimenter cette haine qui s’autogérait complètement dans l’esprit malade du gosse. Tu veux quoi ? Que j'pardonne ? Que j'compatisse ? Sam prit une inspiration, avant de répondre, doucement, presque paternel : J’veux rien de toi Seven. Ni compassion ni colère. Ni amitié ni haine. Rien. Il n’avait plus le temps de se battre avec lui, plus le temps ni l’envie. Il n’y avait que JJ dans sa tête maintenant. Que lui qui empoisonnait son sang et chacune de ses pensées. Que lui pour le faire réagir, maintenant que tout était révélé. Tout le reste était secondaire. Dans quel camp Seven se trouvait, ce qu’il pouvait bien penser. Tout ça… on s’en fiche non ? Tu crois qu'tu peux jouer le bon samaritain juste parce qu'il t'a baisé aussi ? Un sourire glacial fit frémir le coin de ses lèvres. Il l’a baisé hein. C’est comme ça qu’il dit ça. “JJ m’a baisé”. Non, non ce n’était pas ça. C’était bien pire, dix fois pire. Y avait même pas de mot pour décrire ce que JJ lui avait fait. Il n’était pas question d’une vengeance à deux balles. Pas question de s’envoyer des photos de bite, de les placarder dans la ville. Non. JJ l’avait tué. Il avait tout saccagé. Il avait vrillé. Et il ne payerait jamais assez pour ça jamais. On vaut pas mieux qu’lui, et c’est pour ça qu’on va gagner. Tout ce que Sam ne pouvait pas faire, par principe, parce qu’il avait des sentiments pour JJ, des sentiments trop forts pour être ignorés, pour tout ça, y aurait l’autre. Il saurait faire ce qu’il n’osera jamais. Sam ne valait mieux que personne, ça faisait longtemps qu’il avait accepté cette idée, surtout parce que toute sa vie ne lui avait jamais prouvé le contraire. Après tout, il était un raté de plus, sorti du système. Un putain de clandestin, une raclure de la société. Voilà ce qu’il était, et il ne prétendait pas le contraire. Il n’était pas question d’être mieux que JJ. Juste d’avoir la capacité de l’arrêter. Seven ne le lâchait pas. Mais ce n’était pas tellement menaçant. Surtout déroutant, de le voir s’accrocher comme ça, le coeur à vif. Déroutant de le voir souffrir si fort, d’entendre chacune de ses blessures pulser dans son propre esprit, tout comprendre, sans pouvoir se faire comprendre.

Sam monta les deux mains jusqu’aux poignets de Seven, auxquels il s’accrocha, doucement. Presque fraternellement, comme pour le calmer. Il ne chercha pas à se dégager de son étreinte, juste à le tenir, qu’il sente que quelque chose passait entre eux. La voix tordue, il finit par avouer, presque sans réfléchir : C’était lui. Pour Assia, c’était lui. Un sourire tremblant sur ses lèvres, Sam haussa les épaules, les sourcils, complètement démuni. Il ne pouvait plus parler, sa gorge s’était nouée. Les larmes coulaient à nouveau. Voilà, maintenant tu sais Seven. Qu’il aurait lui dire, mais ses lèvres sont scellées. Il dû prendre une large inspiration avant de pouvoir continuer d’une voix brisée : Alors tu vois, c’que tu penses de moi, j’m’en fiche. Il pouvait bien refuser d’être dans son camp. Il pouvait le détester d’avoir laisser JJ agir. Après tout, c’était légitime. Mais qu’il ne s’inquiète pas, Sam s’en voulait déjà tout seul, et personne ne pourrait se détester plus qu’il ne se détestait déjà lui-même. Même pas toi Seven, même toi tu peux pas. même si ça crevait les yeux, que toute cette culpabilité que Sam ressentait trouvait écho dans le coeur de Seven. J’aurais jamais dû essayer de te tuer, ni te tenir responsable… Je… Je savais pas Seven. Comment aurait-il pu le savoir ? Même dans ses pires cauchemars la situation n’étaient pas aussi dramatique. Dans ses pires cauchemars, JJ ne le trahissait pas, pas de cette manière, jamais de cette manière. Maintenant j’le sais. Il était sûr. Et il n’y aurait plus personne pour l’empêcher d’achever sa cible. La promesse restait la même. Il tuerait celui qui s’en était pris à sa soeur. C’était une promesse qu’il se devait de tenir. Et comme je vous le disais, si ce n’était pas lui. Ça serait l’autre.

Il finit par forcer Seven à le lâcher, délicatement. Reculant ses mains et les relâchant une fois dans le vide. Il revint vers lui, d’un pas, il s’approcha, posa une main sur son épaule. J’suis désolé pour ta soeur Seven, sincèrement. Il retira sa main après quelques secondes, et fit tout simplement demi-tour vers le parking.
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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptySam 12 Mai - 13:39

« J’aurais dû t’écouter. » Ça aurait pu lui faire du bien de l'entendre, de voir son innocence éclater au grand jour après tout ce temps, ses protestations qui trouvent enfin écho chez Sam. Mais c'est trop tard pour ça. Y a eu trop de sang trop de haine trop de plaies creusées alors qu'il le méritait pas – pas au début. Il a les lèvres qui s'étirent et les épaules secouées par un rire silencieux, pourtant y a une part de lui qui voudrait exploser, une autre qui aurait presque envie de chialer. Des années passées à dire qu'il avait rien fait et maintenant qu'on l'écoute enfin il s'demande à quoi ça rime tout ça, pourquoi c'est parti aussi loin pour finir comme ça, pour qu'il récolte un simple j'aurais dû t'écouter alors que toute sa vie est partie en fumée. C'est dérisoire, ridicule, c'est une putain de blague mais il n'a plus aucune envie de rire. Il dévisage Sam et y a même plus de rage dans son regard, juste du dégoût, du mépris, une fatigue si profonde qu'il finit par fermer les yeux en basculant la tête en arrière, lâchant un soupir interminable. Il a attendu ça trop longtemps et maintenant que c'est enfin là, il a l'impression que ça n'vaut plus rien. La date limite a été dépassée, c'était avant qu'il fallait laver son nom, l'écouter, croire en son innocence. Elle n'est plus là maintenant – même s'il n'a jamais touché à Assia, il s'est rendu coupable de trop de choses depuis, c'est pas ça qui suffira à lever le poids qui pèse sur ses épaules.

Y a un goût amer dans sa bouche. L'impression que tout est vain, qu'ils se sont tous entretués et auto-détruits à la fois, et tout ça pour rien.

Il veut pas pardonner ni compatir. Il veut même plus le frapper ni lui cracher à la gueule, tirant simplement sur son col, à s'y agripper comme un naufragé à sa bouée. Son équilibre qui dépend presque de Sam et c'est l'pire des choix mais il n'en a pas d'autre. Plus maintenant. « J’veux rien de toi Seven. » Y a rien dans sa voix, comme s'il avait plus la force de ressentir quoi que ce soit envers lui, négatif comme positif. Comme s'il était trop drainé pour lui offrir autre chose qu'un calme aussi plat que l'électrocardiogramme d'un mort. Le regard vide, mais la douleur qui continue d'émaner de lui par vagues qui le submergent et lui donnent la sensation de se noyer lentement. Il a la gorge tellement nouée que ça en devient douloureux.

Il voit passer le sourire glacial de Sam, il se raidit, il fait face au silence qui suit. Toujours cramponné à lui, ses yeux qui n'le quittent pas, son cœur qui bat tellement fort qu'on dirait que les os d'sa cage thoracique vont craquer et que sa peau va se déchirer. Il se fige au contact des mains de Sam sur ses poignets, mais y a pas d'animosité dans le geste et il ne cherche pas à s'en dégager. « C’était lui. Pour Assia, c’était lui. »

Pause.

Respiration en suspens, c'est comme si le monde s'arrêtait de tourner autour d'eux, un silence assourdissant qui le coupe de tout le reste et la sensation de tomber alors qu'il ne bouge pas. C'était lui. Ça continue à résonner en échos, la voix de Sam qui se décompose qui déraille qui se met à hurler dans sa tête. C'était lui. Avant qu'il ne se passe quoi qu'ce soit, avant qu'il ne tombe trop bas, c'était lui. La première pierre qui a pavé sa route vers les enfers, c'était lui. Le début de sa chute avant même qu'il ne le mérite, c'était lui.

Lui à cause de qui il a failli y passer des mains de Sam, lui qui a encrassé son nom pour quelque chose qu'il n'a pas fait, lui qui l'a regardé scander son innocence encore et encore en sachant qu'il disait la vérité. Il a failli en crever et c'était de sa faute. Avant la haine avant le dégoût avant toute l'horreur, c'était lui. Il a commencé à lui gâcher la vie avant même d'avoir une vraie raison de le faire.

Tout ce temps, c'était lui.

Il est figé d'la tête aux pieds, ses doigts toujours accrochés au col de Sam pourtant il ne tire plus. Ses muscles se sont relâchés, il reste simplement là à le tenir, ancré au sol comme un bloc de béton alors qu'il a l'impression d'être en pleine chute. « Alors tu vois, c’que tu penses de moi, j’m’en fiche. » Il n'entend même pas, le regard dans le vide – fixé sur lui pourtant il ne le voit pas. Il rejoue tout le film dans sa tête, tout depuis le début, tout avant le chaos. L'époque où ils n'étaient que deux bandes de p'tits cons qui se provoquaient et se battaient dans les bars, les coups bas d'adolescents, les rires et les insultes faciles. Quand Sam n'était qu'un type bizarre au regard dérangeant et pas le mec qui a essayé de le buter, quand JJ n'était qu'un sale gosse qui parle trop fort et pas celui qui a tout foutu en l'air. Quand il n'en avait rien à foutre d'eux, quand ils n'étaient la cible que parce que Jimmy l'avait décidé, quand il voulait juste passer l'temps en se confrontant à des jeunes comme lui – paumés, cassés, mais pas foncièrement mauvais. Il savait pas qu'il courait à sa perte. Il savait pas qu'il se condamnait à l'instant même où il a attrapé la main que Jimmy lui tendait.

Ils ont plus rien des mômes qu'ils étaient. Les Yobbos se disloquent lentement et il voit que les Kids se sont déchirés si violemment qu'il se demande ce qu'il reste d'eux. Sam a le regard d'un type usé par la vie putain on dirait un condamné qui remonte le couloir de la mort. Il voulait pas tout ça. S'il a rejoint les Yobbos c'était juste pour se marrer et maintenant il est en sursis, comme Sam comme JJ comme chacun d'entre eux. Il commence à s'dire qu'il aurait mieux fait de rester croupir chez lui même si sa haine aurait sûrement fini par l'achever. On l'aurait trouvé crevé comme un chien la gueule ouverte, sûrement les veines saturées par la drogue ou le crâne explosé sur le bitume. Ils sont tombés tellement bas qu'il regrette presque de n'pas avoir emprunté cette voie.

« J’aurais jamais dû essayer de te tuer, ni te tenir responsable... Je... Je savais pas Seven. » Retour à la réalité. Ses prunelles refont le point sur Sam difficilement et on dirait qu'il a oublié où il était, trop paumé dans les remords les regrets tous les choix qu'il a faits et qui se révèlent être des erreurs. Il aurait dû se barrer quand il pouvait. Maintenant il est coincé là, prisonnier de sa propre haine, d'une vengeance sans fin dont il est incapable de se séparer. « Maintenant j’le sais. » Et c'est trop tard, toujours trop tard. Tout est déjà ruiné gâché fracassé, ça sert plus à rien de savoir, de dire j'aurais dû ou j'aurais pas dû, le mal est fait des deux côtés y a plus rien à sauver. Ils se sont tous laissés bouffer par leurs démons.

Il ne réagit même pas quand Sam le force à lâcher, pourtant il se tend. La main posée sur son épaule, les gestes posés et délicats, ça lui fait mal. Il préférerait se faire repousser violemment, recevoir des coups, quelque chose pour le sortir de sa léthargie, la douleur pour s'y raccrocher. Au bord de la falaise tous les deux, Sam l'a poussé mais y a pas de fin, pas d'impact pour l'achever. Rien d'autre qu'une chute et pas d'atterrissage. « J’suis désolé pour ta sœur Seven, sincèrement. » Il reste planté là un instant, à le regarder s'éloigner. Toute la scène qui se rejoue en boucle dans sa tête, c'était lui c'était lui c'était lui et il est pas là, il peut pas se venger, il a les poings qui vibrent et une soif de sang à étancher mais rien d'autre que du vide autour de lui. Son corps tremble, en proie à toute la rage qu'il a du mal à contenir, tout le désespoir qui rend sa vision trouble et le fait suffoquer. En quelques grandes enjambées il rejoint Sam et l'attrape brutalement pour le forcer à se retourner, ses yeux fous qui trouvent les siens. « J'veux qu'il crève. » Il a la voix éraillée et quelque chose d'urgent dans sa façon de parler de bouger et même de respirer. Ses mains se placent de part et d'autre de la tête de Sam, à serrer alors qu'il plante son regard dans le sien, comme s'il essayait d'ancrer chaque mot dans sa mémoire, les imprimer au fer rouge dans sa cervelle. « Faut qu'il crève, t'entends ? » Faut qu'il paye pour tout ce qu'il a fait, pour Anca pour Assia pour tous les autres, pour eux deux. Il a la peau qui brûle et le souffle court, les yeux écarquillés, humides, les émotions qui suintent par tous ses pores et qu'il ne sait plus comment contenir maintenant que tout éclate. « J'en ai plus rien à foutre de toi et des Kids, des Yobbos, toutes ces conneries. J'veux juste qu'il crève putain. » C'est la seule chose qui compte maintenant – le faire payer. De toute façon il a l'impression que c'est soit lui soit JJ mais ils peuvent pas rester tous les deux, ils auront jamais la paix tant que l'autre sera en vie. « Ma sœur– il s'en est servi pour m'avoir moi, comme un putain d'lâche. Elle a essayé d'mourir à cause de lui. » Peut-être que la confession de Sam le pousse à en faire autant, à montrer un bout de l'iceberg, un infime morceau de toute la partie immergée, tout ce qu'ils ont fait sans que personne ne l'sache. « Alors j'vais l'attendre. J'vais l'buter. Et après ça j'veux plus jamais entendre parler de lui ou de toi ou de tout l'reste. » Il veut juste qu'on lui foute la paix et qu'on le laisse tout oublier – mais au fond il sait qu'il pourra pas, les blessures sont trop profondes pour qu'il puisse tout effacer si facilement. « Tout ça c'est d'votre faute. » Celle de Sam d'avoir cru qu'un monstre était son meilleur ami, celle de Jimmy de l'avoir emmené dans ce merdier, celle de tous les Kids tous les Yobbos toute la planète. « J'espère qu'tu t'en voudras toute ta vie. » Y a pas d'agressivité dans sa voix, rien d'autre qu'un constat froid, aussi tranchant que sincère. Et au fond peut-être qu'il se parle à lui-même aussi, peut-être que c'est sa façon tordue d'se punir en punissant un autre, rejeter la faute comme il le fait toujours alors que la culpabilité l'étouffe. Il s'adresse à Sam comme s'il s'adressait à son reflet.
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MessageSujet: Re: no man's land (sevih)   no man's land (sevih) EmptyMar 22 Mai - 8:40

S'éloigner le plus possible d'ici. S'éloigner de l'âme en peine de Seven, s'éloigner du corps brisé de Trixia. Partir se réfugier dans un appartement déserté, hanté par les fantômes d'une amitié d'antan qui n'avait plus cours désormais, par les rires d'adolescents de ce qu'avaient été les Kids hier. Préparer la pipe à eau dans le seul but d'anesthésier au minimum cet esprit rongé par la folie latente, l'auto-médication étant son seul moyen de ne pas sombrer définitivement dans quelque chose de plus terrifiant encore, si c'était possible. Sam n'avait pas envie de se battre, et il luttait tellement pour éviter l'affrontement qu'il avait besoin de mettre au plus vite de la distance entre lui et un Seven fracassé. Le problème, c'est que ce dernier n'avait pas envie de le laisser partir, allez savoir pourquoi. Comme s'il s'accrochait à lui de toute ses forces, dernier représentant des ennemis, la seule personne à qui il pouvait tout reprocher quelque chose avant de se rendre à l'évidence : ils étaient tous coupables. Y avait ni bons, ni mauvais, juste un tas de délinquants dépassés par leurs vices. Gamin capricieux, comme l'être humain l'est fatalement, Seven cherchant un responsable pour se dédouaner de toute l'affaire. Le fait est qu'il avait laissé JJ entrer dans sa vie et celle de sa soeur de la même manière que Sam l'avait fait quelques années avant lui. Le loup dans la bergerie, connerie du genre. Et alors que les pas fatigués de l'égyptien s'éloignaient sur le macadam, les foulées saccadées de Seven le rattrapèrent rapidement. La main qui attrapa son bras envoya comme une décharge électrique dans son corps amorphe. Sam ferma les yeux une seconde avant d'être forcé de se retourner pour se retrouver face à la mine défaite de son reflet cabossé. Seven le retenait sans même savoir pourquoi. Le visage fermé, aussi expressif qu'une statue de Sam comme seul interlocuteur. J'veux qu'il crève. Crachait-il d'une voix tremblante d'émotion. Dans le regard vitreux et globuleux de Sam, rien ne passait. Et toi Sam, tu veux que JJ crève ? Oui. Ca serait horrible, ça ferait un mal de chien, parce qu'on ne se prépara jamais à la mort d'un frère, et pourtant c'était ce qui allait se passer. JJ mourrait de sa main, et celle de personne d'autre. Par esprit de vengeance ou pas simple loyauté. Il lui avait tout donné, il allait tout reprendre. Et il serait là, à la fin, jusqu'à ses derniers instants, aussi bien pour s'assurer qu'il crève que pour l'accompagner. Tu mens, tu mens, t'auras jamais les couilles d'aller jusqu'au bout. Si, et quand bien même, l'autre aura ce courage qui manquait cruellement à Sam. Alors jure de ne pas m'en empêcher, le moment venu. Jamais il ne ferait ça. Tu l'aimes. Comme un frère, comme un fils, comme son propre sang, peut-être plus encore. Mais comme Sam l'avait déjà expérimenter : on ne tue que ceux que l'on aime. Devant le mutisme de Sam, Seven ne pouvait se douter du deal intérieur qu'il était en train de passer avec lui-même. Il répéta donc, martelant chacun de ses mots avec la voix tremblante de rage : Faut qu'il crève, t'entends ? Sam soupira, impatient, presque vexé que Seven insiste à ce point, comme s'il ne le pensait pas capable d'aller jusqu'au bout. Comme s'il craignait qu'il le sauve, par fidélité, par faiblesse. Les doutes du gosse étaient aussi les siens, c'était ce qui était le plus rageant. J'en ai plus rien à foutre de toi et des Kids, des Yobbos, toutes ces conneries. J'veux juste qu'il crève putain. Qu'est-ce que t'attends d'moi ? lâcha-t-il du tac au tac, presque à bout de nerfs. Qu'est-ce qu'il voulait l'entendre dire ? Qu'il pensait la même chose, qu'il voulait aussi que JJ crève ? Seven voulait-il l'entendre jurer à son tour de faire tout ce qui était en son pouvoir pour buter JJ ? Le fait est que Sam n'avait aucune promesse à lui faire. C'était entre lui et JJ, personne d'autre. Et pourtant Seven faisait tout pour s'expliquer, peut-être même pour convaincre Sam de le laisser faire, qu'il était à lui. C'était presque ridicule de se chamailler sur qui aurait la tête de JJ, comme des putains de cow-boy, comme s'il ne s'agissait que d'un bout d'viandes. Comme des animaux. Et la confession de Seven ne provoqua rien d'autre qu'un silence intérieur. JJ s'était servi de la soeur Popescu pour faire du mal à Seven, ça lui ressemblait. Tout ça, c'était Seven qui l'avait sur la conscience. Parce qu'il avait accepté de jouer un jeu dangereux avec l'irlandais. Un jeu dont Sam ne voulait pas connaitre les détails, mais dont l'aperçu qu'il avait eu en débarquant à l'improviste à l'appartement lui suffisait amplement. Aucune émotion encore, pour traverser son visage ravagé de doute, car plus rien ne pouvait empirer son désordre intérieur. A la seconde où Trixia avait avoué la vérité, à cette seconde même, quelque chose d'irréparable s'était brisé chez Sam. Alors j'vais l'attendre. J'vais l'buter. Et après ça j'veux plus jamais entendre parler de lui ou de toi ou de tout l'reste. Non, Seven, tu l'auras pas, c'est moi qui l'aurait. Et Sam ne pourrait jamais attendre plusieurs mois, jamais. Alors il trouverait un moyen de l'atteindre avant, n'importe lequel, le premier qui se présenterait à lui. Seven n'était qu'un gosse, un enfant qui avait à peine fini sa puberté. Jamais Sam ne le laisserait franchir un nouveau cap dans les ténèbres. Jamais il ne le laisserait voler son fardeau. T'en auras pas l'occasion. J'm'en occuperais avant ça. Aussi impossible que ça semblait, Sam savait au fond de lui qu'il y arriverait. Et alors que Seven lui renvoyait une ultime fois les pierres de la culpabilité en pleine face, Sam accusa le coup avec une habitude misérable, les yeux fixes, l'âme écorchée. J'espère qu'tu t'en voudras toute ta vie. Qu'il cracha, Seven, sans que ça fasse sens. Toute sa vie, hein ? Sam était déjà mort. Y avait rien à répondre, rien qu'il ne savait déjà.  Il fit deux pas à reculons, haussant les épaules, désamparé avant de se retourner pour foncer loin d'ici, la démarche peu assurée, et le cerveau en vrac.
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