L'enquêteur est devenu fou, le roi des manipulateur est tombé de son trône. La reine l'a laissé cœur brisé il la cherche dans toute la ville, il n'est pas le seul. Âmes esseulées qui pleurent la disparition d'un proche, d'un frère, un parent, d'un amour. Lui il s'en fout, des autres, de ceux qui au fond le touchent parce que l'abandon, la perte, l'ombre, c'est trop à supporter pour lui aussi. Barbra a disparu et il sait que pour elle c'est différent, qu'elle n'a pas pu se laisser emporter par des types sans protester. Il veut croire qu'elle aurait pu riposter et que quelqu'un d'autre l'a tabassée. Il a besoin de mettre sa rancœur et son manque sur le dos de quelqu'un il sait parfaitement qui viser, il a assimilé les messages en ne voulant pas y croire, il a vu le sourire narquois derrière l'écran. SEVEN SEVEN SEVEN SEVEN ça tambourine dans son crâne, cible numéro une le dernier espoir. Seven comme une cause perdue celle qu'il ne lâchera jamais celle qu'il essaiera toujours de sauver même sans l'aide du concerné même quand il lui crache à la gueule, cette fois c'est fini il ne rit plus, plus de tolérance il a fini de jouer. Les poings serrés quand il toque chez lui quand il fait tourner entre ses doigts le double des clés -il peut entrer chez n'importe quelle Yobbo au cas où c'était le prix à payer pour une guerre sans pitié. La promesse de ne s'en servir qu'en cas d'extrême urgence, il sait que Seven aurait pu changer les serrures mais il n'a jamais eu la thune nécessaire. Il a besoin de savoir besoin de se dire qu'au moins il aurait quelqu'un à blâmer si Barbra venait à crever, besoin de se défouler de se venger -il en a marre de jouer au patriarche usé par une famille nombreuse trop rapiécée. Quand il cogne sur le bois de la porte sa force l'étonne, il n'a jamais été gringalet mais elle semble décuplée, la colère et l'angoisse et la peur et l'envie de frapper ça résonne à l'intérieur. « POPESCU OUVRE TOUT DE SUITE ! » Une dernière chance avant d'entrer sans lui demander.

Regard vissé au plafond il sent les heures passer, le ciel qui s'assombrit les lampadaires qui s'éclairent puis les couleurs qui reviennent percer le noir, le soleil qui s'éveille, le jour qui se lève. Il n'a pas fermé l'œil de la nuit. Il n'a même pas bougé, toujours dans la même position que celle dans laquelle il s'est couché, l'esprit qui divague et se laisse bouffer par les démons. Le refus de Malo les mots de Barbra les mains de JJ sur Anca, Siam jamais rentrée et l'appel de Mihail, Lavinia disparue envolée peut-être même crevée. Ça tourne en boucle – il dort plus. Il n'a même pas la force de se lever, d'attraper une clope ou même un putain de rail de coke. Y a plus rien pour le faire tenir debout, rien de plus que cette rage qui le ronge, la haine qui le gangrène jusqu'à avaler tout ce qu'il restait de bon en lui.

Il a mal. Tellement qu'il sait plus si c'est dedans ou dehors, les plaies qui suintent ou son cœur atrophié.

Quand il entend frapper à la porte il ne bouge pas. Il sait pas quelle heure il est, il sait juste qu'il fait jour et qu'il est tellement fatigué qu'il voudrait s'endormir et ne jamais se réveiller. Il entend vaguement les cris rageurs, son nom qui résonne. Il se lève, à peine vêtu d'un caleçon, les cheveux sales et le teint blême – si on oublie les traces rouges bleues violettes. Il n'ouvre pas. Il traîne des pieds jusqu'à son salon, le regard qui tombe sur le cendrier explosé par terre, souvenir de sa conversation téléphonique avec Mihail. Il enjambe les débris, fouille dans son bordel à la recherche de pilules, de weed ou même de seringues, n'importe quoi en vérité il s'en fout il a juste besoin d'oublier, son crâne va exploser.

Le bruit de serrure attire son attention, ses sourcils qui se froncent quand la porte s'ouvre à la volée, quand il voit débarquer Jimmy. « Comment t'es rentré ? » Il aperçoit la clé dans sa main, le fusille du regard. « T'as fait un double de mes clés ? Sérieusement Jimmy ? T'es un putain d'psychopathe. » Il ne cherche pas à savoir comment il a fait ça, ni même pourquoi il est venu là. Il s'en fout un peu, il a pas l'temps ni l'énergie de s'occuper de lui. C'est loin de lui les histoires avec Barbra, leur altercation et la fierté froissée de Jimmy. Ça vaut plus rien comparé au reste, comparé à la douleur qui lui retourne les tripes et lui donne envie de hurler. Peut-être qu'il le ferait, s'il était pas aussi épuisé. Peut-être qu'il fracasserait tout, s'il était pas si occupé à ruminer. Le temps d'assimiler, d'accepter. La rage n'est pas partie, juste endormie, juste là prête à bondir à la moindre étincelle. Pourtant, ses yeux sont éteints quand ils se plantent dans les siens.

La rage qui aveugle tout, ça lui arrive pas souvent. Jimmy pense sa vie comme un plan, les moindres détails, il analyse les gens avant de cogner. Sauf qu'il y a des fois où son cœur lui fait comme un pieu dans la poitrine des fois où il n'a pas d'autre choix que d'exploser. Quand il déboule en furie dans l'appartement délabré il n'écoute même pas ce que Seven lui dit il ne voit même pas l'état dans lequel Seven est -il voit du rouge du rouge partout du rouge tout le temps il espère que Barbra n'a pas vu le même rouge avant de disparaître. C'est sa faute ça peut être que lui, les messages qui tournent en boucle dans sa tête, il sait comment est Seven quand il a besoin de se venger. « QU'EST CE QUE TU LUI AS FAIT ? » Pas besoin d'expliquer, il le sait. Il l'empoigne par le menton, si fort qu'il le soulève presque du sol. Il pourrait le cogner avec toute la force de sa rage mais il est encore assez lucide pour savoir que ça ne ferait rien, que Seven jouerait toujours au malin même sous ses poings. Il le connaît par cœur, il a vécu chaque ombre chaque bataille, la plupart, celles dont il est au courant. Il ne remarque qu'à peine les marques les bleus l'ombre dans ses yeux, la main qui serre la chair, les pieds qui ne touchent plus la terre. « OU ELLE EST ? QU'EST CE QUE T'AS FAIT ESPECE DE CONNARD ? » et dans les tréfonds de son esprit embrumé par le déni il réalise que les messages étaient sûrement vrais, pas seulement pour le faire enrager. Il imagine le corps de Barbra et celui de Seven se déchire s'enlacer s'embraser, ça lui donne encore plus envie de cogner. Seven l'a cherché. Il a perdu son dernier allié.

« QU'EST-CE QUE TU LUI AS FAIT ? » Il a pas l'temps de répondre ni même de réagir, Jimmy fond sur lui et il attend l'impact, prêt à encaisser comme il le fait toujours.

Le coup ne vient pas.

Les mains qui l'empoignent et son souffle qui reste coincé quelque part au milieu de sa trachée, il ne cherche même pas à se débattre. « OU ELLE EST ? QU'EST-CE QUE T'AS FAIT ESPÈCE DE CONNARD ? » Les mots lui paraissent foutrement lointains et il met trop de temps avant de se réveiller, ses mains qui s'agrippent aux épaules de Jimmy, son genou qui se lève et vient cogner son entrejambe violemment. Ça suffit à lui faire lâcher prise sous l'effet de surprise et Seven s'éloigne en titubant, le jaugeant de son regard le plus noir. « Sors de chez moi. » Il sent la colère de Jimmy mais il veut pas y faire face, il a entendu ses mots mais il veut pas les comprendre. Il veut pas s'occuper de ça, il veut pas savoir ce qu'il veut ni pourquoi il l'agresse comme ça. « Casse-toi putain. » Et c'est son tour de lui foncer dessus, ses paumes qui viennent claquer contre sa carcasse encore et encore pour le pousser, le forcer à reculer. « J'veux plus t'voir. Ni toi ni ta meuf, ni l'reste des Yobbos putain laissez-moi. » Qu'on le laisse crever seul de toute façon c'est tout ce qu'il mérite pas vrai ? Même Barbra le dit. Qu'on le laisse partir, si plus personne ne veut de lui il ne veut plus de personne non plus.

Il sait que sa lente agonie ne suffira pas à l'achever il est comme les cafards – il reviendra tout fracasser jusqu'à ce qu'ils finissent tous par s'entretuer, jusqu'à ce que quelqu'un se dévoue enfin pour venir à bout de lui.

« LAISSEZ-MOI BANDE DE PUTES ! » Sa voix qui résonne trop fort c'est comme un électrochoc, son poing qui se serre et vient heurter la mâchoire de Jimmy brutalement. Il veut plus le voir et il sait que la réciproque est vraie, alors qu'on lui foute la paix.

Y'a jamais de bataille à gagner avec Seven, une guerre qu'il n'a jamais voulu enclencher, parce qu'il y a toujours la seconde la troisième l'énième chance parce qu'il s'est toujours évertué à vouloir le sauver à ne pas le laisser crever. Souvent il repense à ses mots de la dernière fois, c'est ta faute gravé sous sa peau qui lui donnent envie de hurler, parce que Seven ne sera jamais reconnaissant parce qu'il sait qu'il aurait préféré crever que de se laisser embarquer sans sa guerre sans le moindre sens. Mais l'injustice le ronge parce qu'ils ont tous failli y rester ils sont restés soudés le plus possibles lui il a préféré fuir lui cracher à la gueule le laisser tomber -il peut pas digérer. Avec barbra c'est pire, parce que l'inquiétude le bouffe totalement parce qu'il est devenu dément. Les mots le heurtent plus que les poings, il savait qu'il reviendrait pas mais avec la preuve c'est pire, j'veux plus te voir Seven qui préfère crever seul plutôt que de tendre la main, cette fois c'est la rupture le point de non-retour. Mais il se laisse pas faire Jimmy, la mâchoire qui craque et lui qui riposte, se jette sur Seven le renverse sur son plancher -y'a sûrement des éclats de céramique qui lui rentrent dans le dos c'est bien fait, des cendres qui s'incrustent sur sa peau il l'a cherché. Corps maintenu contre le sol le genou sur son torse il le fait ployer, les cheveux tirés pour amener sa tête près de la sienne. « J'me répéterai pas une troisième fois. Tu me dis où est Barbra ou c'que t'as fait pour qu'elle disparaisse et j'me casse. Parle Seven maintenant, tu PARLES. » Main qui claque le crâne contre le plancher une fois, pas deux. Il a pas envie de négocier pas envie d'entendre son rire de môme pourri gâté ses sarcasmes qui lui donnent envie de le gifler.

Quand Jimmy se jette sur lui il n'est pas surpris, sa carcasse qui s'effondre lourdement, ses os qui vibrent sous la force de l'impact contre le sol. Il n'a pas le temps de riposter, Jimmy qui prend le dessus et appuie son genou contre son torse, son poids comme une enclume qui rend sa respiration laborieuse. Il serre les dents quand la main tire sur ses cheveux, quand il est maintenu dans une position inconfortable, son visage proche du sien. Y a une lueur mauvaise au fond d'ses yeux, ses traits tirés qui reprennent l'angle de la rage, la fureur qui vient tapisser la fatigue. « J'me répéterai pas une troisième fois. Tu me dis où est Barbra ou c'que t'as fait pour qu'elle disparaisse et j'me casse. Parle Seven maintenant, tu PARLES. » Son crâne claque contre le sol dégueulasse et ça n'fait qu'agiter un peu plus la colère qui s'éveille – c'est comme sortir d'un coma, l'énergie qui revient dans ses membres et fait vibrer ses poings.

Il le regarde droit dans les yeux quand il lui crache à la gueule.

Il observe sa salive encrasser le visage de Jimmy, affiche un rictus haineux. Il pourrait chercher à se libérer de sa poigne mais ça serait moins drôle, il aurait pas encore assez de matière pour tout déverser sur lui. Il a besoin de plus, besoin que Jimmy continue d'alimenter le brasier qui renaît de ses cendres. « J'sais pas de quoi tu m'parles, connard. » Qu'est-ce qu'il en a à foutre, de Barbra ? Elle a été claire : il n'a plus sa place auprès d'eux et pour une fois il est d'accord avec elle. Il l'a plus vue depuis qu'il a imprimé la trace de ses doigts autour de son cou comme un collier foireux. « P't'être qu'elle s'est tirée parce qu'elle a enfin capté que t'étais qu'un bouffon. C'est pas en jouant au chef que tu vas t'faire respecter. » Y a qu'à voir, lui ne le respecte pas.

« Elle est pas revenue sucer ma queue, si c'est c'que tu voulais savoir. Dommage elle fait ça super bien, pas vrai ? » La provocation est facile, prévisible. Les lèvres étirées en coin et une lueur de défi dans l'fond des yeux, s'il retrouve son insolence c'est qu'il est pas tout à fait mort. Pas encore.

Il n’est même pas étonné quand la salive rencontre sa peau quand il lui crache à la gueule littéralement –violence pour violence y’a rien à sauver il se demande si Seven est définitivement bon à jeter, s’il faut laisser tomber. il est tenté épuisé l’impression d’avoir tout essayé maintenant c’est la fureur qui prend le dessus, il a trop cherché il lui a tout volé et il continue à riposter. Jimmy ne fait rien il se freeze il bloque, regard rageur poing qui se serre dans les mèches, la salive qui dégouline sur sa joue son menton –il s’en fout il peut cracher ses mots et l’reste y’a plus rien qui compte sinon Barbra, la retrouver c’est tout, obsession qui l’empêche de réfléchir et d’être lui dans son entièreté. Y’a plus rien, rien du tout même les mots percent à peine le flou. À part les derniers. Dernière provocation, le sourire cassé d’un gosse toujours en train de se moquer. Ça part tout seul et c’est la première fois que ça arrive, il croit : une gifle qui à faire trembler les os vibrer la mâchoire. À faire rougir la peau qui lui arrache un gémissement, et Jimmy se complaît dans sa propre violence. Instable démence. « Tu la touches pas. Tu parles pas d’elle. Tu penses même plus à elle. T’es mort pour moi, compris ? T’es mort. De toute façon c’est c’que tu cherches non ? Regarde toi. »  Fureur des muscles qui se bandent quand il le soulève par les cheveux et le traîne jusqu’à la salle de bains crasseuse. Le miroir fissuré sur lequel on a sûrement déjà abattu des poings. Le corps de Seven tenu debout à la seule force de sa vengeance. « C’est qui le plus pathétique de nous deux Seven ? REGARDE TOI PUTAIN. REGARDE. » Les ecchymoses violettes les marques rouges la peau blafarde les cernes –il est une ombre un cadavre. Seven qui se complaît dans son malheur, et lui il abandonne pour de bon. « Tu m'fais pitié. » Il aurait pu l’aider maintenant il le trouve juste bon à jeter cas désespéré laissé sur la chaussée.

La gifle fend l'air, le claquement résonne et la douleur éclate dans la joue de Seven. Sa tête tournée sous la force de l'impact, il reste immobile, fixe un point invisible en accusant le coup une seconde. Celle d'après, il éclate de rire. Ses yeux viennent se plonger dans les siens et il n'a pas besoin d'ouvrir la bouche pour que Jimmy sache ce qu'il a sur le bout des lèvres : c'est tout c'que t'as ?

« Tu la touches pas. Tu parles pas d’elle. Tu penses même plus à elle. T’es mort pour moi, compris ? T’es mort. De toute façon c’est c’que tu cherches non ? Regarde toi. » Il n'a pas le temps de répondre, Jimmy qui tire sur ses cheveux si fort qu'il est obligé de suivre le mouvement, à s'remettre sur ses pieds en grognant. Ses doigts s'enroulent autour de son poignet par réflexe et il suit quand Jimmy se met en marche, les pieds qui traînent et le cou tordu. « Lâche-moi putain. » Évidemment l'autre n'écoute rien et il s'retrouve dans la salle de bains, face au miroir, face à ce reflet qu'il n'a plus envie de croiser. « C’est qui le plus pathétique de nous deux Seven ? REGARDE TOI PUTAIN. REGARDE. » Il n'a pas besoin de regarder il sait déjà tout ce qu'il y a à voir – il sait les hématomes les plaies les cicatrices, les cernes et les joues qui se creusent, le teint cireux les yeux éteints il sait putain. « Lâche-moi. » C'est tout ce qu'il est capable d'articuler, la voix étranglée par la colère qui revient l'assaillir brutalement. Ça le gifle plus fort que ne l'a fait la main de Jimmy, c'est une vague qu'il se prend en plein gueule et qui le noie c'est comme être pris au cœur d'un tsunami. Il a du mal à respirer. « Tu m'fais pitié. » Sa poitrine se soulève dans un rythme chaotique son souffle est trop bruyant, il a les dents serrées et le regard fuyant, refusant de se poser sur le miroir qui lui fait face. Il peut pas. Quand il se voit il ne voit qu'un cadavre ambulant un fantôme un tourbillon de rage qui n'a plus rien d'humain, il voit une ombre – celle de son père. Pas assez Seven et trop Lucian Junior, pas assez lui et trop son pire cauchemar.

Il devient tout ce qu'il s'était juré de ne jamais être.

« LÂCHE-MOI ! » Cette fois il gueule et c'est vibrant de rage et de haine, son coude qui heurte violemment le torse de Jimmy pour le forcer à lâcher prise. Une fois libéré il fait volte-face et le pousse de toutes ses forces, le faisant se cogner contre le mur derrière lui. Il a les mains tremblantes et la respiration aussi erratique que s'il avait couru le marathon mais c'est juste les émotions qu'il ne contrôle pas, c'est juste sa fureur qui prend toute la place et qui le fait suffoquer, sa gorge serrée ses tripes nouées il a l'impression qu'il va gerber. « J'EN AI RIEN À FOUTRE DE BARBRA OU DE TOI TU PIGES ? » Il comprend pas ce que Jimmy veut, pourquoi il est là à demander où elle est alors qu'il n'en a aucune idée. Pourquoi il saurait ? Si elle voulait s'barrer c'est pas vers lui qu'elle se tournerait, et il veut plus être au cœur de tout ça – les Yobbos les Kids toutes ces querelles qui l'ont rongé avalé recraché, la guerre l'a fracassé et ce n'était même pas la sienne. « J'veux plus vous voir putain pourquoi tu viens m'faire chier ? Si j'suis mort pour toi, dégage. » Tout ce qu'il veut c'est la paix, qu'on l'oublie et qu'on fasse comme s'il n'existait plus. « J'suis plus un Yobbo, t'as qu'à trouver un autre pigeon pour m'remplacer. » C'est fini. Il arrête tout et qu'ils continuent à s'entretuer si ça leur chante, il veut plus s'en mêler. On lui a tout pris – sa dignité ses espoirs et ce qu'il restait de bon en lui, ils ont tout volé tout cramé et il les a regardés pisser sur ses cendres. La seule chose qu'il lui reste c'est la haine et il assouvira sa vengeance, mais c'est tout. Il déserte le front.

Il devrait le frapper avec toute la force de sa rancoeur, la frustration, l'envie de le voir rester, l'impuissance de le voir filer. Seven comme une ombre quand il le traîne sur le sol carrelé, il devrait cogner voir au moins le sang couler pour le réveiller -ça ne changerait rien il le sait. Seven cabossé abîmé et pourtant il est mort. Il devrait le laisser crever pourtant c'est lui qui refuse de le chasser. Les Yobbos comme ses gosses, il s'accroche à eux même quand ils le laissent tous tomber même quand il voit son empire s'écrouler. Seven qui le laisse tomber plus que les autres, qui se laisse tomber lui-même, aussi, sûrement. Quand il le cogne qu'il fait semblant d'être encore un peu vivant. Jimmy se laisse être malmener, laisse les mains de Seven le pousser, parce qu'il le connaît encore il le connaîtra jusqu'à la mort s'il décide de ne jamais changer. Il sait les sourcils froncés devant le miroir il sait la respiration chaotique les mains qui ont tendance à trembler, déchet attiré par la chaussée, il finira par être aspiré par le trou noir qu'il a créé. Quelque part y'a un peu de culpabilité, il l'a sûrement enfoncé au lieu de l'aider, pourtant il a essayé. Dans sa guerre dans sa folie dans sa tête à moitié cramée il y a encore un peu d'humanité. Mais ce soir elle est cachée derrière la haine l'inquiétude la peur les regrets. Ses mains qui saisissent Seven par les épaules mais qui le n'éloignent pas -il le force juste à le regarder. « Tu laisses tomber. » Il refuse de le frapper. « Ta deuxième famille comme la première, tu laisses tomber tout le monde. Surtout toi, et putain, j'voulais pas te laisser te ramasser mais tu me laisses pas le choix. » Il le pousse et Seven bascule, il aurait du le pousser plus fort, le faire fusionner avec son reflet, lui renvoyer dans la gueule une bonne dose de réalité. C'est lui qui réalise -Barbra n'est pas là et Seven non plus ne sait pas où elle est. Cause perdue pour un gosse plus paumé que la fois où il l'a trouvé. Il voudrait le laisser être mort pour lui il voudrait se casser -au sol il est cloué. « Qu'est-ce que tu vas faire maintenant ? Brûler tout l'monde et toi avec ? Tu penses que ça va marcher ? Que c'est comme ça que tu vas réussir à effacer ton envie de crever ? » Tu réussiras pas à mieux respirer. « J'm'y connais en vengeance Seven. » Ca marchera pas. Mais il lui fera pas la morale, il le laissera se brûler les ailes de trop près. Il le laissera faire ses propres pas forger ses propres regrets. Il a l'impression qu'il ne peut, de toute façon, plus l'aider.

« Tu laisses tomber. » Les mains de Jimmy sur ses épaules et il se tend, les mâchoires qui se contractent, son regard qui continue de l'incendier, qui scande me touche pas sans qu'il ait besoin de le prononcer. « Ta deuxième famille comme la première, tu laisses tomber tout le monde. Surtout toi, et putain, j'voulais pas te laisser te ramasser mais tu me laisses pas le choix. » Il ricane et tant pis si Jimmy le coupe dans son élan, tant pis si sa voix crève quand il se fait pousser encore une fois. Il recule, l'observe, babines retroussées dans un sourire mauvais c'est dégueulasse ça l'rend laid. « Tu crois tout savoir hein ? » Pourtant il n'a rien compris, il a faux sur toute la ligne. Ils n'ont jamais été sa deuxième famille – à ses yeux ce mot est proscrit, ça rime juste avec haine et douleur ça donne rien de bon. Tout au plus ils ont été sa meute, des loups comme lui auxquels se raccrocher pour pas crever seul, pour s'croire plus fort avec des gens pour l'entourer. Jimmy ne fait que s'enfoncer encore et encore, il creuse le fossé qui les sépare déjà et y a plus rien à sauver, le lien est rompu pour de bon.

Y aura pas de retour en arrière.

« Qu'est-ce que tu vas faire maintenant ? Brûler tout l'monde et toi avec ? Tu penses que ça va marcher ? Que c'est comme ça que tu vas réussir à effacer ton envie de crever ? J'm'y connais en vengeance Seven. » Il n'écoute pas vraiment, il veut pas savoir ce que Jimmy peut bien avoir à dire, il veut plus l'entendre il veut plus jamais le suivre. Il a cru que dans son sillage il trouverait de quoi se grandir de quoi tout écraser mais au final c'est lui qui se retrouve piétiné, c'est lui qu'on a lynché. « Barre-toi Jimmy. » Ça sonne las, même sa colère est éreintée bien qu'elle soit toujours là – elle partira sûrement jamais, sans elle il n'est qu'une carcasse vide sans elle il crève. « J'ai plus envie d'entendre tes discours, j'en ai rien à foutre. J'veux juste que tu m'lâches putain. » Lui et tous les autres, il n'a plus rien à faire avec eux. Ils le savent il le sait alors il comprend pas pourquoi Jimmy continue à s'acharner, ça n'sert à rien.

Dans ses yeux on voit qu'il est sérieux, on voit qu'il n'a plus rien à donner. Il veut plus être assimilé aux Yobbos, pour lui la page est tournée. « Dégage. » Il attend une seconde, perd la patience qu'il n'avait déjà pas, empoigne le col de Jimmy pour le tirer dans son sillage. Il le traîne jusqu'à la porte, le lâche brutalement en continuant de le fusiller des yeux. « J'veux plus entendre parler des Yobbos. » Ni d'eux ni des Kids ni de lui. Cette fois c'est fini.