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 once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)

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MessageSujet: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyMer 24 Jan - 19:34

New York, 2016


Trois DJ se partagent la scène ce soir. Ghost appréhendait un peu quand on lui a expliqué que ça se passait chez une It girl/artiste (personne n'a été foutu de lui dire ce qu'elle fait exactement) mais il a été agréablement surpris en arrivant. Il s'attendait à se retrouver dans un loft puant le luxe et la haute couture, penthouse avec piscine de toit et tutti quanti, mais c'est loin d'être le cas. C'est plutôt une vieille baraque bien retapée précisément pour recevoir un max de monde et de bruit. Apparemment la fille habite ici dans les étages et sa vie se résume à l'organisation de ses soirées au sous-sol et au rez-de-chaussée. Les soirées sont privées mais au final il a l'air facile de s'y incruster. Y a des gosses de riches qui le portent sur eux et des artistes underground qui ressemblent à des clochards, soit parce qu'ils le sont, soit parce qu'ils n'ont pas changé leurs habitudes, c'est difficile à dire. C'est un collègue de Gracie autant branché conservatoire que rave parties qui lui a dégoté le job. Malgré ses doutes, Ghost n'a pas craché sur l'occasion parce qu'on rencontre des gens intéressants dans ce genre de soirées, intéressants pour la carrière s'entend, et même si la presse n'est pas là ça fait à coup sûr le tour des réseaux sociaux. Le premier DJ était assez conventionnel et Ghost s'est demandé si l'organisatrice de la soirée avait vraiment écouté ses échantillons avant de l'engager, mais il y a eu plus de cris de joie que de grimaces quand il a fait péter les basses de Tool.

Son set fini, il est invité à rester pour la soirée. Il a sa bouteille d'Ice Tea dans un sac à dos parce qu'il s'est retrouvé plusieurs fois comme un con à n'avoir rien à boire. Il refuse l'alcool qu'on lui offre, refuse de répondre quand on lui demande pourquoi il ne boit pas, décrit un arc de cercle autour d'un type en train d'en ravitailler d'autres en ecstasy. Il y a un putain de paradoxe entre son mode de vie et son hygiène de vie, mais il arrive à s'y tenir à peu près. Il attrape un petit four sur une table qui sert de buffet en espérant que personne n'a mis de drogue là-dedans. Il croit bien remarquer deux personnes se remplir les poches avec de la bouffe, pas sûr qu'ils soient sur la liste d'invités mais il s'en fout, c'est pas chez lui et ça ne manquera à personne. Plus il l'écoute et plus la fille maintenant derrière les platines l'épate. Elle aussi fait dans les mélanges bizarres même si les siens font moins de bruit que ceux de Ghost, plutôt à base de dub et de ce qui ressemble à des instruments traditionnels japonais. Ça fonctionne étrangement bien. Il regrette un peu de ne même pas pouvoir fumer un pétard là-dessus. Il a les yeux fermés, sa bouteille dans la main et il essaie de se laisser partir juste au pouvoir de la musique, quand il sent quelque chose lui couler du nez. Merde. Il se bouche la narine d'un doigt et monte les marches du sous-sol au rez-de-chaussée quatre à quatre. Il se met à saigner de l'autre narine aussi. Bordel de merde. Il se pince le nez comme s'il s'apprêtait à sauter dans une piscine et file dans les chiottes. Y a des gros rouleaux de serviettes en papier à disposition, la proprio fait pas les choses à moitié, sauf que c'est galère de les découper d'une main. « Tu veux pas m'aider ? » il fait d'une voix nasillarde au gamin ou la gamine, il sait pas trop, qui squatte déjà les toilettes.


Dernière édition par Ghost Sun le Dim 11 Fév - 11:27, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyVen 26 Jan - 1:01

Tu manges pas assez, a lancé Victoire ce matin-là, un doigt enfoncé dans ses côtes un peu trop saillantes. Tu manges pas assez et c’est une putain de blague, se dit Merle, parce qu’il mange ce qu’il peut, c’est tout, parce qu’il est pas bien sûr que Victoire bouffe plus, de toute façon, parce qu’il est certain que Valmont mange franchement pas plus, de toute façon. Tu manges pas assez, elle balance, comme si ça allait régler quoi que ce soit et il hausse un sourcil, les genoux ramenés contre son torse et le menton planté dans le creux de sa main, parce que Victoire a l’air trop ravie, trop contente, parce que Valmont, derrière, rallume le feu dans le bidon et que le pont a l’air un peu moins glacial avec les flammes qui lèchent les murs. Tu manges pas assez et il soupire, se passe une main dans les yeux, se dit qu’il aimerait bien coller toute la masse de ses seins dans le reste de son corps, que ce serait plus simple comme ça, pour une fois, moins compliqué, que y aurait pas des histoires à la con de médecins louches et de binders qui coûtent la peau du cul, que y aurait moins de pulls beaucoup trop larges et plus d’assurance peut-être. Tu manges pas assez, répète Valmont, près du feu, avec une inquiétude exagéré et Merle éclate de rire, secoue la tête. Ben non, il bouffe pas assez, personne bouffe assez quand on habite sur le trottoir, c’est un peu la règle du genre, Victoire est bien placée pour le savoir, avec ses joues creuses et ses bras trop maigres, avec l’amas de cheveux emmêlés qui se dressent au-dessus de sa tête. On a un truc à te proposer, piaille Victoire en appuyant sa joue contre son épaule, un sourire taquin sur les lèvres.

Merle regrette un peu d’avoir accepté.

« Un peu » parce que la musique est bonne, « un peu » parce qu’ils se fondent dans la masse, « un peu » parce que ça fait un moment qu’il avait pas pu discuter avec des gens qui s’arrêtent pas à ses cheveux longs attachés en chignon ou à son visage un peu trop féminin et qui réagissent pas trop lorsqu’il corrige, qu’il lance « il », qu’il essaye d’exister autrement qu’à poil et allongé sur un lit ou en tailleurs dans la rue à mendier auprès des patient. Il regrette quand même, parce que y a ce mec qui essaye de lui mettre la main aux fesses et la drogue qui circule entre les gens, les lumières qui flashent dans ses yeux. La bouffe rattrape un peu et il a fourré tout ce qu’il a pu dans ses poches avant d’aller se réfugier aux chiottes, pour planter Matt et sa barbe et bidule et sa chemise à carreau, pour fuir les regards sur son pull un peu trop moche, pas tout à fait assez fashionement laid, un peu trop premier degré. La vérité, c’est qu’il pensait pas qu’on viendrait le faire chier là. La vérité, c’est qu’il manque de faire échapper un canapé lorsqu’un type rentre et le surprend là, assis en tailleurs à même le sol, à essayer de mettre un maximum de trucs dans sa bouche sans oublier de respirer. Le mec saigne du nez. Pas de bol. Merle saigne d’ailleurs, cela dit, alors peut-être que c’est un pacte de sang chelou dans les chiottes d’une villa vachement trop grande, il sait pas.

« Attrape ça. » Il lance, lorsqu’il lui balance un tampon, avec un peu trop de bonne grâce alors qu’on lui ordonne quelque chose. Il est pas sûr que le coup du tampon dans le nez soit efficace dans autre chose qu’un teenage movie mais pas de bol, il a que ça sous la main et c’est déjà vachement sympa de sa part de s’en séparer alors qu’il a passé douze ans et demi à les tirer dans le supermarché. « C’est pour la nuit, j’crois, ça devrait bien réussir à absorber le sang que t’as dans le nez. »

Enfin y a pas de raison, en tout cas, et il mord dans une crevette en le fixant d’un air curieux.

« C’est toi qu’était sur scène juste avant, non ? C'est une meuf en chien qui t'a foutu un coup ? »

Enfin juste avant. Entre le moment où Matt était sympa et le moment où il était franchement navrant, en tout cas. Il croit reconnaître sa tête, en tout cas, la gueule de ses cheveux, vaguement son visage. Ils se ressemblent un peu tous de toute façon, mais ce mec là un peu moins que les autres et c’était franchement une bouffée d’air frais après avoir traîné avec des copies conformes toute la putain de soirée. Sans cérémonie, il s’essuie la main sur son jean, lui fait signe d’approcher :

« T’as besoin d’aide avec ce truc ou t’es un type bien que les produits d’hygiène menstruel dérange pas ? »

Non parce que manquerait plus qu’il se colle le bout en plastique dans le nez aussi, ils auraient l’air fin.
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyVen 26 Jan - 8:19

Il pose sa bouteille d'Ice Tea sur le bord du lavabo et se retourne pour appuyer sa question. Là il remarque que le gamin ou la gamine est en train de s'empiffrer. C'est quelque chose d'assez impressionnant à regarder mais ça ne dure pas. La jeune personne attrape quelque chose dans ses poches et lui balance. Ghost rattrape ça d'une main, l'autre qui fait toujours barrage à son hémorragie. Il ouvre la main et y découvre un tampon. OK. Il lève un sourcil et c'est déjà hyper expressif venant de lui. Et puis suit l'explication de la gamine (du coup, apparemment). Ghost lâche un petit rire incrédule, ça ressemble à krr, c'est bref et ça ne tire pas trop sur ses zygomatiques mais ça aussi c'est déjà énorme. Ça doit être à cause du sucre. Une vraie drogue cette saloperie, la prochaine fois il prend de l'Ice Tea Zéro ou un truc qui ne fait même pas semblant d'être sucré parce qu'il n'est pas sûr d'aimer encore ça, finalement. La prison ça vous change un homme. Krr. C'est pas que la vue d'un tampon le fait glousser, il a probablement eu cette période-là à douze ans quand il a compris ce que c'était que ces choses qui traînaient dans le placard des toilettes et l'a dépassée à douze ans et demi parce qu'il avait des préoccupations plus intéressantes. Il serait presque indigné qu'on lui demande si ça le dérange, il voit pas pourquoi ça le dérangerait. Ça le fait juste rire que la gamine lui lance ça comme si c'était la solution la plus évidente à son problème, alors qu'il y a les gros rouleaux d'essuie-tout industriel derrière lui. C'est le genre de truc que Michelle aurait fait. Sauf que Michelle aurait ordonné à Magnus de l'immobiliser et le lui aurait collé dans le nez de gré ou de force. C'est pas juste, Magnus était un putain de viking à dix-neuf ans et lui il est toujours une crevette, aussi crevette que cette gosse qui a besoin de vider clandestinement le buffet d'une soirée privée pour remplir les creux entre ses côtes. Enfin, ça, il le devine seulement à ses jambes et son visage un peu émacié, parce que apparemment ils partagent le même goût pour les pulls trop grands. Celui de Ghost est noir (et possiblement taché de sang mais on s'en fout, ça se voit pas), et lui tombe sous les fesses. On voit quand même qu'il a les épaules trop pointues et les deux cannes qui tombent dans ses boots ne trompent personne.

En guise de réponse, il libère ses narines et laisse le sang lui couler sur le menton. Il voulait lui montrer qu'il lui en faudrait deux alors mais finalement y a plus qu'une seule narine qui saigne. En fait c'est tant mieux parce qu'on lui a dit de s'inquiéter autrement et il aime pas les docteurs, ils puent l'hôpital et la mort et la neige. « C'est très généreux de ta part mais sérieux je pense que j'ai le nez trop petit pour ça. » Et c'est sûrement une bonne chose. Il se retourne pour déchirer un morceau de papier qu'il se fourre dans le nez, puis il chope plusieurs feuilles qu'il passe sous l'eau pour nettoyer ce qui lui a coulé jusque dans le cou. « En fait c'est bon, je croyais que j'avais pas assez de mains libres. » Et il voulait éviter de se vider de son sang sur le carrelage étonnamment propre. Personne n'a d'envie de pisser ici ou ils ont trouvé l'El Dorado des sanitaires ? Y en a sûrement d'autres au sous-sol. Il hoche la tête à retardement. « C'était moi ouais. C'est la musique qui m'a foutu un coup je crois, donc tu peux dire ça ouais. La meuf qui mixe là elle déchire, tu devrais aller écouter. » On entend quand même vaguement ici, mais l'insonorisation du sous-sol est pas dégueu. Un jour Ghost aura un hangar insonorisé dans son jardin et il organisera des putains de grosses soirées comme ça quand il voudra. Le reste du temps il sera peinard parce qu'il vivra au milieu de nulle part.

« Tu serais pas avec deux autres euh... Gens. » Il en oublie d'y mettre le ton de la question. Il allait dire clochards mais ça peut être mal pris. Peut-être qu'elle est juste défoncée et qu'elle a la grosse dalle, ça arrive, mais y a un truc qui lui met la puce à l'oreille. Ou au nez. Très nasal cette soirée. Bref, elle sent pas la rose.
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyVen 2 Fév - 16:04

Le mec rit et Merle hausse les épaules. Le mec rit et ça lui arrache un sourire, peut-être, aussi, un vague air de satisfaction parce que ça fait longtemps qu’il a pas fait rire quelqu’un et que c’est certainement pas en lui lançant un tampon à la figure qu’il pensait réussir. Le mec rit et ça lui fait du bien, en vérité, parce que c’est un semblant d’interaction sociale à peu près normale, parce que c’est comme ça que ça se passe, en vérité, on se rencontre et on rit et puis la vie fait ce qu’elle a à faire. C’est logique, normal, sain, et il se détend un peu, s’appuie contre le mur, un vague sourire un peu trop satisfait sur le visage alors qu’il joue avec son dernier toast. C’est pas très grave si le mec se colle pas le tampon dans le nez, dans le fond, parce que Merle le récupère et que le type a pas l’air plus alarmé que ça par la situation, parce qu’il tape la discute et que c’est rigolo de le regarder se foutre du papier dans le nez et lui dire qu’il a un problème de bras libres comme s’il avait oublié qu’il avait deux mains. C’est lui qui rit, à ce moment-là, un peu incrédule, un peu surpris, comme si on avait extraie de force la petite bulle de joie qui lui remonte le long de la gorge. C’est lui qui rit, parce que c’est beaucoup trop improbable comme conversation et que le gars a l’air de se faire un principe de lui balancer les trucs les plus absurdes comme si ça allait de soit.

« La musique t’as foutu un coup de poing ? » Il demande, parce qu’il pige pas ce qu’il veut dire. « T’es sûr qu’on a pas foutu de l’acide dans ta bouteille ? » Il pointe du doigt l’Ice Tea, déglutit parce que ça lui fait envie, se concentre sur le fait d’émietter son toast à il sait pas quoi parce que c’est pâteux et que ça a franchement pas de goût – peut-être un truc au soja, il sait pas, ou des aubergines, il déteste ça. « J’suis pas là pour écouter la musique, tu sais, j’suis là pour le buffet. » Il se doute qu’il sait, parce qu’il a vu ses yeux, parce qu’il a entendu sa question, parce qu’il tente d’être poli mais que tout le monde est pareil, dans le fond, et ça fait lever les yeux au ciel de Merle qui s’allume une cigarette, finalement, les genoux ramenés contre sa poitrine et l’air insolent du gamin qui s’apprête à dire un truc un peu offensant, à foutre les pieds dans le plat juste pour le plaisir de provoquer le malaise, juste pour le plaisir de voir les gens rentrer plus bas que terre. Il fait ça bien, généralement, balance les mots qui fâchent, les sujets vexants, les trucs qui font piétiner les gens et les pousse à se tordre les mains. C’est sa grande technique de fumiste pour détourner l’attention des sujets qui le blessent vraiment, le grand tour de magie qui lui permet de s’en sortir indemne la plupart du temps. « J’suis là avec les deux autres clodos, ouais. Parce qu’avoir l’air de pas avoir de maison ça a l’air d’être hype en ce moment alors on en profite, tu vois. » Y a du mépris dans sa voix mais c’est pas sur le mot clodo que ça fait tilt. Il a pas honte, de pas avoir de toit, pas honte de crécher dans la rue. C’est pas facile mais c’est pas honteux, c’est pas lui qui devrait rougir de ça, de toute façon, c’est ses parents, c’est lui qui a claqué la porte mais c’est eux qui ont enterré leur fille lorsqu’il est parti. Y a du mépris et ça fleurit quand il dit hype, parce qu’il pense à tous ces mecs plein de thunes qui ont l’air de vivre dehors mais qui profite du confort, de tous ces mecs qui les font passer pour des mecs branchés plutôt que pour des gens dans le besoin. Qu’ils aillent tous se faire foutre. « Tu vas me balancer à l’organisatrice de la soirée ? Parce que j’te préviens, j’hésiterais pas à te refaire saigner du nez, si tu fais ça. »

C’est pas sérieux, pas vraiment, il prendrait plutôt la fuite, certainement, mais il a le sourire trop grand, trop large, un peu moqueur, un peu vaurien, quelque chose d’un peu dangereux dans les yeux parce que ce mec lui plaît bien, même s’il tourne autour du pot, parce qu’il lui plaît bien, avec sa dégaine d’alien fraîchement débarqué et sa musique qui rime à rien.

« J’m’appelle Merle, au fait. » Et il est serein quand il lui tend la main.

La fumée de sa clope part chatouiller le plafond. Tout va bien.
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyDim 4 Fév - 17:54

« La musique t’as foutu un coup de poing ? » Ghost lui jette un regard en coin, clairement l'air de se demander si la gamine se fout de sa gueule. C'est ça ou elle est un peu conne, peut-être. On lui a jamais parlé des métaphores à l'école ? Non, ça lui vient pas immédiatement à l'esprit que quelqu'un puisse ne pas avoir eu une scolarité comme la sienne, normale et à peu près sereine en plus. Pas immédiatement. Il fait glisser sa bouteille d'Ice Tea vers elle. « J'sais pas, teste. » C'est peut-être un peu tiède mais ça lui fera pas de mal, faut faire couler les crevettes. Il est presque étonné qu'elle se soit pas déjà étouffée vu comme elle s’empiffrait tout à l'heure. Et puis l'ado lui confirme ce qu'il avait plus ou moins deviné, qu'elle est là pour le buffet, et là, finalement, il refait ses calculs sans ses préjugés de sale gosse privilégié. Gamine clocharde + rien à bouffer = probablement pas d'école. Ghost a toujours été un matheux.

« Tu peux pas faire les deux ? » Piller le buffet et écouter la musique, il veut dire. Il voit bien qu'il a gaffé. Ghost n'a jamais eu de tact, c'est une autre vérité sur son compte. Michelle lui tapait tout le temps dessus en lui disant qu'il n'avait aucune empathie. Ça s'est pas arrangé depuis l'accident, c'est le problème quand on abandonne tout espoir de rejoindre un jour le monde des vivants. Ce qu'il aime bien avec les toxicos qu'il fréquente un peu trop souvent, c'est qu'ils lui demandent pas d'être humain, ils le sont pas toujours non plus, et d'autres fois ils le sont trop, assez pour deux, assez pour tolérer ses manquements. Cette gamine, elle est bizarre, il est pas trop sûr de ce qu'il doit en penser, il est pas sûr qu'elle soit une gamine, mais ce qu'il pourrait sentir à dix kilomètres c'est qu'elle est terriblement humaine. Et vexée. Et provoc. Ça marche pas vraiment avec Ghost, c'est un peu comme essayer d'allumer un feu avec du bois mouillé et deux silex, mais ça chauffe juste assez pour qu'il s'en rende compte et ça l'amuse. En plus, même sans forcément se mettre à sa place (une vraie clocharde au milieu de bobos hypocrites), il arrive à voir ce qui l'agace chez ces gens hype. Il se permet même une expression dédaigneuse qui ressemble presque à un sourire. « Très hype, vous passez inaperçus. » Et c'est faux, c'est ça le pire. Il y a quelque chose qui distingue la véritable misère.

Un peu pris au dépourvu quand la gamine lui tend la main, comme si ça n'avait rien d'inhabituel de serrer des  mains dans les chiottes d'une soirée douteuse, il suit quand même le mouvement. « Ghost. » Il n'y pense même plus, quand il se présente. C'est plus une posture, c'est plus un jeu, il a déjà quasiment oublié qu'il s'appelle James. Quant à l'avertissement de Merle, Ghost s'en sentirait presque insulté. « Pourquoi j'te balancerais ? Pour que ça finisse à la poubelle ? » C'est le genre de soirée où les convives préfèrent se fourrer des trucs dans le nez que dans le gosier. En plus faudrait déjà qu'il se souvienne à quoi ressemble la nana. Elle a changé de style entre leur première rencontre et la soirée, il est pas sûr de pouvoir la remettre. « Cela dit, j'en connais pas mal dans le genre qu'ont vraiment pas de maison. Mais c'est le plus grand des luxes. » Ceux-là, ils angoissent pas en se demandant où ils vont passer la nuit, ils savent qu'ils trouveront quelqu'un pour les accueillir, ça rend leur vie un peu plus palpitante mais pas insoutenable, et ils pourraient se poser s'ils en avaient envie. « C'est pas qu'ils ont pas de chez eux, c'est qu'ils sont chez eux partout. Y en même qui sont pas spécialement riches, mais j'comprends pas comment ça marche, la réputation. » Parce que c'est quelque chose comme ça. (Réputation + sociabilité = beaucoup beaucoup d'amis dévoués ?) Enfin y a aussi les gros bourges qui peuvent vivre à l'hôtel toute l'année, mais ça c'est moins énigmatique. « D'ailleurs, j'ai pas vraiment de maison non plus, strictement parlant. » Mais il fait plutôt partie de la catégorie VIP des SDF, même s'il n'a ses entrées que chez sa sœur. « T'es majeure ? » Ça le toque comme ça. Il sait pas vraiment lui-même comment il en est arrivé à se poser la question, sûrement parce qu'un mineur devrait pas être à la rue, ou parce qu'il a repensé à la prison et qu'il se demande si Merle a l'âge d'y être envoyée (pour s'être incrustée à une soirée privée, pour avoir dévalisé un buffet, pour avoir menacé de le refaire saigner du nez...).
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyMer 7 Fév - 1:14

Il le fait rire, parce qu’il est maladroit, quelque part, parce qu’il fout les pieds dans le plat comme si c’était important, comme si Merle en avait quelque chose à foutre. Il le fait rire parce qu’il est foutrement normal, pas sirupeux comme les mecs qui leur apportent des couvertures quelque fois et pas gêné comme ceux qu’ont pas de thunes à filer, il ressemble pas aux mecs qui le paye pour les laisser le sauter, pas non plus à celui qui le filme, pas à ceux qui consomment. Il ressemble à rien de connu, ou à un mélange de plein de trucs connus, il sait pas trop, mais il aime bien, ça fait du bien un peu de changement, surtout en ce moment. Il pose des questions cons, par contre, et Merle lui adresse un regard assez vide pour lui faire comprendre qu’il risque très fort de devenir ennuyeux s’il continue. Bien sûr qu’il pourrait bouffer et écouter la musique, c’est ce qu’il faisait, tout à l’heure, avant que Machin décide de lui peloter le cul et d’être un gros lourd. Bien sûr qu’il peut faire ça, mais faut croire qu’on a décidé de pas trop lui laisser le choix ce jour-là parce qu’il a à peine eu le temps de profiter de la soirée avant que les mecs qui l’entourent se transforment en monstres. Peut-être que c’est lui qui fait cet effet-là. Peut-être qu’il corrompt, il sait pas trop, ça a pas l’air d’avoir de prise sur Valmont mais peut-être qu’il est trop vieux pour ça. Ça marche très bien sur les inconnus, en tout cas, et la pensée lui fait grincer des dents, une seconde, alors qu’il cueille Ghost du regard, le jauge, essaye de soupeser si ce mec va finir comme tous les autres.

« Je pourrais mais y a un type qui m’a fait chier. » Il roule des yeux. « Je pensais pas qu’il aimait les garçons mais faut croire que si. »

C’est un peu hypocrite de sa part parce qu’il sait que le type en question pense qu’il est une fille. C’est un peu hypocrite de sa part mais ça lui fait du bien de verbaliser, de prévenir, aussi, alors qu’il relève les yeux pour confronter Ghost, parce que Merle sait très bien que lui aussi a pensé qu’il était une fille, parce que peut-être qu’il va se rebiffer, le regarder de travers, prendre l’air écœuré. Il est prêt à attraper ses affaires et à partir, prêt à décamper, prêt à foutre le camp, les mains crispées, une seconde, alors qu’il tente de continuer la conversation comme si de rien n’était, parce que ce n’est pas lui qui devrait avoir peur, pas lui qui devrait s’inquiéter, parce qu’il y a un couteau dans sa poche si jamais le mec tenter de l’emmerder.

« Vous êtes les pires, honnêtement. » Vous, c’est tous les mecs sans piaule et sans inquiétude dont il parle, vous, c’est tous les gens comme lui et pas comme lui. « Enfin toi t’as l’air supportable. Mais moi je tuerais pour un endroit chaud où dormir. Et une douche, putain. »

Il demande même pas un matelas, en vrai, il a pas besoin de ça, son pull lui suffit, il a l’habitude de ça. Il aimerait avoir chaud, par contre, arrêter de frissonner, arrêter de faire ce qu’il peut pour pas crever. Il aimerait s’inquiéter un peu moins et vivre un peu plus mais il peut pas, pas maintenant, pas pour l’instant. Ça viendra peut-être un jour ou peut-être jamais mais c’est beau de rêver, de toute façon, de penser à un appartement lumineux, pas forcément grand mais chauffé, à un endroit qui serait sa maison, à un endroit où y aurait du bruit, du mouvement, mais pas d’inconnus, à un frigo rempli, à un chat, à quelqu’un qui l’aimerait. Ça viendra peut-être un jour mais pour l’instant son estomac gronde et il se venge en buvant l’ice tea que le type lui a tendu. Il guette un goût salé qui lui signalerait qu’il tente un truc, un peu alarmé par sa question alors que ses sourcils se froncent, une seconde :

« Pourquoi tu demandes ? Tu veux savoir si c’est légal de me sauter ? »

Y a pas de colère dans sa voix, peut-être de la lassitude, c’est pas le premier, pas le dernier, il ment, généralement, ment pas quand le mec a l’air d’être dans des trips affreux et que ça pourrait le convaincre. Y a pas de colère dans sa voix mais il replie un bras autour de lui-même, presque instinctivement, parce qu’il se sent en position de faiblesse, d’un coup.

« J’ai bientôt dix-huit ans. » Il fait rouler ça sur sa langue, déglutit. Bientôt, et au début il en avait seize, et ça a commencé à ce moment-là et il agrippe son pull entre ses doigts pour se réconforter. « Mes parents m’ont mis dehors. »

Il compte sur l’autre pour comprendre pourquoi. Il est sûr qu’il pigera. Il a pas l’air stupide, pas vraiment, il saura faire le calcul.
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyJeu 8 Fév - 19:08


« Je pourrais mais y a un type qui m’a fait chier. » Ghost fait un petit hochement de tête. Ah oui, les mecs relous ça manque pas à ce genre de soirées. C'est quand même grave que ça force les gens à battre en retraite dans les toilettes quitte à rater la musique. Il comprend que c'est la bouffe qui intéresse Merle plus que la musique, mais ce détail l'ennuie quand même. Et puis y a la seconde remarque de Merle, le ton presque trop léger pour ce regard appuyé qu'il lui lance. Parce que oui, c'est il, finalement. Enfin c'est ça où Ghost a pas compris. Mais il a compris, il en est sûr en voyant ce regard qui le met au défi de demander ce qu'il raconte, de rire, de chercher à le contredire. Ghost a beaucoup de défauts mais il est ni indiscret ni intolérant, si vraiment on peut dire que c'est une histoire de tolérance. En fait il est pas particulièrement curieux d'autrui et ça peut être un défaut mais ça signifie aussi qu'il a pas tellement d'idées préconçues sur les gens et pas d'avis sur leur identité quelle qu'elle soit. Merle a une voix féminine et lui a balancé un tampon alors il a automatiquement pensé que c'était une fille, mais il enregistre tout aussi rapidement la correction. C'est pas comme s'il avait jamais rencontré de trans, Merle est sans doute pas le seul à cette soirée. La vérité, c'est que ça lui passe un peu au-dessus. Ses parents aussi ont des défauts mais il a pas l'impression qu'ils aient adapté leurs attentes et leur éducation au sexe de leurs enfants et il peut sans doute les remercier pour ça, pour avoir jamais été complexé par la minceur de ses bras ou dérangé par le torse nu d'une femme mais pas celui d'un homme, parce qu'à la maison on laissait les portes ouvertes, on s'en foutait. (Faut croire que le seul truc qui passe pas chez les Sun, c'est le meurtre, ça paraît raisonnable.) Faudra qu'il demande à sa sœur si elle a vécu les choses différemment.

La façon dont Merle l'inclut dans ce « vous » le fait plus tiquer mais surtout parce qu'il pense d'abord que Merle parle des mecs relous en général et pas seulement des VIHP (very important homeless person, certainement à faire breveter). Mais après il comprend et il surtout il capte la vérité pure et dure dans la déclaration de Merle. « Moi je tuerais pour un endroit chaud où dormir. Et une douche, putain. » Tu m'étonnes, pense Ghost, tu pues. Y a encore une autre accusation, moins justifiée celle-là, tellement pas justifiée en fait qu'il lâche même un de ses rires grinçants. « Ça m'intéresse pas du tout de te sauter, si ça peut te rassurer. Et j'commence par ça et j'insiste parce que la suite là c'est que je te propose de venir prendre une douche chez moi et même de pioncer dans un vrai lit si tu veux. Ma sœur est pas là jusqu'à mardi prochain. » Et malgré son assurance qu'il a pas envie de le sauter ça doit ressembler à un traquenard, il s'en rend compte, parce qu'on n'invite pas un inconnu à dormir chez soi (ou en l'occurrence pas chez soi mais il y vit quasiment depuis qu'il est sorti de taule). « J'ai pas non plus envie de te tuer ou de me servir de toi de quelque façon ce soit, je sais pas ce que je peux dire pour pas avoir l'air d'un creep. » Il a l'air d'un creep, il s'appelle Ghost et il a trop de tatouages. « En fait j'peux me servir de toi comme cobaye pour écouter mes compo comme ça tu vois que c'est pas désintéressé. » C'est vachement suspect les actes désintéressés. Ghost est pas une âme charitable, il a juste tendance à vouloir aider les gens dans la merde quand il se trouve qu'ils sont dans la merde à proximité de sa personne et que ça lui coûte pas grand chose de le faire. C'est un des effets secondaires à la culpabilité qui lui ronge l'âme, il a découvert ça en thérapie.


Dernière édition par Ghost Sun le Dim 11 Fév - 0:10, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyVen 9 Fév - 18:08

C’est le genre de moment que Merle reconnaît, le genre d’instant qu’il sait lire, le genre de seconde où tout peut basculer. C’est la seconde juste avant qu’il embrasse sa première copine, la seconde juste avant qu’il corrige sa mère la première fois, la seconde juste avant qu’il attrape son sac, la seconde juste avant qu’il vende son corps, la seconde juste avant qu’il décide de venir à cette fête. C’est ce genre de moment-là, où le type en face de lui a l’air désabusé mais pas furieux, où le type en face lui semble insondable mais pas dangereux, où le type en face lui semble putain de maladroit. Peut-être que c’est un creep, Merle sait pas. Merle est pas sûr de vouloir savoir en fait, pas sûr de vouloir savoir si c’est juste un mec un peu déglingué ou un vrai dérangé, pas sûr de vouloir tenter le diable en passant trop de temps à ses côtés. Il a envie de dire oui. Il a envie et ça lui brûle les lèvres. Il a envie parce que le mec lui propose pas la charité, pas vraiment, ou d’une façon tellement tranquille qu’il se sent pas coupable de l’accepter, parce que le mec propose ça maintenant qu’il lui a demandé s’il voulait le sauter de la façon la plus crue du monde, parce que le mec aurait pas pu plus mal choisir son moment et que c’est peut-être ça le plus convainquant, parce que les mecs qui manipulent font pas ce genre de trucs, parce que les connards patentés sont plus malins que ça, plus fins, plus fourbes. Il hésite, les yeux rivés sur lui et les pupilles trop larges. Il hésite, traque la fausse note, la dissension, l’indice qui le placerait en menteur, en infidèle, en connard. Il trouve rien. C’est pas très étonnant. Il trouve rien et il est déstabilisé, sorti de l’eau subitement alors qu’il pensait que la main tendue servirait à le noyer, humide, trempé et jurant qu’on l’y reprendrait plus. Bien sûr qu’on l’y reprend encore. C’est comme ça à chaque fois.

« Faut que je prévienne Valmont et Victoire, avant. » Il bat des cils comme un animal aveuglé, comme s’il ne l’avait jamais vu avant cela, et sa voix est trop basse, subitement, comme s’il craignait que parler trop fort risquait de le pousser à reculer, reprendre sa proposition, remballer sa gentillesse ou sa pitié ou peu importe ce qui le poussait. « T’as quand même l’air d’un creep, au fait. » Il se reprend, se racle la gorge, t’as quand même l’air d’un mec chelou, by the way, parce qu’il sait pas dire merci, parce qu’on a ôté ce mot de son vocabulaire avec le soin d’un chirurgien, parce qu’il a dit merci père, merci mère, merci dieu et que ça n’a jamais rien apporté, que ça n’a jamais marché, que la cruauté n’a pas foutu le camp, que tout a été pire, ensuite. Merci, merci, merci, et personne qui le mérite, merci, merci, merci, et c’est pas ce qu’il a envie de dire. T’as quand même l’air d’un creep, il balance, et c’est presque un compliment quelque part, parce que c’est pour ça qu’il dit oui, pour ça qu’il accepte, pour ça qu’il prend pas la fuite. « Si t’avais pas eu l’air d’un creep j’aurais dit non. Les plus cruels ont toujours l’air normal. »

Comme Clarke et son regard trop paisible et sa voix trop douce, comme Clarke et ses costumes et ses chaussures trop propres, comme Clarke qui représente toute la société gangrenée avec son espèce d’allure de type beaucoup trop bien. Comme Clarke, qui a l’air trop normal, comme Clarke qui le filme depuis qu’il a seize ans, Clarke qui le monnaye, Clarke qui lui fait faire rentrer de l’argent, qui revend les vidéos, qui l’empêche de couper ses cheveux, qui lui permet de survivre et Merle déteste d’avoir besoin de lui, déteste être trop enfoncé là-dedans pour s’en sortir à présent, déteste être aussi perdu, aussi paumé, aussi absent. Il se redresse, l’air encore un peu hébété, écarte d’un geste un peu fébrile les mèches qui retombent devant ses cheveux à présent que son chignon fout le camp. Il a l’impression que son armure a cramé d’un coup, que tout s’est envolé, d’avoir été poussé si loin de sa zone de confort qu’il ne sait plus quoi faire de son corps. C’est peut-être le cas, quelque part, parce qu’il a été pris par surprise, parce que le mec est direct, parce qu’il a l’air un peu dingue, parce qu’il a pas bataillé pour se sortir de son accusation comme un poisson hors de l’eau, parce que tout est un peu curieux et étrange, maintenant, et qu’il a dit oui, à demi-mots, parce que l’idée de prendre une douche sans être filmé lui tord l’intérieur du bide, parce qu’il a envie de crever plutôt que de laisser parler sa dignité.

« Tes pires compos, j’espère, alors, faut bien que je paye d’une façon ou d’une autre. » Il marmonne avant de lui sourire, jette un œil vers la porte. « Je vais essayer de trouver mes potes, tu veux venir ou tu restes là ? »

Il suppose qu’il va rester là : après tout, c’est plus facile pour prendre la fuite.
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyDim 11 Fév - 1:38

Y a l'hésitation notable dans ses yeux, dans le changement à peine perceptible de sa posture, et puis sa voix presque trop basse sous les notes qui parviennent jusqu'à eux. Ghost est presque certain d'avoir bien entendu pourtant, parce qu'il aurait pas naturellement supposé que les potes de Merle s'appellent Valmont et Victoire. Du coup c'est presque étonnant que Merle s'appelle pas... Valjean ou un truc comme ça. Il savait pas que les clodos étaient branchés français. C'est peut-être des clodos francophone, remarque. Ghost lui répond par un petit hochement de tête, ça lui paraît logique qu'il prévienne ses potes. Ils vont peut-être même chercher à s'assurer que Ghost ne lui veut pas de mal mais bon, on peut pas prouver l'inexistence de quelque chose (en l'occurrence ses mauvaises intentions). Il se demande s'il est censé proposer aux deux autres aussi de venir squatter chez lui, si ça aussi ce serait la chose logique à faire. Sa sœur le tuerait parce qu'elle penserait qu'il est déjà risqué d'ouvrir la porte à l'un d'entre eux, alors trois, pour elle ce serait chercher les emmerdes. Merle pourrait très bien se casser au milieu de la nuit en ayant volé des objets de valeur, il est peut-être assez désespéré pour ça. Le gamin a pas de toit, pas de fric et pas de parents mais il manque sûrement pas de problèmes, et même s'il a l'air réglo il y a des situations qui font baisser la barre du moralement justifiable. C'est même possible qu'il soit pas réglo du tout, Ghost est pas spécialement un bon juge de caractère, mais de son point de vue ils prennent tous les deux un risque alors ils s'annulent en quelque sorte. Parce que oui, il a l'air d'un creep. « Je sais. » Pas d'humour sur son visage, pas de sourire d'excuse ni de soupire las. C'est un fait, il a pas l'air commode, c'est un fait, il sait. Mais la suite de ce que lui dit Merle pourrait presque le faire sourire, juste avant qu'il réalise que non, finalement, ça lui fait plutôt l'effet d'un coup dans l'estomac. Y a trop de vécu dans ces quelques mots. Ils prennent pas le même risque, en fait, vraiment pas. C'est Merle qui prend le plus gros risque en acceptant l'hospitalité de quelqu'un dont il ne sait rien, en sachant que ça pourrait se retourner contre lui parce que ça lui est déjà arrivé. Mais il est assez désespéré pour ça.

Ça lui fait bizarre à Ghost. Ça lui fait penser à Crow. Il passe une main dans son cou, sur la tatouage de la corneille. Merle lui péterait sûrement les dents s'il lisait dans ses pensées, s'il savait qu'il avait osé comparer sa vie à celle d'un piaf caractériel, mais Crow a plus d'importance pour Ghost que n'importe qui à cette soirée et, soudain, en regardant Merle, il est étreint par ce même sentiment de responsabilité que quand il s'occupe de son oiseau. L'impression que Merle est prêt à lui confier un fragment de sa vie, quelques heures de son temps et sa sécurité pour une nuit, et ce fragment Ghost doit le traiter avec le même respect et le même soin que s'il avait placé son cœur palpitant entre ses mains. À ce moment-là, la dernière chose que veut Ghost c'est le lui faire regretter. Si Merle s'avère être un petit voyou, ça lui fera les pieds, sa sœur gueulera et il s'en remettra. Il a pas envie d'imaginer les mauvais traitements dont Merle a déjà eu à se remettre. Quand il lui parle de le payer d'une façon ou d'une autre, y a une sale image qui lui traverse l'esprit et une grimace qui vient déformer ses traits. Est-ce qu'il y a des gens qui lui demandent de payer le gîte comme ça ? C'est moche putain.

« J'ai pas assez de recul pour savoir quelles sont les pires, c'est pour ça que j'ai besoin de toi, tu vas devoir tout te taper. » Y en a six, en fait, pas cinquante comme il a l'air de le sous-entendre, mais si ça peut rassurer Merle d'avoir à bosser en échange de la douche et du pieu, Ghost veut bien en rajouter. « Je viens. Si c'est pour qu'on se perde aussi on n'a pas fini. Ils étaient au sous-sol y a cinq minutes. » Avant de le suivre, il se retire le morceau de papier du nez pour voir s'il pisse toujours le sang. Ouais, c'est pas fini. Il fout ça à la poubelle et s'en colle un nouveau dans la narine. Tant pis pour son image. Enfin de toute façon les gens penseront sans doute qu'il a juste pris trop de coke. Il sort derrière Merle et, les yeux rivés sur sa nuque et les petits cheveux échappés du chignon, la question franchit ses lèvres : « Hey. Merle, c'est pas le nom d'un oiseau ? » Il entend Blackbird résonner dans sa tête, la chanson des Beatles, la seule de leurs chansons qu'il écoute souvent, et même en boucle les jours où il reste dans le noir, celle qu'il chantonne à Crow même si Crow est une corneille, pas un merle. Et machinalement sa main revient se poser sur son tatouage.
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MessageSujet: Re: once I was lost to the point of disgust (flashback - merle)   once I was lost to the point of disgust (flashback - merle) EmptyVen 2 Mar - 2:32

Il le surprend et ça lui fait un nœud dans l’estomac. Il le surprend et il bat des cils, une seconde, trace du regard le visage de Ghost, traque la moindre trace d’hésitation, la moindre trace de dégoût, de quelque chose de plus, de quelque chose qui l’avertirait, de quelque chose qui lui permettrait de fuir avant de se faire dévorer. Il trouve rien. Evidemment, il trouve rien, parce que ce mec est a pas besoin de plus pour être chelou, parce qu’il a un bout de papier ensanglanté dans le pif, parce qu’il boit des softs à une soirée, parce qu’il propose à des connards de venir crécher sur lui et Merle sait pas du tout s’il réalise qu’il pourrait tout foutre à sac et puis jamais être retrouvé, s’il réalise qu’il lui fait une fleur que même l’écoute des pires daubes de son répertoire musicale pourra pas payer. Sans doute pas, il a pas l’air d’avoir besoin de se soucier de savoir quand sera sa prochaine douche ou son prochain repas, pas besoin de savoir quel danger il faudra éviter la prochaine fois. Sans doute pas, et ça lui va, à Merle, et il s’en fout, Merle, alors il hoche de la tête quand Ghost lui dit qu’il l’accompagne, un mouvement de la tête sec et déterminé, quelque chose comme de une impatience étrange dans les veines. Il espérait trouver un plan cul, peut-être, dans la soirée, quelqu’un qui ressemble pas à un putain d’hipster déguisé en sans abri. Il a pas trouvé, mais quelque part c’est encore mieux. Pas besoin de coucher pour bouffer. Pas besoin de coucher pour dormir dans un lit. Pas besoin de coucher pour profiter de la douche. C’est ridicule mais ça lui fait plaisir et peut-être que c’est le plus déprimant, peut-être que c’est le plus douloureux, peut-être que c’est le plus terrible. Il attend plus rien des gens, Merle, mais y a ce type qui propose un toit pour une nuit sans contrepartie glauque et il fonce dedans.

Peut-être que y a encore l’espoir qui danse la gigue dans sa peau.
Peut-être que c’est ça, au fond.

Peut-être que c’est le visage du mec ou ses mains ou la façon dont ses cheveux retombent sur son front, aussi, mais ça, il l’admettra pas. Il est pas là pour ça. Il est pas là pour ça, hein ? Même si ce serait agréable, de choisir, pour une fois, même si le mec est bizarre, même si le mec est tout à fait son type. Il est pas là pour ça. Il veut pas être là pour ça. Il veut pas que ce soit bizarre. Il veut juste une nuit loin de la rue. Une nuit loin du reste. Une nuit loin de tout. Il attrape le poignet de Ghost, lorsque la foule se resserre, pour ne pas le perdre, pour ne pas passer sa vie à le chercher, parce qu’il refuse de le laisser filer, parce qu’il lui a déjà laisser un échappatoire, parce qu’il ne lui en accordera plus, parce qu’il lui a promis monts et merveilles et qu’il compte bien lui faire tenir parole.

« Je sais pas. » Il lui répond, un peu à retardement, alors qu’il scanne la foule des yeux. « Pour mon nom, j’veux dire. Je l’ai piqué à un mec qui a gagné le prix Pullitruc, là. »

C’est sa meilleure amie de l’époque lui a parlé du prix, il sait même pas ce que c’est, lui, même aujourd’hui, mais il garde la vision frappante du bouquin sur la table basse du salon. Merle Curti, il lui semble, une connerie comme ça, il sait plus bien, mais il a vu le bouquin et il a su que c’était à lui, mais il a vu le bouquin et il a refusé de laisser s’échapper l’occasion. Il est pas historien, lui, il connaît rien à l’histoire, même, mais sur le moment il s’est dit que ça pouvait pas lui faire de mal de partager son nom avec quelqu’un qu’a gagné un prix au nom imprononçable. C’est pas une histoire romantique, pas une histoire jolie, pas une histoire où il a choisi un oiseau pour pouvoir se casser, un semblant de liberté sur la carte d’identité. C’est rien de tout ça mais il veut pas mentir et il se hisse au niveau de Victoire et de Valmont, bouscule quelqu’un pour entre dans leur orbite, entraîner Ghost à sa suite.

« Ghost. » Il le pointe du doigt, pour l’introduire aux deux autres. « Victoire, Valmont, dans l’ordre que tu veux, choisis soigneusement. » Ça a pas beaucoup d’importance de toute façon, ils ne se quittent jamais, indissociables et intermêlés. « Il me ramène chez lui, si je donne pas de signe de vie, envoyez-lui les flics. »

Y a une trace d’humour dans sa voix, parce qu’il sait que même s’il rentre pas les flics feront rien, parce qu’il fait parti de la lie de la société, parce que y aura personne de suffisamment propre pour le pleurer. Y a une trace d’humour dans sa voix et il sourit lorsqu’ils hochent de la tête, pointe du menton la sortie.

« On y va, ou tu veux en profiter pour leur demander ma main ? »

La foule commence à le démanger.
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