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| it's a sad sad situation (tosher) | |
| Auteur | Message |
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donne coeur, pas cher, déjà utilisé ▹ posts envoyés : 1889 ▹ points : 16 ▹ pseudo : Unserious/Agnès ▹ crédits : WHI, tumblr, bazzart / avatar : balaclava / AES : moi / gif : camille ▹ avatar : Ben Barnes ▹ signe particulier : un accent de liverpool, un tatouage "bad" au creux du coude, et une chevalière à l'index gauche. oh, et totalement casher. en théorie.
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| Sujet: it's a sad sad situation (tosher) Ven 8 Déc - 17:19 | |
| « Comment vous avez fait votre compte ? » Voix qui roule et accent du sud un peu trop marqué, l’infirmière lève un regard interrogateur vers lui, le stylo pointé sur sa fiche pour être sûre de ne louper aucun détail de sa truculente histoire. Pour un peu il aurait l’impression de subir un interrogatoire, presque au point de se croire au poste avec ses collègues. Sauf qu’il n’est pas l’accusé, dans l’histoire, il est celui qui a pris une balle et qui est en train de maintenir ses doigts contre sa chair à vif pour éviter de trop saigner. Les questions, c’est pas forcément nécessaire, vraiment. « On m’a tiré dessus. » Pas suffisamment explicite, visiblement, y a toujours la mine du stylo qui lévite au-dessus de la feuille de papier. Il claudique jusqu’au fauteuil, s’allonge en soupirant. « J’suis flic, je poursuivais l’un des types armés qui fout l’bordel dans toute la ville, c’est lui qui m’a fait ça. Ça suffit ? » Ouais, ça suffit sûrement, pour le moment. Quelque part, c’est normal qu’ils gardent une trace de la raison pour laquelle les blessés leur rendent visite, histoire de voir à la fin de la soirée combien de personnes ont vraiment été frappées par la tragédie. A vue de pif, quelques dizaines, y a qu’à compter rapidement les brancards occupés dans le couloir et les salles d’examen déjà monopolisées, vu qu’il a dû attendre plus d’un quart d’heure avant qu’on ne daigne l’emmener à l’écart pour s’occuper de sa blessure. Un quart d’heure à lire les SMS de Toad, à les ignorer, à ne plus pouvoir le faire quand les je t’aime avaient défilé sur son écran, les premiers qu’il lui adresse et c’est pour se faire pardonner ses putain de mensonges. « Pantalon, s’il vous plait. » Il déboutonne nonchalamment sa braguette, descend juste un peu le tissu du jean, murmure de douleur au fond de la gorge lorsqu’il soulève le bassin pour laisser voir le carnage, les dessous Calvin Klein explosés par l’impact. Marié, marié, marié, ça revient en boucle dans sa tête sans qu’il ne puisse penser à autre chose, marié, ça lui file des hauts-le-cœur, ça lui colle la migraine, marié, et eux ils sont quoi, il a même pas été foutu de lui répondre. Et pourquoi il pense à ça, merde, pourquoi il pense à ça alors qu’y a une nana qui est en train de lui reluquer l’entrejambe, écartant du bout d’une pince les lambeaux de tissu accrochés à la plaie. Dents qui se serrent, gémissement. Ça faisait moins mal quand c’était lui qui colmatait le trou avec ses phalanges, à croire que l’adrénaline retombe et que la douleur cogne enfin. « Le caleçon aussi, s’il vous plait. » Hmpf, ouais, t’façon y a pas le choix, hein, faudra juste pas penser à Toad pendant qu’il sera à poil sous les yeux d’une inconnue, même si elle appartient au corps médical. Sauf que penser à Toad, là tout de suite, ça lui donnerait plutôt envie de chialer. Tout ce qu’on n’est pas, tout ce qu’on ne sera jamais. Et l’pasteur qui l’attend à quelques mètres de là, qu’il va falloir affronter d’ici un petit moment. L’histoire de quelques minutes. « Je suis désolée, je vous fais mal ? » Elle vient de planter une seringue dans sa peau, anesthésie la partie endolorie, et il met un instant à s’apercevoir qu’elle le regarde d’un air inquiet. Il pleure putain, ouais, il pleure sans même s’en rendre compte, c’est le bout de ses doigts qui en fait la douloureuse constatation lorsqu’il cueille ses propres larmes, secoue la tête pour tenter de dissimuler l’évidence. « Non, ça va. » Ça va pas, imbécile, ça pourra jamais aller. Si ça se trouve, en t’attendant, il est allé taper la discut’ avec son mari, il t’a dit qu’il était à l’hôpital lui aussi. Parce qu’il n’a pas parlé d’ex, non, il n’a pas employé le passé, c’est ça qui le terrifie, qui l’empêche d’avoir des pensées vraiment cohérentes. Ça, et le fait que ça fasse quand même un mal de chien, même s’il veut jouer les durs devant la belle infirmière. Il a rien à prouver pourtant, rien à attendre, la personne qu’il aime est à quelque pas de là et il est sur le point de tout foutre en l’air, encore. « Et voilà », ça fait combien de temps qu’il cogite à tout ça, combien de temps qu’elle trifouille sous sa peau ? Il a pas calculé, il sait pas, il voit juste le petit bout de fer ensanglanté au bout de la pince, entend à peine le tintement métallique qu’il émet lorsqu’elle le dépose sur le guéridon à côté d’elle. Y a ses pensées qui sont ailleurs, à mille lieues, la peur de crever qui a quitté son bide pour être remplacée par celle, terrible, de causer un cyclone à la seconde même où ses yeux croiseront ceux du pasteur. Il aimerait lui dire de ne pas aller trop vite, de le recoudre le plus lentement possible, de le laisser profiter d’une seconde de répit avant la tempête, mais ça s’fait pas, y a trop de gens qui attendent qu’on s’occupe d’eux. Elle lui file juste une béquille, histoire qu’il s’effondre pas dans le hall, et elle lui demande d’aller attendre un peu, y a d’autres examens à passer il parait. Et avant ça, y a Toad, leurs regards qui se croisent, et l’envie de se barrer en courant le plus vite possible. Celle-là, et aussi celle de le serrer contre lui et de ne plus le laisser partir, jamais, de ne plus lui permettre se raccrocher à des vieilles branches, à un passé qu’il semblait avoir laissé de côté mais qui le rattrape pourtant. Il s’approche trop vite de lui, trop vite et c’est la collision parce que lui aussi le veut, du plus profond de son être, chaque minuscule fibre, chaque atome, lui aussi en a besoin comme pas permis, une drogue, une addiction, un pacte avec le diable. Les ongles qui s’accrochent à ses épaules, ses yeux qui tâchent son blouson d’une myriade de larmes, une façon comme une autre de se venger. Et ses lèvres qui se collent à l’oreille de Toad pour murmurer, une fois qu’il n’y a plus aucun sanglot pour retenir ses mots : « J’suis quoi pour toi ? » Le visage qui recule, les mains qui le lâchent, il se retient de toute ses forces pour ne pas ciller, pour rester foutrement impassible, les doigts de sa main gauche qui se raccrochent à la béquille pour qu’il ne se casse pas la gueule, pas une nouvelle fois, pas maintenant. « Je suis quoi pour toi ? » Il répète en détachant chaque syllabe, comme si Toad n’avait pas bien entendu la première fois. Dis que tu veux être avec moi, putain. Dis que tu ne peux pas imaginer un futur sans qu’on soit ensemble, dis que j’ai pas eu tort de te faire confiance, dis que t’es pas mon nouveau Caïn, qu’tu vas pas me faire ce qu’il m’a fait, ce qu’il ne m’a pas fait. Demande-moi de rester, dis que c’était rien, ton mari, c’était rien et ça sera plus jamais rien. Mens-moi s’il le faut, parce que je sais que quelqu’un qu’on épouse ne devient jamais rien, j’suis peut-être même le mieux placé pour le savoir. Mais dis-moi que tu me choisis. Choisis. Moi. |
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: it's a sad sad situation (tosher) Jeu 14 Déc - 1:18 | |
| J’suis quoi ?, ça résonne dans mon crâne, c’est tout c’qui reste dans le vide intersidéral qui vient d’m’avaler, j’suis quoi ?, faudra qu’j’aie une réponse, quand j’arriverai là-bas. Si j’arrive entier en tout cas. J’ai failli me prendre trois bagnoles en rentrant chez moi, peut-être bien que j’péterai le score dans l’sens inverse, que j’ferai l’accident tant attendu, j’ferai mon entrée sur une civière, ça sera beau, dramatique, une dernière scène à l’article de la mort, sa main dans la mienne puis plus rien. Après tout faut pas conduire dans cet état, quand on a envie de gerber et qu’on a les yeux qui chialent tout seul, personne a encore inventé l’essuie-glace oculaire, ce serait bien pratique. Faut pas conduire comme ça, parce qu’on y voit que dalle et qu’on a trop mal pour écouter c’qui s’passe autour, c’est pire que l’alcool et la drogue combinés, c’est l’combo rupture et envie de crever pour pas se taper la crise existentielle de plein fouet. J’suis quoi ?, c’est qu’trois mots, une question à la con, pourtant ça f’rait moins mal de s’faire découper à la tronçonneuse, pourtant j’me dis qu’ça aurait été cool, si Seth avait appuyé sur la détente, tantôt. Seth, merde, et si j’le recroise à l’hosto, coucou, j’suis revenu pour mon je-sais-pas-quoi que je baise et dont je suis possiblement légèrement foutrement amoureux. J’ai l’cœur en lambeaux, tiraillé entre trop de trucs, Seth, Asher, Ezra, j’ai même pas vérifié qu’il allait bien, putain, j’aurais dû rentrer dans ma putain de baraque et me foutre de tout le reste à part de ça. J’fais que d’la merde, toujours, j’ai jamais su faire que ça, tout gâcher, j’sais pas ce que Seth attendait d’moi, quand on s’est marié, j’sais encore moins ce qu’Asher attend d’moi, là maintenant, j’sais juste qu’il fallait pas qu’je couche avec lui. Faut jamais coucher avec son meilleur pote, c’est la base de chez base, même les films romantiques à deux balles le disent. J’sais qu’j’aurais dû lui causer de Seth, et j’aurais dû causer d’Asher à Seth, aussi, ouais, sûrement, sauf que j’y pensais pas, à Asher, j’y pensais plus, y’avait Seth en face de moi, Seth-Seth-Seth, Seth qui a toujours tout éclipsé, Seth qui a plaqué ses lèvres sur les miennes et qu’a foutu sa langue dans ma bouche et j’l’ai laissé faire sans rechigner, putain de merde, y’a rien pour plaider en ma faveur, j’ai plus qu’à plaider coupable et accepter la peine de mort. Se garer dans le parking de l’hosto et se traîner jusqu’à la salle d’attente, c’est comme monter sur l’échafaud. J’suis quoi ? J’sais toujours pas, Asher. Un trajet en bagnole à penser qu’à c’que j’pourrais te répondre et j’sais toujours pas. J’ai toujours été le pire aux exams oraux, la gueule enfarinée du mec qu’a rien suivi en cours de l’année. Ça m’fait un peu le même effet. J’veux juste te voir. Être sûr qu’tu vas bien, qu’t’es pas dans un état pire que c’que t’a prétendu. Y’a trop d’gens, dans la salle d’attente, trop de blessées, la ville à feu et à sang et j’me dis qu’j’ai pas l’droit de souffrir autant, en regardant les pauvres types qui se sont pris des balles et des coups de poing américains, le sang qui pisse de partout et les grimaces qui se collent sur ma tronche rien qu’à voir les horreurs des urgences. Y’a une infirmière qui me d’mande c’que j’ai et j’réalise que j’ai toujours le sang de Seth sur mon T-shirt. Putain. J’dis qu’j’ai rien, que j’attends un ami. Ça sonne toujours aussi faux qu’le jour où Asher à balancer ça à ses collègues dans un nightclub. J’suis quoi ? J’pourrais t’énumérer tout c’que t’es pas. T’es pas un amant, t’es pas un secret, t’es pas un second choix, t’es pas un désastre, t’es pas qu’un ami. T’es pas mon mari. Désolé pour ça. Je passe une main dans mon cou, pour détendre les nerfs qui se nouent et se renouent, les douleurs dans tout le corps alors que j’ai rien, c’est ça, d’avoir peur, l’angoisse de perdre quelqu’un, quelqu’un qu’on aime, même si on sait pas y mettre les mots. J’vais le décevoir, parce que j’sais toujours pas quoi dire, j’vais le décevoir, parce que j’ai jamais su quoi dire. Y’a mon index qui glisse sur une aspérité, la peau marquée, rangée de dents plantée dans la chair. Seth t’a mordu, tu t’en souviens que maintenant, ducon ? Fuck. Fuck-fuck-fuck-fuck-fuck et FUCK. Faut pas qu’il voie, faut pas putain. Et Asher qui apparaît, fend la foule tel le Messie, j’me lève, m’attends à recevoir un uppercut, un coup de béquille en pleine gueule, mais y’a juste lui contre moi, brutalement, la chaleur familière et les mains qui viennent s’agripper à ses vêtements. J’suis quoi pour toi ?, et c’est réel, cette fois, c’est l’ogive nucléaire qu’on se prend en pleine face, j’veux pas le lâcher, mais il se recule, et on s’en fout, de c’que j’veux, j’ai plus l’droit de vouloir quoi qu’ce soit, les doigts qui tentent de s’accrocher dans le vide, retombent le long d’mon corps sans avoir trouvé de prise. J’suis quoi pour toi ? « Je... t’aime ? » Mauvaise réponse, mauvais timing, mauvaise intonation, c'est le je t'aime qu'on sert quand on a fauté, quand on veut s'faire pardonner, qui dit m'en veux pas steplaît plus que je t'aime, la question qu’a pas lieu d’être, comme si j’voulais pas me tromper, mais c’est trop tard, j’me suis planté sur toute la ligne, pas moyen de réparer. J’suis quoi pour toi ?, et y’a rien, juste rien, le néant, les p’tits virevoltants dans tous les coins, la conscience qui se suicide sur la seule sensation qui reste : le manque. Trop tard, game over sur toute ma vie, j’l’ai déjà perdu, t’es déjà parti. |
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| Sujet: Re: it's a sad sad situation (tosher) Ven 15 Déc - 18:35 | |
| C’est pas toi, c’est moi. Ça s’est passé qu’une fois. Je t’aime. Y en a d’autres des formules soupe en boîte comme ça, à réchauffer au gré des envies ? Y en a d’autres, des phrases bidons qui servent à tout justifier, complètement artificielles, jamais vraiment pensées pour être sincères mais plutôt pour forcer la sincérité, faire croire à une once de vraie culpabilité là où il n’y en a pas ? Y a les doigts d’Asher qui se serrent, se desserrent, l’envie de les faire claquer contre la joue de Toad lorsqu’il entend sa seule et unique réponse, il déteste cette manie d’éluder, de mépriser, de faire comme s’il n’avait pas entendu sa question. Je suis quoi, c’est facile pourtant, ami, amant, amour, rien. C’est facile, ça demande même pas de faire une phrase complète, juste deux-trois mots histoire qu’il y ait une cohérence qui s’articule, que les syllabes ne sonnent pas dans le vide. « Tu t’fous d’moi », c’est murmuré, même pas une question, il en a désormais la certitude. Il se fout de lui et ça ne pourrait pas lui faire plus mal. Il savait pourtant, après Caïn, après Sam, il savait que se taper son meilleur pote c’était mauvais, ça pouvait mener à rien de bon, il le savait aussi bien que deux et deux font quatre et que le ciel et bleu. Il savait que c’était pathogène à ce niveau-là, que ça pouvait qu’engendrer de la merde, qu’il suffisait d’une cachotterie comme ça – et encore c’est un putain d’euphémisme – pour enrayer toute la machine, pour bousiller la relation à jamais. Amitié mon cul, ça tient pas, ça peut pas tenir, pas quand y a l’un des deux qui veut davantage, et il aimerait que ça ne soit pas toujours lui, qu’il ne soit pas ce gars-là, celui qui ne garde pas les pieds sur terre, celui qui s’emballe, celui qui aime trop, trop fort, trop vite. Tu t’fous d’moi, ça s’entend à peine mais y a des regards qui se sont retournés sur eux, des patients pas suffisamment mourants pour s’occuper juste de leurs affaires, une foule d’yeux indiscrets qui devient douloureusement oppressante, c’est comme s’ils attendaient quelque chose, courbette avant les applaudissements. Sauf qu’y a rien. Y a la baffe à deux doigts de s’échouer sur la mâchoire de Toad mais qui reste au creux de sa paume, les doigts qui continuent de se délasser, de se refermer, le bras le long du corps, comme pour l’intimer de se contrôler, de ne pas laisser l’impulsion prendre le dessus. Il n’a plus assez de force pour ça, plus assez pour être vraiment en colère, plus assez pour être vraiment violent. Y a qu’avec les piliers de bar qu’il arrive à se mettre autant en colère, quand ces derniers le traitent de pédé, quand ils croient pouvoir jouer des poings avec un mec qui a une trop belle gueule, quand il s’agit de défoncer les leurs déjà bien esquintées par la vérole et les verres de vodka. « T’as pas le droit, Shashawnee. » Shashawnee, pas Toad, y a plus de Toad, plus depuis l’appel, depuis les fausses excuses, depuis le je t’aime qu’il ne pense pas, pas vraiment, qu’il ne peut pas penser alors qu’y a son mari à quelques mètres d’eux, dans l’une des chambres de ce foutu hôpital. Il n’a pas le droit de lui faire ça, de lui dire ce qu’il avait envie d’entendre depuis des semaines alors qu’ils ne sont plus rien, qu’ils ne seront jamais assez. Il s’est pris une balle ce soir, mais y a rien qui fasse plus mal que ce mensonge, que ce faux aveu craché pour se faire pardonner, dans ce seul et unique but. Pas pour lui montrer qu’il tient vraiment à lui, pas pour le garder. Juste pour qu’il lui passe de la pommade sur le dos, qu’il rassure son égo, qu’il lui montre que c’est bien, que c’est tout ce qu’il attendait. Il n’a pas le droit, non. Le rire qui se fraye un chemin hors de ses lèvres est glaçant, imperceptible, froid, à peine un murmure, on dirait qu’il expire son dernier souffle et qu’il le fait en saisissant toute l’ironie du moment, son meilleur ami, son amant, son amour qui l’achève à coups de pieux dans le cœur. Y a même pas de larmes dans ses yeux quand il le regarde enfin, ou des larmes invisibles qui perlent seulement aux coins de ses paupières, traitresses subtiles qui se font caméléons puisque la situation l’exige. « Bon, j’vais te simplifier la tâche, du coup. » Non, pas simplifier, pas vraiment, j’vais nous achever parce que c’est tout ce que tu cherches, c’est tout ce que tu mérites, même si ça doit me foutre en l’air dans le processus. « C’est fini. » Non. Non, il veut pas. Il veut pas mais les mots sortent tous seuls, il peut pas les retenir, s’empêcher de les prononcer. C’est un flot, un raz-de-marée, ça fait naître une brûlure dans sa trachée, comme s’ils laissaient sur leur passage une trainée de lave en fusion. « Et comme t’as jamais su dire ce qu’on était, c’est encore plus simple, parce que ça veut dire qu’on n’était rien, j’imagine. On n’est pas ensemble. J’suis pas ton copain. J’viens pas de te larguer. Y a jamais rien eu, et y aura plus rien. »
On était ensemble. J’étais ton copain. J’viens de te larguer. J’étais fou de toi, et je le serai toujours.
Tous les regards braqués sur eux, c’est comme s’ils étaient sur une scène et qu’on avait foutu le projecteur en plein sur leurs faces, pour que tous les spectateurs puissent bien admirer la performance, profiter de chaque instant, chaque larme versée et chaque insulte soufflée avec une amertume qui ne leur est pas coutumière. Il est sublime et stoïque dans la douleur, Asher, à pas montrer ce qu’il ressent alors que tout se délite à l’intérieur, alors qu’il tombe en lambeaux aux pieds de Toad, qu’il voudrait juste disparaître de la surface de la terre maintenant qu’il a dit ça, maintenant qu’il a prononcé des mots auxquels il ne croit pas, bien sûr qu’ils étaient quelque chose, bien sûr qu’il était amoureux de lui, bien sûr qu’il l’est toujours, ça change rien qu’il soit marié. Il pourrait avoir trois gosses et un labrador qu’il lui boufferait encore dans la main, qu’il serait encore complètement dévoué à lui, incapable de passer deux minutes sans penser à sa gueule de con et à toute cette merde qu’il peut bien ressentir, les papillons dans le bide, la boule au fond de la gorge. Il voudrait s’échapper, aller le plus loin possible mais ses jambes le portent à peine, même la béquille qui l’aide à ne pas s’casser à gueule, elles le soutiennent tout juste suffisamment pour qu’il s’éloigne vers la sortie en claudiquant, profitant d’une bouffée d’air frais avant de coller une clope au coin de ses lèvres et de l’allumer. Et là, silencieusement, il pleure, pas certain de pouvoir mieux endurer la peine de cœur que la blessure par balle. Ça, c’est un truc qui ne pourra pas guérir, jamais. |
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: it's a sad sad situation (tosher) Dim 17 Déc - 19:22 | |
| C’est marrant cette manie qu’ont les gens de m’appeler Shashawnee quand je fais de la merde, à croire que y’a eu une circulaire sur le sujet, et que j’suis le seul à pas l’avoir lue. Ça a toujours été la lubie de Skeeter, pour m’engueuler sur répondeur, celle de Seth, quand j’lui avais avoué la chose, par moquerie d’abord, par amour ensuite, Shashawnee c’était comme me traiter affectueusement de connard, puis par dépit, rage, colère, prénom débile qui claque contre les joues plus fort qu’une vraie gifle. C’est curieux, qu’Asher ait si bien compris ça, hasard étrange de la vie toujours bien décidée à me niquer le cœur, ça heurte plus que Toad, ça blesse et ça tourne bien le couteau dans la plaie pour agrandir le trou, parce que Toad, c’était familier, Toad, c’était le prénom qu’il utilisait sous les draps et ailleurs, Shashawnee, c’est l’étranger, celui qu’il ne connaît plus, qu’il n’a jamais connu, la face sombre cachée sous les sourires et les allusions salaces, c’est la distance entre nous qui me frappe de plein fouet, infranchissable malgré les quelques centimètres à peine qui nous séparent. Shashawnee, c’est presque une insulte, un affront, le secret confié par excès de confiance, excès d’amour peut-être, balancé en pâture à une dizaine d’anonymes des urgences qui ont les oreilles qui traînent et les yeux qui font semblant de ne pas nous voir tout en nous regardant trop. Pourtant la violence prend pas le dessus, pourtant je lâche même pas une insulte entre mes dents pour leur intimer de s’mêler de leurs affaires, les pupilles rivées sur Asher, les lèvres qui tentent vainement d’articuler des excuses. J’ai jamais été bon à ça, les mots qui sortent toujours de travers, les je t’aime qui sonnent faux une fois sur deux, c’est pas inné, pas spontané, toujours forcé, pas capable de retomber sur les belles paroles lancées à Seth, les promesses en l’air et les mots doux murmurés pour le faire rester. A quoi bon, il est pas resté, Asher restera pas non plus, t’es qu’un raté. Tout est dénaturé dans ma bouche, par ma voix, mon accent du Sud trop prononcé, l’intonation mal assurée de celui qui galère avec la grammaire, l’habitude de dire les choses pour les mauvaises raisons, les mots d’amour qu’ont pas plus de sens que d’dire que j’vais chercher du lait depuis qu’il s’est barré avec mon cœur écrabouillé contre sa semelle. J’sais pas comment l’expliquer à Asher, que pour moi ça veut rien dire, qu’il peut me dire je t’aime autant qu’il veut, ça m’rappellera toujours le jour où Seth s’est fait la malle. Il avait dit je t’aime, ce jour-là, je t’aime mais j’veux plus te voir, j’veux plus de toi. Il comprendrait pas, Asher, ça serait trop dur à digérer, que pas le dire tout court ou pas le dire bien, ça veut pas dire que j’le pense pas, même si ça me fait chier de le penser, même si j’voudrais avoir un palpitant en béton armé pour pas pleurer devant ces enfoirés qui nous matent comme une émission de télé-réalité. Plus vraie qu’nature, ça fait plus mal quand c’est pas du fake, hein ? C’est l’rire d’Asher qui résonne comme des morceaux de parebrise plantés dans la peau après un accident, c’est fini, c’est le crash, les yeux qui s’remettent à pleurer tout seuls, vannes rouvertes du pathétisme première fraîcheur, j’espère que l’public apprécie, j’me rassieds sur les sièges en plastique, réflexe mécanique comme s’il m’avait poussé en arrière, les yeux baissés pour pas le voir partir.
Y a jamais rien eu, et y aura plus rien.
Rien. Rien, ça ferait pas un mal de chien, rien, ça ferait pas remonter la nausée et les larmes, rien, ça n’aurait pas cette saveur douce-amère, les sentiments sincères et les mensonges entremêlés, pour pas blesser, pour préserver un restant de bonheur, un peu d’espoir. Y’a l’envie de s’réfugier dans la chambre de Seth, même si c’est plus l’heure des visites, s’endormir sur la chaise à côté d’son lit comme quand j’étais ado, comme quand y’avait rien d’compliqué, que l’choix cornélien était vite fait, ma carrière ou toi ? Toi, mille fois toi. La décision parfois regrettée, jamais totalement, ça avait pas d’importance d’être riche et célèbre tant qu’il était là. Tant qu’il était à moi. Je sais pas où je trouve la force de me relever, faudrait sans doute que j’rappelle l’infirmière de tout à l’heure, pour lui d’mander si elle a pas un remède contre les cœurs brisés, j’titube un peu, mais mes pas me guident vers l’extérieur, besoin d’air, besoin de s’éloigner des vautours, de plus avoir autant d’témoins de la tristesse qui me bouffe. Et il est planté là, devant les portes de l’hosto, les larmes sur la tronche et la cigarette pour garder la face, appuyé sur sa béquille. J’reste figé sur place, parce qu’il me tourne le dos, qu’il m’a pas entendu arriver, entre les va-et-vient permanents des urgences, parce que j’sais pas quoi faire, essayer d’me justifier ou l’ignorer et me barrer, reprendre la bagnole, faire un accident pour de vrai. Y’a mon corps qui s’avance, manque de le frôler. Arrêter de mentir, c’est peut-être la dernière chance qu’il me reste. J’veux te garder, steplaît. « Asher, t’es pas rien », je souffle, en prenant appui sur le mur, pour maîtriser les tremblements, pas montrer que j’tiens à peine debout, les jambes en coton et le flou tout autour. « T’es pas rien mais t’es pas lui, j’suis désolé pour ça, mais j’veux pas. J’veux plus te mentir, y’a toujours eu lui d’un côté et le reste du monde de l’autre, et j’sais pas où te mettre, Asher, parce que t’es pas le reste du monde, mais t’es pas lui non plus. J’suis désolé mais j’sais pas c’que t’es, parce que j’ai plus aimé quelqu’un comme ça depuis lui et j’pensais pas pouvoir. Et j’suis paumé et j'suis désolé de l’être. » Les sanglots qui m’étranglent, j’arrive pas bien à respirer, les poings serrés de colère contre moi-même, à répéter toujours les mêmes erreurs. « J’veux pas qu’tu croies que t’es pas important ou que j’t’aime pas. Parce que c’est pas vrai. J’suis fou de toi. »
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| Sujet: Re: it's a sad sad situation (tosher) Lun 18 Déc - 14:12 | |
| Y a eu six ans. Six ans pour faire d’autres projets, rencontrer d’autres personnes, six ans pour construire une autre vie, six ans pour finaliser un foutu divorce, juste une signature à mettre sur un papier, rien de trop compliqué même pour quelqu’un d’aussi peu enclin à l’administratif que Toad. Six ans, ça laisse le temps à toute une vie, six ans ça veut dire que quand ils se sont quittés, Toad avait 22 ans, c’était encore un gamin qui n’avait aucune idée de ce qu’étaient la vie, l’amour, 22 ans, c’était juste à la fin de l’adolescence, pas encore les deux pieds dans l’âge adulte, les piqûres pour tenir d’après ce qu’Asher avait pu comprendre, promettez-vous de vous aimer dans la drogue et dans l’alcool, dans la pauvreté et la misère, jusqu’à ce que la mort vous sépare. 22 ans c’était un putain de serment d’hypocrites, des enfants qui s’aiment et qui pensent que ça durera toute une vie, y a un côté touchant parce que l’homosexualité ne devait pas être facile à assumer à cette période, parce qu’ils avaient dû tout plaquer pour se construire un avenir sans parasitage. 22 ans c’est trop jeune pour savoir, trop jeune pour comprendre, et ça devrait lui sembler évident que Toad se sente perdu, qu’il ne sache pas quoi faire, comment choisir, ça devrait être compréhensible mais au lieu de ça, ça le fout en rogne et il n’arrive pas à expliquer pourquoi, ça le rend triste et il aimerait que ça ne soit pas le cas, ça le tue et il voudrait que ça l’achève, histoire d’en finir une bonne fois pour toutes. T’es pas rien mais t’es pas lui, y a rien qui pourrait lui faire plus mal, rien qui pourrait mieux résumer leur histoire, il n’est pas rien mais il n’est pas grand-chose, ça le ramène à leur conversation téléphonique d’il y a une heure, il est le mec que Toad appelle quand il veut baiser, il est l’ami qui lui prête une oreille quand il a besoin de se confier, il est l’amant qui laisse la trace de ses ongles sur la peau de son dos, mais il n’est rien d’autre. Rien de suffisant pour faire basculer la balance, pour que le pasteur sache vraiment ce qu’il veut. Pour qu’il prenne une décision en son âme et conscience. Et là, il ne sait pas. Pourtant, Asher ne s’est pas retourné, il a juste entendu sa voix, les mots qui ont percé son tympan. Mais il a compris, parce qu’il le connait mieux que quiconque, peut-être même mieux que son mari, cet homme qui doit avoir gardé l’image d’un Toad ravagé, défoncé aux drogues, pas droit sur ses pattes, pas vaillant, pas fort, pas honnête non plus, un Toad à mille lieues de celui qu’il est aujourd’hui et qu’il a toujours été intrinsèquement, quelqu’un de bien, quelqu’un de touchant, quelqu’un d’exceptionnel. C’est ce qu’il devrait lui dire, c’est ce qu’il aimerait lui dire, parce qu’il sent qu’il pense qu’il n’en vaut pas le coup, il sait qu’il pense qu’il n’est pas assez bien, et c’est pas acceptable, pas normal, quand on est en présence d’une âme qui brille aussi fort que la sienne. Il devrait lui dire qu’il le connait, qu’il sait de quoi il est fait, ce dont il est capable par amour, qu’il a confiance en lui et qu’il sait qu’une fois qu’il aura les idées plus claires, il lui reviendra. Mais tout se mélange, tout est confus, rien n’est sûr, et il n’y a que le t’es pas rien mais t’es pas lui qui ressort, un cri asséné dans la nuit. « J’ai déjà donné. » Quatre mots et déjà tellement de sous-entendus, ça veut dire qu’il ne peut plus, ça veut dire qu’il ne veut plus. Il aurait pu répondre qu’il était fou de lui aussi, qu’il lui était impossible de le quitter, qu’il revenait sur tout ce qu’il lui avait balancé dans le couloir de l’hôpital. Sauf que les mots refusent de sortir. Y a que la rancune qui parvient à franchir la barrière de ses lèvres, un ressentiment âpre et visqueux qui ne lui ressemble pas. C’est la balle, c’est les mensonges, c’est l’amour, un peu de tout ça. C’est Toad, principalement. « Tu s’ras pas mon nouveau Caïn, Toad. J’tomberai pas une nouvelle fois pour quelqu’un qui a déjà sa vie, son destin tout tracé, son âme sœur. Et tu s’ras pas non plus une nouvelle raison de me pendre, j’te l’ai dit la première fois, à l’église. » Il a lâché le prénom sans s’en apercevoir, Caïn, ça brûle dans sa tête, dans ses veines, Caïn, comme quoi, ils sont deux à faire de la merde ce soir. Il ne voulait pas l’annoncer comme ça parce qu’il sait que Toad connait le cajun, il sait qu’il l’a tatoué pour avoir reconnu sa patte, ses gribouillis encrés sur sa peau, « fait chier » il lâche quand il se rend compte de sa boulette, tourne lentement pour faire face au pasteur, la paume appuyée contre ses joues pour éponger les larmes. Ça fait mal de le voir comme ça, en sanglots devant lui, mal de ne pas pouvoir franchir la distance qui les sépare, lui montrer qu’il l’aime, qu’il l’aime vraiment, que s’il avait le choix aujourd’hui entre Caïn et lui, il saurait pas quoi faire, il serait paumé, aussi paumé que Toad peut l’être. Ça fait mal de ne pas pouvoir le toucher alors que c’est tout ce qu’il souhaite, de ne pas pouvoir lui dire on rentre et on oublie tout ça. « Je t’aime », brisure au fond de la voix, les yeux plantés dans les siens, il lui avait jamais vraiment avoué en face, pas comme ça, pas aussi posément, chaque syllabe détachée. Il ne peut rien lui dire d’autre, tout de suite, la main agrippée à sa béquille et le cœur au bord d’un gouffre, sa blessure qui lui fait endurer le martyr mais presque plus supportable que l’idée qu’ils puissent se séparer comme ça. Il pensait que ça marcherait, cette fois. Il le pensait vraiment. « Et j’aurais vraiment, de tout mon cœur, voulu essayer de faire ma vie avec toi. » J’aurais voulu si t’avais laissé le choix, si tu m’avais pas imposé la solitude et l’oubli. Adieu, joli pasteur. « Mais j’ai déjà donné. » La mâchoire qui se serre après qu’il ait tiré une bouffée de tabac, sanglots étouffés dans la gorge alors qu’il tapote nerveusement du pied. Il lui aurait tout donné, absolument tout, maintenant y a plus rien, le château de cartes est tombé d’un simple coup de vent. Plus rien sauf deux mecs misérables qui chialent l’un en face de l’autre, ça pourrait presque être beau.
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Invité ☽ ☾
| Sujet: Re: it's a sad sad situation (tosher) Mer 20 Déc - 23:55 | |
| C’est con. J’aurais pu éviter tout ça. Suffirait de remonter le temps, de quelques mois, seulement, suffirait de s’retrouver à nouveau sur les bancs inconfortables de l’église, côte à côte, suffirait qu’je pose la main sur son épaule, qu’je serre un peu, juste pour montrer qu’j’suis là pour lui, comme un pote, un vrai. Sur son épaule et pas sur sa cuisse. Suffirait de le pousser à me parler, même si c’est difficile, insister, pour savoir. Pourquoi t’as voulu t’foutre en l’air, Asher ? Suffirait d’un rien, vraiment, trois fois rien, juste un peu de jugeote, un peu d’éthique, suffirait de pas rebondir sur ses paroles, de pas balancer j’ai personne alors qu’c’est pas tout à fait vrai, simplement hausser les épaules et se la fermer. Pas lui faire penser que y’a pas d’problème pour baiser, là, dans la sacristie, pas insinuer que c’est une excellente idée, s’éloigner aux moindres signes de faiblesse, à la moindre envie de toucher, d’embrasser. Surtout pas croire que ça sera facile, après, surtout pas s’imaginer que ce sera qu’une fois, comme ça, debout contre une porte. C’est même pas romantique. Mais j’ai jamais aimé les trucs romantiques, de toute façon. C’est débile, vraiment. J’aurais pu aller voir Seth directement, en débarquant à Savannah, ça aurait pas été simple, mais j’l’aurais embrassé sans arrière-pensée, j’aurais pas eu ce p’tit truc qui me gratte le cœur, l’impression d’oublier quelqu’un, quelqu’un de trop important pour l’ignorer. J’aurais pas eu envie de couper mon cœur en deux, ou d’le jeter au milieu de l’arène et voir lequel des deux se bat le mieux, juste pour pas avoir à faire de choix. Y’aurait pas de confusion, que dalle, pas de culpabilité, pas d’Asher dans l’équation, pas à cacher la marque de morsure dans mon cou en relevant le col de ma veste. T’es pas rien, Asher, et ça doit être la pire manière du monde de le dire, par la négative alors qu’y’a pas un truc à propos de lui qui soit pas positif, Asher ça rime avec bonheur, merde. T’es pas rien, ça veut dire t’es beaucoup plus qu’un coup d’un soir, t’es beaucoup plus que c’que j’avais prévu, t’es beaucoup trop, Asher, beaucoup trop. Et j’échangerais pas un seul atome de toi contre quoiqu’ce soit. Mais il entend pas, Asher, il entend rien de tout ça, et c’est ma faute, c’est toujours ma faute, parce que les mots sont mauvais, bancals, parce que j’ai Seth gravé dans l’fond du cœur et sur la peau, parce que j’suis empoisonné par le premier amour de ma vie qui d’vait être le dernier. Et j’ai rien à donner à part un cœur hors d’usage, un vieux machin de seconde main auquel on a retiré les piles. Désolé, on n’en fait plus des comme ça. Asher, il a déjà donné, et il m’a trop donné, pour la maigre consolation que j’lui offrais, il a déjà donné, pour Caïn, le nom familier, mon tatoueur, à en juger par la façon dont il maugrée sur son aveu, Caïn et son âme sœur.
C’est con. J’aurais pu éviter tout ça. Suffirait de remonter le temps, de quelques années, seulement, pas écouter cet enfoiré qui dit qu’il vend d’la pure au rabais, tu verras, ça fait planer au-dessus des toits, au-dessus des nuages, au-dessus de la couche d’ozone, mec. J’savais même pas c’que c’était, la couche d’ozone, et Seth s’était foutu d’ma gueule parce que j’avais mal dit le mot. Ecouter Seth qui dit qu’c’est d’la merde, tenir mes promesses quand j’lui dit que j’vais retrouver un boulot, dev’nir livreur de pizzas pour ses beaux yeux, pas mal parler au boss, fermer ma gueule et trimer pour sauver son père. Pas de fric facile, pas de came, juste l’amour, rien qu’l’amour, choper ses sourires de p’tit con et les garder au creux du cœur, le garder lui, forever and after. Mais y’a Asher qui se retourne et j’me dis que j’voudrais pas l’avoir jamais rencontré, et j’tente de virer les larmes qui dégoulinent du revers de la main, regarde pas, me regarde pas pleurer, putain. Et l’autre main qui s’avance, mais qu’ose pas toucher, se fige, retombe. « C’est perdu, hein ? J’aurai beau rester là à te regarder en chialant, ça changera que dalle, pas vrai ? J’t’avais dit que j’te perdrais. Pour une fois qu’j’ai raison, j’aurais aimé avoir tort. » Pâle sourire, les lèvres mordues pour pas éclater en sanglots, tenter d’faire bonne figure devant les gens qui passent, et les yeux qui s’baissent quand j’me redresse un peu. « Moi aussi je t’aime. J’espère qu’un jour tu m’reparleras. » Haussement d’épaules avant d’s’en aller, les doigts qui le frôlent sans même s’en apercevoir, c’est tout c’qu’il me restera de lui, bientôt, une sensation fantôme au bout d’mes phalanges, l’envie d’se retourner dans la rue, mais y’a jamais personne, quand on s’retourne, que dalle, même pas un putain de souvenir. J’sais pas où j’vais, j’retrouve pas le parking, le bar le plus proche, c’est bien, du whisky bon marché et le caniveau pour tout matelas à la fermeture. Ça a toujours été ma place, c’est là d’où j’viens, j’vois pas c’que j’espérais.
C’est con. C’est vraiment con. J’aurais pu éviter tout ça. Suffisait d’pas naître. |
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| Sujet: Re: it's a sad sad situation (tosher) | |
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