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 j'voudrais casser la gueule de la douleur.

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JJ O'Reilly

JJ O'Reilly
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j'voudrais casser la gueule de la douleur. Empty
MessageSujet: j'voudrais casser la gueule de la douleur.   j'voudrais casser la gueule de la douleur. EmptyLun 13 Nov - 16:53

MAX : Hey ducon, t'as du courrier.

Ouais, et alors ? Qu'est-ce que ça peut me foutre ? Je hausse les épaules et recommence à boire ma bière, dans le bar au coin de la rue de notre loft. Ça peut attendre que je rentre, pourquoi il m'emmerde ? Je réponds simplement un smiley fuck, avant de jeter mon téléphone sur le bar en roulant des yeux. Mais quelques secondes plus tard, ça vibre à nouveau. Putain, Max, arrête de faire chier.

MAX : J'ai ouvert. C'est qui Jedediah ?

Hein ? Je bug. Pourquoi il me parle de Jedediah ? Le courrier, c'est de lui ? Pourquoi il m'enverrait un truc par courrier alors qu'il a mon numéro et que je suis dispo pour le voir absolument tout le temps ? Ma curiosité qui se retrouve piquée au vif, je termine cul sec le fond de ma pinte et je quitte le bar, direction le loft pour voir de quoi il en retourne.

La porte qui claque derrière mon passage, Max qui traine sur le canapé, complètement désintéressé par ma présence. Il n'y a personne d'autre, les lieux sont désertés, comme souvent ces derniers temps. Je me précipite vers la table de la cuisine et récupère dessus la carte qui y traine. Je l'ouvre, lis, et y a comme un truc qui se bloque dans mon esprit alors que les mots arrivent en bordel jusqu'à mon cerveau. — Mais.. de quoi ? Je refuse de comprendre. Mes mains qui se crispent sur le carton, le rythme cardiaque qui ralentit de façon significative. Je blêmis, faiblis ; toujours sans comprendre.

C'était ton pote ce mec ?
Hein ?
Le mec du faire-part, c'était ton pote ?
Je...
Il est mort de quoi ?
Hein ? Il est pas m...

J'ai froid. Putain, j'ai froid d'un coup. Je frissonne, non, je tremble. Mon visage qui se déforme, les lèvres qui sursautent, le cœur qui chavire, les tripes qui se retournent. — Non, il est pas.. il est.. je.. Je balbutie, perdu, les yeux qui se gorgent de larmes alors que les questions se bousculent dans ma tête et que l'incompréhension s'installe, se faisant reine. Les connexions ne se font pas et je reste bloqué devant les mots, oubliant même la présence de Max ; qui pourtant me fixe avec un certain malaise. Je fins par reposer la carte et viens passer mes doigts sur mes yeux pour les sécher. — Je comprends pas.. Que je finis par murmurer, la voix prise en étau par mes émotions, soudainement faible, alors que je gueule tout le temps. Les larmes se mettent à rouler, alors qu'une partie de moi a déjà très bien compris. Mais mon conscient se protège et s'enterre dans un déni protecteur. Je me mets à sangloter et je répète. — J-je comprends pas putain.. C'est pourtant simple, non ? Jed est mort.

Je n'ai jamais affronté la mort. Et je ne sais pas comment réagir. Je sens juste que tout mon corps se déchire de l'intérieur. Je sens la peine qui charge mes larmes et les rend abondantes, tellement que mes joues finissent trempées et mes yeux ont rougi. Je me tourne vers Max, haletant, complètement désorienté, comme si on venait de me dire quelque chose de difficile à comprendre. Alors que c'est simple. Y a pas plus simple que ça. Jed était là, et d'un coup, il ne l'est plus. Sans un au revoir. Sans un dernier mot. Sans prévenir. Putain, quand est-ce qu'on s'est vu pour la dernière fois ? Qu'est-ce que c'était ces derniers mots ? J'essaye de repasser ça dans ma tête, mais ça ne vient pas. Je n'arrive plus à penser, tout devient incohérent et y a cette douleur qui grandit, grandit et qui envahit tout. Et mon corps me fait mal, mon coeur me fait mal, mon esprit, mes veines, ma peau, chacune de mes cellules. Je ne suis plus qu'un amas de douleur et j'ai envie de hurler alors que la réalité fait doucement son chemin jusqu'à mon cerveau.

C'est fini. Juste comme ça. Un jour t'es là, le lendemain tu ne l'es plus. C'est terminé. Et je n'arrive pas à assimiler, à encaisser. Je chiale comme un gamin qui viendrait de perdre son père. Je ne tiens même plus debout, les jambes flageolantes. Je sens une main qui se pose sur mon épaule, et je la chasse aussitôt, je hurle, la voix étranglée, la vision brouillée. — LÂCHE-MOI ! Il revient à la charge et je me débats, je fais semblant de vouloir le frapper, mais en quelques tours de bras il m'emprisonne contre lui, et me serre. Me serre tellement fort que ça m'empêche de m'écrouler. Mes doigts s'agrippent à son t-shirt et je continue de pleurer, de râler, même si on ne comprend pas un mot de ce que je dis. Je ne sais pas combien de temps je reste là, lotis contre lui. Mais je finis par me dégager de son emprise, parce que la douleur devient trop immense et qu'il faut que j'évacue. Parce que mon esprit imprime enfin la tragédie et que ça me mets en colère. Contre moi, contre Jed, contre l'univers. Je le repousse violemment et je crois que ça le surprend. J'ai jamais le dessus contre lui, pourtant là, il a tangué sévère. Et je file sans plus attendre, sans savoir où je vais. J'ai juste besoin de courir, jusqu'à en perdre haleine. Jusqu'à m'effondrer par terre. Jusqu'à ne plus pouvoir ressentir quoi que ce soit d'autre que mes poumons en feu qui réclament de l'oxygène.

Jed est mort, ça veut dire qu'on ne se reverra jamais.
Ça veut dire qu'on ne parlera plus jamais.
Ça veut dire que je retourne à la case départ.
Plus de père, plus de refuge.

Ça veut dire que j'suis tout seul.
Et que j'ai peur.

J'ai mal, tellement qu'il n'y a pas de mot pour l'expliquer.
J'ai mal, d'une douleur encore jamais endurée.
J'ai mal et j'ai l'impression que ça ne va jamais s'arrêter.

J'ai mal.
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