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 row row row your boat (Ronnicus)

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MessageSujet: row row row your boat (Ronnicus)   row row row your boat (Ronnicus) EmptyVen 28 Juil - 15:35



Atticus & Ronnie
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Les doigts de Ronnie caressent son écran de téléphone comme si c’était sa possession la plus précieuse. Elle sait pas trop pourquoi elle a ce sourire un peu niais, pense d’abord que c’est parce qu’elle était en train de regarder West Side Story et qu’elle adore ce film, même après cent visionnages, mais elle sait parfaitement au fond d’elle que c’est la réponse d’Atticus à son message qui la met dans cet état. « Tooooony, Toooony », elle chantonne doucement alors qu’elle écrit à son tour, les doigts tapotant à la vitesse de l’éclair. J’arrive, et maintenant qu’elle l’a dit, impossible de lui poser un lapin. Elle ne voudrait pas, de toute façon. Même si elle y pense un instant quand elle voit les prénoms de Lars et Abel défiler dans ses contacts. Ça fait d’elle une pute ? Le fait de traîner avec plusieurs garçons, de les apprécier tous différemment ? Elle s’est jamais posé la question avant aujourd’hui mais c’est légitime, non ? Y a bien une partie d’elle qui pense que ce n’est pas correct, qu’elle devrait arrêter de voir Atticus avant de se concentrer sur d’autres que lui. L’autre, plus fourbe, lui susurre qu’Atticus s’en fout, et elle sait que c’est vrai. Il est comme elle, Titi, il vit toujours le cœur entre deux silhouettes et ne pense pas vraiment à demain. C’est peut-être mal, ils devraient sûrement éviter, trouver d’autres moyens de se briser le cœur qu’en le partageant en plusieurs. Elle ne sait pas si c’est ce qu’elle veut, Veronica. Elle a peut-être trop manqué d’amour, quand elle était plus jeune. Pas jusqu’à ses quinze ans, parce que son père était important, tellement important, mais après. Quand elle s’est retrouvé coincée avec sa mère, la bonne-femme qui lui a filé comme deuxième prénom celui d’un clebs. Ok, personne ne sait, mais quand même. On ne peut pas dire que ce soit l’amour fou entre elles deux à la base, et ça ne s’est pas arrangé avec le beau-père. Donc, circonstances atténuantes, en quelque sorte. Même lorsqu’elle reçoit un message de Lars et qu’elle décide délibérément de l’ignorer, parce qu’elle est en train de se mettre du mascara. Pour rejoindre Atticus. Coup d’œil au téléphone, soupir. Pas ça. Pas maintenant. Pas la culpabilité, l’introspection, la réflexion. Atticus, ça sera toujours Atticus. Rien de moins que les autres, et tellement plus à la fois. Ça sera toujours l’insaisissable, l’indomptable. Celui qui montrera les crocs plutôt que de caresser la main. Celui qui la feulera mais se laissera tout de même approcher. Atticus, ça sera toujours davantage, et ça l’emmerde, parce que son cœur a suffisamment de place pour plusieurs personnes. Mais pas ce soir. Alors elle met son portable en vibreur, se reconcentre sur le reflet que lui projette le miroir. Un coup de brosse et la porte claque derrière elle.
Il n’habite pas loin. Cinq minutes à tout casser, quand on marche vite. Faut croire qu’elle court, parce qu’elle ne met que quatre minutes et vingt-deux secondes et n’est même pas essoufflée lorsqu’elle aperçoit enfin le voilier. Et la silhouette de son ami qui se découpe sur l’une des minuscules fenêtres. On va la jouer au bluff, Ronnie. Y a une idée qui lui trotte derrière la tête, une petite surprise comme elle en a le secret. Elle toque rapidement à la porte de la cabine et s’échappe sur le côté avec une discrétion presque féline, les pas trop légers sur les planches vermoulues. Elle l’entend ouvrir, sourit en se disant qu’il doit bougonner dans sa barbe. Elle est trop farceuse, Ronnie, c’est un truc qui lui colle à la peau, comme à celle de tous les gosses qui n’ont pas fini de grandir. Elle est farceuse, et elle le connait trop. Elle repère rapidement l’une des vitres qu’il a laissées ouvertes, s’engouffre à l’intérieur de l’embarcation. Il lui tourne toujours le dos, main sur la poignée. C’est peut-être pour ça qu’elle fait exprès de faire craquer un peu le plancher, elle voudrait pas lui faire peur. Ça serait commettre le pire des impairs, surtout qu’Atticus est son hôte. Une bonne invitée n’effraie pas le maître de maison. Sauf que c’est pas une bonne invitée. Sauf qu’elle glisse sa main sur sa nuque, même pas une caresse, tout juste un effleurement. Bingo, il se retourne. « Bonsoir », qu’elle murmure, petit sourire au coin des lèvres. Elle espère qu’il la trouve jolie, suffisamment jolie. C’est une question qu’elle ne se pose pas avec les autres, va savoir pourquoi. Peut-être parce que Lars lui montre qu’il la trouve jolie. Peut-être parce qu’elle ne sait pas ce qu’Abel pense et que comme il semble la détester de toute façon, elle préfère l’ignorer. Atticus, c’est différent, et elle déteste ce sentiment de vulnérabilité, même si c’est ce qui la pousse dans ses bras une nouvelle fois. « C’est démodé, de passer par les portes. » Murmure alors que sa main trouve celle d’Atticus, que leurs doigts s’emmêlent. Ils jouent les miroirs, tous les deux, trop assortis dans leurs différences et trop contrariés dans leurs points communs. Les deux faces de la même pièce. « Donc, on disait », elle continue, bandit de gamine, la main accrochée à celle de Titi comme s’il était son port et que les doigts étaient l’ancre, à essayer de se retenir, de ne pas dériver, de ne pas chavirer très loin de lui. « J’me suis trompée de gars au Diner, mais pas ce soir, je crois. » Le sourire s’élargit et elle se rapproche d’Atticus, glisse son bras libre autour de sa taille, les ongles fermement accrochés au t-shirt. « Montre-moi que t’es le vrai Atticus. » C’est ronronné, presque susurré, et elle serre sa main un peu plus fort, imperceptiblement, juste pour lui montrer qu’elle est bien là, que c’est bien elle, qu’elle tient à lui-même s’il pue le macchabée et qu’elle le veut, au moins ce soir, au moins cette nuit.

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Nicola Paulsen

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MessageSujet: Re: row row row your boat (Ronnicus)   row row row your boat (Ronnicus) EmptyMer 2 Aoû - 13:40

Il a un petit sourire aux lèvres quand il repose son téléphone et reprend son bouquin, vautré à même le sol de la cabine, adossé contre un pouf. Il change toujours quinze fois de position quand il lit, jusqu'au moment où il se retrouve happé par les pages et en oublie son inconfort. C'est comme ça que ses parents le retrouvaient parfois les pieds sur le dossier du fauteuil et la tête en bas, les veines gonflées sur son visage cramoisi, plongé dans Huckleberry Finn. Il a du mal à s'y replonger maintenant, puisqu'il sait que Ronnie ne va pas tarder à se pointer. Ça l'amuse de voir comme elle le prend aux mots, à moins qu'elle ne lui fasse une mauvaise blague et ne vienne pas finalement, dans tous les cas ça lui apprendra à distribuer des invitations sans y penser.

Au début, il ne savait pas quoi penser d'elle. Au début, il n'avait même pas envie de penser à elle. C'était une fille ordinaire, et ça aurait dû lui mettre la puce à l'oreille parce que personne n'est jamais tout à fait ordinaire. Il a honte de s'être fait avoir, Atticus, lui qui se targue d'être un observateur hors pair de la race humaine — tu parles, lui susurre une voix narquoise qui ressemble à celle de Nemo, la voix de sa conscience sûrement —, lui qui prétend être capable de voir la vie et les âmes à travers leur vernis. Elle n'est même pas si conventionnelle, Ronnie, mais les vernis d'excentricité n'en cachent pas toujours plus que la conformité. En attendant, le fait est qu'il s'est immédiatement retourné sur Kizuki et ses cheveux roses et même Reid et ses cheveux décolorés — est-ce que tout est histoire de cheveux, est-il superficiel à ce point ? —, alors que Ronnie n'était qu'une jolie fille comme il y en a beaucoup. Dire qu'il aurait pu rater ça. Ça, c'est encore du flou, du vague, une masse informe sur laquelle il tire par ici, appuie par là, pour voir ce qui se passe, guetter ses réactions. Ronnie avec ses mots qui débordent et cette positivité presque enfantine qui aveugle, il a quand même fini par avoir la curiosité d'y planter les griffes. Et c'est en griffant qu'il a découvert des fissures où loger ses ongles sur la peau qui lui avait semblé lisse, et elles ne sont jamais exactement là où il les attend. Ronnie, elle le surprend toujours. Il faut dire que ça ne fait pas encore très longtemps qu'ils se tournent autour, et entre temps il y en a eu d'autres pour lui, d'autres pour elle aussi, il le sait. Il ne lui demande rien à ce propos, il n'est pas jaloux, pas possessif, pas encore. Peut-être que ça viendra, peut-être qu'elle s'en mordra les doigts. Peut-être que c'est quand elle décidera d'en finir qu'il ne voudra plus la lâcher. Parfois il se dit que c'est bien comme ça, calme et tranquille comme une balade fluviale, et parfois il a envie de les précipiter sans prévenir au cœur d'une tempête en pleine mer.

Au bout d'une dizaine de minutes et à peine trois pages avalées, il entend frapper à sa porte. Elle est presque aussi agile que Ninel, Ronnie, il ne l'a pas entendue marcher sur le pont, peut-être aussi parce qu'il était enfin reparti dans son livre. Il marque sa page avec une feuille à rouler, pose son bouquin par terre et gravit les quelques marches pour ouvrir la porte de la cabine. Personne. Il reste planté là et sait qu'il y a deux possibilités, soit il a rêvé et dans ce cas peut-être qu'il commence à trop s'attacher à Ronnie — tant mieux —, soit elle lui fait une blague. Elle en serait bien capable, la gamine. Alors il inspire l'air de la nuit en attendant qu'elle pointe finalement le bout de son nez avec l'air mutin qui lui va si bien. Ça ne se passe pas comme ça. Elle est trop blagueuse Ronnie. Il entend quelque chose derrière lui et la sent effleurer sa nuque. Il a beau savoir immédiatement que c'est elle qui vient de se faufiler à son insu, parce qu'il reconnaît le son de sa respiration et son odeur de tabac parfumé — encore une chose qu'ils ont en commun — avant même de s'être retourné, il sent son cœur s'emballer brièvement. Et elle qui est toute fière de son coup et reprend leur conversation écrite comme si elle n'avait pas été interrompue, elle qui lui prouve encore qu'elle aime le prendre aux mots et joue la fille entreprenante. Elle lui arrache un rire, évidemment, c'est plus fort que lui. Il descend les deux marches qui le séparent du sol, passe les bras autour de sa taille et colle son nez dans son cou, sa pommette écrasée contre son épaule. « Tu peux pas me faire ça. T'es passée à deux doigts de te retrouver avec mon cadavre sur les bras, petite. » Il exagère à peine. La dernière fois qu'on l'a surpris comme ça, il a fait une crise de cataplexie en pleine rue. Elle a de la chance qu'il ait été sur ses gardes, qu'il se sente en sécurité lorsqu'il est chez lui, même si comme elle vient de le prouver c'est terriblement facile d'y entrer par effraction, elle a de la chance parce que s'il était tombé depuis le petit escalier, il aurait pu se faire franchement mal.

Par chance, il est encore maître de ses muscles, mais ses paupières sont lourdes, il se sent somnolent tout à coup. Une petite sieste sur l'épaule de Ronnie, ça le tente bien. Pourtant il a pris son Provigil ce matin, mais peut-être que les mélanges médicamenteux qu'il s'amuse à opérer en réduisent les effets. Il relève sa tête de l'épaule confortable et fait un sourire endormi à Ronnie. « Tu m'as assommé, t'es fière de toi ? T'es une fille as-som-mante, » c'est évident qu'il plaisante. Au moins, ça doit bien lui prouver qu'il est le vrai Atticus, celui qui s'endort au moment les plus inopportuns. Il le lui aurait bien prouvé autrement.  Il soupire et se pince l'arrête du nez, comme si ça pouvait le maintenir éveillé. « Laisse-moi deux minutes. Mais alors, ce type, il a même pas sauté sur l'occasion ? » Il prend un air abasourdi, l'air de dire qu'il est impensable qu'on résiste à Veronica Ferguson.


Dernière édition par Atticus Hornigold le Jeu 31 Aoû - 15:03, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: row row row your boat (Ronnicus)   row row row your boat (Ronnicus) EmptyLun 14 Aoû - 0:01



Atticus & Ronnie
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C’est bizarre comme l’inconnu peut sembler familier, bizarre comme son cœur s’affole à la sensation du corps d’Atticus écrasé contre le sien, bizarre comme elle peut se livrer à quelqu’un qu’elle connait somme toute très peu. Elle n’aurait jamais dû s’ouvrir à Atticus, simplement parce qu’elle n’aurait pas dû en avoir la capacité, au fond d’elle, la force mentale comme physique de se livrer à un autre que Grim, à un autre que son sang, sa chair. C’aurait été facile de faire comme avec toutes les personnes extérieures à son monde, de minauder et prétendre s’attacher en gardant toujours une part de méfiance dans ses gestes et dans ses mots, dans les pensées et dans ses projections. Elle n’aime pas parier sur l’avenir avec des inconnus, même lorsque ces inconnus sont étrangement attirants, même quand il s’agit de Lars, d’Abel, des jolies âmes qui gravitent autour d’elle et la perdent trop souvent. Elle n’aime pas se dévoiler, Ronnie, pas sans enfiler des gants et arrondir les angles, camoufler les imperfections, buriner les défauts. Elle a tout d’une control freak, au final, le genre de nana qui a envie que sa vie ressemble à un conte de fées et qui refuse de laisser entrevoir le bordel qu’elle est en réalité. Sauf que c’est différent, avec Atticus. C’est différent parce qu’elle l’a invité chez elle, parce qu’il a câliné son chat, parce qu’il a dormi dans son plumard et qu’il a pissé dans ses toilettes, c’est différent parce qu’il a laissé un bout de lui dans son minuscule studio et qu’il a marqué son corps de son empreinte. C’est différent parce qu’elle le connait, réciproquement, parce qu’elle a vu et entendu son art, parce qu’elle a assisté à ses siestes impromptues, parce qu’elle a ri avec lui en regardant de vieux nanars et parce qu’elle a écouté le son de sa respiration quand il s’endort après avoir fait l’amour. C’est différent parce que quand il laisse sa tête reposer sur son épaule, elle accroche ses ongles à sa chemises, caresse doucement la peau à travers le tissu, embrasse délicatement les veines de son cou. C’est différent parce que Ronnie n’est jamais douce, habituellement, parce qu’elle est toujours branchée sur secteur et qu’il n’y a pas grand-chose qui la fasse freiner, à part les sentiments. Lars, Abel, Atticus. « Tu sens bon », elle souffle, ça n’a aucun rapport mais ça mérite d’être dit. Il sent bon et elle sait que ce n’est pas quelque chose qu’il doit entendre souvent, parce qu’il sent un peu l’encens, un peu l’embaumement, un peu la mort, mais elle aime bien cette odeur. Peut-être parce que ça lui rappelle papa, le dernier regard au corps sans vie et les paupières qui ne se rouvriraient jamais pour voir un nouveau matin, les mains trop froides et le cercueil trop petit pour le grand homme qu’il était. Peut-être que c’est un genre d’Œdipe chelou, ouais. N’empêche, il sent bon. « Ce type, je l’ai appelé par ton prénom, ça a dû calmer ses potentielles ardeurs. » Le rire s’envole, ricoche contre la peau du brun, doit s’insinuer dans ses mèches de cheveux en bataille. Elle a envie de l’attirer sur le canapé et de se lover contre lui, peau contre peau, son Roméo. Ouais, y a une partie d’elle qui a grillé depuis leur rencontre, un tout petit fusible qui a cramé et bousillé toute la boîte crânienne, comme si le mécanisme n’avait pas tenu le coup. Passe en mode manuel, les gestes sont mécaniques. Main dans les cheveux, l’autre dans le dos, répétant l’inlassable caresse. « Viens t’asseoir », elle ordonne soudain sur un ton presque maternel, les doigts soudain pressés sur les siens alors qu’elle l’attire vers la banquette qui grince un peu lorsque leurs corps s’échouent dessus. La péniche tangue, les berce. C’est possible qu’Atticus sombre, possible qu’il la laisse. Possible, et un peu effrayant. Peut-être que c’est ce qu’elle aime le moins, avec lui, cette impression d’être vulnérable dès qu’il tourne de l’œil, parce qu’il n’est plus là pour veiller sur elle. Non pas qu’elle ait besoin de quelqu’un pour ça, hein. Généralement, si vous lui demandez, elle vous dira qu’elle sait s’occuper d’elle-même et qu’elle n’a certainement pas besoin d’un homme pour s’en charger. Sauf qu’elle dit des conneries, Ronnie. Elle en dit beaucoup, tout le temps. Comme quand elle prétend ne pas être un cœur d’artichaut alors qu’elle tombe amoureuse vingt fois par jour.
Prétendre. C’est facile, ça va vite, ça prend pas plus de temps que pour dire Abracadabra. Ils sont déjà couchés sur le petit canapé, elle à moitié sur lui, tête contre son torse. « Je regardais West Side Story avant de venir », elle commence, naturellement, comme s’ils étaient un petit couple qui se raconte sa journée le soir venu. Ils ne le font jamais vraiment, c’est un concept à expérimenter. Elle ne parle pas à grand-monde, Ronnie, toute bavarde qu’elle est. Y a ses clients, et Titi. Le chat, il compte pas, il ne répond quasiment jamais. « J’en étais au passage où Tony essaie de retrouver Maria, et ils chantent sur le balcon, et elle veut pas qu’ils parlent trop fort parce qu’elle a peur que ses parents l’entendent. Ce qui est stupide, parce que je suis certaine qu’ils les entendent chanter. » C’est forcé. Même s’ils chuchotent pour parler, ils crient pour chanter, c’est totalement irrationnel pour son esprit d’enfant. Du bout des doigts, elle pianote sur le torse d’Atticus, joue une mélodie silencieuse. « J’aime pas cette scène », elle poursuit dans un chuchotement, « j’aime pas parce que c’est trop facile, tu vois. L’histoire d’amour qui ressemble à une allumette, qui s’enflamme d’un coup et qui se consume en un claquement de doigts. » Et quelque part au fond d’elle, elle craint que ça ne fasse écho à eux, douloureusement, alors elle se tait et se concentre sur les battements du cœur d’Atticus, lents, sourds, qui résonnent contre son tympan.

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MessageSujet: Re: row row row your boat (Ronnicus)   row row row your boat (Ronnicus) EmptyJeu 31 Aoû - 16:26

Tu sens bon. Il a l'habitude qu'on lui dise qu'il sent bizarre, qu'il pue le cadavre et l'antiseptique quand il revient du boulot ou le tabac et la vanille à cause de ce qu'il fume, mais ça c'est l'odeur qui plane toujours un peu chez lui. Lui, il préfère sentir l'encre ou la peinture ou la poussière des vieux livres au milieu desquels il s'est terré toute une journée, mais si ce qu'il sent maintenant plaît à Ronnie il peut s'en accommoder. Il la laisse le traîner jusqu'à la banquette étroite et ne se fait pas prier pour s'y vautrer en accueillant son corps sémillant sur lui. Il a le sourire niais d'un adolescent qui touche une fille pour la première fois et le regard rieur qui dit : « Oh oui j'aime quand tu m'allonges. » Mais il a l'esprit qui part dans tous les sens, la faute à la somnolence, et pas le courage de rassembler les mots sur sa langue juste pour la taquiner. Il se contente de la tenir contre lui avec une douceur qu'il ne lui accorde pas toujours, parce que c'est la douceur d'un gosse qui s'endort et qui est reconnaissant de ne pas avoir le faire tout seul.

Il écoute sa voix déjà lointaine qui lui raconte la scène d'un film qu'il n'a pas vu depuis quinze ans et il s'assoupit. Quand il revient à lui sous le pianotage de ses doigts, elle parle encore et elle n'a pas l'air de s'en être rendu compte, tout va bien il n'est pas vraiment parti. À peine trente secondes. Il sait même qu'elle lui parle encore de West Side Story quand elle déclare ne pas aimer cette scène, probablement celle qu'elle lui racontait avant que son esprit ne s'échappe un instant. C'était quoi ? Tony, Maria, un balcon, elle aime pas. Il est presque sûr qu'elle a dit un truc adorable entre les deux mais ça il l'a oublié. Maintenant elle lui dit qu'elle n'aime pas. « Parce que c’est trop facile, tu vois. L’histoire d’amour qui ressemble à une allumette, qui s’enflamme d’un coup et qui se consume en un claquement de doigts. » Sa voix murmurée le berce encore mais il lutte parce que les mots, eux, éveillent son esprit. Il ne comprend ce qu'elle n'aime pas là-dedans, il ne comprend pas parce qu'il pensait que c'était exactement ce qu'elle venait chercher entre ses bras. Pas l'histoire d'amour stéréotypée des comédies musicales, pas ça évidemment, mais la flamme, l'allumette, le claquement de doigts. « C'est la passion ça, la passion ça se consume, ça demande que ça, c'est ce qui est beau là-dedans non ? » Ou alors il n'a pas bien compris ce qu'elle voulait dire. « Tu préfères les histoires d'amour comme un brasier qu'on construit doucement et dont on entretient le feu pour qu'il tienne sur la durée ? » Il pense à un papier qu'il a aperçu dans un journal au travail ce matin, sur la célébration des soixante-dix ans de mariage d'un couple qui s'aime encore, et il comprend que ça puisse séduire mais Ronnie, non, il ne s'y attendait pas. « Moi qui comptais te dévorer toute crue. » Et il y a plus de vérité là-dedans qu'il ne peut l'admettre sans l'effrayer. Elle n'est pas farouche Ronnie, elle est téméraire, elle bouillonne de vie et surtout elle réclame la vie, un peu comme lui en somme seulement elle l'extériorise plus que lui, ou juste différemment. Elle n'est pas farouche, pas avec lui en tout cas, n'empêche qu'elle ne connaît pas sa part d'ombre aussi bien qu'elle semble parfois le croire, et il ne veut pas la faire détaler. Ce n'est pas qu'il veut lui faire du mal, pas du tout, ce qu'il veut d'elle exactement il n'arrive pas encore à le formuler. Il sait juste qu'il veut d'elle. C'est pour ça qu'il explore. Et quand il n'a pas les mots, il cherche la musique. La musique de ses reins quand il y glisse ses doigts trop froids maintenant pour la faire frissonner. La musique de ses lèvres qu'il vient embrasser. Et sa jambe qu'il enroule autour des siennes pour la rapprocher encore de lui.
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MessageSujet: Re: row row row your boat (Ronnicus)   row row row your boat (Ronnicus) EmptyMar 12 Sep - 23:43



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Aïe. Il a raison, Atticus, raison quand il dit que la passion ça se consume, raison quand il sous-entend que c’est beau. C’est vrai que c’est ce qui en fait toute sa splendeur, le fait de cramer comme une allumette et de s’évaporer dans les airs, faut juste pas regarder les restes calcinés qui font la gueule par terre. Il a raison et ça pique le cœur de Veronica parce qu’elle aimerait que ce soit faux, elle aimerait le garder encore un peu, elle aimerait se dire que ce qu’ils ont est plus profond. Mais il a raison. C’est pareil pour eux, totalement pareil, l’hédonisme à l’état pur, la jouissance puissante et brute, les morsures au creux du cou et les coups de rein quand la lune monte dans la ciel. C’est la même chose, bestialité en plus, tous crocs dehors et griffes sorties. C’est la même chose et elle aimerait que ce soit plus, que ce soit autre chose, que ça ait le piquant d’un amour dévastateur et la douceur d’une amitié solide, que ça ait un goût de samedi soir et de dimanche matin, qu’ils refusent d’ouvrir les yeux sans voir l’autre personne allongée sur le matelas à côté. Elle aimerait que ça soit davantage, que ça soit fort et cruel et tendre, que ça ait un goût d’au revoir et de toujours. Elle n’a pas le temps de lui dire parce qu’Atticus prend la poudre d’escampette, comme toujours, en se jetant sur elle comme un animal en rut, et elle se laisse faire, l’idiote, lui rend le baiser qu’il pose sur ses lèvres, les frissons secouant sa chair toute entière. Vas-y, achève-moi, crève-moi avec ta bouche, plante-moi avec tes dents. Resserre ta jambe sur les miennes, attire-moi à toi et aime-moi encore un peu. Soupir d’exaltation au fond de la gorge, elle se redresse un peu en prenant appui sur lui, glisse la main contre sa mâchoire et jusque sur sa nuque, aspire son souffle et lui insuffle le sien. Un prêté pour un rendu. « Titi », elle murmure, Titi et c’est affectueux, c’est doux, c’est tendre, c’est dégoulinant d’amour au possible, Titi et elle dévie de ses lèvres pour venir embrasser sa joue, le lobe de son oreille, sa peau à la naissance des cheveux, dans le creux du cou. Elle suffoque un instant en pensant aux autres, à celles qui baisent les mêmes endroits et sentent les mêmes odeurs, à celles qui doivent murmurer le même surnom et expirer les mêmes soupirs, celles qui jouissent entre ses mains quand elle n’est pas là. Elle aimerait le détester pour ça, mais elle fait la même chose, joue avec d’autres, s’attache et s’attire, elle et eux comme des aimants, comme des amants, comme beaucoup de choses qu’elle ne sera jamais avec Atticus, détachée, froide, violente, tout ce qu’elle ne veut pas faire subir à son ami. Mais la jalousie ne se contrôle pas, vraiment pas. Peut-être ressent-il la même chose lorsqu’il retrouve des affaires d’autres garçons quand il vient la voir chez elle ; peut-être pas. Elle ne le saura pas, n’osera jamais le demander. C’est ce qu’ils se sont dit, depuis la première fois : aucun compte à se rendre, aucune réponse à apporter. L’important, c’est qu’ils s’apprécient. L’important, c’est qu’elle l’aime, peut-être un peu trop.
Trop, parce qu’elle se laisse emporter par leur baiser, trop, parce que bientôt elle se relève, à califourchon sur son bas-ventre, et enlève son t-shirt, son soutien-gorge. Ils n’ont jamais été très subtils l’un envers l’autre, jamais trop réservés. Elle n’est pas pudique, Veronica, particulièrement quand il n’y a pas de raison de l’être. Il la connait par cœur, Atticus, ses grains de beauté, ses cicatrices, les bleus qui constellent ses bras, la faute au roller derby. Il connait la forme de ses seins, celle du creux au bas de ses reins. Elle se penche de nouveau, cueille ses lèvres, presse doucement son nez contre celui du grand brun, bisou esquimau, réminiscence de ses premières années, de la tendresse avec papa, maman, des câlins qui réchauffent le cœur. « T’as raison, la passion a parfois du bon », murmure frappé contre la bouche du jeune-homme qu’elle contemple presque pieusement, comme on regarderait le ciel dans l’espoir d’y trouver Dieu. « Mais ça veut aussi dire qu’un jour, on ne s’aimera plus. » C’est un constat, simple, tendre, soufflé comme quelque chose qu’elle oserait à peine confesser, quelque chose dont elle a peur, dont elle a honte. Elle sait qu’il n’y a pas qu’elle pour Atticus, et réciproquement. Elle sait qu’il y a Abel qui lui pourrit le cœur, Lars qui la touche profondément. Mais elle sait aussi que pour le moment, seul Atticus a accès à son âme, à elle toute entière, à ses faiblesses comme à ses forces, à ses défauts et ses plus grands atouts. Seul Atticus lui remue les émotions de cette manière, et c’est une passion dont elle craint de voir trop rapidement la fin.

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MessageSujet: Re: row row row your boat (Ronnicus)   row row row your boat (Ronnicus) EmptyMar 3 Oct - 16:39

Il n'y peut rien, il a toujours adoré les fins. Il adore les débuts aussi, les débuts et les fins. Il aime la saveur des commencements, ils ont quelque chose de doux et d'épicé, c'est le goût de la nouveauté et des promesses, des surprises qui n'en finissent pas de raviver un feu toujours brûlant au risque de tout embraser, de tout réduire à néant avant même qu'il ait eu le temps de se lasser. Il aime ce risque-là, il aime la douleur des fins brutales, des fins qu'on n'a pas vues venir, il aime le serrement de son cœur quand plus tard il s'égare dans sa mémoire, la réouverture d'une plaie mal soignée, la mélancolie de la nostalgie et des regrets. Il aime le goût des et si... Et si cette fois il n'avait pas tout saccagé ? La fin c'est souvent amer mais il a toujours aimé l'amertume, Atticus, même gamin. Il a du mal à apprécier le milieu, le juste-milieu ou juste le milieu, peu importe, ce n'est pas pour lui ces périodes d'accalmie, cet équilibre qui devient si simple à trouver qu'on peut croire qu'il durera l'éternité. L'éternité c'est toujours une illusion et ça ne fonctionne jamais longtemps avec lui. C'est comme s'il vivait sa vie en pente raide, comme si tout débutait toujours au bord d'un précipice, déjà sur le point d'y basculer. Et lui, tout ce qu'il sait faire, c'est donner la poussée nécessaire pour que tout aille s'écraser au fond du gouffre, de préférence dans le plus grand des fracas. Il est déjà tenté de le faire avec Veronica. Pourtant il l'aime, il l'aime quand elle s'enflamme, quand elle réagit au quart de tour, qu'elle envoie valser son tee shirt dès que ses doigts effleurent la peau de son dos comme sous une impulsion électrique, comme par réflexe. Il l'aime encore quand elle passe à la tendresse presque enfantine du bisou esquimau et qu'elle brave sa gêne pour lui dire ce qu'elle a sur le cœur.

« T’as raison, la passion a parfois du bon. Mais ça veut aussi dire qu’un jour, on ne s’aimera plus. » Il tâche de garder ses prunelles fixées sur le regard grave de Ronnie, les empêche de dériver plus bas sur sa peau de miel et la rondeur de ses seins. Il est à sa merci, allongé sous elle, encore à demi endormi, mais elle lui paraît bien plus vulnérable. Pas à cause de sa nudité, l'idée ne l'effleurerait même pas, non, ce sont ses mots, c'est le ton de sa voix. C'est comme si elle lui ouvrait encore un peu plus son âme et il n'a plus qu'à y plonger les dents. Un peu plus et elle réveillerait cet instinct bestial et destructeur qui attend son heure tapi dans l'ombre de son cœur. Calme-toi la bête, j'ai pas envie de la blesser. « Faut pas penser comme ça, Ronnie. Enfin, c'est vrai, sûrement, mais pourquoi ça devrait être triste ? » Un doux sourire étire ses lèvres. « J'aime bien t'entendre dire qu'on s'aime. » Comme si c'était une évidence pour tous les deux, sans qu'il ait à le lui dire. Parce que c'est ce qu'elle sous-entend quand elle dit qu'un jour ils ne s'aimeront plus. Il fait semblant d'ignorer la peur dans sa voix, il fait semblant de ne pas lui avoir fait mal en confirmant sa crainte. Pourquoi est-il toujours cruel envers ceux qu'il aime ? Même Nemo.

Mais c'est vrai et il n'y a rien à faire, il finira par tout gâcher, peut-être qu'il la videra de toute cette énergie amoureuse dont elle déborde et dont elle le laisse s'imprégner, lui et d'autres d'ailleurs, il lui semble bien. Il aime ça chez elle, il aime qu'elle distribue son cœur comme si elle pouvait le fragmenter à sa guise, comme si en le donnant ça et là elle pouvait aimer plus, être aimée encore plus fort. Il aime ça sans réaliser que c'est un peu ce qu'il fait aussi. Atticus, il prétend ne pas croire au grand amour et en même temps il le cherche sans relâche, pas foutu de le reconnaître quand il le regarde droit dans les yeux parce que ce n'est jamais assez, parce que ça ne fera pas assez mal, parce que ça fera trop mal, parce que la dernière fois qu'il y a cru la chute a failli être fatale. Il n'est pas prêt pour un nouveau saut de l'ange. Il n'attend que ça. Tout à la fois. Il est peut-être là son problème, il veut tout à la fois, le début et la fin. Mais c'est pas le moment pour ces considérations-là. Y a Ronnie torse-nu à califourchon sur lui, ses mains qui le démangent et une tension dans son bas-ventre.

Il l'attrape par la taille et la pousse en peu vers l'arrière pour se redresser sous elle. Il vient embrasser son épaule, fait un détour par son décolleté et remonte mordiller son oreille. « C'est vrai que je t'aime, tu sais ? » En ce moment, aujourd'hui, surtout juste maintenant. « Viens dans la chambre, j'ai pas ce qui faut ici. » Il n'a pas toujours été très sérieux pour ce qui est de se protéger, Atticus, mais il est plus attentif maintenant qu'il y a Reid dans sa vie. Par contre on repassera pour la délicatesse.
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MessageSujet: Re: row row row your boat (Ronnicus)   row row row your boat (Ronnicus) EmptyJeu 5 Oct - 20:21



Atticus & Ronnie
gently down the stream
©️ creditimage|tumblr  


Ce qui est difficile avec quelqu’un comme Atticus, c’est qu’on ne sait jamais à quoi s’attendre. Il est insaisissable, oiseau sur la branche, menace de s’envoler si on approche trop, de chier sur la voiture juste en-dessous, ou juste de pousser la chansonnette, histoire de montrer ses cordes vocales, de crâner un peu. Elle connait un peu trop ses mimiques, Ronnie, la façon qu’il a de planter son regard dans le sien pour ne pas avoir l’air de trop mater sa poitrine, l’air qu’il prend lorsqu’il lui dit que ce n’est pas triste alors que si, ça l’est. Tout ce qui s’arrête un jour est triste, l’amitié comme l’amour, c’est juste des tristesses différentes, certaines qui nous mettent à nu et d’autres qui nous frôlent sans vraiment nous égratigner, sans le faire trop en profondeur. Mais c’est toujours triste, les fins, y a toujours un fond de nostalgie, un bout de regret, un soupçon d’amertume. Y a toujours le mal dans le bide, la peur de sauter de nouveau dans le vide, de s’exploser encore la tête contre les rochers. Quand on perd un ami, c’est très difficile, difficile de s’ouvrir une nouvelle fois, d’accorder sa confiance, de ne pas douter de l’autre, de le laisser entrer totalement dans sa vie. Quand on perd un amour, est-ce qu’on s’en relève vraiment ? Est-ce qu’on parvient à se foutre de nouveau à poil devant quelqu’un, à dire qu’on l’aime, à l’embrasser sans se demander si on ne va pas être repoussé ? Est-ce qu’on commet de nouveau la même erreur, celle de se dévoiler totalement et sans cache-misère, celle d’ouvrir son cœur et ses secrets ? Elle pense pas, Ronnie. Elle pense pas parce qu’elle a vu suffisamment d’histoires se terminer dans les pleurs, dans le sang, dans l’horreur, elle pense pas parce que sa mère lui a montré à quel point perdre l’être aimé peut vous rendre misérable, et elle ne veut pas que ça lui arrive. C’est peut-être pour ça qu’elle a un sursaut, un mouvement de recul, quand Atticus lui dit qu’il l’aime. Quand il le répète. Putain non. [/i]Putain pas toi, pas à voix haute, pas comme ça. Ouais, elle est stupide, parce que c’est réciproque, [i]évidemment que c’est réciproque, qu’elle est dingue de lui, plus qu’elle ne l’avoue, évidemment qu’elle voudrait lui renvoyer la balle. Et évidemment que les mots se coincent dans sa gorge au moment de les prononcer. Elle sourit, pince ses lèvres, laisse ses doigts caresser Atticus, l’arête de sa mâchoire, sa nuque, les endroits qu’elle aime le plus embrasser, les endroits qu’elle n’embrassera bientôt plus. Et puis elle s’arrête net, perd lentement son sourire, parce qu’il parle de nouveau et qu’il vient de l’assassiner.
Elle ne devrait pas lui en vouloir. Elle aussi couche avec d’autres personnes, elle non plus n’aime pas l’exclusivité. Ça n’a jamais été son fort. Pas qu’elle n’aime pas être fidèle, non, c’est plutôt une notion qui lui est plaisante, celle de trouver quelqu’un avec qui on se sent suffisamment bien pour se contenter de cette seule et unique personne. Elle ne devrait pas lui en tenir rigueur, lui en vouloir, lui faire la gueule, mais ses lèvres se sont refermées sur ses dents, mais ses yeux lancent des éclairs. « Tu peux pas dire ça. » Elle souffle, elle expire, elle a du mal à voir clair et a une sacrée envie de pleurer, de dégueuler, de péter tout son mobilier. Elle fait rien de tout ça, pourtant. Elle garde ses mains sur lui, le touche trop délicatement alors qu’il vient de sous-entendre qu’il était bourré d’MST. Y aura toujours cette tendresse avec lui, même quand elle a envie de l’étrangler, de le dépecer et de se faire un manteau avec son épiderme. « Tu peux pas me lâcher que tu m’aimes et me dire juste après qu’on peut plus faire l’amour sans capotes parce que t’as la bite dégueulasse. » C’est dit de manière trop crue, elle se surprend elle-même, les mots refont le tour dans sa tête et elle en rigolerait presque si elle avait pas autant envie de pleurer. Elle s’en fout qu’il baise d’autres personnes. Elle s’en fout. Pas du tout, mais elle fait comme si. Elle s’en fout. Ce sont les mots qui la blessent, les confessions inopportunes, les déclarations qui n’ont pas lieu d’être. « Tu couches avec qui tu veux, Titi. Je serais mal placée pour te faire la morale. Mais tu m’dis pas que tu m’aimes. Quand j’dis qu’on s’aime, j’pense pas qu’on s’aime. J’veux pas le penser. J’veux pas avoir mal. » Elle veut pas finir comme son père, avec une balle dans la tête. Elle veut pas non plus finir comme sa mère, avec des gosses à moitié dépressifs et un mec qui entasse ses affaires de beauf un peu partout dans la maison. Elle veut pas finir comme trop de nanas, qu’espèrent encore que le prince charmant existe. Elle veut pas finir comme Maria dans West Side Story. « On va dans ta chambre », dernier soupir, histoire de clore la conversation. Elle se lève et parcourt les quelques mètres qui les séparent du lit, en espérant très fort qu’il ne la voit pas trembler.

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