crashtration ▹ posts envoyés : 1304 ▹ points : 32 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (avatar) & tumblr (profil) & solosands/vovicus (icones) ▹ avatar : matt gordon ▹ signe particulier : look un peu décalé, tatouages éparpillés, sourirs pondérés et un accent londonien terrible qui vient appuyer un phrasé peu compréhensible.
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| Sujet: cœur éponge. (pire st valentin) Mar 13 Fév - 10:12 | |
| — Applique toi bon sang ! Dieu t'a donné des doigts, alors essaies de t'en servir correctement. La claque qui vole derrière ma tête et je me crispe un peu plus sur mon siège, les larmes aux yeux. Je renifle et lutte pour ne pas me laisser aller. Je secoue légèrement mes mains pour essayer de les détendre et je me remets à appuyer sur les touches du piano, priant pour ne pas faire de fausse note cette fois. Que le rythme soit parfait. Que mon père soit satisfait. Ça fait plus de quatre heures qu'il me fait répéter le même morceau et je n'en peux plus. Je tremble un peu, mon doigt qui ripe sur la touche d'à côté et déjà il explose de colère. — Abraham ! Foutu bon à rien ! Cette fois, je n'y échapperais pas je le sais déjà. Je le sens, au plus profond de mes tripes. Et ça ne rate pas. Sa main qui m'agrippe et m'oblige à me lever, qui me traine dans la pièce d'à côté. La pièce des horreurs qu'on l'appelle avec Michael. Je chouine, je supplie. Et si Micha était encore là, je sais qu'il serait venu tenter quelque chose pour m'épargner tout ça. Mais il n'est plus là, partit depuis un an déjà. Le quotidien vidé de sens et l'impression de n'être plus qu'une ombre. Je ne cherche même pas à lutter lorsqu'il retire mon t-shirt et que je me retrouve à genoux à ses pieds, je connais la danse. La ceinture qui claque, entrecoupant la prière que mon père récite en latin. Je la connais par cœur cette foutue prière. Il demande à dieu d'avoir pitié de mon âme, de m'excuser de ne pas être à la hauteur de ses attentes. Lorsque tout s'arrête, c'est comme un silence assourdissant. Le calme après la guerre. Je tremble de la tête à pied, la douleur s'est diffusée de chaque parcelle de ma peau, le dos ruisselant, de sueur et d'un peu de sang. Il me relève et revient m'asseoir de force devant le piano. Le calvaire dure encore une heure avant qu'il finisse par être satisfait et me laisse le champ libre. Je fonce dans la salle-de-bain et me tord pour constater les dégâts. Je ferme les yeux quelques secondes, dépité. Mais pas le temps de s'attarder. Le désinfectant que j'attrape et que je verse un peu à l'aveugle dans mon dos, les gémissements que j'étouffe, dent serrées, si fort que j'ai l'impression qu'elles vont toutes péter. Après une vingtaine de minutes de soins approximatifs et une bonne dizaine de larmes échappées, je regagne ma chambre pour aller me changer. Je surveille l'heure, ne voulant surtout pas être en retard. Je ne pense qu'à ça depuis ce matin. Je me raccroche à mon rencard avec Elizabeth. C'est la plus jolie fille de l'école dans laquelle je vais et je n'en reviens toujours pas d'avoir eu le courage d'aller lui demander de sortir avec moi pour la Saint Valentin. Je crois que j'en reviens encore moins qu'elle ait accepté - non sans avoir un peu hésité. Jean noir et chemise blanche, je fais ça bien. Je récupère l'argent économisé et je quitte la maison à la hâte, pas mécontent de pouvoir m'en éloigner pour toute une soirée. J'achète un énorme bouquet de roses en passant devant chez le fleuriste et je file au restaurant dans lequel j'ai réservé une table. Je suis le premier arrivé et je vais m'installer à la table, déposant ma veste sur le dossier de la chaise, mon dos qui ne la touche pas - il est bien trop douloureux. Je grimace un peu et prend sur moi pour oublier la tension lancinante qui me ravage. Je ne laisserais rien gâcher ce moment, rien. Je vois les employés du restaurant et les gens des tables autour me lancer des petits regards tendres et amusés. Faut dire que je suis le plus jeune de la salle et je réponds à leur sourire, pas peu fier. Les minutes tournent, les mains moites d'appréhension et le cœur battant. Quand je la vois enfin apparaitre je lâche un soupire de soulagement. Je me lève à la hâte, bouquet en main et sourire resplendissant. Mais il se dissipe bien vite lorsque je vois son troupeau d'amis avec elle. Je fronce doucement les sourcils, perplexe. Et quand ils me voient, c'est le fou-rire général. — Putain, regarde Lizbeth, il a tout donné. Je reste dubitatif devant leur hilarité à l'arrière goût dévastateur. La moquerie évidente que je ne comprends pas. Les téléphones qu'ils sortent et je les vois me mitrailler de photos. Je n'ai toujours pas dis un mot, perdu. — Je vous l'avait dit qu'il achèterait des roses. Tu me dois vingt balles Kathie. Je la dévisage, figé. Y a tout qui s'écroule autour de moi. L'humiliation cuisante alors que je comprends. Tout ça n'était qu'un jeu, une putain de blague. Et ils repartent comme ils sont venus, me laissant seul devant les regards effarés des gens. Mon bras retombe le long de mon corps, les épines des roses qui grattent contre mon pantalon. Je fixe le vide devant moi, sans plus savoir quoi faire. Personne n'ose rien dire, c'est le silence absolu dans la salle. Jusqu'à ce qu'une des serveuses s'approche, posant une main sur mon épaule, son regard rivé dans mon dos. — Monsieur, ça va .. ? Monsieur, vous saignez. Cœur déchu et chemise foutue. |
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