Sujet: Try to do what lovers do {Meram} Lun 11 Sep - 4:41
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Sujet: Re: Try to do what lovers do {Meram} Lun 18 Sep - 14:54
T'as déjà tout vu, tout entendu, t'as rencontré toutes sortes de gens : les bons, les moins bons, les carrément mauvais, les propres sur eux et ceux qui baignent dans le sale, un peu comme toi. Le Troisième Œil, c'est ton repère, et c'est aussi depuis que t'es là que tu rencontres des personnes d'autres horizons : les croyants, les perchés, les sorciers, et les midinettes qui couinent devant les cristaux de Diamond. A la cave en revanche, t'as plutôt droit aux gars plus ou moins baraques, plus ou moins gangrenés par ton milieu. Des mecs comme toi, des mecs comme Ken, et les friqués. Genre Vilhjálmsson; typiquement le genre de mec qui sort jamais sans avoir enfilé une chemise et passé un coup de peigne dans sa tignasse. Ce même genre de type pour qui les cheveux gris paraissent plutôt d'un argent délicat - t'apprendrais même que ses dents étaient fausses que ça t'étonnerait pas tant que ça. Bref, un gars aux antipodes de ta petite personne.
Ça fait déjà quelques années qu'il vient te voir, ou que tu vas le voir, on s'en fout, ça revient au même. Mais voilà, c'est un gros client. Le genre de client qui peut te rapporter autant - voire plus - avec sa bécane de collection que ce que tu peux te faire avec ta meth. Une poule aux œufs d'or. Un poulet. Ou un coq, qu'importe. Et cette semaine justement, il t'a contacté, comme il le fait souvent, pour des questions d'entretien, tout bêtement; parce que son genre de bécane c'est un peu le Freddy Mercury de toutes les bécanes, elle en jette, elle vaut de l'or, et elle a soif d'amour. Amour qu'évidemment tu lui apportes régulièrement, en échange de quelques liasses. Fut un temps, c'était sa gamine qui jouait les pigeons voyageurs. Insupportable. Elle pouvait pas s'empêcher de mettre ses doigts humides partout, de semer ses papiers collants sur ton bureau, de faire la moue à chacune de ses phrases mielleuses. Et dit comme ça, on pourrait bien s'imaginer une enfant en bas âge, un bambin, ce genre de petites choses aussi mignonnes qu’exécrables... seulement Medbh avait déjà passé l'âge de l'adolescence depuis quelques années. Heureusement pour toi, ça faisait pas mal de temps qu'elle avait laissé le flambeau à son père. Peut-être qu'un type moins patient que toi l'avait buté à coups de pelle, qui sait ? Hormis le décès, ça aurait pu lui remettre les neurones en place...
Mais tu savais qu'il fallait pas parler de malheur - surtout à propos des nanas, même si elles étaient aussi chiantes que Gengis - parce que le karma était une chose à laquelle tu avais encore du mal à t'habituer, malgré ton passif de taulard. Et aujourd'hui, là, tout de suite, maintenant... le karma frappait le sol de la cave dans un écho effroyable. « Bonjour tonton Ab ! » Non. PKLAVI. C'est pas juste. Elle n'a pas le droit. Tu plisses les yeux, tentant vainement de rembobiner tes pensées morbides, de la rembobiner elle, afin qu'elle n'apparaisse pas dans ton champs de vision, mais c'est déjà trop tard et la voilà qui s'avance, elle et ses effluves fruitées. Tu ne lui offres pas un regard, trop occupé à bidouiller le moteur d'un autre client, lâchant à peine un grognement de salutations. « Hrmpf... 'lut. » Mais évidemment, la gamine en veut toujours plus et elle s'approche, te collant un baiser sucré contre la joue, dans les poils de ta barbe, et tes narines se dilatent d'agacement. « Ça faisait très longtemps que je n’étais pas venu ici… ça fait plaisir de voir que tu n’as rien changé. La décoration, c’est très changeant après tout. » Gneugneugneu... Tes muscles se tendent légèrement, mais t'as l'droit de rien dire. Parce que si tu la vexe elle, tu vexera aussi papa par extension. Quelle idée pour le coq d'avoir une poussinnette. Et quelle idée d'avoir les cheveux d'une couleur aussi criarde. « Comment vas-tu ? Je t’ai manqué, tonton Ab ? » Cette fois tu expires vivement, un rictus se peignant au coin de tes lèvres. Comme si tu n'avais pas remarqué que ses « seins » pointaient droit dans ta direction. « C'est Chief. Et ça allait, jusqu'à maintenant. » Tu hausses les sourcils et tes paupières se ferment. Mon dieu, rangez-moi ces piqûres d'insecte. C'est indécent.
Si sa présence suffit à t'agacer, tu te tournes pour ne plus avoir à croiser sa mine bien trop joyeuse. Tes mains trouvent clés et chiffons, les bruits du métal couvrent le son de sa voix, mais même le fer ne peut rien contre l'odeur d'orange qui émane de sa langue. Sourcils froncés, tu retrouves ses prunelles brillantes. Curieux. « Qu'est-ce que tu viens foutre ici ? » Sous-entendu : T'es revenue d'entre les morts après les coups de pelle ou comment ça se passe ? Parce que oui, t'as bien vu l'enveloppe entre ses mains, t'as bien compris qu'c'était jour de paye. Mais c'que tu comprends pas, c'est la raison pour laquelle elle a disparu, la raison pour laquelle elle revient. Pas que ça t'intéresse vraiment, mais t'aurais préféré qu'elle cède définitivement sa place à son père; dont les connaissances en bidouillage auraient au moins suffit à nourrir une réelle conversation entre adultes. Il avait beau te payer pour prendre soin de sa monture, les frais de baby-sitting n'étaient pas compris dans la petite cagnotte que tu te faisais mensuellement. « Ça t'a pris tout c'temps pour aller soigner tes caries ? » Question qui n'en était pas vraiment une. On appelle ça de la rhétorique, il paraît. Parce que quitte à devoir supporter ses élans d'affection, autant la faire chier un tout petit peu. Histoire qu'elle se redresse, ou qu'elle enfile un sweat, déjà.