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 resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)

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MessageSujet: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyJeu 20 Juil - 11:03

Morphée n’est pas un homme facile. Morphée c’est des je t’aime moi non plus. Prends garde à toi, tu ne l’aimes pas il t’aime. Si tu l’aimes tu peux l’appeler en vain. Il fuit, s’envole, revient au galop et les pauvres humains se courbent à ses pieds, craignant de devenir fous. Tu ne l’es pas encore dis-moi ? Pas tout à fait je crois, tu déambules dans les labyrinthes de la nuit, pensées noires, réflexions redondantes, logiques insensées… Allongé sur un matelas dans une chambre vide, les plantes ondulant au rythme de la brise qui passe par les carreaux entrouverts, tu fermes puis ouvres les paupières. Tu vois à peine la différence. C’est un noir parsemé de couleurs dans tous les cas. Des couleurs fades. Ta respiration te semble emplir la pièce tant le silence est lourd, le son devient trop fort pour le supporter en silence, il faut courir pour remplacer tes poumons par ton cœur effréné, ou bien mettre la musique à fond et secouer la tête. Inspiration, expiration, c’est si monotone, ça te tuera plus sûrement que l’insomnie tu crois. C’est rare que l’oiseau rebelle du sommeil t’échappe, à toi qui te love presque toujours dans ses bras sans problème, surtout après avoir travaillé tardivement. Que faire ? Manger ? Pas faim. Musculation ? Trop de bruit, tu réveillerais les gamins, enfin ceux qui sont là et dorment. Aller courir ? Pourquoi pas, mais l’idée te déprime. Tout ce que tu veux toi c’est pouvoir dormir, ton corps t’en supplie. Sauf que quelqu’un, quelque part là-haut, en a décidé autrement. Putain de forces supérieures de l’univers, elles ont vraiment rien de mieux à faire qu’emmerder les pauvres gens ? Je t’en foutrai des autels à leur gloire. Tu te redresses, passes des mains calleuses sur tes cernes. Paquet de Lucky Strike sur la table de chevet, t’en accroches une au coin de tes lèvres, en te disant comme à chaque fois que t’en voudrais bien un de coup de chance. La flamme du briquet semble changer entièrement l’endroit dans le temps qu’elle éclaire. Un instant la nuit prend un air mystique avant de retourner à la froide réalité. C’est bien ça qui a tué la petite fille aux allumettes. Inspiration, expiration, c’est moins intolérable lorsqu’il s’agit de remplir tes alvéoles de poison. Une minute ou deux peut-être tu restes comme ça assis dans le noir sur les draps défaits. Il fait trop chaud, c’est sans doute ça le problème, c’est étouffant. Il te semble entendre des pas léger dans le salon. Les adolescents vont et viennent quelle que soit l’heure, tu n’esquisses pas un mouvement. Le mégot vient s’écraser dans le cendrier au milieu de ses congénères. Tu fumes trop mais tu as bien compris de toute façon que tu mourrais jeune. Pas suffisamment jeune pour avoir ce côté fatalement romantique, juste trop jeune pour avoir bien vécu. Alors, cancer ou autre chose, qu’est-ce qu’on peut bien en avoir à foutre ? Tu essaies de te rallonger, de rejoindre cet amant indécis qu'est le repos. Tes iris parcourent le plafond sans y distinguer aucun détail dans la pénombre, même pas un insecte. Les minutes passent lentement, les aiguilles de l’horloge ont ralenti. Comme une envie de crier d’impuissance, toujours la même impression quand on a des choses à faire et qu’on n’arrive pas à s’assoupir. Demain tu auras une tronche de déchet et tu ne te sentiras pas bien mieux. Un côté, l’autre côté, le ventre, le dos, un drap, pas de drap, une jambe en dehors du drap peut-être ? Toujours pas. Putain.

Tu te rends compte qu’hors de la pièce tu n’as pas entendu les pas retourner à leur chambre. Qui est dans le salon et qu’est-ce qu’il fout ? Il n’y a pas de rai de lumière sous ta porte, donc ce n’est pas la télé. Heureusement parce que tu leur interdis formellement de l’utiliser la nuit. Sauf que si ce n’est pas la télé tu ne vois pas bien ce que ça peut être. Merle c’est souvent dans la baignoire qu’il dort ce fou pas sur le canapé, comme à la fin d’une soirée qui carbure aux drogues. Un soupir ébranle ta poitrine. Pour être honnête cependant, tu es presque satisfait. Cela te donne une occasion de faire quelque chose, de ne pas rester là dans l’ennui et la frustration. Tu campes les pieds sur le sol sans te presser. Enfiler un pantalon te prend presque une minute entière tant tu te traînes, quant à un t-shirt tu n’y penses même pas. Pas besoin de haut pour engueuler quelqu’un. Lorsque tu appuies sur l’interrupteur la lumière t’aveugle un instant. Finalement les couleurs fades sous les paupières ce n’est pas si mal, ça ne s’apparente au moins pas à une agression. La porte de la chambre se découpe comme un carré de soleil illuminant le salon lorsque tu l’ouvres. Est-ce que tu es la lueur au bout du tunnel, la silhouette qui se découpe du paradis ? Toi je ne sais pas mais de toute évidence ton ampoule oui. Personne n’est assis là où ne déambule alors tu fais le tour du canapé. Dessus, une silhouette recroquevillée. Tes prunelles font la mise au point pour s’habituer au contre-jour avant que tu puisses la distinguer. C’est ta Wendy. La blondinette si pure que si ici quelqu’un peut arriver à s’envoler c’est bien elle. Elle n’a rien à faire là. Cela fait une semaine qu’elle joue les fantômes, disparaît puis revient en catimini, essayant de se dérober à ton regard. Et maintenant elle dort sur le canapé, semblant trembler encore de ses terreurs nocturnes. Rien ne va plus dans ce monde, même les âmes innocentes croient sous le poids des horreurs. D’habitude lorsque la peur la prend c’est dans ton lit qu’elle vient se glisser pour ne pas avoir l’impression de dormir seule. C’est un chat cette gamine, toujours à chercher la chaleur. Ce sont les chats blessés qui se terrent, trop apeurés pour se montrer même à ceux qu’ils connaissent. Alors que lui est-il arrivé à la petite Jael ? Tu t’accroupis et poses ta main sur son épaule. « Hey. Hey. What’s wrong ? What the hell are you doing here ? You should be in bed. Whichever bed I don’t give a fuck but not the couch. » « Hé. Hé. Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce que tu fous là ? Tu devrais être au lit. N’importe quel lit, j’en ai rien à carrer, mais pas sur le canapé. »


Dernière édition par Peadar Brannigan le Ven 21 Juil - 17:44, édité 1 fois
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Jael Feliciano

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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyJeu 20 Juil - 17:20

J’arrive pas à dormir. C’est pas nouveau, comme une vieille habitude qui revient après tout ce temps. Salut l’insomnie, ça va ? Tu m’avais manqué, un peu. Non c’est pas vrai. Je mens même à mes pensées je crois que j’ai atteins un nouveau sommet.
Ca tourne dans mon crâne, un peu trop, encore encore, les mots et les idées, comme un essaim d’abeille qui refuse de se calmer. Tais toi mon cerveau, j’ai besoin de repos. Mais dès que je ferme les yeux y a tout qui se mélange, y a la douceur et la violence, y a le chaud et le froid, y a trop de têtes, trop de cœurs, et ça m’oppresse. Terriblement. Y a plus les cailloux dans mes poches, ils sont éparpillés sur le sol du cagibi où je me suis retrouvée enfermée avec lui. Je fais comment pour compter maintenant ? C’est plus pareil. Ca sera plus jamais pareil. Le goût amer du whisky mélangé à la fumée, ses doigts, les griffes et la douleur. Fais chier. J’ai la nausée, effet secondaire des médicaments que j’ai chipé à je sais plus trop qui. Parait que ça permet de calmer les douleurs modérées à intenses, même si la mienne dépasse cette échelle. Dramatique Jael, putain de dramatique. Un peu plus et je pourrais intégrer la caste des artistes maudits. Pourtant j’ai vraiment mal et rien au monde ne pourra atténuer ça.
J’enfoui mon nez dans la fourrure d’Al. Le petit rat se met à bouger avant de m’échapper pour venir se nicher à son tour dans mon cou. Il est bien Al. Parfait, honnête, loyal. J’aimerais que le reste du monde soit comme ça. Un monde utopiste fait de rats. Y aurait moins de tristesse surement. Moins de gens poisons et le venin qui suinte de leurs sourires. C’est pas possible. Rageuse je repousse ma couverture, ça sert à quoi de transpirer et d’étouffer ? De tourner en rond encore et encore alors que je sais pertinemment que le sommeil ne viendra pas ? J’attrape Al, enfile un t-shirt et me faufile hors de la chambre, prenant soin à ne pas réveiller Nibs. Lily elle est pas là aujourd’hui, sans doute chez un gars, un de ceux qui lui filent les cachets qui lui bouffent les neurones. Comme si c’était à moi de juger.

Il fait nuit noire dans l’appartement, juste un peu de lumière provenant de la rue qui filtre par les fenêtres. J’ai toujours détesté la nuit. Trop sombre, trop solitaire. Pour ça que j’ai qu’une envie c’est de courir jusqu’à sa chambre, faire comme avant, me glisser sous les draps pour venir me pelotonner comme un chat. Mais c’est plus comme avant pas vrai ? Ca ne sera jamais plus comme avant. Y a trop de choses qui se bousculent maintenant, y a les sentiments et la réalité. Y a la réalisation. T’es grande Jael, arrête de faire l’enfant, et j’entends clairement mon père me le rappeler à chaque fois que je finissais en larme pendant la nuit, effrayé par les ombres qui se dessinaient par les murs. C’est encore le cas aujourd’hui sauf que les ombres ont des formes humaines et des noms, elles ont des consistances, des regards et des saveurs, le genre d’acidité qui colle à la langue et qui me fait frissonner.
Je fais le tour du salon une fois, deux fois, hésitante, le regard rivé sur sa porte fermée. J’entre ? Je n’entre pas ? Je sais pas. Je sais plus. J’ai cette voix au fond de moi qui gueule vas y mais y a la raison qui prend le dessus. Il pensera quoi Peadar si j’arrivais comme ça ? La gueule encore cassée, les bleus à peine effacés et les griffures qui se fondent avec ma peau ? Il pensera quoi si je lui racontais ? Si je lui racontais Seven et ses baisers, Seven et ses coups, Seven et sa haine ? Il pensera quoi si je lui racontais Asher ? La douleur du rejet, celui qui va dans les deux sens. Et puis il pensera quoi si je lui racontais Merle ? Je croire que ça sera un peu trop. Beaucoup trop. Et j’ai honte.
Le canapé qui m’accueille, je m’y laisse tomber par dépit les yeux qui se ferment pour éviter de voir le plafond qui tangue. J’essaye de respirer, et ça va un peu mieux. Juste un peu. Moins oppressée par la chambre, par les quatre murs et la respiration de Nibs. J’me laisse dériver, le médicament qui fait effet sans doute ou ptêtre juste l’épuisement complet qu’à raison de moi. Je sais pas combien de temps j’oscille entre le sommeil et l’éveil, un peu entre les deux, une sorte de voyage dans les Limbes. Puis je sombre. Définitivement.

C’est le genre de sommeil sans sommeil, les rêves qui se déforment et les illusions qui semblent trop vraies. C’est le genre de sommeil où le cœur bat trop fort, où les larmes coulent parce que c’est trop réel. Sortez moi de là que j’aimerais hurler, mais le subconscient qu’est plus fort, qui me laisse pas relever la tête, sortir de l’eau pour respirer. Coule Jael, coule. Ça sera mieux comme ça. Alors c’est ce que je fais. Je me laisse couler, garde l’air dans mes poumons et tombe vers le fond.
Noir.
Blanc.
Sursaut.
Hey. Hey. What’s wrong ? What the hell are you doing here ? You should be in bed. Whichever bed I don’t give a fuck but not the couch. Contact. Je me redresse, j’échappe aux doigts, prête à hurler ou à mordre pour me défendre. Laisse-moi. Me touche pas. Et la nausée qui revient sans attendre. Compte les cailloux Jael ou juste les battements du cœur, respire, respire. Je réapprend à aspirer de l’air, à le recracher, à fermer et ouvrir les yeux. J’laisse un peu la crise passer, toujours balancée entre rêve et réalité. Puis finalement ça me frappe. Les mots repassent dans ma tête, sa voix, et son visage qui se dessine enfin devant mes yeux. Merde. Je reste un instant là, stupide, la honte d’avoir réagi comme une biche paniquée, presque prête à ruer pour me défendre. « Tu m’as fais peur »  chuchotement, comme un secret entre lui et moi, je baisse la tête un peu honteuse. Ca fait longtemps. Combien de temps déjà ? Plus d’une semaine je crois qu’on a pas vraiment parlé, et moi qui danse quand il tourne le dos, pour éviter d’avoir à me justifier. D’avoir à le décevoir. Encore. Encore. Encore.  « Nibs ronfle »   c’est faux. Terriblement faux. Mais je sais pas quoi dire d’autre, stupide gamine qui se recroqueville sur son coin de canapé. J’ai les mains qui brûlent, qui me démange, l’envie de me glisser jusqu’à lui pour quémander un peu de tendresse, juste une dose pour apaiser le tout. Mais je peux pas. J’ai pas le droit. « Pardon j’me suis endormie sans m’en rendre compte, j’étais juste partie faire un tour et puis faut croire que le canapé est vraiment plus confortable qu’on ne le pense »   encore un mensonge, et les ressorts qui me cisaillent le dos, mais c’est pas grave. C’est moins grave que le vrai. Que la foutue vérité.
Je me redresse d’un bond tire un peu mon t-shirt vers le bas, ajuste mon short comme si ça avait une quelconque importance, avant de faire quelques pas. « Je vais retourner dormir, encore désolé »   et ptêtre que ça passera cette fois.
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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyVen 21 Juil - 18:29

C’est marrant, quand tu étais gamin et que tu faisais les quatre cent coups avec les cadets, tu avais toujours l’impression que la rue c’était ton empire. Tu y prenais refuge dès que tu le pouvais, vous vous soustrayiez à l’autorité de votre mère sous la clarté de la lune et vous étiez ces groupes d’enfants désœuvrés qui effarent les adultes bien-pensants. Des fois vous descendiez même jusqu’au centre-ville, vous faufilant entre les dealeurs et les ivrognes qui n’auraient fait de vous qu’une bouchée. Assis au bord de la Liffey, les pieds balançant dans le vide, à enquiller des cannettes de Dutch Gold. Vous ne laissiez que les fonds à la petite dernière, elle était vraiment trop jeune, et puis c’était une fille, les filles on les fait commencer à boire à douze ans pas six. Rois de pacotille que vous étiez, une couronne d’audace et une cape de vent, pas besoin de plus pour être souverain. Parfois, seul, tu parcourais ces rues et ruelles aux heures des sorcières, la tête haute, le regard effronté des enfants perdus fixant ceux qui avaient l’idée de t’observer plus d’une seconde. Ce royaume tu l’as bien abandonné lorsque tu t’es retrouvé sans rien de plus que le bitume et un pauvre sac. La nuit, les gens normaux en aiment le côté interdit et mystique. La nuit, les déchets de la rue attendent qu’elle passe, dormant avec un œil ouvert voire les deux. Alors ça t’est passé cette vision de l’obscurité en tant qu’amie. Aujourd’hui tu cours après le soleil, vainement sans doute, mais avec détermination. Tu veux goûter sa brulure sur ta langue, t’assécher entièrement ou cramer comme Icare, rien à foutre, c’est le risque à payer, et puis au moins on ne meurt pas dans l’ombre. Se terrer dans la nuit, plus jamais. L’insomnie ce n’est plus une occasion de déambuler impunément, c’est un fléau, l’impression que les heures noires et leurs griffes hideuses essaient de te retenir, de t’attirer, de t’aspirer, de t’engloutir et jamais ne te laisser partir. Ça te retourne le cerveau ce silence, ce vide, c’est désagréable de s’entendre penser quand on n’a rien d’un philosophe ou même d’un artiste. C’est chiant, ça rend fou. C’est pas dans le salon, bien qu’intrigants, sont une distraction plus que bienvenue, rien de mieux qu’engueuler quelqu’un pour arrêter de s’ennuyer, ça fouette le sang et puis après on est tout revigoré. C’est une recette de famille ça. Elle ne t’a jamais failli. C’est parti donc, tu dormiras mieux après sans doute.

Un instant tu vacilles en découvrant la silhouette sur le sofa, ne sachant guère quoi faire, puis tu te dis qu’elle ne devrait pas avoir de traitement de faveur, tu ne vas pas juste la laisser là. Il est temps de la réveiller. Mais sa réaction… Disons que tu ne t’attendais pas à ça. Elle bondit comme un animal blessé, essayant de fuir ton contact, visiblement terrifiée l’espace d’un instant. Et tu le sais très bien, ces réactions-là, ce sont des réactions d’enfants battus. Elle a été bien des choses Jael, enfant maltraité, enfant oublié, enfant abandonné, mais pas enfant battu. Puis ces choses-là n’arrivent pas du jour au lendemain sans raison. « Tu m’as fait peur. » Sans déconner ? Tu t’en serais pas rendu compte tiens. Finalement l’engueulade devra peut-être attendre, ça peut perturber ton emploi du temps mais tu trouveras bien un moment où la caser, puis si ça ne coïncide pas avec le sien, tu engueuleras quelqu’un d’autre. Elle qui parle souvent trop fort – effet secondaire de l’enthousiasme – a fait de sa voix un chuchotis. « Nibs ronfle. » Elle a vraiment des excuses de merde. C’était celle qu’elle t’avait donné la première fois qu’elle s’est glissée dans ton lit, comme si ça avait pu dissimuler ses tremblements de panique. Et puis, elle ne ronfle pas Nibs. Tu l’as vue s’endormir sur le canapé au milieu d’un marathon de séries plus d’une dizaine de fois et jamais un son, pas le moindre. Faudrait donc pas te prendre pour un pigeon. D’autant que roucouler ça n’a jamais été vraiment ton truc faut bien l’avouer. « No she doesn’t, she moves around a lot but she doesn’t snore. » « Non, Nibs ne ronfle pas. Elle bouge mais elle ne ronfle pas. » La petite Wendy se tortille, se ratatine, désireuse sans doute de pouvoir disparaître entre les vieux coussins. Agitée, il te semble qu’elle a des mots au bord des lèvres, des gestes au bout des doigts, mais qu’elle est subitement muette. Un mystère, elle doit avoir un secret plus gros que son cœur la gamine pour être dans un état pareil. Quelque chose en elle de si triste et toi ça te déchire le ventre qu’elle ne se confie pas à toi comme elle le faisait avant. « Pardon j’me suis endormie sans m’en rendre compte, j’étais juste partie faire un tour et puis faut croire que le canapé est vraiment plus confortable qu’on ne le pense. » Mais elle te prend vraiment pour un abruti profond en fait. Ce canapé il est antédiluvien et une chaise à torture serait un lit plus confortable. Tu lui lances un regard. Ce regard de ‘‘tu te fous de ma gueule ?’’. Y a plus de respect chez les jeunes, bordel de merde. Cette fois tu ne te fends même pas d’un contre-argument, il n’y a pas besoin, vous êtes tous les deux au courant de l’absurdité de ce qu’elle vient de sortir.

Son mensonge découvert, elle saisit au vol l’autre option. La fuite. Comme une biche prise entre des phares, elle bondit du sofa et essaie d’aller rapidement à la porte, l’air de rien. « Je vais retourner dormir, encore désolée. » Y a du culot dans la tentative, un brin d’audace et surtout une prière pour avoir de la chatte. Pas de chatte. Pourtant, un millième de seconde, elle manque d’avoir une chance de cocu. Sauf que voilà, tu n’en restes pas là, tu décides de ne pas la laisser filer entre tes doigts comme elle l’a fait toute la semaine. En te décalant simplement tu te places entre la porte et elle. La seule échappatoire qu’elle a c’est le balcon. « Come on princess, you’re a shitty liar. I know I’m not a genius but how stupid do you think I really am ? What the hell is going on with you ? » « Sérieux princesse, tu mens comme une merde. Chuis pas un génie c’est clair mais tu me crois aussi con que ça ? Qu’est-ce qui va pas en ce moment ? » Tu te retournes une seconde pour allumer la lumière du salon. Et alors tu comprends. Sa peau un tableau vivant, un arc-en-ciel peint à l’ecchymose. Aucun mot n’arrive à passer tes lèvres alors que tu t’approches doucement et lèves la main vers son épiderme pour y examiner les bleus. Tes doigts font se relever son menton, révélant les marques qui s’étalent sur son cou, cruelles. Ta main libre se crispe, ta face se fige en un masque sans émotion. « Who the fuck did this to you Jael ? » Et si elle ne répond pas tu poseras à nouveau la question. Et encore, et encore, jusqu’à-ce qu’elle cède. Tant que tu n’auras pas ce que tu veux, elle ne quittera pas la pièce.
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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptySam 22 Juil - 0:41

Je mens. Je mens, je mens, je mens. Je mens tellement, terriblement, complètement. C’est comme une seconde nature maintenant, sauf que je l’adopte pas vraiment et faudrait être stupide pour voir que Peter n’avale pas une bouchée de ce que je lui propose. J’ai jamais aimé le théâtre, peut être que si j’avais porté plus d’attention en classe je serais meilleure aujourd’hui, moins transparente et ptêtre que ça me sortirait de situations débiles comme ce soir ? Encore et toujours des peut être, ça aussi ça devient maladif. Et si, peut-être, supposition. Comme si la réalité n’était jamais vraiment bonne, que c’était plus simple de proposer autre chose, une alternative à la vérité pour me soulager le cerveau. Parce qu’il est lourd mon cerveau. Et pas de connaissances. Il est lourd de pensées, de souvenirs, de ces genres de fantômes poussiéreux qui hantent les tiroirs mal fermés dans mon cortex cérébral. Taisez vous. Maintenant. Mais ça marche pas vraiment.
No she doesn’t, she moves around a lot but she doesn’t snore. Sourire figé, le cœur qui chute du haut de la falaise et je me sens stupide. Bien sûr qu’elle ne ronfle pas. Et bien sûr qu’il le sait. Il sait tout. Ou presque. Presque tout. Y a des choses qui lui échappent à Peter, des choses qu’il ne voit pas, qu’on cache comme on peut, peinture sur la misère pour faire genre que rien n’est encrassé. Mais il sait quand même beaucoup trop, comme ma capacité ridicule à mentir. Depuis le temps. Pourtant j’y arrive pas, à lui dire la vérité. Je voudrais ; Je voudrais terriblement, juste faire comme avant. Ca serait tellement plus simple et bien plus rassurant. Mais y a rien qui vient, y a les mots qui se coincent et le regard qui fixe le sol. J’arrive même plus à le dévisager, à chercher son regard comme jle faisais trop souvent. J’ai toujours trouvé quelque chose de rassurant dans ses yeux, un truc différent. Mais même ça maintenant on me l’a retiré.
Alors je fais ce que je sais faire de mieux. Je fuis. Je me faufile, esquive du mieux que je peux, le regard fixé vers la sortie. Si je marche assez vite (mais pas trop pour pas être bizarre) ptêtre que j’atteindrais la porte, le couloir et puis la chambre. Ptêtre que je pourrais me cacher assez vite sous la couette pour que ça se termine maintenant et que mon cœur arrête de tambouriner.
Mais faut croire que je suis pas si bonne que je le pensais. Parce que c’est pas la porte que je rencontre, c’est le torse de Peter et mes pieds qui freinent dans la moquette pour me stopper dans mon élan. J’y était presque. Presque. Mais pas vraiment. Come on princess, you’re a shitty liar. I know I’m not a genius but how stupid do you think I really am ? What the hell is going on with you ? J’ai les yeux rivés sur mes pieds, incapable de lever la tête et la mâchoire qui se crispe quand je l’entend parler. Je sais qu’il est pas stupide. Jamais j’oserais, jamais je voudrais. Je le respecte trop pour ça. Non. Je l’aime trop pour ça. Et je refuse de prendre les personnes qui me tiennent autant à cœur pour des cons. Mais c’est compliqué que j’aimerais lui hurler.
Qu’est-ce qui va pas avec moi ? Je sais pas. Je sais plus. Y a tout qui se bouscule, y a le fait qu’on détruise petit à petit mes dernières fondations et que j’me retrouve actuellement en chute libre. Y a Jedediah, y a Asher, y a Tobias et y a Merle. Puis surtout y a Peter.
La lumière m’aveugle et mes yeux qui se ferment par reflexe pour me protéger du choc. Je grimace, recule un peu, encore pas assez, et pas le temps de penser à me cacher. Me cacher de quoi de toute façon ? Les mains sur mon visage ? Comme un masque grotesque ? C’est trop tard. C’est bien trop tard. J’le vois dans son regard, comment il me dévisage, les dernières traces laissées par Seven qui refusent de s’effacer. « Regarde pas. » que je murmure doucement, parce que j’ai honte. Tellement honte qu’il me voit comme ça. Je veux pas. Mais pourtant j’ai pas le choix.
Il s’approche et j’arrête de respirer. Parce que j’ai envie de hurler, j’ai envie de partir me réfugier quelque part, dans un placard comme avant. Ou sous l’évier. Un endroit sombre, un endroit clos, un endroit où personne ne m’atteindra. J’ai envie de hurler, de lui dire de ne pas me toucher, comme je l’ai fait à Asher, comme je l’ai fait à Merle. Mais j’prends sur moi. Parce que c’est lui et pas eux. Parce que c’est différent cette fois et que je suis fatiguée de repousser. Terriblement fatiguée de blesser. Et que je refuse de merder avec lui. Surtout pas avec lui.
Who the fuck did this to you Jael ? Il me fait redresser la tête, je sens ses yeux sur mon cou, sans doute qu’il reste encore des traces, des bleus qui s’étendent et le souvenir de l’oxygène qui s’envole hors de mes poumons. Je recommence, imite le passé, arrête de respirer, bloque tout. Panique. J’ai mes mains qui fouillent les poches de mon short, devant, derrière, mais que du vide. Rien de vide. « J’ai perdu mes cailloux » que je finis par murmurer, comme une stupide gamine toquée. « J’ai perdu mes cailloux, et j’arrive pas à respirer » le souffle court, l’air qui refuse de rentrer. Panique. Je me rattrape à lui à son bras, parce que y a que le vide comme autre choix. Je serre. Fort. Ptêtre un peu trop. Les ongles qui se plantent sans vraiment faire exprès. Panique. Et ça fait combien de fois ? Trop souvent. Bien trop souvent. Et j’ai l’impression qu’à chaque fois je pourrais crever. Mais c’est peut-être mieux. Ptêtre mieux que de lui avouer, que de tout lui raconter. Et y a les larmes qui coulent, silencieuses, et le blanc qui se mélange à ma vision, l’impression d’agoniser. Encore. Encore. Me laisse pas tomber
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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyDim 23 Juil - 3:02

Jael elle t’est venue comme un ange tombé du ciel. Pourtant sur l’instant c’est toi qui as dû avoir l’air angélique, la main tendue vers elle à travers le froid, à travers la nuit, à travers la solitude. Tu l’as sortie du caniveau ouais peut-être mais si ici quelqu’un a des ailes, ce n’est pas toi. Jael avec sa peau si pâle qu’on la dirait recouverte d’un duvet, ses cheveux en bataille comme d’un atterrissage mal négocié. Elle a dû tomber par erreur, il n’y a pas d’autre explication, qui l’aurait renvoyée ? Et si ça se trouve quelqu’un la cherche dans les cieux, soulève chaque nuage, pleure des ouragans. En vain. Elle est coincée ici la gamine de l’Eden, et elle ne sait pas comment remonter. Comme si tu pouvais l’aider, comme si tu savais où il était toi l’escalier du paradis, autant rêver. Mais peut-être qu’en attendant le chemin elle va vous sauver, te sauver. Quoique… Cela fait bien longtemps que tu n’as pas vu l’intérieur d’une église. Tu ne sais plus vraiment si les anges sont censés secourir les hommes ou les corrompre. Une histoire de tentation et de traversée du désert, ça tu t’en souviens mais c’était un coup du diable. Le diable n’était-il pas un ange d’ailleurs ? Oh et puis tant pis, elles sont toutes à jeter par la fenêtre ces idées. Jael elle t’est venue comme un ange tombé du ciel. Mais ce n’est pas un ange, elle est si humaine, si fragile. Elle vaut mieux que la plupart mais son innocence ne la rend pas divine, juste triste. Ou du moins elle la rendra triste lorsqu’elle s’effritera et s’écroulera enfin, fait inévitable dans ce putain de monde qui ne donne de répit à personne, tu pourrais la garder dans une cage en or que tu n’empêcherais pas ça. Tu te demandes si le processus a commencé, si sa peau va se craqueler, si elle va muer. Tu ne sais pas si tu le lui souhaites. Elle sera plus forte, ouais, peut-être. Ou elle sera brisée et plus jamais la même. Ce serait bien dommage que son innocence se soit envolée vers la stratosphère sans elle, salaud même. La vie, cette sale race. Elle s’est fait rouer de coups ta Wendy et visiblement elle n’a pas pu s’échapper avec des pensées heureuses. Quand vous étiez petits toi et tes frères vous disiez à votre sœur que vous étiez des durs, vous lui montriez vos brûlures, vous lui montriez vos bleus, vous lui disiez ne rien sentir. Tu l’as fait le coup, on te l’a fait, jamais tu n’y croirais si elle essayait un instant. Et puis même si c’était vrai, même si elle n’avait pas mal, elle a l’air brisée de l’intérieur, elle a l’air d’avoir bien mal au cœur. « Regarde pas. » Si tu ne les as pas vus ils n’existent pas c’est ça ? C’est trop tard, tu ne peux pas retourner en arrière, poser tes yeux ailleurs, la laisser te glisser entre les doigts vers la chambre. Toute retraite est impossible, inutile de se demander ce qui aurait été le mieux. La vérité s’étale devant toi comme les ecchymoses sur son corps. Elle a changé de palette Klimt, maintenant elle est ornée de couleurs à la Munch, du vert, du jaune, du violet, du bleu, un peu de rouge ici et là. Ça ne lui va pas du tout. Elle le sait bien d’ailleurs, elle en a honte.

Sur sa gorge des traces de mains encore, chaque seconde durant laquelle le constat des dégâts s’élargit, la haine gonfle en toi. Une colère bestiale. Bordel dans ce monde y en a même qui tabassent les anges. Il est à vomir ce monde. Tu sens ses paluches s’agiter frénétiquement, son corps commence à trembler. « J’ai perdu mes cailloux. » Ses putain de cailloux. Combien de fois tu t’es endormi au son de sa voix qui les comptait doucement à côté de toi ? Bien trop. « J’ai perdu mes cailloux, et j’arrive pas à respirer. » Elle devient naufragée dans un océan de panique, ses ongles s’agrippent à ton bras comme au radeau de la Méduse. Tu la laisses faire, la laisses percer la peau, elle n’arrivera jamais à te faire bien mal. La main qu’elle n’a pas touchée est toujours contre la peau de son cou, alors tu la poses sur sa joue et la forces à te regarder dans les yeux. En un an tu ne peux plus compter à quelle fréquence tu as dû lui parler, la faire se calmer. Toujours, tes yeux étaient remplis de sérénité de compassion. Sauf que ce soir tu ne peux pas. En croisant ses iris tu comprends immédiatement que tu n’y arriveras pas. Faire semblant d’être paisible te semble une tâche herculéenne. Tu déplacerais des montagnes pour elle, mais pas en vain. Rester dans l’apathie ça ne la sauvera pas, ça la perdra. « Look at me. Look at me. » Que ses pupilles hallucinées jettent l’ancre dans les tiennes. « It’s damn time to stop being sad, being scared, being ashamed. I think you’ve done that enough don’t you ? » « Il est grand temps d’arrêter d’être triste, d’avoir peur, d’avoir honte. Tu l’as pas suffisamment fait ? » Ses réactions à toute contrariété, quand elle s’écrase devant le destin, qu’elle essaie de se faire toute petite en espérant que l’orage l’épargnera même s’il ne le fait jamais. Avant de pouvoir observer une réaction chez elle tu continues, chuchotant encore. « That time is fucking over. Now it’s time to be angry. » « C’est fini toute cette merde. Maintenant, sois enragée. » En cet instant tu n’aurais rien pu lui communiquer d’autre, c’est tout ce qui traverse ton corps, fait grésiller chaque neurone, bouillir chaque goutte de ton sang. Alors si c’est tout ce que tu as et que tu en as trop, tu la partageras. La colère n’est pas une émotion négative. « Some cunt did this to you. Now you squeeze my arm as much as you can, you put all you have into it, and you get fucking angry, cause you don’t deserve this. » « Y a un salopard qui t’a fait ça. Alors maintenant tu serres mon bras aussi fort que possible, tu donnes tout ce que t’as, et tu te mets en colère putain, parce que tu mérites pas ça. » Tu n’as pas la moindre idée de si ça va marcher, ça pourrait juste la faire paniquer encore plus. Mais il est temps de passer une étape. Il est temps qu’elle arrête de se laisser marcher dessus, et si il faut la secouer pour que ça rentre alors tant pis. Tu lui laisses un avant-bras à charcuter et de l’autre tu l’entoures, l’attirant à toi pour ne pas la laisser trembler dans le vide. Tu ne vois plus son visage, tu regardes la crinière blonde, passes une main dans son dos. « Get fucking angry. I’m gonna make it right. »
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Jael Feliciano

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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyDim 23 Juil - 23:01

C’est terrible la panique, tu crois pouvoir la maitriser après tout ce temps, après toutes ces années. Tu penses tout connaitre d’elle, le moindre de ses secrets, comme si c’était devenue une vieille ennemie qui tu peux repousser. Tu parles. Si seulement. La panique a la peau dure, la panique est tenace, la panique se fait vile, attend son heure dans l’ombre pour t’attaquer. Je la hais la panique, et toutes ces années de thérapie pour quoi ? Pour étouffer comme une noyée, l’air qui refuse de rentrer, de s’infiltrer ? C’est trop de fois que ça m’arrive, encore, encore. Le noir, le blanc, les tremblements et les cris qui se battent en duel à l’intérieur de ma gorge pour déterminer qui sortira le premier. Hypersensible, un peu paumée, gamine cassée. Y a trop de mots sur mon dossier médical, trop de mots que je comprends pas, que je comprendrais jamais. Mais c’est pas pour autant que je la laisserais gagner.
Oui. C’est entre elle et moi la panique, puis entre mes doigts qui s’agrippent à Peadar, mes yeux qui cherchent les siens sans réussir à faire la mise au point. Ils sont plus très nombreux ceux qui savent me calmer, sans doute qu’ils se calment sur les doigts d’une main. Cinq ou moins, des gens qui disparaissent, un à un, encore, toujours. Combien de temps avant que je sois définitivement seule ? Avant que Peadar me laisse aussi ? Avant que y ai plus que du noir ? Respire, respire, respire j’y arrive pas. Et bon sang ce que ça fait mal. Look at me. Look at me. Y a sa main sur ma joue, y a sa voix dans mes oreilles et l’impression pourtant qu’il est à des kilomètres de distance. Rattrape moi parce que je tombe et je lutte pour me concentrer sur le point de chaleur, sur ses doigts contre ma peau. It’s damn time to stop being sad, being scared, being ashamed. I think you’ve done that enough don’t you ? Triste. Effrayée. Honteuse. Et ça rejoue en boucle dans ma tête. Ces mots qui résonnent dans mon crâne encore et encore. Je ressens pire que ça, trois fois le double et encore plus.[b} That time is fucking over. Now it’s time to be angry.[/b] Et ses mots continuent, qui affluent dans mes tympans, remontent le long des connexions. respire, respire. Un peu d’air, juste assez pour pas chuter, la lumière moins aveuglante mes yeux qui arrivent à se fixer sur quelque chose, lui, je sais pas trop quoi mais j’me raccroche à lui. It’s time to be angry. Pourtant j’ai essayé la colère. J’ai essayé quand j’ai affronté la colère. J’ai essayé, j’ai même hurlé, j’ai pas voulu ployer. Pas une énième fois. Mais ça n’a pas vraiment marché.
Some cunt did this to you. Now you squeeze my arm as much as you can, you put all you have into it, and you get fucking angry, cause you don’t deserve this. J’assimile les mots, peine à comprendre le sens mais j’me concentre. J’me concentre aussi sur mon souffle, force mes poumons, ma trachée, ma bouche. Je force, les doigts qui s’accrochent à sa peau comme si c’était ma dernière corde avant la chute, lâcher ça serait crever. Et je veux pas. Pas comme ça. Pas maintenant. J’me sens tirée en avant, lui qui m’attire contre son torse et moi qui ferme les yeux, les larmes qui coulent, encore, encore. Y a rien de beau dans tout ça, c’est pas vraiment doux non plus, mais putain ce que ça brûle. Ca allume un truc, comme un feu dans le cœur pour chasser la peur. La panique ; Dégage panique. Get fucking angry. I’m gonna make it right. et je crois que c’est le mot de trop, le coup final qui ouvre la cage. J’ai mal quand l’air rentre d’un coup, quand je me retrouve à respirer comme asphyxiée. Vite, vite, vite, j’avale goulument l’air, la vie, et puis je chiale. Comme une gosse, comme toujours, sale gamine, foutue gamine. Je chiale, le relâche pour l’entourer de mes bras. « C’est pas juste » que je murmure tout bas, entre deux sanglots. « C’est putain de pas juste » que je reprend un peu plus fort ? Get fucking angry et j’la sens la colère, celle qui gronde, celle qui menace. « C’est toujours pareil ! Merde ! » J’ai le poing qui s’abat contre son torse, égoïste une fois de plus, c’est lui qui prend alors qu’il n’a rien fait. Alors qu’il ne le mérite pas, alors que je devrais m’excuser d‘être aussi stupide, d’être aussi faible, de tout faire foirer comme à chaque fois. « Pourquoi hein ? Pourquoi moi ? » Je frappe, encore, encore, c’est ridicule face à lui, c’est stupide, comme si je pouvais faire quelque chose avec mes deux misérables poings, mais j’en ai besoin, faire sortir la colère, la foutue colère. « Ca fait mal, ça fait trop mal, j’en ai assez » je cherche son regard, comme pour trouver une réponse, une solution à tout ça. Le pire c’est pas que Seven, c’est pas qu’Asher, c’est pas que Jedediah ni Tobias. C’est cette accumulation de choses, de trucs qui déconnent, poussière après poussière, qui fait chuter l’ensemble. « J’ai beau être en colère ça change rien. Ca changera jamais rien. Chui pas comme toi, chui pas comme eux. » ouais, trop différente, malgré les changements, malgré les adaptations, malgré tous les efforts pour me fondre dans la masse. Trop différente. « Je suis désolée » que je finis par murmurer, les yeux qui refusent de l’affronter plus longtemps. Désolé d’être aussi faible, d’être aussi nulle, désolé d’être aussi égoïste, de te blesser alors que tu mérite mieux, de te mentir, d’être aussi bête. Tellement bête. Désolé
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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyLun 24 Juil - 1:15

Les vagues scélérates déferlent l’une après l’autre sur le navire de ton esprit et tu ne peux te permettre d’en boire ne serait-ce qu’une tasse ou ce serait le début de l’inondation. Tous ces gosses, leurs sentiments s’écrasent contre toi, ne demandant qu’à te dévorer entièrement. Ils sont brisés, ils sont malheureux, ils deviennent fous. Tu peux les entendre, tu peux les comprendre, tu peux leur tendre la main mais tu ne peux t’autoriser à ressentir la plus petite des parcelles de leur horreur quotidienne. Toi aussi sinon tu t’effriterais, et tu dégringolerais. Alors qui les aiderait lorsque tu les aurais rejoints au fond ? Comme un chirurgien tu ne peux pleurer pour tous les patients, tu dois te forcer à demeurer de marbre, à faire tout ce que tu peux sans investir ta santé mentale, te démener en laissant de côté les parties les plus intimes de ton être. Ce n’est pas ton cœur que tu mets de côté, ni ton empathie, mais tu ne peux ressentir avec eux. La menace est toujours présente, les tsunamis ne cessent de balayer les côtes de ton humanité, à chaque instant tu joues le funambule au-dessus de ce maelström, si proche de sombrer. Il ne suffirait que d’une fois pour ouvrir la porte à toutes les autres. Alors quand la panique de Jael se déverse dans la pièce et sur ta peau, rien ne t’éclabousse. Ses ongles arrivent à percer ton épiderme mais pas cette carapace-là, c’est ton dernier rempart. Ton sang coule le long de ton bras, son corps vacille de moins en moins. Un souffle emplit enfin ses poumons sans la faire suffoquer, tu le sens au rythme de sa cage thoracique contre la tienne. Puis ses vannes lâchent et le torrent sur ton corps est bien physique et non pas métaphorique cette fois. C’est vrai qu’elle a tendance à beaucoup chialer la Wendy mais au fond, ça soulage, ça permet de tout nettoyer sur son passage. Les mains violentes lâchent les plaies ensanglantées qu’elles ont créées pour t’entourer. Elle te rend ton étreinte un instant, s’accroche à toi comme une bouée, tu la laisses faire. « C’est pas juste. » C’est pas à ceux qui vivent ici qu’on va apprendre que la vie est injuste, ils ont déjà eu le mémo y a bien longtemps. « C’est putain de pas juste. » Non, c’est un vrai bordel la justice, en tant que chats de gouttières vous la connaissez bien, elle est loin d’être aveugle contrairement à ce qu’on essaie de faire croire au monde. Enfin au beau-monde, parce que dans les bas-fonds vous naissez en le sachant et si vous avez le malheur d’oublier on vous le rappelle chaque jour de votre vie. Il y a un orage qui commence à gronder dans sa voix à la petite. Finalement tu lui as peut-être communiqué cette rage.

« C’est toujours pareil ! Merde ! » Voilà, elle est en colère. Enfin, enfin elle s’insurge contre le destin. Des coups pleuvent sur ta poitrine, elle se déchaîne. Tu n’en ressens pas la douleur, juste une piqûre. Elle déverse sa bile frénétiquement, se défoule sur toi comme un punching-ball, tu la laisses faire. Cela fait trop longtemps qu’elle n’extériorise pas, il était temps. « Pourquoi hein ? Pourquoi moi ? » Si tu savais pourquoi, si tu savais pourquoi tu serais l’homme le plus riche de ce monde, un être aux pouvoirs mystiques. Comment tu pourrais répondre ? Pourquoi elle est née dans cette famille ? Ou pourquoi chaque seconde de sa vie s’est déroulée comme elle s’est déroulée ? Le putain de destin ou le hasard, l’un dans l’autre la réponse c’est de la foi dans l’un ou l’autre. Et tu commets une erreur fatale, dont tu ne te rends pas compte encore, ni même sans doute demain. Sa rage est si similaire à la tienne, si bénéfique, que tu la laisses rentrer. Ce ne serait pas un problème, c’est au fond comme partager un fou rire. Sauf qu’avide de connecter un peu, tu oublies d’écouter le désespoir qui suinte dans toute cette rage. La tristesse a mis un masque et toi, abruti, tu l’as laissée passer la muraille en cheval de Troie. Et tu le regretteras, c’est comme une première cellule cancéreuse qui se détache et va se balader. Sauf que le cancer a l’amabilité de simplement tuer ta chair. Tes mains sont crispées contre elle sans pour autant exercer de pression sur sa peau, trop peur de lui rappeler les coups qu’elle a pris. « Ça fait mal, ça fait trop mal, j’en ai assez. » Ce n’est sans doute ni de ses poings ni de son visage dont elle parle. Elle bout, elle est si fragile, si délicate, on a oublié de la surveiller et elle a débordé comme du lait en une seconde. Ces derniers temps elle s’en est pris des claques, alors oui, ça fait mal. C’est humain, c’est comme ça.

« J’ai beau être en colère ça change rien. Ça changera jamais rien. Chui pas comme toi, chui pas comme eux. » Comme si c’était un cadeau tiens d’être comme ça. Apprendre à encaisser les coups ça ne change pas le fait qu’on se les prend dans la gueule. Il ne suffit pas de la prendre la mandale, il faut la retourner dans le coup suivant. « That’s cause you’re not doing anything. You get angry, you yell and then it’s over. Use that anger in the next punch or it’s good for nothing but blowing off steam. » « C’est parce que tu fais rien. Tu pousses ta gueulante et puis que dalle. Ta colère tu la mets dans la droite suivante, sinon c’est juste un passe-temps. » Tu te dis que vous n’allez pas rester là plantés au milieu du salon comme des abrutis, alors tu passes un bras autour de son épaule et tu l’emmènes vers ta chambre pour qu’elle s’asseye sur le lit. La tête baissée, en chemin, elle te glisse une excuse. « Je suis désolée. » Un soupir t’ébranle, elle t’agace des fois. Vraiment, ça sert à quoi tes discours ? Elle t’écoute en plus elle, mais ça rentre par une oreille et ça ressort par l’autre immédiatement. « Stop fucking apologizing. » « Tu vas arrêter de t’excuser putain ? » En disant ça tu la secoues un peu en marchant, affectueusement. Puis tu la laisses s’asseoir sur les draps pendant que tu fouilles dans une boîte sous le lit à la recherche d’un bandage. En silence tu entoures ton avant-bras de gaze méticuleusement comme pour de la boxe, tournant le dos à l’adolescente. Qu’elle se calme un peu pendant ce temps-là. Puis tu t’appuies contre le mur devant elle et tu plantes tes iris dans les siens. « I’m angry. And I’m gonna get a shitload of punches out of that, so you have to tell me exactly how everything happened. And whose fucking teeth I’m gonna smash in. » « J’ai la rage, et je te garantis que je vais pouvoir frapper un moment, donc faut qu’tu m’racontes tout. Et qu’tu me dises à qui je fais sauter les dents. » Sans doute qu’elle essaiera de protester, que tu ne te mêles pas à tout ça ou quelque chose dans le genre. Même pas la peine d’essayer, tu ne bougeras pas. Ta colère elle ne sera peut-être pas constructive mais elle sera ravageuse.
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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyLun 24 Juil - 19:00

J’explose, boule de nerf ou de rage, boule de désespoir et de lassitude. J’explose, j’implose, entre les deux qui sait, juste de quoi rester vivante à peine, la peau sur les os et le cœur en morceau. Je frappe, un peu, beaucoup, m’acharne sur Peter qui n’a rien demandé, qui n’a jamais rien demandé. C’est pas lui que je devrais griffer, c’est pas lui que je devrais taper. C’est tous les autres. Et pourtant ça tombe sur lui, aveuglement ça tombe sur lui, encore une fois. A croire que c’est une habitude chez nous, les gosses paumés, ceux qu’il a ramassé, de finir par s’en prendre à lui, encore, encore, au lieu de le remercier.
C’est douloureux, de respirer, l’air qui circule enfin et les yeux qui font enfin la mise au point. C’est douloureux, de se retrouver happé par la réalité, par le silence du salon que je brise avec mes piaillement de gamine détraquée. Peter lui ne bouge pas, immobile, il joue au roc, pierre que j’arriverais sans doute jamais à déplacer. Et c’est tant mieux au fond ; Parce que je refuse de le voir disparaitre en morceaux, pas lui aussi, pas lui. That’s cause you’re not doing anything. You get angry, you yell and then it’s over. Use that anger in the next punch or it’s good for nothing but blowing off steam. Il a toujours raison à tout Peter, Peadar, avec sa logique du fond des rues. Il a toujours raison et moi j’ai l’impression d’avoir toujours faux. Je suis comme ça, je hurle je pleure, je frappe un peu, puis quand j’ai l’impression d’en avoir fait assez jvais me terrer sous ma couette, avale deux trois cachets et attend un meilleur lendemain pour me remettre à rigoler. Avant que tout ne recommence. Encore. « J’essaye, j’essaye »  mais sans doute pas assez fort. J’essaye pourtant, promis, c’est déjà plus qu’avant mais sans doute pas assez.
Il passe un bras autour de mes épaules, je me raidis d’abord, un peu comme un réflexe de défense, avant de finir par me détendre, juste un peu, un tout petit peu. Je hais ça, avoir l’impression qu’au moindre geste le monde entier va décider de me frapper, d’essayer de briser les os de mon visage, de ma cage thoracique. Je hais encore plus avoir l’impression que Peter en serait capable, tout comme j’ai reculé quand Asher a essayé de me toucher, tout comme j’ai déconnecté quand Merle m’a embrassé. Alors je prends sur moi, chasse les pensées mauvaises de mon cerveau et le suis dans sa chambre m’excusant en chemin d’avoir dérapé autant. Promis c’était pas voulu. Promis j’aurais préféré juste rigoler, chanter une chanson stupide avec toi et finir sur le lit à parler de tout et de rien jusqu’à ce que l’un de nous deux abandonne en premier et ferme les yeux. Stop fucking apologizing. Pardon mais j’le retiens juste à temps, le laisse me secouer un peu alors qu’on entre dans la chambre, sans doute que j’en ai besoin. Pardon que je pense fort, trop fort, alors que je grimpe sur le lit, petite souris habituée j’m’installe à ma place préférée, comme par habitude. Côté droit, un peu au milieu, pas trop haut et pas trop bas, les genoux contre ma poitrine et le regard qui suit Peter. Il me tourne le dos pendant quelques instants, sans doute qu’il fait la gueule ou je sais pas. J’ai peur qu’il se mette en colère. Je déteste quand il est en colère. Je déteste ça parce que ça lui va pas. Lui ce qui lui va c’est les sourires, ceux qu’il donne pas si facilement, qu’on lui arrache quand il pense qu’on le regarde pas. Alors je prie pour un sourire, juste un petit je suis pas trop gourmande, quelque chose auquel me rattraper, colmater les plaies. Mais il continue à me tourner le dos, et moi je mord mon pouce, ferme les yeux un peu, cherche à retrouver le rythme normal de ma respiration. La panique est mauvaise mais la panique est courte, la panique tourne les talons quand y a pire, quand y a l’appréhension ou bien la sécurité, un mélange des deux que je ressens actuellement quand on est que tous les deux.
Finalement il se retourne et mon regard se fixe sur son avant-bras. Pardon une troisième fois. Mais je dis rien, remonte doucement vers son visage, sérieux, tellement sérieux. I’m angry. And I’m gonna get a shitload of punches out of that, so you have to tell me exactly how everything happened. And whose fucking teeth I’m gonna smash in. Il est comme les autres. Sauf qu’il est un peu plus sérieux. Et quand il dit qu’il va faire sauter le dentier à celui qui m’a fait ça, lui je le crois. Une part de moi à envie de tout lui raconter d’un coup, lui donner le nom de Seven, lui raconter du début jusqu’à la fin pour qu’il aille sonner chez lui et qu’il lui fasse payer tout ce qu’il m’a fait. Parce que j’ai mal. Parce que j’ai terriblement mal et que je devrais pas être la seule à souffrir comme ça. Mais y a l’autre moitié qui a peur que tout soit juste de ma faute, qu’il soit déçu que j’ai même pas réussi à m’en sortir dans tout ça, que j’ai fais n’importe quoi. J’hésite. Un instant. Ptêtre qu’on peut faire un compromis, entre les deux. « C’est Seven »  son prénom. Ca fait mal d’avouer, de dire la vérité. « On s’est croisé en soirée. Faut croire que les choses ont dérapées. »  instinctivement je porte ma main à mon coup, caresse ma gorge là où y a quelques jours encore Seven enfonçait ses serres. Et ça réveille encore quelque chose, une envie de crier de nouveau, de protester. « C’est toujours pareil, tu leurs donne une main ils prennent le bras J’lui avais dit que je voulais pas, j’étais pas d’accord avec ça. »  avec tout, avec ses mains, avec la façon dont il m’avait touché la première fois avant de me plaquer contre le balcon pour m’inciter à sauter. Saute. j’entends encore ça voix, ça tourne en boucle dans mon crâne à chaque fois que y a trop de silence. « Je lui ai crié dessus en lui disant qu’il avait pas le droit, que c’était qu’un con, et il a pas apprécié »   la voix qui se brise, rire désabusé j’ai l’impression d’avoir pris dix ans juste en racontant les grandes lignes de ce qui s’est passé. Je ferme les yeux, enfouie ma tête dans mes genoux parce que j’ai pas envie qu’il me voit recommencer à chialer, parce que c’est nul et que j’en ai assez. « Il mérite même pas que tu t’en occupe tu sais. Il est tellement pathétique. »   Et pourtant j’ai qu’une envie, c’est de savoir que Peter lui a effectivement fait sauter les dents.

Lentement je me redresse, descend du lit pour me rapprocher de lui. Timidement j’attrape son bras bandé, passe mes doigts dessus, regrettant le geste.  « T’es pas fâché ? »    jviens chercher sa main, glisse mes doigts entre les siens. « Dis moi que t’es pas fâché, s’il te plait. »   que je murmure tout bas. Qu’il soit pas comme Jedediah quand il m’a vu à l’hôpital la première fois, le dégoût et la peine sur le visage de me voir avec les tubes dans le nez, dans les veines.  « Me laisse pas »  m’abandonne pas. Surtout pas.
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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyLun 24 Juil - 23:42

Le monde entier semble s’acharner sur ce petit bout de femme. Enfin petit, elle n’est pas si minuscule que toi, elle est même grande, elle fait presque ta taille. Mais elle est si fine, presque transparente, qu’elle a l’air minuscule et fragile. Et la vie semble s’y prendre avec des masses dignes de dessins animés pour essayer de l’écraser et la casser en deux. Peu à peu ils vont finir par réussir tous ces salopards qui lui volent de sa vie à chaque interaction. Tu regardes les plaies bariolées sur son visage si parfait et ça te donne presque envie de chialer cette œuvre d’art gâchée. Comme si quelqu’un avait jeté un pot de peinture sur un Botticelli. A pleurer de rage. C’est tout ce qu’elle arrive à faire d’ailleurs avec sa colère la demoiselle, la mettre dans ses larmes. « J’essaye, j’essaye. » Tu la crois, tu es persuadé qu’elle essaie avec toute sa bonne volonté mais ça ne suffit pas, il lui faudra bien plus pour vaincre son malheur. Peut-être de l’aide mais surtout plus de feu. Elle laisse constamment l’eau s’infiltrer par les fissures de son corps, elle laisse les braises de sa combattivité être étouffées encore et encore. La preuve. Enfin elle explose. Et immédiatement, elle s’excuse. Tu es persuadé d’ailleurs qu’elle a envie de s’excuser de s’être excusée. Tu en mettrais ta main à couper. Cela te ferait presque rire, elle te fait tant rire d’habitude avec sa maladresse et son enthousiasme débordant pour des choses complètement insignifiantes. Mais aujourd’hui en la voyant, tu ne ressens que la mélancolie la plus profonde et une rancœur viscérale qui menace de te dévorer et de te transformer. Méthodiquement, tu caches les demi-lunes ensanglantées laissées par sa panique. Faudra que tu passes un coup d’éponge demain. Tu espères ne pas avoir à combattre pour lui extorquer le nom de son tortionnaire. Ton énergie serait gaspillée, tu la gardes pour la vengeance. Toi tu ne tends pas l’autre joue, non, toi tu rends œil pour œil et dent pour dent. Un moment elle suspend son souffle, et tu ne sais si elle va céder.

Puis elle rend les armes. Le monde semble alléger son poids sur ses épaules. « C’est Seven. » Tu fermes les yeux une seconde, déçu. Déçu parce que tu n’es pas surpris, déçu parce que Seven la première fois que tu l’as vu tu as cru qu’il avait quelque chose à sauver, déçu parce que tu aurais te douter que traiter avec lui finirait mal parce que lui finirait mal. Déçu en te demandant fugitivement si, si tu avais insisté il y a quelques années, les choses se seraient passées différemment et que tu n’aurais pas face à toi l’enfant monstrueux des névroses de Seven affiché sur le visage d’un être cher. Et puis tu les rouvres. Ce n’est pas ta faute. Seven a fait ses choix. « On s’est croisé en soirée. Faut croire que les choses ont dérapées. » Tu voudrais l’empêcher d’effleurer ces marques violacées qui la souillent, comme si les ignorer les ferait disparaître. Dérapé. Ben voyons. Tu t’en rends bien compte oui que les choses ont dérapé. Quand ne dérapent-elles pas avec cet enfant de violence ? « C’est toujours pareil, tu leur donnes une main ils prennent le bras. J’lui avais dit que je voulais pas, j’étais pas d’accord avec ça. » Bien sûr qu’elle n’était pas d’accord, bien sûr qu’elle s’est défendue. Mais bien sûr qu’il n’a pas écouté, il n’y a rien de plus qu’il hait que l’autorité quelle que soient ses formes. « Je lui ai crié dessus en lui disant qu’il avait pas le droit, que c’était qu’un con, et il a pas apprécié. » Il a pas apprécié. Avec sa légendaire patience sans doute pas non. Chaque mot qu’elle prononce te pousse plus près du rebord, plus près d’une explosion de fureur destructrice. Puis son rire brisé te ramène sur terre, t’amarre à la réalité, traversant ton cœur comme un harpon. Putain. Elle l’a perdue. Elle l’a perdue son innocence, la fin du monde approche peut-être alors. Sa tête blonde va se cacher entre ses jambes pour dissimuler son désespoir. Ça ne suffit pas à masquer les dégâts. « Il mérite même pas que tu t’en occupe tu sais. Il est tellement pathétique. » Il l’est. Mais cela ne l’empêchera pas de payer pour ce qu’il a fait, tu as besoin de le voir souffrir. Soudain quelque chose te revient. Seven, elle ne l’a pas juste rencontré à une fête, tu l’avais envoyée chez lui une fois. Dans l’antre de la bête. Bordel de merde, tu blêmis.  « Jael, fuck. I sent you to his place a few months ago. What happened ? Fuck, what happened ? Why didn’t you tell me anything ? » « Jael. Putain. J’tai envoyée chez lui y a quelques mois. Qu’est-ce qui s’est passé ? Merde. Qu’est-ce qui s’est passé ? Pourquoi tu m’as rien dit ? » C’est à ton tour de paniquer. Tu ne le montres guère mais la culpabilité s’est glissée en toi comme un poignard et tu as peur qu’elle n’ait touché un organe vital. T’as merdé. T’as merdé bordel. Non seulement tu ne l’as pas protégée mais en plus c’est de ta faute. Tu vacilles un peu contre le mur.

Son contact te sort de tes pensées. Ses doigts dont tu sens la fraîcheur à travers le bandage t’effleurent avec une douceur inhumaine puis viennent se mêler aux tiens, les enserrer. Se raccroche-t-elle à toi où es-tu au fond celui qui s’ancre dans sa présence ? « T’es pas fâché ? » Elle trouve encore le moyen d’avoir peur que tu lui en veuilles. Tu ne peux comprendre pourquoi elle accorde cette importance ultime à ton approbation. On s’en fout de ce que tu penses. Et puis tout cela est ridicule, tu ne pourrais pas lui en vouloir même si tu essayais. « Dis-moi que t’es pas fâché, s’il te plait. » Un murmure. Fâché tu l’as été quand tu l’as retrouvée dans cette chambre d’hôpital et que tu as cru la voir mourir. Mais tu lui as pardonné, tu lui pardonnes toujours. Et là, pas la moindre once de colère que tu as en toi n’est dirigée vers elle. Tes yeux dans les siens tu secoues la tête. Bien sûr que non espèce de gamine insensée. « Me laisse pas. » Une supplication. Quelque chose en toi s’effrite, c’est une terreur immense. Peur face à une telle responsabilité. Elle met le monde sur tes épaules et tu ne sais pas si tu peux le porter. Mais tu essaieras, et même si tu t’écroules tu tenteras de le retenir. « Never you hear me ? Never. » que tu la rassures, vrillant ton regard dans ses iris. Croix de bois, croix de fer, toutes ces merdes-là. En murmurant tu places ta main libre sur sa nuque. Et quand tu te penches tu as l’impression que tu vas l’embrasser, pire, que tu veux l’embrasser. Mais c’est juste au coin de ses lèvres que se posent les tiennes, puis sur son front. Et tu laisses ta main dans ses cheveux, mettant ta rage de côté pour ce soir.
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Jael Feliciano

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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyMar 25 Juil - 0:55

Seven. Son prénom qui tourne en boucle dans ma tête et j’me souviens de ses blagues sur le chiffre. Quand on rigolait encore. Avant que tout se casse la gueule. Seven et son sourire fugace, Seven et le quelque chose de trop fragile caché en dessous de toute cette armure. Pour ça que j’avais tiré l’éponge dans le cagibi, que je lui avait pardonné ses mots et ses gestes, sa violence lors de notre première rencontre. Parce que j’avais cru qu’il était comme moi. Aussi paumé, aussi cassé, à trembler comme un bébé le joint entre les doigts à essayer d’aspirer la fumée. Faut croire que je m’étais trompée sur lui aussi. Faut croire que je sais définitivement pas juger les gens. Je revis la scène, les scènes, au fur et à mesure que je parle. Jael, fuck. I sent you to his place a few months ago. What happened ? Fuck, what happened ? Why didn’t you tell me anything ? Ah. C’est vrai. Bien sur que c’est ça. C’était lui qui m’avait envoyé là bas, une histoire de débile comme si jouer les coursières ça pouvait rattraper mes bêtises passées. J’y étais allée de bon cœur pourtant, prête à tout, à pas me faire choper, à disparaitre avec la marchandise comme on m’avait appris. Mais encore une fois les choses avaient dérapé. J’avais rien dit, juste caché les marques, pleuré ma tristesse avec Jack sur la plage avant de rentrer en silence à l’appartement. J’me souviens avoir bredouillé des excuses pathétiques pour justifier mes mains vides et on était tous passés à autre chose. Comme toujours. Jusqu’à la seconde fois. « Parce que c’était pas important » que je murmure tout bas, secouant ma tête. « Parce que j’avais honte aussi » et que c’était la première fois depuis longtemps que je me retrouvais bousculée comme ça. Des soucis j’en avais eu, vivre dans la rue ça m’avait appris que le monde n’était pas rose, mais jamais comme ça. « T’avais d’autres choses à penser aussi » que je reprends plus calmement. La crise est passée, c’est le calme après la tempête, quand l’eau se rendort et que les bateaux se remettent à flot. Pourtant je sais qu’il faut que je continue. Que je parle, que j’explique. Je sais qu’il voudra savoir et qu’il vaut mieux tout avouer maintenant plutôt que de faire trainer. D’un coup, arracher le bandage. « J’ai dû le supplier, le laisser me toucher, le laisser me trainer jusqu’à la fenêtre et l’entendre dire que je devrais sauter, que ce serait mieux pour le reste du monde si j’existais plus » nouveau rire cassé, quand je repense à ses mots. Encore aujourd’hui y a cette voix minuscule dans le fond de mon crâne qui me dit que Seven a raison, qu’il a toujours eu raison, que j’aurais du écouter. Sauter. Mais non. Je me raccroche à Peter, à son regard. Je me raccroche à lui comme toujours parce que y a plus d’autres solutions. « C’est pas ta faute. Ni de la mienne. C’est de la sienne » et je le vois maintenant, je suis capable d’appliquer ma sentence un peu plus clairement, pointer le vrai coupable du doigt. Il aurait pu juste me claquer la porte au nez, mais à la place il a voulu jouer.
Et déjà que je me rapproche un peu plus de lui, hésitant un instant à combler ce vide que je me suis assurée de créer pendant cette dernière semaine. J’oscille, bascule, franchit la dernière ligne. Mes doigts contre sa peau, contre les siens. Promis c’est pas toi, culpabilise pas. Parce que je le connais Peadar, quand même, après tout ce temps. Beaucoup me pensent stupide, idiote, incapable de comprendre les choses. Tant mieux, qu’ils continuent de le croire. Mais c’est faux. Je retiens du mieux que je peux, note dans mon carnet mental les différences d’un demi sourire et la lueur d’un regard. J’te connais je crois, alors culpabilise pas.
Je serre un peu plus, avant d’ouvrir de nouveau la bouche, cette fois ci c’est moi qu’étale publiquement mes craintes, qui le supplie de me garder jusqu’à la toute fin auprès de lui. Est-ce que ça veut dire que j’ai fait mon choix ? Je sais plus vraiment, sans doute que j’ai jamais su. Mais ça m’empêche pas de m’agripper à lui de toutes mes forces, de me retenir de me lover contre lui, les pieds sur la pointe et la tête nichée dans son cou à la recherche d’un peu de chaleur. Jme retiens de toutes mes forces pour pas craquer, me contentant de le regarder. Me laisse pas. Never you hear me ? Never. Et ça libère quelque chose en moi, comme un sourire, un des premiers depuis la dernière fois. Je le crois. Je le crois quand il me dit ça.
Je sens ses doigts derrière ma nuque et ses yeux dans les miens. J’ai le cœur qu’a des ratés quand il se rapproche et c’est toujours aussi douloureux. Ca palpite un peu trop fort, sur un rythme désynchronisé et quand il pose ses lèvres à quelques millimètres des miennes puis sur mon front jme sens soudain comme s’il avait laissé des trainées enflammées. C’est comme Merle. Mais pas comme Merle. C’est différent mais en même temps ça y ressemble. C’est plus vraiment si innocent, pas comme jme plais à le penser trop souvent. Mais rien que pour ce soir je vais faire semblant, pas montrer le trouble, l’envie qu’il m’ai embrassé pour de vrai. Comme Seven mais en mieux, comme Seven mais en moins douloureux, comme Seven pour l’effacer, pour finir de me réparer.
Alors doucement c’est à mon tour de me redresser sur la pointe des pieds pour déposer un baiser sur sa joue avant de me lover contre lui, envoyant bouler mes dernières appréhensions. « Merci » Oui. Merci. Merci de pas m’abandonner, merci d’être là quand ça va pas, merci pour tout ce qui a été et pour tout ce qui sera. « Jpeux dormir ici ? » que je finis par demander, gamine timide, parce que j’ai pas envie de le quitter, lui et la chaleur, comme un feu au milieu de la nuit, j’me sens happé par sa lumière comme un hétérocère.
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MessageSujet: Re: resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael)   resquiller les pertes et maquiller les cernes (jael) EmptyMar 25 Juil - 2:26

Elle était rentrée les mains vides tu t’en souviens, elle devait avoir son air de petite souris qu’elle arbore à chaque fois qu’elle est contrariée ou n’a pas ramené assez d’argent. Ce que tu lui avais dit tu ne t’en souviens pas, pour toi c’était un jour comme un autre, tu n’avais aucune raison de prêter particulièrement attention à un mot ou un geste. Si tu avais su ces pans d’infortune qu’on te cachait. Tu es bien aveugle mon pauvre, tu as cru ces mensonges et tu as cru ce jour comme un autre. Et tu l’as oublié. Faut s’y faire il y a des choses qu’on ne te dit pas. « Parce que c’était pas important. » Mon cul oui. Tu aurais envie de la secouer, de lui montrer les énormités qu’elle te sort. Se faire attaquer, ce n’était pas important. Quel drôle de monde. « Parce que j’avais honte aussi. » Voilà encore ce qui te crève le cœur, ce dégoût qu’elle a pour elle-même. Si tu pouvais le lui arracher, le remplacer par tout ce que voient tes yeux. Mais tu ne peux pas, le monde serait un endroit bien plus doux si c’était possible. « T’avais d’autres choses à penser aussi. » Excuse de merde. T’es toujours occupé, pas plus un jour que l’autre, et les autres jours elle ne se gênait pas pour tout te raconter. Peut-être bien que tu lui fais peur en fait. Mais tu ne veux pas toi, l’effrayer. Tu ne l’as jamais voulu. Elle a eu trop peur pour te dire ce qui s’était passé. Ce soir elle a enfin le courage. « J’ai dû le supplier, le laisser me toucher, le laisser me trainer jusqu’à la fenêtre et l’entendre dire que je devrais sauter, que ce serait mieux pour le reste du monde si j’existais plus. » C’est comme une claque en travers de ta gueule. Une sensation de brûlure fugace, la douleur née uniquement de la surprise et de la raison de la gifle. Putain. Il a toujours su cerner les gens le Seven, hein ? Il lui a susurré à l’oreille uniquement ce qui pouvait la plonger dans la plus grande terreur. Il a joué sur ses faiblesses. Il lui a menti. Il l’a empoisonnée. Et toi tu imagines un monde où elle l’aurait écouté, où elle aurait fait le grand saut. A trembler, à hurler ce monde. Ce n’est pas la gueule de cette ordure qui te vient, tu imagines son visage à elle. Tout ça c’est parce que t’as envoyé une poupée chez un gamin qui brûle les jouets, pauvre abruti. Tu prends ton visage entre tes mains, tu t’en arracherais les cheveux. « C’est pas ta faute. Ni de la mienne. C’est de la sienne. » C’est déjà plus de ta faute que celle de Jael. Mais au fond elle a raison, celui qui a sorti les armes c’est l’autre. Avant de te blâmer, il faut qu’il rende ses propres comptes. Tu ne sais pas comment vous en arrivez là, couverte de bleus, les yeux encore rouge d’avoir pleuré, c’est elle qui te rassure. Elle est magique quelque part cette gamine.

Elle te fait t’enfoncer dans un maelström. Sa douceur se heurte contre ta peau, ses plaies conversent avec les tiennes. La main dans la main, c’est innocent non ? Putain t’essaies de continuer à y croire parce que c’est tout ce que tu veux que ça soit. Tu t’empêches d’envisager le reste. Le reste c’est interdit, le reste ça ne se fait pas, le reste c’est une trahison, un abus de confiance. Pourtant ton corps, lui, scande le parjure, il n’en a que faire des méandres de ta conscience. Il manque de tout faire s’écrouler, le baiser manque de cueillir sa bouche, tu manques l’irréparable de si peu. Putain d’instincts, à ces heures de la nuit tes impulsions ne t’écoutent pas. Elle ne dit rien elle, ne recule pas, fait comme si elle n’avait rien remarqué. En retour elle en pose un sur ta joue qui te fait l’effet d’un papillon aux ailes de torrent. Son contact te rafraîchit, te calme. Son visage dans ton cou ce n’est plus une brûlure, c’est un rayon de soleil qui se réfracte à travers l’onde. « Merci. » Ta promesse elle n’était pas difficile à obtenir. C’est toi qui espère qu’elle ne t’abandonnera pas. Ils finissent tous par changer d’horizons. Elle tu ne veux pas la voir prendre la mer, finir seul sur le rivage. Mais tu ne le lui demandes pas. Ce serait injuste. « Jpeux dormir ici ? » D’habitude ça n’a jamais été un problème, ça vous fait à tous les deux de la compagnie. Au bout de la langue tu as toujours le goût du baiser qui a failli être. Tu devrais dire non. Mais elle a de si grands yeux cette belle môme aux ecchymoses. Alors tu souris. Et tu lui dis oui, bien évidemment ; et au son de sa respiration à tes côtés, l’insomnie te quitte. Jael c’est une pilule de rêves.

FIN.
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