Name one hero who was happy ☾ Assis sur la chaise de mon bureau, un genou remonté contre la poitrine et l'autre jambe pendant dans le vide, je suis plongé dans Le vieil homme et la mer d'Ernest Hemingway. Plutôt ambitieux pour une heure aussi matinale. Enfin matinale... Tout est relatif. Disons que pour quelqu'un qui était de garde aux urgences hier soir, c'est définitivement tôt. Mais les rayons d'un soleil déjà haut dans le ciel  pénètrent à travers les rideaux blancs trop peu opaques pour bloquer la lumière laiteuse qui filtre de l'extérieur. Autant dire que je peux lire sans avoir besoin d'une lampe. Le bruissement des draps attire mon attention, et mon regard se porte sur une forme longiligne et terriblement attirante au milieu d'un océan blanc. Mon souffle se bloque dans ma gorge. Je suis transporté à Seattle, quelques mois plus tôt, avec un autre homme dans mon lit. Un homme blond comme lui, aux yeux bleus comme lui, attirant comme lui. Et pendant un instant, pendant ce trou dans l'espace-temps, j'ai l'impression d'avoir retrouvé River. Mais il se retourne, et l'illusion se rompt, la réalité me versant un seau d'eau glacé en plein dans le visage.

Il ouvre les yeux, doucement d'abord, comme pour détailler ses environs, puis plus franchement. Son regard finit par entrer en collision avec le mien. C'est froid, c'est empli de rancœur et de mauvaise foi, mais au moins, il a l'air en meilleur état que quand je l'ai récupéré dans la rue hier soir. Décidément, ça va devenir une habitude. Et la similarité de cette situation avec celle que j'ai vécue avec River il y a quelques mois est plus que troublante. Heureusement que celui-là n'a pas du tout le même caractère, sinon je serais sûrement devenu fou. « Comment tu te sens ? » Pas de bonjour, pas de bien dormi, pas quand il m'a traité comme de la merde hier soir. Je suis sur la réserve, trop peu sûr de la façon dont je vais être accueilli ce matin. Entre les insultes virulentes dans la ruelle, la tentative de fuite, et l'apaisement docile qui a fait son apparition une fois qu'il a compris qu'il ne pourrait pas se passer de mon aide, je ne sais pas trop sur quel pied danser. J'avoue que j'ai un peu peur de me prendre une droite si je fais un geste de travers. Les sourcils froncés, les lèvres pincées, je l'observe, sceptique quant à l'attitude à adopter.

Spoiler:

Tes rêves sont agités. Agités de toutes les emmerdes qui te tombent dessus. Agités par le visage de Nora tuméfié de coups. Agités de l’absence de Lachlan qui n’a jamais été aussi longue. Agités du corps sans vie de cette gamine que tu as pas vraiment eu le temps de connaître. Overdose qu’ils ont dit. Overdose, comme ta salope de mère. Celle qui a préféré la drogue à son gosse. D’ailleurs, on dirait que tout le monde préfère la drogue. Partout autour de toi. Comme si y’avait que ça. Tu les hais. Tous. Tous autant qu’ils sont. T’as envie de leur hurler que si t’arrives à continuer sans te shooter, putain, ils devraient pouvoir y arriver aussi ! T’as la rage au ventre. D’ailleurs, c’est pour ça que t’as été te battre hier. Pour laisser la colère s’exprimer. Pour frapper encore et encore et encore. Jusqu'à en crever. Jusqu'à t’effondrer de fatigue sur le sol. Mais c’est l’autre qui a fini par s’effondrer. Ta fougue, ta vitesse et ta technique t’ont fait gagner. Ta fougue surtout. Celle issue de la rage qui brûle à l'intérieur. T’as failli rentrer avec tes deux cents dollars. Ceux de tous les faux brigands qui n’ont rien d’autre à faire que parier sur les boxeurs de rues. Et forcément, ils misaient pas sur toi. Toi et ta carrure d’oiseau. L’autre et sa gueule tordue plaisait mieux. Quel bande de cons. Ils devraient comprendre à la fin que tout est pas si évident. Que tes muscles équivalent peut être pas celui d’en face mais que t’as l'entraînement et la vitesse pour la contrer. Que t’es ptete pas si mauvais. Toi le sale pédé. Bordel, s’ils savaient. Tu te fais surement plus de filles qu’eux. Même si t’as pas honte d’aimer aussi les mecs. Bande de cons.

C’est le soleil qui tombent sur ton visage qui finit par te réveiller. Ca et la douleur. Tu ouvres les yeux, grimaçant légèrement tandis que tu observes ce qui t’entoure. Tu reconnais rien. Rien du tout. T’es pas de bonne humeur. T’as mal dormi. Et la douleur te vrille le cerveau. Deux longues secondes passent avant que tu ne te souviennes enfin de la veille. Et les souvenirs remontent salement. Tu te souviens des coups des connards pas contents d’avoir perdu de l’argent sur ton dos. De la douleur lancinante. T’as essayé de te défendre mais c’était peine perdue. La fierté t’a retenu de les prier d'arrêter. T’as juste encaissé. Ton regard se pose sur lui. Tu t’souviens vaguement de sa gueule aussi. Le gars qui a pris pitié de toi. T’as la haine qu’on t’ai vu dans cet état. Incapable de tenir debout. Tu détestes ça putain. D'être faible comme ça. Incapable de se débrouiller tout seul. De dépendre de quelqu’un. Devoir dire merci aussi. Tu sais même pas pourquoi il t’a aidé ce gars. Il attend sûrement un truc de toi. Comme tout le monde. Parce que, putain, t’as bien remarqué que personne n’aidait sans rien recevoir en retour. Tu sers les dents. L’autre commence avec ses questions idiotes. “Super” Ta voix est bourrée d’ironie et de nonchalance. Faut l’dire, ça se voit sur ta gueule comment tu vas. Mal. T’as mal partout. Et en plus de ça, c’est ton ego qui a pris un sale coup. T’as cru que t’allais crever la. Sur le trottoir dégueulasse d’une ruelle merdique. Et c’est pas vraiment une fin glorieuse. “Tu veux quoi d’moi ?” T’es toujours aussi désagréable. “J’ai pas d’fric” t'hésites à rajouter que tu vends pas non plus ton cul. Mais t’es pas certain que ça soit vraiment utile. Alors tu te retiens. Tu tentes de te relever mais la douleur te lance violemment. “Putaaain” Tu grognes franchement, te laissant retomber sur le lit sans pouvoir faire autre chose.

Name one hero who was happy ☾ Sa réponse fuse, acide, amère. Tu t'y attendais, mais ça t'empêche pas de grimacer, d'esquisser un mouvement de recul face à l'attaque du lion blessé. Il serre les dents, il sort les griffes, il a mal. « Tu veux quoi d’moi ? J’ai pas d’fric. » T'en crois pas tes oreilles. Tu te figes pendant un instant, une poignée de secondes pendant lesquelles tes yeux ronds sont fixés sur sa figure écorchée vive. Et puis y a ton rire qui sort, trop vite, trop fort, mais tu peux pas t'en empêcher. Tu le réprimes, pourtant, et t'observes ton patient du coin de l'œil, un sourire flottant toujours sur tes lèvres. T'es bêtement optimiste, Felix, toujours à voir le bon côté des choses. Il t'engueule, il t'agresse, il t'insulte ? C'est pas grave, au moins, il va assez bien pour parler, pour réagir. « Si j'avais voulu ton fric, j'aurais fouillé tes poches dans la ruelle et je t'aurais laissé crever comme un rat », que tu dis, ta voix rassurante et ton sourire doux pour essayer d'amadouer l'animal blessé. « J'veux rien du tout, aussi étrange que ça puisse te paraître. J'te demande rien en échange. »

Tu veux juste sauver des vies, sauver des gens, sauver le monde. T'es pas Captain America, mais faudrait te faire rentrer ça dans le crâne à coups de marteau pour que ça reste, parce que tu retiens pas. Tu continues, tu recommences, encore et encore. Même quand la gratitude est pas au rendez-vous, parce qu'au fond, qu'est-ce que t'en as à faire, que les gens te remercient ? Tu mets juste ton expérience, ta passion, ton amour au service des autres. Et quand t'es comme ça, Felix, on dirait que t'agis pour une secte, pour les témoins de Jehova peut-être, pour l'amour de Jésus et celui de Dieu sûrement. Mais t'es pas comme ça. Tu laisses la religion à sa place, t'y touches pas. Toi, tout ce que tu veux, c'est le bonheur des autres, parce que y a que ça que tu sais vraiment faire, y a que ça que tu peux vraiment atteindre. Mais c'est dur pour les autres de te comprendre. Les autres, les humains, les égoïstes qui peuplent le reste de la planète. Tu sais que t'es une espèce en voie de disparition, que peu de gens pensent comme toi, pensent aux autres avant de penser à eux-mêmes. Peut-être que c'est pas une motivation aussi pure que tu ne le laisses croire. Peut-être qu'au fond, tu fais ça pour te sauver, toi, parce que tu sais pas faire autre chose. Parce que ta vie, c'est un trop gros bordel pour le régler par toi-même.

Et puis l'idiot essaye de se relever, trop vite, trop tôt, il retombe sur le matelas, la douleur apparente dans chacun de ses gestes, transpirant par chacun de ses pores. T'es inquiet. Tu bondis de ta chaise pour te retrouver à ses côtés, inspectant les blessures les plus profondes, les plus importantes, pour être sûr que rien ne s'est rouvert et que, sur le plan physique du moins, ça va. « Eh oh, du calme, faut y aller progressivement ! » Tu lui tends deux cachets de paracétamol qui trainent sur la table de nuit et le verre d'eau qui va avec. Tu croises son regard dubitatif, et tu soupires. « C'est pour ton mal de crâne. Et ton mal tout court, en fait, vu le point où t'en es. J'suis étudiant en médecine, fais-moi confiance. » Il a pas trop l'air d'être du genre à faire confiance, cela dit, même pas à la personne qui vient de lui sauver la vie. Mais c'est pas grave, tu t'en fous. T'as pas besoin de ça pour vivre. Mensonge.

Il rigole et ça ne fait d'exacerber ton agacement. Tu vois pas tellement ce qu’il y a de drôle. A part peut-être sa gueule de merlan frit. Tu grognes un peu à sa réponse. Et puis très franchement, tu vois pas bien ce qu’il aurait trouvé dans tes poches. Un paquet de clope au mieux. Surement presque vide. Tes poches, on te les a déjà vidé hier soir, après t’avoir tabassé. Ils ont pris ton butin de boxe et ton téléphone déjà piqué à quelqu’un d’autre. A vrai dire, ils ont surement aussi pris tes clopes. Ces putains de faibles. Obligés de s’y prendre à trois contre un. T’aimes pas tellement sa façon de te parler tout doucement. Comme s’il pouvait te casser. Y’a rien qui peut t’casser. Pourtant, c’est pas faute d’avoir essayer. Les parents, Milo, Nash, Lachlan. Même Nora. Ils ont tous pris, à leur façon, on morceau de ton âme. Ils t’ont tous blessé un peu. Mais le bouclier ne fait que se renforcer. Un peu plus à chaque fois.

Il se précipite sur toi, posant sa main doucement sur ton torse pour te forcer à te rallonger. Tu l’repousses en grognant. « Ca va, fais pas chier là ! » Ton regard est aussi noir que les hématomes qui parsèment ton corps. Pourtant, il s’obstine à vérifier l’état de tes blessures. T’as envie de l’pousser salement, mais t’as franchement pas la foi. Parce que, putain, ça fait mal. Alors tu l’laisses faire en grognant. Il finit par se détacher pour attraper quelque chose sur la table de nuit. Et il te tend deux cachets. Deux cachets blancs qui pourraient contenir n’importe quoi. « Plutôt crever » T’as aucune intention de te faire droguer. T’as déjà assez pris comme ça. Merde. « Si tu veux m’baiser, pas besoin d’me droguer d’abord » Ta phrase est volontairement provocante. Tu veux le mettre mal à l’aise. Et t’es persuadé qu’il va se mettre à rougir comme une pucelle. Ou à bégayer comme un con. Ce gars, il est probablement un peu plus vieux que toi, pourtant, il a l’air d’un putain de gamin. De ceux qui ont rien vu de la vie. Il t’agace. Franchement. Avec son air de sauveur et ses bons sentiments. Qu’il se réveille putain. La vie c’est pas de la barbe à papa. Ta phrase, elle fait écho à ton meilleur pote et sa connerie de drogue. A la douleur de l’intérieur. A l’une des raisons de ta gueule fracassée. Lui ce connard qui fout quinze ans d’amitié en morceau, juste pour le fun. Bordel.

Ta provocation l’arrête même pas. C’gars, il a un sérieux complexe du sauveur. Il a l’air trop gentil, ça fait limite flipper. T’as pas tellement l’habitude de ça toi. Autour de toi, y’a que des chiens. Des chiens comme toi. Qui ont appris à survivre à la dur. Tu les connais pas toi, les fragiles. Et ceux que t’as croisé ont ou vont mal finir. Ton ventre se retourne au souvenir de la gamine blonde, allongée dans son lit, les lèvres bleus et le corps sans vie. Ouais. Elle, elle avait l’air d’avoir une jolie âme. De ceux qui se font écraser par la vie parce qu’ils savent pas se battre. « … sérieux dude, t’as rien d’autre à faire là ?! » T’as pas genre … des amis ? N’importe quoi. Pourvu qu’il se casse et qu’il te foute la paix avec ses mots tous doux.

Name one hero who was happy ☾ Tu lui tends les cachets mais il a un mouvement de recul, comme un animal blessé devant la seule chose qui pourrait le sauver parce qu'il sait pas, il sait plus faire confiance à ceux qui clament vouloir le soigner. T'as pas l'air dangereux pourtant, mais il en a sûrement trop vu pour savoir qui est honnête et qui ne l'est pas. Il met tout le monde dans le même sac, tout le monde dans la case "indésirables", et ça te fait mal, un peu. Pas parce qu'il te fait pas confiance mais parce qu'il mérite pas d'être aussi jeune et aussi malmené par la vie. Personne mérite ça. T'aimerais bien que ça existe pas, les gamins comme ça, échoués dans la vie, les rêves écrasés la confiance piétinée le bonheur évaporé. T'aimerais bien mais tu peux rien y faire, à part essayer de sauver ceux qui croisent ta route. Tu le laisseras pas partir, tu le laisseras pas tomber. « Plutôt crever. Si tu veux m’baiser, pas besoin d’me droguer d’abord. » Y a quelque chose qui gratte derrière la provocation. De la peine, de la douleur, de la rancune. Du vécu. Une blessure de l'âme et du cœur, de celles que tu ne pourras jamais guérir, peu importe tes talents en médecine. Tu fronces les sourcils, t'ouvres la bouche pour le questionner, puis tu te ravises. C'est pas une bonne idée. Il te fait déjà pas confiance, alors si en plus tu viens rajouter ta curiosité mal placée par-dessus le marché, t'es sûr que la moindre parcelle de coopération qu'il peut encore y avoir dans son système sera balancée par la fenêtre. Alors tu te contentes de lever les yeux au ciel, comme si c'était un gamin capricieux, qui dit que des conneries pour se rendre intéressant. S'il veut pas prendre ses cachets, tant pis pour lui, tu vas pas les enfoncer au fond de sa gorge non plus hein, faut pas pousser. De toute façon, tu sais très bien que la fierté ne fait jamais long feu face à la douleur, alors tu déposes de nouveau les deux paracétamols sur la table de nuit, à côté du verre d'eau, et tu te penches pour récupérer des compresses dans la trousse de premier secours, posée au pied du lit. « … sérieux dude, t’as rien d’autre à faire là ?! » Tu lèves les yeux pour rencontrer les siens, si bleus, si noirs. Ils sont orageux et rageurs, prêts à te décapiter si tu viens trop près. Mais t'as pas peur. Tu le défies du regard quelques secondes avant de retourner à ta tâche, et tu prends un malin plaisir à serrer les bandages un peu trop fort, histoire qu'il comprenne que oui, il a besoin d'aide, et merde à sa fierté mal placée. « Non, désolé, ma petite amie m'a largué la semaine dernière et j'ai rien trouvé de mieux à faire pour m'occuper. » Le sarcasme t'entaille la langue, mais si y a que ça qu'il comprend, tu joueras le jeu.

Tu grognes franchement de douleur lorsque l’gamin vient serrer tes bandages. Tu l’imaginais pas comme ça. A faire exprès de d’faire souffrir pour te punir de ton insolence. A croire qu’il faut pas toujours se fier aux apparences. « Putain, lâche moi ! » Tu l’repousses franchement. Tu comprends pas sa lubie de te sauver. Comme un putain de prince charmant. Ca t’fait bien rire tient. Parce que plutôt crever que d’être la princesse en détresse. Monsieur s’essaye au sarcasme. Et ta réponse reflette la question. « On t’a jamais dis que c’est pas l’prince qui chope la princesse à la fin ? »

Il finit par t’laisser là, quittant enfin la pièce. Tu sers les dents en essayant de te relever, la douleur t’en empêchant. T’aurais voulu te barrer, mais la peine est telle que t’as même envie d’dégueuler. Alors tu finis par attraper les médocs, les avalant sans eau tant bien que mal. Bordel, à cet instant, tu donnerais n’importe quoi pour une bonne bouteille de whisky. Pour oublier la douleur de tes cotes pétées. Tu cherches ton téléphone autour de toi. Sans succès. Ces putes ont du te le prendre. Bordel, tu peux même pas prévenir Nora ou Soan. T’es juste bloqué là comme un con. Comme un putain de faible. Sans même t’en rendre compte, tu finis par fermer les yeux. Et tu t’endors, t’égarant dans des rêves trop sombres. Des rêves agités. Le même genre de cauchemars que quand t’étais gosse. Et dire que tu pensais t’en être débarrassé. Et pourtant, les revoilà. Tu te réveilles en sueur, la douleur te lancinant le bide. Et l’gosse est là. A t’observer avec ses grands yeux et sa gueule d’ado. Tu sais pas combien de temps est passé. Longtemps il semblerait. La nuit est de nouveau tombée. Faut que tu préviennes les gens. Au moins Nora. Elle le dira aux autres. Tu te redresses dans le lit avec la plus grande des difficultés. Faut qu’tu pisses. Ca devient foutrement urgent. « Sont où tes chiottes ? » Tu bouges lentement, jusqu’à mettre tes pieds sur le bord du lit. T’as une sale allure. Le corps marqué de bleus et de coupure. Il parait que t’as deux cotes pétés. Et que t’as bien d’la chance que ça n’est pas percé d’organe. Le mec vient te soutenir pour t’aider à te lever. « C’quoi ton nom … ? » La voix est moins agressive. Faut dire, ça a beau t’faire chier, il faut avouer que c’mec t’a surement sauvé la vie. Tu serais surement crevé si t’étais resté là bas.

Name one hero who was happy ☾ T'aurais peut-être pas dû serrer les bandages autant, parce qu'il te pousse violemment, dévoilant une force insoupçonnée. « Putain, lâche moi ! On t’a jamais dis que c’est pas l’prince qui chope la princesse à la fin ? » Tu restes quelques secondes figé, la colère durcissant tes traits. Tu détestes qu'on te croie mal intentionné. Tu veux aider sauver les gens, t'aimes pas être la cible de sa méfiance sous la seule excuse qu'il s'est déjà fait blesser avant. Tu conçois qu'il prenne pas ta main tendue de suite, mais quand même, après une nuit passée sous tes soins, il pourrait faire preuve de bonne volonté. « Pour la centième fois, je veux pas te sauter putain ! » T'essayes de pas crier, mais on entend bien la rage vibrer sous tes mots. « Et puis merde, tu sais quoi ? Démerde-toi. » Tu te lèves du lit et tu sors de la chambre en fermant (claquant) la porte. Tes colocs vont se demander pourquoi tu t'énerves d'un coup, mais rien à battre. Tu files direction la cuisine pour te calmer un peu, les mains posées sur le comptoir et la tête baissée pour tenter de contrôler ta respiration. Il te suffit de quelques minutes pour te rafraîchir les idées et de quelques secondes pour culpabiliser. T'aurais pas dû le laisser tout seul. T'aurais pas dû réagir comme ça t'aurais pas dû t'aurais pas dû. Mais tu l'as fait. Tu te rapproches de la porte de ta chambre et tu toques doucement. Rien. T'insistes. Toujours rien. Tant pis, t'ouvres la porte. Il dort comme un bébé. T'esquisses un sourire et tu refermes la porte derrière toi, reprenant ton poste d'observation (ta chaise) et ton bouquin pour veiller sur son sommeil.

Tu te lèves de temps en temps pour passer un linge humide sur son front. Il fait des cauchemars, tu le sais tu le vois à ses yeux qui bougent trop vite sous ses paupières à ses soubresauts incontrôlés à ses sueurs froides. Et puis, au bout de plusieurs heures, alors que le soleil a déjà disparu derrière les immeubles alentours, il ouvre enfin les yeux. Première question: « Sont où tes chiottes ? » Charmant. Tu veux répondre mais il se redresse et tu te précipites à ses côtés pour le soutenir. « Doucement ! T'as deux côtes pétées et bien de la chance que ça t'ait pas troué un organe. Alors vas-y mollo. » Il ne proteste pas. Au contraire, il te demande même ton nom. Eberlué, tu mets quelques secondes à répondre. « Euh... Felix. Et toi ? » Tu le guides jusqu'à la porte de la chambre. « Dernière porte à droite. Ah et... » Tu sors ton portable de ta poche. C'est pas un bijou de technologie, au contraire vu comme vous vous entendez tous les deux, mais tu le lui tends en espérant qu'il le prendra. « Si t'as besoin de prévenir quelqu'un. Y a pas de code. » Vu la tronche du truc, c'est un peu évident.