Sous le regard médusé du gamin, dans la lumière éblouissante des guirlandes d'ampoules, les toiles du grand cirque se découvrent. Il n'est pas plus haut qu'un muret, le petit, et est obligé de froisser ses chaussures usés pour se mettre sur la pointe des pieds. Les cheveux devant les visage, couvrant ses yeux vitreux et rougis par la brise, il aperçoit au loin la petite boutique de bois dans laquelle on vends les tickets. Ses petites mains agrippant les jambes des adultes, parfois le bras de papa, il se fraie un chemin dans la forêt dense des pantalons de velours. Au dessus de lui le soleil tranche sur son visage, le découpant en deux comme deux masques, oh sweet karma. Mickey, du coin de l’œil attentif, se raidis quand les fauves entre par une porte dérobée. Le souffle court, la bouche ouverte dans un "oh" de stupeur, l'italien ne sent pas la main qui agrippe le col terni de sa chemise. Papa à le regard mauvais, il tire sur la chemise et fait décoller le gamin de son perchoir à rêves. Les fauves disparaissent, les rêves de Mickey s'accrochent à chaque parcelles de toiles rouge sur lesquelles il pose son regard enfantin. Il est encore jeune, et pourtant son cœur est déjà empli d'un désir qu'il n'avait jamais ressentir auparavant. Les larmes s'effacent doucement contre la peau de ses joues, Mickey murmure tout bas, une promesse faite à lui-même, celle de revenir rêver dans la grande tente.

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Elle est belle tout le temps.
Elle est belle tout le temps mais encore plus quand elle est dans son lit.

Du coin des lèvres il laisse s'échapper la fumée de sa cigarette. Du bout des doigts il caresse la peau de marbre de la poupée. Il laisse des traces, des dessins d'étoiles et de lune. Dehors c'est le matin qui berce, et la caravane s'emplie d'une lumière dorée qui fait danser les boucles blondes de la belle.

C'était une nuit, puis deux.
Deux enfants, un jeu.

Mickey écrase le cul de la cibiche contre le fond du cendrier, son regard se perds sur les courbes de la poupée qu'il voudrait faire sienne mais qui se refuse encore un peu. Trop innocente pour le monde, elle se croit amoureuse du rêveur et voudrait lui faire choisir. Le cirque ou l'amour. Le fil ou la chute.

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Le visage du brun se crispe alors qu'il tente d'attraper un bout de ciel. Les muscles tendus, le corps absent. Mickey il a le mal de terre, ce qu'il préfère c'est les cieux. Pas à pas le funambule se dresse de tout son haut, et même le vent ne pourrait pas faire tanguer l'équilibriste. Il vole Mickey, il est libre. A l'autre bout du perchoir c'est la lignée d'arrivée, la récompense. Les yeux figés dans l'espace, sur le moment, y'a rien qui peut le détacher de tout ça.

Et puis il glisse sur la terre, détache de ses chevilles les harnais de vie qui le protège. Quand il se redresse c'est avec la tête qui tourne. Les deux frères, mains habiles et fortes poignes l'attendent déjà. Mickey il aura la gueule en vrac ce soir, pour ne pas avoir suivi les règles, pour être attiré par l'interdit qui brûle la peau. On trahit pas la famille, surtout pas quand elle est dans le besoin.

Plop.
Plop.

Du sang sur le sable. Le nez pété par les hommes qui croient plus au sang qu'au cœur. "Fallait être là Mickey, pour ta famille", qu'ils balancent en se marrant, en se barrant.

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"Je t'aime pas tu sais." Elle enroule une mèche de cheveux contre son doigt, son visage se défait.  Mais la main de la poupée tente de trouver la joue froide du funambule qui se détache, s'éloigne pour ne plus sentir le touchée brûlante de la blonde. "Si, tu m'aimes." Qu'elle prononce du bout des lèvres, le cœur au bord des yeux. Le brun s'allume une énième cigarette, pour faire passer le goût amer dans sa bouche, le goût d'échec. Mickey repousse, de nouveau, la main de la belle qui s'effondre.

Et il aurait pu courir pour la rattraper.
Et il reste là.
Comme un con.