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 On air _(Ivian)

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MessageSujet: On air _(Ivian)   On air _(Ivian) EmptyLun 15 Mai - 11:40

On air
Ivy & Valerian
SIRENS OF THE CASPIAN

Le soleil brillait, miroitant en milliers d'éclats sur l'océan, les renvoyant droit sur ma vitrée qui m'offrait une vue imprenable sur le front de mer. Bien que New-York et sa folie frénétique me manquaient, je devais reconnaître très largement apprécier le noueau coin où j'avais pris mes quartiers. Tybee n'avair rien à voir avec le reste de Savannah. Ici c'était l'opulence. La voiture de course y servait à afficher nonchalamment sa réussite, souvent accompagnée d'une somptueuse villa. Parfois uniquement résidence secondaire. Un putain de ghetto de riches. Et je m'y sentais comme un requin au milieu d'un banc d'otaries: prêt à m'en faire un festin.
Parce que toute cette jolie foule pleine aux as était un vivier de choix pour remplir les comptes. L'image, mesdames et messieurs, était primordiale. Avoir le bon look, au bon moment, la bonne marque de voiture, ou tout simplement le plus coûtant. J'me souvenais notamment d'une des dernières garden party, où un blonde peinturlurée comme un chef de guerre indien m'avait montré d'un air princier ses lunettes plaquées or. Incrustées de diamants deux carats au bas mot, évidemment. Cette jolie bagatelle, faite sur mesure, ne lui avait seulement coûté trente milles dollars... Ces putains de lunettes auraient pu racheter la moitié de mon prêt étudiant à l'époque. Sans déconner.
Mais c'était justement ces excès qui étaient délicieux à détourner pour ses propres intérêts. La gentille blonde (aka porte-monnaie Luis Vitton remplit de gros billets) avait pris congé vingt minutes après son coup d'éclat. Et une prise de rendez-vous chez moi pour le surlendemain.
C'était tellement facile de les amadouer. Souffrir de névrose était tendance. Inviter son psy à ses dîners? Le summum du chic! Sans compter que celui-là était de New-York. Il avait eu des célébrités (en réalité seulement deux acteurs connus qui avaient suffis à ma renommée). Mais les plus simples à garder durablement étaient les femmes. Ces "ménagères" dans leur cage dorée qui s'ennuyaient ferme. Tellement qu'elles se rendaient compte un beau matin être en train de déguster un verre de chardonnay à dix heures trente. Monsieur parti au boulot et les enfants à l'école. Alors on noyait ses nerfs suppliant pour une quelconque stimulation (comme appeler Mary afin de critiquer la nouvelle couleur des volets d'Emma?) dans les sulfites doucereux. C'était là que j'intervenais, et les alcooliques n'étaient vraiment pas dur à repérer pour peu qu'on y prête attention. A six coupes de champagne par demie heure on était quasiment sûr de pas se tromper. Ma belle gueule et cette rauque sollicitude qui sortait de ma bouche par la suite suffisaient à finir le travail. Imaginez-vous, une ou deux fois par semaine, prendre entre trente minutes et deux heures pour déblatérer tout ce qui vous passait par la tête avec quelqu'un obligé de se taire par serment d'Hypocrate? C'était le pied.
Enfin ça, c'était la première catégorie de clients mais pas la plus intéressante. La seconde justement, représentait tout l'attrait que je pouvais avoir pour la profession de psychiatre. Ces vrais patients et patientes, souvent contre leur gré car inscrites de force par des proches pour comprendre et guérir leur si profond mal être. Ils étaient jeunes, très jeunes, ou encore très vieux. Y avait plus d'hommes dans cette tranche aussi, surtout depuis m'être porté volontaire auprès de la police de la ville pour prendre en charge gratuitement la psychanalyse des jeunes délinquants.
Je jetais un œil à ma montre: deux minutes avant le prochain rendez-vous. J'abandonnais ma tasse sur le comptoir de l'îlot central avant de descendre au rez-de-chaussée. Mon cabinet s'y étendait avec la salle d'attente, embrasé par le soleil. Au milieu se trouvait un imposant salon tout en cuir luxueux. L'atmosphère s'y composait surtout d'une chaleurosité épurée. J'allais moi-même chercher la première patiente de l'après-midi. Dans la vingtaine, avec un corps de liane qui correspondait, une robe choisie pour l'épouser de la manière la plus avantageuse possible. Miss Ivy Meister flamboyait. Palpitait. Charmait. Connaissant chaque leçon sur le bout des doigts.
Doigts qui vinrent ranger plus ou moins sagement une mèche folle derrière l'oreille tout en adoptant une moue tendrement aguicheuse. Lors de notre rencontre ses premières phrases annoncèrent rapidement la couleur. Sous les formes, le fond s'affichait clairement belliqueux: la princesse souhaitait appliquer son diktat et le pauvre manant que j'étais n'avait plus qu'à s'incliner en acquiesçant. Elle ne voulait pas être ici, en tout cas pas de manière ouverte. Elle était une rebelle dans l'âme et se laisser apprivoiser ne faisait pas parti de ses attributions.
Ivy était la personnification des maux de la richesse dorée de ce siècle. Balancée trop jeune sous les projecteurs, habituée trop tôt à baigner dans le luxe, victime de compulsions qui dépassaient l'entendement des simples mortels. Un fin sourire se plaqua sur mes lèvres alors que la jeune femme terminait son salut d'une diction exemplaire.
"Bonjour, Miss Meister, nous commencerons doucement aujourd'hui. Juste histoire de planter le décor. Et si je suis de trop mauvaise compagnie rien ne vous empêchera d'être transférée chez un autre confrère à la fin de notre rendez-vous. Je ne suis pas du genre à retenir quelqu'un contre son gré."
Je sortis un calepin griffonné de notes pour commencer la séance. La commencer réellement je voulais dire. J'inscrivis la date et le doux prénom dans une marge vierge avant de reprendre. Il aurait néanmoins été bien dommage de ne plus la voir en ces lieux, puisqu'en plus d'être d'une beauté sculpturale la jeune femme s'avérait d'un certain intérêt. Elle était maligne, peut-être un peu trop pour certains apparemment, mais malheureusement pour elle j'étais d'une patience infinie. La blonde Alice s'était égarée dans le monde des fous, et Cheshire se ferait un plaisir de lui indiquer le chemin détourné pour en sortir...

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MessageSujet: Re: On air _(Ivian)   On air _(Ivian) EmptySam 20 Mai - 0:36

Elle n’avait pas vraiment voulu être là, dans ce foutu canapé, à attendre en croisant, décroisant les jambes, que Valerian Popescu daigne venir la chercher. Oh ça non, elle n’avait pas vraiment voulu. Les hôpitaux, les médecins, elle passait son temps à les fuir, à minimiser les diagnostiques. Pas question de retourner là bas, entre quatre murs blancs et la surveillance perpétuelle. Pas question de retourner là-bas, car cette fois ci il n’y aurait pas Woody pour rendre le temps moins loin. Il n’y aurait qu’elle et la solitude comme putain de compagne. Pas question. Pas question.
Elle avait frôlé le danger pourtant, en trainant dans les pattes de Jedediah. Psychiatre, il avait du surement comprendre depuis longtemps ce qui se passait dans sa tête, dans son cœur, mais il n’avait jamais rien fait pour l’enfermer. Il s’était juste contenté de laisser sa porte ouverte, de lui offrir ses bras, sa présence. Père ou amant. Entre les deux, sans notion de payement, si ce n’est un baiser délicat sur ses paupières fatiguées.
Et puis il y avait eu l’incident lors d’un tournage. Le blanc puis le noir, et son corps se fracassant contre le sol alors qu’elle perdait connaissance. Une bonne crise d’anémie d’après le médecin, et un manque de vitamine, sans doute dû à une alimentation trop sommaire. Sommaire. Si avaler le stricte nécessaire pour ne pas crever était sommaire, alors oui, on pouvait appeler ça comme ça. Le fait est que son agent avait pris peur et une fois sortie de sa nuit d’observation à l’hopital, Mary l’avait inscrite de force à une thérapie. Juste pour être sûr que tout va bien, qu’elle avait bredouillé, avant de lui signaler que refuser d’aller à ces rendez-vous ce serait ne pas respecter le contrat et qu’Ivy serait surement virée. Merde.
Alors elle avait reculé la date le plus possible, espéré éviter jusqu’au bout du bout, mais Mary avait veillé au grain, et le jour J elle avait reçu l’adresse du psychiatre et l’heure du rendez-vous. C’est là que les choses avaient changées quand le sms était arrivé. Valerian Popescu. C’est une blague non ? Non ? Non. Pas une blague, et le sourire d’Ivy devenu carnassier en quelques instants. Parce que des Popescu ça faisait déjà deux fois qu’elle en croisait, deux fois qu’elle en embrassait, deux fois qu’elle les aimait à sa manière. Le hasard, cet humoriste, et l’idée qui germe dans sa tête. Parce que sur ses côtes elle sent encore les coups de Seven, ses insultes, la façon si juste qu’il avait eu de lui enfoncer la tête sous l’eau. T’en fais pas Seven, c’est pas finit, c’est jamais finis avec moi.

Et la voilà qui poiraute dans la salle d’attente, la nervosité soudain qui l’envahit autant que l’envie de partir d’ici au plus vite et tant pis pour la pseudo vengeance, tant pis pour le contrat. Rapidement elle commence à envoyer un sms à Gaïa pour lui demander de venir la chercher quand soudain la porte s’ouvre et qu’un homme – la trentaine environs – entre dans la salle d’attente. C’est flagrant, la ressemblance. Les traits plus fins que Seven et Lucian, sans doute un cadeau de la mère, mais le reste est criant : la mâchoire, le sourire, le regard. Le foutu regard. Merde. Elle se redresse lentement, inspire un bon coup et pose sur son visage son masque de poupée méprisante. Pas question de le laisser prendre le dessus et il est trop tard pour reculer, alors elle ajuste sa robe trop moulante, passe une main dans ses boucles brunes et fonce. « Ivy Meister, j’ai rendez vous avec le Docteur Popescu, vous êtes son secrétaire ?» Non. Bien sur que non ce n’est pas son assistant. Mais c’est plus drôle comme ça. Et le sourire qui s’étire, séductrice, sale habitude qui lui colle à la peau quand elle se retrouve propulsée en présence d’hommes comme Valerian, trop entrainée à faire de son mieux pour obtenir d’eux tout ce qu’elle veut.
Bonjour, Miss Meister, nous commencerons doucement aujourd'hui. Juste histoire de planter le décor. Et si je suis de trop mauvaise compagnie rien ne vous empêchera d'être transférée chez un autre confrère à la fin de notre rendez-vous. Je ne suis pas du genre à retenir quelqu'un contre son gré « Oh. Pas le secrétaire donc ? C’est rare un docteur de votre âge. Vous devez être brillant » elle parle sans parler, poses ses griffes dans la partie, doucement, lentement. Elle veut le tester, vérifier si elle a une chance de gagner, car les psychiatres sont toujours les adversaires les plus dangereux : capable de déterrer votre véritable personnalité en un tour de mots. Pas question qu’elle ne se laisse faire. « J’aime beaucoup votre costume. Dior ? Non. La coupe est trop classique. Chanel peut être. » elle se rapproche un peu pour observer les coutures, posant délicatement sa main sur l’avant-bras de Valerian, caressant les boutons de manchette du bout de l’ongle. « Je n’ai pas spécialement envie de changer, que ça soit vous ou un autre ça sera la même histoire non ? » petit clin d’œil elle finit par se laisser tomber sur le canapé, reprenant sa place initiale. Elle croise les jambes délicatement avant de continuer « Autant choisir le plus plaisant à regarder, si l’on doit passer du temps ensemble non ? » Elle imagine bien que sa petite technique est du vu et revu, un gars comme lui doit avoir toutes ces croqueuses de diamants se jeter à ses pieds quand leurs maris avaient le dos tourné. Pas grave, ça ne coûte rien d’essayer pas vrai ? Autant s’amuser.
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MessageSujet: Re: On air _(Ivian)   On air _(Ivian) EmptyLun 29 Mai - 15:45

On air

Elle était exquise. D'une douceur incisive. Ivy, la femme voulant rester jeune fille, syndrome de Peter Pan mis en action par ses fards, son corps longiligne, ses colorations et décolorations. Elle ne devait jamais laisser personne indifférent: en bien ou en mal on se souvenait d'elle. Pour ma part on était loin du dégoût à son égard. Y avait un attrait professionnel et une espèce de jubilation sadique à constater qu'en dépit de tous ses efforts pour se débattre elle n'aurait d'autre choix que de venir ici. Une fois par semaine pendant une durée indéterminée pour décrire en long et large ses activités, exprimer à voix haute les sentiments qui lui traversaient le myocarde et, bien sûr, disséquer son anxiété latente. Être psychiatre n'était ni plus ni moins qu'une mise à mort intimiste du "soi actuel" de son patient.
"Brillant? Vous en jugerez par vous même au bout de quelques séances. En tout cas je ne peux que vous le souhaiter."
Je n'eus aucun mouvement de recul lorsqu'elle vint inspecter d'un œil expert les détails de mon costume. Pas même quand sa fragrance poudrée, mâtinée d'un relent plus sordide, s'infiltra loin dans mes narines. J'accusais le coup avec un sourire poli.
"Vous avez l’œil. Chanel en effet. J'ai une préférence pour Armani d'habitude, mais celui-ci est confortable pour travailler."
Bien. Ivy mettait déjà en place ses mécanismes de défense face à la thérapie, et vu l'épaisseur de son dossier soigneusement rangé dans mon bureau ça ne m'étonnait pas. Tentatives de suicide diverses et variées, une propension à l'auto-destruction prononcée et caractérisée par les prises massives d'alcool et de stupéfiants. Sans oublier l'affreuse manière d'exprimer tout son mal-être en refusant de s'alimenter correctement.
"Miss, j'ai l'impression que votre précédent thérapeute, et ses prédécesseurs d'ailleurs, vous ont traité à la manière d'une enfant fragile et émotive." Si mon ton avait gardé les mêmes intonations chaleureuses mon regard, lui, s'était sensiblement durci. "Êtes-vous une enfant?"
Traitée en adulte à l'âge de la petite fille. Considérée en gamine alors que la femme se révélait. De quoi tordre l'évolution naturelle. J'aspirais moi à lui réapprendre à s'exprimer, à marcher, à respirer sans que chacun de ses mouvements ne soient une torture. Ou un jeu.
"Ce que je vous propose c'est d’entretenir une discussion entre adultes. Pas forcément sensée. Sans test dépassé à faire. Mais avec un minimum de franchise de la part de chacun."
Je fouillais avec minutie et bienveillance le joli masque de porcelaine translucide qui habillait son visage. La première étape serait de le retirer avec délicatesse pour constater ce qui se cachait en dessous. Évaluer les dégâts. Réparer ce qui pouvait être sauvé puis lui enseigner à devenir maîtresse de son propre corps et de son esprit. Autant qu'on puisse. Et sur la durée qu'il faudrait. Devant cette gosse j'éprouvais un mélange d'excitation face au défi qu'elle représentait et une pointe d’attachement peu familière. Quelque chose dans son regard assombri, ses mimiques de grande dame et ses mouvements d'allumeuse aguerrie m'amenaient à un instinct de protection similaire qu'avec mes petites sœurs. Sans l'attachement fraternel qui en découlait.
Mais surtout, elle me faisait penser à Zita. Avec son port de danseuse ou son sourire jamais très loin. Cette façon de dodeliner de la tête en vous regardant d'un air condescendant, comme si elle vous accordait une immense faveur à vous adresser la parole. Une Zita, jolie sauvageonne, en un peu plus fragile. Pas capable d'affronter le monde toute seule sans quelqu'un pour lui servir de béquille et la forcer à relever le menton... Ou alors c'était moi qui m'acharnait encore à vouloir trouver des ressemblances où il n'y en avait pas.
"Si vous pensez en être capable, Miss Meister, nous allons tout de suite aborder les sujets sensible." Je marquais une pause pour m'installer plus confortablement dans mon fauteuil, avant de remarquer l'intérêt discutable qu'elle portait à son téléphone depuis plusieurs minutes.
"Lâchez votre portable pour le moment. Vous pouvez le garder à portée de main si vous le souhaitez néanmoins."
La moindre distraction ne ferait que compliquer davantage notre chemin déjà périlleux. Ivy devrait entièrement se consacrer à moi, tout comme je le ferais pour elle durant nos séances. Un juste échange. Légèrement despotique, j'en convenais.
J'attendis patiemment qu'elle accepte de se séparer de son cellulaire pour poser la première question réellement dérangeante.
"Sauriez-vous me dire depuis quand l'acte de vous nourrir est devenu problématique?"
Volontairement, je ne lui avais pas demandé pourquoi cette chose aussi anodine s'était révélée douloureuse. Impossible. Les causes étaient souvent profondes et mystiques. L'anorexie n'étant qu'un symptôme parmi tant d'autres. Ivy aurait de nombreux secrets à me révéler, je n'en doutais pas, et il me tardait de me pencher dessus afin de les disséquer minutieusement.

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MessageSujet: Re: On air _(Ivian)   On air _(Ivian) EmptyMer 7 Juin - 22:48

Brillant? Vous en jugerez par vous même au bout de quelques séances. En tout cas je ne peux que vous le souhaiter. quelques séances. C’est déjà trop. Ivy sent son sourire se figer, son masque se craqueler rien qu’un instant quand elle se rend compte qu’elle est coincée dans ce bureau pour un nombre inconnu de rencontres. Vite. Du mieux qu’elle peut-elle reconstruit le tout pour offrir Valerian un de ses sourires charmeurs qu’elle maitrise tant. « Pas besoin de plusieurs séances pour le voir docteur » elle suinte la séduction Ivy, chaque mot qu’elle fait rouler sur sa langue, sur ses lèvres, et le regard brûlant qu’elle lance comme attaque frontale. Pas question de se laisser faire. Pas question de se laisser avoir. Elle compte bien instaurer ses propres règles dès qu’elle en aura l’occasion, prenant le contrôle sans que Valerian ne s’en rende compte. Du moins, dans ses objectifs. Alors elle s’avance, effleure du bout des doigts le tissus du costume, provoque le contact. Elle a plus besoin d’apprendre Ivy, trop longtemps que ça fait partie d’elle, la foutue séduction, comme un besoin primaire au final. Vous avez l’œil. Chanel en effet. J'ai une préférence pour Armani d'habitude, mais celui-ci est confortable pour travailler. « C’est mon métier vous savez » qu’elle répond en haussant les épaules, satisfaite d’avoir deviné juste. Faut dire que oui, des costumes comme ça elle en a vu défiler des centaines et des centaines. Combien en a-t-elle caressé ? Combien en a-t-elle dépouillé leurs propriétaires dans des jeux sordides pour atteindre le sommet ? Trop pour qu’elle ne puisse pas aujourd’hui reconnaitre la marque d’un costume.
Ivy s’installe de nouveau dans le canapé, téléphone entre les doigts et regard distrait, elle compte déjà les minutes jusqu’à la fin, empilant dans son crâne les excuses ingénieuses pour éviter la prochaine réunion. Parce qu’il y aura une prochaine réunion. Et une autre, encore, encore, jusqu’à ce que Valerian se rende compte à quel point elle est pourrie là-dessous, à quel point tout est cassé, combien son âme en est usée d’hurler chaque seconde, chaque minute. Miss, j'ai l'impression que votre précédent thérapeute, et ses prédécesseurs d'ailleurs, vous ont traité à la manière d'une enfant fragile et émotive. Précédent thérapeute. Donc il a eu son dossier d’Allemagne. Précédent thérapeute qui remonte à y a trop d’années, cinq ans à peu près, et ces mois passés enfermés dans l’hôpital aux côtés de Woody à partager leurs secrets. Il est consciencieux Valerian. Et Ivy range l’information dans un coin de sa tête. Êtes-vous une enfant? « Si vous voulez je peux l’être » Ivy répond du tac au tac, comme une blague de mauvais goût, l’air innocent peint sur son visage. Ils sont trop nombreux à lui demander ça. Dolly gravé au creux des reins, et la naïveté factice qui lui sert de réputation. Mais Valerian ne prend pas part au jeu, il continue le plus sérieusement possible, lui laissant croire qu’elle a une sorte de choix dans cette situation. Ce que je vous propose c'est d’entretenir une discussion entre adultes. Pas forcément sensée. Sans test dépassé à faire. Mais avec un minimum de franchise de la part de chacun. Mine de rien c’est sans doute un des premiers à lui parler de la sorte. C’est sans doute un des premiers aussi qu’elle consulte sans la présence de sa mère à ses côtés. A cette pensée Ivy frissonne. Le Monstre. Elle jubilerait si elle savait, retour à la case départ, et tout ce qu’elle avait prédit qui était arrivé. Son cœur et son esprit brisé par un garçon stupide qu’elle avait toujours détesté. Ou adoré. Entre les deux, Ivy n’avait jamais compris la position de sa mère vis-à-vis de Meo. « Va pour la discussion entre deux adultes plus ou moins consentants alors » elle insiste sur le plus ou moins, sourire narquois, comme pour lui rappeler qu’elle n’a aucune envie d’être ici et qu’elle ne se laissera pas manipuler. Il pense pouvoir la soigner ? Y en a trop qui ont essayé avant, et y a jamais rien eu de bon qui en est sorti.
Si vous pensez en être capable, Miss Meister, nous allons tout de suite aborder les sujets sensible. Cette fois ci la grimace est difficile à cacher, sans doute qu’elle essaye de rattraper la chose avec un soupir d’ennuis et dans sa cage thoracique ça bat à cent à l’heure. Parce que quelque chose lui murmure que Valerian n’est pas comme les autres médecins qu’elle a rencontré. Y a quelque chose de déterminé dans son regard, une étincelle qui semble briller un peu plus que l’heure avance. Alors elle ne répond pas. Elle se contente de jouer avec son téléphone, allumer, éteindre, parcourir ses sms qu’elle commence à connaitre par cœur. Y a les minutes qui s’affichent en haut à droite et le temps qui s’écoule bien trop lentement. Lâchez votre portable pour le moment. Vous pouvez le garder à portée de main si vous le souhaitez néanmoins. Prise sur le fait, piqué au vif comme une gamine à qui on aurait fait une remarque en pleine classe Ivy redresse la tête pour dévisager Valerian, le défiant un instant du regard. « Si ça vous fait plaisir » et lentement elle fait glisser le téléphone sur la table basse, toujours à portée de main au cas où elle recevrait un appel important, du genre de son agence, lui signifiant qu’elle n’avait plus besoin de venir ici. Le doux rêve. Alors Ivy s’enfonce de nouveau dans le canapé, croisant et décroisant ses longues jambes encrées, geste trop sensuel pour être anodin.
Sauriez-vous me dire depuis quand l'acte de vous nourrir est devenu problématique? Ah. C’était ça le problème. Qu’avait-on encore raconté ? Qu’elle se faisait vomir dans les toilettes du studio ? Pitié, toutes les filles le faisaient. Qu’elle ne mangeait presque rien aux repas officiels ? Comme toutes les autres, préférant peut être une trainée de poudre blanche sur un coin de table et quelques barres protéinées plutôt qu’un hamburger ou une pizza dégoulinante de graisses saturées. « Je n’ai aucun problème là-dedans docteur » Oui. Aucun. Menteuse, menteuse, et le sourire qui s’étale encore une fois sur son visage, le regard incandescent, comme une provocation pour qu’il ose la contredire. Le pire dans tout ça c’est qu’elle y croit presque. Que malgré la petite voix qui lui hurle attention, elle se persuade quotidiennement que tout va bien. Tellement bien. Parfaitement bien. « Je croyais qu’on devait avoir une discussion sérieuse. Je suis mannequin docteur, normal que je surveille ma ligne, c’est mon métier. » Elle se redresse, passe une main dans ses cheveux comme pour lisser ses boucles pourtant bien fixées. Bien sur que c’est son métier de rester mince, fine, jolie. Bien sur qu’elle fait des efforts, des putains de sacrifices. Parce que c’est comme ça. Y a le rythme cardiaque qui n’en peut plus, l’envie de jouer qui disparait aussi vite qu’elle est venue et déjà Ivy se lève en soupirant. « Ecoutez, c’était sympa, mais si c’est pour me demander pourquoi je me fous deux doigts dans la gorge, vous aurez la même réponse que tout le monde. Parce qu’au final y a rien de plus hypocrite de votre part de me reprocher ce genre de choses, quand ce sont des hommes comme qui dictent les règles » ou les femmes comme sa mère, ces personnes haut placées qui dirigent tout, jusqu’aux dictats des sociétés qu’Ivy ne voit même plus. « Si vous voulez parler avec moi, demandez moi plutôt ce que j’aime boire, où est-ce que j’aime me faire embrasser, quelle couleur de robe pour une avant-première ou bien encore si j’ai déjà réalisé le fantasme de la patiente et du psychiatre sur le bureau en verre. » elle finit sa tirade en haussant les épaules, les yeux rivés dans ceux du brun. « Là je pourrais vous répondre » Parce que tout ça elle sait, parce que tout ça elle connait, que c’est plus simple. Bien plus simple, que de lui demander pourquoi manger la fait autant flipper.
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MessageSujet: Re: On air _(Ivian)   On air _(Ivian) EmptyLun 10 Juil - 18:37

On air
Ivy & Valerian
MONEY

Elle savait y faire, la danseuse équilibriste sur le fil du rasoir. C'était typique de ce genre de pathologie: le mensonge en faisait partie intégrante. Elle pouvait vous présenter mille facettes différentes en enlevant masque après masque, chacun soigneusement empilé, aussi fins que du papier de riz. Mais diablement efficace.
Voilà pourquoi elle répondait à mes questions par de nouvelles interrogations. Comme si c'était bien moi qui tenait la barre de notre entretien, alors qu'elle indiquait le cap à suivre d'un doigt impérieux. Voilà pourquoi elle grimaçait avec amertume devant les piques enrobées de miel que je lui lançais.
"Il y a une différence entre surveiller sa ligne et refuser de manger, Miss. Vous êtes trop maligne pour l'ignorer."
Je lui concédais néanmoins devoir subir les pressions du milieu dans lequel elle exerçait. Ce qu'elle vendait c'était son image. Une de celle qui vous semblait parfaite, qui vous faisait acheter pour mieux lui ressembler. Ivy vendait du rêve et manifestement, ne se nourrissait que de sa substance immatérielle. Tel un papillon, elle était attirée par l'aura lumineuse que dégageaient certains individus , ceux qui lui permettaient -l'espace d'une seconde, d'une journée ou d'une année- de tromper l'ennui. Mais à force et inévitablement, Ivy finissait par consumer son ou sa partenaire. Le faire fuir dans le meilleur des cas. Une veuve noire n'était pas faite pour vivre en communauté.
J'interrompis ma prise frénétique de notes pour relever vers elle un sourcil dubitatif.
"Je ne vous ai jamais reproché quoi que ce soit. Simplement posé une question. Et si je devais me cantonner à me dire qu'une personne se fait vomir simplement pour rester mince, je ferais un bien piètre thérapeute."
Pensivement, je me penchais en direction de la jeune femme alors qu'elle-même s'affairait à rediscipliner ses boucles impeccables. Elle était jolie Ivy, avec une bouche écarlate qui dévoilait de temps à autres l'éclat ivoire de ses dents. Dans des sourires trop francs afin de provoquer l'insurrection, ou plus timides, presque gêné lorsqu'elle répondait à des interrogations dérangeantes. Dans un demi-rictus traînant sur ses lèvres pour se moquer perpétuellement du monde entier. Et d'elle. Surtout d'elle. Parce qu'au fond les autres elle s'en foutait bien. Ils étaient trop insignifiant pour lui porter atteinte, ou au contraire trop écrasant pour qu'elle ne veuille pas se les attacher.
Je cherchais encore ce mouvement véritable qui lui illuminerait ses grandes pupilles.
J'hésitais sérieusement sur ma réponse qui allait suivre: garder le silence ou me justifier... Le premier risquait de m'éloigner de ma patiente et créer une distance peu désirable. La seconde option soulignerait une faille dans laquelle Ivy pourrait s'engouffrer.
"Et si moi, je vous disais aimer les hommes? Votre remarque sur ces règles tacites seraient caduques, Miss."
Et le pire c'est que ce n'était pas tout à fait faux... J'appréciais la beauté, plus particulièrement celle un peu abîmée que présentaient certains individus. Chez cette femme aux traits émaciés par exemple, mais au charme si remarquable. Chez ce jeune homme au profil de statue, avec une crispation continue de colère flottant sur son visage. Partout où je pouvais la trouver, je la reconnaissais et lui portais de l'intérêt. Un peu comme un collectionneur d'âmes.
"Et puisque vous l'évoquez: je vous verrais parfaitement dans une robe rubis, un Manhattan à la main et votre amant en train de vous embrasser délicatement juste en dessous de l'oreille. Là où vous auriez mis une goutte de parfum quelques heures auparavant, avec un arôme puissamment féminin, comme Chance, de Chanel."
Au fur et à mesure de ma tirade ma voix se fit plus douce, plus rauque aussi, ronronnant presque comme une litanie embrumée pour projeter cette image. Sciemment, je choisis d'éviter le fantasme évoqué précédemment, sans pouvoir empêcher le souvenir d'un goût de tabac mentholé se répandre sur ma langue.
Je m'adossais profondément dans mon fauteuil en réadoptant un air professionnel détendu.
"Laissons de côté les questions trop spécifiques. Comment cela se passe-t-il pour vous professionnellement parlant?"
Introduction terminée. Lever de rideau sur le début de l'acte I.

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MessageSujet: Re: On air _(Ivian)   On air _(Ivian) EmptyDim 23 Juil - 19:41

Il y a une différence entre surveiller sa ligne et refuser de manger, Miss. Vous êtes trop maligne pour l'ignorer. Le sourire qu’elle ne dissimule qu’à moitié quand Valerian lui fait la remarque. Bien sûr qu’elle est maligne, mais ça trop peu de gens le savent, trop occupés à ne voire que l’emballage, poupée stupide au corps idéalisé. Mais pas Valerian. Non. Pas Valerian. Bien différent de son frère ou de son père, et Ivy se demande s’il n’a pas hérité de tous les neurones de la famille. Ca serait quand même drôle. Et un peu triste pour le reste de la fratrie. Mais qui sait. Alors elle prend des notes Ivy, comprend qu’avec lui faut pas jouer pareil, faut être plus fine, moins cruche. Faut aiguiser les lames et les aiguilles. Parce qu’elle ne compte pas se laisser faire, tomber sans même se défendre. « Qui vous a dit que je refusais de manger ? Je mange, juste de façon réfléchie » et le mensonge qu’elle enrobe d’un regard appuyé. Bien sûr qu’il ne la croira pas et si elle avait un repas avec lui, il comprendrait que si elle passe son temps à jouer avec la nourriture c’est pour créer une illusion de satiété. Elle doit se contrôler, ne pas grimacer, ne pas devenir excédée, ne pas perdre le contrôle. C’est difficile les sentiments, les émotions, surtout en ce moment, surtout quand elle danse sur des charbons ardents. Alors elle finit par craquer un peu trop rapidement, le masque qui se fissure sans qu’elle ne se rende compte, persuadée de jouer deux coups d’avances alors qu’elle vient déjà de se faire piéger.
Je ne vous ai jamais reproché quoi que ce soit. Simplement posé une question. Et si je devais me cantonner à me dire qu'une personne se fait vomir simplement pour rester mince, je ferais un bien piètre thérapeute. Ivy s’enfonce un peu plus dans le siège, sans vraiment s’en rendre compte, un peu comme une reflexe défensif. Il est mauvais l’adulte. Très mauvais. Ou plutôt très bon. Il est différent, cherche sans doute à vraiment connaitre le patient, pas une de ces foutues blouses blanches qu’elle manipulait à quinze ans. Un peu comme Jedediah. Beaucoup comme Jedediah. Bon sang ce qu’il lui manque cet idiot. Mais c’est compliqué. Tout est compliqué. Comme toujours.
Alors Ivy ne répond pas, à court d’argument ou d’envie d’argumenter, elle croise les bras et le défi du regard. Essaye de me soigner et tu verras. Parce qu’il n’est pas le premier et sans doute pas le dernier à essayer, même si c’est sans doute le premier à être proche d’arriver à quelque chose. Alors à la place elle se protège Ivy, enfile son armure, sa carapace, crache les mots et devient plus féline, les dents qui brillent dans le noir comme une promesse d’une attaque proche. Debout elle domine, elle observe, attend la réponse de Valerian, partagée entre le désire de savoir son prochain mouvement et l’envie de partir en courant.
Et si moi, je vous disais aimer les hommes? Votre remarque sur ces règles tacites seraient caduques, Miss. « Mais je n’ai jamais dit qu’on parlait de vous » qu’elle répond en murmurant, emmagasinant l’information à l’arrière de son cerveau. Lui ? Aimer les hommes ? Fort possible, qui était-elle pour juger la sexualité des autres quand la sienne était aussi catastrophique que chaotique. Mais c’était toujours ça de pris, une information de plus à ne pas négliger. « Mais si c’était le cas, je répondrais que les règles sont faites pour être brisées et qu’on peut toujours improviser » et que la seule limite est celle de l’esprit, esprit qui s’effiloche trop avec le temps, avec la vie, et puis tous les sentiments.
Lentement elle retourne s’asseoir, comme si Valerian venait de lui donner un nouvel os à ronger, quelque chose à attaquer. Lui aussi d’ailleurs semble entrer dans la danse, il a ce quelque chose de différent dans le regard, la nostalgie d’un moment qui n’appartient qu’à lui mais qui lui a filé entre les doigts. Et puisque vous l'évoquez: je vous verrais parfaitement dans une robe rubis, un Manhattan à la main et votre amant en train de vous embrasser délicatement juste en dessous de l'oreille. Là où vous auriez mis une goutte de parfum quelques heures auparavant, avec un arôme puissamment féminin, comme Chance, de Chanel. Elle aussi elle pourrait l’imaginer, amant ou amante, et pourquoi pas Valerian, les lèvres contre la peau, le rouge de sa robe qui se reflète dans la glace et les soupires qui se font trop rares. « Vous avez beaucoup d’imagination Docteur » qu’elle finit par murmurer le sourire poison aux lèvres, les jambes qui se croisent et de nouveau sa peau blanche qui se dévoile au niveau des cuisses, un instant, juste instant, le temps de replacer le tissu correctement. C’est presque naturel pour elle, comme une façon de respirer, d’exister.
Mais déjà Valerian rompt l’instant, brise le mirage ; Déjà qu’il la tire sans douceur vers la réalité alors qu’elle aurait aimé continuer à rêver. Laissons de côté les questions trop spécifiques. Comment cela se passe-t-il pour vous professionnellement parlant? « Dommage je commençais à vous trouver bien plus amusant que le précédent » le précédent psychiatre sous-entendu. Mais l’entracte lui a permis de reprendre des forces, de mieux se préparer et déjà Ivy se redresse un peu plus, comme pour montrer qu’elle n’est pas faible. Qu’elle n’est jamais faible. « Tout va très bien, j’ai mon agence et des propositions, je fais ce que j’aime. » c’est vrai. Et en même temps faux. C’est un mélange des deux, c’est la pression pour remonter la pente après l’ouragan, c’est retrouver sa place au milieu des autres quand elle a disparue trop longtemps. Mais paradoxalement le travail est sans doute le seul endroit où elle peut se fermer complétement, comme un refuge, une île au milieu de la mer.
« Et vous monsieur Popescu, professionnellement parlant, ça se passe comment ? » Si elle avait des lunettes, elle les ferait glisser sur le bout de son nez, comme une vieille institutrice qui attend la récitation de la leçon de géographie. « Des cas passionnants ? Allez, racontez moi, vous devez en avoir des histoires » des histoires plus jolies que la sienne, plus tristes aussi, surement plus sanglantes. Comme un besoin avide de se rassurer, de savoir que y a pire à côté.

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