Wolfgang n'avait jamais été un grand fan des karaokés. Il aimait bien les fêtes, il adorait boire de l'alcool, bien qu'avec modération puisque ces derniers temps il n'avait plus vraiment la tête à se bourrer la gueule, et adorait la musique forte et les corps qui se mêlent. C'était toujours l'occasion idéale pour faire de nouvelles rencontres. Mais là, il se sentait coincé. Il avait été invité à l'anniversaire de cette meuf là, qu'il connaissait à peine. Il s'était dit que c'était une bonne idée sur le coup. D'autant plus qu'une de ses amies, Loria, était censée venir. Mais voila. Il était devant le comptoir à boisson, Loria lui avait envoyé un sms pour lui dire qu'elle ne viendrait pas, et il s'était rendu compte, de ce fait, qu'il ne connaissait personne d'autre. Hors, entamer les échanges sociales lorsqu'il n'avait pas encore 3gr dans le sang, c'était pas son truc. Le sommet de la soirée avait sans doute été atteint lorsqu'il avait appris qu'il y allait y avoir un karaoké. Seriously ? Elle a quel âge pour organiser ça ? C'est un truc de gonzesse. Il sait pas chanter, en plus. Cette information avait eu le mérite de le mettre de particulièrement mauvaise humeur, et il sirotait son verre de bière dans un coin de la salle en ruminant ses idées noires. Il flippait à mort. Il avait vraiment, vraiment, vraiment pas envie de devoir passer devant tout le monde pour chanter un truc, même un truc à la con. Évidemment il était sur que les filles allaient se mettre au Disney. Il était prêt à mettre 50 balles sur La Reine des Neiges, ce torchon nyanyan sur le pouvoir des "sisters powers". Mais les mecs du coup ils chanteraient quoi ? Du Queen ? Du Michael Jackson ? Ben voyons. Plutôt crever que de chanter. Il avait essayé une fois, et le souvenir de cette infâme honte lui brûlait encore les joues. Il ne chanterait pas, un point c'est tout.
Il remarqua une silhouette silencieuse à quelques pas de lui. Un jeune homme qui, de toute évidence, semblait s'amuser ici autant que lui. Il était peut-être temps de fraterniser en vue d'une alliance potentiel contre le karaoké de la mort. Glissant d'un pas vers l'inconnu, il remarqua que son verre était vide et en saisit un nouveau au passage avant de le tendre au gars. Il était étrange d'ailleurs. Tout pâle, presque maladif. Avec des cheveux longs qui bouclaient légèrement. Ce mec était de toute évidence resté bloqué dans les années 70. Pas étonnant qu'il soit mal à l'aise ici. "Tiens, ton verre me paraissait vide alors.... Il lui colla un nouveau verre de bière dans les mains sans lui demander son avis. "Je m'appelle Wolfgang." Lâcha t'il alors qu'il observait son interlocuteur. Avait-il déjà, ne serait-ce qu'une fois, passé la porte d'un coiffeur ? Un super crucifix pendait à son cou, chose que Wolfgang n'avait pas remarqué au début. Il le sortait d'une soirée déguisée ou quoi ? Super... Déjà qu'il avait du mal à sympathiser avec les gens, mais en plus lorsqu'il en avait la possibilité, il tombait toujours sur les chelous du coin. Sa vie était géniale.

« JE VEUX CHANTER UNDER PRESSURE, PUTAIN. »
L’esclandre qui éclate quelques mètres plus loin, c’est Veronica, la tornade qui a encore frappé, qui joue un peu la drama queen avec ses quelques verres de trop dans le nez, le daiquiri toujours vissé à la main. Elle ne sait pas ce qu’elle fout là, elle a juste accepté l’invitation d’une nana qu’elle connait vaguement parce qu’elle vient souvent au Diner, même pas une amie, tout juste une connaissance. Elle a toujours aimé les karaokés. Pas parce qu’elle aime particulièrement se donner en spectacle, elle le fait suffisamment lorsqu’elle se produit sur le bitume de Savannah, mais surtout parce qu’elle aime l’ambiance, les écrans qui diffusent des clips un peu trop kitsch, les néons qui font danser des couleurs fluorescentes sur les visages, les cocktails colorés qui passent de mains en mains. C’est pour ça qu’elle a accepté de venir, Ronnie, ça et la perspective de rencontrer des gens, de se vider la tête, de ne pas penser au bordel qu’est sa vie, à Atticus qui lui a lâché les baskets depuis quelque temps (elle l’a un peu cherché), à Lars qui ne lui parle plus suffisamment (elle ne l’a pas cherché du tout), à Abel qui envahit beaucoup trop son esprit quand elle n’y prend pas garde (elle l’a carrément cherché). Ça fait du bien de sortir, de voir des nouvelles têtes, de tester des boissons improbables et de finir complètement déchirée au fond d’un caniveau. C’est ce qui se profile, de toute façon, quand on voit la manière dont la soirée a commencé. Elle tient fermement le micro dans ses mains, fait une moue boudeuse, les deux lèvres pincées pour signifier à son interlocutrice qu’elle campera sur ses positions, qu’elle ne se laissera pas dicter sa manière d’agir et surtout, qu’on ne lui imposera pas un répertoire. C’est Bowie ou rien. « Lâche ce micro, Veronica », l’ordre qui claque dans l’air et Ronnie qui en perd son latin, qui balbutie, qui finit par faire claquer le micro sur le bois de la table voisine, provoquant un larsen désagréable. Elle aimerait lui dire que sa soirée pue la merde, mais c’est pas vrai. Jusqu’à maintenant, elle s’amusait plutôt bien. Et elle ne compte pas se laisser saper le moral par une petite écervelée en jupe courte. « On a dit qu’on chantait Pocahontas. » Elle fronce les sourcils, à deux doigts de balancer sa boissons au visage de la petite nana qui la toise. Pocahontas c’est elle, ok, elle va pas chanter des putain de messages sur son peuple, elle va pas faire croire que les indiens étaient heureux que ces putain d’anglais viennent s’accaparer leurs terres. Trop tard pour parler, y a L’air du vent qui commence à résonner dans les enceintes et sa seule voie de sortie est de s’éloigner en pestant dans sa barbe.
Elle ne sait pas pourquoi elle se dirige vers ces deux mecs à l’écart de la foule, elle se demande aussi ce qu’ils foutent ensemble. Ils n’ont pas l’air de sortir du même tableau, entre le blondinet peroxydé au look soigné et l’hippie dégingandé qui sirote sa bière comme si c’était une boisson venue de l’espace. « Salut », elle lâche en arrivant près d’eux, sourire aux lèvres comme si elle n’avait pas eu quelques envie de meurtre ces dernières minutes. Elle porte le daiquiri à ses lèvres, en boit une gorgée de façon distinguée, faudrait pas passer pour une alcoolique devant des gens qu’elle connait à peine. « Je m’appelle Ronnie », elle lance d’un ton enjoué, la main tendue pour serrer celles de ses interlocuteurs. C’est trop formel, ça ne se fait pas, elle n’a aucun sens des convenances et c’est profondément navrant. Mais il faut de tout pour faire un monde. Des mecs branchés, des ermites, des Veronica. Elle dodeline un peu de la tête alors que l’hôtesse de cette soirée entonne le refrain de la chanson, bien malgré elle. Elle déteste ce film. Elle déteste l’idée-même que ce film ait pu voir le jour. Faut vraiment être barjot pour ajouter un aspect romantique à une histoire basée sur la barbarie des hommes, comme si Anne Franck avait eu un plan cul. « Belle soirée de merde, hein ? » Et elle regarde dans le vide en continuant de siroter sa boisson, persuadée que ses interlocuteurs partageront son point de vue.

Il était optimiste Ezra. La fille qui l'a invité à son anniversaire (c'est bien un anniversaire ?), c'est à peine une cliente du disquaire chez qui il travaille. Elle y accompagne souvent une de ses amies qui, elle, est une vraie cliente à qui Ezra aime bien parler — parce qu'elle aime les Beatles et qu'il l'a fait acheter un coffret de leurs vinyles hors de prix, ce qui lui a valu une tape dans le dos et un petit bonus financier de la part de son patron, du moins il pense que c'était pour ça. Elles parlaient de la fameuse soirée sous son nez quand celle qui n'achète pas grand-chose a vu qu'il les regardait avec peut-être trop d'insistance et lui a dit qu'il serait le bienvenu. De la musique et une fan des Beatles à qui parler toute la soirée, une soirée normale avec des jeunes de leur temps, c'était une expérience pour Ezra, ça. Il n'avait pas réalisé que la fille avait apparemment décidé d'inviter toute la ville pour meubler et qu'il n'y trouverait pas celle qu'il connaissait. Il aurait dû demander à Toad de l'accompagner.

Il a échangé quelques mots avec des gens au hasard, s'est pris quelques regards en biais comme s'il importunait les heureux élus qui préféraient rester entre eux, a sifflé une première bière trop vite pour compenser, puis s'est retrouvé tout seul dans un coin. Pourtant il veut bien chanter lui, mais il n'a pas bien compris comment on doit s'y prendre pour avoir son tour. « JE VEUX CHANTER UNDER PRESSURE, PUTAIN. » Une voix amplifiée lui fait lever les yeux sur la petite scène. Une fan de Queen et Bowie ? C'est presque aussi bien que les Beatles. La soirée n'est pas perdue. Aussitôt qu'il se fait cette réflexion, un type décoloré l'approche et lui tend un verre en se présentant. Il a une drôle de dégaine pour un ange mais il lui sourit quand même comme à son ange gardien venu le sauver d'une soirée ratée. « Euh, ouais, merci, » il dit en acceptant le verre qu'il empile dans l'autre. « Moi c'est Ezra. » Wolfgang c'est encore plus original. Il tire un peu la gueule quand même l'ange gardien, surtout après l'avoir détaillé du regard, faut croire qu'à lui non plus son look ne plaît pas. Il aurait du opter pour le jean-hoodie-baskets dont il se contente parfois, histoire de se fondre dans la masse. Mais il voulait pas se fondre dans la masse, c'était pas le plan.

Il cherche quoi dire pour éviter de se faire déserter aussitôt que quelqu'un a daigné lui adresser la parole, mais celle qui voulait chanter Under Pressure vient à sa rescousse à son tour. Trois c'est mieux, trois c'est bien, trois c'est suffisant pour qu'un truc tienne debout, comme un tabouret ou un tricycle. Il lui serre la main en lui rendant son tour et répète son prénom. « Ezra. » Puis vient le commentaire sur la soirée. Autour d'eux il y a des gens qui s'amusent, Ezra n'est pas certain que la soirée soit mauvaise en elle-même, mais sans doute que Ronnie n'aime pas qu'on la contrarie alors il n'en rajoutera pas une couche. Il hoche la tête en faisant une moue vague. « À nous trois on peut peut-être prendre la scène d'assaut et chanter Under Pressure. » Même si c'est pas dans la sélection. « C'est quoi ton style Wolfgang ? » Le classique ?

« Moi c'est Ezra. » Ezra. Ça sonnait bien. Peut-être que ce type était sympa finalement, même si en 5 minutes c’était pas facile d’en juger, et de toute façon un troisième luron fit irruption dans leur super contre soirée. Ronnie, aka la meuf qui voulait chanter Under Pressure depuis environ ¼ d’heure et qui du coup avait apparemment trouver que venir se réfugier vers eux était la meilleure solution pour régler ses problèmes. Hm. « Moi c’est Wolf »Lâcha le blond alors qu’il lui rendait sa poignée de main. Sérieux Ronnie t’es en 2017 à une soirée tu serres les mains ? ok. Soit. Il en faut pour tout le monde hin. « Belle soirée de merde, hein ? » Wolfgang acquiesça, heureux de trouver une personne dans cette pièce qui partageait son point de vue sur l’ambiance assez bancale de la soirée. Sérieusement il avait l’impression de s’être pommé, qu’est ce qu’il foutait là au juste ? « À nous trois on peut peut-être prendre la scène d'assaut et chanter Under Pressure. » Des applaudissements pour Ezra ! Palme d’or de la meilleure idée du siècle ! Non mais seriously ???!? Wolfgang le fusilla du regard, mais ce dernier était trop occupé à scruter la scène pour se rendre compte qu’il venait de s’attirer l’animosité du blond décoloré. Il était hors.de.question que Wolf mette un seul pied sur cette scène improvisée blindée de gens complètement torchés. Lui qui pensait avoir trouvé une planque en rejoignant le petit timide du coin, il venait de se mettre les doigts dans les yeux bien profonds. Et comme si ça suffisait pas, Ezra se tourna vers lui pour ajouter : « C'est quoi ton style Wolfgang ? » Mon style ? Mon style ???! Mon style c’est de pas chanter en dehors de ma cabine de douche, déjà. Faillit-il répondre d’un ton acerbe, mais il se contint parce qu’il n’avait pas envie de se mettre à dos les seules personnes avec qui il avait réussi à décrocher un semblant de conversations lucides. Enfin pour le moment. Après Ronnie avait pas non plus spécialement l’air d’avoir tous ses esprits, mais il était encore trop tôt pour juger du degré d’alcoolisme de ses interlocuteurs. « J’aime bien Under Pressure. » Maugréa-t-il. Mais non, non, non, il chanterait pas, aller vous faire foutre. « Mais j’ai un talent au chant assez limité, je préfère pas monter perso mais j’peux vous aider à prendre la scène si vous vous sentez d’humeur à vous ridiculiser en public. » Toujours là pour vous servir m’ssieurs dames. Il sirota sa bière, l’humeur assez refroidie et un air de chien battu accroché à ses traits…  Sérieux non s’il vous plait…

Y a du Disney dans les enceintes et le cœur de Veronica sur la sellette, elle veut pas entendre cette chanson de merde une seconde de plus. Question de principe. Pff, qui elle croit tromper, elle a plus aucun principe quand ça concerne tonton Walt ou les dessins-animés, c’est comme les comédies musicales, elle pardonnerait n’importe quoi du moment qu’on lui file des gens qui chantent et des sentiments qui dégoulinent de l’écran. On va dire que c’est juste une question d’orgueil, le fait de ne pas vouloir prendre part à la fête. Elle la connait à peine, la reine de la soirée, elle aurait jamais dû accepter de venir simplement pour boire à l’œil. Parce que ouais, elle arrive à s’faire offrir des tournées depuis tout à l’heure, c’est à cause de sa jolie gueule, de ses yeux trop grands et des plis qui se dessinent sur ses joues quand elle sourit. Elle en est pas consciente, Ronnie, ça lui passe au-dessus comme un vol d’hirondelles dans un ciel de printemps, elle a jamais eu conscience de sa beauté, t’es moche, la rengaine de sa pute de mère qui lui revient en tête, son verre qui se vide d’un trait. « J’reviens », elle interrompt Ezra et ne prend même pas la peine de s’excuser, elle est déjà partie. Papillon, de fleur en fleur, de cœur en cœur. De verre de vin en coupe de champagne. Indécrottable, incorrigible. Y a un plateau qui passe avec des cocktails, elle en chope un quand le serveur a le dos tourné, sirote le Cuba Libre avec un petit sourire satisfait avant de revenir vers Wolfgang et Ezra. Y a quelque chose de réconfortant à les avoir trouvés dans la foule, à avoir aperçu deux âmes comme la sienne, paumées au milieu de ce cinoche, deux mélomanes qui ne veulent pas s’infuser des chansons de nanas en manque d’amour pour le reste de la soirée. Y a quelque chose de marrant, aussi, parce qu’on dirait un petit groupuscule terroriste, à comploter pour savoir comment ils vont s’emparer de la scène. Enfin, ça marcherait mieux si Wolfgang faisait preuve de davantage d’enthousiasme. Elle lui file un petit coup de coude entre les côtes, fronce les sourcils. « J’suis sûre qu’tu chantes bien. » Elle en sait rien, elle s’en fout un peu, mais elle a trop picolé pour vraiment capter que ce qu’elle dit est insensé. Se rendant rapidement compte de sa boulette, elle se mord la lèvre, penche la tête sur le côté. « En fait, j’en sais rien, mais on s’en fout, c’est pas l’principe d’un karaoké. » C’est pas fait pour chanter bien, c’est vrai. C’est fait pour chanter tout court. Chanter à s’en esquinter les cordes vocales, à s’en user la voix, à plus pouvoir parler une fois rentré chez soi. Une nouvelle gorgée, elle soupire, tapote du bout des doigts sur sa cuisse pour marquer le rythme. Jamais totalement à sa place mais chez elle un peu partout, Ronnie, elle était jamais venue ici et elle semble déjà avoir semé des bouts d’elle un peu partout dans la salle.
Les greluches ont pas encore fini, ça la désespère, tellement qu’elle jette des regards désabusés à la scène dans le maigre espoir qu’elles finissent par se casser. Et c’est ce qu’elles font, au final, lorsque la chanson se termine quelques secondes plus tard. « J’dis qu’on va sur la scène et qu’on leur montre ce qu’est la vraie musique. » Yeux légèrement plissés, elle pue l’alcool à cinq-cents mètres et ils auraient toutes les raisons de refuser. Sauf qu’elle a Ezra dans son camp, elle pense. Parce qu’il a ce look de Beatles, qu’il ne l’a pas repoussée quand elle s’est approchée d’eux et, surtout parce qu’il est le premier à avoir suggéré qu’ils prennent le micro. « Sergeant Pepper’s Lonely Hearts Club Band ? » Et elle tend la main vers le petit hippie, sourire au coin des lèvres, m'lâche pas sweetie.

Entre Ronnie qui les abandonne sans un regard en arrière et Wolfgang qui montre l'enthousiasme d'un cochon qu'on mène à l'abattoir, Ezra se dit que son idée est déjà tombée à l'eau, un pétard mouillé dans son petit cœur d'oisillon chanteur. Il enfonce le nez dans son gobelet de bière pour fuir le regard noir du décoloré et hausse les épaules un peu pour lui-même, pour se dire que c'est pas bien grave s'il a raté son coup pour se faire des amis cette fois. Il y en a plein des gens à cette soirée. Mais Ronnie revient avec son cocktail, finalement elle s'était juste éloignée le temps de se ravitailler, et la voilà qui revient à la charge pour essayer de convaincre Wolfgang de chanter avec eux. Ezra lance un sourire à ses deux acolytes ou peut-être bien à la salle entière, même s'il n'y a personne pour le lui rendre. « Mais oui, on s'en fout de bien chanter, et moi je zozote t'as dû entendre, » il fait à Wolfgang, venant en renfort à Ronnie. Ça ne l'a jamais arrêté, Ezra. Il ne sait pas s'il n'a honte de rien ou s'il a tellement honte de tout que ça finit par en annuler les effets. Et puis, en réalité, il zozote moins quand il chante et lui chante plutôt bien, juste au moins, grâce à tous les chants religieux dont il a été abreuvé depuis gamin, mais il garde ça pour lui. Le but est de rassurer Wolfgang, pas de le décourager encore plus en lui filant des complexes. Ezra n'est pas sûr que ce soit efficace, dans tous les cas. Il a l'air difficile le garçon. Ronnie doit être difficile aussi dans son genre, mais à canaliser surtout. En l'occurrence, ça ne pose pas de problème à Ezra, même si elle est visiblement ivre et pas forcément en contrôle. Il s'en fout, surtout quand elle tend la main vers lui en prononçant les mots magiques. « Sergeant Pepper’s Lonely Hearts Club Band ? » Elle allume des étoiles dans ses yeux en disant ça et en même temps le rose monte aux joues d'Ezra. Est-ce qu'il le porte tellement sur lui qu'il est un fan inconditionnel des Beatles ? Il baisse les yeux sur la chemise rentrée dans son pantalon à la taille un peu plus haute que ceux des autres mecs, pas pattes d'eph non plus ce soir mais ça aurait pu. Ouais. Ça se voit. Et dire que c'est lui qui appelle les Américains des Anglais. Il devrait peut-être feindre l'accent britannique pour aller avec le reste. Il lui rend son sourire en attrapant sa main et jette un regard interrogateur derrière lui à Wolfgang. Il ne va pas jusqu'à lui tendre la main non plus, quelque chose lui dit que ce n'est pas le genre de Wolfgang de se la jouer cour d'école et puis sa main libre est encore occupée par ce qui reste de sa bière. « Allez, au pire tu fais juste les gros bras pour nous aider à prendre le micro, tu seras notre roadie. » Et il rit en se laissant entraîner au bord de la scène.