agacement. neven, il déteste ça. nash et nora encore disputés, paul qui demeure « suisse » pour ne surtout pas prendre parti, jumeau diabolique ayant oublié ses cornes dans un coin sombre de cet appartement miteux qu’ils partagent tous les quatre. mais ce qui l’étouffe encore davantage, c’est surtout ce téléphone qu’il ne cesse de passer de main en main, froncements de sourcils à l’appui. baya. quatre lettres qui mettent son cœur en émoi. baya. jolie blonde, jolie obsession qui ne cesse de tarir ses prunelles d’un feu ardent de convoitise. baya. le fantôme qu’il ne parvient jamais à capturer entre ses doigts, dresseur de pokémons incapable de la battre dans l’arène. baya l’enflammée, baya l’éthérée. alors quand neven baisse le regard sur l’écran blanchâtre de ce téléphone dérobé sur un coin de table et constate de n’avoir aucun nouveau message, y’a une rage intense qui palpite dans son myocarde. baya qui ne donne aucune nouvelle depuis quelques semaines, bientôt un mois. baya qui apprécie plus que tout de le faire languir, neven-obsédé par sa princesse des rues, par sa princesse-tête brûlée. neven, il aime jamais personne. nash, il lui a jamais appris… et il paraît que voir sa mère se barrer du jour au lendemain pour laisser papa s’alcooliser jusqu’à en crever n’aide pas. pourtant, c’est bien une sorte d’affection qui fait gonfler son cœur comme un ballon de baudruche ridicule qu’il aimerait bien faire exploser à l’aide d’une aiguille acérée. mais il a déjà essayé neven, et ça a jamais fonctionné. y’a eu qu’une douleur vivace qui s’est répandue un peu partout dans son être, apparue après qu’il ait amoché ses phalanges contre des murs ou d’autres visages pour se soulager.
d’un pas rageur, neven quitte l’appartement en claquant la porte bien fort, agacé de ces disputes incessantes, agacé d’être oublié, agacé de n’être qu’un parmi tant d’autres. neven, il est jamais satisfait, et ça reste toujours douloureux dans son crâne quand il constate qu’il est toujours laissé de côté. neven le petit calimero qui aimerait tant d’être accepté dans l’illégalité d’un trafic qu’il sait exister et qui lui est refusé. le nez relevé vers l’astre solaire qui brille de tout son soul, neven est tenté d’aller rouler jusqu’à s’oublier sur les routes goudronnées. au lieu de ça, il avance comme une âme en peine, errant dans les ruelles jusqu’à arriver devant une boutique de fleur. neven, on dirait pas mais il a toujours eu un petit côté sensible, amour pour les végétaux qu’il tient à garder secret. et il s’avance malgré tout pour admirer les compositions, jusqu’à repérer la fleur. la plus jolie de toute, bouton de rose offerte aux regards viciés. baya qui est là. le sang du caldwell ne fait qu’un tour : qu’est-ce qu’elle fait là ? et pourquoi est-ce qu’elle ne répond pas à ces deux textos qu’il a lutté pour ne pas envoyer pour finalement échouer ? il approche d’un pas furieux, lui attrape le bras avec une certaine violence… pour finalement laisser retomber la pression quand elle pose son regard de poupée contre son minois défoncé. « ça te tuerait de donner des nouvelles, baba yaga ? » il demande, les sourcils froncés pour ne pas changer, les mâchoires crispées. ainsi dévisagé par son regard brûlant, neven se sent redevenir poussière, en cendres consumées. mais neven, il est bien trop en colère pour hausser simplement les épaules devant sa présence ici et dire « ok ». parce que c’est toujours comme ça avec baya, depuis des années. elle se pointe quand elle le veut, lui faisant miroiter monts et merveilles pour mieux disparaître à nouveau et le blâmer quand elle est là et qu’il s’est absenté. « j’peux savoir où t’étais ? » il demande à nouveau, la toisant d’un regard noir et froid. neven, il peut pas s’empêcher de réagir comme un mec jaloux, blessé qu’elle puisse se servir de lui et exiger tant de choses, qu’il reste muet face à ses allers-retours incessants. « m’enfin, pense pas que tu m’as manqué. parce que c’est pas le cas. » qu’il ajoute avec le nez redressé, mine hautaine qu’il s’invente et qui n’apparaît que comme une vulgaire grimace, essai maladroit d’un comédien raté. ô baya, douce obsession qui finira par assassiner sa raison.