Elle chante à tue-tête, frappant en rythme le volant de la voiture de sa mère, encore euphorique du concert que son père vient de donner. C'était la dernière fois qu'il se produisait dans le coin, il repart déjà pour la suite de sa tournée et Mads n'a pas voulu manquer une seule seconde de sa présence ici. Alors elle chante aussi fort qu'elle peut, pour masquer le chagrin qui lui cisaille le cœur à l'idée de ne plus le revoir avant des mois. Ça a beau être comme ça depuis toujours, elle ne s'y est jamais habituée. Chacun de ses départs est comme un nouvel abandon et la brise plus qu'elle ne veut bien l'admettre. Mais ses pensées sont rapidement détournées par la pluie qui vient violemment s'abattre sur son pare-brise, lui bouchant de plus en plus la vue. Elle monte le son de la musique et met la vitesse de ses essuie-glaces au maximum tout en pestant contre le temps. Elle ralentit progressivement, au fur et à mesure qu'elle voit de moins en moins loin. Et doucement, elle commence à s'inquiéter. Elle ne conduit pas souvent, préférant largement sa bicyclette à la voiture, alors elle sent un certain malaise pointer le bout de son nez. Elle déglutit, passe ses feux en mode route et se penche au-dessus de son volant pour tenter d'y voir plus clair. Elle se guide comme elle peut en se raccrochant à tout ce qu'elle parvient encore à voir autour d'elle. La moindre lumière, le moindre objet. - Mais c'est quoi c'délire ?! Qu'elle finit par marmonner, à fleur de peau. Elle voit enfin le panneau annonçant l'entrée dans Savannah mais elle, elle doit traverser complètement la ville pour rejoindre le motel de sa mère. Et elle comprend bien vite que ça ne sera pas possible. Alors elle change de route et se dirige vers chez Sid. Et elle enrage contre lui à l'idée de le savoir paisiblement au chaud chez lui, lové dans son canapé, bien à l'abri de cette déferlante sortie de nulle part.

Mais l'état de Mads s'aggrave lorsqu'elle constate avec désarroi que le niveau de l'eau monte dangereusement et lui fait perdre progressivement le contrôle de la voiture. La bouche entrouverte, elle se met à respirer bruyamment, le palpitant comprimé dans sa poitrine, malmené par une peur soudaine. Elle ne comprend rien à ce qui se passe et ne sait pas comment réagir. La panique finit par la gagner complètement lorsqu'elle sent l'eau gelée venir lui glacer les pieds. Elle pousse un petit cri strident et arrête brusquement la voiture, enclenchant le frein à main et relevant ses pieds. Son premier réflexe est d'ouvrir la portière pour sortir de là, mais le vent dehors est si violent qu'il lui complique la tâche et la terrorise. Putain, si elle sort de là, elle va se faire emporter comme une feuille. Elle referme alors bien vite sa portière, au bord des larmes, les nerfs qui lâchent. Alors, elle s'dit qu'elle va rester là, à l'abri et que ça finira bien par passer. Les minutes s'écoulent et l'eau continue de monter dans l'habitacle, elle en a presque jusqu'aux genoux. La voilà qui éclate en sanglots, terrifiée. Et ça ne s'arrange pas, elle sent la voiture bouger et commencer à glisser, emportée par le courant. Ses pleurs redoublent et dans un réflexe de survie, elle attrape son téléphone et appelle Sidney. Après quatre sonneries, il décroche et déjà, elle se sent mieux.

- SID ? Mais elle n'obtient aucune réponse. - SIDNEY PUTAIN ? Mais pour toute réponse, elle n'entend que le vent hurler dans le haut parler, lui vrillant les tympans. - Sid mon dieu, t'es dehors ?? SID RÉPOND MOI ! Qu'elle hurle comme une forcenée, doublement inquiète désormais. Elle entend un bruit de chute et la connexion coupe. - SIIIID ?! Elle a crié si fort qu'elle en a le souffle coupé. Une main sur sa bouche, elle panique deux fois plus. Elle regarde son téléphone et relance l'appel aussitôt. Ça sonne, encore et encore. - Mais qu'est-ce que tu fous Sid ? Qu'elle murmure, la voix secouée par ses sanglots. Ne sachant plus si elle doit s'inquiéter pour lui ou pour elle. Elle tombe sur son répondeur et raccroche. Elle le rappelle six fois de suite, les mains tremblantes, le visage inondé. Désespérée, elle finit par laisser un message vocal. - Sid putain mais t'es où ?? Pourquoi tu réponds pas ? Sid j-j'ai besoin de toi ! Sid j'suis dans ma voiture, j'suis coincée, je.. ça se remplie d'eau ! Sid je sais pas quoi faire, j'ai vraiment peur. J'arrive pas à sortir, j'veux pas.. J'veux pas mourir comme ça ! J'fais quoi si l'eau s'arrête pas de monter ? Elle s'arrête un instant, reprenant son souffle entre deux sanglots. - Sid j'suis sur historic district je crois, viens me chercher, s'il te plait, viens me chercher.. J'ai vraiment vraiment peur Sid. Y a son cœur qui serre à l'idée de ne plus jamais le revoir. - Sid, je... Sa voix s'essouffle et ses pensées s'embrouillent. Elle tremble de la tête aux pieds, frigorifiée, effrayée. - J-j'voulais juste te dire.. enfin je sais pas.. je.. J'suis désolée pour tout et.. Putain Sid.. Elle pose une main sur son front, le corps malmené par ses pleurs qui refusent de se calmer. Mais là, dans son avancée, la voiture percute quelque chose et tremble de tous les côtés. Mads sursaute, pousse un cri et échappe son téléphone qui finit sa course dans l'eau marron. - NOOOOOON ! Hurlement de désespoir. Elle enfonce ses mains dans l'eau à la recherche de son combiné : en vain.

Elle se laisse finalement retomber en arrière et passe ses mains trempées dans ses cheveux, haletante. Faut qu'elle bouge. Qu'elle fasse quelque chose. Y a son instinct de survie qui la secoue à l'intérieur et qui lui ordonne de fuir. Elle tente à nouveau la porte, mais l'idée s'avère désastreuse. La pression de l'eau es trop forte, l'empêchant de l'ouvrir vraiment, mais en revanche, l'eau en profite pour s'infiltrer encore plus, montant le niveau jusqu'à son ventre. Elle referme rapidement la porte. De toute façon, qu'est-ce qu'elle ferait hors de la voiture ? Elle sait à peine nager, elle n'a jamais aimé l'eau. Alors dans de telles conditions, elle se noierait probablement en un rien de temps. Elle finit par ouvrir la fenêtre et tente de s'y glisser comme elle peut avant de se mettre à crier de toutes ses forces. - A L'AAAAAIIDEEEEE ! En quelques secondes à peine, elle est trempée, la gueule ravagée par la pluie et le vent. Elle s'accroche fermement à la voiture et plisse les yeux, tentant désespérément de voir ce qui l'entoure. Et là, entre les gouttes, une silhouette. Mads s'agite et secoue ses bras dans tous les sens pour se faire voir. - HEY VOUS ! S'IL VOUS PLAIT ! J'SUIS COINCÉE ! HEEEEY ? Elle ne sait même pas s'il l'entend avec tout ce boucan. Et puis, pourquoi il viendrait l'aider ? Elle sacrifierait certainement pas sa vie pour un inconnu, elle.

il rentre chez lui à pied, parce qu’il déteste prendre sa voiture pour circuler en ville. elle lui sert pas à grand chose, si ce n’est aller faire quelques courses, et encore. c’est pas les violents orages annoncés par la météo qui vont le freiner dans son élan, il aime bien marcher sous la pluie d’ailleurs. par contre, il reconnaît que le temps ne va pas en s’arrangeant, qu’il sera rassuré quand il arrivera chez lui. et qu’il sera au sec. là, ace il revient d’un déjeuner avec plusieurs de ses anciens camarades de fac, et parce que ces retrouvailles étaient prévues depuis longtemps, ils ont décidé de maintenir l’événement malgré les conditions météorologiques. c’est la fin d’après-midi, et la pluie n’a pas cessée. c’est pire même maintenant parce qu’il y a un vent de dingue, et que même lui, avec ses grandes jambes, il galère à avancer à son rythme normal. il hésite un moment à prendre le bus, histoire d’aller plus vite, et rapidement il s’aperçoit qu’ils ne circulent plus. du moins, il en voit pas sur la route. bizarrement ça le rassure pas trop, et il cherche à s’abriter, mais en pleine rue y a rien du tout. les commerces sont fermés, certains ont barricadés leur vitrine, et même leurs fenêtres d’appartement. alors lui il a pas d’autres choix que de continuer sa route. il baisse vachement la tête, car il pleut vraiment beaucoup et ça gêne son champ de vision. il fait pas attention aux autres personnes dans la rue. et d’un coup, il remarque qu’il est vraiment trempé au niveau des jambes, que l’eau monte. alors il prend conscience de la situation, que ce n’est pas un simple orage, mais une tempête, voire un ouragan. il décide de se mettre à l’abri quelques secondes sous l’auvent d’un magasin. il vérifie son téléphone portable et voit un message de riley. il le lit, et il répond vite fait, pour pas l’inquiéter. et puis il décide de taper sur les planches en bois qui recouvrent la vitre du magasin. « y a quelqu’un ?! » qu’il demande sans grande conviction. il a l’impression d’être seul au monde dans cette rue. personne ne lui répond. et puis d’un coup, l’auvent se détache à cause du vent et s’envole. là il se dit qu’il doit vite trouver une solution, parce que l’eau ne fait que monter, le vent souffle de plus en plus fort, et certaines voitures commencent même à se faire emporter. dans un premier temps il décide de quitter le trottoir, de peur que quelque chose lui tombe sur la tête, genre un pot de fleur d’un appartement qu’une personne aurait oublié d’enlever. il se retrouve au milieu de la rue, paumé. il réfléchit pas, il grimpe sur le capot de la plus grosse voiture qu’il aperçoit, celle dont il se dit qu’elle ne va pas bouger. il peut toujours attendre que l’ouragan passe, parce que ça va pas durer si longtemps que ça. là, c’est l’endroit idéal pour lui, la voiture a l’air assez solide pour pas forcément se faire emporter trop facilement, et en plus de ça elle est à côté d’un poteau auquel il peut s’accrocher si jamais y a un quelconque souci. il sait pas s’il a eu la meilleure idée qui soit, mais en tout cas il est plus dans l’eau. parce que ace il a beau être sportif, c’est pas tellement son truc la natation. surtout pas dans cette eau glacée qui avec le vent devient véritablement dangereuse. il décide carrément de monter sur le toit de la voiture, pour avoir une meilleure vision de ce qui se passe. et s’il voit encore quelques personnes qui pataugent dans l’eau, beaucoup ont aussi adopté sa technique. et puis il remarque une petite voiture qui se fait emporter un peu plus loin, et qui semble se diriger vers lui. au début, il pense que cette voiture n’est pas occupée, alors il s’en préoccupe pas trop. et puis elle percute quelque chose, et elle se retrouve finalement coincée, là à deux pas de lui. il a l’impression que ça bouge à l’intérieur, que quelqu’un tente d’ouvrir la porte. finalement, la vitre se baisse et il voit apparaître la tête d’une jeune femme. elle crie à l’aide, visiblement terriblement panique à l’idée de finir noyée enfermée dans sa voiture. elle agite les bras dans tous les sens vers ace, et lui il réfléchit même pas une seconde, il s’élance. il quitte le toit de la voiture pour retourner dans l’eau. et malgré son mètre quatre-vingt-dix, l’eau lui arrive pratiquement à la taille. il commence à percuter que la situation est grave, et que la jeune femme va pas faire long feu si on ne l’aide pas. il galère un peu à l’atteindre, parce que y a du courant. « J’ARRIVE » il lui crie histoire de la rassurer, ou peut-être même de se rassurer lui-même. parce que la dernière chose dont il a envie c’est de la voir se noyer sous ses yeux. une fois qu’il arrive à sa hauteur, il se met face à la vitre et il comprend qu’ouvrir la portière avec la pression de l’eau ce n’est pas possible. « je vais te tirer pour que tu puisses sortir. » il est presque sur qu’elle pourra passer par là, de toute façon ils ont pas vraiment l’embarras du choix. elle s’est agrippée à sa voiture, et lui il attrape ses deux bras pour tenter de la tirer, mais c’est pas facile et surtout ça ne doit pas être hyper agréable pour elle. alors dès qu’il peut il l’attrape sous les bras pour avoir plus de force, mais aussi pour que ça soit plus confortable. il tire, de toutes ses forces, mais avec la pluie et le vent c’est difficile. à un moment il trébuche, de ce fait il la lâche et il tombe dans l’eau. il se relève et il recommence. petit à petit son corps passe à travers la vitre. « on y est presque, est-ce que ça va ? t’es pas blessée ? » y a la moitié de son corps qui est passé par la vitre, reste plus que le bas de son corps. il la chope par la taille et il la tire, encore mais cette fois c’est plus sympa, moins fatiguant. « t’es à l’aise dans l’eau ? » il demande avant de la libérer totalement, parce qu’il se rend pas compte, lui il est grand. peut-être que pour elle, la progression dans l’eau sera beaucoup plus compliquée.

Elle voit la silhouette sur la voiture bouger et elle perçoit comme les échos d'une voix, mais ça ne lui parvient pas nettement. Elle se contente de fixer l'ombre de toutes ses forces, pour ne pas la perdre de vue, parce qu'à cet instant, cet inconnu est devenu son seul point d'ancrage. Et la forme s'avance jusqu'à elle, lui permettant enfin de le distinguer vraiment. Elle échappe un soupire de soulagement en comprenant qu'il vient pour elle, qu'il vient l'aider. Qu'il ne va pas la laisser se noyer misérablement, la voiture emportée par les flots. Elle voudrait lui hurler des millions de merci, mais les mots restent coincés dans sa gorge, le souffle un peu coupé par l'appréhension. Et la pluie qu'elle se prend dans la gueule lui coupe de toute façon toute envie d'ouvrir trop la bouche, où elle va finir par se noyer en ne faisant que parler. Elle le voit qui jauge la situation en quelques secondes, avant de prendre une décision, parce qu'il n'y a pas de temps à perdre. - je vais te tirer pour que tu puisses sortir. Malgré la peur qui la tétanise depuis tout à l'heure, elle parvient à hocher la tête pour approuver, non sans blêmir encore plus. L'idée d'être plongée dans cette rivière de débris l'effraie peut-être encore plus que l'idée de rester coincée dans la voiture et d'y mourir. Elle ouvre la fenêtre en grand et l'inconnu lui attrape les bras, et le voilà qui tente de l'extirper tant bien que mal de son piège meurtrier. Elle se contorsionne dans tous les sens pour essayer de faciliter la chose, mais la tâche reste difficile et particulièrement pénible pour elle. Elle serre les dents, oubliant la douleur et la peur. Ses jambes remues dans l'eau et elle tente de prendre appui sur les sièges pour s'aider, mais elle ne fait que glisser, échappant quelques larmes de rage, qui se font aussitôt balayer par la pluie déferlante qui lui bat le visage.

L'homme vient finalement l'attraper sous les bras et continue sa manœuvre, touchant presque à son but. Mais Mads se raidit progressivement, ne faisant que compliquer le tout. Elle s'immobilise de plus en plus, le laissant faire tout le travail, complètement apeurée alors que son regard ne quitte plus l'eau qui remplie la rue. Elle se met à sangloter à la simple idée de devoir y foutre les pieds. Et elle tuerait pour que Sid débarque sur l'instant, la prenne dans ses bras et l'emporte ailleurs. - on y est presque, est-ce que ça va ? t’es pas blessée ? Non ça va pas, putain. Ça ne va pas du tout, même ! Mais elle s'efforce de ne pas céder à la panique. Elle ferme les yeux et inspire un grand coup avant de répondre en criant, pour qu'il l'entende. - ça va, j'suis pas blessée ! Elle ne croit pas. En tout cas, elle n'a rien sentit jusqu'à maintenant, mais l'adrénaline est trompeuse parfois. Il finit par lui attraper la taille et la sortir complètement, alors que son pauvre palpitant cogne si fort dans sa poitrine qu'elle a l'impression qu'il va passer à travers. - t’es à l’aise dans l’eau ? Qu'il demande, tout en la relâchant. Et là, elle s'étrangle à moitié en échappant un cri de terreur, alors qu'elle ne sait plus ses bras autour d'elle. Dans un réflexe instinctif, elle bondit sur lui et passe ses bras autour de son cou pour s'y accrocher fermement. - ME LÂCHE PAS ! Qu'elle hurle à son oreille, désormais complètement paniquée. - J-je sais pas vraiment nager ! Qu'elle avoue sans pudeur, bien décidée à rester accrochée à lui, quoi qu'il arrive.

Et elle sent, contre la partie de son corps immergée, des choses la heurter, signe que l'eau a tout emporté sur son passage. Et elle est anéantie rien qu'à l'idée de voir les corps de Sid ou de Leo sans vie passer sous son nez, emportés par le courant. Elle décolle sa tête de la nuque du garçon, juste à temps pour voir le véhicule leur arriver droit dessus. Ses yeux s'écarquillent et dans un mouvement irréfléchi, elle relâche l'inconnu en se jetant en arrière et en hurlant : - ATTENTION !! Elle a à peine le temps de s'écarter, que déjà, le véhicule vient s'écraser contre eux, les coinçant entre ce dernier et le véhicule de Mads. Elle ouvre la bouche pour crier sa douleur, mais aucun son n'en sort. Elle jette sa tête en arrière et ferme les yeux, le corps secoué par une violente agonie qui semble lui atrophier tous les muscles. Sa main gauche se raccroche à sa voiture, là où la vitre est baissée. Et quand le véhicule qui les a percuté se détache d'eux, continuant sa route, tout son corps se détend violemment et elle manque de relâcher sa prise et de se faire emporter elle aussi. Les jambes flageolantes, le bassin en morceau, elle trouve malgré tout la force de tourner la tête pour chercher l'inconnu du regard. Mais très vite, elle le sent tout contre elle, elle baisse la tête et le voit, à semi-inconscient, en train de dériver. Sûrement que pour lui, le choc a dû être plus fort. De sa main libre, elle lui empoigne le col pour le retenir. - HEY ! DEBOUT ! Mais elle sent vite ses forces l'abandonner et elle refuse de devoir se retrouver à choisir entre lui et elle. - J-j'vais pas tenir encore longtemps, accroche toi à la voiture ! HEY ! Y a sa main gauche qui se met déjà à glisser le long du métal de la voiture, alors que le poids de l'inconnu l’entraîne de plus en plus. Elle n'veut pas choisir. Mais le destin choisira pour elle. Sa main lâche la voiture et ils s'font emporter.

ace il peut lire la peur sur le visage de cette jeune femme prise au piège par les flots. tant bien que mal il essaie de la sortir de la voiture, mais la tâche s’avère pénible et ardue. les conditions météorologiques ne s’arrangent pas, au contraire, la pluie s’abat encore plus violemment sur eux et le vent emporte tout sur son passage. il l’a saisi par les bras pour la faire passer à travers la vitre, elle glisse, mais elle ne ménage pas ses efforts. il arrive à la saisir sous les bras, ce qui est beaucoup plus pratique pour lui, et pourtant il a l’impression que le corps de la jeune femme se tend, se raidit. sur le coup, il fait pas trop attention, parce qu’il est concentré sur l’objectif fixé ; la sortir de là, peu importe le moyen. avant de la libérer totalement il veut s’assurer qu’elle est pas blessée. après tout, il vient de la tirer par le bras comme un dingue, manquerait plus qu’il lui ait déboité l’épaule par exemple. elle prend un temps pour répondre, elle ferme les yeux et lui crie qu’elle n’a rien. il lâche un faible soupir de soulagement. du coup, il vient l’attraper par la taille pour la faire sortir totalement de l’engin. il veut aussi s’assurer qu’elle est à l’aise dans l’eau, parce que même s’il n’est pas question de savoir vraiment nager, faut pas qu’elle se laisse impressionner par le niveau d’eau. il vient tout juste de la relâcher que tel un petit koala elle vient enrouler ses bras autour de sa nuque. il a visiblement la réponse à sa question. l’eau lui fait peur. elle lui hurle à l’oreille de ne pas lâcher, il affiche un grimace parce qu’elle vient sans doute de lui briser le tympan. « non mais c’est bon je te lâcherai pas. » il répond alors assez fort, pour qu’elle puisse l’entendre. le vent souffle vraiment fort, et les eaux commencent à se déchainer davantage. il fait passer une main dans son dos pour lui montrer qu’il va pas la lâcher, et qu’apparemment ils progresseront ensemble à travers le marécage qu’est devenu la rue. pour aller où ? ça, par contre, il en a aucune idée. l’idéal serait de trouver un point un hauteur, entrer dans un immeuble de l’autre côté de la rue pour se réfugier dans les étages. il tourne la tête de tous les côtés, pour savoir où se diriger, et c’est pas la jeune femme totalement paniquée qu’il tient entre ses bras qui va l’aider à analyser la situation clairement. les eaux continuent de monter, parce que la pluie ne cesse toujours pas. donc il se dit qu’il faut bouger, et vite. il a pas le temps de l’apercevoir, la voiture qui arrive vers eux, car elle se fait malmenée par les eaux. attention, qu’elle crie pour l’avertir du danger, il a peine le temps de tourner la tête et de ne plus sentir la fille accrochée autour de lui qu’ils se font prendre au piège entre les deux voitures. il entend plus rien, d’un coup y a plus d’image ni de son. il se fait assommer par la masse de la voiture, sa tête venant violemment cogner l’épave de la jeune femme. il a l’impression de se prendre un K.O. heureusement que le véhicule qui les coince continue son trajet mais il a plus rien pour le soutenir, et il sent plus ses jambes. le coup porté a été trop fort. alors il s’écroule, il tombe à l’eau. il dérive près de la fille, mais il s’en rend même pas compte. il est sérieusement dans les vapes, il entend le son de sa voix, mais de loin, comme dans un rêve. il lui répond pas. alors qu’il commence doucement à reprendre conscience, mais il est incapable de bouger tellement sa cogne fort dans sa boite crânienne. un boum boum incessant, comme un marteau piqueur qui viendrait s’enfoncer doucement dans sa tête. il peut même pas se relever alors qu’il croit entendre la demoiselle lui donner l’ordre de se relever. il sent qu’on l’attrape par le col de son pull et elle lui ordonne d’attraper à son tour la voiture. il essaie de lever la main, mais il est incapable de tenir son geste plus de deux secondes. il a plus de forces, il se sent vide, épuisé. il se doute qu’ils ont pas réussi à se raccrocher à la voiture parce qu’il sent son corps dériver, alors que l’inconnue est encore accrochée à son col. et heureusement d’ailleurs, parce qu’il pourrait finir par se noyer lui aussi, si jamais elle le lâche. il se laisse porter par le courant, et petit à petit, il a l’impression de retrouver légèrement conscience des choses qui l’entourent. il porte la main à son visage, où une douleur lancinante vient de le saisir, comme s’il venait tout juste de s’apercevoir que quelque chose ne va pas. « putain de merde. » il saigne. il plonge sa main dans l’eau pour effacer les traces de sang. et puis il trouve la force de se relever légèrement, et il voit qu’ils ont quand même bien avancé, qu’ils sont assez loin de leur point de départ. il essaie de se remettre debout, d’au moins tenir sur ses grandes jambes. mais ça changera rien au fait qu’ils se laissent encore porter par les flots. « faut qu’on sorte de l’eau sinon… » sinon ils sont foutus. clairement. et même si cette phrase sonne comme une évidence, ace il ressent le besoin de le dire. « j’ai besoin de toi. » parce qu’il faut qu’il s’accroche à elle, tout comme elle s’accroche à lui. ils ont besoin de former une équipe. il passe son bras autour des épaules de la fille, il peut faire d’elle une sorte de béquille, et elle sera pas si embêtée par son poids grâce à la pression de l’eau. il peine à garder les yeux ouverts, parce que la lumière du jour lui éclate les yeux, et de fait il ressent davantage la douleur à la tête. « par là, les bâtiments. » qu’il fait en l’entrainant à contre-courant, leur corps venant toucher toutes sortes de choses qui se sont perdues au fond de l’eau. évidemment leur progression n’est pas simple, mais ace il lâchera pas. jamais. et petit à petit il se rapproche du côté de la rue qu’il a quitté tout à l’heure. il se dit que peut-être ils peuvent atteindre une fenêtre, se réfugier à l’intérieur et attendre que cette merde s’en aille. il repère le petit balcon d’un immeuble. « monte sur mes épaules. tu peux, peut-être aller là-haut, te mettre à l’abri. » l’idée lui semble pas vraiment brillante, principalement pour deux raisons : la première c’est qu’il ne sait pas si, même debout sur ses épaules, l’inconnue pourra atteindre le balcon, et la seconde c’est qu’il ne sait pas ce qu’il adviendra de lui quand si toutes fois elle réussit à se mettre en sécurité.

- Non mais c’est bon je te lâcherai pas. Il n'a clairement pas intérêt. De toute façon, Mads s'agrippe si fort à lui que même s'il voulait se débarrasser d'elle volontairement, il n'y parviendrait probablement pas. Mads n'est pas folle, elle sait que toute seule elle n'a aucune chance, surtout que le niveau de l'eau ne semble pas décidé à s'arrêter de monter. Ce mec, il est inespéré. N'importe qui d'autre aurait pu la trouver : un vieux, un gosse, une fille encore moins épaisse qu'elle. Et là, ça aurait été compliqué. Mais non, dieu, le hasard, son destin, le karma, qu'importe, mais la vie avait décidé de lui envoyer un grand gaillard bien costaud et pour elle c'était clairement le signe qu'elle devait fonder tous ses espoirs de survie en lui. Alors, dans un premier temps, quand elle sent sa main se poser dans son dos, la maintenant ainsi contre lui, elle ne peut s'empêcher d'esquisser un soupire de soulagement. Comme si tous ses ennuis venaient déjà de s'envoler et qu'ils étaient tirés d'affaire. Mais visiblement, elle avait crié victoire trop tôt. Elle a à peine le temps de reprendre son souffle que déjà, le danger s'abat de nouveau sur eux. Elle voit la voiture qui se rapproche à grande vitesse, mais si elle parvient à s'extraire assez rapidement, l'inconnu lui, non. Et le voilà qui se fracasse contre sa voiture. Elle échappe un cri d'effroi et ne le lâche pas des yeux, complètement paniquée. Elle lutte contre les flots pour se retenir à son capot et regarde, impuissante, la voiture assassine se faire emporter, libérant ainsi son sauveur. Un sauveur inconscient qu'elle va devoir sauver à son tour. Et là, ouais là, elle regrette carrément qu'il ne soit finalement pas une fille toute maigrelette. Parce que lorsqu'elle lui attrape le col et tente de le retenir, elle sent alors tout son poids et elle n'a pas la force suffisante. Épuisée et après plusieurs secondes à s'interroger sur sa moralité, elle décide de lâcher prise sur la voiture et de dériver avec lui, puisqu'il ne semble pas capable de se remettre sur pieds.

Elle glisse son bras autour du cou du garçon pour lui maintenir la tête hors de l'eau et elle enfonce ses pieds autant que possible dans le sol, pour essayer de rester debout. Mais elle glisse sans cesse et ils se font percuter par des objets qui ne cessent de les déséquilibrer. A plusieurs reprises, ils se font engloutir sous l'eau, avant de revenir à la surface, continuant de descendre la rue à toute vitesse, Mads ne parvenant pas à saisir d'objets stables. A vrai dire, elle ne voit pas grand chose. Entre le vent et l'eau, elle se fait à moitié aveugler. Mads continue de chialer en silence, alors qu'elle commence à perdre espoir sur leur sort. Lorsqu'enfin, elle le sent remuer. Elle baisse les yeux vers lui et le voit venir se passer la main sur son visage avant de se dégager de son emprise pour se redresser. Elle ferme les yeux une seconde, soulagée. Ils vont peut-être s'en sortir, finalement. Il a tout juste le temps de se mettre debout que Mads s'accroche à nouveau à son t-shirt, lui jetant un regard noir, comme si c'était de sa faute à lui s'il s'était blesser. - faut qu’on sorte de l’eau sinon… Elle le dévisage, et voyant qu'il ne semble pas décidé à poursuivre sa phrase, elle décide de la terminer pour lui, légèrement hystérique, à bout de nerfs. - sinon on va crever, JE SAIS OUI ! Qu'elle s'écrie, sur un ton plutôt désagréable. Elle passe sa main libre dans ses cheveux pour venir les plaquer en arrière alors que de nombreuses mèches venaient lui barrer le visage et lui piquer les yeux. - j’ai besoin de toi. Elle esquisse une petite moue dépitée et échappe un soupire désespéré. Il n'était décidément pas ce grand sauveur qu'elle avait tant espéré. Elle secoue la tête pour approuver, résignée, et passe son bras gauche autour de sa taille, tandis que sa main droite vient attraper celle qu'il a passé autour de ses épaules. Et, tant bien que mal, ils avancent en direction de l'immeuble le plus proche d'eux. Elle a l'impression que ses jambes sont comme du coton. Chaque pas est une véritable torture et elle est complètement frigorifiée. Ils finissent par rejoindre l'immeuble et l'inconnu lui désigne un petit balcon qui se trouve au-dessus d'eux. - monte sur mes épaules. tu peux, peut-être aller là-haut, te mettre à l’abri. Elle fronce les sourcils et regarde à tour de rôle le balcon puis le brun, plusieurs fois de suite. Sur le principe, elle adorerait. Se hisser en hauteur, se retrouver hors de l'eau, loin du déluge. Mais... et lui ? Une fois encore, elle se retrouve en plein cas de conscience. Sauver sa peau et le laisser se démerder ? Après tout, ils sont quittent. Il la sauvé de la voiture, elle l'a sauvé de la noyade. Mais bizarrement, elle ne peut pas se résigner à le planter là. Et bien que son instinct de survie lui hurle de ne pas faire la fine bouche et d'accepter l'offre, y a comme un truc en elle qui bloque. Elle soupire discrètement, ne pouvant s'empêcher de penser qu'elle va regretter ses mots. - non, c'est trop haut et pis de toute façon, dans ton état, j'sais pas si tu pourrais me porter sur tes épaules. surtout avec ce courant. Ouais, ça y est, elle le regrette déjà. Elle se foutrait des baffes. Au moins, il ne sait pas qu'elle fait ça "pour lui". Et c'est mieux ainsi. Elle se met à regarder autour d'eux. - j'suis sûre qu'on va trouver une autre solution. Mais sa voix n'est pas très convaincante, trahissant le fait qu'elle n'y croit qu'à moitié.

Et d'un coup : - là-bas, regarde ! Sur le trottoir d'en face, quelques mètres plus loin, une entrée d'immeuble avec une grande baie vitrée. Elle la lui montre du doigt avant de laisser retomber son bras le long de son corps. Son visage se décompose légèrement alors qu'elle réalise que tenter de l'atteindre se serait un risque énorme, encore. Mais l'avantage, c'est que la porte fonctionne de façon électrique avec un digicode. Et sans électricité, la porte ne ferme plus à clé. Ils pourront donc aller s'y réfugier. Elle relève la tête vers le garçon. - si.. si on y va en diagonale, on devrait pouvoir l'atteindre sans trop se faire emporter.. enfin, je crois.. peut-être.. Elle baisse les yeux alors que son plan lui semble de plus en plus insensé. Elle regarde encore une fois autour d'eux, mais toutes les portes du coin sont de vieilles portes en bois qui s'ouvrent avec des clés. Ils n'ont pas trente mille solutions. Elle serre la main du brun dans la sienne, comme pour se donner du courage. - allez. Qu'elle dit tout en s'élançant, se souciant assez peu de savoir s'il est d'accord ou non.

L'eau lui arrive désormais au niveau de la poitrine et ses pieds glissent sur le bitume, le vent la désoriente et elle avance presque au hasard, sans trop savoir où elle se dirige. Elle espère que le garçon s'en sort mieux qu'elle et les mène au bon endroit. Et alors qu'ils ne sont plus qu'à quelques petits mètres de leur but, ils se font doucement heurter par quelque chose. Elle baisse les yeux et tout contre eux, flotte le corps inanimé d'une femme adulte, le visage dans l'eau. Après deux secondes d'effroi silencieux, Mads se met à hurler et se débat dans l'eau pour éloigner le corps, terrifiée. Elle ferme les yeux et colle sa tête contre le torse du garçon, en pleurs, au bord de la rupture. - j'veux rentrer chez moi.. Qu'elle gémit, lessivée. Et à nouveau, elle pense à Sid. Est-il a l'abri ? Ou est-il comme cette femme, emporté par le courant ? Cette idée lui serre le cœur et est tout simplement insupportable. Quand elle rouvre enfin les yeux, ils sont au niveau des marches de l'immeuble. Elle relâche le garçon et se précipite jusqu'à la porte et tire dessus de toutes ses forces alors que l'eau complique la tâche. Et, comme elle l'avait pensé : la porte s'ouvre. Un soulagement immense la saisit de part en part, la faisant trembler de la tête aux pieds pour quelques secondes. Elle se jette à nouveau dans les bras du garçon, le serrant contre elle aussi fort qu'elle le peut, ressentant ce besoin irrépressible de chaleur humaine et de réconfort. - On a réussi, on a réussi.. Oui, mais, et maintenant ? Ils sont trempés, gelés, menaçant de déclencher une fièvre. Lui est blessé également. Et si c'était grave ? Et s'il faisait une hémorragie interne ? Un traumatisme crânien ? Et combien de temps vont-ils resté coincé ici ? Elle sent l'angoisse monter à nouveau et elle le relâche. Sa main droite vient glisser sur le visage abîmé du brun et, soucieuse, elle demande : - comment tu te sens ? Faudrait pas qu'il lui claque entre les doigts, le con. Elle ne pourrait pas supporter ça.

il ne sait pas si c’est l’adrénaline où l’habitude à encaisser les coups qui lui ont permis de reprendre connaissance et d’avoir la force de se remettre debout. il oublie un moment qu’il n’est pas seul, qu’il y a toujours cette fille à ses côtés, qui vient immédiatement l’attraper par le t-shirt comme pour signifier sa présence. alors, il vient remarquer qu’ils doivent absolument se sortir de cette situation, et lui dans un souci de pas dramatiser les choses, il n’achève pas sa phrase. mais l’inconnue la termine à sa place, et gueule même qu’ils risquent bien d’y passer. sa voix résonne dans sa boîte crânienne, signe que le choc qu’il a subi contre cette voiture a laissé des traces. il plisse les yeux dans l’espoir d’atténuer la douleur qu’il ressent, en vain. ace ne peut pas faire le boulot tout seul, il a besoin de cette fille pour tenir debout. il lui demande de l’aider, ce qu’elle fait en venant passer son bras autour de sa taille, dans le but de le maintenir. ils arrivent à progresser de cette façon, et il repère la façade d’un immeuble avec un petit balcon. il se dit qu’avec sa taille, combiné à celle de la fille, il peut la hisser là-haut pour qu’elle soit à l’abri. il lui demande de monter sur ses épaules, alors qu’il tient à peine debout. ace, il a trop cette tendance à vouloir sauver tout le monde, à faire passer les autres avant lui. encore plus quand c’est une fille, ce qui peut être macho ou chevaleresque, en fonction des situations. en l’occurrence, la fille, elle se décide pas tout de suite à monter sur ses épaules. elle a bien dû voir que son plan était tout sauf infaillible et qu’il ne prévoyait aucune issue de secours pour lui. à ce stade, il se dit que si déjà un des deux est sauvé c’est bien. surtout qu’il a vraiment l’impression de plus avoir de force, et que désormais il n’a plus seulement mal à la tête, puisque son épaule le lance douloureusement. il ressent peut-être le contre coup d’un autre choc contre la voiture. il préfère se concentrer sur autre chose, et vient interroger son acolyte du regard pour qu’elle arrive enfin à prendre une décision. elle décline la proposition, alors qu’il est plutôt sur qu’elle arriverait à l’atteindre ce fichu balcon. d’un autre côté il se sent soulagé, parce qu’elle va pas le laisser seul à son sort. elle tourne la tête pour chercher une autre solution, et il se dit qu’elle sera peut-être plus efficace que lui parce qu’après tout, il a pas vraiment les idées très claires. elle finit par ajouter d’une voix mollassonne qu’ils finiront bien pas trouver une autre solution. il lâche un rire jaune, il y croit pas plus qu’elle. et puis, il suffit de quelques secondes pour qu’elle lui ordonne de regarder en direction de la rue d’en face. il relève la tête précipitamment et son champ de vision se brouille un moment. mais il l’aperçoit, cet immeuble, avec ses grandes baies vitrées. elle expose son idée, traverser la rue pour rejoindre la porte d’entrée. le risque est assez conséquent, mais quels autres choix ont-ils ? « qu’est-ce qu’on attend ? » il répond sans grand enthousiasme, de toute façon il est prêt à tenter n’importe quoi pour se sortir de là, pour attendre un semblant de sécurité. il sent la main de l’inconnue se serrer dans la sienne, et étrangement ça le rebooste, parce qu’il est pas seul dans cette galère.

et puis elle s’élance sans plus attendre. il sait pas trop qui suit l’autre, il l’impression de se laisser guider par elle, parce qu’il a pas trop idée par où passer. ils progressent plutôt bien, quand soudain il sent un truc le toucher. instinctivement il essaie d’envoyer balader le truc avec sa main, mais il sent que c’est froid et dur, alors il baisse les yeux et il entend la fille crier à côté de lui. il réalise que c’est un corps, une femme. qu’elle s’est noyée. que ça aurait pu être lui. il préfère détourner le regard, comme si le fait d’ignorer la chose allait la faire ne plus exister. c’est trop tard. parce que l’image est déjà bien encrée dans ses souvenirs. à côté de lui, la fille se débat dans tous les sens tout en poussant des cris d’effrois, mais il est tellement choqué par la scène qu’il reste muet, impassible. jusqu’à ce qu’elle vienne se blottir contre lui. il grimace d’abord à cause de son épaule qui le fait encore souffrir. mais il lui reste quand même un bras valide qu’il fait passer dans son dos, en signe de réconfort. elle déclare avoir envie de rentrer chez elle, et il sait pas quoi répondre. les mots, c’est pas son truc. il sait que quoi qu’il dise ça sonnera creux, vide et sans intérêt. « moi aussi. » il lâche alors. son appartement, son foyer. sa copine aussi. il s’autorise pas vraiment à penser à elle depuis tout à l’heure, mais là, ça vient le frapper d’un coup. il pense au dernier message qu’il lui a envoyé, en lui assurant être à l’abri. il a menti, évidemment, pour pas l’inquiéter. il se dit qu’au final elle doit quand même s’inquiéter de ne pas le voir rentrer, se ronger les sang pour lui. la seule chose positive c’est qu’il la sait saine et sauve chez eux. et c’est avec ça en tête qu’il accomplit les derniers mètres qui le sépare de l’immeuble. l’inconnue se précipite vers la porte et tire de toute ses forces dessus pendant qu’ace se tient l’épaule gauche, celle qui commence à le faire vraiment souffrir. elle s’ouvre, et ils s’engouffrent à l’intérieur. il pousse un soupir de soulagement et se tourne vers la fille, qui vient se jeter dans ses bras. il peut pas étouffer un grognement de douleur, parce qu’il a mal. mais il essaie quand même de l’étouffer alors il ajoute précipitamment pour lui répondre « oui, on a réussi. on va s’en sortir » il fait même pas attention aux paroles qu’il prononce, il veut juste pas montrer qu’il est mal. et puis, comme si elle avait deviné quelque chose, elle fait passer ses mains sur son visage, et lui demande comment il se sent. « bien. » il répond du tac au tac. il ment, ça se sent, et ça se voit. mais quand bien même il dirait la vérité, à quoi ça servirait à part la faire stresser davantage. et il a déjà eu un aperçu de ce qu’elle donnait sous pression, ses tympans s’en souviennent encore. « j’ai juste besoin d’un moment, OK ? » il fait alors qu’il se dégage d’elle, et qu’il avance vers les marches de l’escalier. il se laisse tomber sur la première marche. il essaie déjà de contrôler sa respiration, pour s’apaiser. il ferme les yeux deux, trois secondes. et il se tourne vers la fille. « je crois que je me suis déboité l’épaule. » il dit le plus calmement possible. en soit, c’est pas très grave. c’est douloureux, mais facile à remettre en place. il préfère pas parler de sa tête, parce qu’il sait pas du tout ce qui provoque les migraines, si c’est simplement le choc, ou autre chose. « je m’en suis pas rendu compte tout de suite mais…voilà. » mais il a mal. « et toi ça va ? » il finit par demander même si elle a l’air d’être en meilleur état que lui. « distrais-moi, parle-moi pour que j’oublie la douleur. » il demande ensuite, parce qu’il a pas d’autres idées, qu’il sait pas comment ils vont faire pour se sortir de là, et que de toute façon, pour le moment, il a pas la force de penser à quoi que ce soit d’autre. « j’sais pas, dis-moi que tu sais comment on va sortir de là. »

- Moi aussi. Et elle aimerait bien, Mad, qu'il ait le pouvoir d'exaucer leur vœux. Qu'il puisse claquer des doigts et que, hop, il les ramène chez eux. Bon sang. Un frisson d'effroi remonte le long de son dos alors qu'elle pense brusquement à sa mère et au motel. Elle prie pour qu'elle ait pu se mettre à l'abri, quelque part, n'importe où. Et l'inquiétude est multipliée par mille à cause du corps de cette femme qui vient de les percuter. Elle étouffe ses sanglots, à bout de forces, les nerfs qui lâchent complètement. A tel point qu'elle ne remarque pas la douleur du garçon à son épaule alors qu'elle s'agrippe à lui, désespérément, recherchant absolument un point d'ancrage, un peu de chaleur humaine, au milieu de tout ce bordel, de tout ce froid qui lui glace les veines. Alors quand ils atteignent enfin leur destination, elle a le coeur qui explose, brutalement rempli d'un soulagement bien trop intense. Elle se dit qu'elle ne va pas crever. Qu'ils ne vont pas crever. Elle se dit qu'ils sont tirés d'affaire, que ça va aller, que ça va s'arranger. Qu'ils sont à l'abri et que plus rien de mal ne peut leur arriver. Et cette idée lui fait oublier, pendant un instant, la précarité de leur situation. Tant et si bien que dès qu'ils se retrouvent à l'intérieur, elle bondit sur le grand brun, toujours sans réaliser la douleur qu'elle peut lui causer. Elle a juste besoin d'un moment de réconfort. Et quand il lui dit qu'ils ont réussi, qu'ils vont s'en sortir, ça termine de la rassurer complètement. Ca la conforte dans ce qu'elle se répète depuis tout à l'heure. Et elle se sent subitement immensément reconnaissante à son égard. Sans lui, elle n'aurait eu aucune chance. La panique l'aurait clairement empêché d'y voir clair, de réfléchir, de trouver une solution. Et elle aurait finit par se noyer, ou mourir d'une hypothermie, dans l'eau glaciale. Elle voudrait le remercier, mais elle n'a jamais été très à l'aise avec ce verbe. Blocage stupide qui n'a pas lieu d'être dans une situation aussi extrême. Elle prend sur elle, prête à le formuler, mais ses pensées se font happer par la tête qu'il tire. Il est blême et aussitôt, elle sent son inquiétude remonter en flèche. Elle s'enquiert de son état, les sourcils froncés, sérieuse. - Bien. Bien ? Ce n'est clairement pas le premier mot qui lui serait venu à l'esprit en le voyant dans cet état. Elle retire sa main mais ne dit rien, n'étant pas du genre à insister lourdement lorsque quelqu'un se braque. - j’ai juste besoin d’un moment, OK ? Et déjà, il se dégage et s'éloigne d'elle, allant s'asseoir sur les marches de l'escalier. Mads se vexe un peu, tirant légèrement la tronche. Et elle réalise encore plus à quel point elle voudrait que Sid soit là. Pour l'enlacer, la réconforter, lui apporter cette étreinte dont elle a tellement besoin et dont l'inconnu ne semble pas disposé à lui offrir. Elle croise doucement ses bras, frigorifiée et finit par le rejoindre, silencieuse, perdue dans le fil de ses pensées morbides. Les visages de sa mère et de Sid ne cessent de tourner en boucle dans sa tête. Elle n'a aucun moyen de les joindre. Tout ce qu'elle peut faire, c'est attendre. Et la patience, ça n'a jamais été son fort. Elle se pose à côté de lui, à une distance raisonnable, les coudes sur ses cuisses, tandis que son état de nervosité remonte doucement. - je crois que je me suis déboité l’épaule. Elle se redresse un peu et grimace en le dévisageant, imaginant sa douleur. - je m’en suis pas rendu compte tout de suite mais…voilà. Elle lui lance un regard désolé, bien consciente que c'est de sa faute à elle. Mais elle n'est pas foutu de lui dire. Au fond, rien ne l'obligeait à venir jouer les héros. Alors non, ce n'est pas de sa faute. - Finalement, heureusement que je ne suis pas grimpée sur toi tout à l'heure, j'te raconte pas le désastre. Elle secoue doucement la tête en devinant comment ça aurait pu se terminer. Mal, très mal, assurément. Elle voudrait être capable de trouver des mots rassurants à lui dire, mais rien ne vient. Probablement encore trop sonnée par tout ce qui vient de se passer. Et aussi parce que ce n'est pas vraiment dans sa nature. Mads, elle ne s'occupe jamais des autres. Ce sont eux qui s'occupent d'elle. Alors là, elle ne sait pas comment s'y prendre. - et toi ça va ? Elle réalise subitement qu'elle n'avait même pas encore pris le temps de s'en assurer. Elle se détourne de lui pour se concentrer une seconde sur son propre corps. Elle a les jambes et les bras tout endoloris, elle aura probablement de vilains bleus. Elle tremble aussi de froid et elle sent toujours la peur qui cogne dans sa poitrine. Mais il lui semble que c'est tout. Rien de grave. Rien d'alarmant. - Oui, je crois. Qu'elle finit par dire, plutôt rassurée. - distrais-moi, parle-moi pour que j’oublie la douleur. Elle ouvre légèrement la bouche mais la referme aussitôt, prise de court. Elle n'est pas spécialement douée pour faire la conversation, surtout à un inconnu. - j’sais pas, dis-moi que tu sais comment on va sortir de là. Elle fait une petite moue, trahissant le fait qu'elle n'en a pas la moindre idée. - Tu sais, maintenant, je crois que tout ce qu'on peut faire c'est attendre que ça passe. Le truc, c'est qu'un ouragan ça peut durer quelques heures. Et qu'elle n'est pas certaine d'être capable de tenir encore longtemps dans des fringues trempés et gelés. Surtout que l'eau ne semble pas vouloir cesser de monter. - On devrait peut-être monter dans les étages et trouver un appartement où aller se réfugier, non ? Elle lève la tête tout en le disant, regardant les nombreux étages qui s'offrent encore à eux. - Tu te sens de monter les marches ? Qu'elle demande, un peu inquiète. Elle commence déjà à se relever en s'agrippant à la rampe. - Au fait, moi c'est Mads. Et toi ? Si elle est amenée à le remercier, elle aimerait autant le faire en connaissant son prénom, ça lui semble plus correct. Une fois debout, elle s'approche de lui pour l'aider à faire de même. - Faut vraiment qu'on se mette au chaud ou je vais crever de froid. Qu'elle dit, ses lèvres devenues bleus témoignant de la véracité de ses propos. Ils s'engagent dans l'étage du dessus et Mads commence à frapper aux portes. Les deux premières ne donnent rien, mais en arrivant à la troisième, celle-ci est entrouverte. Mads cogne trois coups dessus et la pousse avec prudence. - Y a quelqu'un ? Pas de réponse. Elle se tourne vers le garçon, qui a l'air d'aller vraiment de plus en plus mal, l'interrogeant du regard. - On fait quoi ? On rentre ou pas ? Elle n'a qu'une envie, c'est de rentrer et d'aller se débarrasser de ses affaires ruisselantes pour s'envelopper dans une couverture chaude et sèche. Mais elle ne voudrait pas leur attirer des ennuis non plus. Alors elle préfère s'en remettre à lui et le laisser décider. Assumer, c'est pas trop son truc à Mads.

il demande pas grand chose, juste un peu de distraction. durant leur avancée dans l’eau, il pouvait pas se permettre de penser à la douleur. il était bien trop concentré sur le but final à atteindre, se mettre en sécurité. y a déjà une certaine pression qui est retombée, parce qu’ils ont réussi à atteindre un immeuble, à échapper au vent, à la pluie et au courant. alors maintenant il réalise vraiment qu’il a pris un coup physiquement. il préfère la prévenir, de toute façon il va avoir dû mal à cacher quelque chose comme l’illustre la grimace qu’il tire à cause de la douleur. les marches de l’escalier deviennent son refuge pour un moment, histoire de se remettre un peu de tout ce qui vient de se passer. l’inconnue fait un constat intéressant : effectivement, heureusement qu’elle n’est pas montée sur ses épaules tout à l’heure. il aurait pas supporter son poids sur lui, c’est évident. mais quand il lui a fait cette proposition c’était plutôt l’adrénaline qui parlait, il se rendait pas vraiment compte de sa blessure. ça tire, ça lance, ce n’est pas agréable. il suffirait déjà de la remboîter, son épaule, mais il ne peut pas le faire seul, et demander ça à la jeune fille qui l’accompagne ne lui semble pas une très bonne idée. il faudra donc attendre. et c’est ce qu’elle lui donne comme conseil. ils ne peuvent plus rien faire maintenant, si ce n’est attendre qu’on vienne s’occuper d’eux, car retourner dehors est inenvisageable et qu’ils n’ont aucun moyen de prévenir les secours. il hoche la tête, peu satisfait par la réponse, bien qu’elle soit totalement logique. elle propose de se réfugier dans les étages, et de potentiellement trouver un appartement où s’installer en attendant. il n’y a même pas pensé, pour lui cette immeuble c’était simplement leur point de chute, il en a totalement oublié sa fonction première c’est-à-dire loger des personnes dans des appartements avec, accessoirement, des téléphones et internet. il bug un instant et ne répond pas tout de suite, alors elle lui demande s’il se sent de monter les marches. « oui, bien sûr. » il répond de but en blanc bien qu’il ait quand même quelques réserves. en tout cas, pour le moment, il décide de ne pas bouger, et d’attendre qu’elle le fasse en premier. et heureusement qu’il s’est blessé à l’épaule, et pas aux jambes. il maintient son épaule avec sa main droite. il a mal. vraiment mal. ace tente de se concentrer sur autre chose, parce que c’est la seule solution. il a pas le choix. et puis elle se présente, mads qu’elle s’appelle. il sourit à moitié, c’est assez cocasse comme situation. « moi c’est ace. j’te dirais bien que je suis ravi de te rencontrer, mais de toute évidence... » il lâche avec second degré. il reste quand même fidèle à lui-même, un peu lourd avec son humour de gamin. mais il a une excuse, ça lui permet de penser à autre chose. elle l’aide à se relever et précise qu’elle a vraiment froid. il l’observe un instant, c’est vrai qu’elle est assez pâle, ses lèvres son bleues et ses mains complètement glacées. « ouais, t’es complètement gelée. » il fait remarquer inutilement. parce qu’elle a dit qu’elle allait bien, mais faudrait pas qu’elle fasse une crise d’hypothermie ou autre chose. il a aucune idée de comment ça pourrait se manifester. la meilleure solution est donc de trouver un nouvel endroit pour se mettre à l’abri. ils montent les marches, atteignent le premier étage. il s’arrête et il la laisse faire. mads commence à frapper aux portes, concernant les deux premières elle n’obtient aucune réponse. la troisième est entrouverte. elle tape avant de questionner pour savoir si quelqu’un est là. aucun son ne se fait entendre. elle lui demande s’ils doivent entrer ou pas. ace il a pas un cas de conscience là. il avance vers la porte et il finit de la pousser entièrement. « franchement tant pis si on nous en veut pour ça. » il lance alors qu’ils découvrent l’appartement. « on peut entrer ? » il demande dans le vent parce qu’il n’obtient une nouvelle fois aucune réponse. il entre entièrement à l’intérieur, il découvre un salon, avec canapé et fauteuil. déjà, il sent que l’ambiance se réchauffe. son premier réflexe est de se poser sur le fauteuil. entre sa tête et son épaule, il commence vraiment à avoir dû mal à tenir debout, parce que la douleur ne s’amoindrit pas. au contraire. y a une couverture posée à côté de lui, il l’attrape de sa main encore valide et la tend vers elle. « tu devrais te réchauffer un peu. » il l’incite à venir se poser aussi, pas longtemps, juste le temps de gagner un peu de chaleur. lui aussi il a froid, ses vêtements sont tout aussi trempés, ils en deviennent lourds et ça colle à la peau. il se lève pour lui laisser la place. en attendant il décide de jeter un œil à la pièce. c’est pas très grand, c’est sûrement une personne seule qui vit ici. il scrute l’endroit à la recherche d’un téléphone. « on devrait appeler les secours... juste pour signaler notre présence, même s’ils doivent être débordés. » il se fait pas d’illusions. il s’attend pas à voir les pompiers ou les médecins urgentistes débarquer. pour la simple et bonne raison qu’il est sûrement pas assez blessé pour ça. mais il voit pas d’autres solutions. y a un téléphone fixe posé sur un bureau en face de lui. il compose le 911 avant de se rendre compte que, bien évidemment, il n’y a plus d’électricité et que ce qu’il vient de faire est totalement débile. « putain y a plus d’électricité. » il lance autant pour lui que pour mads. il commence à être à court d’idées. il commence aussi à saturer, il a envie que la situation se décante, qu’ils arrivent à trouver une issue. il se tourne vers la fenêtre, elle donne sur la rue. « tu penses qu’on peut nous entendre et venir nous sortir de là ? » il tourne son regard vers elle, entre espoir et inquiétude. il lui dira pas, mais la douleur commence sincèrement à devenir ingérable. et pourtant il est pas douillet. il s’adosse contre la fenêtre, il a juste envie de se laisser tomber sur le sol et d’attendre que ça passe. pourtant y a son instinct qui lui indique qu’ils sont proches de la fin, que bientôt ils seront libérés délivrés. il jette un œil dehors, et il croit apercevoir un bateau au loin. un bateau des secours. « viens voir on dirait un bateau de pompiers non ? » il fait en ouvrant la fenêtre. « mads tu veux pas gueuler comme tout à l’heure pour qu’il nous repère ? » il demande sans vraiment de tact, mais juste parce que là maintenant tout de suite c’est un peu leur seul espoir de sortir de là à peu près en sécurité.

Elle le regarde se lever et elle ne peut pas s'empêcher de grimacer légèrement, alors qu'elle devine sans peine que la douleur qui l'étreint est immense. Il tente de conserver bonne mine, mais les muscles de son visage qui se tendent par pulsions le trahisse. Elle voudrait pouvoir faire quelque chose pour lui. Le soulager, régler son souci. Malheureusement, elle n'y connait rien. Absolument rien. Et tenter quoi que ce soit risquerait surtout d'aggraver son cas. Elle serait capable de lui arracher complètement le bras tant elle n'a aucun talent médical. Elle n'est d'ailleurs pas d'un soutient psychologique très efficace non plus. Elle aimerait pouvoir le rassurer, l'aider à tenir le coup, lui dire que tout va s'arranger et trouver les mots justes pour l'apaiser. Mais rien en vient. Déjà qu'en temps normal, ce n'est pas son truc, mais là, elle est beaucoup trop fatiguée, gelée et terrifiée. Oui, terrifiée. Parce que malgré le fait qu'ils soient à l'abri désormais, elle entend toujours la tempête dehors. Et elle se dit que l'immeuble pourrait bien s'écrouler sur eux et les écraser. Et puis, elle pense à sa mère et à Sid. Et l'idée de les perdre lui terrasse le cœur. Elle se sent plus fébrile que jamais, avec la furieuse envie de se laisser tomber au sol et de pleurer, jusqu'à ce qu'on vienne la secourir. Mais elle se retient et s'efforce de bouger, avant de crever de froid. - moi c’est ace. j’te dirais bien que je suis ravi de te rencontrer, mais de toute évidence... Elle hoche la tête, entièrement d'accord avec lui. Clairement, elle aussi elle aurait préféré ne jamais le rencontrer si ça signifiait ainsi qu'il n'y aurait pas eu d'ouragan. Mais au vu des circonstances actuelles, elle est quand même bien contente d'être tombée sur lui. Sinon, elle serait probablement déjà morte, noyée. Lamentable. Elle avait une capacité de survie absolument lamentable. - ouais, t’es complètement gelée. En effet, elle ne se souvient pas avoir déjà eu aussi froid auparavant. Elle voudrait pouvoir retirer ses fringues trempés et se sécher. Se foutre sous un sèche-cheveux et contre un radiateur brûlant, tout en buvant un chocolat chaud. Malheureusement, elle devra attendre un peu pour ce programme. Elle se contente de hausser les épaules, consciente que lui aussi doit être frigorifié et qu'il serait assez mal venu de se plaindre plus que nécessaire, sachant que lui en plus, a une épaule en compote.

Ils finissent par arriver à l'étage et Ace décide de ne pas s'embarrasser des bonnes manières en pénétrant rapidement dans l'appartement. Mads ne se fait pas prier et lui emboîte le pas. Elle n'est généralement pas du genre à faire preuve d'une extrême politesse, mais elle est tellement sonnée par tout ça que son cerveau tourne au ralentit. Dans sa tête, tourne en boucle l'image de cette femme morte qui les a heurté tout à l'heure dans la rue et elle n'arrive pas à s'en débarrasser, s'empêchant ainsi de réfléchir à quoi que ce soit d'autre. Elle suit donc Ace et la chaleur de la pièce la réchauffe déjà un peu. Dans un premier temps, elle ne fait plus attention à lui, regardant autour d'elle sans vraiment pour autant. A chaque fois qu'elle pose les yeux quelque part, y a encore et toujours le visage de la femme qui apparaît. Elle finit par fermer les yeux et serrer les dents, au bord de l'explosion de larmes. Mais la voix d'Ace la tire de ses pensées morbides in-extremis. - tu devrais te réchauffer un peu. Elle rouvre les yeux et pivote, pour tomber nez à nez avec le grand brun qui lui tend une couverture. Elle ne se fait pas prier et l'attrape aussitôt avant de s'envelopper dedans, tremblante de la tête aux pieds. Il finit même par lui céder sa place et elle n'hésite pas non plus, venant se recroqueviller dans le fauteuil, essayant ainsi de recouvrir tout son corps avec la couverture. Elle l'entend râler alors qu'il se souvient qu'il n'y a plus d'électricité et elle le dévisage, un peu désolée pour lui. Elle n'ose imaginer l'enfer qu'il doit être en train de vivre avec sa blessure. Mais il a l'air vraiment très très mal en point. Peut-être qu'ils pourraient trouver quelque chose ici pour l'aider ? Des anti-douleurs ou quelque chose de ce genre là. Du coup, elle s'efforce à se lever, prête à aller fouiller l'appartement à la recherche de quoi que ce soit qui pourrait faire l'affaire. - tu penses qu’on peut nous entendre et venir nous sortir de là ? Elle s'arrête et se tourne vers lui, qui est désormais appuyé contre la fenêtre, regardant dehors avec un désespoir certain. Elle fait la moue et change ses plans pour s'approcher. - J'en sais rien.. honnêtement, avec tout ce vent, j'ai pas bon espoir. Je pense que tout ce qu'on peut faire, c'est attendre que ça se calme et que les secours arrivent. Elle lève sa main et vient la poser doucement sur le bras valide du garçon, essayant de lui offrir un geste réconfortant. - Je vais voir si je trouve pas des anti-douleurs ou un truc comme ça, pour essayer de te soulager en attendant. Elle retire sa main et s'éloigne, se dirigeant vers la porte la plus proche. Mais à nouveau, il l'interrompt. - viens voir on dirait un bateau de pompiers non ? Elle fait demi-tour sur le champ et se précipite vers la fenêtre, y collant ses mains et plissant les yeux. - T'es sûr ? Qu'elle demande, préférant ne pas se faire trop de faux espoirs. Il ouvre la fenêtre et son cœur bondit alors que le vent et la pluie viennent subitement lui agresser le visage. La peur se réveille sous sa peau et elle se fige quelques secondes, cherchant à se concentrer sur sa respiration pour se reprendre. - mads tu veux pas gueuler comme tout à l’heure pour qu’il nous repère ? Elle tourne la tête vers lui, fronçant un peu les sourcils, mais clairement, ce n'est pas le moment de se vexer. Elle secoue la tête et prenant son courage à deux mains, elle se penche autant que possible par la fenêtre et se met à agiter les bras en hurlant, de toutes ses forces. - HEY ! ON A BESOIN D'AIDE ! HEY LA HAUT ! Elle s'interrompt et tousse, elle crie si fort que sa gorge s'irrite. Mais elle reprend de plus belle. - ATTENDEZ NOUS ! HEEY ! Et enfin, elle voit des gens les pointer du doigt et le bateau dévie sa trajectoire pour s'approcher de leur immeuble. - Viens ! Qu'elle s'écrie à l'intention d'Ace, lui attrapant sa main valide et l'obligeant ainsi à le suivre dans sa course folle. Toujours sa couverture sur le dos, elle dévale les escaliers, espérant que le bateau ne leur fasse pas faux bond. Une fois en bas, c'est avec un soulagement immense qu'elle constate que le bateau est toujours là et les attend. Deux pompiers descendent dans l'eau pour les aider à les rejoindre et à grimper en lieu sûr. Aussitôt, les hommes prennent en charge Ace et dépose une couverture de survie sur Mads pour la réchauffer. Et l'effet ne se fait pas attendre.

La traversée est longue et difficile, mais dès lors que le bateau ne peut plus accueillir personne, il retourne en direction de l'hôpital pour déposer ses passagers. Une fois sur place, des médecins et des infirmiers viennent les récupérer, au milieu de toute cette pagaille. Des gens qui courent partout, qui pleurent, qui crient. On dirait le terrain d'une bataille. Mads, complètement perdue, ne remarque d'abord pas que deux personnes emmènent Ace. Lorsqu'elle réagit enfin, elle leur cour après. - Attendez ! Elle se faufile entre les gens et les rejoint. Là, elle attrape la main du grand brun et souffle. - Merci. Sa voix tremble. - Merci d'être venu me chercher. Je.. Elle déglutit, peu habituée à se livrer à ce genre d'exercices. - J'espère que tout va s'arranger pour toi et que.. enfin, que tu n'auras pas de séquelles et.. Mais elle se fait interrompre. - Mademoiselle, on doit l'emmener d'urgence faire des examens. Ils l'écartent de leur chemin et disparaissent dans les couloirs, laissant Mads toute seule. Elle resserre sa couverture de survie autour d'elle et regarde autour d'elle, les yeux gorgés de larmes, complètement perdue. Personne ne fait attention à elle, parce qu'elle est en bon état comparé à la majorité des personnes présentes, mais elle supporte pas ce manque d'attention. Elle a terriblement besoin des bras de Sidney autour d'elle et.. Sidney ! Avec un peu de chance, il est là lui aussi. Elle se met alors en mouvement, histoire de s'occuper. De ne plus penser à l'enfer qui se déchaîne dehors. Et au fait qu'Ace pourrait avoir des soucis irréversibles à cause d'elle. Et surtout, surtout ne pas penser à la femme dans l'eau. Se concentrer sur Sidney. Trouver Sidney. Sidney. Sidney. Sidney.