T’avais toujours des idées de génie Penelope. Et quand c’était pas toi qui les avait, c’était Tex. Mais personne dans la bande ne semblait reconnaitre votre talent, ce que tu trouvais fort fâcheux. Mais aujourd’hui t’avais fait un coup de maître. Après des heures d’enquête et de filage intensif – oui parce que concrètement t’avais rien à faire de tes journées - t’avais découvert que Tom bossait dans un bar. Le cachotier. Il vous l’avait caché. Enfin surtout à toi. Et ça t’avais blessé. Qu’était-il arrivé à la règle du on se dit tout on se cache rien ? Hein ? Envolée la règle. Alors t’avais eu une idée pour te venger. Pourquoi pas lui rendre une petite visite hein ? Après tout, il vous devait bien ça. T’avais pas vraiment eu besoin de convaincre Tex, après tout c’était ton partenaire à la vie à la mort, toujours fourré dans les mêmes coups stupides que toi. Toujours. Billy par contre ça avait été une autre histoire, mais t’avais réussi à le trainer à grand renfort de yeux de chiens battus et de supplications dignes d’une gamine de cinq ans.
Vous vous étiez donc embarqué le soir vers le fameux lieu secret pour une soirée mouvementé. T’étais trépignante Penelope, intenable, à sauter dans tous les sens et à gesticuler. Un instant tu t’étais dis que t’aurais du proposer à Junior de venir puis ton cœur s’était serré et t’avais rangé cette idée de côté. Tu le verrais une autre fois, quand tu serais plus prête à l’affronter.
Une fois le bar en vue t’avais poussé la porte à la manière des cow-boy qui entrent dans un saloon, chapeau sur la tête et santiags aux pieds. « A BOIRE PATRON » que t’avais gueulé, de ta voix infatigable, avant de lever les bras pour saluer ton frère. En quelques bonds t’es au bar, tu pousses du coude une nana qui lui fait de l’œil et tu te lèves pour planter un baiser sur sa joue. « Désolé Tomtom ton secret est révélé. J’espère que tu nous offres la tournée pour te faire pardonner » que tu t’exclame, tapotant le comptoir avec excitation. Ce soir tu bois. Tu bois jusqu’à voir triple. Tu bois pour oublier que en ce moment t’as sacrément envie de pleurer.

Tom bosse où ?! Oh le mec qu'avait bien caché son parcours extra-scolaire au reste de la bande. Tex, il en était pas revenu. Enfin un peu. Enfin ça l'avait surtout fait chier que Tom décide de faire carrière solo. Pourquoi tu m'avais rien dit. C'était un peu comme croiser un prof dans la rue, avec les mioches à un bras et les sacs de courses à l'autre. C'était réaliser, en changeant de trottoir avec l'air un peu con de quelqu'un qui réalise subitement l'évidence, qu'il y avait une vie indépendante de la sienne. Et que Tom, comme le foutu reste des humains sur cette planète, n'échappait pas à la règle ; les bras croulant sous le poids des sacs plastiques qu'il traînait. Humain ou pas, ça fait chier. Ouais, mais fallait s'en remettre. D'ailleurs, c'était parti pour. Là, maintenant, alors qu'il sautillait pas pour pas derrière Billy et Penelope. Il avait suffit d'un mot, d'un début de question qui s'était pris l'immédiat d'une réponse dans les dents. Un t-shirt pas trop dégueulasse, un claquement de portière, les sermons de Billy qui doutait encore. Et Penelope, qui jubilait au moins autant que lui à l'idée de bousculer un peu les choses. Doute pas, Billy, allez, ils sauraient comment se tenir. A leur manière ; tu les connais. 
A BOIRE PATRON. Collé aux basques de sa blonde, il peut pas s'empêcher de se frotter les deux mains d'un air presque machiavélique. Il adore ; les têtes qui se retournent, agacées, puis son air de branleur, trop bien soigné. Il imagine le portrait que ça tire, un rictus contenté aux lèvres. A hauteur du comptoir, il se pose à côté de Billy, un bras lâche autour des épaules de son brun de pote. Il a son pauvre air désolé, la décence de ressentir un peu de culpabilité. La décence que Tex connait pas. Non, lui il tape, il tape bien fort du plat de ses paumes sur le comptoir dans un roulement de tambour débarqué de nul part. Il arrête seulement quand la nana que Penelope a gentiment dégagé sur le côté lui lance un regard meurtrier. Pour bonne mesure, il retape une dernière fois. Fort. Histoire de bien se faire remarquer. Désolé Tomtom ton secret est révélé. J’espère que tu nous offres la tournée pour te faire pardonner. Oh ouais. La tournée, la tournée, la tournée. qu'il commence à chantonner comme un gamin. La tournée qu'il tiendrait sûrement pas, vraiment pas. Ah oui hein, je suis venu, mais seulement parce qu’elle a dit que tu offrais. Ce sera une Guinness pour moi, mec. Une pinte, évidemment. Et toi Tex ? Ouais, et toi, Tex. Qu'est-ce que tu vas foutre, toi hein ? Il hausse les épaules, beaucoup trop haut. Puis il les redescend, pour le coup trop bas. J'sais pas, je vais laisser Tom choisir. Attend, t'es barman maintenant. Vas-y, impressionne moi.

Aujourd’hui j’ai un putain de mauvais pressentiment, le même poids sur la poitrine quand l’Autre nous a lâché. Sentiment désagréable, une sorte de bouillon noir et dérangeant dans le bide, mais je faisais avec. Ce soir j’étais de service au bar, ça allait me changer les idées.

La fin de la journée approchait, et aucune merde ne m’était tombé sur le coin de la gueule, bizarre… Pourtant j’avais la ferme impression d’être poursuivi par le spectre incarnant les emmerdes, m’observant tapi dans l’ombre, caché à chaque coin de rue derrière le mur d’un bâtiment, m’espionnant sournoisement attendant le moment opportun pour me lâcher un maelstrom de merde en pleine face.
Mais non… toujours pas… Je me dirigeais vers le bar, je n’allais pas tarder à commencer, le soleil s’était couché depuis un bon moment… … On verra bien, au pire ce n’est qu’un mauvais pressentiment rien de plus.

Durant mon service, j’observais attentivement chaque client entrant et sortant, plusieurs clientes m’avaient fait la remarque. « Bah alors Tom qu’est-ce qui se passe ce soir ? Quelque chose ne va pas ? » … je n’ai aucune idée de ce qui ne va pas mais je sais qu’il y a anguille sous roche voilà ce qui ne va pas.
Bon plus qu’une demi-heure avant la fermeture et j’ai encore tous mes membres et je suis encore en liberté… ça devrait aller no… merde… Putain de merde....

La porte s’ouvrit dans un fracas, une voix aussi enjouée que familière « A BOIRE PATRON » fuck… C’est trop tôt, je ne leur ai rien dit pour le moment exprès… Heureusement que je suis tout seul ce soir et que je fais la fermeture… L’effet de surprise passé, je retrouvais aussitôt mon calme et cet air stoïque qui me caractérise tant. Je jaugeais la situation…
Il restait encore quelques clients, deux bandes de potes posés tranquillement dans leurs coins, et une cliente qui tentait sa chance avec moi, y en a au moins une chaque soir, je n’y prêtais pas attention. Penelope, parce que oui c’était bel et bien elle, beaucoup trop fière, la dégagea et se posta pile devant moi. « Désolé Tomtom ton secret est révélé. J’espère que tu nous offres la tournée pour te faire pardonner. » c’était une vraie pile électrique, elle devait jubiler de fierté. Tex était collé à ses basques comme d’habitude, il tapa fort sur le comptoir pour se faire remarquer, je lui lançai un regard noir pour le refroidir aussitôt. Quant à Billy, il était resté en retrait, s’excusant du regard, je fermais les yeux et fit un signe de la tête pour lui faire comprendre qu’il n’y avait pas de soucis. Il rejoignit les deux enfants au comptoir et passa commande à son tour avant de proposer à Tex de choisir, il haussa les épaules, et je lui renvoyai le petit sourire narquois en bien plus flippant. « Tu veux que je t’impressionne Tex ? » lui demandai-je un sourire carnassier sur le visage, les canines clinquantes.
Je m’occupai d’abord de Billy, c’était le seul à avoir demandé quelque chose de précis. « Vous savez, je comptais vous en parler d’ici une semaine ou deux, le temps d’avoir gagné la confiance des propriétaires. » dis-je tout en servant la pinte de Guinness pour Billy. « J’espérais pouvoir faire de ce lieu notre petit QG de la picole après la fermeture. Jouer au billard jusqu’à pas d’heure et se défouler un peu. Mais bon… » je soupire et tend le verre vers Billy « Pourquoi ne passe commencer ce soir, je ferme dans 20 minutes. »
Je ne prenais plus de commandes des autres clients, les autres consos étaient déjà payés, il n’y avait plus qu’à attendre que tout le monde se barre avant de baisser le rideau et de passer aux choses sérieuses. « Hmm… A nous deux Tex… » je me plaçais devant de lui, un petit sourire en coin. Je pris un verre de pinte, et je tournais le dos à Tex, je remplis un peu moins de la moitié du verre avec du rhum, je complétai jusqu’à la moitié avec de la vodka, je pris un bloc de glace que je bats au-dessus du bac de glace pilée, j’en pris une louche que je versais dans le verre, que je complétais avec du cola et du sirop cola et citron vert pour être sûr qu’on ne sente presque plus l’alcool. Je me retournai vers Tex. « Tiens, j’espère que ce Cuba Libre remixé sera… é-pou-strou-flant. » lui dis-je en rigolant. Puis je me tournais vers ma petite sœur. « Bon à nous deux Calamity. Une petite grenadine ? Un monaco ? » je lui tire la langue.
Le bar se vidait peu à peu, les clients me saluaient de la main avant de quitter l’établissement, je répondais d’un simple signe de la tête. Je fixe Penelope droit dans les yeux, plissés, un peu comme au far west, je la jauge. « Alors je t’écoute ? Hm nan… laisse-moi faire… On va juste éviter que… » je me penche vers elle pour lui chuchoter quelque chose à l’oreille « tu ne finisses comme Tex, d’ici vingt minutes, il nous dira ô combien il nous aime… si tu vois ce que je veux dire. »
Oui… je suis une tepu avec Tex. Je refis un Cuba Libre pour Penelope mais avec les vraies proportions et sans vodka ni trois tonnes de sirop, il n’y en avait pas besoin, du rhum, citron vert et du coca, simple mais efficace. Je tendis le verre à Penelope.  « Fière de m’avoir démasquée hein ? »

Y a ce regard qui passe sur le visage de ton frère. Du dépit ? de la surprise ? de la résignation. Surement de la résignation. Faut dire qu’il a pas vraiment le choix avec toi, avec Tex, même avec Billy. Vous êtes intenables. Tex d’accompagne, maltraite le comptoir à un rythme dissonant et ça te fait rigoler. Heureusement qu’il est là ton Tex, sinon qu’est-ce que tu ferais tous les jours hein ? Tu te ferais surement sacrément chier. Billy lui est plus sobre, il se justifie devant son ami sa voix qui s’élève derrière te fait sourire. Ah Billy, sacré Billy. Il dit qu’il est là pour l’open-bar, tu te doutes qu’il est surtout là pour vous surveiller, Tex et toi, et puis aussi parce qu’il réussissait jamais à te dire non.
Tu te mets un peu en retrait Penelope, les yeux fixés sur ton frère pendant que Tex réclame à boire, qu’il demande à Tom de l’impressionner. A croire que le blond n’a toujours pas compris la mentalité du chef de la bande, laisser ton frère choisir c’est comme un appel au meurtre. Parce que Tom est sans pitié, et tu le sais. Tu veux que je t’impressionne Tex ? tu sens la menace dans sa voix, et son sourire n’a rien d’amical et plus prédateur
Ton sourire meurt un peu sur tes lèvres, mais tu redresse bien vite la tête, fixant Tom qui commence à préparer la bière de Billy. Vous savez, je comptais vous en parler d’ici une semaine ou deux, le temps d’avoir gagné la confiance des propriétaires Hm. Pourquoi ne pas en avoir parlé tout de suite hein ? Pourquoi ne pas leur avoir tout simplement interdit de venir, le temps que les choses se tassent ? Pourquoi cacher ça à eux ? Pourquoi cacher ça à toi ? Ca pique un peu dans ton cœur Penelope, et t’essaye de pas y penser. J’espérais pouvoir faire de ce lieu notre petit QG de la picole après la fermeture. Jouer au billard jusqu’à pas d’heure et se défouler un peu. Mais bon… Pourquoi ne pas commencer ce soir, je ferme dans 20 minutes «Bien. » Que tu murmures à ton frère, juste entre vous deux, tu lui fais comprendre qu’il en faudra plus pour que tu lui pardonne. Puis tu reprends ton air de gamine insupportable, observant le massacre de Tex se dérouler. Il mélange des choses dans son shaker, des alcools, et tu te diriges vers Billy pour lui chuchoter à l’oreille : « Pauvre Tex, on tire au sort pour savoir qui lui tiendra les cheveux ce soir quand il gerbera ? » Même si y a pas vraiment de suspens et la personne qui l’accompagnera toute la nuit ça sera forcément toi. Il te dira des conneries, t’expliquera à quel point tu gueule fort dans la nuit, et toi tu finiras par ravaler tes larmes, à vouloir le taper, s’étouffer dans son vomi. Ce que tu ne feras pas.
Bon à nous deux Calamity. Une petite grenadine ? Un monaco ? Il te dire la langue et tu lui donne un léger coup de poing dans le bras. Il se fout de ta gueule et tu le sais. Il s’interrompt un instant pour saluer ses clients et de nouveau tu te sens laissée de côté. Les gens le connaissent, les gens l’aiment. Et vous alors ? Et vous… Qu’est-ce qui vous dit qu’il vous laissera pas tomber ? Qu’il se trouvera une nana et qu’il décidera de rester barman pour la vie ? Pitié. Pas ça. Tout mais pas ça. Y a rien de pire que la sédentarisation. C’est le regard de Tom qui te sort de tes pensées, tu sais que quand il te regarde comme ça c’est qu’il va rigoler. T’aime bien quand il fait ça, ça te rappelle qu’il est ton frère, pas juste ton boss, plus qu’un ami. Alors je t’écoute ? Hm, nan… laisse-moi faire… On va juste éviter que… Il se penche vers toi pour chuchoter à ton oreille et tu rigole déjà d’avance tu ne finisses comme Tex, d’ici vingt minutes, il nous dira ô combien il nous aime… si tu vois ce que je veux dire Oui tu vois très bien Penelope, et votre soirée y a quelques semaines à Tex et toi remonte dans tes souvenirs. Ptêtre que y a du rouge qui se met à colorer tes joues, tu tournes la tête pour regarder le blond en question. « Aucun risque Tomtom, tu sais très bien que je vous aligne quand vous voulez toi et Billy. Tex on a pas besoin d’en parler. » ce qui est loin d’être faux. T’es un cow-boy un vrai Penelope, tu préfères le whisky à l’eau. C’est plus sain.
Fière de m’avoir démasqué hein ? « Tu parles, tu peux m’appeler Sherlock maintenant, je devrais penser à me reconvertir dans les enquêtes. » Ou pas. Parce que la subtilité c’est pas vraiment pour toi. Tu laisses à Tom et à Tex. C’est plus simple comme ça.
Ton verre en main tu le lèves comme pour porter un toast, prenant soin de vérifier qu’il ne reste plus vraiment personne autour de vous. « A Savannah, la ville où apparemment on a le droit de se réinventer. Tu penses faire quoi toi Billy ? Danseur classique ? Et Tex. Non. Tex laisse-moi deviner….T’aurais même pas le temps de te réinventer, tu te feras enfermer tout de suite tellement t’es insortable. Quant à moi je rejoindrais le cirque. Voila. » Ce qui n’est pas non plus sorti de nulle part, vu le temps que tu passes là-bas avec Halina.

« Tu veux que je t’impressionne Tex ? » Oh vas-y, ramène tout. Il est prêt, l'idiot. Déjà, il arbore un rictus qui trahit l'inévitable éventualité de le voir finir quelque part, ivrement explosé, entre le comptoir et la table de billard. Sous la foutue table de billard, peut-être. C'est sa façon de tenir l'alcool comme une gamine qui vient de débarquer à l'université ; mal. C'est sa manie de descendre le liquide, la compétition dans le sang et les nerfs qui chantent encore, encore, encore. Puis c'est aussi Tom, qui en joue comme un putain de prodige. Les notes parfaites qui filent droit sur les barres des partitions. A jamais casser de cordes ; seulement à le casser lui entre deux mélodies et trois verres, pour les quelques fois où il arrivait à tenir plus longtemps que le premier. Une gamine, j'vous dis. Une gamine qu'a une confiance aveugle dans le mec qui se tient de l'autre côté. Bizarre. C'est le sentiment qu'il a en regardant Tom gérer son affaire comme un grand. Son affaire légale. Son affaire rémunérée. Sûrement déclarée aux impôts aussi. Merde, ils étaient en train de le perdre.
« J’espérais pouvoir faire de ce lieu notre petit QG de la picole après la fermeture. Jouer au billard jusqu’à pas d’heure et se défouler un peu. Mais bon… » Ouais. Il a quelques doutes quand même, et une poignée de battements de cœur qui se serrent au passage. Un coup d’œil vers Penelope, et il comprend que ça vient pas que de lui. Il la regarde, puis Billy, puis Tom, puis encore Penelope parce que c'est gratuit et qu'il peut pas dire non à ça. Il a une lueur méfiante dans le regard, il tente de déceler la blague, le moment où Tom va révéler le plan qui se cache derrière la façade monstre de la banalité. Un braquage, un client milliardaire et un peu sénile, des bruits de rue intéressants. Tom, qu'est-ce que tu fous avec ces gens, c'est pas toi. C'est pas nous. On a pas besoin de ça, on a pas besoin d'eux. On a jamais eu besoin d'eux, pourquoi est-ce que tu t'acharnes à vouloir changer ce qui a toujours fonctionné. « Bien. » Pas bien. Pas bien du tout. On rembobine ça tout de suite, "patron". « Ça pour une surprise, t'as le niveau pour aller animer des goûters d'anniversaires. Qui sait, peut-être encore une autre vocation ? » Les mains qui picotent, les mains qui tremblent. L'addiction qui tape du pied, furieuse qu'on refuse de lui porter attention. Elle tire la gueule, sévère, l'addiction. Elle se demande quand ça va revenir, et c'est plus ça qui la tue lentement à petit feu ; pas savoir quand la prochaine dose va se pointer. « Hmm… A nous deux Tex… »

L'alcool lui revient à l'esprit, l'alcool lui revient dans les mains, sous la forme d'un cocktail maison. Tex hoche une fois de la tête en remerciement. Le rictus joueur de Tom lui échappe, alors qu'il trempe les lèvres dans le liquide sans hésiter. Le sucre lui éclate violemment au palais, laissant une âpreté presque dérangeante sur l'émail de ses dents. Il déglutit la première gorgée, difficilement. La deuxième passe déjà mieux. « Merde, c'est sucré ton truc, tu veux me refiler du diabète ou quoi ? » La plainte dure à peine. Tex questionne plus, il boit. Il boit, il boit, il boit. Ça coule facile le long de sa gorge, directement dans le fond de l'estomac. Ça court-circuite tout à une vitesse dingue sur son passage, à commencer par ses mains. Indépendantes ; les deux paumes qui décident de prendre la relève et de communiquer à la place de la bouche. Pas bon. Pas bon du tout. « Pourquoi vous chuchotez ? Hey, faites partager, c'est pas cool pour nous. » Nous. Lui et son verre. Lui et Billy, dont il tente d'attirer l'attention en balayant l'air de sa main libre. Sauf que la main, elle atteint jamais Billy. C'est le comptoir qui la récupère, lourdement. Merde. Il laisse échapper un gémissement aux nuances plaintives ; putain de comptoir qui était pas foutu d'être installé ailleurs. « A Savannah, la ville où apparemment on a le droit de se réinventer. Tu penses faire quoi toi Billy ? Danseur classique ? Et Tex. Non. Tex laisse-moi deviner….T’aurais même pas le temps de te réinventer, tu te feras enfermer tout de suite tellement t’es insortable. Quant à moi je rejoindrais le cirque. Voila. » Cette fois-ci, il loupe pas Billy, lui écrasant bien l'épaule comme s'il tentait de la refoutre en place après un accident. Fallait pas lui laisser manipuler des trucs aussi fragiles dans cet état là. Le nombre de soirées où il avait failli trébucher et éclater Penelope sur le sol en milles morceaux aurait du suffire pour qu'il se ramasse une contravention. « J'suis parfaitement sortable, merci beaucoup. » qu'il sort dans un hoquet, parce que forcément, c'est au tour de sa gorge de déconner et d'avaler tout de travers. Puis il y a l'image de Billy en tutu rose qui lui vient à l'esprit, et là, il manque carrément de recracher tout son verre. « Déconne pas, Billy il pourrait avec ses cheveux. T'sais, faire un chignon et tout ; putain mec ouais pourquoi tu fais jamais ça avec tes cheveux hein ? Ils sont cool tes cheveux. Moi j'les aime bien. » Il retourne à son verre, une trace de rire sur les lèvres qui l'empêche de boire sans manquer de s'en foutre partout. Il glousse comme un con dans son coin. « Hey, je peux fumer quelque part ou bien ? Il faut que j’en grille une là. » « T'as des clopes ? Hey Billy. Hey Billy. Tu m'en files une ? Allez Billy. S'teplait. »