▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
J'arrête pas de gratter mon tatouage. J'sais pas pourquoi, mais il me démange. Pourtant, ça n'a pas l'air irrité, ma peau a l'air de très bien supporter l'encre. Alors je comprends pas. Mais il m'obsède. Je passe mon temps à le toucher, le triturer, me poser des questions. J'ai vu les quelques regards qui se sont posés dessus quand je le laissais apparent. J'ai vu le regard dépité du psychologue lors de la séance de groupe. Comme s'il était déçu, résigné. Je vois bien qu'un truc cloche, mais je ne pige pas quoi. Faut que je sache. Faut que j'en parle. Alors, instinctivement, c'est le numéro d'Eanna que je compose. L'heure des appels est quasiment terminé et ça m'arrange. Y a quasiment plus personne qui traîne dans le coin. Pas d'oreilles curieuses. Je regarde nerveusement autour de moi, faudrait pas que je me fasse voir en train d'appeler où on va encore me poser des questions. Et à force, je ne sais plus quoi inventer. Ça sonne. J'attends. Elle décroche et je soupire de soulagement. Y a toujours cette petite appréhension. Celle qu'elle ne réponde plus un jour, celle qu'elle tourne la page, qu'elle m'oublie, qu'elle m'abandonne. — Salut Nana. La voix qui se charge de tendresse quand je prononce son surnom. Mais cette intonation disparait vite alors que je reprends. — Faut qu'tu me rendes un service. Et je viens gratter encore une fois mon tatouage à travers mon t-shirt.
J’rêve en technicolor, la respiration apaisée, paupières closes. Un silence total règne dans l’appart : même Finn se contente d’un faible ronflement en fond sonore rythmé par le ronronnement de la circulation. Y a rien qui pourrait me faire sortir du lit. Surtout pas depuis l’ingestion de kéta y a quelques heures quand une obscure inconnue m’a généreusement filé sa bouteille de flotte trafiquée. J’étais complètement stone. L’impression d’avancer dans du coton, les hallu’ dans les pupilles, l’incapacité de formuler autre choses que des onomatopées. J’me souviens même pas clairement du reste de la nuit. Tout c’que je sais, c’est d’être parvenue à m’échouer en sécurité dans mon pieu à un moment donné.
Mais ma tranquillité se fait rudement secouer par le portable planqué sous l’oreiller – et malheureusement disposant encore d’un peu d’batterie - qui mugit sa sonnerie. Mon cœur fait un saut périlleux tandis que ma main s’empare instinctivement de la petite machine. J’commence à lever le bras pour l’envoyer dans le décor quand mes yeux s’accrochent sur le numéro. « Allô ? » « Un détenu de la prison fédérale Coastal cherche à vous joindre. Pour accepter la communication veuillez appuyer sur dièse. Cet… » J’appuie rageusement sur la touche en question avant de reformuler. « Allô ? » Le timbre est rauque, encore goudronné par toutes les clopes enfilées à la chaîne de la veille et le sommeil à peine dissipé. « Salut Nana. » Y a mon palpitant qui bondit à nouveau – mais plus doucement cette fois-ci- et mon esprit qui se dérouille. J’me sens plus vivante tout d’un coup. Ma bouche s’arrondit, se détend en semblant de sourire puis grimace. « Salut. » Qu’est-ce qu’il me veut mon bagnard de mec ? P’t’être qu’il a appris pour mes dernières incartades. J’vais en être quitte pour une longue litanie d’insultes, toutes plus crades les unes que les autres. Ou alors il va menacer de m’tuer. Ou se frapper la tête contre le combiné. « Faut qu'tu me rendes un service. » Ah ? C’est nouveau ça. Il a l’air drôlement sérieux JJ ; c’est qu’il y a un truc qui tourne pas rond. J’me redresse sur le matelas en cherchant dans la pénombre mon paquet de clopes. Tant que le cancer pointe pas le bout de son nez j’ai pas prévu de m’arrêter. « Quel genre ? » C’est pas que j’me méfie, mais un peu quand même. « Tu vas pas m’commanditer un meurtre hein ? T’es histoires tu les règles tout seul JJ, j’te préviens. » Ça va bien cinq minutes de devoir ramasser les dégâts derrière lui. C’est carrément une pelleteuse qu’il me faudrait maintenant pour déblayer toutes ses conneries de pots cassés.
JJ O'Reilly
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▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
— Salut. Sa voix qui suffit à tout réchauffer, tout calmer. Comme si finalement, rien n'était grave. Je ferme les yeux une seconde. Putain, je veux la serrer contre moi. Je veux sentir son odeur, j'ai l'impression de l'oublier progressivement. Je veux sa peau sous mes doigts, mes lèvres sur les siennes. Elle me manque. C'est pire chaque jour. — Quel genre ? Tu vas pas m’commanditer un meurtre hein ? T’es histoires tu les règles tout seul JJ, j’te préviens. Je lève les yeux au ciel et soupire bruyamment, commençant à m'agiter un peu. — Mais non putain. Je ne cherche même pas à vraiment démentir ses propos. Bien sûr que je serais capable de lui demander un tel service. Mais pas ici, il me semble que les conversations sont écoutées, ou enregistrées. J'suis pas sûr mais c'est trop risqué. Et de toute façon, je n'ai personne à faire buter. Je commence à tirer sur le fil du téléphone, vérifie encore une fois que personne ne rôde autour de moi et je me lance. — J'ai besoin que tu cherches un truc sur internet. Je déglutis, deviens nerveux, mon œil droit qui cligne par intermittence alors que je ne tiens pas en place. — Cherche 'croix gammée' et dis moi c'que tu trouves. Ma voix est devenue basse, comme si elle peinait à s'élever avec le poids de la culpabilité qui pèse sur moi.
« Mais non putain. » J’peux presque l’entendre lever les yeux au ciel. Ou en tout cas j’me le représente parfaitement avec sa gueule de fatigué et son p’tit air narquois. Au moins il a pas prévu d’ajouter l’homicide sur sa liste de crimes. Pas encore. Et c’est déjà ça. « Balance. » J’suis toujours en train d’essayer de mettre la main sur mes blondes. J’finis par m’allonger sur le ventre en travers du lit pour jeter un coup d’œil en sous le sommier. En dehors de mégots abandonnés et d’un soutien-gorge, y a pas un bâton qui m’fait du gringue à l’horizon. « J'ai besoin que tu cherches un truc sur internet. » J’me dirige vers la cuisine en même temps. Finn laisse toujours traîner des paquets en évidence. J’passe sur la pointe des pieds dans le salon pour pas le réveiller et chope d’un revers les Malboro sur le plan de travail. « Mmmh ? » Je grogne, filtre coincé entre les lèvres, doigts appuyés contre le briquet. « Cherche 'croix gammée' et dis moi c'que tu trouves. » Je manque de m’étouffer avec la première taffe. Immédiatement, j’retourne sur mes pas à toute allure mais en évitant de claquer la porte. Vu la teneur de la conversation j’vais éviter de mettre mon frangin dans la confidence. « Quoi ? » Je persifle en recrachant la fumée par les narines, l’image même de la Gorgone. « Qu’est-c’que tu racontes ? » J’me souviens vaguement d’une histoire d’allemands pas contents qui adulent un p’tit bonhomme à vilaine moustache. Je sais plus exactement de quoi il en retourne mais ça m’étonnerait que ce soit un gage d’amour et de paix. Je m’empare au passage de mon antique ordinateur portable. La connexion dure trois plombes et j’peux pas m’empêcher de tapoter nerveusement sur la souris. « Vas-y répète. Tu l’écris comment ? » La barre de recherche daigne enfin s’afficher. J’coince le téléphone contre mon oreille, prête à taper lesdits caractères. J’suis vraiment sûre de pas découvrir un champ de roses.
JJ O'Reilly
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▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
— Quoi ? Sa voix qui vrille et aussitôt, je me tends. Deviens de plus en plus nerveux. Je tire plus fort sur le fil, enroule mon doigt dedans. — Qu’est-c’que tu racontes ? Je souffle discrètement, agacé. Je n'ai pas envie qu'elle me pose des questions, qu'elle me fasse des remarques. Je veux juste qu'elle fasse ce que je lui demande. — Nana. Ma voix est sèche, autoritaire, comme pour mettre fin à ses questions. Elle n'insiste pas. Un bref silence nous enveloppe, je l'entends qui se mouve et qui s'active, elle doit probablement allumer l'ordinateur. Moi, je continue de regarder frénétiquement autour de moi, me rapproche encore plus du mur, comme si ça allait me rendre invisible. — Vas-y répète. Tu l’écris comment ? Je me concentre à nouveau sur elle. — Croix gammée. Croix, ben, comme une croix quoi. Et gammée, g-a-m... Je bug. Putain, je n'ai aucune idée de comment s'écrit cette merde en fait. Je m'énerve, secoue la tête et ma main libre, faisant voler le fil du téléphone dans tous les sens au passage. — Gammée quoi, j'sais pas, tape comme tu l'sens sur google ça te corrigera de toute façon. J'aime pas trop qu'on me rappelle mon niveau de non connaissances, ça a tendance à me foutre les nerfs en boule.
J’attends quelques secondes le temps qu’il fasse le point. Puis il me lance d’un ton suffisant. « Croix gammée. Croix, ben, comme une croix quoi. Et gammée, g-a-m... » J’appuie sur les touches au fur et à mesure jusqu’au silence. J’ricane comme une hyène devant son mutisme : JJ a pas inventé l’eau chaude c’est sûr. Il peut bien me prendre de haut quand ça lui chante, mais les bancs scolaires et toute autre forme de culture en dehors de celle de la bière, il les a abandonné y a bien longtemps. L’irlandais se fie davantage à ses instincts ou a sa ruse innée. « Gammée quoi, j'sais pas, tape comme tu l'sens sur google ça te corrigera de toute façon. » « Ça va, pas la peine de t’énerver l’analphabète. » J’suis toute fière de mon insulte élégante pour une fois. Je glousse encore en frappant « entrée ». Google justement, m’indique 758 000 références sur le sujet. Je parcoure rapidement des yeux les premières lignes et reste perplexe. « Y a plusieurs significations. C’est une croix gammée nazie que tu cherches ou la svat… Svastika ? » Les deux ont la même forme. J’finis par cliquer sur la seconde. Un truc indien ou chinois, la ligne a l’air floue visiblement, qui est sensé vous porter chance sur commande. Le Kid vire bouddhiste depuis sa prison ou quoi ? Remarque, il peut ramer dès maintenant pour trouver la rédemption… ¨Peu convaincue que ce soit le cas, je retourne sur le premier résultat. Merde. J’relis plusieurs fois les caractères, pas certaine de tout piger. L’histoire était pas ma matière favorite. Comme la plupart des autres d’ailleurs. Je pose le téléphone sur la couette et le met en haut-parleur. Y a un terme qui revient souvent : neo-nazi. Groupuscule contemporain des idéologies nazies… Existe de nombreuses branches, notamment dans le milieu carcéral… Carcéral ? La prison ? JJ est en prison. Et JJ s’y est fait de nouveaux amis, c’est lui-même qui me l’a raconté lors de notre dernier coup de fil. « JJ… C’est quoi ce délire ? Ça parle de suprématie de la race blanche… De comparaison avec le Ku Klux Klan ! » Y a pas que ça. L’image d’un trèfle vert éclatant en filigrane de la fameuse croix apparait au fil de mes clics névrotiques. Aryan Brotherhood. Conditions de recrutement : être blanc, jurer allégeance. Commettre un meurtre. Un soudain goût de répulsion me tapisse la bouche. « Pourquoi tu m’demandes ça ? C’est qui tes potes là ? » Ça va encore moins me plaire. J’le sens. Je l’sais.
JJ O'Reilly
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▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
— Ça va, pas la peine de t’énerver l’analphabète. Je grogne. — Hey, la ramène pas trop toi non plus. Faut dire ce qui est, je n'ai pas choisi Eanna pour son QI non plus. Alors je suis peut-être plus con qu'elle - ou peut-être pas d'ailleurs - mais elle ne brille pas franchement non plus dans le domaine. — Y a plusieurs significations. C’est une croix gammée nazie que tu cherches ou la svat… Svastika ? — Euh... Je bug. Quoi ? Nazie ? Sva... Truc-chose ? Putain, je nage dans la confusion. Je viens gratter l'arrière de mon crâne, le front plissé, l'incompréhension qui plane sur mon visage. C'est quoi cette merde encore ? Je ne dis plus rien, ne sachant pas quoi répondre, laissant Eanna faire sa petite enquête pendant que je me perds dans un flot de pensées incohérent. Jusqu'à ce qu'elle m'interrompt à nouveau. — JJ… C’est quoi ce délire ? Ça parle de suprématie de la race blanche… De comparaison avec le Ku Klux Klan ! — Q-quoi ? La stupeur qui fait vaciller ma voix pendant une seconde. Putain, putain, putain. Je regarde à nouveau autour de moi, ne tiens plus en place et reviens gratter frénétiquement mon tatouage. Le Ku Klux Klan, ça je connais, j'ai vu des trucs dessus aux infos. Daire a souvent gueulé contre d'ailleurs. Putain, j'ai chaud. — Pourquoi tu m’demandes ça ? C’est qui tes potes là ? Merde. Je panique. Je viens à peine de me réconcilier avec elle, si elle découvre tout maintenant, ça va être mauvais pour moi. Je réponds précipitamment, butte sur les syllabes. — Non non, rien à voir avec moi ou, ou mes potes. T'inquiètes. C'est, hm... C'est quoi, c'est quoi, c'est quoi ? — Putain. Que je murmure tout bas, commençant à peine à réaliser dans quoi je viens de m'embarquer. — C'est rien. Juste... Ne dis pas que je t'ai demandé ça, ok ? Surtout pas à Daire putain. Elle va me tuer.
« Q-quoi ? » Y a calage, je l’entends nettement. Même lui comprend c’que ça implique les trois initiales identiques dont s’affublent ces abrutis encapuchonnés de blanc. Je dévore les lignes qui défilent sur l’écran. J’suis pas la plus instruites des gonzesses, mais quand un truc m’intéresse je peux ingurgiter des quantités impressionnantes d’informations. Puis j’ai pas mal d’intuition, un trait de caractère inné aux femmes du clan Gynt. D’autant plus si ça concerne JJ qui semble incapable d’éviter les emmerdes depuis sa venue au monde. « Non non, rien à voir avec moi ou, ou mes potes. T'inquiètes. C'est, hm... » J’attends. Mais y a que le blasphème pour réponse. C’est qu’il est nerveux. J’continue à lire la description des Aryan Brotherhood. Moins de 1% de la population carcérale donc, mais responsables de 26% des assassinats commis en prison. Putain. « C'est rien. Juste... Ne dis pas que je t'ai demandé ça, ok ? » « OK… Si tu m’expliques. » J’me frotte les paupières en inspirant comme une tarée sur ma clope. C’est plutôt un joint qui m’faudrait, ou une machine à remonter le temps pour pas entendre l’appel. J’pourrais être encore en train de dormir peinarde et jamais m’être intéressée aux AB. Je sens que JJ va pas vouloir lâcher le morceau. Il est borné le garçon ; il préfère verrouiller les mâchoires façon bouledogue plutôt que de revenir sur une de ses décisions. Alors j’ai pas l’choix. Faut que je sorte la menace ultime. « Sinon je raconte tout à Daire. » Bien que ça me fasse royalement chier de devoir encore compter sur elle pour le remettre sur le droit chemin. Ils me gonflent avec leur relation fusionnelle à la con ces deux là. Parfois j’ai l’impression d’être la cinquième roue du carrosse entre eux. Mais y a un truc que j’sais : Daire est la seule à avoir autant d’emprise sur JJ. Il a intégré et accepté qu’elle était plus intelligente que lui. Quant à la rouquine, elle le comprend suffisamment pour utiliser les bons mots au bon moment. Et surtout elle parvient à réaliser l’exploit de gueuler plus fort que lui. «Donc balance JJ. On est plus à ça près j’crois… » Moi j’le suis plus en tout cas. C’est comme si j’étais anesthésiée. Je pense que le fait d’être amoureuse d’un mec vrillé - qui m’a foutu la tannée de ma vie, qui m’a rendu stérile, trompée, souillée, humiliée - a profondément biaisé ma perception des limites entre le « bien » et le « mauvais ». Je navigue dans les limbes sans me soucier d’arriver en enfer ou au paradis.
JJ O'Reilly
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▹ posts envoyés : 2817 ▹ points : 51 ▹ pseudo : mathie (miserunt) ▹ crédits : moi (ava + gif) & tumblr ▹ avatar : yuri pleskun▹ signe particulier : regard fendillé, la folie qui crame au fond de son regard, la gueule toujours un peu cassée et l'allure dézinguée.
— OK… Si tu m’expliques. — Y a rien a expliquer p'tain. Je souffle bruyamment et mes doigts passent encore et encore sur mon crâne lisse. Je ne l'ai pas appelé pour ça. Pour qu'elle exige des informations de ma part. Alors non, je ne dirais rien. Je vois bien que tout ça ne l'enchante pas et je crains trop de la perdre encore plus si je venais à passer aux aveux. — Sinon je raconte tout à Daire. Blanc. Pardon ? Je grince des dents, mes doigts qui serrent le combiné si fort qu'ils blanchissent. Si je l'avais en face de moi, je lui en aurait peut-être bien retourné une pour lui sortir ça de la tête et lui faire regretter d'y avoir juste pensé. Mais elle n'est pas là. J'suis coincé ici. Impuissant. Et ça me rend dingue. Je presse mes lèvres l'une contre l'autre et ferme les yeux, inspirant doucement pour m'éviter de hurler. Ne pas se faire repérer, ne pas se faire repérer. — Donc balance JJ. On est plus à ça près j’crois… — T'es vraiment une putain d'emmerdeuse d'merde Eanna. Que je finis par grogner, la rage qui fait trembler doucement ma voix. Je souffle à plusieurs reprises, continue de regarder autour de moi, de plus en plus nerveux. Comme un truc insidieux qui monte et qui me fait perdre mes moyens. — P'tain j'devrais même pas être en train d'te parler. Que je souffle doucement, ça m'échappe sans que je ne puisse l'arrêter. Et je ne réalise même pas. Trop obnubilé par le fait de surveiller les alentours. Ma main libre revient gratter mon tatouage. J'essaye de me calmer. Au pire, est-ce que c'est si grave ? J'crois pas. C'est juste un tatouage. Et pis j'aime pas vraiment les noirs non plus, comme ceux du KKK. Donc au fond, c'est pas totalement incohérent. Un peu rassuré, je me décide enfin à passer aux aveux. Au pire, je fais ce que je veux de toute façon. — Écoute, p't'être bien que mes nouveaux potes... aiment les croix gammées. Je lâche ça rapidement, comme si ça n'avait pas tant d'importance finalement. Je tire sur mon col et baisse la tête pour observer mon tatouage. Je hausse les épaules. C'est plutôt joli en plus comme motif. — Et p't'être bien que j'en ai une sur la peau aussi maintenant. C'est sexy les tatouages de toute façon, non ?
« T'es vraiment une putain d'emmerdeuse d'merde Eanna. » S’il m’appelle par mon prénom complet c’est qu’il est fâché. Et c’est parfait. Parce que dans le tremblement de ses syllabes y a la capitulation qui s’pointe. JJ sait qu’il a pas d’autre option. « C’est c’qu’on dit, mais apparemment ça fait mon charme, chéri. » J’suis ravie de le mettre en difficulté. Je me rends compte qu’il y a que ça qui m’importe maintenant : aller gratter les plaies, y enfoncer le doigt. Crever la peau. Traverser les muscles. Faire éclater les os en copeaux. Le tout avec amour. « P'tain j'devrais même pas être en train d'te parler. » Je dresse l’oreille en tiquant sur la phrase. « C’est quoi ces conneries ? C’est les gardiens qui t’mettent la pression ? Pourquoi tu devrais pas, t’as les mêmes droits qu’les autres détenus JJ. » Encore une fois je sens l’embrouille. Soit il a été suffisamment con pour se mettre tous les matons à dos en un temps record, soit y a autre chose. Une chose que j’peux évidemment pas connaître parce que j’suis pas présente pour jouer les fouines. La contrariété vient me vriller les tempes, doucement mais sûrement, et j’me masse l’arête du nez en espérant que l’irlandais n’en rajoute pas plus. C’est pas mal le connaître, hein, j’sais très bien que j’suis pas au bout de mes peines. Mais y a pas de honte à essayer de croire qu’un minimum de bon sens subsiste chez lui. La bonne blague. « Écoute, p't'être bien que mes nouveaux potes... aiment les croix gammées. Et p't'être bien que j'en ai une sur la peau aussi maintenant. » Il me sort ça d’un ton complètement désinvolte. Comme si il me racontait c’qu’il avait mangé au p’tit déj’. Y a un blanc. Énorme. Il se pose entre nous et enfle jusqu’à occuper tout l’espace. Sous mon crâne aussi c’est la neige. Seule l’image de JJ y ressort nettement avec sa croix de merde ridiculement tatouée sur un de ses pectoraux. Quelque chose bascule. Lui. Ou moi, j’saurais pas dire. « T’as pas fait… » Je m’éclaircis la voix toute enrouée par le choc. « T’as pas fait ça… Tu t’es pas fait tatoué en prison par des abrutis consanguins de connards de violeurs ! » Oh putain. Je vais en parler à Daire. C’est sûr. « MAIS QU’EST-CE QUI TOURNE PAS ROND CHEZ TOI ! » La gueulante que je pousse peut bien réveiller mon frère ou tout l’immeuble j’en ai absolument rien à faire. La frustration d’être impuissante m’épingle sur place. J’ai la paume qui fourmille sous l’envie d’en coller une à JJ. J’voudrais pouvoir le secouer jusqu’à ce que ses neurones se remettent en route et qu’il réalise à quel point il a été stupide.
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Sujet: Re: jj | nana
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