Aujourd’hui c’était jeudi. Et le jeudi c’était ta soirée Penelope, le soir où tu faisais ce que tu voulais, ce qui te plaisais. Le plus souvent tu finissais au cinéma, seule dans ton siège, popcorn dégoulinant de beurre sur les genoux, à rigoler, à pleurer, à vivre un trop plein d’émotion devant ce grand écran. Et personne avec qui partager ça. Comme un vide, une place à côté de toi toujours libre, pour un ami invisible. C’est pas que t’es seule Penelope, c’est pas que t’as pas d’amis. C’est faux. T’as ta bande et d’habitude ça te suffit. Mais y a des soirs comme aujourd’hui où personne n’est là. C’est trop souvent même. Posé à Savannah, ils s’inventent une vie pendant que toi tu piétine sur place, engoncée dans cette vie sédentaire qui te donne la sensation d’étouffer. Parfois y a Tex, Tex et ses idées à la con, qui arrive à te faire oublier un instant la prison dans laquelle Tom vous a enfermé. Parce que c’est comme ça que tu le ressens Penelope, comme une putain de prison de doré. Le pire dans tout ça ? C’est votre geôlier. Junior. Car c’est pour lui que vous êtes là pas vrai ? Car c’est pour lui que vous vous enracinez dans cette terre trop meuble pour te soutenir Penelope. Putain de SDF. Tu te souviens encore de cette nuit, entre deux bières et cigarettes, Tom et toi sous les étoiles, front contre front, main dans la main. Tu ferais tout pour moi Penelope ? Oui. Jusqu’à crever, jusqu’à tuer, jusqu’à voler la Lune. Parce que Tom c’est tout ton univers, ton monde. Ton grand frère. Le seul et unique. Et quand il t’a demandé d’attirer Junior, t’y es allée les yeux fermés. Grossière erreur. Parce qu’aujourd’hui tu te sens prisonnière Penelope, en train de développer un putain de syndrome de Stockholm qui te donne envie de t’éclater la tête contre un mur pour te remettre les idées en place. Comme si t’avais besoin de ça, des palpitations dans la cage thoracique et de la frustration à chaque fois qu’il te dévisage avec ses grands yeux de poisson pané. Tu vas le bouffer ce poisson. Parce que t’es le putain de chat qui se lèche les babines devant le bocal Penelope, il est la proie et toi le chasseur. C’est comme ça. Et pas l’inverse. Ça lui apprendra à te faire mal au cœur.
Mais t’es faible Penelope. Au fond de toi y a une petite voix qui te gueule que t’as trouvé ta kryptonite, que Junior et sa bouille d’ange auront raison de toi bien trop vite, bien trop tôt. Car quand tu penses à lui, tu te demandes s’il te trouve jolie et que si tu le prenais par la main il se déciderais à t’embrasser, de te prendre dans ses bras et de te garder. C’est horrible Penelope, car tu sais que tu ne te débattrais pas. Tu fermerais les yeux et tu le laisserais faire. Rien qu’un instant. Et c’est ça le plus frustrant. Cette mièvrerie qui coule par tous les pores de ta peau quand tu te retrouves en face de lui, de son sourire un peu coincé, légèrement tremblant face au danger. Alors ouais, aujourd’hui c’est jeudi. Jeudi soir plus précisément. T’avais repéré à l’affiche les 7 mercenaires, un putain de remake mais après tout c’était toujours mieux que Twillight 16. Et pour une fois tu te dis, pourquoi pas ? Pourquoi pas briser les codes, les mythes, asseoir quelqu’un d’autre à côté de toi ? Quelqu’un qui dira pas non, qui t’esquivera pas. Tu sais que Junior il osera pas. Jamais. Il a trop peur de toi. Et égoïstement, tu te dis que tu pourrais profiter de ça, de l’effet que t’as sur lui, pour l’obliger, à t’accompagner. C’est suicidaire Penelope, c’est comme jouer avec le feu. Pourtant ce soir c’est comme ça, t’as trop envie. T’en as assez de cette solitude dans le noir, qui te pousse à braver la mort avec Halina, à faire des conneries sans nom qui t’écorchent les genoux, le ventre. La tête. A chaque instant tu repousse un peu plus tes limites, mais tu sais pas jusqu’à quand tu tiendras, combien de minutes avant la chute finale. Irréversible. La bêtise de trop.
Tu te fais belle dans ta salle de bain, mettant à exécution les leçons de Serena. Tu peins ta bouche en rouge façon peinture de guerre, la couleur te donne du courage, un peu. Deux gouttes de parfum qu’elle t’a offert, et pendant un instant tu te sens frivole. Stupide. T’avais jamais eu besoin de tous ces artifices avec Tex. T’avais jamais eu besoin de te sentir femme. Mais Junior n’était pas Tex et t’avais envie qu’il te regarde. Toi. Penelope. Et pas juste la braqueuse intrépide, à la gâchette facile.
Sur ta moto tu te sens bien. Calme. Posée. Y a que ça de vrai pour t’apaiser quand tu sais plus vraiment quoi penser. Tu laisses la vitesse te griser, le moteur gronder, l’euphorie te noyer. Pendant un instant t’oublis tout, Junior, Tex, les braqueurs et cette putain de ville à la noix. Tu penses qu’à la façon dont tu te fonds avec le vent. Aux lumières qui défilent sous tes yeux. A ton cœur qui bat à 100 à l’heure sans aucune limite. T’es à deux doigts de renoncer Penelope, d’oublier ta soirée ciné pour tout simplement te barrer, loin, très loin, avec ta moto jusqu’au bout du monde. Mais non. Non. Ça serait beaucoup trop simple ; Alors comme à regret tu ralentis, détournant ton regard de la route pour observer les trottoirs, à la recherche du gars le plus fragile de tout Savannah. Qui n’est nulle part en vue d’ailleurs. Et ça commence à t’énerver, de pas réussir à le trouver. Putain. Après vingt minute à arpenter les routes de la ville tu te dis que tu lui foutrais bien ton poing dans la tronche quand tu le trouveras. Pour lui faire payer de t’avoir fait tourner en rond comme ça. Voilà, une bonne droite dans son visage et tout ira pour le mieux. Connard de poisson. Adorable poisson. Merde. Et puis c’est là que tu le vois, sur le trottoir marchant tranquillement, les mains dans ses poches. Et ton cœur se serre instantanément. T’as l’impression d’avoir à nouveau 14 ans. Tu le dépasses sans réussir à t’arrêter et frustrée tu te mets à jurer. Heureusement que tu portes un casque Penelope, ou bien t’aurais choqué la petite mamie avec ton langage plus que fleuri. Inspire, expire. Tu peux le faire Penelope. Tu peux le faire. Au pire s’il dit non, tu sors ton flingue de ta poche et tu le pointe sur sa tempe, c’est un bon moyen d’obtenir ce que tu veux à ce qu’il parait. Alors tu fais demi-tour et cette fois ci tu pile. Brusquement. Ca crisse sous tes pneus. Et en quelques secondes t’as sauté de ta moto, relevée ta visière et tu t’es plantée devant lui. « Bah alors Junior, on oublie ses rendez-vous ? C’est pas très galant de ta part tu sais » Putain mais ta gueule Penelope, pourquoi tu dis juste pas bonjours comme un être humain normal ? Non ? Non. « Pour te faire pardonner tu m’offres le ciné. Toi, moi, les étoiles et des gangsters. Super programme pas vrai ? » Pas vraiment, d’autant plus qu’il doit pas vraiment comprendre que tu parles du Drive-In, ni de quel film tu parles en fait. Mais ton cerveau est comme déconnecté, t’as l’impression de t’appeler Tex et de débiter que des conneries. « Et si t’es sage je paye le pop-corn. » Attention Junior, seulement si t’es sage.
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Sujet: Re: Young & Reckless | Penelior Dim 25 Sep - 15:19
J'lance un dernier regard à Michael, qui dort profondément, avachit sur son lit, probablement 10g d'alcool dans chaque bras. Et ça me fait mal de le voir comme ça. Je n'sais plus quoi faire. J'échappe un soupire désemparé et je referme la porte derrière moi avant de quitter le foyer. Les mains dans les poches, le regard qui traîne sur l'bitume, j'avance d'un pas léthargique, le bruit de mes semelles qui frottent le trottoir. Je cogite. Je réfléchis. Trop, comme toujours. Mes pensées fusent, si rapides, mais aujourd'hui je n'ai pas suffisamment l'esprit clair pour tout trier dans les temps. Une partie de moi se focalise complètement sur Micha et m'empêche de me concentrer. Je cherche des solutions, encore et encore. Je me repasse en mémoire, tous les bouquins de psychologie que j'ai lu. J'organise tant bien que mal mes pensées en chapitres, et je cherche désespérément celui qui s'intitulerait : comment sortir quelqu'un d'un deuil difficile. Mais rien ne me vient, si ce n'est quelques banalités qu'on répète à tout va. Qu'il faut du temps. Qu'il faut laisser la personne extérioriser tout ça tant que c'est nécessaire. Mais c'est n'importe quoi. Pour Micha, ça devient trop risqué. Il m'faut une recette miracle, une solution magique. J'voudrais claquer des doigts et le soulager de toute sa peine. Mais non. Je reste désespérément démuni. Et j'ai l'impression de tout faire de travers. Dès que j'essaye de l'aider, il semble m'en vouloir encore plus. Et j'commence à me demander à quoi je sers. Si même moi j'peux pas l'aider à se relever, qui l'pourra ? Et j'en viens à avoir des pensées égoïstes. J'en viens à m'dire que j'aime autant qu'il ne se relève jamais, plutôt que quelqu'un d'autre que moi réussisse là où j'ai échoué. Parce que ça voudrait dire qu'on a vraiment perdu notre lien. Et ça, j'peux pas l'accepter.
Alors j'essaye de penser à autre chose, parce que ça m'épuise de ruminer cette histoire tout le temps. Et puis, quand j'pense à Micha, je finis toujours par penser à Bee. Et j'veux pas. J'veux plus. J'ai pleuré, déjà. Je refuse de finir comme Micha. Alors faut vite que je pense à autre chose. J'me met à chantonner discrètement, en récitant dans ma tête chaque note du morceau qui me vient à l'esprit. sol, si, la si. sol, la si, do, ré, fa. Et mes doigts qui s'agitent dans mes poches, qui se contracte au rythme des touches imaginaires. Et je n'vois pas la moto passer, plongé dans mes pensées musicales. Ma tête qui ondule légèrement pour marquer le tempo, j'deviens métronome humain, et le temps d'un instant, j'oublie tout le reste. La partie libre de mon cerveau se met à compter le nombre de pas que je fais, afin d'être totalement occupé, de ne pas pouvoir penser à quoi que ce soit d'autre. Et dans ma tête, c'est tout un florilège de notes et de chiffres qui s'enchaînent sans la moindre difficulté. Jusqu'à ce que le vrombissement d'un moteur de moto ne s'arrête à ma hauteur et que le crissement de pneus me fasse sursauter et me tire brusquement de mes pensées. J'marrête brutalement et j'titube un peu, le temps pour mon cerveau de se reconnecter à la réalité, et de repasser en mode manuel. J'ai à peine le temps de saisir où j'suis, que j'vois le visage de Penelope se dresser devant moi, à moitié recouvert par son casque de moto. Encore abasourdis, j'cligne des yeux et mon regard va de Pene à la moto, puis de la moto à Pene.
Qu'est-ce qu'elle fout là ?
- Bah alors Junior, on oublie ses rendez-vous ? C’est pas très galant de ta part tu sais.
Pardon ? J'écarquille les yeux, dubitatif? Rendez-vous ? Quel rendez-vous ? Avec elle ? Aujourd'hui ? Je fronce les sourcils. C'est impossible. Si j'avais eu un rendez-vous avec elle, je m'en serais souvenu. A ça oui. J'aurais pas pu oublier.
- Euhh.. on avait rendez-vous ?
Ma voix est hésitante et je la fixe avec méfiance. Elle perd la tête, voilà, c'est la seule explication. Ou alors, elle avait juste noté qu'elle avait un rendez-vous aujourd'hui, mais elle n'avait pas spécifié avec qui et elle s'est trompée. Putain. Elle avait rendez-vous avec un autre mec ? Sérieusement ? Mon cœur qui se froisse en même temps que ma mine se renfrogne. C'est qui ce mec ? Et ils avaient prévu quoi ? Et pourquoi elle devait aller le voir ? Ça fait longtemps ? J'le connais ? Est-ce que c'est un mec bien ? Est-ce qu'il est canon ? Est-ce qu'elle le préfère à moi ? Putain, putain, c'est la panique. J'ai l'impression de brasser un milliard de pensées durant une éternité, mais ça ne dure même pas une seconde. Et très vite, je réagis. Si elle croit qu'elle a rendez-vous avec moi, je ne vais certainement pas être suffisamment con pour la laisser réaliser son erreur et filer de là pour rejoindre l'autre gars, qui est très probablement un crétin. J'en suis sûr. C'est sûr. Ouais.
- Ah oui ! Que je m'exclame, feintant d'avoir une illumination. - Oh, j'suis désolé Pene... lope. Putain. - J'étais au foyer avec Micha, il.. Il va pas bien. J'baisse les yeux une seconde, parce que le fait d'évoquer ça réveille à nouveau la tristesse qui croît dans mon cœur. - Enfin, j'ai pas vu l'temps passer. Pardon.
J'me dis que j'ai peut-être joué un peu gros, là. Que si elle me demande ce que j'avais prévu, j'suis dans la merde. Que je vais devoir improviser une idée de rendez-vous en une fraction de seconde, et c'est juste impossible. Non pas que je n'sois pas capable de prévoir un plan en quelques secondes à peine. Ça, pas de souci, j'en ai largement les capacités. Non, le souci réside plutôt dans l'aspect du plan. Un rendez-vous, avec une fille... Même en trois mois je n'serais pas foutu de concocter un truc qui en vaille la peine. Et qu'est-ce qu'elle préférerait qu'on fasse ? Que je l'emmène au stand de tir ou aller voir un couché de soleil ? Oh non, putain, plus ringard tu meurs. Un verre, un café, quelque part dans un bar ? Non, trop impersonnel. Un pique-nique sur la plage ? Putain, et j'le paye avec quoi le pique-nique ? L'emmener dans une autre ville où y aurait genre un super parc d'attraction ? Ouais, ça, ça lui plairait ! Sauf que je ne sais pas s'il y en a en ce moment. Ni où. Et en fait, j'ai pas de voiture. Merde. C'est finit, voilà, elle va m'griller en deux secondes. Elle va m'rire au nez et après ça, elle voudra plus m'parler. J'suis à deux doigts de céder complètement à la panique quand elle m'sauve la mise.
- Pour te faire pardonner tu m’offres le ciné. Toi, moi, les étoiles et des gangsters. Super programme pas vrai ? Et si t’es sage je paye le pop-corn.
Est-ce que c'est réel ? Est-ce que j'suis vraiment réveillé ? Est-ce que c'est vraiment en train de s'passer ? J'entrouvre la bouche, mais aucun son ne sort. La gorge serrée par l'émotion, j'crois même sentir mes joues chauffer. Sûrement qu'elles vont pas tarder à virer au rouge, ces maudites traîtresses. Je scelle à nouveau mes lèvres et déglutis péniblement, alors que j'suis partagé entre l'envie de me mettre à bondir dans tous les sens en hurlant de joie, et l'envie de disparaître six pieds sous terre parce que je pressens déjà le fait que je vais tout faire foirer. Pas capable d'assurer. J'suis pas Tex, moi. Ni Micha. Et je frémis déjà à l'idée de ne pas savoir quoi lui dire, de laisser de longs blancs gênant s'installer entre nous. Et putain, c'est con, parce que Pene elle parle tout l'temps. Elle pourrait faire la conversation pour dix personnes en même temps. Alors, ça me rassure un peu. J'arrive à me détendre un chouïa, essayant de faire abstraction du mini-moi qui est en train de s'adonner à une danse hystérique dans ma poitrine. J'ai les mains qui tremblent, mais heureusement, elles sont sagement cachées dans mes poches. J'inspire discrètement, pour ne pas qu'elle voit que je tente désespérément d'avoir l'air normal, serein. Alors que j'suis comme un ado lors de son premier rendez-vous. Pathétique, entre d'autres termes.
- J'adorerais pouvoir m'faire pardonner comme ça, mais... Je stoppe mes tremblements et sort mes mains de mes poches tout en les tenant pour qu'elle puisse constater à quel point elles sont tristement vides. - J'crois que j'vais rien pouvoir te payer du tout.
Et j'peux pas réprimer une moue déçue. J'voudrais tellement lui payer le ciné. Et tant d'autres choses encore. J'voudrais pouvoir la couvrir de cadeaux, comme si ça allait pouvoir effacer la nullité de ma personne. Lui faire oublier que j'en vaux pas le coup. D'ailleurs, j'n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi elle s'intéresse à moi. Enfin, je crois. J'suis pas toujours sûr. Quand elle me hurle dessus, j'ai plutôt l'impression qu'elle me déteste. Mais Pene, elle hurle souvent. Et sur beaucoup d'gens. Sur des objets même. Alors j'sais plus quoi penser. Après tout, si on a rendez-vous, c'est bien que j'lui plaît, non ? Ah oui, non, sauf qu'à la base c'était un autre. Donc y a d'autres gars. En fait, je ne l'intéresse pas du tout. Pourtant, j'ai dû mal à l'imaginer en collectionneuse, en croqueuse d'hommes. Y a comme un truc qui colle pas. Putain, j'comprends plus rien. Alors, ressaisis toi Junior, bon sang !
- Mais, ouais, super programme !
C'est quoi le programme déjà ? Je n'sais déjà plus. J'suis pas certain d'avoir écouté, en fait. Je crois que j'étais trop occupé à essayer de faire taire les cris d'angoisse qui raisonnaient dans ma boîte crânienne. J'lui lance un sourire nerveux, un peu bêta, en priant pour qu'elle ne me demande pas de lui répéter le programme. Comme un professeur le fait toujours quand il choppe un élève bavard. " Mr Healy, vous qui semblez avoir autant envie d'parler, vous pouvez me répéter ce que je viens de dire ? " La vérité, c'est qu'à l'école ça ne m'inquiétais pas plus que ça ce genre de remarques. Je parvenais à écouter les cours, parler avec Micha et inventer une mélodie en même temps. J'étais même obligé de fonctionner comme ça, mon cerveau étant totalement incapable d'être monotâche, au risque de mourir d'ennui très rapidement. Mais là, quand il s'agit d'une fille, c'est pas pareil. Y a ce foutu bordel dans ma tête, les pensées qui vont de travers et tout l'reste. Et c'est à peine si j'arrive encore à respirer. Mais tout à coup, c'est autre chose qui attire mon attention. J'tourne lentement la tête vers sa moto. Non. Ah non, hein. Je serre les dents et relève les yeux vers elle, lui lançant un petit regard inquiet. J'échappe un rire nerveux, les traits tirés.
- On.. on y va à pieds, hein ?
Je n'sais pas où on va, mais moi, j'y vais à pieds, c'est clair. J'me fige face à elle et j'me mets à la dévisager avec une certaine intensité. Et j'remarque la couleur sur ses lèvres. J'crois que c'est la première fois que j'vois ça sur elle. Et c'est joli, ça fait très.. femme, je trouve. Et pourtant, j'peux pas m'empêcher de la trouver tellement parfaite quand elle a les cheveux en bataille et sa tête des mauvais jours. J'désigne brièvement sa moto d'la main gauche et je déclare, avec un mélange d'assurance et de soulagement.
- De toute façon, on peut pas y aller en moto, t'as qu'un casque. Et, c'est interdit de monter sur une moto sans casque.. et, en plus.. c'est, enfin, c'est dangereux quoi. Et ça sert à rien de prendre des risques inutiles.. j'veux dire.. ce s'rait bête.. et pas raisonnable.. et tom nous en voudrait sûrement, alors.. à pieds, c'est bien.
Oh.mon.dieu. J'suis en train de parler de risques et de légalité a une braqueuse armée jusqu'aux dents. Plus crétin, tu meurs. Elle va m'abandonner là, c'est sûr. J'ai les épaules qui s'affaissent et j'me ratatine sur moi-même, remettant rapidement mes mains dans mes poches. J'la zieute en biais, me préparant à la voir rebondir sur sa moto et s'envoler loin d'ici. Loin de moi. J'comprendrais.
Sujet: Re: Young & Reckless | Penelior Dim 2 Oct - 3:02
PENELIOR - Reckless to the day I rest my bones
Il a l’air paumé. Totalement paumé. Comme un poisson hors de l’eau avec ses grands yeux à essayer de comprendre ce qui se passe. A essayer trouver de l’oxygène. Pour respirer. En fait t’as jamais vu Junior autrement que paumé, et au fond c’est mieux comme ça parce que du coup il peut pas voir que toi tu l’es aussi. Ptêtre encore plus, bien trop stressée de devoir te trouver en face de lui, le cœur au bord des lèvres tant il bat vite. Alors tu balance des conneries, comme d’hab, ta langue s’active avant ton cerveau. Tu prends des airs, foutue poseuse, pour faire genre que tu maitrise. Alors que c’est faux. Dans ta tête l’impression que y a un con qui joue des maracas comme un teubé en hurlant aiaiaiaia la bamba. Ca aide pas vraiment à réfléchir. Mais si y a bien un truc que t’as appris durant toutes ces années à braquer des banques, c’est garder ton sang froid. Ne pas trembler. Parce que franchement, qui prend au sérieux une braqueuse qu’a la main qui tremble hein ? Hein ? Personne. Alors ouais Pene, fais semblant d’être trop classe, fais semblant de tout maitriser, parce que t’as plus de chance d’obtenir ce que tu veux comme ça. Euhh.. on avait rendez-vous ? En plein dans le mille. Yes. T’es un génie Penelope, un véritable génie. T’entends dans sa voix ce craquellement qui signifie qu’il comprend pas vraiment ce qui lui arrive. Parfait, affaiblir le spécimen pour mieux pouvoir l’attraper. C’est un peu comme dans pokemon en fait, où tu balance des objets à la gueule du pikachu pour finalement l’attraper quand il lui reste plus que quelques grammes de conscience. Bon le problème c’est que t’avais jamais été douée à Pokemon et que là tout de suite t’avais juste envie de te barrer. Parce que vous etiez proches. Trop proches. Et que bah. Ca se chamaillait dans ta poitrine, genre sévère. Une seconde, deux secondes, trois secondes, juste le temps de le détailler, de se dire que putain il a cette espèce de fragilité en lui qui te crève le cœur, qui te donne envie de lui construire une armure pour apprendre à le protéger. Oh, j'suis désolé Pene... lope Y a cette hésitation quand il dit ton nom qui te fait sourire. C’est plus fort que toi, t’arrive même pas à garder ton air fâché. Putain, autant pour la crédibilité. Mais t’aime bien le fait qu’il se souvienne que les surnoms et ti ça fait deux. Que tu préfère Penelope à Pene. Mais qu’au fond c’est toujours mieux que Tulipe. Mais ça il sait pas. Tant mieux. Les fleurs c’est nase, c’est pour les stupides. J'étais au foyer avec Micha, il.. Il va pas bien. Enfin, j'ai pas vu l'temps passer. Pardon. Et pendant un instant tu crois à la situation, t’oublis que c’est que des conneries et qu’il a pas à se justifier. Pendant un instant son visage te troue le cœur, cette expression quand il prononce le nom de son frère. « Pas grave, la famille avant tout, je connais ça. » et tu lui donne un léger coup de coude pour le faire relever la tête, pour qu’il te regard et qu’il voit que y a aucune colère sur ton visage. Y en aura jamais quand t’es avec lui. La famille c’est important, et ça tu le sais bien. Pour ça à la base que t’es là, en face de lui. Pour Tom. Putain de Tom. Alors t’enchaine, vite, pour pas y penser. « Pas besoin de t’excuser tu sais. »
Alors comme pour faire passer le moment de silence, vos deux regards gênés, la rougeur qui menace de te monter aux joues si tu continues de le fixer comme ça, t’enchaine sur des conneries. Tu parles de ciné, de pop corn, déroule le plan de ta soirée. Parce que si t’as bien compris une chose avec Junior, c’est que y a besoin que tu prennes les choses en main, sinon rien ne se passera. Rien. Et fallait qu’il se passe quelque chose. Il devait. Ou peut être que tu voulais. Putain. Tout se mélange dans ta tête Penelope, t’es trop perdue au milieu de ces conneries, de ces jeux, de ces faux semblants qui deviennent trop réels. Putain t’espères qu’il va pas s’enfuir. Pas cette fois. T’es même prête à le trainer par la peau du coup s’il décide de se défiler. Il te doit ce putain de ciné, cette putain de sortie . Il te doit bien ça pour la merde qu’il fout dans ta vie, dans ta p’tite bulle que tu t’es construite. Alors tu le vrille de ton regard, tu serres les lèvres en même temps que les poings, et ton rythme cardiaque s’accélère, badum badum badum. Tu te croirais retour en arrière quand t’avais ressenti ce besoin pour la première fois.
J'adorerais pouvoir m'faire pardonner comme ça, mais... Y a toujours un mais. Bon sang, si tu pouvais tu bannirais les mais de la langue anglaise. Ca apportait toujours des mauvaises nouvelles. Des refus. Tu sens tes lèvres s’abaisser doucement, tentant du mieux pour pas afficher une moue contrite. Déçue. Puis soudain tu le vois sortir les mains de ses poches. Vides. Terriblement vide. J'crois que j'vais rien pouvoir te payer du tout. Oh. C’était ça le problème ? L’argent ? T’avais juste dis ça pour déconner, tu comptais pas vraiment qu’il te paye le ciné. Ou peut-être que si, mais ça t’oserais jamais l’avouer. Tu laisserais tes rêves de romance stupide au vestiaire et tu prendrais les devants. Et puis mince alors, t’étais une femme moderne Pene, qu’est ce qui t’empêchait d’inviter ton mec ? De tout lui payer ? Surtout quand ce dernier s’avère être SDF et qu’il est plutôt endetté. Et que c’était pas vraiment ton mec non plus, même si l’idée t’avais déjà traversé l’esprit. Rien qu’une fois, rapidement. Alors tu te mets à rigoler, un rire trop fort, trop nerveux, mais que tu espères saura lui faire comprendre que c’est pas grave. Rien n’est grave. Jamais. Surtout avec toi. « Pas grave ça Juju, on a qu’à dire que je paye cette fois et un jour tu m’offriras un truc en retour. » Parce que s’il dit oui, ça signifiera qu’il accepte de te revoir. Encore. Après le rendez-vous. Demain, après-demain, un jour. Qu’il disparaitra pas comme tous les hommes avec qui t’a flirté, pour essayer d’oublier. « Pas obligé que ça soit un truc génial hein » que tu continues à expliquer, marmonnant entre tes dents, un peu gênée parce que tu viens de demander. Mais, ouais, super programme ! Bien sur que t’as prévu un super programme. Et puis quoi encore hein ? T’avais toujours des supers programmes, juste que généralement ça plaisait pas aux non-initiés. Pas ta faute si Tex ou Billy aimaient pas le cinéma hein ? Pas ta faute s’ils étaient d’infernaux rabats joies à toujours fuir quand tu cherchais quelqu’un pour t’accompagner, pour remplir ce siège vide à tes côtés d’une présence. T’espère Penelope, T’espère vraiment que Junior ça lui plaira. Qu’il aimera. Que comme toi il aura ces étoiles dans les yeux, ce cœur serré par l’excitation, cette impression d’être de nouveau gosse, les yeux rivés sur l’écran à ne plus penser à rien. Juste à l’histoire qui se déroule devant vous. Une histoire qu’est pas la vôtre, où tout est permis, l’amour, le sexe, la drogue, le meurtre, les larmes, la violence, la réussite, l’espoir. Putain l’espoir. Alors tu relève la tête fièrement, ça doit être drôle à voir avec ton casque mais tant pis. « Bah ouais attends, tu croyais quoi ? Avec moi on s’éclate trop tu verras. Et j’espère que t’aime les cow boys hein, parce que c’est les 7 mercenaires ce soir qui passe. » Tu parles, tu parles, tu parles, encore et encore, tu t’emballe, tu t’étale. « Bon et c’est un remake, mais parait qu’il est bien. Pas trop mauvais pour un block buster ! J’espère qu’ils ont raisons. » Parce que t’as pas envie que Junior pense que tu l’emmène voir un truc pourris.
T’attends son feu vert, le sourire victorieux sur ton visage, parce que y a plus rien qui l’empêche de te suivre. Et tu te sens fière Penelope, fière de pas avoir craqué, de pas t’être mélangées, d’être restée classe, efficace. Pas d’insultes, pas de menaces. Juste ton sourire et le sien. Sourire d’ailleurs qui devient étrangement figé quand Junior pose son regard sur ton bébé. Ta moto, c’est un de tes biens les plus précieux, tu la bichonne comme personne. Tu te sens jamais aussi libre que lorsque tu chevauche ce monstre blanc. Y a que le flingue qui vient détrôner ça. Le flingue et ptêtre les baisers. Mais tu sais pas trop encore t’as pas décidé. Le truc dans tout ça, c’est que Junior à l’air de pas vraiment adhérer à l’idée de te suivre là-dessus. Et ça c’est vraiment incompréhensible ! Parce que tu comptais plus le nombre de mec qui t’avais demandé d’essayer ta moto, qui voulait faire juste un tour et que t’avais renvoyer. Pas touche connard Baby elle était que pour elle, et les personnes privilégiées. On.. on y va à pieds, hein ? « Tu parles ! Impossible d’y aller à pieds c’est trop loin. Et puis faut bien te dépuceler un jour pas vrai ? Quelque chose me dit que t’as jamais posé tes fesses sur un bestiau pareil ! » Ah ça non, le pauvre gosse semble au bord de l’apoplexie et t’as presque pitié de lui. Mais non. Non. Pas question. S’il voulait te suivre dans la vie, il avait intérêt à savoir se déplacer en Ducati. Alors c’était le bon moment d’apprendre pas vrai ? De toute façon, on peut pas y aller en moto, t'as qu'un casque. Et, c'est interdit de monter sur une moto sans casque.. et, en plus.. c'est, enfin, c'est dangereux quoi. Et ça sert à rien de prendre des risques inutiles.. j'veux dire.. ce s'rait bête.. et pas raisonnable.. et tom nous en voudrait sûrement, alors.. à pieds, c'est bien. Et c’est plus fort que toi. T’explose d’un rire franc, d’un rire qui de traverse de la tête aux pieds, un rire qui te donne envie de sourire pendant toute la soirée. Parce qu’il te parle de risque, de dangers. Tu comprends son point de vue Penelope, mais c’est pas pour autant que t’adhère. Sans un mot tu lui tourne le dos pour retrouver ta moto. Rapidement t’ouvre le coffre caché à l’avant et t’en sors un deuxième casque. Un peu cabossé, bleu avec des étoiles. Et t’as ce pincement au cœur quand tu te retournes vers Junior, le foutu casque entre les mains. Doucement tu le lui pose sur la tête avant de vérifier que tout lui va bien puis tu relèves sa visière. « Tiens j’ai toujours un casque avec moi, chui pas si inconsciente que ça tu sais, le danger j’le connais, je sais le parer. » Du moins la plupart du temps. Et comme par reflexe tu cogne tête contre la sienne et vs deux casques résonnent. Bim. L’ondulation est légère, pas suffisante pour vous sonner. Tu le sais, t’as l’habitude, c’était ce que tu faisais avec Tex à chaque fois qu’il montait derrière toi. Putain. Pas maintenant. Vite, faut agir sinon tu vas commencer à te morfondre et ça, pas question.
« Tu sais Bubulle, je fais de la moto depuis plus de 5 ans, tous les jours, tout le temps. T’es en sécurité avec moi je te promets ! » Ouais. Tu lui laisseras rien de mal lui arriver, promis jurer, quitte à prendre les coups toi-même, parce que tu veux pas le voir abimé. Il l’est suffisamment comme ça, pas besoin d’en rajouter. Même toi t’avais compris ça Penelope. Alors t’enfourche ta moto en faisant signe à Junior de te rejoindre. « Allez vient, c’est une deux place on sera pas trop serrés. » Concentrée tu lui explique comment grimper, où se mettre, à quoi s’accrocher. « Et si tu veux tu peux te tenir à mon blouson. Ou bien serrer tes bras autour de ma taille si t’as vraiment trop peur de lâcher, c’est comme tu veux ! » Et secrètement t’espère qu’il choisira la deuxième option. « Allez vamos Junior, on va finir par louper les pubs au ciné !! »
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Sujet: Re: Young & Reckless | Penelior Jeu 3 Nov - 13:53
- Pas grave, la famille avant tout, je connais ça. Pas besoin de t’excuser tu sais.
Je relève les yeux vers elle lorsqu'elle me refile un petit coup de coude et je lui offre un petit sourire désolé, malgré tout désolé de voir qu'elle ne m'en veut pas. Et je n'en reviens toujours pas d'avoir pu oublier ça. Moi qui n'oublie jamais rien. Comment ma mémoire a-t-elle pu me faire défaut sur un truc aussi important ? Je ne pige pas. Et j'ai beau me creuser la cervelle, vraiment, non, rien ne me revient. C'est incompréhensible. J'ai l'impression qu'il me manque quelques pièces du puzzle, mais je n'ose rien dire. Rien demander. De peur de la vexer, alors que j'ai la sensation d'avoir évité le pire justement. Elle ne m'en veut pas et elle veut toujours qu'on y aille. Je n'ai certainement pas l'intention de gâcher ça. J'suis peut-être pas très doué, mais j'suis pas encore crétin à ce point. Ou pas tout le temps, en tout cas. Il m'arrive, parfois, d'avoir des éclairs de lucidité et de savoir saisir certaines opportunités.
- Merci, t'es cool.
T'es cool ? SÉRIEUSEMENT ? Si je pouvais, j'arrêterais le temps et je me facepalmerais pour cette expression digne du début des années 2000. Mon dieu. Pourquoi il faut toujours que je me ridiculise en parlant comme un arriéré. On dirait un adulte de 40 ans qui essaye d'être tendance, comme dans les séries américaines humoristiques. Ce sont toujours des moments très gênants à regarder. Et j'ai l'impression, justement, d'être très gênant à regarder à cet instant précis. Mon dieu. Je voudrais disparaître. Je fourre mes mains dans mes poches et souffle en m'insultant intérieurement. Je prie pour qu'elle ne m'en tienne pas rigueur et qu'elle ne change pas d'avis, refusant d'aller s'afficher au ciné avec un ringard comme moi. Je n'pourrais pas lui en vouloir. Et mon malaise ne fait que s'accroître alors que je passe encore pour un looser face à elle. Un pauvre SDF sans thune, pas foutu d'inviter une fille au cinéma. Bon dieu, mais pourquoi elle est encore là ? Pourquoi elle veut se faire une sortie avec moi ? Je comprends pas. Je sais qu'elle était avec Tex avant. C'est normal. Tex, il gère. Tex, il doit toutes les faire craquer. J'me sens tellement insipide à côté de lui. Tellement nul à chier. Et je ne sais pas pourquoi Penelope préfère aller au ciné avec moi plutôt qu'avec lui. A sa place, j'irais avec Tex. Sans hésiter. Mais non. Elle, éclate de rire. Elle a presque l'air rassurée et je me sens de plus en plus perdu. Je la fixe, dubitatif et je regarde un peu autour de nous, nerveux. Je ne sais pas si elle se fout de moi, ou si c'est autre chose. Alors je me tais et je la regarde, juste ça, subissant une légère appréhension.
- Pas grave ça Juju, on a qu’à dire que je paye cette fois et un jour tu m’offriras un truc en retour. OK, donc ce n'est pas grave visiblement. Je me détends un peu. - Pas obligé que ça soit un truc génial hein.
Je la dévisage et je voudrais trouver les mots pour lui dire que je lui offrirais tout ce qu'elle veut. Pour lui dire qu'elle a déjà obtenu de moi bien plus que tous les cadeaux du monde. Qu'elle est là, gravée quelque part sous ma peau, un peu partout. Que j'pense à elle tout le temps. Je voudrais trouver le courage de m'avancer vers elle, de glisser ma main derrière sa nuque, dans une tendre caresse et de lui voler un baiser. Mais je ne fais rien. Je ne dis rien. Je me contente de baisser les yeux et de virer au rouge, parce que j'ai l'impression d'avoir pensé ça tellement fort qu'elle l'a entendu. Ridicule, putain, ridicule. Vite, trouve un truc à dire. Répond lui. Reste pas planté là comme un con. Je rassemble mes esprits, relève courageusement - ou pas - la tête et affronte son regard. Et je fonds, complètement. Elle est tellement jolie avec son petit nez carré, ses sourcils foncés et sa dégaine énervée.
- Ouais, on trouve des trucs sympas dans les poubelles.
Non. Je. Mais. C'est pas ce que je voulais dire. Je me fige. Merde. Je me mets à rire nerveusement, un rire hideux. Putain, on dirait un décérébré. Aidez-moi, pitié. Dieu, quelqu'un. Je bafouille, m'embrouille, c'est pas possible. Je vais me noyer dans ma nullité.
- Je-j'déconne hein ? C'était.. pour rire. Je vais pas faire ça.
Non, Junior putain, une blague, t'es pas censée l'expliquer. Est-ce que c'était une blague ? Non. Enfin, je n'ai sincèrement jamais eu l'intention de lui offrir un truc récupéré dans une poubelle. Mais je ne sais pas pourquoi j'ai dit ça. C'est sortit, comme ça, sans que je ne puisse l'empêcher. Pourquoi je dis toujours des trucs gênants. Je soupire et me passe une main sur le visage, ne lui cachant même plus ma détresse. Je n'en peux plus, mon état de stress est à son maximum. Je relève la tête et lève les yeux au ciel, dépité, avant de lui refaire face, à la fois confus et excédé par moi-même.
- Ouais, je sais, l'humour c'est pas pour moi.
Je laisse ça à Tex, puisqu'il a tout et moi rien de toute façon. Fait chier.
- Bah ouais attends, tu croyais quoi ? Avec moi on s’éclate trop tu verras. Et j’espère que t’aime les cow boys hein, parce que c’est les 7 mercenaires ce soir qui passe. Bon et c’est un remake, mais parait qu’il est bien. Pas trop mauvais pour un block buster ! J’espère qu’ils ont raisons. Elle parle, elle parle, sans s'arrêter. C'est à se demander quand est-ce qu'elle respire. Et moi, je me laisse emporter par son flot de paroles, incapable de me lasser de l'écouter. - J'suis sûr que ce sera très bien.
Que j'dis pour la rassurer. De toute façon, je sais déjà que je ne vais rien suivre au film. Que je vais lutter pendant 2h pour ne pas la regarder. Parce que, on va pas se mentir, mais Penelope est plus intéressante que le meilleur film de la planète. Et je vais probablement passer 2h à me torturer les méninges pour savoir si je tente quelque chose ou pas. Et si oui, quoi. Tout en sachant pertinemment qu'au final : je n'aurais rien fait. Désespérant. J'aimerais avoir l'assurance de Michael et ainsi oser me jeter à l'eau. Oser tenter quelque chose. Mais non. Je suis moi. Et moi, je n'ose pas. Je subis. PUTAIN. Non, ce soir, je tente quelque chose, allez, c'est partit ! Enfin. On verra. Peut-être. Si, allez ! Si. Ce soir, c'est LE soir. Ou peut-être la prochaine fois. Oui, voilà, la prochaine fois c'est bien. Bon sang. La soirée n'a pas commencée que je me dégonfle déjà. Si elle savait, bon sang, si elle savait. J'ai envie de me foutre des baffes tiens.
Et les choses ne s'arrangent pas quand je comprends qu'on va y aller à moto. Pourquoi la vie m'envoie-t-elle toutes ces épreuves ? Tous ces trucs pour m'humilier encore plus devant Penelope. Pour me faire passer pour un gosse de 4 ans effrayé par la vie. C'est nul, franchement. J'ai l'impression d'être Calimero et que la vie est vraiment trop injuste avec moi. Mais Pene, elle, ne semble même pas s'en formaliser. Fidèle à elle-même, elle me répond avec entrain, avec passion. Et je me surprends à envier sa vie. Cette vie si intense, pleine de rebondissements et d'aventures. Elle vit ce qu'on voit dans les films. Et moi, j'suis coincé dans cette réalité dégueulasse, triste et morne. Moi, je m'ennuie à mourir. Et, d'une certaine façon, je me sens chanceux d'avoir croisé sa route. Chanceux de l'avoir, elle qui vient tout illuminer de ses sourires de petite fille. Le genre de sourire qui pourrait porter la terre à bout de bras, tellement il est puissant. Quand elle sourit, j'ai l'impression que tout va bien. Qu'il n'y a ni guerre, ni famine. Que je vais bien, que Micha va bien, que tout est exactement à sa place et que rien ne devrait changer. Et quand elle s'en va, elle emporte toute sa lumière. Et j'me retrouve tout seul, dans l'noir. Et ça non plus, j'peux pas lui dire. Je n'y arrive pas. Les mots restent bloqués dans ma gorge.
- Tu parles ! Impossible d’y aller à pieds c’est trop loin. Et puis faut bien te dépuceler un jour pas vrai ? Quelque chose me dit que t’as jamais posé tes fesses sur un bestiau pareil !
Je ne sais pas pourquoi, mais le terme dépuceler me met incroyablement mal à l'aise. Comme si je craignais qu'elle puisse penser que je le suis. Puceau. Pas de la moto. Mais du sexe. Oh mon dieu. Pourquoi je pense à ça. D'ailleurs, je sens déjà que je vais dire une connerie. Pourquoi je n'arrive pas à m'arrêter ?
- Bppff, non, j'suis pas, j'ai, enfin, la moto, non jamais. Pardon ? Quoi ? - Euhhhh... Génial, je sens que je suis en train de faire ma tête d'ahuri. C'est bon. Je viens de griller mes chances - inexistantes on est d'accord - à vie. Cette fois-ci, je ne me retiens pas et me facepalm. Vraiment. - Oh mon dieu.
Pas la peine de faire semblant que personne n'a rien vu. Elle a vu, j'ai vu, j'ai vu qu'elle avait vu, elle a vu que j'avais vu qu'elle avait vu et ainsi de suite. Bon, allez, reprend toi Junior. C'est pas le moment de partir en courant. Si. C'est absolument le moment. Mais tu ne vas pas le faire. Tu es un grand garçon. Ou un truc comme ça, je crois. Je libère mon visage et la fixe, totalement blasé.
- Ce que j'essayais de dire, au milieu de ce méli-mélo incompréhensible et pathétique, c'est que, en effet, je n'étais jamais monté sur une moto. Voilà.
Ben tu vois quand tu veux Junior, ça ressemble à quelque chose. Mais c'est trop tard du coup, le mal est fait. Et puis je ne me sauve pas la face bien longtemps, car déjà j'essaye de trouver des excuses pour fuir cette virée en moto. La-men-table. J'ai autant de courage qu'une fillette de 3 ans. Non, même une fillette de trois ans aurait plus de courage. Je suis l'homme le moins courageux du monde. Génial. J'adore ce genre de révélation, pile dans ce genre de moment. C'est par-où pour se cogner la tête jusqu'à ce que mort s'en suive ? Ah, juste là. Contre l'éclat de rire de Pene qui vient me foutre à terre. Parfait, parfait. Je souris maladroitement, mais le cœur n'y est pas. Pourquoi je suis même pas foutu de faire semblant de ne pas avoir peur ? J'veux dire, tout le monde n'est pas obligé de savoir. Je pourrais garder ça pour moi. Faire comme si de rien était. Mais non. Faut que je le montre à tout le monde. C'est moi, Junior Healy, la grosse victime, venez me martyriser svp. D'ailleurs, c'est ce que faisait les gens à l'école. Junior t'es nul, ton frère est tellement mieux. Junior, tu crains. Junior, sale pédale. Je me braque un peu face au rire de Penelope, blessé. Je lui en veux pas, tout est de ma faute. Mais c'est dur à encaisser. Elle s'éloigne, me tournant le dos une seconde et j'en profite pour me frapper le front avec le poing. ARRÊTE D'ÊTRE TOI JUNIOR, ARRÊTE. Sois Micha. Micha est cool. Micha chope des filles. Micha ose tout. Allez. Sois Micha, sois Micha. Elle revient vers moi avec le casque bleuté et me le pose sur la tête. Je me laisse faire sans broncher, feintant de ne pas être perturbé par cette proximité naissante. Je ne suis pas perturbé. Je. ne. suis. pas. perturbé.
Je suis perturbé. Je ne suis pas Michael du tout. Sans blague.
- Tiens j’ai toujours un casque avec moi, chui pas si inconsciente que ça tu sais, le danger j’le connais, je sais le parer.
Évidemment. Ça aurait été trop sympa de faire en sorte qu'elle n'ait pas de second casque et que du coup, on ne puisse pas y aller en moto. Je ne répond rien, me contentant de lui servir un sourire crispé et pas excessivement sincère. Je n'ai pas DU TOUT envie de grimper sur cet engin. Mais je n'ai pas le choix. Elle ne me laisse pas le choix.
- Tu sais Bubulle, je fais de la moto depuis plus de 5 ans, tous les jours, tout le temps. T’es en sécurité avec moi je te promets !
Oh. mon. dieu. Non. J'avais presque oublié ça : Bubulle. Qui sort avec un mec qu'on surnomme Bubulle ? PERSONNE. Ben oui. J'ai l'impression d'être sa meilleure amie. Oui. Sa. Ça me déprime. Je suis déprimé. Tellement que je trouve rien à répondre à ça. J'ai pas le cœur d'ouvrir la bouche. Je suis juste totalement dépité. Faut que j'arrête de rêver. La question de savoir si je vais oser tenter quelque chose ce soir ne se pose même plus. Je sais déjà que je me ferais remballer. J'écoute d'une oreille distraite la suite de ses paroles et grimpa sur la moto, non sans une certaine maladresse. Une fois installé, je regarde mes mains, puis le dos de Penelope. Et maintenant, je fais quoi ? J'attrape son blouson ? La moto ? Où je l'entoure de mes bras ? Non, la dernière option n'est pas envisageable. J'ai déjà suffisamment l'impression d'être son enfant qu'elle amènerait à l'école en étant installé ainsi derrière elle. Alors je ne vais pas en plus m'agripper à elle comme si ma vie en dépendait. Il me reste un peu de fierté. Je crois. Peut-être pas, en fait. Je place mes mains de part et d'autre, m'accrochant à ce que je trouve, le cœur dans la gorge, l'estomac dans les talons. Je vais mourir. Je vais mourir.
Elle met le contact et la moto s'élance. Je ferme les yeux et je me mets à réciter une prière en silence. La moto détale dans toute la ville et, bien vite, je me surprends à rouvrir les yeux. Et mieux encore, à apprécier. J'ai cette sensation de légèreté qui m'assaille. Mes peurs s'envolent, balayées par le vent qui s'écrase sur nos casques. Et je me détends pleinement, profitant de cette balade. Les sensations sont nouvelles, inattendues et je comprends mieux pourquoi elle aime tant ça. Même si je ne sais pas comment un si petit gabarit comme elle peut "porter" une moto de cette taille. Enfin, si, je le sais, c'est physique. D'ailleurs, je ne peux pas m'empêcher de visualiser quelques schémas et calculs afin de finir de répondre à ma propre question. Ça va, ça va, je SAIS. Je secoue la tête, c'est pas le moment de jouer les intellos Einstein. Tiens, est-ce que Einstein arrivait à pécho facilement lui ou pas ? Pécho. Mon dieu, t'es tellement vulgaire Junior. Pardon.
La moto s'arrête et je ne peux m'empêcher d'être un brin déçu. On arrive au guichet et Penelope nous prend deux places, avant de conduire la moto jusqu'à ce qui sera notre emplacement pour la séance. Là, elle coupe le contact et je descends le premier. Je retire mon casque et je sens aussitôt sur moi son regard inquisiteur. Je lève les yeux au ciel, lui offrant un sourire à la fois amusé et convaincu. Je souffle, pose mes prunelles dans les siennes et passe ma main droite dans mes boucles pour leur redonner un peu de consistance.
- OK. J'avoue. C'était.. Ne dis pas cool, crétin. ... Vraiment génial ! J'échappe un petit rire, les yeux pétillants et un sourire qui refuse de s'en aller graver sur le faciès. - J'suis convaincu.
Que j'avoue enfin. Je range le casque là où elle l'avait pris puis je m'avance vers elle.
- Donne moi les sous, je vais aller nous chercher de quoi grignoter.
Une fois les billets en poche, je fonce vers le stand de nourriture et nous prend un gros pot de pop-corn et une boisson chacun, avant de revenir à la hâte, alors que les pubs sont déjà lancées. Pris d'un élan de courage inattendu, ma main accroche la sienne au passage et je l'entraîne à ma suite.
- Vite, vite, je voudrais pas que tu rates les pubs !
Que je lui murmure, moqueur. Et d'un coup, je sens une chaleur diffuse glisser le long de mon bras et venir envelopper avec douceur mon palpitant. La main de Penelope dans la mienne me fait rougir et mon rythme cardiaque augmente sensiblement. Reprend-toi, tout de suite. Stop. Pas de connerie. Je gère pas trop mal, ne faisait pas la bêtise horriblement stupide de retirer ma main de la sienne par exemple, pris d'un élan de conscience sur ce que j'ai fait. Tout va bien. Je ne la relâche qu'une fois sur l'herbe et je fais mine de ne rien avoir remarqué. Elle nous installe une couverture et je m'assois en second, à une distance raisonnable. Ni trop près, ni trop loin. Peut-être que j'aurais dû me rapprocher ? Non. Junior, arrête. Elle s'en fout. Tu es Bubulle. Bubulle le trouillard. Imprime toi ça en gros et en gras : tu n'as aucune chance. Et cette idée vient m'entailler le myocarde. Je baisse les yeux, panique. Et comme toujours quand je panique, je dis des choses totalement inintéressantes dont tout le monde se fout.
- Tu savais que la première publicité télévisée date du 1er Juillet 1941, qu'elle est américaine et que c'était pour la montre Bulova ?
Alors, déjà, on s'en fout. Et ensuite, elle va croire que je ramène ma science pour me faire mousser. Rattrape le truc. Vite. Vite.
- Bulova. Je ris. - C'est d'la merde comme nom.
Ah oui non. En fait, j'aurais mieux fait de fermer ma gueule.
Sujet: Re: Young & Reckless | Penelior Dim 13 Nov - 20:57
T’aimes bien qu’on dise que t’es cool, tu te sens importante, d’autant plus quand c’est Junior qui le dit. T’aimes bien le fait qu’il te trouve cool. Ca te ferait presque rougir. Respire Penelope, calme toi, fais pas l’idiote, souris pas comme ça, il va cramer tout de suite que t’es qu’une gamine avec lui et il te trouvera plus du tout cool dans quelques secondes. Tu prends un instant pour te ressaisir, lui adressant un p’tit signe de la tête l’air de rien, comme si tout était tout à fait normal. De son côté Junior s’emmêle, Junior s’empêtre, il se prend les pieds dans le mensonge que t’as tissé parce que t’es même pas foutu de l’inviter proprement au cinéma. Non. Tu passes par des chemins détournés et tu le vois se décomposer, devenir tout chose parce qu’il a pas les sous pour t’offrir un place de cinéma. Franchement, t’aimerais lui dire que tu t’en fous, toi l’argent t’en as un paquet, si tu pouvais tu lui en filerais mais tu sais que Tom te taperait sur les doigts, et même pas sur au final que Junior accepte que tu lui fasses la charité. Alors pas grave, tu fais comme tu peux, tu l’emmène faire des folies pour mettre un peu de sourire sur son visage paumé, pour lui montrer ton côté de la vie. Tu lui dis qu’un jour il te remboursera, il t’offrira des cadeaux lui aussi, même si tu t’en fous royalement, ton cadeau c’est d’être avec lui. Mais ça tu le diras pas. Parce que tu le comprends même pas. Et puis y a cette autre part de toi qui se demande ce qu’il t’offrirait comme cadeau s’il pouvait, et tu sais même pas ce qui te ferais plaisir. Ptêtre un sourire, un rire, quelque chose qui cristallise dans l’air et qu’elle pourrait garder, dans son coffre à secrets. En face de toi Junior baisse les yeux et prend cette teinte que tu trouves si charmante. Tu te sens totalement niaise en face de lui et ça été bute, parce que ton cœur devient guimauve et tu serais bien incapable de mettre au sol qui que ce soit dans cet état-là. Puis il relève la tête et vos regards se croisent. C’est comme un choc dans la poitrine, une déflagration silencieuse qui te coupe le souffle. T’essaye de rester stoïque, de prendre racine sur des deux pieds, de pas te laisser emporter. Ouais, on trouve des trucs sympas dans les poubelles. Pardon ? C’est tellement sorti de nulle part que soudain, tu te mets à exploser de rire. Un rire franc, un rire honnête, un rire qui balaye tout le malaise que tu ressentais y a quelques instants. Il a vraiment le chic de te surprendre à chaque fois qu’il ouvre la bouche. En echo avec ton rire s’élève le sien, plus faible, moins franc, plus bancale. Tu sens qu’il est mal à l’aise, qu’il a l’impression d’avoir dit une connerie ou un truc comme ça. Peut être même qu’il pense que ton rire c’est une moquerie, que tu le méprises. Merde. Tout de suite tu t’arrête et tu t’apprête à t’excuser quand il reprend. Je-j'déconne hein ? C'était.. pour rire. Je vais pas faire ça. et devant toi tu assiste à la résignation en live de Junior, l’air penaud et paniqué sur son visage, la main dans ses cheveux que t’as soudain envie d’ébouriffer. Contrôle toi Penelope. Contrôle toi. Ouais, je sais, l'humour c'est pas pour moi. « Au contraire, j’ai rigolé. T’as vu ? Tu m’as fais rire. Jpense que tu peux encore travailler deux trois trucs mais qui sait, t’as ptêtre une carrière qui t’attend ? » que t’enchaines pour détendre l’atmosphère, pour lui faire comprendre que avec toi y a pas besoin de tout ça, que toi ça fait 16 ans que tu ris aux blagues stupides et mêmes pas drôles de Tex alors bon, t’as pas vraiment une barre très haute niveau humour. Tu frôle son bras avec tes doigts, hésitante, avant de ranger ta main dans ta poche pour enchainer, parce que sinon tu risques de craquer. « Et puis c’est pas si con comme idée, tu sais le nombre de trucs cools que j’ai fait quand j’étais gamine, en fouillant dans les poubelles. Alors tu me choques pas tu vois. » Ouais. Penelope t’es pas ce genre de nana à qui on offre un diamant, t’as pas besoin du superflus, t’as besoin des sentiments, de ce qu’il y a au fond du cœur des gens, tu préfères ça, mais on te l’offre rarement.
T’enchaines, tu parles encore et encore, comme pour le convaincre que trainer avec toi ce soir c’est la meilleure idée du monde, qu’il devrait rester avec toi, qu’il devrait pas te lacher de la soirée. Tu lui parles du film en boucle, tu t’emportes les mots t’échappent plus vite que ton cerveau ne voudrait les laisser. Il doit te trouver folle. Et stupide. Surtout stupide. De parler autant. Tom te le dis parfois, que tu parles trop, que tu devrais réfléchir un peu avant de cracher ce que t’as sur le cœur. Mais t’y arrive pas ; T’y arrive jamais. Tu préfères te taire, ou bien tout avouer, le plus souvent de façon déguisée. Parce que dans ta bouche un je t’aime devient un ta gueule et comme ça y a que ceux qui ont ton code qui peuvent comprendre la vérité. J'suis sûr que ce sera très bien. De quoi ? Ah ? Le film. Le foutu film que vous allez voir. T’espère qu’il sera bien, qu’à la fin Junior sera content et que la prochaine fois ptêtre que ça sera lui qui te proposera. T’as bien le droit d’espérer pas vrai ? Tu lui adresse un petit sourire sans répondre, pensive.
Le visage de Junior quand il fixe ta moto devrait valoir tout l’or du monde. Tu l’immortaliserais bien pour le lui ressortir tout le temps, comme la gamine que t’es, mais tu le fais pas. A la place tu rigole, t’essaye de lui faire comprendre que y a aucun moyen pour que vous y alliez à pieds. Et puis t’as envie de partager ça avec lui, cette sensation que t’as quand tu chevauches la bête, l’impression d’être la reine du monde. D’être libre. Putain de libre. Plus aucune attache, plus rien, tu fais corps avec ton bolide et ton être vibre en cadence. C’est jouissif, encore mieux que s’envoyer en l’air, un peu dessous du sentiment que t’as quand tu dégaines par contre. Mais ça, tu te dis que Junior n’est pas prêt. Pas encore. T’as pas envie de lui faire définitivement peur en te ramenant avec un flingue à votre rendez vous. Non. Plus tard. Un jour tu l’emmèneras avec toi, dans la zone abandonnée que t’as déserté, zone où tu vas te défouler et que tu plombe tout ce qui bouge. Un jour mais pas maintenant, pas tout de suite. Junior c’est un penseur, pas un physique, pas comme toi, faut l’emmener doucement vers les choses pour pas le faire flipper, pour pas qu’il décide de se casser. Alors pour détendre l’atmosphère tu plaisante, tu fais la nana un peu lourde et sans finesse comme tu sais bien le faire. Bppff, non, j'suis pas, j'ai, enfin, la moto, non jamais. Tu relèves la tête intriguée parce qu’il essaye de te dire, bafouillant comme un enfant parce que tu viens de prononcer le mot dépuceler. Merde t’as vraiment prononcé ce mot ? Le rouge te monte aux joues quand tout d’un coup tu comprends ce que Junior essaye de dire, et t’hésite entre rigoler ou tout simplement phaser. Euhhhh... Tu sais plus quoi dire Penelope, et si jamais tu prenais la parole tu finirais par dire des conneries comme lui, à s’enfoncer. Tu sais pas jouer les indifférentes quand les conversations prennent ce genre de tournure, tu finis juste par des bulles dans ta boisson et à lever la tête pour prier que le temps passe plus vite et être moins gênée. Tu te souviens encore de LA conversation que t’avais eu avec Tom. Le moment le plus gênant de ta vie. Et maintenant tu savais que Junior n’était pas. Non. En même temps. Normal ? Non ? Oui. Bref. Oh mon dieu. Exactement. Oh mon dieu. Et t’as un petit rire nerveux qui s’échappe de tes lèvres, te laissant ainsi le temps de reprendre peu à peu tes esprits, d’essayer de perdre le rouge qui te colle aux joues. Heureusement quand il relève la tête pour te regarder t’as déjà repris contenance. Manquerait plus qu’il te voit comme ça : faible, stupide, gamine. Pas une femme, une vraie, le genre qui pourrait le séduire. Ce que j'essayais de dire, au milieu de ce méli-mélo incompréhensible et pathétique, c'est que, en effet, je n'étais jamais monté sur une moto. Voilà. Et sa réponse te fait rire encore une fois. Il est tellement adorable comme ça, le fait que tu le considère comme ça te donne envie de te taper la tête contre le mur pour arrêter de niaiser. « T’inquiète Junior, moi j’aime bien ton méli-mélo, ça serait pas toi sinon. Et pour la moto, faut bien une première fois à tout. Promis ça se passera bien. » Hop. Parfait Penelope. Parfait. Fait genre que tout vas bien, soit naturelle, totalement naturelle. Sauf que tu finis par exploser de rire en te rendant soudain compte du double sens de la fin de ta phrase. Qu’on t’achèves, maintenant, ça sera mieux pour l’humanité.
Malgré tes paroles rassurantes, malgré le casque, Junior regarde toujours la bécane comme si elle allait le bouffer. Alors tu continues de parler en enfilant ton casque à toi, laissant la visière relevée pour continuer à l’entendre parler si jamais. Ni une ni deux t’enfourche la moto tout en continuant de parler, lui expliquant qu’il n’y a aucun risque avec toi. Et c’est vrai. T’es peut être inconsciente dans la vie, quand tu conduis ta moto, c’est une toute autre histoire et depuis que tu as commencé à en faire, t’as jamais eu un seul accident. Peut être que Junior devrait le savoir ? Non. Pas la peine, il semble convaincu. Ou presque. Et montre derrière toi. T’as envie de lui dire de s’accrocher à toi, qu’il enserre ta taille de ses bras et qu’il se colle à toi. T’as envie qu’il brise la distance entre vos deux corps, comme une communion, pendant le trajet. Mais Junior ne le fait pas. Peut être qu’il est trop fier pour ça. Ou tout simplement qu’il n’a pas envie de toi. La deuxième option te semble plus probable et s’infiltre dans ton cœur. Alors pour faire taire cette idée, tu lance la moto et tu file dans la nuit. Derrière toi Junior ne semble pas mourir, alors tant mieux, t’en profite pour accélérer un peu, faire quelques virages, jouer de ce nouveau poids à l’arrière. Et soudain y a plus que toi. Plus que toi et la nuit, toi et la vie, toi et ta moto. Tu pense plus à Junior qui est derrière, tu penses plus à Tom, à Tex ou à Billy. Tu penses plus à toutes ces merdes qui te tracassent. Tu te laisses porter, le vent sifflant autour de toi. T’es en apnée Penelope, comme si respirer briserait ce moment parfait et t’accepte finalement de l’air dans tes poumons qu’une fois à l’arrivée. Le trajet a été trop rapide. Au niveau du guichet tu te faufile entre les voitures et tu fais signe au vendeur. Il commence à te connaitre par cœur, vu le nombre de soirs où tu viens hanter ce ciné toute seule. Aujourd’hui t’es accompagnée, ça le fait sourire, toi aussi, t’oublie vite ta déception de la fin de ta course. Les places en poches tu relance la bécane avant de trouver un endroit où te garer, pressée de descendre, de voir l’état dans lequel se trouve Junior, voir si comme toi il a été transporté. T’es nerveuse Penelope, tes doigts tremblent un peu quand tu défais la lanière de ton casque et que tu secoues la tête pour libérer tes cheveux. Puis ton regard se pose sur lui, son visage qui se dévoile à son tour. Il a cette expression sur le visage qui te fait louper un battement encore une fois, et un sourire victorieux vient s’imprimer sur ton visage quand tu le vois réagir. OK. J'avoue. C'était.. Cool ? Vraiment génial ! Génial ça marche aussi. Tu te mets à sautiller sur place, heureuse comme pas possible, avec l’impression que ton cœur va exploser. Tu sais pas pourquoi c’est aussi important, que Junior approuve. Mais c’est important. Et il approuve. T’es heureuse. Tellement heureuse. J'suis convaincu. « Bien sur que t’es convaincu idiot ! Bien sur !! On recommence quand tu veux !!» T’enchaine un petit tour victorieux avant de rigoler en chœur avec lui. Tu le regarde te tourner le dos pour aller ranger le casque et soudain le sourire meurt sur tes lèvres. Tu te sens nostalgique. Enfin. En quelque sorte. Des échos de sentiments qui te reviennent, des sensations que tu pensais oubliées, qui n’appartiennent qu’à Tex. Mais quand Junior marche vers toi, avec cet air de gamin à qui on a offert de la neige à Noël, tu sens ton armure se fissurer Penelope. Et tu te rends compte que tu t’es faite prendre à ton propre piège. Même si tu l’avoueras jamais. Stupide cœur, idiot de cœur, incapable de marcher comme tu l’aimerait. Donne moi les sous, je vais aller nous chercher de quoi grignoter. Sans un mot tu sors de ta poche deux billets de dix dollars et tu le regarde s’éloigner une nouvelle fois. Tu te demandes si c’est ce qu’on ressent normalement comme notre copain va acheter de quoi manger, gentleman et bonnes manières, et tu te prends à imaginer que l’argent c’est pas toi qui le lui a donné. C’est Junior qui te sors de tes pensées, les bras chargés de pop corn et de quoi boire, il t’attrape ensuite la main sans prévenir pour te tirer derrière lui. Il te prend la main. Vos mains se touchent. Vos doigts s’entremêlent. Et soudain t’as l’impression que tout autour de toi s’est arrêté. Tu te laisses faire sans rien dire regardant bêtement la main de Junior dans la tienne. Vite, vite, je voudrais pas que tu rates les pubs ! qu’il te murmure. Stupide Penelope, reprend tes esprits, te laisse pas avoir par sa gueule d’ange aussi facilement. C’est n’importe quoi tout ça ! Vraiment n’importe quoi ! « Les pubs. Oui. Les pubs. La plus grande invention du cinéma. » Que tu marmonne tout bas pour reprendre contenance, les yeux toujours rivés sur vos mains collées, sourire léger qui s’installe sur tes lèvres. Finalement l’instant se brise quand vous vous asseyez sur l’herbe. Il relâche ta main et y a comme un vide au creux de ta paume. T’aimerais faire ta gamine capricieuse, attraper de nouveau ses doigts et ne plus les lâcher. Mais non. Tu inspires doucement, pose le pop corn et ta bouteille devant toi avant de sortir une couverture de ton sac pour que vous puissiez vous installer confortablement dessus. Les ciné en pleine air, ça te connais, t’as toutes tes habitudes, tes places attribuées, tes petits rituels. Ca te fait drôle d’avoir quelqu’un avec toi aujourd’hui, c’est différent, ça rend l’évènement encore plus important. Les yeux rivés sur l’écran, tu t’efforce de regarder les pubs, mais le son ne passe pas. Rien. Tu comprends rien. T’as juste conscience de la présence de Junior à quelques centimètres de toi et c’est tout. Tout le reste est flou, silencieux. Y a plus que vous deux. Tu savais que la première publicité télévisée date du 1er Juillet 1941, qu'elle est américaine et que c'était pour la montre Bulova ? La bouteille à tes lèvres tu manques de recracher le liquide tant t’es surprise par ce qu’il vient de te raconter. Vraiment ? T’avale avec difficulté avant de te tourner vers lui, plantant ton regard dans le sien, intriguée par ce qu’il te raconte. Parce que non, tu le sais pas Penelope. La vérité c’est que tu sais pas grand-chose. L’école tu l’as quitté quand t’avais 13 ans et ça se ressent encore aujourd’hui. Pour toi l’Inde se confond facilement avec la Chine et quand il faut multiplier 3 par 15 t’as du mal si t’as pas tes doigts. Alors non tu sais pas toutes ces histoires de pub, de montres. Tu te sens stupide tout d’un coup, à côté de lui. Bulova. - C'est d'la merde comme nom. Son rire te libère un peu, tu te joins à lui, un peu hésitante. « Ouais. Totalement nul. T’imagine tu t’appelles Monsieur Bulova ? Le pauvre. » Ton rire s’affermit, tu te détend et instinctivement tu te rapproche un peu de Junior pour juste avoir à chuchote pour lui parler. Vos épaules se touches et t’as l’impression que cette partie de ton corps est en fusion. « Mais en même temps, moi j’aimerais bien m’appeler Bulova si ma montre c’est la première pub de l’histoire. C’est assez impressionnant. » Tu te penches à son oreille pour discuter, pour éviter d’embêter vos voisins, qu’on vous regarde mal à cause du fou rire de tout à l’heure. Exit les pubs t’as trouvé quelque chose de bien plus intéressant pour attendre le film. « Tu peux me raconter autre chose Junior ? Quelque chose d’incroyable. Ou tout simplement incroyablement stupide. Une histoire comme ta montre la. Dis moi. » Parce qu’elle a envie de savoir, elle a envie que tu continues de parler pour raconter des faits qui se sont réellement déroulés. Parce quand il parle il se rend pas compte mais il te fait voyager. Il devient un peu plus sur de lui, moins hésitant, moins tremblant. Encore plus touchant. « Je connais pas tout ça moi Junior. Chui pas quelqu’un d’intelligent. Alors raconte-moi quelque chose et j’irais frimer ce soir quand je rentrerais. » Tu le regarde droit dans les yeux, sérieuse comme jamais, c’est pas une blague. Parfois tu te dis que t’aurais bien aimé continuer à apprendre, si l’école ne ressemblait pas autant à une cage pour toi. Mais ce qui est fait est fait et depuis, tu fais comme tu peux pour te débrouiller. Pour grappiller des informations. Et si c’est Junior qui t’en donne, ça sera encore plus intéressant. Et en attendant que le jeune homme se mette à parler, elle attrape du bout des doigts le pop corn de Junior et commence à piocher dedans, le narguant du regard. Parce que c’est bien connu que le pop corn du voisin d’à côté est toujours plus savoureux que le sien.
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Sujet: Re: Young & Reckless | Penelior Mar 6 Déc - 11:29
- T’inquiète Junior, moi j’aime bien ton méli-mélo, ça serait pas toi sinon. Ah bon ? Vraiment ? Je souris, timidement, touché. Et pour la moto, faut bien une première fois à tout. Promis ça se passera bien.
Je n'en suis pas convaincu. Faut dire que, malheureusement, je connais les statistiques des accidents de motos et du taux de mortalité qui va avec. Et ça ne me rassure franchement pas. Mais je ne peux pas me résoudre à lui dire non. Déjà, parce que je n'ai vraiment pas envie de passer pour un énorme lâche devant elle. J'ai déjà suffisamment l'impression à chaque fois que je la vois que c'est elle qui a une paire de couilles et pas moi, autant éviter de m'enfoncer encore plus. Et ensuite, parce que j'ai envie de ce ciné avec elle. J'ai envie de découvrir un truc qui lui plaît, qui la passionne. J'ai envie de passer du temps avec elle, tout simplement. Alors, je me fais violence et je grimpe sur cette foutue moto en priant pour qu'on ne meure pas, parce que c'est tout ce que je peux faire désormais. Et mes prières ont été entendues, puisqu'on arrive vivants sur place. Et j'ai même le sourire aux lèvres. Je ne pensais pas que ça pourrait me plaire, que ça pouvait être aussi agréable, aussi grisant. Mais je comprends désormais, pourquoi Penelope a définitivement adopté la moto. Je comprends mais pour autant, je n'en ferais jamais de même. Les risques sont trop élevés, j'en ai beaucoup trop conscience et clairement je serais paniqué à chaque fois que je prendrais le volant. Je retire mon casque et ne tarde pas à lui faire part de mon enthousiasme, j'en rajoute même un petit peu, juste pour lui faire plaisir, parce qu'elle avait l'air de vraiment y tenir.
- Bien sur que t’es convaincu idiot ! Bien sur !! On recommence quand tu veux !! Je le regarde tournoyer et je ris doucement, attendris. - Hé bien tout à l'heure, pour me ramener à mon squat !
Mais après ces deux tours de moto, je ne suis pas certain de me laisser séduire à nouveau dans le futur. C'est très sympa, tout ça, tout ça, mais le danger est toujours là. Et je ne vois pas l'intérêt de provoquer la chance tous les jours en grimpant sur cet engin de la mort. D'ailleurs, ça ne me rassure pas que Penelope en use et en abuse allégrement. Surtout que je suis convaincu qu'elle n'est pas aussi prudente qu'elle le prétend. Au vu de son caractère de feu, je l'imagine plutôt se laisser emporter, griller les limitations de vitesses et prendre des risques inutiles. Mais je cesse rapidement d'y penser, un peu emporté par l'euphorie du moment. Je me sens étrangement bien, à ma place et ça me permet d'obtenir une certaine assurance. Je me sens moins pataud, moins stupide, sans savoir d'où ça provient. Mais je prends avec plaisir, si pour une fois je peux avoir l'air d'autre chose qu'un crétin attardé et bégayant, je ne vais certainement pas dire non ! Je lui emprunte des sous et je m'éclipse pour aller nous chercher de quoi nous occuper pendant tout le film. Quand je reviens, ma confiance semble s'être décuplée puisque j'attrape sans hésiter la main de Penelope pour l'entraîner derrière moi et qu'après ça, je ne panique même pas vraiment. Juste un peu. Suffisamment peu pour que ça ne se voit pas. J'suis fier de moi. Penelope elle, par contre, semble un peu perdue. Je l'entends qui marmonne dans mon dos, sans vraiment réussir à distinguer tous les mots, j'imagine que ça ne doit pas être important puisqu'elle ne revient pas dessus lorsqu'on s'installe.
Ça me fait bizarre d'être là, avec elle. Est-ce que c'est vraiment un rencard ? Genre un vrai ? Qui sous-entendrait que je lui plais, au moins un peu ? Ou est-ce que c'est juste une sortie entre "potes" ? Je sais bien que toute la bande essaye d'être sympa avec moi, j'suis pas complètement stupide. Sauf Billy, mais je n'ai pas envie de parler de lui, il est beaucoup trop flippant. Mais du coup, je ne sais pas comment me comporter, ni comment interpréter chacun de ses gestes, de ses regards, de ses sourires. J'me sens pris d'un certain malaise dû à l'ambigüité de la situation qui n'est pas clairement définie. Le stresse monte, je perds mes moyens et me voilà qui déblatère ma science infuse à la con, persuadé que ça ne l'intéressera pas. Pire même, que je vais la saouler. Qu'elle va vouloir écourter la soirée. La pauvre. Les rencards avec Tex devaient être mille fois plus drôles. J'aimerais vraiment pouvoir avoir son aisance et son humour. Mais non. Je suis coincé dans ce corps de mioche qui sait trop de choses dont tout le monde se fout complètement. Génial. J'essaye de rattraper le truc en me moquant de ma propre information, parce que je sens qu'un malaise vient de se créer. Je la sens un peu crispée à côté de moi, ça émane de partout et je m'en veux. Elle se joint doucement à mon rire, elle hésite. Et je me dis qu'elle se force à rire pour ne pas me laisser tout seul, mais qu'au fond, elle ne trouve pas ça drôle. C'est vrai que c'est pas drôle, putain. J'ai envie de me taper la tête contre un mur. De me transformer en fourmis et disparaître dans l'herbe. Ma vie craint. Je crains. Tout ce que je dis craint. Junior, ferme ta gueule, définitivement, s'il te plait. Merci.
- Ouais. Totalement nul. T’imagine tu t’appelles Monsieur Bulova ? Le pauvre.
Elle rit avec plus de contenance, à tel point que des regards désapprobateurs se tournent vers nous. Personne ne nous fait de remarques, parce qu'il ne s'agit que des pubs pour l'instant, mais je sens l'inquiétude des gens pour la suite. Comme s'ils craignaient que l'on soit des éléments perturbateurs pendant tout le film. Enfin, je n'ai pas trop le temps de m'attarder sur ce genre de pensées, parce que déjà, je vois Penelope qui se rapproche de moi. MAYDE. MAYDE. Je déglutis, fixe l'écran et devient étrangement silencieux. Elle se rapproche tellement que nos épaules finissent par rentrer en contact. Je fais quoi putain ? Je fais quoi ? Elle tente une approche ? Ou c'est parfaitement anodin ? Je n'en sais rien, mon cerveau à foutu le camp, m'abandonnant toujours dans les moments où j'ai le plus besoin de lui. Y a plus que mon palpitant qui s'emballe, mon pouls atteignant des sommets comme si je venais de me taper un sprint. Je rougis mais heureusement, ça ne se voit pas trop alors que la pénombre tombe déjà. Je me concentre sur mon souffle et j'appuie sur mes mains de toutes mes forces pour m'empêcher de trembler bêtement. Je suis en train de perdre toute la confiance que j'avais acquise au fil des dernières minutes. Putain, j'en ai marre.
- Mais en même temps, moi j’aimerais bien m’appeler Bulova si ma montre c’est la première pub de l’histoire. C’est assez impressionnant.
Je voudrais lui répondre. Vraiment. J'aimerais. Mais j'en suis incapable. Elle s'est penchée à mon oreille et je sens ses lèvres qui frôlent ma peau. Je sens son souffle qui s'éparpille un peu partout, sur mon oreille, ma nuque et ma joue. Et j'ai juste l'impression que je vais crever. Je serre les dents et je fixe toujours l'écran, mon regard se teintant d'un désespoir évident. Désespoir de ma propre personne. Je suis affligeant, je sais. J'en ai conscience et c'est encore pire. Parce qu'en le sachant, je pourrais réagir. Faire quelque chose pour changer ça. Mais même pas. J'suis prisonnier de ma timidité, j'ai pas la clé pour m'en sortir.
- Tu peux me raconter autre chose Junior ? Quelque chose d’incroyable. Ou tout simplement incroyablement stupide. Une histoire comme ta montre la. Dis moi.
Quoi ? Je fronce les sourcils et tourne la tête vers elle. OH. MON. DIEU. Mauvaise idée. Elle est toujours toute proche et nos nez se frôlent. Je panique et esquisse un mouvement de recule, histoire de retrouver une distance correct pour ma propre survie. Et puis, je réalise qu'elle va peut-être se sentir insultée. Sauf si elle s'en fout et que je me fais des films. Merde. Je fais quoi du coup ? Je m'excuse ? Je continue comme si de rien était ? Je l'embrasse ? NON, fais pas ça. Je ne fais pas ça. Je déglutis, bredouille, tentant de chercher une information à lui dispenser mais ma tête est incroyablement vide, me lâchant au pire moment. Je fais quoi maintenant ? Y a mon coeur qui tape au hasard sur une batterie dans ma cage thoracique, c'est bruyant, désordonné et ça me vrille les tympans. Caisse claire, cymbale, ça s'enchaine, ça fait un boucan pas possible. Et je ne dis toujours rien, lui offrant un spectacle pathétique. Au. secours.
- Je connais pas tout ça moi Junior. Chui pas quelqu’un d’intelligent. Alors raconte-moi quelque chose et j’irais frimer ce soir quand je rentrerais.
Et subitement, j'arrête de paniquer. Mon cœur cesse son tintamarre et mon cerveau reprend sa place. Je me redresse, mon hésitation à foutu le camps. Je fronce les sourcils et la dévisage sérieusement.
- T'es carrément intelligente Penelope. Tu confonds l'intelligence et la culture. Y a des gens très cultivés qui sont également très bêtes. Et inversement, des gens très peu cultivé qui sont très intelligents. Et toi, t'es vraiment pas une fille bête.
Oh ça non, elle ne l'est pas. Loin de là même. Elle est maline, débrouillarde et inventive et ça, on ne peut pas l'être sans être intelligent. C'est un tout. C'est même ce qui définit une partie de l'intelligence selon moi. Et je ne veux pas qu'elle pense un seul instant qu'elle puisse être un peu bête. Y a peut-être un tas de choses qu'elle ne sait pas, et alors ? Ça ne l'empêche pas de s'en sortir dans la vie. Et puis, elle connaît probablement un tas de choses que d'autres gens ne connaissent pas. On ne peut pas tout savoir, c'est comme ça. Bon, le point positif dans tout ça, c'est que j'ai retrouvé contenance et que je peux à nouveau parler sans trembler d'émotion. Et subitement, les anecdotes insolites fusent toutes seules.
- Tu savais qu'il était possible qu'un corps pur, comme l'eau par exemple, se trouve à la fois à l'état liquide, solide et gazeux ? Ça arrive à une certaine pression et température spécifiques. J'ai déjà fait l'expérience, c'est totalement incroyable à voir. Enfin, je trouve.
Des fois, je m'extasie peut-être un peu sur des choses peu communes. Des choses dont la plupart des gens n'auraient rien à faire. Tant pis, moi j'adore. La science, c'est fascinant. Emporté par mon élan, je continue de plus belle. Je souris et écarquille les yeux, comme si je venais d'avoir une illumination. C'est à mon tour de me pencher un peu vers elle, nos épaules se touchant à nouveau.
- Oh celle-là, elle devrait te plaire ! La première étape de la momification ça s'appelle l'excérébration et ça consiste à retirer le cerveau du défunt par son nez avec un crochet.
Je grimace tout en riant, parce que franchement, c'est dégueulasse. J'avais vu ça dans un documentaire, les mecs étaient même allés jusqu'à reproduire le processus sur un mannequin confectionné exprès pour cette reproduction. C'était absolument immonde. En même temps, le principe lui-même de momification est assez sale. Je marque un pause, baisse les yeux et rassemble tout mon courage. Là, j'attrape la main de Penelope, puis j'isole son pouce et je viens le poser sur son propre nez en murmurant :
- Et notre pouce fait toujours la taille de notre nez..
Je déglutis, mon visage si proche du sien, sa main dans la mienne, y a mon cœur qui se serre et une bouffée de chaleur qui viens me faire suffoquer. J'ai envie de l'embrasser. J'en ai tellement envie. Allez, vas y Junior. Embrasse-la. Mais la magie de l'instant est brutalement interrompue par le début du film. Je sursaute légèrement, relâche brusquement sa main et me remets à ma place, nerveux. Je me mets à fixer l'écran avec intensité et pourtant, mon cerveau refuse d'analyser les images. Je suis toujours bloqué sur l'image de sa bouche si proche de la mienne, sur la sensation de sa main si fine et si douce, dans la mienne. J'ai mal au ventre tellement le stress qui m'habite à cet instant est fort. Pendant de longues minutes, je n'ose plus bouger d'un poil. C'est à peine si je respire. Mais je finis par me calmer et les allées-venues de la main de Penelope dans mes pop-corns terminent de me ramener à la réalité. Je souris, tourne la tête vers elle, les yeux rieurs. J'attrape mon pot et l'éloigne de Penelope en chuchotant.
- Hey, pioche dans le tien !
Je me détends progressivement mais je ne parviens toujours pas à me concentrer sur le film. Les images et le son défilent de façon décousue. Mon cerveau, pourtant habitué à gérer pleins de choses à la fois, se retrouve incapable de faire quoi que ce soit d'autre que de penser à Penelope. Quelle galère. Si elle veut parler du film avec moi après coup, je suis foutu. Foutu, foutu, foutu. Mais mon corps s'en fout clairement. Il ne pense qu'à une chose : venir se blottir contre celui de ma partenaire. J'oublie mon envie de vomir, passe outre toutes mes craintes et ma main vient se poser derrière Penelope, sur la couverture. Je me retrouve ainsi collé à elle et je reprends mon souffle dès lors que je vois qu'elle ne me fuit pas. Le soulage est intense. Libérateur même. Tellement, qu'au bout de quelques minutes encore, j'ai suffisamment confiance en moi pour venir poser ma tête contre la sienne. Mon palpitant explose complètement, il cogne si fort contre ma poitrine que j'ai l'impression que tout le monde peut l'entendre. Je suis si bien que j'en ferme les yeux, oubliant complètement le film. Je sens l'odeur de son shampooing, une odeur sucrée. Et je sens toute la chaleur qui émane de son corps et qui vient envelopper le mien tendrement. Je crois que c'était bien un vrai rencard. Je souris, pris d'une joie intense qui vient crépiter sous ma peau et qui me refile même la chaire de poule. Je voudrais rester là, avec elle, pour l'éternité.
Mais l'éternité n'existe pas dans notre monde et le film finit par toucher à sa fin. Bien trop tôt à mon goût. Tout le monde se lève et s'agite pendant que le générique défile, mais moi, je n'ai pas le cœur à bouger. Ni même à parler. Je continue de savourer l'instant, conscient qu'il va se terminer d'une minute à l'autre. Et la minute arrive. L'écran s'éteint et la pelouse est déjà à moitié vidée. La frustration vient étreindre mon myocarde et c'est à contre-coeur, avec difficulté, que je finis par me redresser, je souffle, m'étire sans oser la regarder. J'ai l'impression d'être encore plongé dans une douce torpeur et j'ai du mal à atterrir. En fait, je n'en ai absolument pas envie. Mais je n'ai pas le choix. Je me mets debout, toujours sans un mot. De toute façon, je ne saurais pas quoi dire. J'ai à peine saisit l'histoire du film. Je baisse les yeux sur la couverture et constate que je n'ai quasiment pas touché à mes pop-corn, ni même ouvert ma boisson. L'avantage, c'est que ça me fera mon repas du soir. Penelope se lève à son tour et je bloque sur elle. Sur cette envie qui me démange depuis des jours et des jours.
- Pene..
Que je souffle pour attirer son attention, oubliant complètement qu'elle déteste ce surnom. Je m'avance, le pas hésitant et lorsque j'arrive à sa hauteur, mon regard se perd dans le sien. Ma main droite vient se perdre sur sa joue et.. Je me met à chialer. Je l'ai pas vu venir celle-là. Mais d'un seul coup, une tristesse et une culpabilité énormes sont venu s'abattre sur moi, ouvrant les vannes. Je retire ma main et recule, alors que subitement tout mon corps hurle le prénom de Bee. Complètement perturbé par ce qui se passe, je recule jusqu'à me retrouver à deux mètres d'elle, paumé, le regard qui s'agite. La bouche entrouverte, haletant, je n'arrive plus à m'arrêter. Je pensais pourtant être passé à autre chose. Je pensais que j'y arriverais. Mais non. J'suis pas prêt. Pourtant, avec Ivy je peux. Je passe mes mains sur mon visage pour tenter de faire disparaitre ces larmes honteuses. Et je ne met pas longtemps à comprendre pourquoi je peux avec Ivy, mais pas avec Penelope. Parce que Pene, c'est différent. Pene, c'est comme avec Bee. Mon cœur bat pour elle de la même façon qu'il bat pour Bee. Et je m'en veux. J'ai la sensation de tromper Bee et je comprends subitement tellement mieux ce qu'éprouve Micha. J'ai tout fait pour faire taire ma peine, pour passer à autre chose, pour avancer. Mais je n'ai fait que l'enterrer dans un coin sans parvenir à l'apaiser. Résultat, c'est maintenant qu'elle ressort, se faisant traitresse.
- Je.. excuse-moi, je sais pas..
Si je sais. Et j'ai trop mal, c'est trop dur. Je n'ai qu'une envie, c'est de retourner voir Micha et d'aller pleurer dans ses bras. Je ramasse mes affaires à la hâte, avec une certaine maladresse. Puis, je lui fais face à nouveau, le visage inondé. Si mon chagrin n'était pas aussi prenant à cet instant, sûrement que je serais déjà mort de honte. Mais je n'y pense même pas. Je n'en suis pas capable.
- Je préfère rentrer seul finalement.. j'suis désolé.
Je recule, je ne sais même pas comment je tiens encore sur mes jambes. J'ai envie de me laisser tomber par terre et de pleurer jusqu'à ne plus avoir une goutte d'eau dans mon corps.
- Merci pour la soirée.
Je fais demi-tour et je m'enfuis lâchement, alors que des sanglots commencent à venir me secouer les épaules. J'ai mal. J'ai tellement mal. Bee me manque, elle me manque tellement c'est horrible. J'ai une boule dans la gorge et je quitte les lieux en quatrième vitesse, tentant de fuir la culpabilité qui me brûle la peau. En tentant de fuir Penelope. En tentant de fuir la réalité de mes sentiments à son égard.
Sujet: Re: Young & Reckless | Penelior Mar 6 Déc - 20:29
hoche la tête pour montrer que c’est bon, tout à l’heure tu lui servira de chauffeur pour le ramener chez lui. Puis qui sait, peut-être qu’il aimera vraiment, peut être que tu pourras même lui apprendre à conduire ? Non. Non. Peut-être pas. Mais qui sait. T’es contente de partager quelque chose avec lui Penelope, peut-être pas une passion, mais quelque chose, qu’il te comprenne un peu, qu’il ressente ne serait-ce qu’un instant ce que toi tu ressens. Parce que t’as envie de lui faire découvrir ton monde Penelope, c’est un des premiers avec qui tu crève d’envie de partager ça, de le voir venir manger à la maison le soir, au milieu de la bande, de l’embarquer avec toi quand les choses deviennent un peu plus sérieuses. T’as envie qu’il sache que ta vie c’est pas que des bêtises, c’est pas que du danger, que y a aussi beaucoup de joie, beaucoup de bonheur, de petits trésors qui se cachent comme ça sur la route. Comme lui. Mais ça tu peux pas lui dire pas vrai ? Que tu le vois comme un trésor ? Quelque chose de précieux à garder contre sois, ne plus jamais le lâcher. Vous vous installez, popcorn et boissons dans les bras, nappe étendue au sol, au milieu des bagnoles ou des gens comme vous assis dans l’herbe. Les drive-in ça a toujours été ta passion, l’ambiance moins étouffante que la salle de ciné, le bruit de la nature, de la vie autour. C’est moins aseptisé, tellement plus libre. Pourtant aujourd’hui t’arrives pas à totalement te laisser aller, à profiter du cadre, de tout. Tu te crispes un peu, tu serres les dents et inspire lentement. T’essaye de calmer ton palpitant à chaque fois que tes yeux se posent sur lui, t’as encore dans ta main, l’empreinte de la sienne. Puis soudain c’est Junior qui brise le silence, ses mots maladroits, sa science qui coule de ses lèvres et toi tu le regarde. Tu l’écoute. Et tu rigole. Tu rigole pour te libérer, tu rigole parce que c’est tellement improbable, tu rigole parce que c’est mieux que de gueuler, que de crier, que de frapper. Tellement mieux. Alors tu parles à ton tour Penelope, tu te rapproches un peu – non beaucoup – de lui, à quelques centimètres seulement de sa peau, de son oreille. T’observe son profil pendant qu’il fixe l’écran, profitant de son regard détourné pour le détailler. Y a quelque chose de pur dans son visage, quelque chose d’innocent, de doux, quelque chose qui te tord les sentiments sans que tu sache vraiment trop pourquoi. T’as envie de nicher ton nez dans le creux de son cou, de remonter jusqu’à son oreille, perdre tes doigts dans ses cheveux. Contact. Toujours plus de contact. Ne plus jamais se séparer de lui. Et pourtant vous conservez une sorte de distance religieuse, comme si y avait une barrière invisible entre vous deux, à ne pas franchir. Il tourne la tête et vos nez se frôle. Pendant un instant tes yeux dérivent sur ses lèvres et tu sens le rouge te monter aux joues. Toi qui as toujours les tripes pour faire la connerie la première, aujourd’hui tu te sens ridicule, comme un ballon de baudruche tout dégonflé. T’ose rien. Remarque t’aurais rien pu oser puisque Junior s’écarte soudain, comme si quelque chose venait de le piquer. Et dans ta bouche ça te laisse un goût amer. Tu comprends pas ce geste, tu comprends pas pourquoi. T’aurais voulu qu’il se rapproche au contraire, qu’il s’entrechoque avec toi. Mais non. Il s’éloigne, et dans ta tête ça commence à former des idées. Et si tu le dégoutais ? Et si il te détestait ? Et si, et si, et si. Merde Penelope ressaisit toi ! C’est pas le moment, c’est pas bien de penser ça. Tu te foutrais des baffes si tu pouvais, mais ça serait ridicule et Junior prendrait surement peur, et tout serait encore pire. Alors tu te mord l’intérieur de la joue, pour essayer de pas montrer ta déception, ton incompréhension. Tu prends sur toi pour continuer de parler, même si y a un peu moins d’entrain dans ta voix, comme si quelque chose s’était cassé. T'es carrément intelligente Penelope. Tu confonds l'intelligence et la culture. Y a des gens très cultivés qui sont également très bêtes. Et inversement, des gens très peu cultivé qui sont très intelligents. Et toi, t'es vraiment pas une fille bête. Tu rigole Penelope, d’un rire un peu cassé, parce que ça te fait drôle. C’est bien la première fois que quelqu’un te dit ça. Que quelqu’un te dit ça avec autant de sérieux. T’es pas stupide, tu le sais, mais intelligente t’y crois pas trop. Faut dire qu’avec un frère comme Tom, ça met tout de suite la barre un peu trop haut. Pourtant quand Junior te dis que t’es intelligente, ça te réchauffe, ça chasse le malaise d’il y a quelques instants. Tu te perds dans son regard bleu et tu lui offre un pauvre sourire, trop touchée pour faire genre que ça compte pas ce qu’il dit . « Wow. La déclaration. » Que tu souffles avant de recommencer à rire, un peu plus franchement cette fois ci. « Je sortirais ça à Tom la prochaine fois qu’il dira que je suis stupide. » Parce que t’as l’impression que Tom te le dis un peu trop souvent ces derniers temps et ça te bouffe. T’as envie qu’il te regarde, qu’il t’estime, pas qu’il se planque derrière un comptoir minable à draguer toutes les filles qui passent devant lui. Il fout quoi Tom hein ? Et Billy, et Tex ? Pendant que toi tu t’acharne sur Junior, alors que ton cœur se fait envahir par son regard trop pur. Tu savais qu'il était possible qu'un corps pur, comme l'eau par exemple, se trouve à la fois à l'état liquide, solide et gazeux ? Ça arrive à une certaine pression et température spécifiques. J'ai déjà fait l'expérience, c'est totalement incroyable à voir. Enfin, je trouve. Il te sort de tes pensées, avec une nouvelle phrase. Y a comme une sortie de fascination dans sa voix et ça te fait tendre l’oreille. Parce que toi tout ça tu sais pas, t’as quitté les bancs de l’école trop tôt, au fond t’y a sans doute même jamais été vraiment. 13 ans et déjà sur la route, toute une éducation à faire, et heureusement que Junior est là, à te balancer des infos anodines comme ça, que tu ranges précieusement dans ta tête, pour pas oublier. « Non, je savais pas. J’arrive pas vraiment à visualiser mais j’imagine que ça doit être impressionnant ! Faudra que tu m’explique comment on fait ! » Parce que oui, ça t’intéresse. Si t’avais été jusqu’au lycée, t’aurais surement été de ces élèves qui font exploser les tubes à essais en chimie, qui mélangent n’importe quoi en physique et qui arrivent à faire pousser une plante transgénique sans savoir pourquoi en biologie. Mais à la place t’as appris à tirer des deux mains, à démonter et remonter un flingue plus vite que la plus part des policiers, à armer et viser avec un sniper. Tu sais aussi assommer un homme et survivre dans la nature toute seule, avec le strict minimum. Mais bon, quand même, savoir faire coïncider un corps pur dans 3 états c’est quand même archi stylé. - Oh celle-là, elle devrait te plaire ! La première étape de la momification ça s'appelle l'excérébration et ça consiste à retirer le cerveau du défunt par son nez avec un crochet. Là t’explose carrément de rire, avant de grimacer . « C’est. Trop. Génial. Oh mon dieu. » Que tu réplique en battant des mains. Parce que t’es pas une fille qu’on dégoute facilement Penelope. Toi les trucs un peu dégueux comme ça au contraire tu trouves ça fascinant. « Par le nez ? Mais ha. J’allais dire ça doit faire mal… Mais bon je pense que le gars devait plus sentir grand-chose vu qu’il est crevé… » Tu l’encourage Penelope, parce que quand Junior parle, c’est comme si t’étais autre part, dans un monde que tu connais pas, à la découvertes de nouvelles choses. Et ça te fait kiffer. Tellement kiffer. T’as l’impression de partager un peu plus de trucs avec Junior, comme un échange équivalent. La moto contre ses anecdotes, un peu de vos deux univers qui se mélangent, qui se fusionnent. Tu rigoles, encore et encore, jusqu’à ce que ton rire se meurt dans ta gorge. Y a Junior qu’a pris doucement ta main, et chaque millimètre de ta peau au contact de la sienne te brûle. Tu le laisse faire et toi tu bouge plus. Immobile, de peur qu’au moindre mouvement il prenne peur et se rétracte, comme avant. Et notre pouce fait toujours la taille de notre nez.. C’est fou ça, t’as envie de répliquer, mais y a rien qui sort. Rien du tout. Pas même un souffle. T’es bloquée, totalement bloquée. Sur sa main sur la sienne, ses yeux en face des tiens et cette barrière invisible qui semble soudain s’effondrer. T’as envie de l’embrasser. Vraiment. De passer une main derrière sa tête, tes doigts dans ses boucles et de l’attirer à toi. Tu vas le faire. Vraiment. Si seulement. Mais y a le film qui démarre et la magie qui s’envole. Il lâche ta main, tu t’écartes un peu remerciant en silence l’obscurité pour qu’il ne puisse pas voir le rouge de tes joues. Parce que là, t’es surement cramoisie. Et c’est ridicule. Alors tu souffle un bon coup et tu te concentre sur l’écran, sur le film qui démarre et les acteurs qui apparaissent.
T’as du mal à te concentrer, d’autant plus que le film est pas vraiment super. T’es de ces puristes Penelope, qui vont râler et crier au scandale, qui diront que l’original c’était mieux et que faire un remake c’était inutile. T’as du mal à te concentrer aussi parce qu’à quelques centimètres de toi y a Junior et que malgré le son beaucoup trop fort, tu l’entends respirer. Machinalement tu pique dans son pop corn plutôt que dans le tien, comme un réflexe que t’as toujours eu avec Tex ou Billy. Incapable de te satisfaire de ce que t’as devant toi, t’as ce besoin de tout voler, d’aller chercher encore plus loin. Hey, pioche dans le tien ! Et il écarte son pot de tes doigts. Tu lui tire la langue avant de répliquer en murmurant « C’est toujours meilleur chez le voisin ! Tu connais pas cette règle ? » Non, sans doute qu’il connait pas cette règle, Junior ça a pas vraiment l’air d’être le gars à aller au ciné tous les jeudi comme toi, à commander des tonnes de maïs soufflés enrobés de beurre ou de caramel. Pas grave, tu lui apprendras. Tu reportes ton attention sur le film, avalant ton pop-corn à une vitesse éclaire pour arrêter de stresser. Pourquoi tu stress déjà ? Merde. T’arrives même pas à profiter des scènes de fusillade, ni même à retenir le nombres de coups échanger, pour vérifier que les scénaristes ont bien respecté ça. Non, t’arrives juste à retenir le nombre de coup que ton cœur fait. Et c’est ridiculement élevé. Soudain tu sens Junior qui se rapproche, qui se colle même contre toi, sa main derrière ton dos. Une fraction de seconde tu te raidis, surprise par ce geste, pas l’initiative du jeune homme. Juste quelques secondes, parce qu’après, t’as ce sourire stupide sur les lèvres que t’arrives pas à cacher. Puis quelques instants plus tard c’est sa tête contre la tienne et là ton cœur dérape. Tu continues de fixer l’écran, mais rien ne rentre, rien ne sort, c’est juste des couleurs qui défilent devant tes yeux car tous tes sens sont mobilisés ailleurs. Y a plus que vous deux, Junior contre toi et doucement tu viens glisser ta main dans la sienne, centimètre par centimètre, comme si t’y croyais pas vraiment. Puis finalement tu ferme les yeux. Tu profites juste de sa présence, de lui, de ce calme qui s’abat de façon radicale sur ton cœur. Pour la première fois depuis longtemps, tu te sens à ta place, et ça fait du bien. Combien de temps vous restez comme ça ? T’en perds le compte. C’est juste le bruit de tes voisins qui se lèvent qui te sors de ta torpeur et t’ouvre les yeux. A côté de toi Junior se redresse, s’écarte un peu et tu le regarde. Rapidement tu te lèves à ton tour, essuie les miettes de popcorn sur ton pantalon avant de te tourner vers Junior. Il a un air sur son regard. Un air drôlement sérieux, qui te fait manquer une respiration. - Pene.. tu tique pas sur le surnom qu’il utilise. Tu tique plus depuis longtemps quand c’est lui qui le fait, tu fais juste semblant, pour la forme, mais ça tu l’avouera jamais. Il s’avance vers toi, lève la main et la pose sur ta joue. C’est un geste d’une incroyable douceur, qui te fait frissonner. Tu ferme un instant les yeux, te laissant aller à son contact, mais quand tu les ouvres de nouveaux, c’est un Junior en larmes qui te fait face. Putain. « Junior ? » Pourquoi est-ce qu’il pleure comme ça ? Qu’est-ce que t’as fais Penelope ? Qu’est-ce que t’as encore fait ? - Je.. excuse-moi, je sais pas..La douleur que tu ressens actuellement te ramène arrière. Elle est identique à la fois où tout a foiré, cette fois où la balle t’as transpercé. Ouais. Voila. C’est la même douleur sourde, bam dans le ventre, bam dans le cœur, et ton souffle qui se bloque, ton myocarde qui s’affole, ton cerveau qui décroche. Pourquoi il pleure ? Pourquoi ? Et t’as envie de le prendre dans tes bras, de le consoler, mais tu sais que c’est pas une bonne idée. C’est tout sauf une bonne idée. Et ça fait tellement mal. - Je préfère rentrer seul finalement.. j'suis désolé. «Je. Ok. T’en fais pas. » que tu lâches dans un souffle, comme si rien n’avait d’importance, comme si c’était pas grave qu’il soit en larmes devant toi et que tu sois incapable de faire quoi que ce soit. - Merci pour la soirée. Et il fait demi-tour avant que t’ai pu répondre quoi que ce soit, te laissant là, seule, au milieu de la pelouse vidée. Il te faut peut-être quelques minutes, avant de pouvoir retrouver tes esprits, et Junior est déjà bien loin. Rapidement tu rassemble tes affaires, retourne chercher ta moto et tu file droit vers la maison. Tu vas vite. Bien trop vite. Mais t’as besoin de ça. D’un peu d’adrénaline dans les veines, pour chasser la tristesse qui se tortille au fond de toi. Vite, toujours plus vite, et les lumières de la ville qui défilent devant tes yeux. Arrivée chez toi, tu gares la moto et rentre dans votre appartement rageusement. Y a les gars, sur le canapé, à se mater un film stupide. Tu les regardes avant de donner rageusement un coup de pied dans la chaise. T’as envie de taper quelqu’un, de t’énerver sur quelque chose. D’expulser tous ces sentiments qui sont entrain de te bouffer. C’est toxique, tellement toxique. Tu ne laisse pas le temps à Tom ou Billy de te demander quoi que ce soit et tu file dans ta chambre, enlevant des vêtements avec hargne, tout ce maquillage, tes cheveux, tout. Ton jean atterrit à l’autre bout de ta chambre et tes chaussures heurtent le mur. Tu te déteste Penelope. Tu te hais tellement de te mettre dans des états pareils pour quoi ? Pour un garçon ? C’est tellement ridicule, tellement stupide. Tu te trouves faible. Terriblement faible. Alors rapidement t’enfile une tenue de sport, rabats ta capuche et tu pars dans la nuit en courant, sans un mot aux garçons. T’as besoin d’être seule ce soir, de faire le point, sinon tu vas finir par tuer quelqu’un.
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Sujet: Re: Young & Reckless | Penelior
Young & Reckless | Penelior
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