La journée avait été merdique à 20 sur une échelle de 10. La belle neige du matin s’était transformée en pluie tiède, le commissaire en chef l’avait envoyé faire la circulation et il n’avait pu poser aucun pv. Aden se sentait nul, le moral au fond du trou. Son insigne de policier ne brillait même plus son son torse, malgré les heures passées à la lustrer. Il claqua la porte de son bureau et traina sa carcasse chez lui, sans prendre le temps de déposer son pistolet. Il pensait à toutes les fois ou il aurait du s’imposer face à son boss, à toutes les amendes méritées qu’il aurait dû envoyer à la gueule de ceux qui se foutaient de la sienne. Le temps de reprendre ses esprits, il s’était déjà perdu. Devant lui, ce n’était ni son appart, ni celui d’Ivy. Le Jen’s and friend. Il y était déjà allé pour accompagner des amis.

L’établissement était quasi vide, seules quelques âmes perdus se disputaient les dizaines de de siège. Aden s’installa au bar. Il regardait les clients, surtout des vieux, et puis, au milieu, apparu une créature étrange qui se baladait comme si elle était chez elle. Le policier parcouru tout son corps d’un regard interrogatif. Il n’y avait aucune volonté de juger, il se trouvait juste face à un être non identifié. Rose, sans cheveux, avec un très grand verre remplie d'une boisson jaune dans la main. Aden ne comprenait pas ce qui se passait sous ses yeux, et comme à chaque fois qu'Aden ne comprend pas... il se paralysa, le temps que les infos remontent jusqu’à son cerveau.

« Ah bah… oula.. merde »

Il laissa glisser son lait-fraise entre ses mains et le rattrapa d’un geste maladroit. Sa paille, elle, tomba à terre et ne pu être sauvée. Tristesse. Aden remarqua que la créature le regardait aussi. L'échange était trop intense, il ne voulait surtout pas se faire remarquer, surtout pas. Il espérait que son regard ne l’ait pas blessé, en tout cas pas assez pour qu’elle ne le provoque en duel. Il n’avait aucune envie de se justifier, ni se battre et de toute façon, il était mauvais à ce petit jeu la. Alors qu’elle arrivait vers lui, en panique, il enfonca sa tête dans ses bras croisés en marmonnant. « Cpas mooooi, cpas moooi, je veux pas me baaattre ». 

Aden s’en voulait comme jamais. Ce n’était pas son genre de juger les gens. A Savannah, il avait du traiter avec tous types de personnes, de l’aristocrate snob au toxico en manque, et il s’était bien rendu compte que ni la richesse, ni les vêtements ne font d’un humain quelqu’un de bien. Il avait même tendance à préférer les gens aux looks étranges. Souvent, ils étaient les premiers à faire preuve de calme dans des situations tendues.

L’homme qu’il venait d’agresser avec son regard s’approchait. Aden le voyait entre ses bras faussement fermés. Il releva la tête, prêt à s’excuser, mais l’autre était à terre en train de ramasser sa paille. La nouveauté a tendance à perturber, n'est-ce pas ? Aden ne réagit pas, à moitié euphorique d’avoir récupéré sa paille, à moitié paniqué par l’approche rapide de celui qui nommait maintenant dans sa tête,  Le gentil chauve.  Il continuait à parler, de barbe, de fringues. Il avait l’air plus sympa de près que de loin.

Aden descendu de son fauteuil. « Non non, oula, non, bizarre ? Loin de moi cette idée… C’est juste que… je… » Il passait ses mains au dessus de sa tête, pour décrire ce qu’il était incapable de verbaliser. « De toute façon, le look, c’est pas si important. Moi j’ai une amie avec les cheveux roses, ou blonds, ou noirs, enfin ça dépend, ça change selon l’humeur. Alors oui, c’est étrange, mais elle est vraiment sympa. » Le policier se rendit compte que parler d’Ivy à quelqu’un qui ne la connaissait pas et de cheveux à quelqu’un qui n’en avait pas n’était pas une très bonne tentative d’approche. Mais il n’était plus à ça près. Il s’attela à changer de sujet, rapidement. « C’est marrant parce que justement, la semaine dernière, un collègue policier m’a dit qu’il avait mis en garde à vue un mec chauve bizarre. C’était pas vous ? » Pour le changement de sujet, c’était raté.