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 and the blood's run stale (sevoan)

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MessageSujet: and the blood's run stale (sevoan)   and the blood's run stale (sevoan) EmptyLun 14 Mai - 23:55

and the blood's run stale
seven & ioan

« I want to hide the truth
I want to shelter you
But with the beast inside
There’s nowhere we can hide. »
L'barman te demande si tu bosses pas cet après-midi et t'inclines vivement la tête en signe désapprobateur avant de retraverser la brume formée par l'abondances des fumeurs, ton verre à la main. Tu t'éloignes un peu du brouillard, vas te caler dans un coin à l'abri des regards parce que t'aimes pas qu'on te remarques même si t'es habitué des lieux et que t'as quelques connaissances ici, aujourd'hui t'as pas envie de discuter. Aujourd'hui comme hier et comme demain d'ailleurs, comme tous les jours qui sont passés et qui sont à venir. Toi ton truc, c'est les mots écrits, scellés sur papiers, pas ceux qu'on lâche dans les airs et sur lesquels on peut revenir au moindre instant, pas ceux que l'on peut jurer ne jamais avoir prononcés, pas ceux qui ne sont pas fiables parce qu'ils ne laissent pas de trace. T'as jamais été très loquace, les seuls moments ou tu faisais des efforts c'était quand t'étais gosse pour poser des questions mais aucune des réponses que t'espérais n'étais jamais venue alors t'avais laissé tomber et tu t'étais concentré sur tes cahiers. Aujourd'hui, cela suffit plus, t'arrives plus à te contenter d'une seule bouée, il te faut un canot de sauvetage et l'alcool en est l'une des rames. Alors t'es là, au milieu de l'après-midi, parce qu'il y a des choses qui te tournent dans la tête, la tentative de suicide d'Anca, le retour de ta mère de l'hôpital après son kidnapping, le retour de Valerian qui prend le même chemin que ton père et Sergheï vis à vis de toi, et d'autres trucs, comme si la vie avait décidé de réunir toutes les probabilités de te rendre anxieux sous forme liquide dans un seul seau et de t'en envoyer le contenu à la gueule. Y a le passé et le présent qui s'embrouillent dans ton crâne, au point que tu fais plus la différence parce que tu es là depuis une heure à faire des allers retours entre le comptoir et ta table, alternant rhum, whisky, vodka sous forme pure comme en cocktails, mais t'es pas encore à sec et t'es pas encore minable parce que t'arrives encore à ordonner tes pensées, alors tu continues. T'attrapes ton verre, tu le fais rouler entre tes paumes un instant comme pour en profiter et tu l'avales cul sec ensuite, en réfléchissant déjà au prochain alcool ou cocktail que tu vas commander mais t'as pas trop le temps de te questionner.

Parce qu'il y a cette silhouette qui accroche ton regard à travers la brume opaque, cette silhouette qui te ramène brusquement une décennie en arrière. Un instant, tu penses que t'as une hallucination mais non, t'es pas encore soûl à ce point, t'es pas sujet aux hallucinations de toute façon même sous l'effet de l'alcool. Alors tu redresses la tête, t'interrogeant un instant sur ce qu'il fout là à son âge, et pourquoi on l'a laissé rentrer parce qu'il est trop jeune, il a pas l'âge, c'est encore un gamin. Et puis tu clignes des yeux pendant une brève seconde, qui te replonges dans la réalité, celle ou ton frère a de nouveau vingt-et-un ans et plus onze, mais même dix ans plus tard tu pensais pas qu'il viendrait dans ce genre de lieu. Tu le suis du regard pendant qu'il se dirige vers le comptoir et puis tu reportes ton attention sur ton verre de whisky vide pour penser à autre chose mais tu peux plus maintenant que tu l'as aperçu. C'est bien la première fois d'ailleurs, tu te souviens pas de l'avoir déjà croisé dans ce rade et pourtant t'es habitué des lieux. Peut-être qu'il va ailleurs habituellement, dans un bar que tu fréquentes moins, un truc plus classe parce qu'ici, c'est plus à toi que l'ambiance minable et insalubre correspond, mais t'es pas sûr qu'il y aille du tout. Il traîne dans les bars, Seven ? Tu sais pas, tu sais plus. Y a trop longtemps que t'as perdu la notion d'où il traîne et de ce qu'il fait, et les dernières nouvelles racontaient que son truc c'était plus la came et la drogue, que vous vous ne noyiez pas dans les mêmes eaux. Tu te relèves, pas parce qu'il est là, parce que ton verre est vide. C'est parce que ton verre est vide, n'est-ce pas ? Il est passé le temps ou tu cherchais encore à nouer contact avec lui et ou tu n'étais pas lassé de te faire ignorer ou jeter par le gamin. Sang trop friable pour que tu puisses le tenir dans tes mains et ne pas le laisser s'échapper, votre lien s'est effrité au cours des neufs dernières années et tu t'es lassé de l'entendre dire qu'il te connaît pas, comme tu t'es lassé d'écrire pour lui quand il te rejetait, comme tu t'es lassé de le chercher quand il fuguait. Alors tu vas au bar, t'appuyer contre le comptoir, parce que ton verre est vide, que tu poses contre le meuble qu'est devenu trop luxueux pour la clientèle des lieux, t'hésites à commander un autre verre à l'un des serveurs mais tu finis par demander une bouteille entière de pincer vodka, histoire de pouvoir être tranquille un moment. T'alignes les billets pendant qu'on te tends la bouteille et un verre propre et tu veux t'retourner pour revenir vers ta table mais tu te bloques à quarante-cinq degrés, ton regard cassé fixé sur Seven.

T'as pas pu faire un demi tour complet, tu sais même pas pourquoi, mais le profil de ton frère t'as figé et tu peux pas passer à côté sans rien dire même un truc banal, même avec la voix morne de quelqu'un qui demande l'heure qui te caractérise si bien parce que t'as pas d'animation dans la voix et encore, tu fais des efforts parce que ton timbre actuel n'est pas cassé comme à l'ordinaire. T'essaies de paraître normal, ou tout au moins, moins faible que d'habitude. Peine perdue ? Peine perdue. « J'suppose qu'tu m'connais pas alors j'me présente. J'suis l'frère d'Anca et aux dernières nouvelles toi aussi, alors j'espère qu'ça va. » T'espère qu'ça va parce que c'est la famille, t'espère qu'ça va parce que t'arrives pas à faire une croix dessus définitivement, t'espère qu'ça va que t'essaies de garder un lien aussi mince soit-il.

Mais t'as beau espérer tu sais qu'ça va pas pour lui et pour toi non plus, vous seriez pas là si ça allait. Cela va jamais vraiment chez les Popescu, y a plus de bas que de hauts et chacun évacue comme il veut, comme il peut surtout. Parfois tu leur laisse l'occasion de se faire les crocs sur toi, en te rejetant ou en t'insultant, mais cet après-midi, t'as pas envie, tu veux pas servir de punching ball mental, alors t'espère juste qu'ça va et tu te casses direct après avoir lâché ces paroles, t'attends pas la réponse. T'as déjà chopé la bouteille par le goulot et tu retournes à ta place, parce que tu veux pas attendre qu'il se foute de ta gueule ou qu'il te crache dessus, parce que t'es lassé, parce qu'aujourd'hui tu veux pas, tu veux plus de haine mais tu sais que d'un autre côté t'as jeté un pavé dans la mare en parlant d'Anca et y a tes yeux qui s'embrument à cette idée pendant que te recolles le cul sur ta chaise. Tu pleures pas, parce que t'as les yeux secs depuis longtemps, parce qu'elle s'en est sortie cette fois là aussi, mais t'as le cœur qui s'serre quand tu te demandes pour combien de temps encore elle s'en sortira, t'as le cœur qui s'serre parce que tu veux pas la perdre elle, t'as déjà perdu tous les autres et c'est celle qui mérité le plus de vivre. Mais tu l'as ramenée sur le tapis parce que tu sais que Seven va réagir en entendant son prénom et qu'inconsciemment, t'as besoin qu'il réagisse. T'as besoin que quelqu'un te fasse te sentir coupable parce que coupable tu l'es, coupable d'avoir rien vu, coupable d'avoir pas su. T'aurais du comprendre et l'heure d'expier tes fautes arrive, de façon violente parce que Seven épargne pas, jamais. Tes dents raclent plusieurs fois ta lèvre inférieure qui blanchit sous l'agression, et même si tu veux pas la mordre, t'essaies de faire couler du sang à l'aide de tes canines, parce que cela t'soulagerait que cela sorte, tu saurais que t'es encore un peu en vie. Tant qu'y a du sang qui gicle et cette odeur métallique qui écœure ton palais, tu supposes que tout va bien mais y a ton attitude qui tranche avec cette pensée, la bouteille que t'as ouverte et le verre que t'as rempli presque à ras bord d'une main tandis que l'autre s'affaire dans la poche de ton jean, là ou tu gardes tes clopes parce que t'as pas pu arrêté définitivement de fumer. Heureusement parce que t'en aurais besoin et qu'tu vas pas tarder à en allumer une, quand tu t'seras décidé à boire le verre cul sec comme t'en as l'habitude.

Mais tu le feras plus tard, dans quelques minutes.
Pour l'instant tu l'regardes juste, fixement, comme s'il contenait toutes les réponses universelles aux questions que tu t'es posées depuis le début de ta vie.
Pour un peu, tu trinquerais presque. À l'alcool, la cause et la solution de tous nos problèmes dans la vie, comme dirait Homer Simpson.
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Seven Popescu

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MessageSujet: Re: and the blood's run stale (sevoan)   and the blood's run stale (sevoan) EmptySam 19 Mai - 12:56

Son ventre gronde pourtant c'est pas de bouffe dont il a faim. Il a les veines qui brûlent, ça démange ça fait mal c'est comme si elles s'étaient asséchées, comme si un millier d'insectes y grouillaient pour remplacer son hémoglobine. Il est drainé de toute énergie pourtant il est pas foutu de rester calme, trop agité trop nerveux, les muscles si tendus que ça en devient douloureux. L'impression que tout son corps est courbaturé, des frissons désagréables qui secouent son échine à intervalles réguliers et ses doigts qui tremblent furieusement par moments.

Il sait ce que c'est.

L'esprit qui s'égare, la concentration qui s'fait la malle et des relents de paranoïa. Le sommeil qui le fuit plus que d'habitude, les cauchemars de plus en plus violents, les réveils en sueur et la fatigue qui ne le quitte plus. Il trouve plus aucune satisfaction dans quoi que ce soit – même quand il baise le plaisir n'est plus vraiment là, c'est l'illusion du contrôle plus que l'extase, le pouvoir sur un corps plutôt que la passion. Y a rien qui arrive à combler le vide qui se creuse jour après jour. Il a faim tout le temps mais il mange toujours pas ; au fond il sait que c'est pas ce que son organisme réclame réellement.

C'est le manque qui se fait sentir.

Il aurait qu'un coup de fil à passer pour y remédier, il sait où trouver ce dont il a besoin, il sait comment stopper cette spirale infernale. Mais il peut pas. L'épée de Damoclès au-dessus de sa tête est trop acérée, le bracelet à sa cheville est trop lourd – un seul faux pas et c'est la chute. Il se sait en sursis, surveillé, les hyènes aux aguets pour l'enfermer s'il déroge à une seule des conditions de sa probation. Rester clean. Il pensait pas que ça serait si dur, persuadé qu'il avait le contrôle sur la situation et maintenant que ça se casse la gueule il peut plus nier l'évidence. L'addiction est là. La seule chose qui l'rassure c'est d'être au bas de l'échelle et pas un junkie confirmé, ça fait mal mais c'est pas invivable. C'est juste long, lent, douloureux mentalement aussi bien que physiquement. Ses pensées sont plus sombres qu'elles ne l'étaient déjà et elles le happent elles le bouffent elles l'entraînent vers les profondeurs, un boulet à sa cheville et il n'a pas de bouée à laquelle se raccrocher.

Il sent qu'il sombre, doucement. L'agonie est vicieuse, pernicieuse. Programmée. Il aurait préféré une chute brutale, un crash violent pour disloquer son corps et le plonger dans une douleur qu'il connaît qu'il sait encaisser qu'il est capable de gérer. Y a rien de pire que se consumer à petit feu.

Son pas est raide quand il passe la porte du bar en fin d'après-midi. Il a choisi le plus miteux qu'il a trouvé, là où les cigarettes flambent comme les rêves avortés, là où les âmes sont aussi crasseuses que la sienne. Pourtant il se sent pas à sa place au milieu des piliers de bar – c'est pas son univers, ça l'a jamais été. Pas comme son père ou ses frères, différence tranchée qu'il entretient avec soin comme pour se rassurer, parce que c'est peut-être la seule chose qui le différencie clairement de celui dont il porte le nom.

Carcasse échouée sur un tabouret au comptoir, il est tendu comme un arc, mâchoire crispée et dents qui grincent. Voix basse et ton sec quand il demande un whisky pur, phalanges qui battent le bois au rythme de son myocarde – trop vite trop fort. Il vide le verre d'une traite, en demande un deuxième. Sa gorge crame mais c'est pas assez il a besoin de plus, besoin de sentir sa trachée se désintégrer jusqu'à ce que la brûlure surplombe tout le reste, jusqu'à se noyer dans les fonds de verre plutôt que dans ses pensées trop noires. C'est la seule alternative qu'il a pour combler le manque et il s'y raccroche désespérément, même si au fond il sait que ça marchera pas.

Y a du mouvement sur sa gauche mais il n'y prête pas attention, focalisé sur le liquide ambré qui le ramène onze ans en arrière, la première fois qu'il y a goûté. Un rictus écœuré déforme sa bouche alors qu'il porte le verre à ses lèvres à nouveau, résigné. Il se retourne pas, pourtant il sent le regard dardé sur lui avant d'entendre sa voix. « J'suppose qu'tu m'connais pas alors j'me présente. J'suis l'frère d'Anca et aux dernières nouvelles toi aussi, alors j'espère qu'ça va. » Figé. Il met un temps avant d'enfin daigner le regarder, ses prunelles qui croisent les siennes une seconde avant que Ioan ne tourne les talons sans lui laisser le temps de réagir. Il l'observe s'éloigner bouteille en main, l'air plus misérable que lui ou peut-être que c'est juste parce qu'il voit pas de quoi il a l'air. Aussi minables l'un que l'autre, finalement. C'est peut-être ce qui le pousse à se lever, verre en main, yeux braqués sur Ioan qui continue de le fixer. Le besoin d'se prouver qu'il peut toujours le dominer même dans les bas-fonds, même quand ils ont tous les deux le cœur mort et l'allure zombie. Le besoin d'se dire qu'il est au-dessus, toujours au-dessus quoi qu'il arrive. Égo détraqué, fierté mal placée. Il avance et vient se planter devant lui, debout pour le surplomber de toute sa hauteur, regard hautain quand il le baisse sur lui. « Aux dernières nouvelles elle veut crever et t'es une grosse merde. » Ses yeux sont noirs quand ils le jaugent de haut en bas. Le mépris se fait sentir et la colère vibre au creux d'ses os, constante, épuisante. Prononcer le nom d'Anca c'est la ligne à n'pas franchir, c'est l'étincelle qui allume la mèche chaque fois. « Faut croire qu'y a des choses qui changent pas. » Haussement d'épaules faussement désinvolte, regard perçant. Il finit par lever son verre dans sa direction avant de cracher : « À toi et Anca, les putains d'faibles de la famille. » Il a la nausée quand il avale ce qu'il reste de son whisky cul sec. Et sans attendre il attrape la bouteille de son frère pour se resservir, insolent. Quand il le regarde à nouveau y a quelque chose d'assassin dans ses iris, quelque chose qui lui demande de venir le défier. Le coin d'ses lèvres étiré, c'est moche, on dirait juste qu'il retrousse les babines comme un fauve prêt à attaquer. Affamé, cruel. Sans pitié.

Il n'a pas soif d'alcool mais de sang, et Ioan a toujours été une proie parfaite.
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MessageSujet: Re: and the blood's run stale (sevoan)   and the blood's run stale (sevoan) EmptyDim 20 Mai - 7:26

and the blood's run stale
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Cela tourne dans ta tête. Y a tout qui se mélange, le passé et le présent, Seven dans tes bras à huit ans, Seven dans la rue à douze ans et Seven dans ce bar maintenant. Tu te mords les lèvres, les yeux fixés sur ton verre d'alcool en te demandant ce que t'as foiré avec lui. T'as fais ni plus ni point ce que Valerian et Sergheï avaient fait avec toi, t'as laissé faire, mais t'étais passé de gamin faible à adolescent dépressif et t'aurais jamais eu le courage de t'opposer à ton père pour l'empêcher de faire de Seven un homme comme il disait. T'étais resté de marbre et les seuls moments ou tu tentais de rattraper les morceaux en allant à sa recherche lorsqu'il fuguait s'étaient vite évaporés dans les airs. T'avais laissé tomber cela comme tout le reste – est-ce que tu pouvais vraiment le sauver, au final ? Non. Il aurait fallu que Valerian soit moins absent, que Sergheï soit moins dur et éventuellement il aurait pu compter sur eux, mais pas sur toi. T'étais trop faible, tu l'es toujours et tu pouvais plus continuer à le chercher. Pas en passant pour un minable à ses yeux, pas en te faisant cracher dessus et mépriser comme il savait si bien le faire – parce que Valerian et Elena étaient partis, que Iulia était en prison, que Sergheï était dur, tu sais pas, mais il arrivait toujours à te toucher en plein cœur, peut-être parce qu'il était le seul avec Anca à qui tu accordais de l'importance, le seul que t'aimais vraiment. tu supportais plus ses regards de pré-adolescents bourrés de haine, ce même regard que tu sens posé sur toi à l'heure actuelle parce qu'il s'est rapproché, ce regard que t'as provoqué au final comme tes deux frères aînés.

Celui qui était absent, celui qui prenait la relève et celui qui était trop dans sa bulle, trois paumés qui n'ont pas su sauver le quatrième. Avant, tu te disais que sa place était pas dans la rue, qu'il était trop jeune, qu'il pouvait lui arriver n'importe quoi. Maintenant, tu te dis que cela a peut-être limité la casse, parce que même si vous êtes tous brisés au final, il a cette haine dans les yeux qui te donne le sentiment qu'il a la rage de vivre et qu'il se laissera jamais abattre. Ce genre d'éclat qui scintille dans ses yeux te paraît à la fois horrible et magnifique, parce que t'arrivera jamais à l'égaler. Il le sait, Seven, il le sent. C'est la raison pour laquelle il reste debout, te surplombant de toute sa fierté mal placée. Il s'assied pas, parce qu'il aime te dominer, être au dessus de toi et te regarder de haut et tu te relèves pas parce que t'as pas le cran d'être à sa hauteur, parce que tu n'arriveras jamais à son niveau. Plus que Valerian, Seven te donne le sentiment dans ses moments là qu'il pourrait, lui, s'élever bien au dessus de vous s'il le voulait.

Peut-être que tu le surestimes, qu'il peut pas vraiment faire cela, mais t'as le sentiment qu'il en est capable malgré tout, qu'il y arrive pas parce qu'il préfère s'enterrer dans son rôle de victime et rejeter la faute sur les autres. Du côté victime, vous vous ressemblez. Y a pas que les cheveux sombres et les regards haineux qui vous réunissent, y a aussi ce trou dans la poitrine à la place du cœur, cette plaie béante qui se referme pas depuis vos dix ans et vous tentez de combler avec cette haine des autres qui vous caractérise, toi avec les mots, lui avec les coups, toi avec l'alcool, lui avec la came. Chez les mecs Popescu, y a pas de sentiments, l'organe cardiaque est là que pour vous maintenir en vie. Chez les filles en revanche, y en a trop, c'est peut-être pour cela qu'Anca fait des tentatives de suicides alors que tu n'y arrives pas de ton côté. Elle ressent. Elle ressent et cela lui permet de passer à l'acte quand la limite est atteinte, même si elle devrait vivre et toi mourir parce qu'elle mérite d'avoir une existence heureuse et toi non. Tu mérites pas parce que t'as jamais su te construire, parce que t'as abandonné Seven, parce que t'as abandonné Anca en ne voyant pas qu'elle allait sombrer. Alors quand il crache sa haine en continuant de te surplomber, t'encaisse sans broncher. Tu mérites cette rage, tu voudrais qu'il la déverse autant que possible pour achever de te détruire, pour faire de toi une épave complète parce que l'alcool ne te ravage pas encore entièrement. « Aux dernières nouvelles elle veut crever et t'es une grosse merde. », qu'il a lancé dans les airs et tu te retiens d'incliner pour pas donner l'air de te foutre de sa gueule mais tu sais qu'il a pas tort pour la dernière partie. Tu serres les dents, tu tentes de choper la bouteilles que tu as payée mais tes doigts se referment sur du vide parce que Seven a plus de réflexes que toi. Il s'en est emparé au moment ou tu tendais le bras droit et tu le replies contre ta poitrine – s'il veut cet alcool, tu le lui laisses. Tu boiras ce qu'il reste et au besoin, tu gagnes assez à la fourrière pour aller te chercher une seconde bouteille de Vodka s'il le faut. Mais il se sert un verre et reposes la bouteille avant de trinquer ironiquement sur ta sœur et toi, sur votre sensibilité malsaine. Elle, pourtant, à la droit. Pas toi.

T'accuse le coup, tu attrapes ton verre rempli précédemment presque à ras bord et tu le lèvres dans la direction de ton frère. « À ta santé, toi qui n'vaut pas mieux que nous. » T'as le cœur sec mais ce qu'il te reste d'émotif dans le corps vrille quand même, quelques part vers tes tripes ou ton estomac. Tu mens malgré ton assurance, tu mens pour le pousser dans ses retranchements et en subir les conséquences. Jeu malsain, dont tu augmentes encore les limites en te servant un nouveau verre après avoir bu le tien cul sec malgré sa quantité imposante. Y a ton trou dans le cœur qui recommence à faire des siennes et le reste d'émotion dans tes tripes qui brûle autant que ta gorge mais tu continues malgré tout, tu continueras jusqu'au bout. Tu l'vois presque plus, tu l'reverras pas avant un moment. C'est ce soir, ou jamais. « Ouais, y a des choses qui n'changent jamais définitivement… Ton prénom, par exemple. »  Tu recules ta chaise et tu te lèves pour être à sa hauteur. Tu t'leurres pas, t'es toujours aussi faible mais tu tiens à le provoquer jusqu'au bout et tu dois attiser sa rage pour cela, alors parler du père ou d'Anca reste la meilleure solution. T'as toujours moins supporté les critiques de la part de tes frères que de ton père de toute façon, c'est la raison pour laquelle cela fait dix ans que tu l'as laissé tomber, Seven et que c'est sans doute pas ce soir que tu pourras le récupérer, même si t'aimerais. Alors tu te mets à sa hauteur et tu poursuit les hostilités afin d'en recevoir de nouvelles. « Parce que tu seras toujours son fils, parce que vous n'partagez pas le même prénom pour rien. Tu nous ressembles à Anca et moi mais tu lui r'semble surtout à lui. T'as même pas besoin d'être Junior pour c'la, tu l'as dans les tripes, dans l'sang et dans l'crâne, tellement plus que Valerian, Sergheï, Mihail ou moi. » Ton regard se noircit également et vos iris semblent deux panthères prêtres à s'affronter pour gagner un territoire dont vous ne voulez pourtant ni l'un ni l'autre. « Quand j'te regarde c'est lui que je vois. » Tu reprends la bouteille en main et tu la tends dans sa direction d'un geste sec, la plaquant contre sa poitrine pour qu'il la reprenne en même temps que la parole, en même temps que la haine. À son tour, maintenant, d'appuyer là ou cela fait mal. T'es plus facile à démolir que lui de toute évidence, cela devrait être un jeu d'enfant, et puis tu lui a pas mal mâché le travail. Y a ton regard qui le prouve, ton regard qui à travers sa pénombre, lance clairement allez Seven, fais moi payer.
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MessageSujet: Re: and the blood's run stale (sevoan)   and the blood's run stale (sevoan) EmptyMar 29 Mai - 17:13

« À ta santé, toi qui n'vaut pas mieux que nous. » Il le regarde lever son verre comme il l'a fait juste avant, mimer un toast à son nom avant de vider l'alcool d'une traite. Y a un rictus qui déforme ses lèvres et qui gueule son arrogance sans qu'il ait besoin de prononcer le moindre mot – comme s'il cherchait à prouver le contraire de ce qu'il dit, à montrer qu'il vaut mieux alors qu'il sait pertinemment que c'est un mensonge. Et Ioan le sait aussi bien que lui. « Ouais, y a des choses qui n'changent jamais définitivement... Ton prénom, par exemple. » Son corps tout entier se tend alors qu'il le voit se lever d'sa chaise pour se mettre à la même hauteur. Il prend ça comme un défi qui vient s'ajouter à la provocation de ses mots, ses poings qui se serrent, ses yeux qui brûlent. Il le fixe en silence, nez qui se fronce légèrement, peau qui tressaute nerveusement. L'affront est tel que la rage se déverse dans ses veines comme une coulée de lave, violente, ardente. Il a envie de lui sauter à la gorge et lui faire passer l'envie de se mesurer à lui, pourtant il ne fait rien. Immobile, seulement trahi par la fureur qui grouille sous sa chair et rend ses veines saillantes ; il attend. Le mot de trop, le geste mal placé, le regard trop appuyé. Il attend que Ioan franchisse la limite avec laquelle il flirte dangereusement, celle qui les sépare, celle qui l'empêche de le faire taire par la force.

Il attend. Il sait que la chute est proche.

Une inspiration. Le temps en suspens, leurs yeux à la même hauteur, les flammes de Seven qui n'peuvent rien face à un tas de cendres. Tout ce qu'il lui reste à faire, c'est se consumer lui-même. « Parce que tu seras toujours son fils, parce que vous n'partagez pas le même prénom pour rien. Tu nous ressembles à Anca et moi mais tu lui r'semble surtout à lui. T'as même pas besoin d'être Junior pour c'la, tu l'as dans les tripes, dans l'sang et dans l'crâne, tellement plus que Valerian, Sergheï, Mihail ou moi. » Chaque mot est un poignard salement aiguisé et Ioan vise bien, trop bien putain il l'a jamais autant haï qu'à cette seconde précise. Parce que c'est tout ce qu'il ne veut pas, tout ce qu'il a fui sans voir qu'il n'a fait que courir à sa perte.

J'veux pas finir comme lui. C'est la volonté d'un enfant bafoué, l'échec d'un presque homme raté ; ses cauchemars deviennent réels et il peut s'en prendre qu'à lui-même. Il a tout fait pour ne pas être comme son père et au final il n'est qu'une copie, un peu floue, beaucoup trop sombre. Il voulait pas finir comme lui mais quand il se regarde dans le miroir il sait qu'il a tout foiré. Il est devenu pire que lui.

« Quand j'te regarde c'est lui que je vois. » Il pourrait lui dire qu'il sait et qu'il voit la même chose mais y a une boule dans sa gorge et des nœuds dans son bide, un étau autour de son cœur qui s'atrophie un peu plus à chaque seconde. Il ne réagit pas quand Ioan lui plaque la bouteille contre le torse sèchement. Il est figé, statue de pierre mais la roche se fissure et en-dessous il ne reste rien d'autre qu'un magma infernal. Ses yeux dans les siens, un fusible qui saute, le compte à rebours qui touche à sa fin. Sa main est violente quand elle attrape son visage, enfermant sa mâchoire dans un étau brutal, ses doigts qui s'enfoncent dans ses joues jusqu'à deviner la forme de ses dents sous la chair. « J'te conseille de fermer ta grande gueule. » Voix basse mais chargée de haine, comme le calme qui précède la tempête. « T'as jamais été capable de l'ouvrir, c'est pas maintenant qu'il faut commencer. » Surtout pas quand il est si fragile, si instable, sa carcasse qui tangue sur le fil du rasoir sans qu'il soit capable de garder l'équilibre. Y a trop de colère accumulée et ravalée jusqu'à ne plus pouvoir respirer – elle est pas dirigée contre Ioan mais s'il n'a que lui sous la main il peut facilement en devenir une victime de plus. « Tu t'crois malin j'parie ? » À parler de ce prénom qu'il ne veut plus entendre et appuyer là où ça fait mal. Du sel balancé cruellement sur les plaies béantes.

Il resserre sa poigne sur son visage, encore et encore, jusqu'à ce que la douleur se peigne sur ses traits. Il voudrait serrer jusqu'à le briser, le réduire en poussière, ne rien laisser. « Tu sais c'que j'vois moi, quand j'te regarde ? » Il sourit. C'est laid. « Un échec. » Son ton se baisse un peu plus, pourtant y a trop de violence infiltrée dans chaque syllabe. C'est dans ses yeux assombris par la haine, dans chaque cellule qui le constitue, dans ses doigts qui malmènent la mâchoire de son frère. Ça suinte par tous ses pores avec une telle force qu'il n'a même pas besoin de gueuler pour que ça résonne en échos. « T'es toujours là et personne sait pourquoi. C'est toi l'plus faible. C'est toi qui devrais crever, pas elle. » Ça sonne comme un reproche et c'est aussi dégueulasse qu'injuste – il le pense même pas. Pourtant on dirait que si, peut-être parce qu'il s'en persuade, peut-être parce qu'il a tellement besoin d'un coupable qu'il est prêt à rejeter la faute sur n'importe qui. Tout pourvu que ça lui permet d'oublier toute la culpabilité qui l'étouffe. « Ça fait deux fois qu'elle se loupe alors sois sympa, applique-toi quand ce sera ton tour. » Et aussi violemment qu'il l'a agrippé, il le relâche. Son visage qu'il libère dans un mouvement désinvolte qui le pousse en arrière. Il le jauge une seconde puis daigne enfin reporter son attention sur la bouteille, la lui arrachant des mains pour porter le goulot à ses lèvres vivement. La grosse lampée qu'il avale lui brûle la gorge, mais c'est rien en comparaison du brasier qui lui ronge les entrailles. Il voudrait que ça s'arrête, mais tout ce qu'il sait faire c'est balancer de l'essence dans les flammes. Il continuera jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien.
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