Lorsqu’Ayden l’avait invité à prendre une glace dehors, Riley avait sauté sur l’occasion pour sortir de l’appartement. C’est que les journées sans Ace peuvent paraitre longues. Il ne faut pas s’y méprendre, Riley a une vie en dehors lui mais, c’est qu’elle préfère passer son temps libre en sa compagnie, le truc c’est qu’il travaille et que la rentrée n’est que dans quelques semaines. C’est comme ça qu’elle se trouve en compagnie d’Ayden, à fixer les différents parfums de glaces. Riley a toujours dis que choisir s’était renoncer, il lui faut de longues seconde de réflexion avant qu’elle n’opte finalement pour la classique glace à l’italienne au chocolat. Elles parlent de tout et surtout de rien, puis Riley perçoit quelque chose de bizarre comme une larme qui coule le long de la joue de son amie, elle doit prendre sur elle pour ne pas demander. Alors, elle préfère se concentrer sur sa glace et peut que la jeune femme parlera d’elle-même. Riley, elle se dit qu’il vaut mieux se laisser porter par le soleil qui tape contre sa peau et laisser les choses faire, jusqu’à ce que plus sérieusement, Ayden l’interpelle lui disant qu’elle doit lui dire quelque chose d’important. Ca tord son ventre, elle n’a jamais aimé les entames de phrase qui ont cette tournure, elle lui fait signe de continuer et puis son téléphone sonne, elle regarde de qui il peut bien s’agir ; Ace. Elle est obligée de répondre. « Raaah, je dois prendre l’appel, désolée j’en ai pour deux minutes. » Si ça avait été de ses frères, Riley n’aurait pas décroché, elle aurait attendu la fin de la discussion pour rappeler mais… quand il s’agit d’Ace, elle ne peut pas se résoudre à ignorer l’appel. « Non je suis dehors pourquoi ? Avec Ayden pour manger une glace… Bah oui je serais rentrée avant toi… Ooh, je vais pas répondre à ça, il y a des enfants à côtés... Oui... Bisous moi aussi. » L’avantage, c’est que Ace n’est pas très porter sur les conversations téléphoniques par conséquent, tout est rapidement expédié. Riley range donc son téléphone dans sa poche et reporte son attention sur Ayden. « Je t’écoute donc. »

Et puis le drame, une histoire à laquelle, Riley ne s’attendait pas pour le moins du monde, Ayden avait eu un bébé, qu’elle avait abandonné, accouché sous X, personne n’est au courant, pas même sa famille et ça lui noue le ventre rien que d’y penser. Riley serait incapable d’abandonné un enfant qu’elle aurait porté pendant neuf mois, elle le sait. Depuis toute petite, elle s’était imaginée avec des enfants, plus ou moins nombreux, mais elle aime tellement ça qu’elle aurait été incapable de s’en débarrasser, elle ne juge pas Ayden pour autant, elle comprend ses motivations, les études la pression de la société mais… Riley serait incapable de traverser cela. Elle reste sans voix, muette et touchée par l’histoire, elle ne sait si elle doit dire quelque chose ou non et quand une seconde glace s’impose, elle accepte par automatisme. Elle en prend une vanille chocolat. Elle est surprise d’entendre son amie lui demander comment elle va. « Certainement mieux que toi. » Riley fronce un peu les sourcils, elle doit digérer la nouvelle et Ayden a cette capacité de passer du coq à l’âne, tantôt émue par sa propre histoire, puis de retour avec la douceur des généralités. « J’aurais… j’aurais jamais pu faire ce que tu as fait. Wouah… même si j’avais été enceinte ado, j’aurais pas pu… j’imagine que… ça doit être dur, tous les jours. » C’est y penser au quotidien, de savoir qu’un enfant à soi grandi quelque part élever par d’autres parents, est-ce qu’il est heureux ? Est-ce qu’il a des frères et sœurs ? Est-ce qu’il vit sur le même fuseau horaire. Même si elle est assise, Riley a cette impression de tomber à la renverse. « Je suis touchée que tu aies partage ça avec moi. » Riley aime garder les secrets les plus enfouies de ses amis mais elle est incapable de partager les siens, de parler ses propres démons. « Pourquoi l’avoir caché ? Pourquoi le cacher encore aujourd'hui ? »

Riley a du mal à comprendre comment Ayden pourrait décevoir son entourage à cause d’une simple grossesse. Une famille se doit de soutenir ses membres, peu importe les circonstances, elle l’avait compris avec son passé, personne n’a osé lui dire quoi que ce soit au sujet des violences qu’elle a subi pendant un an avec son ex. Oui… une famille doit se serrer les coudes, toujours. Pourtant, elle est encore un peu sous le choc de la nouvelle, elle peut comprendre son amie, vraiment, ce n’est pas évident de gérer une grossesse en étant jeune, même quand l’enfant est désiré, ça n’a rien d’évident. Elle comprend pourquoi Ayden refuse d’en parler, elle connait que trop bien ce sentiment de honte et de gêne pour l’avoir elle-même vécu, certes dans une situation totalement différente mais elle a l’avantage de connaître cette impression souvent faussée. Et puis, de gros nuages sont venus obscurcir leur ciel bleu. Une goutte tombe sur sa cuisse et puis deux, puis trois. On entend les enfants crier, les serveurs s’affairaient à ranger les tables extérieures le plus rapidement possible et puis Riley et Ayden qui se précipitent à l’intérieur du glacier pour éviter d’être trempée. En voilà une météo bien capricieuse. Un match de baseball joue en fond sonore, un enfant vient à la bousculer et les hommes hurlent un home run. Malgré le bruit, les trombes d’eau qui tombent, Riley sourit parce que c’est son expression faciale naturelle. Ayden doit hausser le ton pour se faire entendre, elle questionne Riley, cherche un peu de réconfort sûrement en lui demandant si cette dernière pense que son fils est au courant de son statut d’enfant adopté. « Sûrement, maintenant et fort heureusement ce n’est plus une honte d’adopter un enfant. » Du moins, c’est ce qu’elle pense, si un jour elle devait adopter un enfant, elle ne lui cacherait pas d’où il vient car ça fait partie de lui et il n’y aucune honte à adopter, au contraire, elle trouve que c’est un joli geste, donner de l’amour à un enfant qui en aurait manqué. Elle ne dit pas qu’Ayden est incapable d’aimer un enfant, mais au moment où c’est arrivé, elle n’aurait pas pu.  Il vaut mieux faire ça que de rendre un enfant malheureux. Et puis, une question plus délicate, récupérer un enfant adopté. Riley connait la réponse mais, elle n’a rien de réjouissante pour son amie malheureusement. Pourtant, elle se doit de lui répondre et comme Riley ne sait pas mentir, elle lui répond franchement. « En accouchant sous X, en mettant ton enfant à l’adoption, malheureusement tu as renoncé à tout tes droits parentaux. Au mieux, si tu arrives à le retrouver tu peux demander à le rencontrer, et ça encore, je crois que seuls les parents pourront décider si tu as le droit ou non de le voir. » La vie est ainsi faite, pleine de choix fait à un instant T qui peuvent par la suite bouleverser le reste de notre vie. Jamais Ayden ne pourra oublier cet enfant, et constamment, elle se demandera ce qui se serait passé si elle l’avait gardé avec elle, comme si elle avait avorté. C’est quelque chose qui restera ancré dans sa tête. Même là, même quand elle lui demande comment va Ace, le changement de discussion est brutal, elle met ça sous la gêne de l’annonce, la volonté de ne pas parler uniquement de ce bébé abandonné, de son erreur de parcours et peut-être de mauvais conseil. Mais aujourd’hui, Riley ignore ça, ne cherche pas à comprendre et va essayer de suivre la conversation sans trop se poser de question. « Heu… Il va bien. On va bien. » C’est encore tout récent leur vie de couple, même s’ils cohabitent depuis trois ans. Riley est encore sur son petit nuage à planer bien haut, à vouloir passer tout son temps libre en sa compagnie, à rester coller à lui toute la journée. « On se pose pas trop de question à vrai dire, on a décidé de laisser les choses se faire. » Obligée de sourire un peu niaisement quand elle parle de lui. « Enfin, je suis bien avec, il a l’air d’être bien avec moi alors…» Alors rien, il y a rien de plus à dire. « J’espère que tu connaîtras ça aussi un jour. Pourtant, quand j’avais ton âge ce n’était pas gagné l’amour. »

Riley, c’est une personne entière et une bien piètre menteuse. Alors, elle dit les choses comme elle le pense. Quand on met son enfant à l’adoption, on renonce à tous ses droits dessus, on a plus aucun droit, en plus avec l’accouchement sous x, c’est plus compliqué pour justifier sa légitimité en tant que mère biologique. C’est aussi un moyen de protéger l’enfant et les parents adoptifs, enfaite, ça lui semble logique. Quand on abandonne son enfant et bien… on ne peut pas du jour au lendemain décider de vouloir le récupérer sous prétexte qu’on a grandi et qu’on a peut-être fait une erreur, c’est un gage aussi à la famille adoptive d’être certain qu’on ne viendra pas à leur arracher l’enfant des bras après plusieurs années. Évidemment, Riley sait que Ayden est une personne digne de confiance, qu’elle regrette vraiment son choix et qu’elle ferait une bonne mère. C’est juste que la loi est ainsi faite, on ne peut la transgresser aussi facilement que ça. Quoi qu’il en soit, Riley la soutiendra dans ses recherches, elle imagine le trou que doit laisser cet enfant inconnu dans son cœur, comme un vide au quotidien. Sans avoir dû faire ce choix, elle sait qu’elle serait incapable d’avorter ou d’abandonner son enfant. C’est un peu comme la consécration ultime, devenir mère. On s’imagine ça depuis gosse, avoir un mari, une jolie maison et des enfants, parfois tout n’arrive pas dans l’ordre ou tout n’arrive pas tout court. Elle respecte tellement ses femmes qui ont le courage de stopper une grossesse ou de laisser leur enfant à quelqu’un d’autre. « Je pense qu’effectivement, tu devrais le dire à ta famille proche. Ils ont le droit de savoir et ils pourront t’aider à surmonter ça. » Riley est bien savoir que de garder des secrets au fond de son placard n’a rien de bien enrichissant, il faut en parler, même si on a honte, même si c’est difficile. Se confier à des personnes proches et la famille remplie souvent ce rôle à la perfection. Et puis… mine de rien, cet enfant est aussi lié aux parents d’Ayden. Ils sont en droit de savoir.

Ayden admet être fatiguée par son train de vie, il n’y a rien d’évident à être au taquet sur plusieurs fronts. Elle ne peut que la comprendre pour l’avoir vécu. Avant d’être institutrice, Riley a été étudiante, elle avait dû jongler avec des petits boulots pour se responsabiliser, des stages, sa relation catastrophique avec son ex, toujours garder bonne figure et de bons résultats scolaire, entretenir une certaine vie sociale aussi. Le sujet rebascule, Ayden lui demande de l’aider dans ses recherches et Riley ne sait pas trop quoi répondre. Déjà parce qu’elle est surprise, ça fait beaucoup de nouvelles à digérer en peu de temps et puis Ayden semble avoir les idées embrouillées pour passer du coq à l’âne aussi vite. Riley est une personne carrée qui aime les argumentations construire, un fil conducteur mais là. Elle se retrouve un peu désorientée, ne sait plus sur quel pied danser. Elle ne voit pas trop comment elle pourrait l’aider, elle a son expérience de maîtresse d’école mais de là à retrouver un enfant adopté il y a plusieurs années sans savoir où par qui ni comment, on est bien loin de son champ d’expertise. « Et bien oui… si tu penses que je peux être utile. » C’est vrai, Riley ne saurait même pas par où commencer les recherches, quoi faire, où regarder. Elle peut toutefois soutenir son amie dans la mesure du possible dans les démarches, elle pourrait d’avantage intervenir auprès des parents adoptifs si un jour elle les retrouve, assurer de la bienveillance d’Ayden comme étant une personne proche, auprès de l’enfant aussi, sans doute. « Si je peux aider, j’aiderai, c’est certain. »