Installée à ton bureau, tu remplissais les derniers papiers nécessaires pour que ton patient puisse aller passer les tests que tu estimais important. Il s’agissait de l’un des premiers dossiers que l’on t’avait donné après ton transfert : Malikai McGraw. Ce petit garçon avait besoin de reprendre du poids de manière adaptée et il était de ton devoir de s’assurer que la chose se passait bien. Certains tests étaient donc indispensables et devaient être faits régulièrement. Cela t’avait permis de discuter avec le père de l’enfant qui te rappelait étonnement ton frère en raison de la chaise roulante dans laquelle il se promenait. Tu n’avais pas osé poser trop de question, te disant simplement que le sujet viendrait de lui-même un jour. Insister n’aurait pas été professionnel et tu te doutais bien que la chose n’était pas simple.
Une fois les papiers remplis, tu pus te relever et revenir vers le père et le fils avec un sourire. Tu t’agenouillas devant le gamin pour lui expliquer ce qui allait se passer : « Une infirmière va t’amener passer quelques tests. Ça ne te feras pas mal et en revenant tu pourras prendre un bonbon. » S’il y avait une chose que tu avais appris dans tes années de pratique, c’était le fait que les enfants répondaient beaucoup plus facilement lorsqu’il y avait une récompense à la fin de l’histoire. Les bonbons et autres sucreries fonctionnaient généralement bien, mais tu avais aussi d’autres tours dans ta manche.

L’infirmière dont tu avais parlé ne tarda pas et amena le gamin avec elle vers les salles de test. Tu n’avais pas besoin d’y être, pas plus que le père de l’enfant. Les parents avaient la fâcheuse habitude de se mettre en travers du chemin des spécialistes en posant trop de questions ou en s’opposant à des tests nécessaires qu’ils avaient déjà approuvés auparavant. Il était donc plus simple que le père reste avec toi pour que tu lui expliques ce que tu avais prescrit. Tu pris donc ta chaise pour t’installer à ses côtés - se mettre à la même hauteur te semblait nécessaire - avant de reprendre la parole : « Avec les tests je cherche à voir si le poids qu’il a pris s’est accumulé de la bonne manière et s’il a un peu plus de force physique. » Rien de bien méchant en conclusion et surtout quelque chose de nécessaire. « Ce ne sera pas très long. » En temps normal, s’il n’y avait pas de file pour les machines. Tu étais habituée à un hôpital beaucoup plus grand et être ici te posait parfois des problèmes en raison de cette habitude. Enfin, parler de l’hôpital n’intéresserait sans doute ps Owen, si bien que tu préféras changer un brin le sujet : « Tout va bien à la maison ? » Du dossier, tu avais compris que le gamin n’était pas là-bas depuis si longtemps et l’adaptation jouait un rôle dans la santé du garçon.

Entendre que le gamin aimait bien les bonbons te rassura un brin, après tout, cela voulait dire que c’était une bonne récompense pour motiver le gamin à bien se comporter avec l’infirmière et pendant les tests. Tu rigolas néanmoins lorsque tu entendis la précision comme quoi il préférait les pâtisseries : « C’est bon à savoir pour la prochaine fois. » Bien sur, il t’était impossible de ramener des pâtisseries ou autre nourriture pour chacun de tes patients, néanmoins, tu pouvais très bien faire une exception pour ce gamin s’il faisait les efforts nécessaires. Après tout, il avait besoin de manger, reprendre du poil de la bête, et tu avais besoin de gagner sa confiance si tu voulais que les prochains rendez-vous se passent bien. Tu n’avais jamais vraiment eu de mal à t’entendre avec les enfants que tu soignais, le plus important était de ne pas trop agir en adulte. Il ne fallait pas les prendre de haut, il fallait savoir s’accroupi devant eux.
Bref, c’était différent de ce qui devait être fait avec les parents. Avec ces derniers, il fallait souvent agir en grandes pompes. Il fallait leur montrer que tu étais en contrôle et que tu savais mieux qu’eux ce qui devait être fait. Bien sur ce n’était pas toujours le cas, tu te trompais parfois, mais que les parents doutent n’aidaient jamais. Enfin, ça ne semblait pas être le cas ici et tu étais bien contente d’apprendre le fait que le petit aimait courir après les ballons. Le sport était toujours une bonne façon de se remettre en forme et ainsi mieux accumuler le poids gagné. « Excellent, rien de mieux qu’un peu de sport. » Bon, en toute honnêteté, il y avait un bon nombre de chose qui était ‘mieux’, mais pour un gamin, sortir était bénéfique. Tout comme l’était la présence de parents ou en l’occurence d’un père. Tu ne pus t’empêcher de rigoler légèrement en apprenant que le petit s’amusait à imiter sa figure paternelle. Ça ne t’étonnait pas particulièrement, ce n’était certainement pas la première fois qu’on te disait une telle chose. « Je ne suis pas une experte, mais c’est définitivement bon signe. » Une bonne situation familiale était primordiale pour le bien d’un enfant et visiblement vivre avec cet homme était ce qu’il y avait de mieux pour le gamin. Hochant légèrement la tête en entendant la suite, tu ne perdis pas de temps avant de répondre : « Ce n’est pas toutes les femmes qui sont prêtes à s’engager avec un père non plus. » Ça ne semblait pas encourageant pour lui, mais ça restait la vérité. Dans tous les cas, ni le premier point, ni le second ne te décrivait puisqu’aucun des deux ne te dérangeait. « Après je suis certaine que vous vous débrouillez très bien. » Un handicap n’était pas la fin du monde et apprendre à vivre avec montrait la force de caractère d’une personne. Tu n’insistas pas davantage, incertaine du fait qu’il était ouvert sur sa condition, préférant plutôt répondre à la question qu’il venait de lui poser. « Oui, enfin, j’ai pratiqué pendant plusieurs années à San Fransisco, mais je suis venue ici pour des raisons familiales. » Tu ne t’étendis pas plus, ne voulant pas lui faire le résumé de ton histoire de vie.  

L’idée de préparer des pâtisseries pour la prochaine visite de Malikai te semblait évidente. Bien sur, tu ne les ferais pas toi-même, empoisonner un enfant en raison de tes piètres qualités de chef ne faisait pas partie des plans, mais voilà en acheter était une bonne idée. Cela dit, tu ne t’étais pas attendue à ce qu’il te sorte l’histoire d’atteindre le coeur d’un homme par son estomac et tu ne pus retenir ton hilarité face au proverbe. Ce n’était pas que tu doutais de sa véracité, on te l’avait souvent répété après tout, seulement ça te renvoyait à tes lacunes culinaires. « Ça expliquerait pourquoi je n’ai jamais vraiment touché le coeur d’un homme. » Non pas que tu devais te lamenter de la chose, ça ne te dérangeait pas le moins du monde à vrai dire. Enfin, tu comptais pas t’étendre sur la question, en vérité la seule raison qui expliquait le fait que tu aies touché le sujet était davantage pour expliquer ton hilarité.

Dévier la conversation sur la vie familiale du père et du fils te semblait nettement plus sage. Le fait qu’une complicité s’était installée au point où l’enfant l’imitait était définitivement un bon signe. Owen avait probablement raison en pointant le fait qu’elle était sans doute plus une experte que lui dans le domaine et ce malgré le fait que tu n’avais jamais eu d’enfant. La question n’était pas là puisque tu avais de l’expérience avec les enfants en raison de ton travail. Tu te contentas néanmoins d’hocher la tête en guise de réponse. La suite de la conversation était tout de suite plus intéressante. Il marquait définitivement un point lorsqu’il parlait de s’engager avec une personne qui acceptait non seulement sa personne, mais l’enfant dont il avait la charge. C’était une façon louable de voir les choses et tu devais t’avouer impressionnée. « Exactement, peu de personnes comprennent la chose. » Tu avais croisé suffisamment de parents pour le savoir. Le fait qu’il le sache alors qu’il n’était père que depuis six mois était donc un point pour lui. Pour ce qui était de l’handicap, il confirma qu’il se débrouillait bien ce qui ne t’étonnait guère. Tu fus néanmoins plus surprise d’entendre qu’il était un pilote, ce n’était pas le genre d’emploi qui était normalement occupé par une personne souffrant d’un tel handicap. « Pilote, c’est impressionnant. Je pense qu’on peut dire que vous vous débrouillez plus que bien. » Tu étais curieuse de voir l’étendue de ses capacités malgré son handicap, mais tu ne pouvais quand même pas lui poser mille et une questions sur la chose. Peut-être que ça viendrait avec de nouveaux rendez-vous.
Cela dit, Owen ne semblait pas avoir de difficulté à s’ouvrir puisqu’il continuait sur sa vie personnelle. Ça ne te dérangeait pas, tu trouvais même la chose intéressante. « Je suis bien d’accord. Mes parents sont ici aussi, tout comme mes petits frères. » Et tout spécialement Jordan qui étaient le coeur de la raison derrière ton déménagement. « Enfin, je vais m’installer de façon durable ici, je pourrai être à proximité de ma famille. » Tu avais déjà entamé les démarches en ce sens et l’emploi que tu occupais à présent le prouvait totalement.

Affirmer haut et fort que tu n’avais jamais vraiment réussi à capturer le coeur d’un homme ne te gênait pas le moins du monde. Après tout, c’était une affirmation qui servait surtout à exposer ton manque total de talents culinaires. La réponse du père te fit sourire à nouveau. Plusieurs façon de toucher le coeur d’un homme ? « Je n’en doute pas une seconde. » Tu ne les connaissais pas vraiment, sans doute parce que tu ne t’étais jamais vraiment intéressé à la chose. Dans tous les cas, tu n’étais pas une experte en la matière, ta dernière relation était avec une femme - mariée - donc ça disait probablement tout ce qui devait être dit.

La légèreté de cette discussion se poussa légèrement pour faire place à quelque chose de plus sérieux. Ça ne te dérangeait pas le moins du monde, la conversation était même plutôt agréable. Tu ne t’attendais néanmoins pas à une historique de l’arrivée de Malikai dans sa vie, mais c’était fort intéressant. C’était des informations qui pouvaient être importantes pour tes rapports avec le gamin, mais au-delà du point de vue du médecin en toi, c’était une discussion agréable, tout simplement. « C’est une façon particulière de découvrir votre paternité. Malikai est bien tombé en tout cas. » C’était l’impression que cette histoire te donnait, c’était certain. Puis, aux dires du père, la seule chose qui manquait dans sa vie était une femme. Le commentaire te fit sourire et tu cherchas la réponse adéquate à lui fournir. « Il me manque beaucoup de chose. Probablement un homme aussi, mes parents attendent encore des petits-enfants. » Ou une femme, mais tu ne connaissais pas suffisamment le jeune homme pour embarquer dans une telle discussion.
Néanmoins la chose revenait à une chose en particulier : la famille. Owen le disait si bien, c’était ce qu’il y avait de plus important. Tu n’avais aucun doute sur la question, ce n’était pas pour rien qu’il s’agissait de la raison derrière ton déménagement à Savannah. « L’important est de le réaliser. » Mieux vaut tard que jamais disait-on. Le fait d’avoir un enfant avait au moins eu cet avantage notable, enfin celui-là et celui d’avoir un enfant (ce qui n’était pas mal en soit).

Puis, le père te surprit avec une proposition particulière, le tout avec un sourire charmeur: celui d’être son guide à Savannah. Tu pondéras la chose pendant un moment, incertaine de la bonne réaction qu’il fallait avoir. Après tout de base, il n’était pas très encouragé de côtoyer les parents en dehors de l’hôpital. « Je suis venue quelques fois en vacances, mais je ne dirais pas non à un guide. » Surtout s’il devait être aussi mignon, avouons-le. Tu ne connaissais pas vraiment la ville, tu avais passé la plupart de tes vacances chez tes parents et n’avaient pas vraiment pris la peine d’en faire le tour. Il fallait certes remédier à la chose maintenant que tu allais habiter à Savannah si bien que se faire guider par Owen était sans doute une excellente idée, tant pis si ce n’était pas l’idéal du point de vue des relations médecins/patients.  

Ton interlocuteur visait juste en disant que la question à votre âge était plutôt de trouver la bonne personne. C’était la vérité, tes priorités en ce sens avaient changé avec le temps et aller voir un peu partout ne te disait plus rien. Cela dit, la quête de la bonne personne était longue et ardue. « Certes, mais ce n’est pas ce qu’il y a de plus simple. » Pour ne pas dire que c’était pratiquement une mission impossible à tes yeux. Parfois, tu te demandais comment tes parents avaient réussi à faire le coup de force qu’était de se trouver. Une question qui restait sans réponse satisfaisante dont tu devais te contenter. Ce n’était pas très grave, tu prenais la chose avec un brin de recul, te disant simplement que tu avais d’autres priorités pour le moment. Ta famille en était une et ton travail en était une autre. Tu accueillerais la bonne personne à bras ouverts si tu avais la chance de la trouvée, mais en attendant, tu pouvais t’en passer.

Puis, c’était sans compter les rencontres que tu pouvais faire grâce à ton travail. Tu étais réellement intéressée par l’histoire derrière la soudaine paternité d’Owen et de comment ils en étaient venus à leur relation. Il fallait dire que ce n’était pas un cas que tu pouvais voir régulièrement et que ça ne pouvait donc que t’intriguer. « C’est l’important dans ce cas. Puis le temps ne pourra qu’aider davantage. » En grandissant, Malikai pourrait bâtir sa relation avec son père. Tu en étais plutôt certaine pour voir les changements chez Jordan après qu’il soit arrivé dans votre famille. Par la suite, tu hochas légèrement la tête lorsqu’il te confia qu’il n’était pas contre l’idée d’avoir d’autres enfants. Tu lui souhaitais de trouver cette personne, il le méritait sans doute. Après trouver quelqu’un qui voulait des enfants en plus de celui de quelqu’un d’autre n’était sans doute pas la chose la plus simple. « J’espère que vous aurez l’occasion de tout découvrir dans ce cas. » Il y avait sans doute une multitude d’aspect qu’il ne découvrirait que tardivement, du moins c’était ton hypothèse en raison de ce que tu avais pu observer dans ton travail.
Pour ce qui était de l’importance de la famille, tu approuvais ce qu’avançait alors le père malgré le fait que c’était quelque chose qu’on t’avait inculqué dès ton enfance. Tu n’avais pas eu besoin d’expériences particulière, mais peut-être que c’était une chance de ton côté. « Sans doute oui. » Il parlait sans doute de ce qu’il avait pu vivre et tu ne saurais le contredire en ce sens.

À la place, tu décidas de te concentrer sur la proposition qu’il t’avait fait. Tu ne t’étais pas attendue à la chose et peut-être que tu aurais du refuser, mais rien n’y fait. Avoir un guide était une excellente idée et la chose te tentait si bien que tu te laissas aller à accepter. Il te surprit à nouveau avec une réponse un peu douteuse et tu ne pus t’empêcher de rire nerveusement. Ce fut de courte durée puisqu’il rectifia rapidement la chose de façon un brin maladroite. « Merci ? » Incertaine de savoir comment il fallait que tu réagisses. « Ce sera avec plaisir en tout cas. Je n’ai pas eu souvent l’occasion d’avoir un pilote comme guide. » Pour ne pas dire jamais à vrai dire. L’idée t’inquiétait un peu, incertaine d’être des plus à l’aise dans les airs. Enfin, autant ne pas y penser immédiatement. « Vous sortez souvent cette ligne pour draguer ? » Curiosité et tu cherchais un peu à l’embêter. C’était une façon de te détendre après avoir été surprise à plusieurs reprises.