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 croix d'bois, croix d'fer (fantie)

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Arthur Teague

Arthur Teague
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MessageSujet: croix d'bois, croix d'fer (fantie)    croix d'bois, croix d'fer (fantie)  EmptyMer 17 Jan - 12:26

C’est pas tellement que j’aime les gardes, simplement, quand on est aux urgences, c’est plus intéressant. Une fois mis de côté les alcoolos du dimanche qui tentent une fois sur deux de ploter les infirmières, et les hypocondriaque qui ne peuvent pas joindre leur médecin généraliste, on y trouve les pires cas, beaucoup de sang, et pas mal de pression. J’aime la pression, ça crève pas les yeux comme ça mais j’adore ça, et quand je pose les palettes de réa y a le sentiment du devoir accompli qui m’envahit, j’m’octroie une petite pause entre deux dossiers, envoyant mon externe vérifier les constantes du type qu’on vient de réanimer en lui laissant entendre que je serais à la cafet. Il acquiesce et je retire mes gants, les jette dans la poubelle la plus proche et m’étire. J’envoie un message à Fanny sur son bipper. Elle est de garde aussi cette nuit, et c’est notre rituel, quand on est de garde tous les deux, de prendre un café ensemble sur les coups de 2 heures. D’après ce qu’elle m’a dit plus tôt dans la journée, je crois qu’elle est libre, pas le temps de faire un détour au service des bouchers pour vérifier sur les tableaux des opérations. Fanny s’arrange toujours pour être dispo à 2 heures du matin quand on est de garde ensemble.

Assis sur l’une des tables, je sirote mon café d’un air boudeur, un autre est posé face à moi, il commence à refroidir. Ok, parfait. Fanny s’est pas pointée et ça fait 3 messages que je lui envoie. En plus de ça, y a Dan, l’idiot d’interne légiste qui se pointe devant moi, puant le cadavre. Je pince mes lèvres, dégoûté, personne n’aime Dan. Je lui fais un sourire sans grand intérêt, il pointe mon café, me demande pour qui il est. Personne, prends-le. Je marmonne, enfoncé dans ma chaise. Il est surexcité et s’assoit en face de moi. Bordel, j’ai dis de le prendre, pas de me coller. j’ai pas envie de schlinguer le cadavre moi. Je me replace sur ma chaise, et j’ai l’air du mec le plus malpoli du monde, mais Dan ne s’en aperçoit pas. T’as entendu le bruit d’couloir ? Parait que y a deux internes qui s’envoient en l’air comme des bêtes en salle de garde depuis genre 1 heure. J’arque un sourcil et le regarde par en-dessous, j’hausse les épaules d’un air égal. Je suis trop ronchon pour faire la conversation. Normalement, je serais déjà en train de trépigner d’impatience pour avoir un nom. De toute façon, Dan n’a pas vraiment besoin de moi pour faire la conversation, le pauvre, tout le monde raconte qu’il parle à ses cadavres toute la journée. Apparemment, c’est des internes en chirurgie. Tu sais sur qui je parierais ? La nana là, qui est toujours énervée. Leitord. Cette nana, elle a l’air d’avoir faim. Et ya le petit nouveau de Californie qui la drague depuis des semaines. Mon sang ne fait qu’un tour et je recrache tout mon café sur la table. Dan explose de rire pendant que je m’étouffe. QUOI? QUOOOI ? Cet idiot de Dan est tellement mal aimé que personne n’a pensé à le prévenir que Fanny était ma copine ou bien il est juste beaucoup trop débile ? Et puis c’est qui ce californien qui la drague ? Et pourquoi je ne suis pas au courant ? Je veux dire quelque chose, genre qu’il a intérêt à arrêter de répandre de fausses rumeurs sur ma petite amie sinon… (je peux menacer personne de lui casser la gueule, parce que j’ai toujours été le plus naze de toute ma classe en sport, même Fanny était plus forte que moi. FANNY.) je voudrais aussi lui dire que c’est abject de parler de la vie des autres dans leur dos, et que ce ne sont pas ses affaires et puis en fait le café c’était pour quelqu’un. Mais non, je suis muet et j’me contente de me lever d’un bond, et de tendre le bras pour arracher le café des mains de Dan d’un air mauvais. Je tourne les talons et m’en vais d’un pas pressé de la cafet, au passage je jette les deux cafés dans la poubelle. Dès que je suis dans le couloir, je me mets à courir en direction des chambres de garde.

Devant, y a un genre d'attroupement qui s’est formé, on glousse, on chuchote et y a même le titulaire de traumato qui prend des paris. Je le regarde interloqué et d’un coup, sans trop savoir pourquoi, je secoue des bras comme un demeuré. ALLEZ BOSSER, vous avez tous des trucs à faire, des patients à sauver, putain ! Le chef de traumato lève sa tête de son calepin et me regarde, personne ne bouge. Deux secondes de blanc et tout le monde reprend comme si je n’avais rien dit. Bordel. Si Fanny est en train de me cocufier HORS DE QUESTION que ça soit devant tout l’hôpital. Y a mon coeur qui tambourine si fort dans ma poitrine qu’à tout moment il va bondir par ma bouche pour s’écraser sur le sol. Evidemment, ça sera à ce moment là que le californien sortira de la chambre de garde, les cheveux ébouriffés pour l’écraser avec ses pieds parfaits de surfeur. Tuez-moi maintenant, ma vie n’a plus aucun sens.

J’ai voulu taper à la porte de la chambre de garde mais j’ai été bippé au même moment. Je me suis rassuré en retrouvant le chemin des urgences en me persuadant que c’était juste impossible que Fanny soit dans cette chambre de garde. Impossible. De toute façon elle est sans doute encore au bloc, c’est pour ça qu’elle ne peut pas répondre à mes sms. C’est aussi pour ça qu’elle n’a pas pris notre pause habituelle. Fanny je le connais, trop d’ailleurs. Le problème, c’est que je me connais aussi. Et je sais comment faire pour tromper sa nana. Je sais à quel point c’est simple. Je sais aussi où on en est Fanny et moi, je sais qu’on s’est engueulé la veille pour un débat stupide sur l’un des titulaires. Bordel, non, c’est pas possible. J’ai repris ma garde l’air de rien, enfin presque. J’ai été tellement imblairable avec les patients que mon titulaire m’a envoyé faire des dossiers. J’ai pris trois fois plus de pauses clopes que d’habitude et quand j’ai fais un détour sur le tableau des opérations du service de chirurgie j’me suis rendu compte que Fanny n’y figurait pas. En fait, Fanny n’était même pas de garde. Alors c’est ça ? Psychoter, devenir dingue, voir le mal partout, c’est ça ? C’est ce qu’elle vit ? Je déteste ça. Profondément. Je ne veux plus jamais ressentir ça. Plus jamais. Alors pourquoi j’ai l’impression que ce genre d’idées ne partira plus ? Pourquoi depuis que Bo m’a annoncé qu’il était amoureux de Fanny, y a comme un noeud dans ma gorge impossible à délier ? Peut-être que je sais ce que je ne veux pas encore m’avouer. Shit.

J’ai tenté d’appeler Fanny une ultime fois en montant dans la jolie cylindrée offerte par papa. Pas de réponse. J’ai balancé mon téléphone sur la place passager et j’ai foncé. J’ai pris le chemin de son appartement sans même y réfléchir, malgré mon rituel post-garde qui consiste à rentrer, fumer un pétard, boire un nesquik et m’affaler sur le canapé devant Scrubs. Mais comment ? Comment je peux rentrer chez moi et me détendre avec cette idée qui me broie l’estomac. Fanny m’a menti ? Elle a simplement oublié de me préciser qu’elle n’était plus de garde ? Pourquoi ça fait des heures que je n’ai pas de réponse. Elle dort ? J’en sais foutre rien moi. Et c’est dans ce genre de moments que je me rend compte à quel point notre couple c’est du solide, et du fragile à la fois. À quel point il compte et qu’il peut se déliter à tout moment. Quand on a 21 ans et qu’on sort avec quelqu’un depuis 6 ans, on a l’impression que rien en peut nous séparer mais le monde veut vous séparer. Drôle d’équilibre qu’on a jamais trouvé depuis notre départ d’Okatie, depuis la fac, depuis que j’ai officiellement arrêté d’être sincère, malgré ce qu’elle croit.

J’ai ses clés, elle a les miennes. Du coup, je ne sonne pas, j’entre directement, espérant secrètement la trouver endormie, ce qui expliquerait pas mal de choses. Au lieu de ça je tombe sur des lumières allumées, des affaires éparpillées. Fanny rentre visiblement de soirée aux petites heures du matin. J’claque la porte derrière moi. Ah bah t’es pas morte. Que je fais remarquer en balançant mes affaires dans un coin de la pièce avant de pénétrer dans le salon. Elle est sur le canapé, avec un regard plus ou moins vague. Ni dans la chambre de garde avec un putain de californien qui, spoiler alert, te drague depuis des semaines à ce qu’on dit. Diarrhée verbale, j’avais prévu de la jouer plus fine que ça, mais j’me rend compte que je ne peux pas me retenir, non. Y a mon coeur qui a commencé à tambouriner contre ma poitrine, et j’ai chaud. Bordel j’ai peur.

Non, j’dis ça parce que Dan le débile de la morgue est venu me dire, me dire À MOI que t’étais sûrement entrain de flirter avec ce débile venu de Californie. Et, au fait, je t’ai appelé 47 fois. Mon débit est rapide, ma voix se casse sur mes fins de phrases à force de ne pas reprendre d’air. Je sors mon paquet de cigarettes et j’en mets une dans ma poche. Mais génial, tout va bien, j’suis rassuré, vraiment ! aucun doute que j’aurais préféré qu’elle soit en train de dormir au fond de son lit. J’allume ma mentholée en repoussant du pied le chat qui est venu se frotter à moi.
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MessageSujet: Re: croix d'bois, croix d'fer (fantie)    croix d'bois, croix d'fer (fantie)  EmptyMer 17 Jan - 15:08

La fête bat son plein entre les murs sales de la boîte de nuit. Elle ne voulait pas venir, elle avait même demandé à ce qu'on lui foute la paix en cette soirée. Elle devait aller travailler, en théorie. Sur le planning, son nom avait été affiché un moment, avant qu'elle ne trouve une personne pour la remplacer. Ce n'était pas que l'envie de travailler avait disparu. Au contraire, elle adorait ce qu'elle faisait et elle ne changerait pour rien au monde. Seulement, en cette journée des plus tristes, elle avait décidé de changer le cours de sa journée. Se faisant mielleuse pour amadouer son prochain, elle avait demandé à un collègue de la remplacer pour la garde de cette nuit, en échange de services rendus plus tard. S'il avait besoin de quoi que ce soit en son pouvoir, il n'aurait qu'à l'appeler pour qu'elle accoure. Fanny aurait donné beaucoup pour ne pas avoir à prendre son rôle en chirurgie durant la nuit. Il lui fallait plus, un moment pour décompresser, de quoi penser à autre chose qu'à ses pulsions pour Bo ou ses disputes intempestives avec Arthur. Elle était perdue, de jour en jour, entre son devoir envers eux, et celui envers elle-même. Pour eux, elle se devait d’être le plus irréprochable possible, alors que dans son coeur elle ne voulait qu’être la meilleure pour des raisons bien diverses. Pour la fidélité de son petit ami. Pour l’amitié de ses amis. Et, bien plus encore, pour l’estime qu’elle se devait d’avoir pour elle-même. Malheureusement, ces derniers temps, rien n’allait plus. Bo semblait l’ignorer pour des raisons qu’elle ne comprenait pas, et ne répondait même plus à ses nombreux messages. Il n’y avait rien d’harcelant dans sa démarche, et elle ne lui en voulait pas dans le fond. Mais, quoi qu’elle en dise, elle se sentait trahis par chaque personne vivant sur cette terre.
Alors, lorsque dans la journée, une connaissance de sa classe de préparation lui avait proposé d’aller  boire un verre, elle n’avait pu refuser. Elle s’était empressée de chercher un remplaçant pour sa garde, mais n’avait pas pris la peine d’en prévenir Artie. Lui-même ne l’informait pas de ses moindre faits et gestes, et rien ne l’obligeait alors d’en user ainsi de son côté. Il était pourtant fort stressant pour elle de faire ainsi une sortie dans un bar sans l’en avertir. Elle qui faisait toujours tout pour être parfaite aux yeux de son amour, n’avait pas pour habitude de ne pas le tenir au courant de ses agissements même les plus minimes. Elle allait jusqu’à s’en vouloir lorsqu’elle partait sans un mot pour lui.

C’était donc un verre à la main, et l’autre ravivant le ciel, qu’elle passait sa soirée. Au début, il n’était question que d’un verre en terrasse. Un simple petite verre d’alcool, pour décompresser sans abus. Finalement, après trois tournées, alors qu’une des pipelettes du groupe avait proposé comme d’une épiphanie : — Et, si l’on allait finir la soirée en boîte ? Quelques jeunes femmes s’étaient mises à crier en une seule voix un oui unanime. Excuses. Fanny ne voulait pas. Elle aurait aimé rejoindre son appartement avant minuit, afin de se reposer un peu et réfléchir à l’avenir. Mais, les sollicitations toujours plus appuyées de ses compagnes d’infortune l’avait faite chavirer vers l’autre côté de la raison. Dans son esprit, l’image d’Artie et elle se disputant avait immanquablement refait surface. Son poing se serrait presque par instinct, alors que son pauvre coeur tambourinait dans sa poitrine, afin de s’en échapper certainement. Les bruits autour d’elle l’influençait, elle n’avait su que répondre. Une main s’était alors posé sur son épaule alors qu’elle aurait aimé se relever pour fuir cette soirée qui ne ferait que l’empourprer un peu plus dans son malheur. — S’il te plait, Fanny ! Je te jure, on va s’amuser ! Alors, malgré l’impression que c’était là la mauvaise décision à prendre, la belle interne avait bien sûr hoché la tête et rendu les armes. C’est d’accord, je vous suis. Euphorie générale alors qu’elles se levèrent en coeur pour partir vers l’endroit de débauche qui aura le pouvoir sur les défenses de Fanny.

C’est ainsi qu’elle s’était retrouvé ici, sur un fauteuil de velours rouge. Les verres vides devant elle lui faisait honte, elle essayait de se convaincre qu’elle ne les avait pas tous bus, qu’une de ses camarades l’avait aidée. Elle savait à peine où elle était, et sans les barrières défensives de son esprit qui lui rappelaient à chaque instant son amour pour Arthur, elle se serait retrouvée sur les genoux d’un autre à inspecter avec attention ses amygdales. Il n’était pas une idée extraordinaire de la laisser ainsi, éméchée plus que d’ordinaire, au milieu d’une foule qui lui faisait peur. Bien sûr, malgré l’euphorie dans son sang, et l’alcool dans ses yeux, elle n’avait pas eu le courage d’aller danser de peur de la réaction des femmes bien foutues qui se déhanchaient avec leur jupe leur arrivant au commencement des fesses. Elle n’était pas de celles-là, et faisait presque trop prude avec son pantalon à pince qu’aurait porté une secrétaire pour une réunion d’affaire. Rien de trop aguicheur, en dehors de ses formes qui pouvaient faire tourner la tête de certains. Elle ne savait pas qu’elle pouvait faire de l’effet, et s’en contentait bien. Le verre à la main, vidé par une gorgée se voulant assez longue pour lui couper l’envie d’en avoir plus, elle se lève en titubant. Le verre tombe à terre alors qu’elle fait le tour du propriétaire afin de retrouver ses amies pour rentrer. Il devait être environ deux heures du matin, rien de bien méchant pour une sortie de ce type. Le téléphone dans son sac a beau émettre des bip bip, elle n’y prend pas garde. Elle est loin d’être en état de répondre à qui que ce soit.
Trouvant elle-même le chemin de la sortie, elle abandonne ses amies et s’en va d’elle-même après avoir récupéré ses affaires au vestiaire. Trouvant le courage dans le vin, elle s’engage sur la route de son appartement en titubant un brin. Pas assez bourrée pour s’écrouler, mais assez pour ne pas marcher très droit. Elle marche lentement, ses pieds sur faisant un mal de chien. Ses membres sont douloureux durant le trajet, son coeur lui hurle des insultes en tout genre. Son téléphone conne une fois de plus, pas un message cette fois-ci, mais bien un appel. Attendant que la sonnerie se termine, elle regarde son portable sévèrement. L’index devant ses lèvres pour lui intimider d’arrêter de sonner, elle souffle un léger. Chuuuuuut. Elle range ensuite l’objet dans son sac et continue sa route. Jusqu’à ce qu’enfin, après avoir traversé des épreuves imaginaires sur la route -comme un bout de bois l’empêchant de passer, et n’ayant pas l’idée de passer juste à côté- arriver chez elle.

La porte s’ouvre comme par enchantement alors qu’elle se jette presque dessus. Le moindre mouvement lui semble infaisable tant sa tête lui tourne. Finalement, sans plus de cérémonies, elle s’étale sur son canapé en pestant contre son pantalon qu’elle estime trop serré. Se tortillant dans tous les sens, comme un verre de terre affolé, elle se débarrasse de ce vêtement afin d’être plus à l’aise. Un miaulement lui fait ouvrir les yeux, comme par réflexe, elle fait pendre sa main pour que son chat puisse s’y frotter. Elle murmure. Je t’aime aussi mon petit Timon, toi au moins tu me montres de l’affection. Un sourire éclaire son visage alors qu’elle continue de caresser l’animal un petit moment. Jusqu’à ce que tout s’assombrisse, qu’elle ne s’endorme, lourdement.

Un bruit lui fait ouvrir les yeux, la porte s’ouvre. Elle ne réagit pas en voyant le visage d’Arthur apparaître. L’alcool fait encore effet dans son organisme, et elle ne peut s’inquiéter de ce qui peut arriver alors. Son regard est vide, autant que l’expression de son visage qui s’empêche de sourire. — Ah bah t’es pas morte. Elle ne peut s’empêcher de souffler, le plus discrètement du monde. — Ni dans la chambre de garde avec un putain de californien qui, spoiler alert, te drague depuis des semaines à ce qu’on dit. Nouveau soupir. Elle comprend à peine ce qu’il lui dit. Se redressant légèrement afin d’être mieux installée, mais pas complètement couchée, elle le regarde en bâillant. Pourtant, elle ne répond rien. Elle est interloquée, certes, mais n’a pas envie de rentrer dans de tels débats ce soir, pas dans son état. Elle le laisse finir. — Non, j’dis ça parce que Dan le débile de la morgue est venu me dire, me dire À MOI que t’étais sûrement entrain de flirter avec ce débile venu de Californie. Et, au fait, je t’ai appelé 47 fois. C’était donc lui les messages et les appels. Elle aurait du s’en doutait, et d’ailleurs le savait bien, mais elle préférait fermer les yeux pour ne pas avoir à l’affronter pour le moment. — Mais génial, tout va bien, j’suis rassuré, vraiment ! C’est trop pour elle. Se redressant encore un peu plus, elle se met en position assise en essayant de ne pas s’offusquer du refus de son petit ami de donner un peu d’attention à son chat venu se faire caresser. On ne refuse rien à son chat, elle y tient trop. Pourtant, ne voulant pas aggraver la situation, elle ne dit rien à ce propos et se contente de s’habiller d’ironie pour répondre. Bonjour mon chéri. J’ai passé une très bonne journée, merci. Elle parle ainsi pour lui faire comprendre qu’il était un peu trop abrupte avec elle et qu’elle méritait mieux que ses humeurs. Elle ne voyait même pas où était le problème puisqu’elle n’était pas en train de batifoler avec ce fameux californien contre lequel il semblait avoir tant de rancoeur.
Puis, défenseur des autres, lorsqu’elle juge qu’ils ne sont en rien blâmable, elle pense bon d’ajouter. Coucher dans la salle de garde avec le petit californien ? Tu rigoles ? C’est bien trop inconfortable dans la salle de garde, j’aurais plutôt choisi les douches. Et ce « californien », comme tu dis, a un prénom j’te signale. Elle reste allongée à le regarder comme s’il était un intrus chez elle, alors qu’elle n’avait qu’une envie. Celle de se jeter contre lui, et de s’excuser pour cette soirée de stress qu’elle avait du lui faire passer. Au moins, il savait ce qu’elle vivait bien trop souvent, bien qu’elle n’ait pas fait exprès. Elle ne savait pas d’où venait cette rumeur la concernant, et le fait qu’Arthur ait pu y croire la surprenait. Elle avait toujours été des plus fidèles, bien trop amoureuse pour avoir l’idée de le tromper. Même ce petit jeu qu’elle entretenait avec Bo ne devait pas constituer un problème pour lui. Arthur n'avait pas à se plaindre de ce côté là, elle ne regardait que lui et avait une tendresse si parfaite à son égard qu'elle ne pourrait se résoudre à briser ses voeux d'exclusivité. En somme, tu ne t'inquiètes pas pour moi. T'as juste la trouille que j'puisse te tromper, ton petit égo prendrait trop chers. Fanny reste sur son canapé, à moitié à poils, comme si elle était protégée, qu'il en pouvait rien lui arriver ici. Elle le regarde toute de même, d'un regard emplit de reproches qu'elle n'arrive à verbaliser.
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Arthur Teague

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MessageSujet: Re: croix d'bois, croix d'fer (fantie)    croix d'bois, croix d'fer (fantie)  EmptyLun 29 Jan - 12:19

Avachie sur le canapé, Fanny me lance un petit regard par en-dessous, qui, en d’autres circonstances, m’auraient rendu le sourire. Faut dire, elle n’est pas très habillée. Mais j’ai aucune envie de rire, aucune envie de jouer à ce petit jeu de regard, non. En fait, je ne prête aucune attention à son attitude, j’me contente de parler comme j’le fais souvent : parler, parler, parler. Elle dit rien, que dalle, elle m’écoute et je ne sais même pas si elle comprend un traitre mot de ce que je lui dis. Trop occupé à me plaindre, je n’attend pas de voir si elle suit. Je balance tout ce que j’ai passé la nuit à ravaler et enfouir tout au fond de mon bide pour pouvoir faire correctement mon boulot. Essayer d’ignorer cette petite voix dans ma tête qui me hurlait qu’un truc clochait. Non, j’ai jamais réellement pensé que Fanny était entrain de me cocufier en salle de garde, mais ça m’a trop affecté pour que ça soit innocent. Parce que Fanny a échangé ses gardes dans me le dire, parce qu’elle ne m’a pas répondu de la soirée, parce que ça fait des jours qu’on fait du small talk tous les deux. Merde, ça veut dire quoi ça ? Être de ce côté là, c’est infernal, une sensation d’avoir du papier de verre dans les veines et le cerveau qui part en vrille. Donc, j’suis pas content, et je me fiche de savoir de quelle manière elle me regarde. Quand enfin le silence s’étant dans la pièce (sans compter le matou qui me miaule dessus d’un air vexé), j’allume ma cigarette et enfin, la voix vaseuse de Fanny résonne dans la studette. Bonjour mon chéri. J’ai passé une très bonne journée, merci. Je tire sur ma clope et hausse mes sourcils, ahuri. Elle est sérieuse là ? Ouais, cool. Bah moi pas du tout figure-toi. Pour tout ce que je viens de t’énoncer. Faut que je répète, vraiment ? La rumeur sur le californien ? Le fait qu’elle ne réponde pas à mes 104 appels ou bien l’échange de garde sans me prévenir ? Le pire, c’est qu’elle enchaîne, toujours aussi vaseuse, toujours aussi insolente. Fanny elle a ce côté en colère. Ce côté sur la défensive, quoi qu’il arrive. Je crois qu’elle aime être en colère en fait, je crois que ça la rassure. Elle a passé tellement de temps à subir la haine des autres, les moqueries, les remarques désobligeantes, elle a passé tellement de temps à se morfondre sur son poids, que c’est comme un réglage par défaut chez elle. Elle est insolente même quand elle veut faire de l’humour. Putain. Coucher dans la salle de garde avec le petit californien ? Tu rigoles ? C’est bien trop inconfortable dans la salle de garde, j’aurais plutôt choisi les douches. Je serre les dents pendant que dans mon cerveau tous les signaux s’allument en rouge. Ça clignote, clignote, clignote encore. Putain, jamais elle aurait balancé un truc comme ça normalement. Jamais elle ferait ça, parce que l’idée même de me tromper n’a jamais été source de plaisanterie. Notre confiance mutuelle est trop fragile. Rectification, sa confiance en moi. Un petit rire nerveux s’échappe de mes lèvres en même temps que la fumée de ma mentholée et je siffle entre mes dents : C’est ça, fou-toi d’ma gueule en plus de ça. J’sais même pas si elle a entendu, parce qu’elle enchaîne sur le fait que ce putain de californien a un prénom. Oh, génial. On s’en branle de cet idiot. Et puis, pourquoi elle connait son prénom ? Ok ils bossent dans le même service, et ils sont internes tous les deux et… merde, en quoi ça la dérange que je l’appelle le californien hein ? La parano me rend complètement zinzin. Je me passe une main sur le front, par fatigue et par stress. Pourquoi faut toujours que ça parte en vrille en ce moment ? Moi qui avait juste envie de partager un cappuccino avec elle sur les coups de 3 heures du matin, comme d’habitude. J’suis planté au milieu du salon sans même oser m’approcher du canapé. Sans même le vouloir. On est comme des foutus aimants qui se repoussent en ce moment. Je crois que c’est ça qui me rend dingue : savoir pertinemment que quelque chose cloche, ne pas savoir quoi, ne pas savoir comment faire pour arranger ça. Tout a toujours été simple avec elle, fluide, normal. Sans parler de passion, notre relation roule depuis des années. Faut croire qu’on a comme une panne de moteur tous les deux. En somme, tu ne t'inquiètes pas pour moi. T'as juste la trouille que j'puisse te tromper, ton petit égo prendrait trop cher. Ça claque si fort dans l’atmosphère que je ne l’ai pas vu venir. J’en aurais presque sursauté si je n’étais pas aussi choqué. Attendez, quoi ? Je cligne plusieurs fois des yeux et entrouvre ma bouche. Elle dit ça comme si… comme si elle s’en fichait. Comme on s’en fichait de nous. Ok, super maintenant qu’on en est là, ça veut dire quoi ? Et puis, ça me saute à la gueule, comment j’ai pas pu le voir plus tôt. Fanny est complètement et irrémédiablement bourrée. Je ferme les yeux, et tente de me rassurer en me disant qu’elle sort ça sans y réfléchir. Génial donc t’es bourrée. Que je fais remarquer en soupirant bruyamment, plaintif, comme un bébé. T’as raison, donc si tu veux me tromper, pas à l’hosto steuplait. Tu sais, histoire de soigner mon égo. Que j’dis avec une belle ironie qui se mêle à de la colère. Parce que je suis en colère, et en plus j’ai de la peine. Comment elle peut me sortir un truc pareil ? Y a un bug entre nous deux, j’le sens, elle aussi. Et on marche tous les deux sur des oeufs depuis des jours, des semaines, sans trop oser s’affronter. Faut croire qu’elle a trouvé le courage dans le fond de sa bouteille. Mais moi, j’suis pas prêt à l’affronter, non, j’refuse. D’ailleurs, dès que j’ai balancé ma vacherie je disparais dans la cuisine pour me prendre une bouteille d’eau. Je reste quelques secondes devant le frigo ouvert, et je ferme les yeux. Mes paupières tremblent d’émotion. Le chat me pourchasse. MAIS DÉGAGE TOI. Que j’ai envie de hurler. J’y mets toute ma bonne volonté pour me retenir. J’reviens avec ma bouteille d’eau, même si je n’ai pas soif. J’voulais juste m’éloigner d’elle et de ses reproches. J’vous ai déjà dis que dans ma famille, on règle les conflits avec la fuite ? Quand j’suis à nouveau face à elle, j’écarte les bras, la mentholée dans une main, la bouteille dans l’autre. Bon, tu vas finir par me dire où t’étais cette nuit et pourquoi tu m’as pas répondu ou bien ça te fait trop plaisir que ça soit moi qui psychote pour une fois ? Petite pique acérée, envoyée dans le simple but de me défendre. Si j’attaque pas, c’est elle qui le fera. Et contrairement à Fanny, j’ai aucune carapace, ni blindage. Elle est plus forte que moi à ce jeu-là, c’est sûr. Ça fait des semaines, des mois, des années qu’elle a appris à dompter sa jalousie maladive. Pour moi, c’est tout nouveau.
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