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 (père fouettard) there's no escape

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(père fouettard) there's no escape Empty
MessageSujet: (père fouettard) there's no escape   (père fouettard) there's no escape EmptyJeu 7 Déc - 16:36


i fear no monsters, for no monsters i see
because all this time the monster has been me


Rouge sur ses mains sur ses fringues derrière ses paupières, rouge sur lui dans son cœur dans son esprit. Il voit que du rouge partout, comme un filtre qu'on lui a posé devant les yeux, comme si tout le sang versé coulait sur ses pupilles pour l'empêcher d'y voir clair. Il a le souffle saccadé et les joues trempées – hémoglobine ou larmes il sait pas tout s'mélange il fait plus la différence.

C'est moi.

À ses pieds y a des corps par dizaines il sait pas d'où ils viennent, il en reconnaît certains mais pas tous. Il voit les teints cadavériques les yeux vitreux les bouches ouvertes, il sent l'odeur qui l'prend à la gorge et qui lui fout la gerbe. Celle de la mort. Celle qu'il a semée pendant des années les yeux fermés et qui revient le hanter, tous ces corps disloqués ces têtes explosées ces membres tranchés. Ils sont partout autour de lui et il n'ose plus bouger, il essaie de marcher mais c'est eux qu'il piétine et ça roule ça glisse, ça coule sous ses semelles ça l'écœure.

Les carcasses s'étendent devant lui comme la route qu'il a lui-même pavée, mais qu'il n'est plus capable d'arpenter. Il grogne il murmure il supplie mais y a personne pour l'écouter, personne d'autre que tous ces macchabées.

C'est moi.

Il lève les yeux il voit Lazar et puis tous les gars du gang, sa main qui s'tend comme pour les attraper – eux ils vont l'aider, eux ils vont le sauver. Après tout c'est eux qui l'ont foutu dans ce merdier, c'est eux qui ont fait de lui ce qu'il est. Pourtant le flingue dans sa main est le sien, ce n'est pas eux qui l'ont mis là. Ce n'est pas eux qui lui font lever le bras. Ce n'est pas eux qui pressent la gâchette une fois, deux, trois, quinze, il perd le compte. Il voit leurs visages se fissurer leur existence s'effriter, ils sont là sans l'être mais il continue, même sans les ordres et les regards il tue.

C'est moi.

Ils ont disparu il est seul à nouveau et il gueule, il les appelle, il hurle à s'en déchirer les cordes vocales, à s'mettre à tousser, cracher, à en oublier comment respirer. Il appelle et personne ne répond, au loin ils sont tous en train de s'effacer. Le gang n'est plus là le gang l'a laissé, il a plus rien à quoi se raccrocher, plus rien derrière quoi se planquer.

Y a sa mère qui est là qui pleure, elle sanglote et la seule chose qu'il comprend dans ses plaintes c'est mon fils où est mon fils alors qu'elle le regarde droit dans les yeux. Il voudrait lui dire qu'il est là c'est lui il n'a pas bougé il n'a rien oublié, mais elle secoue la tête comme si elle ne le reconnaissait pas comme s'il n'était qu'un étranger. Elle dit rendez-moi mon fils il répond je suis là mais même lui n'y croit pas. Il est plus là son gosse il s'est fait ronger de l'intérieur, dévoré par le monstre qui lui a gangréné le cœur.

C'est moi.

Il y a son père qui lui tourne le dos qu'il ne peut pas atteindre, pas un mot pas un regard et Bran crie Bran s'égosille mais il ne se retourne pas. Il s'enfonce dans le noir dans les ténèbres, il se laisse avaler comme s'il ne voulait pas le voir.

Et il court il court encore, il essaie d'atteindre tous ceux qui disparaissent et ne lui laissent rien. Il piétine les corps il arpente les morts, il entend les os craquer sous ses pieds, sent les peaux se déchirer – il veut pas regarder. Il court jusqu'à trébucher jusqu'à ne plus se relever, il rampe, ses mains qui s'enfoncent dans les chairs dans le sang, l'odeur qui lui pique les yeux et lui retourne les boyaux. Il avance mais la route semble s'étendre encore et encore il n'en voit plus le bout, il ne voit plus rien du tout. Jusqu'à elle.

Elle est là elle est partout, son corps inanimé sous son poids, ses yeux grands ouverts sur ce regard horrifié. Elle est là elle est dans le tas, elle finit par remplacer tous les cadavres il pleure il comprend – il l'a tuée.

Il les a tous tués.

C'est moi.

Y a des mares de sang autour de lui et ce qu'il y voit ce n'est ni le gang ni personne d'autre, ce n'sont pas eux qui l'ont fait couler. Ni ses frères ni ses idéaux ni les ordres qu'on lui a donnés, ni cette entité qu'il défend comme s'il s'agissait de son dieu. Le gang n'est pas à blâmer, la seule chose qu'il voit c'est son reflet. Il est le seul à punir et il ne reste personne pour lui pardonner, ils se sont tous envolés. Il est face à ses actes, face à ce foutu reflet qui semble se foutre de sa gueule. Pour la première fois de sa vie, il est seul.

C'est moi.
C'est moi qui ai fait ça.
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(père fouettard) there's no escape

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